#PARTICULIÈREMENT maman
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isopode · 2 years ago
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jsais que jretombe en dépression quand jme met à écouter du pierre lapointe en boucle comme si j'étais encore au secondaire
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e642 · 3 months ago
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J'ai un rapport très particulier à la maladie que ce soit pour moi ou pour les autres. J'ai été un enfant peu malade, une ado peu malade et une adulte peu malade. À chaque fois que je l'ai été, c'était grave. Je ne crois même pas avoir eu une gastro dans ma vie, c'est dire. J'ai aussi été élevée avec des parents stricts niveau douleur. Je ne me plains pas quand j'ai mal parce que mes parents m'ont toujours dit que ça passerait et que j'aurais toujours un jour au moins encore plus mal. Puis ma mère est tombée malade du cancer quand j'étais au collège et ça ne s'est jamais arrêté. Ça a marqué un tournant à la maison, celui de dire "rien n'est grave tant que tu n'as pas un cancer". C'est devenu la limite. Ça a renforcé la résistance et le silence face à la douleur. Comment se plaindre à quelqu'un qui a un cancer ? Comment avoir pire ? La douleur est risible pour ma maman et mon papa a toujours voulu une fille "pas faible" car c'est bien connu, les filles sont pleurnichardes, vulnérables, plaintives. En attendant, j'ai rarement vu plus faible qu'un homme face à quoique ce soit qui frôle son intégrité physique mais passons. Le fait que mes parents aient toujours été sévère pour ça m'a rendu sévère, j'ai du mal à tolérer la douleur physique des gens. Au delà de tout ça, si j'ai autant de mal à supporter c'est que j'ai peur, la maladie des autres m'angoisse, peu importe ce que c'est parce que j'ai toujours extrêmement peur que ce soit grave. Quand j'ai vu ma mère passer d'un mal aux côtes à un cancer, je me dis que ça va vite, trop vite alors j'ai une escalade d'angoisse et je suis très redflag pour ça. Je peux être très oppressante, j'ai besoin de savoir le moindre détail, je peux être très injuste, j'ai peur d'être bloquée par la maladie des autres. J'ai jamais eu peur d'attraper quoique ce soit c'est pas la contagion le pb. En plus de ça, j'en parle très p un souvent car c'est une relation qui m'a traumatisée mais quand j'avais 18 ans, je suis sortie avec un mec de 28 ans bien 6 mois et je n'ai jamais plus vécu quelque chose d'aussi toxique. Pour illustrer, 5 ans après, je n'ai presque plus aucun souvenir avec lui tellement ça m'a affectée pas dans mon amour à l'autre mais dans le respect, les hommes, la violence. Et justement, ce garçon est tombé bien malade au milieu de la relation et il en jouait beaucoup et ça a décuplé mon côté inquiétude extrême des autres. J'ai beaucoup souffert de la violence psychologique et même physique avec lui mais particulièrement de cette période de maladie qui a concrétisé ma phobie. Dès que quelqu'un se plaint trop, et surtout s'il ne se soigne pas, ne fait pas en sorte d'aller mieux et m'en parle outre mesure pour jouer avec mes angoisses, ça me paralyse. J'ai peur de perdre les gens ou qu'ils aillent mal et que je sois spectatrice comme avec ma mère. Je continuerai à jamais trop me plaindre même quand j'ai vraiment mal parce que je ne me sens pas légitime. Voilà, ça c'est un de mes redflag tenaces.
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prosedumonde · 11 months ago
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Car voilà, il y a des matins, on commence à peine à vivre, on prend le vent dehors pour la première fois depuis la veille et déjà, sans raison particulière, sans aucune connaissance de ce qui va advenir, on voudrait que ça recommence. Le même matin. La même lumière. La même promesse qu’on ignore mais qui persiste. 
Sara Bourre, Maman, la nuit
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90sb-tch · 23 days ago
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Un de nos élèves est décédé subitement. Elève dont j'ai été professeure principale l'an passé, dont j'ai rencontré la maman. Vendredi, journée particulière, les élèves ont appris l'information, entre stupeur et effondrements. Cela ne fait aucun sens de mourir à 14 ans. M. a poussé un soupir de soulagement en me voyant et m'a couru dans les bras. J'ai alors su quoi faire. Face à ça, face à eux. On a été marcher avec mes anciens 4e. Je les ai fait rire avec tout et rien, parce qu'il y a un âge où on n'a pas à porter le deuil. J'ai failli entarter une collègue qui a manifesté son mépris face à des élève qui riaient, qui dansaient (ils ont fait le choix de maintenir le cross). Qu'ils encaissent comme ils peuvent, parmi eux certains étaient très proches de N., on sait qu'ils ont mal, qu'ils auront mal, s'ils arrachent un temps de répit, un temps de soutien, un temps d'euphorie d'être en vie, qu'ils fassent putain, qu'ils fassent et pas à moitié. Ils ont 14 ans.
Ils ont été si beaux. Ils ont fait des t-shirts à son nom et organisé une sorte de marche blanche. C'était dur. On a pleuré ensemble tout au long de la journée. On était là. On était unis.
J'ai admiré les plus solides qui savaient faire preuve de bienveillance et de douceur envers les plus sensibles.
"Tu peux pleurer, tu sais." a dit une de mes merveilleuses élèves de l'an passé à une de ses amies. Passant à côté, je me suis autorisée à ajouter "Tu peux l'écouter, je pars du principe qu'elle a toujours raison."
Ils sont incroyables. C'était irréel, violent et dénué de sens. Ils ont réussi à rendre ce moment beau, fort, inoubliable.
J'espère qu'il les a vus, j'espère qu'il sait, c'était pour lui.
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swedesinstockholm · 3 months ago
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12 août
ça fait deux fois que des filles bruyantes qui parlent français passent devant moi avec leur pédalo et ça me donne envie de faire du pédalo avec quelqu'un et d'être légère moi aussi. y a pas de pédalo à une place. je crois que j'ai moins de mal à être légère quand je suis avec quelqu'un que quand je suis seule. quand je suis seule je pèse plus lourd. mais j'ai la flemme de faire des efforts pour être sociale. f. m'a dit qu'elle irait à la mer en octobre quand jo/johanna aurait des vacances, tout le monde a deux prénoms dans son entourage selon son genre du jour, j'ai dit c'est qui jo? un nouveau membre de votre polycule? (oui). je sais pas comment elle fait. l'autre jour avec n. on parlait de mon genre, je sais plus pourquoi. je lui disais que je me sentais pas particulièrement féminine et que j'aimais pas les formes de mon corps, que j'aimerais avoir un corps plus neutre. elle m'a demandé si j'aimerais utiliser les pronoms non-binaires et j'ai dit ohlala non i don't mind being a girl! c'est juste une histoire de corps. mais c'est jamais juste une histoire de corps. j'ai jamais aimé mes seins par exemple. quand ils ont commencé à pousser j'en voulais pas et je refusais catégoriquement de porter un soutien-gorge. je sais pas si c'était par refus d'avoir des seins ou par refus de grandir mais c'était un refus. maman me disait lara tu dois en mettre sinon t'auras la poitrine qui tombe, mais je préférais mettre des tshirts serrés en me disant que ça ferait le job de soutien, et maintenant j'ai la poitrine qui tombe et je l'aime pas. même si samedi soir j'ai fait un photo shoot nue devant ma webcam et je me suis excitée toute seule.
quand j'avais parlé de mon soupçon d'abus sexuel à maman elle m'avait dit que j'avais toujours eu une relation de dégoût avec mon corps. que j'avais toujours refusé de mettre des tampons par exemple. je sais pas à quel point tout ça est lié. à supposer qu'il se soit vraiment passé quelque chose. ça me fait penser à une scène de la série split où une des filles pleure pendant le sexe et puis elle raconte à son amante qu'elle est devenue lesbienne après avoir été violée par un homme. je me demande combien d'histoires de préférence sexuelle et d'identification de genre sont liées à des histoires d'abus sexuel.
hier matin je suis retournée au vide-grenier au maybachufer parce que c'est pas loin et parce que je rêve de trouver une robe en vichy rose pâle. j'en avais une quand j'étais petite. en fait mon identité de genre n'est ni féminine ni masculine, je veux juste mettre les mêmes habits et avoir le même corps que quand j'étais petite. un corps non marqué fémininement. un corps libre. libre de me promener nue. libre de bouger. non encombré par toute la gêne et le dégoût qui s'y sont nichés à l'adolescence. quand j'étais petite je pouvais danser où je voulais et le grand figement n'existait pas. je parlais à qui je voulais je chantais partout le monde était à moi. je m'en rappelle pas, mais j'imagine. c'est ce que maman me raconte. c'est ce que je vois sur les photos. n. m'a dit qu'elle se rappelait que quand elle était petite il lui tardait de grandir parce qu'elle se sentait pas libre, justement, en tant qu'enfant. et peut être que je me sentais pas du tout libre en réalité moi non plus, j'en sais rien. mais je sais que j'avais pas particulièrement envie de grandir. vers la fin de l'enfance en tout cas. enfin non, même ça c'est faussé parce que pour écrire mon texte sur l'été 2004 y a quelques mois j'ai relu le journal de mes treize ans et je disais que j'avais envie d'avoir seize ans et de rencontrer un joli garçon dans le tram et de lui donner mon numéro. donc j'en sais rien. tout ce que je sais c'est que hier au marché j'avais envie d'acheter une robe rouge laura ashley que j'aurais pu porter à six ans et un minishort en coton jaune avec des étoiles mauves clairement des années 90 et aussi des grands tshirts et des grandes chemises d'homme.
dans un documentaire d'alejandro jodorowsky dans lequel il faisait vivre à des gens une seconde naissance, il disait que les gens avec des traumas restaient parfois bloqués à l'âge mental qu'ils avaient à l'époque où le trauma s'est produit. ça m'avait paru évident. je suis une enfant de sept ans. dans ma relation avec maman, dans ma relation avec la maison, dans ma relation avec mon corps, dans mon refus de vivre ma propre vie, jusqu'à mon style vestimentaire putain.
finalement j'ai acheté qu'une chemise en vichy bleu ciel à trois euros que j'ai regretté d'avoir acheté cinq minutes plus tard en me rendant compte qu'elle était 40% polyester. après j'ai fait du pain, une lessive, je me suis rasé les jambes après plus d'un mois de jambes poilues et j'ai affronté le ménage de la salle de bain. ça va, j'en suis pas morte. maman m'a appelée pour me raconter sa journée et me parler de la météo mais jamais elle me demande ce que je fais moi ou comment je me sens. elle m'appelle juste pour me raconter ses virées au centre de recyclage et à la piscine et pour me dire le temps qu'il a fait le temps qu'il fait là et le temps qu'il fera demain. je vois ces vacances à la mer comme une bouée de sauvetage à la fin de mon été, le rêve à atteindre au bout de l'enfer, mais ma détresse berlinoise m'a un peu fait oublier que maman était toujours maman. je suis même pas en détresse en plus. je suis en apprentissage. aujourd'hui j'ai fait des progrès: j'ai pensé à prendre un snack dans mon sac, j'ai pas trop marché (j'ai pas bougé du parc), j'ai fait des longues pauses pour écrire tranquille, et j'ai trouvé des wc pour faire pipi! prochaine étape: penser à prendre une serviette pour m'allonger dans l'herbe.
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selidren · 7 months ago
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Printemps 1918 - Champs-les-Sims
5/10
Ils ont une relation assez particulière. J'ai parfois l'impression de voir un grand frère s'adresser à sa petite soeur, alors qu'ils ont strictement le même âge. C'est assez touchant quelque part. De son côté, elle tempère le caractère parfois un peu trop sévère de son frère et lui rappelle qu'il est toujours un enfant. C'est en les voyant que je regrette de n'avoir eu ni frère ni soeur. J'y pense d'ailleurs, en avez-vous vous-même ? Votre époux s'est parfois essayé à nous décrire les méandres de votre arbre généalogique, mais je ne crois pas qu'il ait déjà abordé le sujet.
Transcription :
Arsinoé « Mais bon, ne le lui dit pas, ça ne servirai à rien. Ah ! Je crois qu’on y est presque. Tu as pensé à prendre l’écharpe et le vieux chapeau de Grand-Père ? »
Marc-Antoine « Une minute… Le chapeau de Grand-Père ? Pour faire un bonhomme de neige ? Tu es sure que ce n’est pas trop… irrespectueux ? »
Arsinoé « J’ai demandé à Papa, et il pense que ce n’est pas grave. Il dit que de toute façon, plus personne n’oserait porter cette vieillerie. »
Marc-Antoine « Oui, mais de là à le laisser à la merci des éléments… »
Arsinoé « Bon, si ça te dérange tant que ça, je suis sure qu’on peut trouver autre chose. Oncle Adelphe est souvent d’accord pour nous prêter des choses. »
Marc-Antoine « Non ça ira, je ne vais pas jouer les rabat-joies. Mais tu ne te pose pas des questions sur notre grand-père de temps en temps ? »
Arsinoé « Non, pas tant que ça. Il faut dire que Grand-Mère ne cesse de nous rabattre les oreilles avec ses transactions, l’aménagement du jardin d’hiver, à quel point c’était un fils et un père exceptionnel… Parfois j’ai l’impression de l’avoir un peu connu. »
Marc-Antoine « Moi, pas du tout. Mais il avait l’air d’être quelqu’un d’exceptionnel. Grand-Mère dis que je devrai lui ressembler. »
Arsinoé « Mais tu lui ressembles déjà, c’est ce que dis Papa en tous cas. »
Marc-Antoine « Je ne suis pas sur que dans sa bouche, ce soit un compliment. »
Arsinoé « Ah heu… bah… on s’en fiche de son avis non ? »
Marc-Antoine « Wahou ! Arsinoé Le Bris se permet d’être irrespectueuse ? On devrait le faire dire à la gazette régionale ! »
Arsinoé « Oh arrête un peu. J’en ai peut-être marre que les seuls compliments que me font les adultes sont que je suis gentille et bien élevée ! Oh, mais ne répète pas à Maman que j’ai dit ça, je pense qu’elle ne serait vraiment pas contente. »
Marc-Antoine « Je serai muet comme une tombe. Grand-Mère dit que notre grand-père était très doué pour garder les secrets de la famille et que c’est utile. Donc je pense que je peux bien garder les secrets de mon héritière. »
Arsinoé « Ton héritière ? »
Marc-Antoine « Oui enfin, c’est une façon de parler. Mais dès que tu diras du mal des adultes, je serai là pour me taire et te couvrir. Tu peux compter sur moi ! »
Marc-Antoine « D’ailleurs, ça te dirait de faire quelque chose d’interdit ? »
Arsinoé « C’est à dire que… le soleil va bientôt se coucher. »
Marc-Antoine « Justement. Grand-Mère avait promis de m’emmener me promener et elle ne l’a toujours pas fait, alors que dirai-tu d’aller à l’étang pour patiner un peu ? Kléber m’a dit qu’il laissait toujours ses paires de patins là-bas pour éviter que sa mère ne les lui confisque. »
Arsinoé « C’est vrai que Kléber est malin, mais… tu es sur de toi ? On ne risque pas de se faire disputer vraiment très fort ? Et puis tu sais, Grand-Mère oublie pas mal de choses en ce moment, elle a peut-être juste besoin que tu lui rappelle de t’emmener en promenade. »
Marc-Antoine « Mais je n’étais pas en train de me plaindre ! Pas du tout ! Bon, après oui, on risque de récolter une volée de bois vert mais ça vaut le coup non ? »
Arsinoé « Bon allez, d’accord ! »
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wumisims · 18 days ago
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Je m'y oppose !
Marina conseille à Mario d'en parler aussi à Lola, car la connaissant elle risque de le prendre mal si elle ne l'apprend pas par son fils. Son premier crush d'ado, c'est important non ?!
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Mario : "D'ailleurs maman, je voulais te dire un truc."
Lola : "Tu as obtenu une bonne note pour changer ?"
Mario : "Haha trop drôle. Non, enfait j'vais inviter Sally au bal de fin d'année."
Marina *encourageante*: "Son premier crush d'ado, tu te rends compte ?"
Lola : "Euh, c'est cool. Mais j'aimerais que tu priorises tes notes. En ce moment, t'as pas le meilleur profil pour avoir le bac donc..."
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Marina : "Arrête, il fait beaucoup d'efforts ! Nos sessions de révisions se passent de mieux en mieux."
Lola : "Tu peux l'encourager et être la gentille flic, moi ça ne m'intéresse pas. Je veux que tes notes s'améliorent, sinon tu peux dire au revoir à ta Sylvie."
Le lendemain...
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C'est le dawa chez les Bialetti ! Et Marina n'en peut plus. Encore une fuite d'eau ce matin, et le buffet de la fête d'Halloween n'a pas été nettoyé. Si elle accepte de vivre dans un logement social, elle refuse de vivre dans une maison sale !
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Le meilleur ami de Mario, Josh, est souvent à la maison en ce moment, et n'aide pas particulièrement Marina à garder le salon en bon état.
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Josh : "Bonjour Marina, bien dormi ?"
Marina s'étouffe avec sa bouchée.
Marina : "Oui, oui ! "
Mario est réveillé depuis un moment, et décide de prendre de la glace pour son petit-déjeuner.
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Mario : "Josh, tu veux pas m'aider à nettoyer après ? Y'a Sally qui vient tout à l'heure."
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lefeusacre-editions · 4 months ago
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"LA MAMAN ET LA PUTAIN" (Jean Eustache, 1973), par Pierre Pigot
Le blog du Feu Sacré tenait à revenir sur l'un des événements cinématographiques marquants de cette année : la parution en vidéo de la quasi-intégralité de l'œuvre de Jean Eustache. Avec trônant au centre, ce film proustien qu'est "La Maman et la Putain".
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Alexandre lit Proust.
« Longtemps, je me suis réveillé fort tard », telle est la note proustienne parodique sur laquelle s’ouvre le magnum opus de Jean Eustache, explicitement conçu en miroir du grand œuvre du petit Marcel. Alexandre émerge d’un lit qui n’est même pas le sien, et qui reviendra régulièrement comme une matrice dont il est difficile de s’extraire : lieu-refuge, et surtout lieu des femmes, de celles qui obsèdent et qui tourmentent, parce qu’elles se refusent avec obstination à la complète transparence qui devrait, selon leur supposé maître, accompagner leur possession jalouse. La passion d’Eustache pour la Recherche devait inévitablement rencontrer le problème qui se pose à tout créateur confronté à cette cathédrale de mots, d’art et de passion : être brutalement possédé par le désir de la reproduire, pour soi-même, pour en atténuer la force presque transperçante – et s’acharner à ne pas se satisfaire d’une simple reproduction. Tout dépendait du matériau qui était à disposition du fanatique. Proust avait sa propre vie, mais qu’il avait enrichie de sucs fictionnels vénéneux pour tout exégète. Eustache, moins protégé par l’art, n’était capable de mettre au mont-de-piété du cinéma que les parts les plus sacrifiables et les plus précieuses de son existence tourmentée. Moins d’une décennie plus tard, cette transparence s’avérerait fatale – et l’on reverrait, encore et encore, Alexandre assis, torse nu, lisant la Recherche dans sa vieille édition NRF, et plus particulièrement La Prisonnière, ce catafalque du malheur amoureux qui débouche ensuite sur son volume gémellaire, hanté par le deuil – et l’on songerait qu’ici, les photogrammes exhalaient, à défaut du plus beau, du moins le monument funéraire le plus juste qui soit. « Dans quel roman te crois-tu ? », lance Gilberte (la bien nommée) à Alexandre, au début du film, alors que la volubilité irréelle de ce dernier fonctionne déjà à plein régime. Alexandre, en effet, parle comme coule la prose, artificielle, syntaxiquement cassante, généreuse uniquement en feux d’artifices blessants. Le cinéma lui offre la voix de Jean-Pierre Léaud, ses tonalités d’innocence perverse, de naïveté étudiée, de détachement anxieux, de sociabilité paranoïaque. Ses paroles sont la véritable trame de sa personnalité – à côté desquelles son apparence physique ou vestimentaire (le profil d’oiseau mélancolique et obtus, les cheveux longs, les lunettes teintées, les foulards interminables) n’est qu’une concession faite à la réalité des corps, comme le snobisme (qui adore rôder dans l’ombre mouvante du dandy) aime à en circonscrire dans la matière, ici baignée dans un noir et blanc qui se défie de son époque. Ce sont ces paroles qui auraient dû convaincre Gilberte, mais n’ont fait que la confirmer dans sa part d’univers, d’un stérile doucereux, dont elle ne resurgira plus que comme fantôme de supermarché – avec à son coté, un mari incarné par Eustache lui-même, spectre silencieux, trop conscient d’avoir placé son autoportrait dans le seul recoin dont il se sentait digne face à ce que ses propres mots parvenaient à bâtir comme beauté noire : le rayon des fruits et légumes.
Ce n’est pas un film bavard (reproche habituel), mais un film prolixe, profus, où parmi les bruits de la ville (Paris, encore capable de faire sourdre de ses entrailles pompidoliennes un parfum balzacien), bruits enregistrés comme jamais, ne cessent de défiler comme à la parade leurs adversaires de toujours, les mots. Et que ceux-ci soient employés le plus souvent comme des armes impropres, fait justement partie du jeu misérable qu’Eustache feint de célébrer pour mieux le dénoncer. Alexandre utilise le vouvoiement : c’est à la fois une marque de distanciation, une flèche de séduction, et une moquerie du langage à double-fond – de manière totalement française, son discours fleuve, son discours marathon, a moins pour but d’exprimer une opinion, que d’exciser un peu de « réalité » du monde des humains, à l’aide des tenailles du langage, pour en obtenir la maîtrise passagère. Sur ce point, Alexandre est fidèle à l’adage védique, qui affirme que « les mètres sont le bétail des dieux », autrement dit, que chaque syllabe poétique est une armure vivante et divine en soi, une protection changeante et complexe, contre ce qui dans le processus sacrificiel peut blesser celui qui s’en approche. De la même manière, les mots sont pour Alexandre un double de ses foulards imposants qu’il transporte autour de son cou comme des gonfalons prétentieux : mètre gayatri ou trishtub, peu importe, il lui importe avant tout de découvrir, parmi les mots qui s’enchaînent, celui qui sera capable d’enfermer, de blesser, de retenir l’autre dans un cercle invisible, qui serait celui d’un microscopique gothul où quelques femmes, de son point de vue ses femmes, danseraient sa propre solitude. Ainsi l’histoire du tampax, qui doit aussitôt devenir un récit entré à son répertoire (comme celui de la Comédie-Française) – exhibé, digéré, poli telle une pépite d’or du Yukon, exploitable ensuite en société. Ainsi ces vieilles chansons de Frehel ou d’autres chansonniers du tournant du dernier siècle, dinosaures archaïques transportés dans les loges de la modernité cinématographique, mais qui au-delà de leur mélancolie intrinsèque, sont avant tout des transports de mots surarticulés, scandés, nourris d’une émotion que l’homme contemporain souhaiterait faire renaître sincère en soi (et bien sûr, il n’y parvient pas). Sans le savoir, Alexandre prouve que le divin réside désormais dans la chansonnette pour bal des pompiers. Une fois que le pouvoir des femmes unies l’aura défait, que le maquillage l’aura fait rejoindre leur camp dévirilisé, ce ne sera plus l’heure de la démonstration séductrice, mais celle du repliement mélancolique – et le classique, funèbre, sans mots, aura eu raison du populaire.
S’il l’avait connue, Alexandre aurait longuement rêvassé sur la légende de Krisna et des gopi, les seize mille gardiennes de troupeaux qui le vénéraient et tissaient autour de lui des jeux érotiques sans fin. Tout l’équilibre de la relation entre Krisna et ces jeunes filles résidait dans la balance infinie qui régit le svakiya (lien légitime, conjugal) et le parakiya (lien illégitime, adultérin). Alexandre crache d’emblée sur le svakiya parce qu’il l’associe au retour à l’ordre bourgeois qui suit la remise au pas de la société après mai 68. La complicité mentale avec son meilleur ami (qui est en réalité son parfait double dandy hautain, son frère jumeau, mais privé, lui, de toute déchirure psychique) repose sur la croyance hypocrite que le parakiya, la recherche inassouvie de l’unique parmi l’infinie multiplicité féminine, est le seul contrepoids du svakiya auquel en vérité il aspire (car sinon, pourquoi encore et toujours Gilberte, pourquoi, au-delà des questions d’argent, encore et toujours Marie ?). Mais l’écueil majeur du svakiya, autour duquel le film navigue comme s’il s’agissait d’un vaste et sanglant récit de corails ne faisant qu’affleurer la surface, demeure bel et bien la procréation, l’engendrement, le renouvellement des générations au-delà du plaisir égoïste. Quand Alexandre confesse face caméra une histoire qui finit par parler d’avortement, il s’empresse de remettre ses lunettes teintées, qui sont l’équivalent d’un masque : la faille, à charge pour nous de le comprendre, n’est pas celle d’un deuil, mais d’une mauvaise conscience, qui se hâte d’aller se blotir derrière les dandy paraphernalia. Les mots sont cette fois érigés en muraille de Chine, mais avec la mystérieuse Veronika, ils ont rencontré un adversaire de taille, maniant exactement la même arme, mais avec une précision bien différente. « Baiser » : Veronika aime les mots crus, c’est sa philosophie à coups de marteaux – déchirer les bandelettes ductiles du langage avec des lames aiguisées sur le fer de la vie, la vraie, dépouillée de son fantasme, ramenée à l’essentiel d’une humanité qui frôle, dans l’exaltation du sexe, l’animalité. Elle ne cesse de réclamer une promenade au « bord de l’eau » : c’est une créature liquide, plus Mélusine foudroyante que nymphe désirable, jouant de ses cheveux coiffés en bandeaux lisses et inflexibles, puis une fois défaits, tentaculaires et gorgonesques. Ses propres blessures ramènent celles d’Alexandre au stade de l’enfantillage : une puérilité ivre d’elle-même, qui se croyait le dieu de sa parole, et qui se découvre une rivale, à la mentalité aussi acérée qu’Athéna et aussi imprévisible qu’une ménade. Le grand exploit de Veronika est l’instant suprême où elle obtient, enfin, le silence. Ses propres mots ont pris leur victime, le jeune homme trop sûr de ses dégoûts et de ses névroses, à la gorge, et lorsqu’elle démolit sa grandiloquence et sa vanité, elle ne laisse plus, derrière elle, qu’un petit animal piteux et blessé, auquel ont été retirés ses jouets syllabiques, et qui se découvre nu dans une obscurité psychique sordide. Le grand monologue de Veronika, si justement célèbre, qui réussit à unir dans sa confession à la fois le gloria de l’amour et le sanctus des larmes, est un chant profondément personnel, arc-bouté contre toutes les dissimulations, qui réduit à néant tout le vaste échafaudage néoromantique qu’Alexandre avait disposé autour de sa personne. C’est une tempête de désir et de désespoir qui, dans la stase d’un plan unique, ravage tout et s’octroie ainsi la royauté de tout le récit. Et la révélation que Veronika est enceinte, détruira ainsi chez Alexandre les dernières illusions, le rendra à son caractère d’infamie, d’infériorité, de mendicité amoureuse qui était véritablement le sien. Impuissance face à la divinité qui l’a terrassé – qui a obtenu, comme dans tant de hyérogamies grecques, un peu de sperme pour générer du futur – et qui, comme premier acte de serviteur, lui fait recueillir son vomi.
C’est sur cette note de souillure, de chaos et d’humiliation qu’Eustache conclut les quatre heures de son roman, pardon, de son film. Peu auparavant, on avait pu voir Alexandre, soudain muet, se mettre à écrire quelque chose, sur un coin de table, sur un bout de papier. Et c’était la première fois qu’on le voyait, depuis le début de cette longue histoire, réaliser quelque chose qui soit de l’ordre de l’esprit. Ce quelque chose, malgré une moquerie de femme, il restera à jamais invisible, on ne saura jamais ce qu’il contenait, ce qu’il parvenait soudain à exprimer, en mots cette fois non parlés, mais écrits. C’est le résidu irréductible de cette expérience – son mystère d’Eleusis, le seul auquel nous ne pouvions pas être conviés.
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ernestinee · 1 year ago
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J'ai fini Psychopompe, d'Amélie Nothomb. Spoilers dans la suite. Je la lis depuis 1992 avec L'hygiène de l'assassin. J'ai dû le lire plus de 20 fois, le prêter, ne pas le récupérer, le racheter, le relire encore pour me le réapproprier.
Chaque année, ma maman m'offre son nouveau roman dès sa sortie.
Je sais ce qu'elle a bien voulu montrer de sa vie, dans ses romans autobiographiques, dans les indices laissés ça et là au travers des fictions. Je connais ses thèmes de prédilection, la beauté, la mort, l'alimentation, le froid, le silence, les mots rares.
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Cette fois, c'est un roman autobiographique particulièrement intime. J'avais comme à chaque fois sa voix dans la tête.
L'histoire commence avec un conte japonais qui met en lumière l'oiseau sublime qu'est la grue, et introduit la passion qu'a Amélie Nothomb pour les oiseaux.
Elle parle ensuite de ses nombreux voyages (elle est fille de diplomate belge, sa famille a beaucoup voyagé), de son observation des oiseaux, et cette deuxième partie se termine par un évènement majeur et traumatisant qui donnera lieu à plusieurs années d'anorexie. Elle en avait parlé dans certains livres, je connaissais cette partie de sa vie mais je n'en connaissais pas l'origine.
On comprend alors la quatrième de couverture "Écrire c'est voler" lorsque l'écriture l'aide à quitter le sol et l'anorexie. Les métaphores entre l'écriture et les oiseaux se suivent. Sa vision de l'écriture est envoûtante pour moi qui l'admire depuis longtemps.
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La dernière partie du livre est la plus intime, elle y parle de la mort, en particulier de la mort de son père et de leur conversation posthume. J'ai été assez émue.
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A plusieurs moments, l'histoire fait le lien entre certains de ses livres, des pièces s'ajoutent petit à petit dans un puzzle entamé depuis plusieurs années.
J'ai encore du mal à dire si j'ai aimé ou pas le livre, en fait. Hygiène de l'assassin, Mercure, Métaphysique des tubes, Cosmétique de l'ennemi, Antéchrista, Biographie de la faim, Stupeur et tremblements : je pourrais relire ceux-là plusieurs fois sans m'en lasser une seconde. Ce n'est pas le cas de Psychopompe, même si j'ai adoré l'impression d'en savoir un peu plus encore sur un personnage omniprésent chez moi depuis plus de 30 ans.
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petit-atelier-de-poesie · 6 months ago
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Quelques trucs bien. Avril 2024
Ces “Quelques trucs bien” s’inspirent directement des “3 trucs bien” de Fabienne Yvert, publié au Tripode. 
Pas 3 par jour pour ma part, mais une volonté régulière de gratitude et d’optimisme. 
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Jardins du Musée International de la Parfumerie. Mouans-Sartoux
Participer aux travaux de rénovation chez mon amie P. Ouvrir l’espace à la lumière. Mais me sentir toujours cloisonnée à l’intérieur 
Avoir la satisfaction du travail accompli jusqu’à la fin des vacances de printemps 
Pleurer à chaudes larmes devant ce film qui évoque l’adoption. Repenser à mes enfants petits et tout ce que j’ai pu leur dire d’amour 
Inviter des amis de maman. Nous faire plaisir des retrouvailles 
Me réveiller avant l’aube, déjeuner, lire et me rendormir au petit matin sans mettre de réveil 
Me promener avec la poussette dans les jardins en fleurs. Nous laisser baigner de lumière et d’odeurs 
Composer un bouquet de fleurs sauvages du jardin : iris, fleurs d’ail, pois de senteur, boutons d’or 
Commencer et finir un bouquin entre la veille et le lendemain : « Une nuit particulière »
Entendre mon petit Mateo commencer à s’entraîner à dire « papa »
Aller boire un verre de vin blanc en terrasse. Être surprise par un double arc-en-ciel 
Écrire. Encore. Comment la poésie est devenue un nid…
Cueillir pour maman un bouquet de fleurs sauvages dans le jardin 
Apprécier le passage à l’heure d’été. Rallonger les journées 
Partir en fou rire au souvenir d’un fou rire 
Garder mon petit Mateo. S’accorder ensemble sur le rythme 
Partager une invitation au soleil avec ma sœur chez des amis. Évoquer le temps qui passe et l’âge qui n’y fait rien, les questions d’identité qui se renouvellent et se précisent tout au long de la vie
Organiser le premier apéro de la saison dehors dans le jardin 
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pourprecry · 2 years ago
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Bon ça fait un moment que je n’ai pas écrit, peut être est ce parce que je n’avais plus le goût (et c’est rare, même treeees rare).
Ces dernières semaines ont été particulières:
-ma maman a eu un accident, elle ne peut plus marcher donc j’ai passé mes 2 semaines de vacances à l’aider + faire mon rapport de stage (il me manque le mémoire la) mais en gros entre l’aider et travailler je n’ai rien pu faire d’autre et je satuuuure. J’aurai besoin de vrais vacances
-Je commence à ne plus m’aimer physiquement et c’est assez difficile (a cause d’une réflexion d’une bonne amie mais bref passons)
-Mon ex, enfin R quoi, m’a invité à son anniv, et merci mais non merci en fait. Pour faire quoi au juste? pour faire comme si tout allait bien en les voyant tous heureux alors que j’ai mis des mois à me remettre de cet abandon. Beh non mon coco, je ne suis plus ´acquise ´comme tu le disais si bien.
-j’ai eu un entretien d’embauche ajd fais par la fac et des intervenants et la meuf n’a fait que me descendre, en me posant pleins de questions pas bienveillante, alors oui, j’ai craqué et je me suis effondrée devant les 2 jurys. Vous m’auriez vu, j’ai pleuré et quand j’essayais de me calmer de plus forts sanglots revenaient encore. Elles m’ont demandé pourquoi j’étais si émotive. Si vous saviez ce que j’ai vécu seulement. C’était trop, la manière dont on me disait que je n’avais pas ma place dans cette formation pour ce poste, alors que je passe mon temps à me battre.
J’en peux plus ce soir. Je crois c’est un ras le bol. J’aimerai prendre une valise, claquer la porte de mon appart et partir. Pour dire à tout le monde « je vous emmerde laisser moi si je ne conviens pas à cette société ». Je suis à bout, pardonnez moi, j’avais besoin que ça sorte, de cracher ces mots sur un papier.
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e642 · 9 months ago
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Comment tu vas ?
C'est très gentil de demander.
À vrai dire ça fait 2h que je réfléchis et je sais pas trop quoi répondre. Si on fait un ratio pragmatique, ça donne une tendance plus vers le "ça va". Si je fais entrée en compte plein de paramètres : sommeil, stress, vie de couple naze, maladie de ma maman, les cours, la fatigue, je dirais que ça va bof.
Mais comme toujours, ça ne va pas vraiment mal. Jsuis plutôt neutre. J'me sens ni particulièrement mal, ni particulièrement bien. Le fameux vide intersidéral quoi.
Et toi, comment tu vas ?
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ditesdonc · 1 year ago
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H.E.C.
Hautes Etudes Cozançardes
Texte écrit par Josiane GOUVERNAYRE
Notre institutrice était Mademoiselle Suzanne Perceval, arrivée à Cozance peut-être à la rentrée 1943. Elle habitait à l'étage avec sa maman et parfois son frère André. Elle bénéficiait d'un jardin avec sa cabane en guise de sanitaire. Entre les légumes on trouvait un griottier, des groseilliers, un cognassier. Parfois nous y faisions de menus travaux, désherbage cueillette et préparation des fruits pour confiture.
Mlle Perceval était très sévère, très exigeante, elle ne tolérait aucun écart en ce qui concernait la politesse, l'entraide, la solidarité, le respect des autres. La première leçon du lundi était la morale.
Je me souviens particulièrement d'une semonce que nous avions reçue pour avoir singé ces pauvres vieux qui traînaient de graves séquelles de leurs blessures de la Grande Guerre. Benoît qui marchait sur les talons, ses pieds gelés avaient été amputés ou le père Garde à la démarche saccadée et à l'élocution difficile car il avait été trépané...
Je me rappelle aussi avoir reçu une baffe bien appuyée car j'avais eu, paraît-il, un geste de mépris envers un camarade !
Mlle Perceval suivait le programme de l'éducation nationale auquel elle ajoutait quelques matières dont le solfège et l'algèbre, ce qui fut couronné d'échec. Elle dut déclarer forfait face à notre manque de motivation. Son but, disait-elle, était « de nous sortir la queue des vaches ».
Pendant la guerre il n'y avait ni gomme ni colle ni crayon de couleur. L'institutrice préparait l'encre en diluant de la poudre dans de l'eau chaude.
La maîtresse nous faisait faire des exercices d'évacuation au cas où. Un jour, je m'étais si bien cachée au fond d'un bosquet que l'on ne me retrouvait plus.
Un autre jour, à la sortie de l'école, dans un fossé près de la croix, nous avons trouvé une arme et son chargeur. Heureusement un grand, Marcel, s'est chargé de les rapporter à l'institutrice.
Nous allions tous à l'école à pied qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il vente. Malgré la période trouble que nous vivions, les parents ne nous accompagnaient pas. La maîtresse nous avait prévenus : « Si vous croisez des Allemands, inutile de m'en parler, ils feront partie du paysage tant qu'on ne les aura pas chassés. » Sous-entendu : «J'appréhende suffisamment lorsque je les aperçois dans les parages !» Et pour cause, elle et sa famille étaient très impliquées dans la Résistance. Alex, un juif, avait même trouvé refuge chez elle un certain temps. Ça, tout le hameau le savait mais personne n'en a jamais parlé.
Le long du mur de la route, dans le jardinet bordé de galets apportés par nos soins, poussaient lilas, rosier, spirée, pommiers du Japon. Nous en assurions l'entretien. C'est là que se dressait le mât qui aurait dû servir à hisser les couleurs pour le salut du matin, mais le drapeau tricolore dormait dans le placard car l'institutrice refusait de se plier aux ordres de Vichy.
En décembre 1943, dans l'après-midi, nous décorions une branche de sapin apportée par mon père : flocons de coton, étoiles en carton faites par nos soins, fils brillants de la tréfilerie et un petit agneau de plâtre trouvé chez nous. Pas de boules, pas de guirlandes. En raison du froid, la récréation a été supprimée, Renée et moi sortons pour soulager un besoin pressant. Soudain des ronflements nous glacent, des camions allemands s'arrêtent sur la place, une trentaine de « Boches » en descendent.
Nous courons prévenir la maîtresse. Craignant le pire, elle ordonne de fermer les volets, nous regroupe au centre de la classe et nous entonnons mon beau sapin. Plusieurs fois de suite nous chantons et rechantons jusqu'au départ des véhicules. Que voulaient-ils : simple détente, présence dissuasive ? En entendant des enfants interprétant un chant de chez eux, ont-ils oublié qu'ils étaient des soldats ? La maman de l'institutrice descend de son appartement, étreint sa fille, toutes deux éclatent en sanglots. Nous retournons à notre décoration sans un mot mais on a tout compris, respectant la consigne maintes fois répétée : même si on sait, on se tait ! J'avoue que maintenant, après tant d'années, les larmes emplissent mes yeux lorsque j'entends « Mon beau sapin ».
Pendant les hostilités des enfants de Lyon avaient été mis en sécurité dans leurs familles ou chez des amis et poursuivaient leur scolarité avec nous. Eugène, un grand, a appris très tardivement qu'il avait fait de la résistance sans le savoir. La maîtresse lui confiait des plis qu'il devait porter dans un endroit désert à un homme jeune qui repartait prestement sans un mot.
A la rentrée 1944, notre maîtresse, debout, les larmes aux yeux, nous a parlé de la libération de Bourgoin le 23 août et nous a appris la mort, près des silos, de son oncle Claude Rochas de Morestel et de Paul Lozitski (lieutenant François de Salagnon) combattants du secteur VII.
Après la guerre, Mlle Perceval s'est mariée avec M. Léon Bouvier, un ingénieur des mines qui nous rapportait de ses lointains déplacements des curiosités: minéraux, soufre du Vésuve, un scorpion séché... C'était quelqu'un de gentil et d'une grande érudition. En 1952, Mme Bouvier, à son grand regret, a dû quitter Cozance pour suivre son mari à St Beuil. Elle a enseigné ensuite à Arnouville-Les-Gonesses puis le couple s'est retiré dans le Loiret.
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unechappatoire · 2 years ago
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on s’est connues tôt, très tôt à un tel point qu’on a grandit ensemble toi,moi et les autres, on était une petite bande, 6 en fait. quatre filles dont ma meuilleure amie, toi, une autre amie que j’ai perdue un peu de vue et enfin, moi. deux garçons avec qui on a commencé à grandir, à faire nos premières bêtises, nos premiers dramas, notre rentrée en secondaire. on s’était deja tous un peu éloignés à l’époque mais particulièrement toi. je me souviens, je ne me rendais pas compte à quel point je tenais à toi, on était trop petites pour savoir qu’on n’allait jamais pouvoir se lâcher complètement toutes les quatres. du moins c’est ce que j’aurais pensé il y a encore une semaine.
tu sais, j’ai mal au cœur. tu as toujours été comme une sœur pour moi, on l’a toujours toutes été l’une pour l’autre. mais toi? l’as tu ressenti? j’ai mal au cœur. mal de voir que je ne compte pas autant pour toi. mal de savoir que tu ne reviendras pas en arrière. mal de te voir ne plus m’adresser un seul regard, une seule parole, peut être même pas une pensée?
« les gens partent, ne te préoccupe pas trop du départ des autres » m’a dit maman. j’ai toujours su que tu allais nous laisser sans excuses ni explication parce que c’est toi. ne t’es tu déjà jamais attaché à nous?
je t’ai aimé, je t’aime et t’aimerai toujours malgré tout car c’est bien ce qu’on se doit. la loyauté. je serai toujours là pour toi mais ce n’est pas réciproque n’est ce pas ?
je t’en veux de m’avoir laissé, nous avoir laissé. tu me manques. tu n’es pas morte mais j’ai l’impression que c’est moi qui le suis pour toi.
«  il y a des gens comme ça, qui partent sans raisons, du jour au lendemain » m’a dit maman. que dirais tu maman si tu savais que je pleure dans mon lit en écrivant ces mots? j’ai mal au cœur. mal au vide que tu laisses. je n’en peux rien mais je n’étais pas prête à ce que tu partes d’un coup, sans rien dire, me tournez le dos comme ça alors que je t’ai toujours soutenue, aider, aimer, j’ai toujours été là. à la première occasion tu es partie, n’attendais tu que cela?
j’ai mal, la rupture amicale est bien plus douloureuse.
L.
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penseescafeinees · 1 year ago
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Dans ma tête ce 13 - 9 - 2023
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Quoi de fou cette semaine... J'avais envie d'utiliser ce blog comme un journal... semi-intime. J'ai envie d'y coucher mes pensées... Mes émotions. Car j'en ai un peu plein le cul des tabous que la société met autour de la santé mentale.
Je me sens particulièrement fragile pour le moment. Et d'ailleurs... Je me demande si ce n'est pas une force que de l'admettre... soit... J'élucubre.
Le 31 juillet... J'ai coupé les ponts avec l'homme qui m'a servi de père durant 35 ans. Mes mots semblent dures. Mais je reste assertive. Peut-on qualifier de père une personne qui était censé vous protégé et qui a été moins que basique ? Car la base d'un père... c'est nourrir, protéger, donner de l'amour, offrir un toit, ... Si je comptes ce qu'il a fait sur ces 4 choses... Je n'en dénombre que 2... Vous allez me dire... c'est déjà ça... Mais il y a les choses qu'un père ne peut pas faire que le mien a fait. Mais... non... C'est moi la vilaine... La fille ingrate ! Celle qui refuse d'être élevée en allant portée plainte pour coups et blessures quand elle avait 12 ans. C'est moi qui subit. Et c'est moi qui est un problème.
Heureusement, maintenant, je suis bien entourée. Mes enfants sont fantastiques. Et j'ai des hommes adorables. Et je ne remercierais jamais assez le destin d'être polyamoureuse. ♥ Car j'ai pu rencontrer des personnes qui bien qu'ayant pas mal de défauts, ont nombre de qualités.
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Et mes enfants... adorable petites créatures que j'ai mises au monde. Que j'aime plus que tout. Erwan ne comprend pas encore tout ce que je traverse. Mais Rose bien qu'elle ne comprenne pas tout... Se montre tellement enveloppante. Elle est souvent collée à moi. Quel plaisir de sentir ses petits bras m'entourer. Et me rappeler que je ne suis pas une humaine si nulle. Par moments, ça me fait culpabiliser. Car c'est à la maman de soutenir... Pas à l'enfant non ? bien que... Je dis ça... Mais je faisais pareil avec ma mère. Je crois juste que j'agissais avec elle. Comme elle agissait avec moi. Elle n'a pas été la meilleure des mères. Mais elle a toujours reconnus ses torts. Et juste pour ça... Je suis fière d'elle.
J'ai pris rendez-vous avec un psychiatre. Car je vis toujours au bord de la crise d'angoisse. Je le vois le 10 novembre.
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selidren · 2 months ago
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Eté 1925 - Champs-les-Sims
2/6
Ils ont également décidé d'emmener Petite Eugénie (ma petite soeur, bien que Cléo me dit dans ses lettres qu'il est dommage qu'ils ne prennent pas Grand-Mère à sa place). Elle a neuf ans, et Maman pense qu'elle est encore un peu jeune pour vivre sans elle. Elle est vraiment contente Petite Eugénie.
En fait, je redoutais surtout la réaction d'Oncle Adelphe, et Maman également. Tu te demandes sûrement pourquoi tout le monde craint la réaction d'un cousin de mon père plutôt que ses propres enfants, mais je pense que ta mère en saura bien plus long que moi. Ils ont une relation bien particulière et je partage avec Cléo la certitude que Papa est bien plus attaché à Adelphe qu'à tous ses enfants réunis. Aussi injuste que cela puisse paraître. Mais il serait idiot d'en vouloir à Oncle Adelphe, ce n'est pas sa faute si Papa n'a pas grandit sur le plan des relations humaines.
Transcription :
Adelphe « Tintin ! Tu as une minute ? »
Constantin « Pas vraiment à vrai dire. »
Adelphe « Alors prends-en un peu. Je tiens à profiter du temps qu’il nous reste avant le grand départ. »
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