#le bon roi rené
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René d'Anjou (1409-1480). Unknown artist.
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Je suppose que c'est un peu tard pour me lancer dans une fanslation... mais en voyant quelques surprises, j'ai eu envie de proposer mes propres idées de noms pour la localisation française d'AAI. La première sera reconnaissable puisque j'ai déjà fait un post à ce propos. Ces propositions ne visent évidemment pas à être parfaites vu que j'y réfléchis tout d'un coup pour le fun de faire un post, et j'ose espérer que l'équipe de traduction officielle a réfléchi aux siens un peu plus longtemps que ça.
Je vais en faire un petit jeu......... Je vais juste lister mes idées de noms sans mettre qui est qui, et j'aimerais savoir si c'est assez clair tout seul ! Le corrigé et les explications seront sous la coupure..............
Une règle que je me retrouve à suivre est que le prénom doit vraiment exister en tant que prénom, du moins pour le premier AA c'était toujours le cas.
Victor Yeux
Content Yeux
Dorothée Misse
René Gide
Richard Corbin
Camille Cavalier
Maxime Sage
Y en a des plus évidents que d'autres. J'ai pris une direction spécifique avec ces noms, mais d'autres, comme celle choisie par l'équipe de traduction officielle, sont aussi bien voire mieux.
Victor Yeux = Sebastian (ce bon vieil Eustache). Voir la première fois que je l'ai mentionné. Ce nom de famille existe ! Au début, j'ai pensé que le changer pour "Hiyeux" ou "Iyeux" pourrait le faire ressembler plus à un nom qu'au mot yeux, mais ceux-là n'existent pas, alors que Yeux existe.
Content Yeux = le père du jeune homme (Blaise?). Déjà je pense que le prénom Content serait drôle pour lui. Mais en plus, le mot "contentieux" correspond de près ou de loin à ce à quoi s'adresse sa profession.
Dorothée Misse = Justine Delcourt. J'ai vraiment voulu créer un jeu de mot dans son nom, plus intense que celui de la traduction officielle, parce que sinon ça sert à rien d'essayer de faire un truc différent. J'ai eu du mal ! Les thèmes de la justice n'ont pas des noms qui font joli ou ressemblent à des prénoms... "Pomme Depin" serait allé, mais je n'ai pas trouvé beaucoup de sources liant la pomme de pin à la justice, c'est plus religieux. Ici, j'ai choisi d'utiliser des noms qui existent pour inclure le nom "Thémis".
René Gide = Raymond Shields/Freddie Lapointe. Direction complètement différente de celle prise par la traduction officielle, encore une fois exprès. Tragiquement, "André Gide" aurait aussi bien marché pour ce jeu de mot - le mot caché ici est "égide" ! Et je trouve qu'il a une tête de René, mais d'autres prénoms en -é font aussi bien l'affaire.
Richard Corbin = Tyrell Badd. Je ne sais pas comment il s'appellera dans la version officielle. Le nom de famille "Corbin" est un ancien synonyme de corbeau, Yatagarasu, jeu de mot déjà présent dans son nom Japonais et tout. Quant à l'appeler Richard, j'ai essayé d'avoir un deuxième jeu de mots un peu plus discret qui correspond à "hardcore", si on regarde bien, pour rappeler le Badou/Badd original. Pas mal celui-là, non ?
Camille Cavalier = Horace Knightley. Idem, pas encore de traduction officielle, je crois. Cavalier, super simple, nom de famille assez commun et le nom de la pièce d'échec. Camille, ça paraît un peu délicat pour lui, mais c'est un nom qui signifie "serviteur", or il parle souvent de défendre (ici on va se dire, "servir") son Roi.
Maxime Sage = Simon Keyes. Idem encore... Et celui-là, ça a été dur parce que je tiens tellement à bien faire. Je n'ai pas vraiment pu conserver l'élément "singe", mais je me suis basée sur les singes de la sagesse : c'est une maxime... à propos de sage-sse. Les deux peuvent être prénom ou nom, mais Maxime est plus souvent un prénom qu'un nom, et va mieux à sa bouille.
Du coup je viens de découvrir des exemples de noms venant apparemment d'une fanslation française sur le Wiki AA...? Je ne la connais pas. Je ne sais pas si ça vient du Wiki français. Je vois par exemple "Louie Stiti", "Carl Vallier", "Sergio Badd". On les reconnaît bien, c'est vrai ! Mais on voit direct une direction différente de la mienne. C'est ça qui rend la localisation super intéressante - ce n'est pas une science objective. (Par contre pourquoi "Louie" et pas "Louis", ça c'est un mystère.)
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Du bon usage des coins
Soit la phrase suivante, dans un entretien donné par René Homier-Roy : «Quand je me suis mis à faire des entrevues, j’avais tendance à tourner les coins ronds dans l’écoute, à faire mine d’écouter sans vraiment y mettre l’intensité nécessaire» (p. 33). Au Québec, qui va trop vite en affaires est réputé couper / tourner les coins ronds. Exemples ici et là. Conséquence ? «En France, M. Legault est…
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👑🥧 J’aime la galette, savez-vous comment ? Quand elle est bien faite, surtout sans beurre dedaaaaans 🎶 Et sans pâte feuilletée, parce que je déteste la pâte feuilletée. Bon, au final, c’est une version tellement peu traditionnelle que vous me direz sans doute que ce n’est pas une Galette des Rois. Appelons-la Prolétarte, comme suggéré sur la page d’ @insolenteveggie alors. La recette vient de chez la merveilleuse @mail0ves (sauf pour la pâte évidemment, puisque je ne respecte rien et que j’ai fait une pâte brisée, allez-y, collez-moi sur le bûcher, ça me fera des économies de chauffage) (en plus j’ai oublié la fève. Le fail de l’année, déjà) (de toute façon j’avais pas de couronne) #galette #galettedesrois #epiphanie #epiphany #january #roismages #magi #kingcake #recipe #recette #vegan #veganfood #veganrecipes #veganlife #vegancake #cake #bake #baking #baker #food #kitchenwitch #kitchenwitchery #tradition #maissansrespect #teatime #yummy #king #roiarthur #kingarthur #roi 🥧 Recette @mail0ves 🔮 Tarot de Gulliver by my first wifey @gulliver.laventuriere 📚 L’elféméride (Pierre Dubois & René Hausman), Le Roi Arthur (Amaury Chauou) 🔪 Forgé par mon génie de père https://www.instagram.com/p/CnKTYkHNMhk/?igshid=NGJjMDIxMWI=
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To call forth a miracle
France was in political darkness and the spiritual aspect of its condition was always bubbling away beneath the surface narrative. Transcendant lambency was what Charles craved, a guiding light from above, one that might redeem him from the political morass in which he found himself. If France needed "the help and aid which could only come from Almighty God and the Lord of Hosts who exalts the humble and humbles the proud", it materialized in the most humble form of all- a pious country maiden from the eastern reaches of the kingdom, Bar-Lorraine, where René of Anjou had been established by his grandmother and mother some ten years before. In the period leading to the close of 1428, Yolande had deployed most of the political and diplomatic weaponry in her arsenal, with varying degrees of success and durability. When hope was extinguished, she was able to call forth a miracle of biblical proportions; serendipity brought Yolande and Joan together. France's misery warranted Joan's acceptance, and Yolande's connections and spiritual practices eased her path.
Yolande was held in regard not only by reason of her political acumen, her consummate diplomacy, and her fine intellect, she was also renowned for her deep and authentic piety.
[..]
From the time of his father's death, Charles VII had been praying feverishly for a miracle and deliverance, testified to by his frequent pilgrimages to Le Puy and elsewhere. Charles's wife Marie and Bonne-mère Yolande had tilled and prepared the ground by the time of Joan's appearance. They had received letters from René of Anjou citing the appearance of a "bergerette extraordinaire" (remarkable sheperdess), originating from the marches of Lorraine; all that was required of Charles was that he stand firm and prepare himself for the coming miracle.
Joan was not groomed from childhood to become a "secret emissary" of the house of Anjou. Rather, my sense is that Yolande was extremely adept and strategic at pulling positives out of largely negative circumstances, and that she possessed an acutely developed "situational eye" when it came to patronage- whether it was political, cultural, and/or religious. Joan, a subject of her son René and his father-in-law, Charles of Lorraine, appeared out of nowhere, convinced that France's salvation could only be achieved by her with the guidance of her celestial interlocutors [..] Charles VII had given up hope, French morale was almost nonexistant, and something extraordinary was required to stem the downward spiral and inevitable defeat at the hands of Bedford and Burgundy [..] While Yolande might not have been the instigator of Joan's mission, it does not follow that she did not welcome her appearance and smooth her path. Patronage of Joan suited Yolande's political and strategic agenda, at least until Joan started to interfere in the politics and diplomacy of bringing the war to an end.
Zita Eva Rohr- Yolande of Aragon (1381-1442) Family and Power. The Reverse of the Tapestry
#xv#zita eva rohr#yolande of aragon: family and power#hundred years war#yolande d'aragon#charles vii#rené d'anjou#le bon roi rené#jeanne d'arc#marie d'anjou
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Je change, tu changes, il change...
On était, hier, à Londres ? Je propose qu’on y reste un instant, car Charles III à peine intronisé, pas encore couronné mais héritant d'un Royaume en grand danger de n'être bientôt plus très Uni, ne trouve à promettre que... le changement. C'est le truisme le plus répandu de notre temps : gouverner, ce ne serait plus ''prévoir'', ce serait ''changer'' ! Passe encore que nos petits ''monarques républicains'' se réfugient dans les cultes démodés de l'Homme nouveau ou du dieu-Progrès : ils ignorent que Voltaire et Rousseau sont morts depuis 250 ans. Mais qu'un vrai Souverain, et britannique de surcroît, souscrive à cette banalité, c'est choquant !
Si on met De Gaulle ''hors épure'' (ce qu'il a été), c'est Giscard, je crois, qui avait ''fauté'' le tout premier. Jusqu’à lui, un Roi couronné ou un Président élu se donnaient comme charge principale d'assurer au mieux le bonheur et la sécurité (c'est un peu la même chose, ou plutôt : l'un est dans l'autre) de leurs sujets ou de leurs mandants, de faire prospérer le pays, de l'enrichir au présent tout en le préparant au futur, et de protéger sa culture, son Histoire, son patrimoine, et les forces de ses populations. On n'imagine pas un Vincent Auriol ou un René Coty n'avoir en tête que de tout chambouler et d'inventer un pays et un peuple tout autres que ceux reçus en apanage, et de ''changer'' tout ce qui marchait... plutôt pas mal ! Les conneries de 1968 ont donné des ailes à ceux qui, ne se sentant pas la force de protéger et maintenir (en l'améliorant) le fantastique cadeau dont ils avaient la garde, se sont réfugiés dans une ''fuite en avant'' sans justification, sans raison d'être, et sans intérêt réel ! Mais dans son chuintement inimitable, Giscard ''avait regardé la Franche au fond des jyeux et avait cru y voir un déjir de chongemont''. Où avait-il pu voir un truc comme ça ? Il ne l'a jamais dit !
On peut opposer à cette ineptie du changement pour le changement la sagesse de la devise des Princes d'Orange, ''Je maintiendrai'' (en français). C'est en 1565 que Guillaume 1er d'Orange-Nassau avait promis ''Je maintiendrai la vertu et la noblesse, de mon nom la haultesse, l'honneur, la foy, la loy de Dieu'' (NDLR : quel magnifique programme, pour un quinquennat ! Ça fait envie !). Pourquoi faut-il que le nouveau Roi Charles III croie ''dans le coup'' de se mettre en contradiction avec l'héritage de sa Mère, qui ne ''changeait'' les choses qu'avec des pincettes et lorsqu'il devenait nécessaire de le faire --d'où son immense popularité ? Et il n'est pas inutile de lui remettre en mémoire que cette belle devise néerlandaise est reprise, en français aussi, of course, sous les Armoiries de la monarchie anglaise...
Ah ! Bien sûr, rien n'est simple : entre les risques de sorties du Commonwealth et l'éclatement possible d’un royaume qui se retrouverait très désuni... le nouveau Roi piaffe : après 53 ans dans le rôle de ''Prince Héritier'', il a hâte de enfin montrer ce dont il croit être capable ! Et en plus, il est tenu par l'image tutélaire qui lui a fait tant d'ombre si longtemps, et obligé de se fondre dans un discours filial (et sincère, sans nul doute. Pour le moment)... sauf que le message que lui laisse sa chère ''Majesty, Mummy'', est sans ambiguïté : ''Tiens bon, accroche toi, laisse passer l'orage, et n'en tire, avec des pincettes, que les conséquences inévitables''. Si quelque chose est à l'opposé de toute démarche progressiste, c'est bien ''l'elisabethisme'' --d'où, peut-être, qu'elle soit tellement aimée de son peuple ! Résultat : il se ‘’coince’’ lui-même entre le succès posthume de sa défunte Mère et le nouveau poncif que le monde aurait changé au point que tout devrait s'aligner sur les idées à la mode (elles-mêmes si changeantes !), rendant son règne pour le moins ''pas facile''.
Il existe une explication à cette dérive de la pensée qui incite les peuples à croire aux sornettes de dirigeants qui leur racontent que la mission d'un ''chef'' ou d'un ''leader'' serait de promouvoir cette chose qu'ils désignent, tous, dans tous les pays, par ce mot qui ne veut rien dire : 'le changement'' (à leur décharge, il est plus facile de tout chambouler sans dire ni pourquoi ni vers où que de ''gérer en bon père de famille'' et donc de laisser, à la fin de son mandat, plus et mieux que ce qu'on avait trouvé en arrivant !). Nombre des dirigeants actuels commettent (sciemment ? ''that is the question'' !) la faute énorme qu’est cette confusion entre progrès et changement, ces deux mots que tout oppose... mais que modernistes et progressistes voudraient faire croire synonymes, ce qui ne peut mener à rien.
Je m'explique : un changement consiste à passer d'un état ''A'' à un état ''B', sans aucune forme de jugement qualitatif sur le résultat, alors qu'un ''progrès'' est un changement qui a réussi, en apportant ''du mieux''... C'est une denrée rare. Par effet-miroir, un changement est le plus souvent un progrès qui a ''foiré'' à apporter quelque chose de bon, et c'est le cas général, qui explique pourquoi proposer ''le changement'' comme seul programme est devenu une habitude chez la plupart des hommes politiques de tous les pays... qui laissent, un peu plus tard, tous leurs électeurs profondément déçus –à tort, car ils attendaient des ''progrès'' là où on ne leur avait promis que le ''changement''. Ils ne doivent s’en prendre qu’à eux seuls : ils ont été ‘’roulés dans la farine’' par ce mauvais usage systématique de deux concepts qu’on leur fait croire synonymes alors qu’ils sont, juste, antagonistes.
Un dernier point à prendre en considération : contrairement à tout ce qu'on nous fait croire à force de nous le répéter ''24 / 24'', les gens, à quelques exceptions près, n'aiment pas ''le changement'' : il fait peur, comme l'ont démontré les recherches récentes de nombreuses équipes de chercheurs (dont celle du Laboratoire de neuro sciences cognitives computationnelles de l'Ecole Normale Supérieure --cf le Figaro de ce12 septembre ), qui se sont récemment penchées sur les réactions de notre cerveau devant des situations de routine (perçues comme confortables et rassurantes, donc efficaces) et de changement (qui exigent des efforts cognitifs et d'adaptation, donc anxiogènes -une impression de mise en danger). Je doute que nos leaders, ''shootés au changement'', connaissent ces études fondamentales. Qui va oser le dire au Roi Charles III avant qu'il ne soit trop tard ? God save Him !
Et tant qu'on y est, il serait de toute première urgence de réveiller tous nos génies malfaisants de l'ultra-modernisme, tous nos avant-gardistes ringards et tous nos progressistes démodés, qui se croient novateurs mais ne le sont que dans tout ce qu'il serait sage, prudent et intelligent d'éviter... C'est de vrais ‘’progrès’’, dont l'Humanité a besoin, pas de ''changement''. Ils ont tous tout faux, depuis des années.... et nous, ''les obscurs, les petits, les sans grades'' --comme disait Flambeau--, nous en mourons. ''Laissez les morts enterrer les morts''... et passez moins de temps sur l'euthanasie et les problèmes liés à la mort --sur lesquels vous ne connaissez rien !-- et plus sur le mieux-être des vivants, qui est de votre ressort ! Il est vrai que c'est plus difficile que de tout détruire !
H-Cl.
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Je suis dans le train pour 💫Angers💫 du coup je pense à toi
passe un bon dernier week-end. j'espère que tu auras des ola. que ce sera un stade de foot. que ce sera la plus belle dernière qu'on ait vue dans l'histoire du théâtre. que ce ne seront toujours pas des fraises de théâtre. que Cade vous fera danser. que tu ne désespéreras, ni ne mourras. que le roi René veillera sur vous, quoi.
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COMPLAINTE DU LÉZARD AMOUREUX
N' égraine pas le tournesol,
Tes cyprès auraient de la peine,
Chardonneret reprend ton vol
Et revient à ton nid de laine.
Tu n'es pas un caillou du ciel
Pour que le vent te tienne quitte
Oiseau rural, l'arc-en -ciel
S'unifie dans la marguerite.
L'homme fusille, cache-toi;
Le tournesol est son complice.
Seules les herbes sont pour toi,
Les herbes des champs qui se plissent.
Le serpent ne te connais pas ,
Et la sauterelle est bougonne;
La taupe, elle, n'y voit pas;
Le papillon ne hait personne.
Il est midi, chardonneret.
Le séneçon est là qui brille.
Attarde-toi, va, sans danger:
L'homme est rentré dans sa famille!
L'écho de ce pays est sûr.
J'observe, je suis bon prophète;
Je vois tout de mon petit mur,
Même tituber la chouette.
Qui, mieux qu'un lézard amoureux,
Peut dire les secrets terrestres?
Ô léger gentil roi des cieux
Que n'as-tu ton nid dans ma pierre!
Orgon, août 1947
René Char 1907-1988
(La sieste blanche -Les Matinaux
éd. Gallimard- 1950)
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QUEJA DEL LAGARTO ENAMORADO
El girasol no desgranes, tus cipreses acongojas, jilguero, levanta el vuelo vuelve a tu nido de borra.
No eres guijarro del cielo para que el viento te exima, ave campera; el arco-iris se aduna en la manzanilla.
El hombre fusila, escóndete; el girasol es chivato. Sólo la yerba te cumple, yerba cimbreña del campo.
No te conoce la sierpe, la caballeta rezonga; el topo pasa cegarra, no odia la mariposa.
Es mediodía, jilguero. Reluce la yerba cana. Demórate sin peligro: ¡el hombre volvió a su casa!
El eco del país es cierto. Acecho y soy buen profeta; todo veo de mi tapia: el mochuelo que cunea.
¿Quién si no lagarto sabe los secretos de la tierra? ¡Ay leve rey de los cielos si anidaras en mis piedras!
*
LA COMPLAINTE DU LÉZARD AMOUREUX
N’égraine pas le tournesol, Tes cyprès auraient de la peine, Chardonneret, reprend ton vol Et reviens à ton nid de laine.
Tu n’es pas un caillou du ciel Pour que le vent te tienne quitte, Oiseau rural; l’arc-en ciel S’unifie dans la marguerite.
L’homme fusille, cache-toi; Le tournesol est son complice. Seules les herbes sont pour toi, Les herbes des champs qui plissent.
Le serpent ne te connaît pas, Et la sauterelle est bougonne; La taupe, elle, n’y voit pas; Le papillon ne hait personne.
Il est midi, chardonneret. Le séneçon est là qui brille. Attarde-toi, va sans danger: L’homme est rentré dans sa famille!
L’écho de ce pays est sûr. J’observe, je suis bon prophète; Je vois tout de mon petit mur, Même tituber la chouette.
Qui, mieux qu’un lézard amoureux, peut dire des secrets terrestres? Ô léger gentil roi des cieux, Que n’as-tu ton nid dans ma pierre!
Orgon, août 1947.
René Char
di-versión©ochoislas
#René Char#literatura francesa#poesía contemporánea#Provenza#garriga#lagarto#jilguero#di-versiones©ochoislas
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📜Le Livre des Tournois du roi René.
~•~
📝Prince valeureux au combat et homme de lettres, René d'Anjou était expert en l'art des tournois. En imaginant un tournoi opposant le duc de Bretagne au duc de Bourbon, il élabore un cérémonial minutieusement codifié depuis la proclamation du tournoi et ses préparatifs jusqu'à la remise de prix au vainqueur. Le manuscrit français 2695 de la Bibliothèque nationale de France en est le témoin le plus précieux. Exécuté sur papier, probablement après 1462, il s'enrichit d'une superbe série de dessins à l'encre rehaussés de couleur que la critique attribue unanimement à Barthélemy d'Eyck, le peintre dans lequel le bon roi René trouva l'interprète le plus subtil et le plus séduisant de sa propre sensibilité artistique. Ce manuscrit était présenté par l'Inp et la Bibliothèque nationale de France à l'occasion des "Trésors du patrimoine écrit".
~*~
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Denise Grey.
Filmografía
Cine
1913 : Mademoiselle Etchiko
1914 : En famille, de Georges Monca
1914 : Madame Rigadin, modiste, de Georges Monca
1914 : Mademoiselle Etchiko, de André Hugon
1914 : Le Voyage de Corbillon, de Georges Monca
1916 : Document secret, de René Navarre
1916 : Nemrod et Cie, de Maurice Mariaud
1916 : Rigadin professeur de danse, de Georges Monca
1917 : Les Bleus de l'amour, de Henri Desfontaines
1917 : Honneur d'artiste, de Jean Kemm
1935 : Jeunes Filles à marier, de Jean Vallée
1936 : La Dame de Vittel, de Roger Goupillières
1937 : Trois artilleurs au pensionnat, de René Pujol
1938 : Trois artilleurs à l'opéra, de André Chotin
1938 : Serge Panine, de Paul Schiller y Charles Méré
1940 : Monsieur Hector, de Maurice Cammage
1941 : Boléro, de Jean Boyer
1941 : Montmartre-sur-Seine, de Georges Lacombe
1942 : Romance à trois, de Roger Richebé
1942 : Le Voile bleu, de Jean Stelli
1942 : Des jeunes filles dans la nuit, de René Le Hénaff
1942 : Retour de flamme, de Henri Fescourt
1942 : L'Honorable Catherine, de Marcel L'Herbier
1943 : Adieu Léonard, de Pierre Prévert
1943 : Vingt-cinq ans de bonheur, de René Jayet
1943 : L'aventure est au coin de la rue, de Jacques Daniel-Norman
1944 : Les Caves du Majestic, de Richard Pottier
1945 : On demande un ménage, de Maurice Cam
1945 : Madame et son flirt de Jean de Marguenat
1945 : L'Insaisissable Frédéric, de Richard Pottier
1945 : L'Extravagante Mission, de Henri Calef
1946 : Étrange Destin, de Louis Cuny
1946 : Le Couple idéal, de Bernard Roland y Raymond Rouleau
1946 : Six heures à perdre, de Alex Joffé y Jean Lévitte
1946 : Coïncidences, de Serge Debecque
1946 : Le Diable au corps, de Claude Autant-Lara
1947 : Et dix de der, de Robert Hennion
1947 : Carré de valets, de André Berthomieu
1948 : Une femme par jour, de Jean Boyer
1948 : Bonheur en location, de Jean Wall
1949 : La Ronde des heures, de Alexandre Ryder
1949 : Tête blonde, de Maurice Cam
1949 : Mon ami Sainfoin, de Marc-Gilbert Sauvajon
1949 : Pas de week-end pour notre amour, de Pierre Montazel
1950 : Rome-Express, de Christian Stengel
1950 : Les Petites Cardinal, de Gilles Grangier
1950 : Demain nous divorçons, de Louis Cuny
1952 : Allô... je t'aime.
1952 : La Tournée des grands ducs, de André Pellenc
1953 : Art. 519 Codice Penale, de Leonardo Cortese
1953 : Il Seduttore, de Franco Rossi
1953 : Raspoutine, de Georges Combret
1953 : Dortoir des grandes, de Henri Decoin
1953 : Les Corsaires du bois de Boulogne, de Norbert Carbonnaux
1953 : Julietta, de Marc Allégret
1953 : Le Père de Mademoiselle, de Marcel L'Herbier
1954 : Escalier de service, de Carlo Rim, sketch Les Béchard
1954 : Le Printemps, l'automne et l'amour, de Gilles Grangier
1954 : Fantaisie d'un jour, de Pierre Cardinal
1954 : Le Mouton à cinq pattes, de Henri Verneuil
1954 : Poisson d'avril, de Gilles Grangier
1955 : La Villa Sans-Souci, de Maurice Labro
1955 : La Rue des bouches peintes, de Robert Vernay
1956 : Sylviane de mes nuits, de Marcel Blistène
1956 : L'Auberge fleurie, de Pierre Chevalier
1956 : Une nuit aux Baléares, de Paul Mesnier
1956 : Mitsou, de Jacqueline Audry
1957 : À pied, à cheval et en voiture, de Maurice Delbez
1957 : Carve Her Name with Pride, de Lewis Gilbert
1957 : La Peau de l'ours, de Claude Boissol
1957 : Le Tombeur, de René Delacroix
1957 : Police judiciaire, de Maurice de Canonge
1957 : Mimi Pinson, de Robert Darène
1957 : C'est la faute d'Adam, de Jacqueline Audry
1958 : À pied, à cheval et en spoutnik, de Jean Dréville
1959 : Bomben im Monte-Carlo, de Georg Jacoby
1959 : Le Confident de ces dames, de Jean Boyer
1960 : Le Panier à crabes, de Joseph Lisbona
1960 : La Française et l'Amour, de Christian-Jaque, sketch Le Divorce
1963 : La Bonne Soupe, de Robert Thomas
1965 : Pas de caviar pour tante Olga, de Jean Becker
1969 : La Maison de campagne, de Jean Girault
1970 : Hello-Goodbye, de Jean Negulesco
1970 : Los Aristogatos, de The Walt Disney Company
1971 : Mais qui donc m'a fait ce bébé ?, de Michel Gérard
1980 : La Boum, de Claude Pinoteau
1982 : La Boum 2, de Claude Pinoteau
1982 : N'oublie pas ton père au vestiaire..., de Richard Balducci
1982 : En cas de guerre mondiale, je file à l'étranger, de Jacques Ardouin
1983 : Le Voleur de feuilles, de Pierre Trabaud
1985 : Le Gaffeur, de Serge Pénard
1988 : Les Saisons du plaisir, de Jean-Pierre Mocky
1991 : Tchin tchin, de Gene Saks.
Televisión
1960 : Rouge, de André Leroux
1962 : Chéri
1967 : Le Chevalier Tempête, de Yannick Andréi
1969 : Tout pour le mieux
1971 : Une autre vie
1972 : Les Rois maudits, de Marcel Jullian y Claude Barma
1977 y 1982 : Cinéma 16
1978 : Un ours pas comme les autres
1979 : Les Moyens du bord
1979 : Les Dames de la côte, de Nina Companeez
1980 : L'Esprit de famille
1983 : Merci Sylvestre
1985 : Les temps difficiles.
Teatro
1916 : Six Hommes, une femme et un singe, de Pierre Veber y Yves Mirande, Théâtre Michel
1921 : Comédienne, de Jacques Bousquet y Paul Armont, Théâtre des Nouveautés
1922 : La Femme de mon ami, Théâtre de l'Athénée
1922 : Atout... Cœur !, de Félix Gandéra, Théâtre de l'Athénée
1924 : Si je voulais..., de Paul Géraldy y Robert Spitzer, Théâtre du Gymnase Marie-Bell
1926 : Passionnément, de Maurice Hennequin y Albert Willemetz, Théâtre de la Michodière
1936 : Europe, de Maurice Rostand, Théâtre Pigalle
1938 : Le Valet maître, de Paul Armont y Léopold Marchand, escenografía de Pierre Fresnay, Théâtre de la Michodière
1948 : Les Enfants d'Edouard, de Frederic Jackson y Roland Bottomley, adaptación de Marc-Gilbert Sauvajon, escenografía de Jean Wall, Théâtre Édouard VII
1949 : Les Enfants d'Edouard, de Frederic Jackson y Roland Bottomley, adaptación de Marc-Gilbert Sauvajon, escenografía de Jean Wall, Théâtre des Célestins
1950 : George et Margaret, de Marc-Gilbert Sauvajon y Jean Wall, escenografía de Jean Wall, Théâtre Daunou
1950 : Il faut marier maman, de Marc-Cab y Serge Veber, escenografía de Pierre Dux, Théâtre de Paris
1953 : Faites-moi confiance, de Michel Duran, escenografía de Jean Meyer, Théâtre du Gymnase Marie-Bell
1955 : Les Enfants d'Edouard, de Frederic Jackson y Roland Bottomley, adaptación de Marc-Gilbert Sauvajon, escenografía de Jean Wall, Théâtre des Célestins
1956 : La Femme du siècle, de Claude Schnerb, escenografía de Jacques-Henri Duval, Théâtre des Célestins, giras Georges Herbert
1959 : Bon Week-End Mr. Bennett, de Paule de Beaumont a partir de Arthur Watkyn, escenografía de Michel Vitold, Théâtre de la Gaîté-Montparnasse
1961 : Ocho mujeres, de Robert Thomas escenografía de Jean Le Poulai.
1962 : Ocho mujeres, de Robert Thomas, escenografía de Jean Le Poulain, Théâtre des Bouffes-Parisiens
1963 : Vénus de Milo, de Jacques Deval, escenografía de Pierre Mondy, Théâtre des Célestins
1965 : Assassins associés, de Robert Thomas, escenografía de Jean Piat, Théâtre Antoine y Théâtre du Palais-Royal
1966 : J'y suis, j'y reste, de Jean Valmy y Raymond Vincy, escenografía de Jean Valmy, Théâtre Marigny
1966 : La Fin du monde, de Sacha Guitry, escenografía de Jean-Pierre Delage, Théâtre de la Madeleine
1967 : Quarante Carats, de Pierre Barillet y Jean-Pierre Gredy, escenografía de Jacques Charon, Théâtre de la Madeleine
1971 : Le Train de l'aube, de Tennessee Williams, escenografía de Jean-Pierre Laruy, Théâtre Édouard VII
1972 : En avant... toute !, de Michel André, escenografía de Michel Roux, Théâtre Édouard VII
1972 : La Bonne Adresse, de Marc Camoletti, escenografía de Christian-Gérard, Théâtre Michel
1973 : La Royale Performance, de Marcel Mithois, escenografía de Jean-Pierre Delage, Théâtre des Bouffes-Parisiens
1974 : Le Tube, de Françoise Dorin, escenografía de François Périer, Théâtre Antoine
1976 : Le Jardin de craie, de Enid Bagnold, escenografía de Raymond Gérôme, Théâtre Hébertot
1977 : Bichon, de Jean de Létraz, escenografía de Jacques Valois, Théâtre de Charleville-Mézières
1978 : Crime à la clef, de Alain Bernier y Roger Maridat, escenografía de Jean-Paul Cisife, Théâtre Tristan-Bernard
1981 : La vie est trop courte, de André Roussin, escenografía de Michel Fagadau, Théâtre Daunou
1983 : La vie est trop courte, de André Roussin, escenografía de Michel Fagadau, Théâtre de la Gaîté-Montparnasse
1984-1985 : Les Temps difficiles, de Édouard Bourdet, escenografía de Pierre Dux, Théâtre des Variétés
1985 : Harold et Maude, de Colin Higgins, escenografía de Jean-Luc Tardieu, Espace 44 Nantes
1987 : Harold et Maude, de Colin Higgins, escenografía de Jean-Luc Tardieu, Théâtre Antoine
1989 : Arsénico y encaje antiguo, de Joseph Kesselring, escenografía de Jean-Luc Tardieu, gira
1991 : La sopera, de Robert Lamoureux, escenografía de François Joffo.
Operetas
1919 : Nelly, de Marcel Lattès, con Félix Oudart (Théâtre de la Gaîté)
1950 : Il faut marier maman, de Guy Lafarge, Théâtre de Paris, con Roland Armontel.
Créditos: Tomado de Wikipedia
https://es.wikipedia.org/wiki/Denise_Grey
#HONDURASQUEDATEENCASA
#ELCINELATELEYMICKYANDONIE
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Autoportrait
La mer , l’océan, le bleu le rose, le rouge, le thé, le thé noir, vert, parfumé, mon préféré le lapsang souchong, le coca-cola, les bieres artisanales, et celles de la brasserie lindemans, la joie, les doutes, se promener dans les bois, l’histoire du petit chaperon rouge, alice , tim burton, mathias malzieu, la femme chocolat, petit bout de chocolat noir 90% à fondre sous la langue chaque soir, faire la grasse matinée, prendre le temps de ne rien faire, trier les livres dans la bibliothéque , René char, Man Ray, Henri Cartier-Bresson, lucien clergue, jacques -henri Lartigue, frida khalo, femme, feministe, parité , égalité, sororité, fraternité, j’ecris ton nom liberté, on n’est pas serieux à 17 ans, zelda sayre-fitzgerald, années folles, champagne, cave à vin, amis-amitié, rire, sourire, heureuse, amour, ma famille, mes enfants, amande, noisette, cerise, mangue, figue, abricot, sexe, faire l’amour, petit geste tendre sur ta peau, respect des silences de l’autre, , regarder les oiseaux, regarder les fleurs, se trouver si petite devant l’immensité de la foret, avoir peur des legendes contes et mystères, la mythologie, le reve d’Icare, magritte, dada, andré breton, picasso, fougita, astro boy, naoki urasawa, hoayo miyazaki, anna karina, benjamin bioley, tom waits, bruce springsteen, des camels, des philipp morris, de la sativa, steve reich, pina bausch, martha graham, philip glass, Merce-angelin-trisha, le sacre du primtemps d’igor stravinsky, l’oeuvre de satie, debussy. le louvre, le grand palais, le musée de l’homme,lucy- toumaï , yves coppens, michel serres, huberts reeves, aurlien barrau,Nietszche Friedrich, spinoza, le bons sens des gens de la terre, apprendre, etre curieuse de tout, saoulante, 2d degré, cinema, théatre, comedie française, théatre de l’odeon, théatre des amandiers, l’opéra garnier, l’olympia, le sud ouest, le sud-est natal, une ford mustang, le vent dans les cheveux, lunettes de soleil, odeur de la pluie d’été sur le bitume. soleil caché par les feuillages, paresse, jouer de la musique, les musiciens, la transmission, dire que je parle chinois en vrai, que j’ai pris l’ascensur avec david bowie, que j’ai assité à un concert de bob marley 1 an avant sa mort, les savoirs partagés, la chaleur d’un cou, enlacer, faire des rencontres, croire en l’amitié homme-femme, artiviste, ne plus croire au prince charmant, se blinder,les couronnes de fleurs, la legende du roi athur, Morgane, les fées , les sorcières, les sortilèges, la bretagne, ne pas savoir ce qu’est une brosse à cheveux, ne jamais être parfaite, préférer l’être à l’avoir, mon monde interieur, my little mess, mon petit desordre, je n’aime pas choisir, je prefere l’alléatoire, que le destin en decide pour moi, or je ne souhaite pas avoir une vie toute tracée, j’aime le risque,chaque matin est une nouvelle vie, la routine loin de rassurer, m’enferme à tout jamais dans une norme. je suis en perpetuelle revolution, évolution, créative, 100 idées a la minute, foutraque, bordélique, la nouvelle vague, françois truffaut, faire des crepes, cuisiner, suivre son instinct, jeanne Added, etienne Daho, Paolo Conte, Abba- thiefaine, higelin -supertramp, pink floyd, Wish you were here, ne rien comprendre à la physique, au quantique mais m’obstiner, changer une roue, tri selectif, seconde main, manger bio, les amap, l’autre.
et tant d’autre
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Souvent confondus avec les Vendéens, les Chouans hantent l’œuvre des plus grands romanciers, de Balzac à La Varende. Mais leur histoire dépasse, en grandeur, les meilleures œuvres d’imagination. C’est ce que démontre, avec un beau talent, Anne Bernet.
Une historienne nous est née Voilà la bonne nouvelle apportée aux lecteurs des Grandes Heures de la Chouannerie. Des lecteurs dont certains, jusqu’alors appréciaient - et j’en suis - la finesse des analyses littéraires d’Anne Bernet Sans se douter que le démon de l’Histoire allait, pour notre plus grand bonheur, la saisir. Car c’est bien d’Histoire qu’il s’agit, et de la meilleure : celle qui sait faire revivre avec force les émotions, les enthousiasmes, les passions, les drames d’hommes engagés à la vie à la mort dans un grand combat, tout en peignant avec une claire érudition la toile de fond sur laquelle se déroulent ces tragiques destins.
Terrible paysage : pendant quinze ans, de 1789 à 1804, la France est plongée dans la fureur, les larmes - et le sang, le sang partout, le sang toujours ! Tandis qu’à Paris vont s’échelonner les scènes les plus atroces de notre histoire, les provinces subissent, par contrecoup, les soubresauts de la folie parisienne.
Les terres de l’Ouest vont payer un très lourd tribut. La Vendée bien sûr. Mais aussi l’Anjou, le Maine, la Normandie, la Bretagne. Terres d’élection de la chouannerie, née comme une réaction de survie face à la folie meurtrière des sectateurs de la sainte Egalité, nouvelle religion au culte sanglant desservie par des prêtres fous. A vrai dire, l’Ouest a connu, dans les premiers temps de 1789, la tentation des idées à la mode. Des insensés ont joué avec le feu : certains nobles, amusés par les nouveautés dont se gargarisaient des bavards, ont contribué à saper l’édifice sous les ruines duquel ils devaient se retrouver ensevelis… Et, surtout, il y a ce sacré tempérament breton qu’Anne Bernet croque à merveille en quelques mots : “les vingt-cinq mille gentilshommes bretons étaient souvent plus gueux que leurs manants et plus à l’aise en sabots qu’en escarpins. Leur orgueil était donc chatouilleux, leur épée prompte à sortir du fourreau et ils regardaient volontiers les initiatives du pouvoir central comme des affronts faits à l’antiquité de leur sang bleu.” Il était donc tentant, en 1789, d’affirmer l’identité bretonne face à Versailles. Mais, très vite, l’aristocratie bretonne a compris que la terrible mécanique enclenchée par les émeutes parisiennes conduisait tout droit au précipice.
Armand de la Rouërie a été de ceux qui n’entendaient pas subir. Ayant gardé de sa participation aux guerres des Amériques le sens de la guérilla, il entreprit d’organiser à travers toute la Bretagne de vastes réseaux destinés à se mobiliser pour défendre la Croix et les Lis. Car la menace se précisait, au fil de 1790, 1791, 1792… D’abord la constitution civile du clergé, peu appréciée dans les provinces de l’Ouest ; puis les humiliations successives infligées au Roi et à sa famille ; puis les exigences de plus en plus insupportables de ce pouvoir fou qui siégeait à Paris… Quand on apprit l’assassinat du Roi, stupeur et consternation semblèrent assommer l'Ouest, le plonger dans une léthargie comateuse. Il en sortit, rouge de colère, en mars 1793.
Lorsque la République avait fait appel à des volontaires pour meubler les rangs de ses armées, elle n’avait pas eu beaucoup de succès… En décidant la levée en masse, par conscription obligatoire, la Convention mit le feu aux poudres. Rennes, Vannes, Pontivy, La Roche-Bernard : de jeunes citadins trouvent quelques pétoires, les paysans ont des faux emmanchées à rebours, ou tout simplement le bon vieux couteau à tout faire, qui vous saigne proprement un goret. Ou un gabelou, comme le savait bien Jean Cottereau, grand faux-saunier devant l’éternel et connaissant comme sa poche, grâce à cet art, les confins de Bretagne et du Maine. Et qui avait hérité d’un aïeul le surnom de Chouan (le hululement du chat-huant étant le cri de ralliement, le signal convenu des bandes faisant le trafic, les nuits sans lune, du sel de contrebande).
Au printemps 1793, les foyers d’insurrection se multiplièrent. La République était défiée, ridiculisée : le chevalier de Boishardy s’emparait de la berline de poste chargée d’assignats destinés à Paris. L’argent républicain finançait la Contre-Révolution ! A Saint-Pol de Léon, les Bleus entendaient monter des rangs de leurs adversaires de rauques chants issus de la longue mémoire celtique : “Si c’est querelle et bataille qu’ils cherchent, avant qu’il soit jour ils seront satisfaits ! Avant le jour, ils auront querelle et bataille ! Nous le jurons par la mer et la foudre ! Nous le jurons par la lune et les astres ! Nous le jurons par le ciel et la terre !”
L’habileté diplomatique du général républicain Canclaux désamorça la révolte dans le nord du Finistère. Mais, au printemps 1793, toute la Mayenne vibrait au bruit des coups de main de Jean Chouan et de ses compagnons. Grand rêve : que les gens du Maine puissent tendre la main aux Bretons et aux Vendéens, et les jours de la République honnie seraient comptés…
On pouvait y croire : les hommes du prince de Talmont et de Jean Chouan n’ont-ils pas infligé une sévère frottée aux Bleus de Westermann, en octobre 1793, à la Croix-Bataille ? Là se sont déployées les qualités manœuvrières de ces chouans dont les longs cheveux se confondaient au poil de chèvre de leur veste, marquée du sacré-cœur et sur laquelle brinquebalait le rosaire aux grains de plomb. Anne Bernet décrit superbement la tactique de ces partisans : “Les Mainiaux avançaient dans les ténèbres comme des chats : vieille habitude des expéditions nocturnes aux buts pas toujours avouables. Aucun caillou ne roulait sous leurs pas. Ils marchaient à l’oreille, se guidant sur les commandements braillés par les Bleus, trop sûr de surprendre les royaux endormis. Pas de chance, citoyens, à cette heure-ci, les chouettes ne dorment pas.” Familiarité avec le terrain, frappe forte et rapide, embuscades à répétition… Lorsque les Chouans peuvent mettre en pratique ces principes, ils sont intouchables. Mais, sortis de leurs bois, exposés à une campagne plus classique, ils souffraient durement. L’épuisante longue marche que fut la virée de Galerne, pendant sept semaines du terrible automne 1793, marqua l’échec d’une coalition où Bretons, Angevins, Vendéens étaient censés unir leurs forces, en une grande armée catholique et royale. L’héroïsme de beaucoup ne suffit pas à donner de véritable homogénéité à une troupe aussi farouche que disparate, souffrant des tiraillements et dissensions de l’état-major. Après la terrible épreuve - la fin atroce de l’armée catholique et royale, massacrée dans les marais de Savenay - Jean Chouan et ses hommes replongèrent dans la clandestinité des sous-bois, où étaient creusées de véritables tanières, abris souterrains surmontés de trappes recouvertes de mousse. Là était leur domaine.
La fin de Jean Chouan fut, comme celle de beaucoup des siens, héroïque. Cerné par les Bleus, il s’exposa sciemment à leurs balles pour détourner leur attention et permettre, ainsi, à sa belle-sœur enceinte de se sauver. Il rendit l’âme en pensant à ses deux jeunes sœurs, Perrine et Renée, guillotinées à l’âge de dix-huit et quinze ans, mortes en criant : “Vive le Roi ! Vive mon frère Jean Chouan !” Jean Chouan fut placé par ses hommes en un refuge secret, creusé dans cette terre pour laquelle il s’était bien et longtemps battu. “Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre…” Mais la mort de Jean Chouan ne fut pas celle de la chouannerie. Il laissait un exemple, un modèle. Ils furent suivis. Tandis que sur la guillotine installée à Laval se succédaient, jour après jour, nobles et gueux, hommes et femmes, jeunes et vieux, religieux et laïcs, les campagnes de la Mayenne, au printemps 1794, bruissaient aux cris de mille chouettes. Kléber était conscient de l’enracinement de la révolte car il était plutôt moins obtus que la moyenne des généraux républicains : “Ces bandes, disséminées sur un grand espace, mendient ou travaillent le jour, la nuit se livrent au brigandage. Elles forment pour ainsi dire, toute la population du territoire. Les hommes qui semblent travailler le jour au labourage se réunissent la nuit aux brigands.”
“Si c’est querelle et bataille qu’ils cherchent, avant qu’il soit jour ils seront satisfaits !”
Les bandes chouannes se groupent autour de chefs improvisés. Certains sont peu expérimentés et du coup l’affaire finit assez mal et assez vite. Mais d’autres sont des solides. Tel ce Jean-Louis Tréton, dit Jambe d’argent à cause d’une terrible claudication, héritée d’une enfance particulièrement misérable. Entouré de gaillards aux noms sonores (“Va-de-bon-cœur”, “Brise-bleus”)… Jambe d’argent entreprend de fédérer les groupes de chouans qui s’agitent aux quatre coins de la Mayenne. Rude tâche. Il y parvient de son mieux et crée mille soucis aux Bleus jusqu’en février 1795.
Dans le Morbihan, Georges Cadoudal s’activait. Il fut de ceux qui ne crurent pas aux folles promesses d’une paix “menteuse” - paix envisagée, souhaitée par deux chefs de bonne volonté, le général républicain Humbert et le chef chouan Jérôme de Boishardy. Certes, elle était belle, l’espérance d’une paix enfin revenue, pour panser les blessures et fermer les cruelles cicatrices de la guerre civile. Mais à quel prix ! Reconnaître la République honnie et s’incliner devant elle ? Renoncer à la fidélité jurée aux Lis ? Mieux valait mille fois la mort ! Cette mort, le trop crédule Boihardy la trouva, au coin d’un champ, le 17 juin 1795. Lui qu’on avait nommé le Sorcier, tant il avait de tours et de ruses de guerre dans son sac, ne trouva ce jour-là d’autre issue que de bien mourir.
Cependant le débarquement d’une armée blanche à Quiberon avait fait lever les plus folles espérances. Las ! Hoche, profitant des hésitations des chefs blancs, sut les enfermer dans la presqu’île “comme des rats dans une ratière”. Et puis il vida la ratière et extermina les rats jusqu’au dernier… Des garçons de seize ans aux vieillards octogénaires, tous y passèrent. Jambe d’argent eut, lui, la bonne fortune de mourir les armes à la main, en combattant une fois de plus un parti de Bleus, le 27 octobre 1795. Le boiteux courait plus vite que tout le monde, ce jour-là, pour aller sus à l’ennemi. En tête, tout seul loin devant ses hommes. Belle cible…
Avec de tels exemples, la chouannerie ne pouvait pas mourir. Au point d’enflammer à son tour la sage Normandie, fin 1795. Derrière Louis de Frotté, qui avait pris pour nom de guerre Blondel. Ce Blondel a la qualité des vrais chouans et applique leurs recettes : “ Se battre tous les jours ; se dérober plus souvent encore ; surprendre pour ne pas être surpris et renoncer à la gloire, du moins à celle que peignent les manuels d’Histoire”.
Mais la fatigue finit par gagner les terres chouannes : au printemps 1796, l’Anjou, le Bas-Maine, la Bretagne, la Normandie acceptèrent de cesser le combat. Pour la plus grande gloire du “pacificateur”, Lazare Hoche…
Pourtant des insoumis, des indomptables restaient tapis au creux des bois. Les événements leur donnèrent raison : malgré les apaisantes promesses de la République, celle-ci s’évertua à pourchasser et à éliminer, en 1797 et 1798, tout ce qui pouvait ressembler à un chouan. Le 12 juillet 1799, le Loi des Otages autorisait à emprisonner les parents, grands-parents, frères et sœurs des chouans à la place des rebelles en fuite. Et à tirer dans le tas, en cas de “tentative d’évasion” (éternel et commode prétexte des policiers assassins)…
Contre le Directoire agonisant, une nouvelle levée de chouannerie se produisit à l’automne 1799. Cette fois-ci, les Lis allaient revenir ! C’était compter sans un certain général Bonaparte. Celui-ci, en apportant l’apaisement religieux, désarmait moralement bien des combattants de la Croix et des Lis. Jusqu’au bout, cependant, un dernier chouan résista, lutta, courut au-devant de la mort. Il s’appelait Georges Cadoudal. Il reste un symbole pour ceux qui savent que vivre dans la fidélité implique de mourir, quand il le faut, pour la fidélité.
Anne Bernet, Les grandes heures de la chouannerie, Perrin.
Pierre Vial, Le Choc du Mois – N°63 – Avril 1993.
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Avril MMXXI
Films
Une idée de génie (Ingenious) (2009) de Jeff Balsmeyer avec Dallas Roberts, Jeremy Renner, Ayelet Zurer, Marguerite Moreau et Amanda Anka
Ghost in the Shell (2017) de Rupert Sanders avec Scarlett Johansson, Takeshi Kitano, Michael Pitt, Pilou Asbæk et Juliette Binoche
Comment voler un million de dollars (How to Steal a Million) (1966) de William Wyler avec Audrey Hepburn, Peter O'Toole, Hugh Griffith et Eli Wallach
Niagara (1953) de Henry Hathaway avec Marilyn Monroe, Joseph Cotten, Jean Peters, Casey Adams et Denis O'Dea
Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages (1968) de Michel Audiard avec Françoise Rosay, Bernard Blier, Marlène Jobert et André Pousse
Lost in Translation (2003) de Sofia Coppola avec Scarlett Johansson, Bill Murray, Giovanni Ribisi et Anna Faris
Mission impossible 2 (Mission: Impossible 2) (2000) de John Woo avec Tom Cruise, Dougray Scott, Thandie Newton et Ving Rhames
Dies iræ (2003) d’Alexandre Astier avec Tony Saba, Thomas Cousseau, Lionnel Astier, Nicolas Gabion, Franck Pitiot, Jean-Christophe Hembert, Alexandre Astier et Jean-Robert Lombard
Poulet au vinaigre (1985) de Claude Chabrol avec Jean Poiret, Stéphane Audran, Lucas Belvaux, Michel Bouquet, Caroline Cellier, Jean Topart et Pauline Lafont
Tony Rome est dangereux (Tony Rome) (1967) de Gordon Douglas avec Frank Sinatra, Jill St John, Richard Conte, Gena Rowlands et Simon Oakland
Le Retour de la Panthère Rose (The Return of the Pink Panther) (1975) de Blake Edwards avec Peter Sellers, Christopher Plummer, Catherine Schell et Herbert Lom
Spectacles
Une femme presque fidèle (1977) de Jacques Bernard avec Jacques Mauclair, Dominique Paturel, Jacqueline Gauthier, Monique Tarbès et Sacha Briquet
Nono (1984) de Sacha Guitry avec Michel Roux, Bernard Alane, Robert Manuel et Katia Tchenko
Séries
Friends Saison 5, 6
Celui qui rate son week-end - Celui qui a du mal à se taire - Celui qui emménage - Celui qui avait des souvenirs difficiles à avaler - Celui qui s'était fait piquer son sandwich - Celui qui avait une sœur un peu spéciale - Celui qui prenait de bonnes résolutions - Celui qui riait différemment - Celui qui avait un sac - Celui qui découvre tout - Celui qui prenait des coups - Celui qui enviait ses amis - Celui qui ne savait pas se repérer - Celui qui se sacrifiait - Celui qui ne savait pas flirter - Celui qui sauvait des vies - Celui qui jouait à la balle - Celui qui devait casser la baraque - Celui qui était à Las Vegas : 1re partie - Celui qui était à Las Vegas : 2e partie - Ceux qui revenaient de Las Vegas - Celui qui console Rachel - Celui qui était de mauvaise foi - Celui qui perdait sa belle assurance - Celui qui avait une belle bagnole - Ceux qui passaient leur dernière nuit - Celui qui avait une jolie colocataire - Celui qui avait les dents blanches - Celui qui s'était drogué - Celui qui souhaitait la bonne année - Celui qui avait le derrière entre deux chaises - Celui qui inventait des histoires - Celui qui sortait avec la sœur
Méli Mélo Saison 1, 2, 3
Au prix que ça coûte ! - Sors de ton lit ! - Vive l'herbe libre - Allais, allez ! - Des tout petits cachets ! - Bzz ! - Tartare de sédiments ! - Papy lingette ! - Eau propre eau sale ! - Le goût des eaux - Le changement c'est maintenant ! - Les sceptiques de la fosse ! - Culture et Captages - L'étroite moustiquaire - Un léger penchant ! - De source sûre !
Meurtres au paradis Saison 10
Meurtre dans la matinale - Trésors enfouis - Jackpot - Enquête sous perfusion
Nestor Burma Saison 3
Les Eaux troubles de Javel - Nestor Burma court la poupée - Brouillard au pont de Tolbiac
Kaamelott Livre IV, I
La Carte - Le Repas de famille - Le Répurgateur - Le Labyrinthe - Beaucoup de bruit pour rien - Le Oud II - Le discours - Le Duel - L'Invasion viking - La Bataille rangée - La Romance de Perceval - Unagi IV - La Permission - Anges et Démons - Les Tartes aux fraises - Le Chaudron rutilant - La Visite d’Ygerne - Les Clandestins - La Kleptomane - Le Pain - La Mort le Roy Artu - Le Problème du chou - Un roi à la taverne - Les Fesses de Guenièvre
Les Nouvelles Aventures de Lucky Luke
Liki Liki - Lucky Luke en Alaska
Top Gear Saison 14, 21, 19, 22, 13
Road Trip en Roumanie - Road Trip à Tchernobyl - Spécial Afrique : Première partie - Les pires voitures de l’histoire - Les imbéciles changent d'avis ! - Passion vintage
Columbo Saison 7, 3
Le mystère de la chambre forte - Au-delà de la folie
Livres
Lucky Luke #52 : Fingers de Morris et Hartog Van Banda
Plan de bataille pour OSS 117 de Jean Bruce
Lucky Luke #33 : Le Pied-Tendre de Morris et René Goscinny
Superman Poche N°48
On est foutu, on pense trop ! de Serge Marquis
Wanted Lucky Luke de Matthieu Bonhomme
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RAOUL GUILLAUME S’EST ÉTEINT
« HAÏTI A PERDU UN TRÉSOR »
(1ere Partie)
Par Louis Carl Saint Jean
<< Chers amis,
Je prends plaisir à partager avec vous LA PREMIÈRE PARTIE d’un texte que j’ai écrit sur le grand maestro, musicien, compositeur et poète Raoul Guillaume. Il a été publié dans la dernière edition de l’hebdomaire Haïti Observateur. Vous recevrez la seconde partie la semaine prochaine Dieu voulant.
Par ailleurs, si le temps et mon état de santé me le permettent, après ces deux articles, je publierai deux ou trois autres dans lequel je ferai l’analyse littétaire d’une dizaine de poèmes qu’a écrits cet homme hors du commun. >>
Bonne journée,
Louis Carl
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RAOUL GUILLAUME S’EST ÉTEINT
« HAÏTI A PERDU UN TRÉSOR »
(1ere PARTIE)
Par Louis Carl Saint Jean
La musique populaire haïtienne a connu ses lettres de noblesse indiscutablement à l’avènement au pouvoir, en août 1946, de l’Honorable Dumarsais Estimé. En effet, à partir de cette date et jusqu’à la chute, en décembre 1956, du général Paul-Eugène Magloire, le firmament artistique de notre pays a vu scintiller toute une constellation de musiciens. Réunis dans un cénacle qui sera baptisé plus tard « La Belle Epoque », la majorité d’entre eux, entièrement acquis à la notion du sublime, allaient se montrer en faveur d’un art haïtien authentique, donc contre le « bovarysme culturel ». C’était d’ailleurs l’appel qu’avait lancé le Dr Jean Price Mars dans son œuvre magistrale Ainsi parla l’Oncle, publiée en 1928.
Nos musiciens, comme ce fut le cas pour nos poètes, nos peintres, nos sculpteurs, nos danseurs, nos dramaturges et d’autres de nos artistes, allaient quêter au tréfonds de leur être le suc de notre terre pour nous amuser et sa sève nourricière pour assurer la sauvegarde et la survie de cette nation, menacée dès sa fondation par toutes sortes de vieux démons. Les Antalcidas Murat, Guy Durosier, Rodolphe « Dòdòf » Legros, Michel Desgrottes, Hulric Pierre-Louis, Félix « Féfé » Guignard, Edner Guignard, Ernest « Nono » Lamy, Destinoble Barrateau, Murat Pierre et d’autres musiciens allaient nous offrir une musique angélique conçue on dirait au fond d’un rêve délicieux. Ils furent les uns plus brillants que les autres. Cependant, l’un d’eux possédait un je ne sais quoi qui le distinguait sensiblement de ses pairs. Il s’agissait bel et bien de Pierre Joseph Raoul Guillaume, que nous appelions tous Raoul Guillaume ou familièrement Raoul.
Raoul Guillaume personnifiait le rêve et la promesse d’Haïti. Il avait fait corps avec le pays. Tout comme le Polonais ne se conçoit pas sans Chopin, l’Allemand sans Goethe, le Martiniquais sans Aimé Césaire, le Jamaïcain sans Bob Marley, le Français sans Charles Aznavour, le Brésilien sans Pelé et l’Argentin sans Diego Maradona, franchement, je ne peux imaginer notre pays sans Raoul Guillaume. Et pourtant, le dimanche 29 novembre dernier, l’Eternel, l’architecte de la vie, a mis notre pays dans une stupeur blême. À midi trente, en ce jour, il nous a frappés d’un grand deuil, en nous sevrant du génie de Raoul Guillaume.
Franchement, son héritage musical, sa valeur intellectuelle et son immense contribution à l’avancement de notre société ont fait de Raoul Guillaume un être hors du commun. Il fait partie des humains qu’on aurait aimé avoir toujours parmi soi. À un moment où, chez nous, l’horizon se rembrunit chaque jour davantage et où une vague de crainte se répand dans presque tous les esprits, perdre ce bel étalon prend, selon moi, l’aspect d’un autre drame national. Il représentait ce qu’il y a de plus beau, de plus noble et de plus magnanime qu’Haïti eût pu offrir à l’espérance, ou même à l’espoir.
Pour ma part, je garde le plus beau souvenir de Raoul Guillaume. D’ailleurs, il est le premier musicien haïtien dont j’ai connu le nom et aimé la musique. Je devais avoir cinq ou six ans quand je l’ai vu pour la première fois. C’était un vendredi, peu après midi. Il sortait du magasin de Léon Bordes, au Portail Saint Joseph, tandis que ma grand-mère, qui s’y rendait à chaque fois que ses courses la conduisaient au « Bord-de-Mer », y entrait avec moi, qui revenais de l’école. Ayant connu mon aïeule depuis qu’il était gosse au Morne-à-Tuf, il la salua avec joie. D’un regard, celle-ci me demanda d’ôter mon chapeau « cow-boy » pour faire le même geste. Tandis que cet homme de belle et droite taille me tendait la main, elle m’apprit avec un air de satisfaction: « C’est lui, Raoul Guillaume, le compositeur de Joseph, morceau que tu ne cesses d’écouter. » C’est comme si j’avais rencontré un dieu.
L’homme était tout simplement merveilleux. Dieu l’avait béni d’un caractère bien trempé, qui lui a valu le respect et l’admiration tant de ceux qui ont croisé son chemin que de ceux qui l’ont simplement admiré de loin. Paul Choisil, musicien de bon goût, s’est ainsi lamenté : « Quelle perte ! Quelle tristesse ! Nous venons de perdre un trésor national, un Haïtien digne de notre respect et de notre gratitude. Il a été une référence pour l’histoire et la représentation de notre musique. » Pour Presler Julien, fils de l’ancien contrebassiste Dieudonné Julien : « Le départ de Raoul Guillaume allonge la liste des pertes irréparables enregistrées dans la culture haïtienne. Nos légendes s’en vont et il n’y a personne pour les remplacer. »
Au début du siècle dernier, Georges Clémenceau déclarait: « Une vie est une œuvre d’art. Il n’y a pas de plus beau poème que de vivre pleinement... » On dirait que le grand homme d’État français avait fait cette déclaration justement pour définir Raoul Guillaume, ce « trésor national » comme l’a si bien appelé son émule, le brillant saxophoniste Paul Choisil. Pour mieux comprendre l’œuvre artistique et la contribution immense de cet homme génial à l’avancement de notre société, je pense nécessaire de jeter un petit coup d’œil sur son arbre généalogique.
Raoul Guillaume a des liens directs avec les Simon-Sam, originaires de la Grande-Rivière-du-Nord, l’une des familles de l’aristocratie du Nord. Augustin Simon-Sam (1794 – 1886), le premier relaté par nos historiens, était l’un des hommes les plus riches de son temps. Il avait engendré une cinquantaine d’enfants naturels et légitimes. Influent, parmi d’autres postes, il était « sous-lieutenant en 1818…, commissaire chargé de la comptabilité de la maison militaire du roi Henry Ier ». (Référence : Dictionnaire biographique des personnalités politiques de la République d’Haïti, par Daniel Supplice). Plus tard, il a été élevé au rang de duc de l’Acul-du-Nord. Rappelons que l’un de ses fils, Augustin Tirésias Simon Sam, présidera aux destinées de notre nation du 31 mars 1896 au 12 mai 1902.
L’un des frères d’Augustin Simon Sam s’appelait Guillaume Simon-Sam. Ce dernier avait également une abondante progéniture. Pour une raison qui n’a jamais été révélée, il avait donné le patronyme de Simon-Sam à certains de ses enfants et celui de Guillaume, son prénom, à d’autres. Parmi ces derniers, nous en signalerons deux : Villbon Guillaume et Grand-Jean Guillaume. Le premier, mort à l’âge de 36 ans, a laissé plusieurs orphelins : Jean Simon Guillaume, le vrai nom du président Vilbrun Guillaume Sam, Arianne Guillaume Sam, Etienne Guillaume Sam, etc.
Le second, Grand-Jean Guillaume, était un intellectuel de belle eau. Vers la fin du XIXè siècle et au début de la prochaine décennie, il était l’un des principaux parlementaires haïtiens, avec Brutus Saint Victor (grand-père de mon ancien professeur de mathématiques Edner Saint Victor). Excellent clarinettiste et poète à ses heures perdues, Grand-Jean Guillaume avait fait une bonne partie de ses études classiques en France. À son retour en Haïti, il s’installa d’abord à la Grande-Rivière du Nord et fonda un orchestre philharmonique avec Louis Firmin Blot.
Bientôt, il se fixe à la rue des Miracles, à Port-au-Prince (en face des Saint Victor) et épouse Arianne Guillaume Sam, sa cousine germaine. S’installant plus tard au 40, rue Lamarre, ils ont eu plusieurs enfants. Les deux connus furent l’aîné L.J. S. Fernand Guillaume et le benjamin Sieyès Guillaume. Il est bien de noter que selon certains, ce dernier serait le neveu du parlementaire qui l’avait adopté comme son fils à la mort de son jeune frère.
En août 1902, L.J. S. Fernand Guillaume s’éteint quelques jours avant ses 18 ans. Peu après, Sieyès Guillaume est envoyé en France, plus précisément à Paris. Il achèvera ses études secondaires au Lycée Hoche, à Versailles. Il les avait commencées au Petit Séminaire Collège Saint Martial. En 1911, après la mort de son père, il regagnera Haïti.
Entre 1920 et 1924, Sieyès Guillaume épousera Francesca Hermantin, Gonaïvienne dont la famille a des origines martiniquaises. Ce couple avait sept enfants : Solange, Raoul, Roland, Yvon, Serge, Marthe et Raymond. Virtuose de la mandoline et de la trompette, Sieyès Guillaume, avec les Emile Chancy, Geffard Cesvet, François Alexis Guignard, Arsène Desgrottes, Félix « Féfé » Clermont, Fabre Duroseau, Arthur Duroseau et quelques autres jeunes de la capitale, fera partie des pionniers de fondateurs d’ensembles de danse « modernes » qui allaient remplacer les groupements formés des musiciens de nos différentes fanfares militaires.
Francesca Hermantin, dame pleine de distinction que j’ai bien connue dans mon enfance, était la sœur d’Elodie Hermantin, femme du pianiste Joseph Dor. Ils furent les père et mère, parmi d’autres enfants, de Ferdinand et de René Dor, les fondateurs, avec Pierre Riché, du Trio des Jeunes. Rappelons, surtout au bénéfice des plus jeunes, que c’est ce groupement qui allait s’agrandir pour devenir, en 1943, le Jazz des Jeunes. André Hermantin, le cousin de la mère des jeunes Guillaume et Dor, fut le premier trompettiste de ce mythique orchestre et un compositeur de méringue carnavalesque de premier ordre. Rappelons que André Hermantin a été assassiné en janvier 1961 par les sbires du régime d’alors.
C’est justement du second fils du couple Sieyès Guillaume et Francesca Hermantin Guillaume que nous allons parler - Pierre Joseph Raoul Guillaume. C’est à Port-au-Prince, plus précisément à la rue de l’Enterrement, non loin de la rue Joseph Janvier, le 7 décembre 1927, que celui-ci est venu au monde. Raoul a grandi dans un foyer où les lettres et la musique ont occupé la première place après les préceptes religieux, civiques et moraux. Il a fait ses études primaires et secondaires à l’Institution Saint Louis de Gonzague. Là, il étudiera la musique sous la direction du Frère Marie Léon, le religieux avignonnais qui, deux décennies plus tôt, avait enseigné ce même art à son père à Paris.
Paradoxalement, la musique n’a pas été le premier art à avoir conquis le cœur de l’adolescent. D’abord, à ce sujet, au cours des 317 minutes d’entretien qu’il m’a accordées entre le 18 octobre 2004 et le 31 mai 2009, il m’a dit plus d’une fois: « J’accompagnais souvent mon père dans les répétitions du groupe Les Jacobins et plus tard dans certains bals du Jazz Scott à Savoy, à Trocadeo et ailleurs. Parfois, il m’arrivait même de tomber de sommeil pendant que jouait l’ensemble. J’avais alors sept ou huit ans. Cependant, depuis cette époque, c’est la poésie qui me taquinait.»
Dès le début de l’adolescence, l’intellectuel en herbe est un familier des cercles littéraires, artistiques et mondains de la capitale. Dès l’âge de dix ans, il participe à presque toutes les manifestations culturelles offertes par la Mission Patriotique des Jeunes. Le plus souvent, celles-ci étaient organisées à l’Ecole Saint Vincent de Paul, fondée et dirigée par maître Horatius Laventure, à la rue de l’Enterrement, à une dizaine de mètres de la maison qui a vu naître Raoul Guillaume. Excellent diseur, il s’attire l’estime des grands éducateurs et intellectuels tels que L.C. Lhérisson, Horatius Laventure, André Momplaisir, Pradel Pompilus, Vianney Denerville, etc. Il y cotoie des poètes et des lettrés tels que Jean Brierre, Clovis Désinor, Pierre « Roro » Mayard, Roussan Camille, Félix Morisseau-Leroy, qui l’ont toujours admiré.
Bientôt, son talent de diseur égaiera plusieurs salons et manifestations culturelles organisées par certaines écoles de la capitale. En effet, c’est en mars 1938, à l’occasion du 80è anniversaire de naissance du brillant lettré Joseph Cadet Jérémie, que Raoul Guillaume s’est manifesté pour la première fois devant un grand public. Il récite, sur la demande de Me. Laventure, quelques strophes d’À la mémoire de Toussaint Louverture du poète Charles Moravia. L’événement a eu lieu à l’Ecole Saint Vincent de Paul.
Un peu plus tard, avec Emerante de Pradines, Martha Jean-Claude et d’autres diseurs, on l’entendra souvent sur les ondes de la HH2S ou de la HH3W dans le cadre des programmes culturels organisés par la Société des lettres et des arts d’Haïti. Ils ne furent pas des diseurs de bonne aventure. Raoul déclamera des vers d’Etzer Vilaire, de Georges Sylvain, de Justin Godefroy, de Damoclès Vieux, etc. Il m’a dit une fois: « Inspiré par ces grands poètes, dès l’âge de treize ou quatorze ans, j’ai commencé à écrire mes premiers vers. »
Raoul Guillaume allait s’orienter ensuite vers le monologue, genre théâtral dont, au début du siècle dernier, le poète Massillon Coicou était le maître incontesté. Quelques années plus tard, Clément Coicou, dit Papa Youtt, et Théophile « Zo » Salnave deviendront des idoles pour la jeunesse port-au-princienne. Ils inspirent Raoul qui, une fois de plus, comme Emerante de Pradines, sera souvent l’invité de l’émission L’Heure de l’Art Haïtien de Clément Benoît.
Toutefois, le démon de la musique le chatouille fort. Il ne peut s’y échapper, car cet art occupait une place spéciale chez les Guillaume qui, au milieu des années 1930, allaient déménager au 240 de la rue du Centre. Plusieurs facteurs allaient contribuer pour de bon à l’engouement du jeune Raoul pour la musique. D’abord, presque tous les jours, se croisent chez lui les musiciens de toutes tendances. Les Jules Héraux, Lyncée Duroseau, Augustin Bruno, Luc Jean-Baptiste et d’autres ténors de la musique savante haïtienne et les Annulysse Cadet, Antoine Hilaire, Antoine Radule, Joseph « Kayou » Franck et d’autres as de la musique populaire se disputent pour partager le temps de Père Guillaume, chef de bureau au Département de l’Agriculture.
Un deuxième facteur de taille allait inspirer durablement le jeune Raoul Guillaume. Entre 1936 et 1937 (il a neuf ou dix ans), l’immortel et génial compositeur Augustin Bruno vient habiter près de chez lui, à la rue du Centre. Celui-ci, tant pour ses bonnes manières que sa virtuosité musicale, devient l’idole de tous les gens du quartier : enfants, adolescents, adultes et, surtout, les aspirants musiciens. Le maestro défunt m’a toujours raconté: « Mes cousins Ferdinand et René Dor et moi passions des heures sur la galerie d’Augustin Bruno pour l’entendre pratiquer sa clarinette. C’était un homme de bien. Il nous donnait gratuitement des leçons de musique. En fait, il fut le premier musicien haïtien qui m’a vraiment impressionné et énormément influencé. »
L���heure pour Raoul de s’initier de manière formelle à la musique est enfin venue. Il est en neuvième. On le voit dès l’année scolaire 1937- 1938 à la « La Petite Musique », la classe d’initiation à la musique à l’Institution Saint Louis de Gonzague. Sous la direction du Frère Marie Léon, il apprend la lecture musicale, le solfège et l’harmonie. L’année d’après, il s’essaie d’abord à l’alto, puis se tourne vers le saxophone alto, dont il fera son instrument de prédilection. En 1940, il était déjà admis à « La Grande Musique », la salle où se tenaient les séances de répétition de la fanfare de cette école où il a fait ses études primaires et secondaires.
Raoul Guillaume était un homme admirable, partisan d’une société juste. En dépit de sa position sociale favorisée, il a toujours été proche du peuple défavorisé, marginalisé et ostracisé depuis le parricide perpétré le 17 octobre 1806 au Pont-Rouge. Il peut répéter avec fierté cet aveu sincère de l’immortel poète martiniquais Aimé Césaire : « J’ai baigné dans le peuple. J’ai passionnément aimé le peuple. Je l’ai aimé physiquement. Je l’ai aimé dans ses poèmes. Je l’ai aimé dans son folklore, et dans ses mots aussi…» Comme les Jacques Roumain, Jacques Stéphen Alexis, Yvonne Hakim (future Rimpel), René Dépestre, Anthony Phelps, Carl Brouard, Magloire Saint Aude, Lina Mathon (future Fussman, puis Blanchet), Gérald Bloncourt et d’autres jeunes aisés de notre société, de très tôt, Raoul Guillaume a cherché à communier avec ses frères. Futur travailleur de l’esprit, il a donc cru en ce cri de Mao : « Seul le peuple est artiste ! » et en celui de l’ancien président Leslie François Manigat : « Le peuple est le vrai détenteur de la culture haïtienne. »
Et comme, très jeune, Raoul Guillaume a charnellement aimé cette merveilleuse culture haïtienne! Bientôt, il sent que l’instruction qu’il reçoit du Frère Léon, bien que solide, nécessaire et utile, est incomplète. Il en manquait, selon lui, ce qu’il y a de plus essentiel: la connaissance de la culture populaire de son pays. Il commence alors à se rebeller contre un système qui aurait fait de lui ce que, plus tard, Frantz Fanon appellera « peau noire, masques blancs ». Bien que sensible à la musique de Bach, de Beethoven, de Mozart et des autres géants de la musique occidentale et à la poésie de Lamartine, de Vigny et de Victor Hugo, son âme haïtienne réclamait vivement la musique faite par les Annulysse Cadet, Albéric Samedi, Hubert François et saluait le génie poétique des artistes « intouchables » dont l’histoire n’a su retenir les noms.
Dès l’âge de 15 ou 16 ans, en pleine campagne anti-superstitieuse, comme presque tous ses jeunes camarades du Morne-à-Tuf – les Baron, les Malette, les Prophète, les Bartoli, les Sabala, les Erié, les Bouchereau, etc. –, Raoul Guillaume refuse de rejeter notre folklore. Alors, il commence à fréquenter les « bals criminels » organisés chez Miracule Joseph au Portail Saint Joseph ou chez Hermann Petit-Homme à Lakou Bréa et à d’autres endroits de nos quartiers populaires. Là, au son de « jazz endiablés » et des tambours indescriptibles de Raymond « Ti Roro » Baillergeau, de Labbé, de Pipirit et d’autres artistes anonymes, il danse à cœur joie des morceaux populaires tels que L’amiral, Twou panno, Kay Madan Bruno, Madan Minan tèt kokolo, Pye-m pa touche tè, Balanse Yaya, etc. Et ce furent justement ces deux expériences diamétralement opposées – les études musicales à Saint Louis de Gonzague et les divertissements populaires - qui allaient influencer plus tard l’œuvre magnifique, impeccable et irréprochable de Raoul Guillaume.
L’univers musical de Raoul Guillaume est maintenant plus élargi. Il évolue comme saxophoniste alto à la fanfare de son institution scolaire. S’il joue à côté des Ernest « Nono » Lamy, Roger Savain, Serge Lebon et d’autres devanciers, Guy Durosier, son benjamin de cinq ans, est celui qui deviendra son complice musical. Sur ce, je préfère laisser parler le maestro lui-même: « À l’Institution Saint Louis de Gonzague, il nous était interdit de faire de la musique populaire. Or, Guy et moi aimions ce genre de musique, en particulier la méringue haïtienne. Nous avions pris l’habitude de nous échapper à la vigilance des Frères pour aller plaire aux jeunes filles de l’école Sainte Philomène dirigée par les sœurs Dupé, en jouant des airs du terroir... C’est à partir de cette période que Guy et moi avions commencé à nous adonner à la musique populaire. » (Entrevue de Louis Carl Saint Jean, LCSJ, avec Raoul Guillaume, Lundi 18 octobre 2004).
Un autre bonheur allait se poindre pour Raoul Guillaume. Vers la même époque – nous sommes en 1944 -, Charles René Saint Aude, clarinettiste de La Musique du Palais et maestro du Jazz des Jeunes (alors un sextette), vient habiter presque en face des Guillaume, toujours à la rue du Centre. Dans les salons du maestro-militaire, se tiennent les séances de répétition de ce groupe. Raoul Guillaume m’a souvent dit : « J’assistais à presque toutes les séances de répétition du Jazz des Jeunes. Cela m’avait permis de me familiariser davantage avec la musique populaire et de connaître par cœur le répertoire du Jazz des Jeunes. En plus, je suivais ce groupe un peu partout : chez les Baron, à la rue du Champ-de-Mars, chez les Florus, à la rue de la Réunion, chez les Charlier au Chemin des Dalles, chez Acès Magnan à l’avenue Bouzon, etc. De très souvent, je remplaçais au pied levé à la clarinette le maestro Saint Aude qui s’absentait surtout les dimanches soir pour aller jouer au concert que donnait La Musique du Palais sur le Kiosque Occide Jeanty, au Champ-de-Mars. »
Cette heureuse initiative allait porter ses fruits. Au cours des premiers mois de l’année 1946, Issa El Saieh assiste à un bal du Jazz des Jeunes organisé dans les salons de Mme Démosthènes Brignolle, à l’Avenue Bouzon. Ebloui par le talent du jeune saxophoniste, le maestro petit-goâvien s’informe à son sujet. Apprenant qu’il fréquente Saint Louis de Gonzague, il demande à Serge Lebon, membre fondateur de son orchestre et ami du jeune musicien, de contacter celui-ci. C’est ainsi que Raoul Guillaume a intégré l’Orchestre Issa El Saieh. Il avait remplacé Raymond Mevs, qui, lui, jouait le soprano. Il avait 18 ans et se trouvait en classe de Rhéto.
Le choix d’Issa El Saieh allait se révéler judicieux. À ce sujet, il m’avait confié: « L’intégration de Raoul Guillaume dans mon orchestre a été une bénédiction. En dépit de sa jeunesse, comme exécutant, il s’était montré à la hauteur de saxophonistes chevronnés tels que Victor Flambert et Ludovic Williams. En plus, remarquant son sérieux et sa discipline, bien qu’il fût encore adolescent, je lui ai immédiatement confié l’administration complète de l’ensemble. Et il s’était montré à la hauteur de la confiance que j’avais placée en lui. D’ailleurs, lorsque j’avais remis sur pied mon orchestre, c’est chez ses parents que je faisais les répétitions. » (Entrevue de Louis Carl Saint Jean avec Issa El Saieh, Vendredi 10 juin 1994)
Fin de la première partie
Louis Carl Saint Jean
Lundi 30 novembre 2020
HAÏTI ⭐
LEGENDS
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Slow Burn, BatB fic, StanFou, chap 7
Il y a quinze ans...
La charrette arriva devant la maison vide, devant plusieurs villageois. Clothilde marmonnait dans sa barbe « Des parpaillots… Qui n’iront même pas à l’office avec nous… Je ne les saluerai pas. »
Les Laurent n’étaient pas loin. Stanley s’accrochait aux jupes de sa mère. C’était la maison de Gervais. Et ces gens l’avaient prise. Il ne le leur pardonnerait jamais.
Le père Robert sourit aux nouveaux arrivants et donna la main à la dame pour l’aider à descendre.
- Bonjour et bienvenue à Villeneuve, mes amis.
Le couple parut fort étonné d’un tel accueil de la part du curé, mais sourirent et répondirent à son salut.
- Bonjour mon père, et merci. Nous sommes les Durand. Je suis Thérèse, et voilà mon mari Michel. Et voilà nos enfants : Samuel et Renée. Venez dire bonjour, les enfants !
Stanley vit alors un petit garçon et une petite fille descendre de la charrette, aidés par leur père. Le petit garçon avait une dent en moins, et de beaux yeux noirs. La petite fille était plus jeune, ses cheveux bouclés étaient séparés en deux couettes retenues par des rubans blancs, et elle avait une jolie poupée dans les bras. Le père Robert les salua chaleureusement. Madame Laurent fit un signe de tête à son mari et ils s’approchèrent.
- Bonjour ! Je suis Eliabel Laurent, la modiste. Voilà Guillaume, mon mari.
- Bonjour ! Je suis le drapier. Nos boutiques sont juste là, fit le père de Stanley en désignant les deux façades à vitrine, de l’autre côté de la place.
- Et voilà nos deux fils, Richard et Stanley, et nos trois filles. Élise, Éloïse et Eliana.
Dick s’approcha, en attrapant le collet de Stanley pour le forcer à s’approcher. Il souffla à l’oreille de son cadet « dis bonjour ! », et l’enfant obtempéra de mauvais gré. Les triplées firent une petite révérence avec un sourire irrésistible.
Mais il se sentit rougir quand le petit garçon lui sourit largement en lui rendant son salut. Les quatre fillettes se mirent à jouer ensemble sans plus de cérémonie, courant et riant sur la place.
- J’ai apporté une tarte aux blettes ! Annonça la modiste en tendant à la femme un plat enveloppé dans un torchon. Pour que vous n’ayez pas à vous soucier du repas de ce soir.
- Et nous prêterons nos bras pour vous aider à remonter vos meubles ! Annonça Guillaume.
Le couple rosit de plaisir.
- Oh, nous ne pouvons accepter…
- Bien sûr que si ! Nous savons ce que c’est de s’installer dans une nouvelle maison. Et à plusieurs mains, ça ira plus vite. Vous voulez que je garde les enfants pendant ce temps ?
- Et je ne suis pas seul, Dick n’a pas les mains dans les poches, il a de la ressource ! Lança Guillaume, approuvé par son aîné.
- J’aiderai aussi, renchérit le prêtre en retroussant ses manches.
- Mais… Mon père, nous ne sommes pas…
- Catholiques ? Qu’importe ! Tous les nouveaux arrivants sont les bienvenus ! Allons ! Faites-nous plaisir en acceptant notre aide !
Le couple se regarda, puis accepta en souriant. Plusieurs badauds se mirent à imiter les Laurent, et commencèrent à décharger la charrette. Si même le prêtre n’était pas gêné par la différence de religion des nouveaux venus, on ne pouvait se faire plus royaliste que le roi… Eliabel rentra avec Thérèse et les fillettes, qui envahirent aussitôt la chambre des filles et jouèrent à la poupée. Samuel et Stanley se retrouvèrent à peu près seuls.
- Tu as l’air triste, constata Samuel.
Stanley hocha la tête.
- C’était la maison de mon ami. Il est parti pour une autre ville.
- Ah…
Instant de silence. Samuel regarda Stanley.
- On joue ?
- J’ai des épées à la maison.
- Des vraies ?
- Non, en bois. Mais je sais me battre !
- Montre-moi ! S’écria le garçon.
La glace était rompue. Stanley apporta deux épées en bois, et les deux enfants jouèrent avec entrain. L’aide plus ou moins spontanée de quelques solides gaillards permit aux Durand d’être meublés en moins de trois heures. Les dames s’occupèrent de nettoyer et d’accommoder tentures, rideaux, ranger les vêtements dans les armoires, etc.
Le soir venu, les Durand remercièrent chaleureusement les villageois venus les aider et les Laurent rentrèrent au logis.
Guillaume ébouriffa les cheveux de Dick.
- Tu n’as pas les deux pieds dans le même sabot, mon garçon ! Tu es fort comme un bœuf !
- Merci papa.
- Et toi, Stanley ? Tu les trouves comment, les nouveaux voisins ?
- Oh, ils sont bien, fit l’enfant d’un ton qui se voulait détaché.
- « Bien », seulement ? Toi et Samuel, vous avez joué toute la journée !
- Il est gentil, concéda Stanley d’un air boudeur.
Guillaume et Eliabel se regardèrent. Leur cadet allait peut-être surmonter son chagrin plus vite que prévu, en fin de compte.
OoO
Sept ans plus tard…
Stanley sortit en maugréant de sa maison.
La semaine avait mal commencé. Les nouvelles de la guerre étaient mauvaises. On parlait de batailles sanglantes, et les Laurent, comme les Déroulède, comme quasi-toutes les familles de Villeneuve, tremblaient pour l’être cher qui servait sous les drapeaux. Dick était parti depuis quatre ans déjà, laissant Magdeleine et leurs enfants aux bons soins de ses parents, et Stanley ressentait avec une acuité affreuse l’absence de son grand frère. D’ordinaire, il écrivait avec abondance, une lettre arrivant au courrier au moins deux fois le mois pour ses parents, sa femme et parfois son cadet, mais ces derniers temps, ses courriers s’étaient raréfiés, raccourcis. De temps à autre, une tache de boue souillait le papier et l’adolescent craignait toujours que ce soit du sang séché. Partagé entre l’admiration pour le courage de Dick et la peur affreuse d’une mauvaise nouvelle, Stanley se faisait un souci terrible, partagé par sa famille.
Eliana, Élise et Éloïse cherchaient à distraire leur inquiétude en se plongeant à corps perdu dans les falbalas et la toilette, ou en harcelant leur frère sous couvert de le seconder dans son rôle d’homme de la maison, lorsque leur père s’absentait pour ses affaires.
Dernièrement, les triplées s’étaient mis en tête de lui trouver une fiancée. Et Stanley haïssait qu’on se mêle ainsi de ses affaires. Elles l’avaient accablé de recommandations, vantant les qualités de l’une, la beauté de l’autre, sans lui laisser en placer une. Il avait finir par sortir en trombe de la maison après leur avoir crié de le laisser tranquille. Marcher lui ferait du bien. Ses pas le conduisirent à la ferme des Durand. Samuel était en train de nettoyer le poulailler, il lui fit de grands gestes.
- Eh, Stan !
Les deux garçons bavardèrent longuement pendant que le jeune homme achevait sa tâche. Samuel alla se laver un peu avant de s’affaler sur le tas de foin où Stanley s’était assis.
- Elles sont bizarres, tes sœurs. Pourquoi te demander de choisir une femme maintenant ?
- Elles veulent que je me marie, je ne sais pas pourquoi. Déjà, c’est trop tôt ! Je n’ai que quinze ans ! Et puis… Ça ne m’intéresse pas, moi, d’avoir une femme.
- Moi, dit Samuel d’un ton qui trahissait un long passé de réflexion sur la question, je trouve dommage qu’on ne puisse épouser qu’une personne à la fois. Je ne pense pas que j’arriverais à n’en aimer qu’une seule. Et pourquoi se limiter aux filles, d’ailleurs ? Il y a des garçons que j’aurais bien épousés, aussi !
Stanley rougit violemment à cette réflexion.
- Heu… Mais, heu… Ton église et la mienne…. Ne trouvent pas ça bien…
- Oui. Et c’est dommage. Franchement, quel mal il y aurait à épouser un homme ? Deux fois plus de bras pour faire les gros travaux. Et puis, il y a des garçons qui sont aussi beaux que des filles, et je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas les courtiser aussi. Toi, par exemple, tu es très beau, fit Samuel en mâchouillant un brin de paille, l’air de rien.
Il sourit en voyant le trouble croissant de Stanley. Il s’approcha de lui, avec un air à faire des confidences.
- Tu sais quoi ?
- Quoi ?
- J’ai embrassé un garçon la semaine dernière. Un du village d’à côté.
Stanley était de plus en plus troublé. Le cœur battant, il avait du mal à suivre son propre fil de pensée face à l’immensité du champ des possibles que venait d’ouvrir Samuel devant ses yeux.
- Oh ? Et, heu.. C’était… C’était comment ?
Samuel se rengorgea.
- Oh, c’était bien. Différent d’avec les filles. Il avait un peu de barbe qui piquait, et il serrait plus fort dans ses bras.
- Je vois, murmura Stanley, l’air absent.
- Tu as déjà embrassé des filles ?
- Heu, oui, une ou deux.
- Et des garçons ?
Stanley jura que le village entier l’avait entendu déglutir. Samuel, étendu à côté de lui dans la paille, le regardait avec des yeux à demi-clos, un petit sourire entendu sur les traits.
- Ça te dirait d’essayer ?
Stanley ne savait même pas comment dire oui. Il se contenta de hocher la tête, pris de vertige.
Samuel se redressa, s’approcha de Stanley, qui était assis, raide comme un piquet. Il le prit par les épaules, ôta un brin de paille de ses cheveux, et posa les lèvres sur les siennes.
Stanley crut défaillir. Si les baisers qu’il avait échangés du bout des lèvres avec quelques filles ne lui avaient laissé qu’un souvenir médiocre, celui-là le transporta quasiment dans un autre monde. Ses bras se levèrent automatiquement pour s’enrouler autour du cou et du dos de Samuel, et il inclina la tête sur le côté pour que leurs nez ne se cognent pas. Samuel approfondit le baiser et fut surpris du son qu’émit Stanley, mi-gémissement mi-cri de surprise, avant de s’accrocher à lui comme si sa vie en dépendait. Surpris et très, très excité. Leurs langues vinrent à la rencontre l’une de l’autre et se mêlèrent, sans grâce, mais avec passion.
La main de Stanley s’accrocha dans les cheveux de Samuel et pressait leurs deux têtes l’une contre l’autre, tandis qu’il lui dévorait la bouche avec une frénésie désespérée. Il poussa un autre cri de surprise quand Samuel lui attrapa une fesse tout en insinuant un genou entre ses cuisses. Il avait une érection monumentale qui menaçait déjà de tacher son pantalon. Stanley sentait que se profilait à l’horizon l’orgasme le plus violent de sa courte vie. Encore quelques secondes et...
- Samuel ? Où es-tu ? Cria une voix lointaine.
C’était son père qui l’appelait.
L’enthousiasme des deux garçons fut douché en un temps record. Ils se séparèrent aussitôt et s’époussetèrent pour retirer les brins de paille accusateurs.
- Je suis dans la grange, papa ! Je déplace le foin !
- Mais c’est trop lourd pour toi !
- Ne t’inquiète pas, j’y vais à mon rythme !
- Tu es sûr de ne pas avoir besoin d’aide ?
- Certain papa. Je nourrirai les chevaux tout à l’heure.
- Bon garçon. Ta mère me fait dire que le dîner est prêt dans une heure !
- Oui papa !
Stanley se redressa comme un automate, se dirigea vers l’auge que Samuel venait de remplir pour les chevaux, et y plongea sa tête entière. Samuel le regarda faire un peu stupidement avant de s’inquiéter du temps qu’il passa sans respirer. Le jeune homme finit par sortir la tête de l’eau, ruisselant, mais calmé. Il s’essora les cheveux et s’essuya la figure avec la manche de sa veste.
- Pourquoi tu as fait ça ? Demanda Samuel, éberlué.
- Parce que je préfère encore me balader les cheveux mouillés qu’avec un chapiteau dans le pantalon, répliqua Stanley.
Le jeune fermier eut un regard amusé.
- Je ne pensais pas te faire un effet pareil.
- Moi non plus, en fait.
Silence.
- Tu voudrais qu’on recommence, plus tard ?
- Tu es libre quand ? Demanda Stanley, l’air avide.
- Je pense que je pourrais arranger le coup samedi prochain, à la tombée de la nuit. Tu pourrais me rejoindre ici ?
Stanley hocha la tête.
- J’y serai.
OoO
Il en fut ainsi pendant quelques mois. Stanley faisait régulièrement le mur pour aller retrouver Samuel, et ils volaient quelques heures en étreintes maladroites, baisers affamés et cris étouffés. Stanley sentait qu’il commençait à s’attacher, et que c’était un gros, gros risque. Cette petite histoire prit fin un beau jour, quand Samuel décida d’ajouter la fille du savetier à son tableau de chasse. Stanley n’était pas aussi enclin à partager son amoureux et son amour-propre souffrait de voir que visiblement, ses charmes ne suffisaient pas à retenir le cœur du jeune homme. Il finit, un soir, par s’expliquer auprès de Samuel, qui prit relativement bien la chose. Ils se serrèrent dans leurs bras, jurèrent de rester amis et rentrèrent chacun de leur côté. Stanley pleura en cachette pendant quelques semaines, puis finit par reprendre le cours ordinaire de sa vie.
Les trois années suivantes se passèrent, entre inquiétude pour Dick, qui parvenait de temps à autre à obtenir quelques jours de court répit au village, apprentissage chez le tailleur du village voisin et tentatives infructueuses de trouver un nouvel amoureux. Soit les candidats manquaient, soit il ne savait pas les voir. Stanley n’avait guère à se mettre sous la dent que des souvenirs qui commençaient déjà à décolorer et la triste perspective d’une échappatoire par un mariage classique, une fois adulte, qui le rendrait, il le savait déjà, infiniment malheureux. Tout pesé, mieux valait la solitude que partager son lit avec une pauvre fille qu’il ne parviendrait pas à rendre heureuse, elle non plus ! Le travail lui donnait au moins l’occasion de se focaliser sur autre chose. Au cours des rares permissions de Dick, il s’était exercé à prendre ses mesures et pour s’entraîner, avait quasiment refait la garde-robe de son aîné pendant son temps libre. Son maître le félicitait souvent pour sa rigueur et sa méticulosité, et l’assurait qu’il serait un excellent ouvrier sous très peu de temps. Cette perspective rassurait Stanley, qui se disait qu’au moins, il réussirait professionnellement, ce qui était toujours ça de pris.
Il pensait que sa vie sentimentale, en revanche, se profilait comme un océan de triste solitude et de vide existentiel, jusqu’au jour où la fin de la Guerre de Sept Ans sonna le retour des hommes du front. Dick et Tom le forgeron rentrèrent les premiers et furent acclamés –Tom était un excellent ami de la famille Laurent-, mais le lendemain, un triomphe fut réservé à Gaston, le capitaine.
Cependant, ce jour-là, Stanley aurait été bien incapable de dire si ce Gaston était un homme, une armoire ou un cheval… Il n’avait d’yeux que pour le Plus Bel Homme du Monde qui chevauchait à ses côtés. Ses sœurs se pâmèrent d’extase devant le capitaine, Stanley regrettait de ne pouvoir en faire autant devant le lieutenant.
Dans les premiers jours, les premières heures de leur retour, il grappilla avec voracité le moindre renseignement sur le nouveau venu ; son nom, sa famille, où il demeurait, ce qu’il avait fait… Il s’étonna de reconnaître l’adolescent replet qui n’avait pas plus que ça capté son attention, plusieurs années auparavant. La perfection absolue qu’était cet homme à ses yeux l’empêchait d’aller lui adresser la parole. Lui, Stanley, simple apprenti tailleur, ne pouvait décemment déranger Mr Le Folliet pour le prétexte futile d’entendre le son de sa voix !
Il fallut un heureux coup du sort et la première sortie de ses sœurs à la taverne pour l’approcher de plus près. Stanley avait été assigné comme chaperon, et eut fort à faire lors de cette soirée. Dick avait, charitable, pris le relais pour quelques minutes. Du reste, elles étaient faciles à retrouver, elles étaient toujours au même endroit : suspendues aux lèvres du capitaine. Stanley allait mettre à disposition ce temps de répit pour s’offrir une bière. Mais lorsqu’il se retourna pour surveiller ses sœurs, il sursauta en voyant devant lui Mr Le Folliet. Qui lui souriait.
- Bonsoir ! Oh, tu dois être le frère de Dick Laurent ! Dit-il en lui tendant la main.
Stanley, au bord de l’apoplexie, arriva à grimacer un sourire et serrer la main devant lui. Ce n’était pas une voix. Aux oreilles de Stanley, c’était des chœurs angéliques, doux comme une caresse.
Ce sourire avec les dents du bonheur, c’était une vision du paradis.
- Bonsoir… Oui, je suis le frère de Dick. Je suis…
- Stanley, c’est bien ça ?
Stanley luttait pour ne pas couiner de façon hystérique. Il connaissait son nom !!
- Oui, c’est exact.
- Ton frère ne tarissait pas d’éloges sur toi. Il nous a souvent parlé de toi. Tu étais jeune, encore, quand nous sommes partis. Tu es tailleur, il paraît ?
- A… Apprenti encore, précisa Stanley, avant de le regretter. Mr Le Folliet allait le prendre pour un gamin !
- Je suis sûr que tu feras un excellent tailleur ! Moi, je suis Étienne Le Folliet, mais tout le monde m’appelle LeFou.
- Le… LeFou ?
- Oh, c’est un surnom que j’ai gagné à l’armée ! Tu as des projets pour l’avenir ?
- Ah, heu.. Hé bien… Eh bien je pense que dès que je serai devenu tailleur, je resterai auprès de mes parents pour travailler avec eux. J’aime travailler en famille.
- C’est admirable ! Je pense que j’en aurais fait autant s’il m’en restait une.
Stanley sentit un élan de compassion le traverser. C’était vrai qu’il avait perdu ses parents jeune, par la faute d’une épidémie de fièvre, et que son aïeule avait trépassé pendant son adolescence.
- Mais trêve de mélancolie, c’est la fête ce soir ! Dit LeFou en lui adressant un sourire éblouissant.
Stanley lui sourit aussi, par mimétisme, et l’espace d’un instant, se crut réduit dans l’univers à l’ombre des deux délicats points de perfection que formaient les fossettes sur les joues de LeFou.
- LeFou ! Tonna une voix de l’autre côté de la taverne.
LeFou se retourna et appela :
- J’arrive, Gaston !
Puis retournant à Stanley :
- Eh bien, à bientôt Stanley.
Il repartit, deux bières aux mains, laissant Stanley sur un petit nuage.
Ce soir-là, Stanley étouffa ses gloussements dans son oreiller, euphorique. Cela ne dura pas. Car Stanley eut rapidement conscience du redoutable concurrent dans les affections de LeFou, en la personne de Gaston lui-même. Déjà, on s’étonnait de la relation étrange entre les deux hommes. Ni l’un ni l’autre n’était marié, et ils menaient encore une vie de régiment : levés aux aurores, patrouillant aux alentours du village régulièrement, Gaston et LeFou s’étaient imposés comme une sorte de milice privée au sein du village. L’hiver qui suivit leur retour fut très rigoureux et le pain vint à manquer. Gaston s’employa alors à chasser voracement dans les bois et rapporta régulièrement des proies dont la chair et la peau furent mis à contribution pour nourrir et réchauffer les habitants. Des bandits, poussés par la misère, avaient tenté un raid pour voler les provisions du village, mais le Duo, comme on commençait à les appeler, établit un plan d’action et chassa les importuns, leur apportant une aura supplémentaire. Ils persistèrent dans leurs efforts en escortant les expéditions pour aller couper du bois de chauffage dans la forêt. Cet hiver-là, ils avaient sauvé les plus vulnérables, dont la fille bien-aimée du patron de la taverne. Celui-ci fit peindre le portrait du héros sur ses murs, asseyant la réputation de Gaston dans tout Villeneuve.
Encore peu sûr de ses charmes et de ses capacités, mal servi par sa timidité naturelle, Stanley se vit contraint de se couler dans le modèle du soupirant de loin, n’osant adresser la parole qu’épisodiquement à l’objet de son affection, sans se rendre totalement compte que ce dernier faisait exactement la même chose pour la vedette de la ville.
Il en fut ainsi pendant les cinq années qui suivirent. Stanley gardait soigneusement le secret de son inclination envers LeFou, et rapidement il prit l’entière mesure du poids que celui-ci représentait. Il n’avait personne à qui en parler, que ce soit pour s’attrister des périodes où il ne parvenait pas à capter son attention, ou pour s’extasier d’un échange de bons mots ou d’un geste. Il n’osait pas partager cela avec Samuel, avec qui ses relations, quoique cordiales, s’étaient allongées d’une salutaire indifférence pour faire passer l’épreuve de son mariage. Dick ? Il n’osait ! Stanley ne savait pas les opinions de son frère en particulier et de sa famille en général sur les gens de sa, disons, condition, et l’amour qu’il portait à son frère, ajouté à sa crainte, l’empêchaient de s’épancher auprès de lui. Plutôt s’arracher un membre que de perdre l’affection de Dick ou de quiconque de sa famille.
Assez vite, l’amabilité naturelle de LeFou et les nombreux gestes de gentillesse qu’il avait envers les habitués de la taverne, dont Stanley faisait partie avec Tom et Dick, lui firent gagner dans le cœur du jeune homme des marques d’une attirance de plus en plus forte. Le coup de foudre n’avait pas changé d’intensité, et tout ce que pouvait faire ou dire LeFou était merveilleux au regard énamouré de Stanley. Quelle torture cela pouvait être de ne pas pouvoir le dévorer des yeux quand il dansait, de feindre l’inattention quand il chantait, de se forcer à compter les fois où il osait l’aborder, et pour ne parler que de futilités ! Combien de fois il avait eu envie de lui avouer cet amour qui le rongeait de plus en plus, pour renoncer, forcément.
Stanley se prenait à imaginer des scénarios de moins en moins sages où il imaginait LeFou lui faire découvrir l’amour physique, et lorsqu’il assouvissait comme il pouvait ses pulsions les plus urgentes, il se sentait écrasé de solitude, en songeant que l’objet de sa tendresse n’était même pas au courant de ce qu’il ressentait.
Stanley lui-même ne savait quelle avait été la goutte d’eau qui avait rendu cette situation insupportable, après plusieurs années passées à contenir ses sentiments aux yeux de tout le monde, famille, amis et LeFou inclus. Était-ce cette énième fois où il avait vu Gaston entourer les épaules de LeFou d’un bras possessif ? Était-ce ce soir où il avait vu une voyageuse lorgner sur LeFou d’un air gourmand et se dire qu’il n’aurait aucune chance face à cette rivale ? Était-ce à cause de cette discussion avec ses parents où ils parlaient de lui acheter ou lui louer une petite maison, une fois qu’il serait marié ? Il ne pouvait le savoir. Mais ce soir-là où la boisson lui avait enfin fait avouer ses sentiments à LeFou, Stanley avait simplement renoncé à vivre plus longtemps ce calvaire.
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