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"Levi & Hange, s'abriter de la pluie. La bibliothèque couverte de poussière.''
(SNK Shorts Stories - Traduction FR)
Une petite traduction non-officielle faite de ma patte. Les short-stories (Smartpass) sont des histoires courtes officielles approuvées et relues par Hajime Isayama. Elles sont publiées dans une application japonaise ‘‘AU’‘.
Source: https://attackoncoffee1988.tumblr.com/post/615576613014454272/the-library-thats-covered-in-dust
Le Bataillon d’Exploration avait décidé de s’abriter de la pluie dans un ancien château, qui avait néanmoins une allure robuste. La pluie qui battait contre les grandes fenêtres résonnait, les plongeant ainsi dans une ambiance assourdissante.
- C’est pas vrai… Mais quelle montagne de richesse! Ces anciens manuscrits… ce serait tellement bien si je pouvais les lire. Fichtre! Je ne peux toujours pas déchiffrer ça!
Le dos de cette personne pleine d’enthousiasme, fouillant joyeusement dans les documents, n'appartenait à nulle autre que Hange.
- Hé, fichue bigleuse. T’as laissé les membres de ton escouade vagabonder dans le château comme bon leur semble?
- Oh, Levi? Non ce n’est pas le cas, car Moblit s’occupe de répondre aux besoins de tous. C' est un inestimable et excellent assistant, tu ne trouves pas?
Sans se retourner d’un pouce, Hange parcourait les étagères, où se trouvaient divers types de manuscrits anciens et de parchemins illustrés, qui semblaient ainsi constituer une ancienne bibliothèque. Elle essaya d’attraper un livre qui se situait bien trop haut pour elle, ce qui la fit tituber.
- Oh!
- Pff!
Tandis qu’un amas de livres s'apprêtait à lui tomber dessus, il réussit de justesse à la saisir par la veste, pour ainsi la mettre hors de danger.
- Ouah… Tu m’as sauvé la vie, Levi. Si tous ces livres m’étaient tombés dessus, j'aurais eu une bosse qui aurait rendu ma tête bizarre.
- Ne t’en fais pas. Elle n’aurait pas été davantage bizarre. Sérieusement, tu devrais faire plus attention à ce qui t’entoure.
Hange remit en place ses lunettes de protection qui pendaient. Elle dépoussiéra ensuite les livres qu’elle venait de saisir.
- Ce livre-là, par exemple… Dans ce vieux château qui se trouve au sein des murs, il y a de nombreux livres et du matériel qui sont écrits avec des lettres que nous ne savons pas lire. Cet héritage est présent partout, au sein des murs. On dirait les vestiges d’une civilisation disparue, tu ne penses pas?
- Pas besoin de m’étaler toute ta théorie. Je sais bien que tu en as dans le cerveau. C’est pour ça que je te dis que t’avoir en vie est important. Si je n’avais pas été là en ce moment-même, et que les livres te seraient tombés dessus, les os de ton cou se seraient brisés.
- Tu es adorable.
Levi se sentit irrité. Il tira même la tronche, témoignant ainsi de sa mauvaise humeur. Il détestait qu’on le décrive avec de tels mots.
- Tu fais exprès de me dire ça, car tu sais que je déteste ça.
- Ha ha, tu as vu clair dans mon jeu, hein?
Hange se laissa ensuite tomber sur le sol. Elle ouvrit un livre tout en redressant sa tête.
- D’ailleurs, quel bon vent t’amène? Tu es venu me voir, non?
- Ah. C’est au sujet d’Eren. Il voudrait avoir l’autorisation de se déplacer dans le château, et qu’en tant que soldats, nous lui donnions le droit de sortir du sous-sol.
- Il n’y a pas de danger. Les murs extérieurs ont été construits de façon solide. Et si jamais dans le pire des cas, Eren se transformerait en Titan et détruirait ainsi le toit, il y a de nombreux points d’appui le long de la tour qui nous permettraient d’utiliser notre équipement tridimensionnel… Ah, si seulement j’arrivais à saisir le sens de ces illustrations en m'imprégnant de tous ces livres… Hange annonçait ces mots de façon insouciante.
-Je vois. J’en suis ravi… Et aussi…
- Oui?
-Avant de continuer à farfouiller, sèche tes vêtements. On voit à travers ta chemise, c’est indécent.
Il montra du doigt le feu de la cheminée qui avait sans doute était préparé par Moblit, qui s’inquiétait de voir sa supérieure trempée. Levi la dévisageait comme s’il se trouvait face à la pire des immondices.
- D’accord. Ce serait pas mal de lire par là-bas.
Levi soupira à la vue du dos de Hange qui se déplaçait lentement pour se positionner devant la cheminée, puis il quitta la pièce.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 09 : Le point de vue de Livaï
L’affaire du thé des soldats du Bataillon (3/3)
« Selon l’explication d’Auruo, du thé de qualité supérieure a été envoyé par erreur au Bataillon d’exploration, et les toutes-puissantes Brigades spéciales font le déplacement en personne jusqu’ici pour le récupérer…
- Est-ce que cette erreur justifie le déploiement de tels efforts ? Il est déjà difficile de se procurer une nourriture digne de ce nom pour les repas ; je doute que beaucoup de soldats soient difficiles en matière de qualité du thé. »
La lettre qui réclamait le retour du thé qu’on leur avait fourni était arrivée dès leur réveil. Tous les soldats aux ordres de Livaï se creusaient la tête pour éclaircir la situation.
Ces feuilles de thé sont indéniablement plus correctes celles que nous recevons d'habitude... Je pense que tout cela s'explique par…
Même si la théorie des soldats du Bataillon - à savoir qu'ils n’étaient pas dignes du produit de luxe qu’on leur avait envoyé - était recevable, elle n’expliquait pas les efforts déployés par les Brigades spéciales pour récupérer le produit.
« ...Auruo, apporte les feuilles de thé ! Je veux vérifier un truc. »
Livaï venait de se rappeler la façon dont les Brigades spéciales menaient leurs activités et il décida alors de vérifier par lui-même.
*
« Eren, passe-moi la cuillère là-bas ! »
Le thé qu’Auruo venait d’amener dans la salle était à peine différent de celui que les soldats du Bataillon d’exploration recevaient habituellement. Puisque Livaï détestait se salir les mains, il prit la cuillère à thé, longue et fine, que lui tendait la recrue, et commença calmement à remuer les feuilles.
« Qu’est-ce que c’est ? Une magnifique pierre ?! »
… Quelques instants après, une pierre assez grosse et étincelante se trouvait au creux de la main de Livaï. Une pierre qui, au sein la société emmurée dans laquelle ils vivaient, ne pouvait être aperçue que dans la Capitale royale et les propriétés des aristocrates… C’était une gemme d’ornement que les soldats de bas étage comme ceux du Bataillon n’avaient jamais vue qu'en dessin.
« Est-ce cela qu’on appelle… un bijou ?!
- Des pierres aussi étincelantes sont habituellement traitées avec le même respect que les trésors sacrés du Culte du mur !...
- Pouvez-vous nous expliquer, Caporal ?! »
Livaï dégagea les feuilles de thé autour la gemme et la fit rouler sur la table.
« C’est ce que veulent récupérer les Brigades spéciales… depuis le départ.
Puis, s’appuyant sur sa propre expérience, ainsi que sur des histoires racontées par de vieilles connaissances, Livaï leur fit part de son avis.
« Vous voulez dire qu’ils ont essayé de cacher leurs pots-de-vin : ils ont prétendu qu’on leur avait fait un don de thé et ils ont caché des objets de valeur à l’intérieur… ? Est-ce possible ?
- Quel que soit leur degré de corruption, même les Brigades spéciales doivent garder une apparence de dignité. Accepter directement de l’argent entacherait leur réputation…
- Mais les denrées alimentaires, c‘est autre chose. Auruo a raison : recevoir un don de thé est plus discret - qu’il s’agisse d’un produit de luxe ou pas. N’importe quel citoyen peut s’en procurer, et personne n’ira se plaindre qu’il aurait dû être donné à des œuvres de charité. »
Les soldats talentueux placés sous les ordres de Livaï assimilèrent rapidement ce qui venait d'être dit, et arrivèrent d’eux-mêmes à la bonne conclusion.
« Ensuite, un de ces idiots des Brigades spéciales a dû s’embrouiller. Ainsi, ils prétendent que le thé est impropre à la consommation afin de pouvoir le récupérer. » résuma l’un d’eux en faisant scintiller la pierre entre ses doigts…
En dehors des murs, cette pierre n’était rien d’autre qu’un objet de pacotille, sans aucune valeur. Eren était du même avis que son aîné. Il observa la gemme avec curiosité et demanda :
« Qu’allez-vous faire de cette gemme, Caporal ?
-… Ce sera à Erwin d’en décider. »
« Nous rentrerons immédiatement après avoir vu le Major. » annonça Livaï.
Il se prépara à aller voir Erwin, le plus haut gradé du Bataillon d’exploration.
*
« Je vois. Heureusement que tu as compris rapidement la situation. Nous allons en informer le membre des Brigades spéciales en charge de cette affaire. »
Après avoir entendu le rapport sur l’incident, Erwin eut une réaction plus calme qu’ils ne s’y attendaient. Puisqu’il pouvait y avoir d’autres pierres, il ordonna brusquement à son lieutenant de se renseigner auprès des Brigades spéciales pour connaître la quantité de thé impropre à la consommation, et demanda que soient prises les dispositions nécessaires pour fouiller l’ensemble du thé, afin de s’assurer qu’aucun vol n’avait été commis.
« … Tu comptes leur rendre les pierres sans faire d’histoire ?
- Dans notre propre intérêt, je préfère que les Brigades aient une dette envers le Bataillon, plutôt que de se les mettre à dos pour quelques cailloux. Tu n’es pas content, Livaï ? »
Livaï n'émit pas d’objections sur la décision d’Erwin. Il jugea préférable de laisser Erwin s’arranger, comme il le faisait ordinairement, avec les hauts gradés et les autres corps d’armée.
« Je te laisse te charger des manœuvres politiques.
- Si tu as une demande particulière à faire, je serais ravi de la leur transmettre - de la part de l’individu qui a trouvé les pierres en premier.
- Hum... »
Livaï se rappela le thé dont il n’avait pu prendre qu’une gorgée le matin-même. Il était indéniablement excellent.
« Je me fiche de ces cailloux ; mais le thé était bon. J’apprécierais qu’ils puissent nous en fournir davantage de cette qualité. »
Erwin sourit, puis répéta la demande toute simple de Livaï en la reformulant à sa manière - si particulière.
« Très bien, je la leur transmettrai. Et je leur demanderai d’enlever ce qui rendait le thé impropre à la consommation la prochaine fois qu’ils vous en fourniront. »
Il tourna ensuite le dos à Livaï et se préparera à aller rendre visite, en personne, au membre des Brigades en charge de l'affaire, tandis que Livaï retourna à ses propres occupations.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 05 : Le point de vue de Petra
L’affaire du laboratoire saccagé (2/3)
Petra Ralle ne faisait pas partie de la quatrième escouade du Bataillon d’exploration, dont le chef était Hansi. Ce fut par hasard qu’elle s’arrêta devant le laboratoire fermé à clé au moment où il fut saccagé. Elle s’approcha de la porte.
« Hum ! J’ai une communication du caporal à l’attention de tous les chefs d’escouade ! »
Pas de réponse. Elle tourna la poignée, mais la porte était verrouillée.
Hansi est sortie ? Je vais dire au caporal d'aller la voir en dernier.
A ce moment-là, elle entendit un vacarme.
« Ah ?! »
Un fracas de meubles qui se brisaient ; des papiers qui semblaient voler à travers la pièce ; et un gros Boum assourdissant !
Instinctivement, elle frappa pour vérifier que personne n’était blessé. Pas de réponse.
Elle avait peut-être entassé un fatras d'objets et tout s'est renversé ?
Petra n’y prêta pas plus attention car elle pensait qu'il n'y avait personne dans la pièce. Elle poursuivit son travail.
*
C’est au moment où Hansi et ses subordonnés débarquèrent pour lui poser des questions que Petra apprit qu’Hansi se trouvait dans le laboratoire au moment où elle avait entendu ce vacarme.
« … Je parie que tu piquais tellement du nez que tu as tout foutu en l'air et cassé ces machins toi-même. Tu as de la chance que tes lunettes soient intactes. » lança Livaï à Hansi d'un ton rempli de mépris après s'être approché du groupe.
Mais la répartie d’Hansi fut un peu hors sujet :
« J’avais des lunettes de protection, pas mes lunettes de vue. Je testais une nouvelle arme. »
Elle se tourna vers Petra et l’interrogea :
« Petra, on m’a dit que tu t’étais arrêtée devant le laboratoire pendant que j’y étais. Est-ce que tu as vu quelque chose ?
- … J’ai entendu du bruit. J’ai cru qu’il n’y avait personne et que des objets s’étaient simplement renversés. »
Puis elle fournit des détails sur le bruit qu’elle avait entendu et décrivit la scène qui avait suivi.
*
Une cabane de stockage gérée par la quatrième escouade se trouvait juste à côté du laboratoire d’Hansi. Elle était toujours remplie d’un tas d’objets divers. A certains moments, on y trouvait des légumes pour nourrir les titans lors d’une expérience ; à d’autres, des lances pour tester leur résistance à la douleur. Petra passa devant cette cabane.
Je me demande quel genre d’expérience mèneHansi aujourd’hui. Des bûches… et une corde…
Elle fut intriguée par ce qu’elle aperçut et s’arrêta.
Nifa, une des subordonnés d’Hansi, l’interpella :
« Petra ? Tu as un message à faire passer à notre escouade ?
- En effet. Une note de service stratégique est parue et… Peu importe, je reviendrai voir Hansi plus tard.
- Merci, c’est préférable. Notre chef d’escouade est occupée pour l’instant. » dit Nifa en riant, avant de remarquer que Petra fixait l’intérieur de la cabane.
Elle lui donna volontiers des explications.
« C’est cela qui a attiré ton attention ? C’est du matériel pour fabriquer des prototypes d’arme anti-titans. »
Fidèle à elle-même, la quatrième escouade regorgeait toujours de nouvelles idées. Petra remercia Nifa. Elle était encore subjuguée en quittant les lieux.
*
« Une arme ? » réagit Livaï.
Même s’il avait eu l'air d'écouter l’histoire de Petra d’une seule oreille, il fronçait à présent les sourcils.
« Oui. Apparemment, Hansi veut tester la puissance de l’impact que le corps d’un titan peut encaisser.
- La seule façon d’arrêter un de ces monstres est de lui trancher la nuque. On le sait depuis longtemps.
- Le but n’est pas de les tuer. Il s’agit de pièges fixes destinés à arrêter les titans en neutralisant leurs membres. Si on réussit �� les mettre en place, ils se révéleront extrêmement utiles, par exemple pour défendre un campement lors d’une marche. »
Petra, qui avait l’expérience du combat en première ligne, jugea en effet que l'idée était pertinente. La plupart des titans étaient peu actifs la nuit, mais certains échappaient à cette règle. Concernant les titans, on n’était jamais trop prudent.
« Donc, c’est une recherche qui va aider chacun d’entre nous, quand nous devons monter la garde ? »
Si Petra était encore en vie, c’était grâce à l’entraide dont faisaient preuve ses camarades et elle. De ce fait, elle était séduite par la recherche d'Hansi. En évitant l’affrontement direct avec les titans, un nombre plus important de ses camarades pourraient revenir en vie.
« C’est vrai. C’est peu stratégique d’épuiser les forces de spécialistes du combat tels que vous en leur demandant de monter la garde. » intervint Livaï.
Il restait cependant circonspect :
« Tout ceci est bien beau, mais est-ce que nos chariots sont assez gros pour transporter ces bidules, en plus de tout le matériel de première nécessité ?
- Je suis partie du principe qu’on peut se procurer les matériaux sur place. Les pièges sont constitués d’un balancier et de marteaux fabriqués à partir d’arbres et de cordes. On a essayé beaucoup de formules différentes.
- Ah, Chef d’escouade ! »
Un des soldats qu’Hansi avait amené avec elle s’exprima tout à coup. C’était Nifa, cachée au milieu des autres soldats, qui avaient une carrure plus imposante que la sienne.
« Oui ?
- Je crois… que j’ai deviné ce qui s’est passé. »
Cette annonce sortie de nulle part laissa tout le monde pantois. Tous les regards se tournèrent vers Nifa.
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SHORT STORIES 2 - Histoires au cœur de la nuit (aux environs de minuit) - Chap. 15 : Livaï
Une histoire de souvenir affectueux
« Hum, caporal Livaï ! Où êtes-vous allé cette après-midi ? »
L’escouade se trouvait alors dans le vieux château dépoussiéré qui avait autrefois servi de siège au Bataillon d’exploration. Eren posa cette question à Livaï au moment du dîner, devant le reste de l’escouade qui était chargée de le surveiller.
« … Tu m’espionnais, Eren ?
- Non, non ! J’étais simplement en train de nettoyer les fenêtres, comme on me l’avait demandé, et je vous ai vu partir, Caporal.
- Je vois. »
Le ton glacé de son supérieur fit frissonner Eren. Il secoua la tête. Erd, un de ses aînés, prit part calmement à la conversation :
« Aujourd’hui, le Caporal est allé rendre visite à un mécène qui finance nos expéditions.
- Habituellement, c’est une tâche réservée au Major, mais il y avait une petite fille dans cette famille qui tenait absolument à rencontrer le caporal Livaï. Apparemment, c’est son héros. » précisa Petra.
Eren hocha la tête. Il comprenait parfaitement. S’il avait été à la place de cette fille, lui aussi aurait certainement voulu rencontrer Livaï, le soldat le plus fort de l’humanité.
« … Tout s’est bien passé��? Non seulement il faut marcher sur des œufs lors de ces visites, mais en plus, vous deviez gérer la rencontre avec une enfant. » dit Gunther en essayant de montrer de la considération pour les efforts de son supérieur.
Livaï laissa échapper un profond soupir et hocha la tête : « A peu près... » commença-t-il.
*
Les mécènes qui finançaient le Bataillon d’exploration étaient des commerçants enrichis. Ces individus cherchaient à tirer profit du succès (relatif) d’une expédition. Leur objectif était de mettre la main sur n’importe quel minéral rapporté ou sur la moindre portion de terre conquise pour en faire commerce.
Parce que les individus qu’il devait rencontrer ce jour-là connaissaient déjà Erwin, ainsi que sa propre réputation de héros silencieux, Livaï s’en sortit avec quelques formules d’usage et l’affaire fut classée.
Après avoir obtenu la promesse de la poursuite d’un soutien financier, Livaï entendit une petite fille l’appeler. Elle était bien habillée et avait un regard intelligent.
« … Ouais. C’est bien moi, Livaï. »
*
« Incroyable ! Les soldats du Bataillon ont toujours été mes idoles. S’il vous plaît, ne le dites pas à mon père, mais j’ai l’intention de m’enrôler pour devenir soldat dès que j’aurai douze ans ! Dites-moi, quelle taille font les titans ? Est-ce qu’ils parlent ? On dit qu’ils mangent les gens, mais par quelle partie commencent-ils ? »
La petite fille ingénue, qui vivait à l’abri des murs et ne connaissait les titans que par ouï-dire, assaillit Livaï de questions. Même si ces dernières l’ennuyaient profondément, Livaï y répondit avec calme :
« Quelle taille font-ils ? Ça dépend. Certains font deux mètres : ils sont à peu près aussi grands que la tringle qui est accrochée là-bas. Et certains font quinze mètres : ils sont presque aussi hauts que cette maison. Certains poussent des cris… mais je ne sais pas ce qu’ils disent. Et la façon dont ils mangent les gens est propre aussi à chacun d’eux… Certains nous écrasent dans leur main avant de nous manger, et d’autres arrachent avec leurs dents la moitié du corps avant de jeter le reste. »
Livaï essayait volontairement de faire ressortir la violence de ces scènes dans l’espoir que la jeune fille parte en courant assez rapidement ; mais l’intérêt de cette dernière resta visiblement intact :
« Donc, si je réussis l’entraînement, je peux devenir membre du Bataillon, moi aussi ? Je veux voir le monde extérieur ! »
Sans s’en rendre compte, Livaï avait baissé les yeux, et il croisa le regard déterminé de la petite fille.
« … Est-ce que tu aimes ton père et ta mère ?
- Quoi ? Oui, je les aime.
- Comment réagirais-tu si, tout à coup, tu ne pouvais plus les voir ?
- Comment ?… »
*
« Tu dois être prête à cette éventualité si tu veux rejoindre le Bataillon d’exploration. » dit Livaï de cette manière si particulière qui le caractérisait. « Ainsi… choisis ce qu’il y a de mieux pour ce qui est le plus cher à tes yeux ! » acheva-t-il. La jeune fille réfléchit quelques instants, puis leva la tête.
« … Dans ce cas-là, je deviendrai un marchand, encore plus riche que Père ! déclara-t-elle. Ensuite, je donnerai beaucoup d’argent pour soutenir les activités du Bataillon d’exploration ! »
« ...C’est incroyable, Caporal ! Je pensais que vous vous sentiriez dépassé face à un enfant, mais en réalité, vous avez même réussi à nous garantir un futur mécène ! »
Erd et les autres s'amusèrent de cette remarque et rirent ensemble. Livaï, de son côté, but une gorgée de thé et soupira :
« Je n’ai fait que lui dire la vérité, rien de plus. Il n’y a pas de quoi rire. »
Livaï aussi était satisfait de ce qu’il avait accompli : il avait réussi à maîtriser ses mots et avait rempli sa mission sans incident. Si la fille du marchand avait continué de supplier son père et fait des pieds et des mains pour rejoindre le Bataillon d'exploration, on aurait pu l’accuser de l’y avoir encouragée.
« … Les gosses n’ont vraiment aucune mesure. »
Du coin de l’oeil, Livaï remarqua qu’Eren affichait une expression de surprise. Il ferma les yeux et posa sa tasse sur la table.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 07 : Le point de vue d’Auruo
L’affaire du thé des soldats du Bataillon (1/3)
« Il ne manque plus que le thé. Est-ce que tu peux t’en charger, Auruo ?
- Ok... Je m’en occupe. »
Comme d’habitude, il y avait fort à faire ce matin-là.
Les membres de l’escouade tactique du Bataillon d’exploration, également appelée escouade Livaï, étaient occupés à préparer un énième petit-déjeuner confectionné sans chichi à partir de leurs provisions, dans l’ancien QG où ils avaient établi temporairement leurs quartiers.
« ...Tiens ? »
Pendant que ses camarades apportaient les plateaux sur la table, Auruo commença à préparer le thé - celui que son supérieur préférait…. Mais il sentit que quelque chose n’allait pas en effectuant cette simple tâche.
Ces feuilles de thé… Le premier venu penserait que ce sont des feuilles de thé ordinaires, et pourtant….
Il regarda le thé - sorti du paquet qu’il venait lui-même d’ouvrir - et ses soupçons se confirmèrent.
Pas de doute possible !... A coup sûr, ça va donner lieu à une affaire.
*
Lorsqu'Auruo apporta la théière dans la salle à manger, l’affaire commençait déjà.
Tout le monde regardait avec méfiance le morceau de papier qui semblait avoir été apporté par Livaï, leur chef.
« Qu’est-ce qui se passe, Petra ? demanda Auruo aussi calmement que possible.
- Nous avons reçu un billet, tôt ce matin, de la part des Brigades spéciales. Ils nous informent que le thé livré l’autre jour est impropre à la consommation et nous demandent de renvoyer tous les colis sans les ouvrir.
- Impropre… à la consommation ? »
Quelque chose sonnait faux.
Les Brigades spéciales avaient eu l’amabilité de leur fait parvenir cette communication. Cependant, tout le monde savait qu’ils gardaient pour eux les meilleurs produits : la viande de qualité supérieure et l’alcool le plus cher. Ils prenaient les soldats du Bataillon pour des attardés.
« Ces guignols ne pensent qu’à eux et nous refilent les produits les plus médiocres… »
Il n'aurait pas été étonnant qu'ils profitent de l’occasion pour se débarrasser d’un produit impropre à la consommation en le refilant aux soldats qui se trouvaient au bas de l’échelle.
Tandis que l’ensemble de l’escouade était occupée à chercher la raison pour laquelle les Brigades spéciales prenaient la peine de leur demander le retour le thé, Livaï prit la parole :
« Auruo, as-tu sorti le thé ? Est-ce que tu as remarqué quelque chose d’anormal ? »
La voix du caporal était calme, comme s’il avait compris la situation.
J’en étais sûr… Ce thé… !
Auruo fit un signe de tête affirmatif, puis prit son temps pour donner son avis, tout en remplissant la tasse de chacun.
*
« Ecoutez-moi bien... Tous les thés n’appartiennent pas à la même classe. Mais cela n’a rien à voir avec leur qualité... Tout est une question de taille des feuilles…. »
De tous les soldats présents dans la pièce, Auruo était le seul à avoir vu le thé qu’on leur avait livré. Il savait aussi qu'il était différent.
« Est-ce-que tout ceci a un rapport avec cette demande suspecte de restitution ?
- Du calme, Petra… La vérité ne va pas nous filer entre les doigts ; elle est juste sous vos yeux, pour tout dire.
- Arrête de parler en te donnant des airs ! Donne-nous simplement ta conclusion ! »
Auruo tendit à sa camarade irritée le thé tout en poursuivant :
« Le thé qui arrive jusqu’à nous - parce que personne d’autre n’en a voulu- est un mélange de feuilles ramassées tardivement et de basse qualité. Quelque soit la classe d’un thé, son goût est à peu près le même. Néanmoins… le thé que nous avons là est différent. Sa couleur indique qu’il est a été fait à partir de feuilles fraîches, avec un puissant arôme… Même si la taille et la forme des feuilles est la même que d’habitude, la qualité du produit n’est absolument pas la même. Le thé que nous avons là est fait à partir de restes de feuilles du printemps que ces fichus aristocrates boivent dans leur petit salon ! »
« Le fait qu’il ait une couleur plus claire que d’habitude en est la preuve. » conclut-il fièrement.
*
Son camarade d’escouade, Erd, prit une petite gorgée. Il sentait bien que le goût avait quelque chose de différent. Il pencha la tête sur le côté.
« … Ainsi, ils nous auraient envoyé par erreur du thé de haute qualité qu’ils essayeraient de récupérer parce qu’on ne mérite pas de l’avoir ?
- Ce ne serait pas la première fois que ces types agissent de façon fourbe… Peut-être que l’un d’entre eux était complètement éméché et nous a fait livrer les mauvais colis par accident ; et maintenant, ils essaient de cacher cette bourde et veulent récupérer le thé en prétendant qu’il ne faut pas le consommer. »
Auruo chercha le soutien du caporal qu’il respectait tant. Livaï but une gorgée du thé qui était dans ses mains et sembla l’apprécier plus que d’ordinaire. Il soupira :
« Tu as raison… Il est meilleur que le thé bon marché qu’on reçoit habituellement. L’analyse d’Auruo doit être juste. Cependant...
- Oui, Caporal ? »
Tous les membres de l’escouade - même la nouvelle recrue - étaient suspendus aux lèvres de Livaï, qui semblait plongé dans une profonde réflexion.
Il va ajouter quelque chose… Mais quoi… ?!
Auruo n’en pouvait plus d’attendre les mots que s’apprêtait à prononcer l’homme qu’il aspirait au fond de lui à devenir un jour.
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SHORT STORIES -A l’abri de la pluie - Chap. 01 : Livaï et Moblit Berner
D’épaisses gouttes de pluie tombaient d’un ciel gris comme la cendre et battaient les pierres de la chaussée.
« Oh là là… Comment vais-je faire ? » dit l’homme en se réfugiant sous l’auvent d'une boutique, les bras chargées de sacs. Un client, qui se trouvait déjà là, lui répondit sur un ton peu aimable :
« C’est qu’une averse passagère.
- Caporal Livaï ! » dit l’homme.
Il essaya de saluer et manqua au passage de faire tomber tout ce qu’il portait.
« Repos. Tu es... le lieutenant d’Hansi, pas vrai ?
- Oui, Caporal ! Je suis le commandant en second de la quatrième escouade, Moblit Berner.
- Tu fais des courses ?
- Oui, j’achète des livres et des médicaments, ainsi que des produits de première nécessité, pour le chef d’escouade… Et vous, Caporal ?
- Erwin m’avait fait venir. Soit disant pour parler d’un truc dont on ne pouvait pas discuter à la caserne.
- Et vous ne prenez pas de voiture pour rentrer ?
- Elles projettent de la boue à chaque fois qu’elles s’arrêtent.
- Je vois. » dit Moblit, se rappelant qu’en dehors du champ de bataille, Livaï était obsédé par la propreté.
*
Le caporal Livaï est l’opposé de notre chef d’escouade. Cependant, je sais qu’il y a une confiance mutuelle entre eux.
Un lien particulier les unissait. Ils avaient passé de nombreuses années ensemble. Un lien que Moblit n’avait jamais eu avec son supérieur. Il ressentit comme de la jalousie naître en lui, mais Livaï se contentait de regarder les nuages pluvieux et ajouta, presque comme s’il se parlait à lui-même :
« Ce doit être dur d’être le lieutenant de quelqu’un comme elle.
- Que voulez-vous dire ?
- Si Hansi se prend d’intérêt pour quelque chose, elle va faire fi de tout ce qu’il y a autour, même de ta propre vie.
- … Je considère qu’il est de mon devoir de protéger mon supérieur dans ce genre de situation.
- Ouais. Tu es bien le seul à pouvoir le faire.
- Comment ça ? »
Moblit ne comprenait pas le véritable sens de ces paroles, mais Livaï poursuivit, toujours sans le regarder :
« Aussi loin que remontent mes souvenirs, nous n'avons jamais été collés ensemble toute la journée. Tu es le seul à être toujours aux côtés d'Hansi, Moblit. »
L’averse s’était changée en un mince filet de pluie et les nuages se dissipaient dans le ciel.
« Aie davantage confiance en toi. Même si je sais bien qu’on ne peut pas toujours être optimiste. »
Je vois… Il me demande donc de continuer à prendre soin d’Hansi.
*
En un clin d’œil, la pluie disparut. Les rayons du soleil percèrent à travers les nuages et vinrent illuminer les deux hommes sous l’auvent.
« Ça s’est dégagé. Allez, donne-moi ça.
- Attendez, Caporal ! Celui-ci est lourd ! »
Livaï empoigna un des sacs que tenait Moblit et sortit à découvert. Sans daigner se retourner, il engagea Moblit à le suivre :
« On se rend au même bâtiment de toute façon. Et je serais content si Hansi pouvait avoir une dette envers moi.
- J’espère seulement que la capitaine remarquera votre présence, Caporal.
- Ça se réglera facilement avec un coup de pied au cul. » répliqua Livaï.
Tout en marchant derrière lui, Moblit se plut à imaginer un sourire gêné sur le visage du caporal Livaï.
[ Histoire animée par @luki-chan : ici ]
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SHORT STORIES - A l’abri de la pluie - Chap. 07 : Petra Ralle et Erd Gin
Toute la matinée, le ciel avait paru menaçant. Les nuages s’épaissirent soudainement dans l’après-midi et les premières gouttes se mirent à tomber.
« Argh.. C’est pas bon signe ! »
Petra Ralle, un des membres du Bataillon d’exploration, se trouvait dehors. Elle accéléra le pas mais la pluie s’intensifia et déversa des trombes d’eau sur elle, au point qu’elle n’eut d’autre choix que de courir se réfugier sous l’avant-toit d’une maison privée. Elle regarda le ciel et proféra un juron.
« Purée… J’étais presque arrivée !
- Je compatis.
-… Erd ?! »
Erd, un de ses camarades du Bataillon, la salua tranquillement en levant la main. Petra lui demanda ce qu’il faisait là.
« La même chose que toi, Petra. J’étais dehors et je rentrais à la caserne quand il s’est mis à pleuvoir, et je me suis retrouvé coincé ici.
- Ah, d’accord. »
Petra soupira et leva le nez pour regarder la pluie tomber, à l’abri sous le toit.
« Déçue que ce ne soit pas le caporal Livaï ici avec toi en ce moment-même ? la taquina Erd.
- Quoi ?! Non… Bien sûr que non !!!
- Alors, Auruo ?
- Est-ce que tu pourrais éviter de prononcer ce nom en ma présence? Merci ! »
Erd observa avec un sourire le visage de Petra passer d’un rougissement de gêne et de dénégation à la manifestation d’une authentique indignation.
« Je plaisante.
- Oui, eh bien, je te demande d’arrêter ! »
*
« A ce propos, Petra… As-tu entendu parler de notre nouvelle affectation ?
- Bataillon d’exploration, escouade tactique… Aussi connue sous le nom d’« escouade Livaï ». C’est bien ça ?
- En toute honnêteté, ça m’a étonné... » dit Erd en croisant les bras et en regardant vers le ciel. Je sais qu’il n’est pas surprenant que tu te retrouves dans la même escouade que le caporal. En revanche, Gunther, Auruo et moi-même n’avons pas souvent fait équipe avec lui par le passé.
- Maintenant que tu le dis… C’est vrai. »
Les deux soldats visualisèrent sous la pluie battante le visage de Livaï, qui allait bientôt devenir leur supérieur direct.
« Il faut dire aussi qu’on va être chargé de surveiller cette recrue qui possède le pouvoir des titans. Le caporal va avoir besoin de soldats extrêmement fiables dans l’escouade.
- Et solides mentalement, cela va de soi. Je sais bien que nous ne sommes pas si nombreux que ça dans le Bataillon... Il a cependant choisi chacun de nous individuellement, en sachant qui nous étions. Il voit tout. »
Erd n’essaya pas de cacher sa surprise et sa satisfaction quant au fait que Livaï avait détecté et reconnu leur valeur.
« Tu as raison…. On ne peut même pas dire que nous sommes des vétérans à ce stade, n’est-ce pas ?
- Il doit nous suivre de près. Même si nous ne sommes pas dans la même escouade et même si nous n’avons pas combattu ensemble depuis des années. Et c’est ce qui me donne envie de le suivre…, ajouta Erd. Cette équipe est pleine de points d’interrogation, mais, en même temps, je suis on ne peut plus heureux. Non seulement parce que mes qualités ont été reconnues, mais aussi parce que je vais travailler directement sous les ordres du caporal.
- Moi aussi. » dit Petra. Cette conversation lui fit à nouveau prendre conscience d’une réalité qu’elle avait oubliée : même si Livaï affichait toujours un air revêche et bougon, il gardait un œil sur tout le monde. C’était cette attention pointilleuse aux détails qui avait fait de lui un officier digne de confiance.
*
Peu à peu, la pluie diminua d’intensité et les rues se remplirent à nouveau de monde.
« Ecoute, je ne sais rien de ce gosse qui a le pouvoir de se transformer en titan… mais, quoi qu’il en soit, apportons tout notre soutien du caporal ! D’accord ? dit Petra.
- Bien sûr, acquiesça vivement Erd en décroisant les bras. Il n’est pas seulement doué sur le champ de bataille. La confiance des soldats qui sont sous ses ordres, comme nous… est aussi une des armes les plus redoutables du caporal.
- Bien dit ! Soyons à la hauteur ! »
Sans même se concerter, les deux soldats sortirent en même temps de leur abri. Puis, comme pour faire voir un avant-goût du travail d’équipe dont ils allaient continuer à faire preuve, ils dévalèrent la rue en direction de la caserne, sous la pluie qui n’était plus qu’un fin crachin.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 12 : Le point de vue de Reiner
L’affaire de l’invitation anonyme (3/3)
Au moment du dîner – quelques jours après l’arrivée de la lettre anonyme au sein de la Brigade d’entraînement…
Les jeunes soldats étaient occupés à papoter : ils se demandaient lequel d’entre eux avait le droit d’accepter l’invitation à dîner que contenait la lettre.
« Est-ce que Reiner Braun est ici ?
- Hein ?... »
La voix de l’instructeur avait retenti dans le réfectoire et le silence tomba en un instant. Autre fait surprenant : l’instructeur venait d’appeler quelqu’un dont le nom n’était pas censé sortir de sa bouche.
« Rends-toi dans le bureau des instructeurs après le dîner !
- Reçu, Monsieur ! »
Reiner se leva et fit un salut, même s’il ne comprenait pas pourquoi il était convoqué. En principe, seuls les fauteurs de trouble étaient envoyés dans le bureau des officiers … Reiner avait d’excellents résultats ; il n’était pas du genre à fréquenter ce bureau.
« Hé, voyez-vous ça ! Toi, Reiner, convoqué dans le bureau des officiers ?! »
Quelle peut bien en être la raison… ? Je n’ai rien fait de mal.
*
Reiner se rendit dans le bureau des instructeurs dès qu'il eût fini son repas. Étrangement, son instructeur montrait la même attitude détachée que d’ordinaire.
« D’après ce que je comprends, tu as secouru un civil égaré lors de notre exercice d’entraînement en montagne l’autre jour, dit-il.
- Pour être exact, je me suis assuré que cela ne gênerait pas les manœuvres de mon escouade... et j’ai ramené un individu - que j’ai croisé au moment où j’allais chercher de l’eau - jusqu’au chemin en bas de la montagne. Je crois bien avoir mentionné cet incident dans mon rapport... »
En fin de compte, l’instructeur avait-il jugé cette initiative déplacée pour un chef d’escouade ? Reiner était sur le point de se justifier lorsque l’instructeur l’arrêta pour l’informer qu’il n’avait rien fait de mal.
« Une lettre de remerciement a été envoyée par ce civil à l'ensemble des Brigades d'entraînement. Une autre lettre est parvenue jusqu’à nous par simple voie postale l’autre jour, mais, apparemment, l’expéditeur avait oublié d’écrire le nom du destinataire. C’est la raison pour laquelle il a envoyé une troisième lettre. »
L’instructeur présenta une enveloppe sur laquelle était inscrit le nom de Reiner. Ce dernier reconnut le papier de l’enveloppe. Il n’eut pas besoin de se faire prier pour l'ouvrir.
« ...Hein ?! Ça change tout… !! »
*
« Ainsi, le courrier de l’autre jour, que nous avons pris pour une lettre d’amour… ?
- … n’était qu’une simple lettre de remerciement, selon toute vraisemblance. L’auteur est le même : l’enveloppe, l’encre et l’écriture … tout coïncide. » conclut l’instructeur.
Reiner retourna au réfectoire. Il expliqua toute la situation à ses camarades, puis leur montra la nouvelle lettre qu’il tenait à la main, et leva le mystère sur la précédente lettre qu’ils avaient reçue.
« Au fond, je pense que cette histoire a du bon. On te propose un repas gratuit, n’est-ce pas ? De plus, l’écriture est élégante. Elle appartient sans doute à une belle…
- C’était un homme d’âge mûr.
-… Pardon ?
- L’homme que j’ai aidé était d'un certain âge - à peu près le même que notre instructeur. »
Après un moment de silence, tout le réfectoire éclata de rire.
*
« Ha ha ha ! On ne s’était donc pas trompé ? » lança Ymir, qui se tordait de rire.
Plusieurs filles hochèrent la tête. En effet, en échangeant leurs informations dans le dortoir l’autre soir, elles étaient arrivées à la conclusion que c’était Reiner qui avait aidé le civil.
« Ah, les filles étaient donc au courant ! On ne s’est aperçu de rien !!
- En tout cas, Reiner, tu m’épates : faire preuve d’autant d'amabilité et escorter un civil alors que tu étais au beau milieu de cet exercice éprouvant... Si j’avais été à ta place, je lui aurais au mieux donné une direction à l’aide de la boussole, et rien de plus. » intervint Eren.
Il complimentait Reiner sans rigoler. Ce dernier prit un air grave pour s’expliquer :
« Nous sommes des soldats. Nous ne pouvons pas accepter de laisser des gens dans le besoin - peu importe la situation. » déclara-t-il.
… Il cherchait à en imposer, mais ses camarades n’étaient visiblement pas prêts à s’arrêter de rire maintenant qu’ils avaient commencé.
« Quoi qu’il en soit, tu devrais saisir l’occasion de profiter d’un bon repas en tête à tête avec l’homme que tu as sauvé, déclara l’un d’eux.
- J’ai déjà donné ma réponse à l’instructeur : je refuse l’invitation… N’importe lequel d’entre nous aurait fait la même chose. Ce ne serait pas juste que j’accepte. »
Les réactions de ses camarades commençaient à l’agacer et il tenta d’entraîner tout le monde vers les dortoirs. A ce moment-là, Bertolt fit une chose inhabituelle : il s’approcha de Reiner, soupira, et le mit en garde :
« Reiner… Tu peux te montrer attentionné… mais je ne veux pas que cela finisse par te mettre en fâcheuse posture…
- Ouais, je sais bien. Cela ne m’amuse pas du tout que l’on se moque de moi. »
Bertolt soupira de nouveau sans faire de bruit. Le soldat Reiner prit les paroles de son ami comme une simple marque d’exaspération et suivit Bertolt en direction du dortoir tout en se grattant la tête.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 08 : Le point de vue d’Annie
L’affaire du thé des soldats du Bataillon (2/3)
« … Et ainsi, certains colis de thé que nous avons fait partir l’autre jour contenaient des paquets absolument impropres à la consommation. Je vous demande de récupérer aujourd’hui tous les colis de thé envoyés aux soldats et de leur en fournir de nouveaux à la place. Ce sera tout. »
Le ton sur lequel l’officier des Brigades spéciales s’était adressé à eux était encore plus sec qu’à l’ordinaire. Néanmoins, il n’avait visiblement pas l’intention de se déroger à ses habitudes en refilant tout son travail aux recrues. Il leur ordonna d’obtenir des résultats rapides, puis retourna dans la salle réservée aux officiers.
« C’est bizarre. Les provisions que nous fournissons au Bataillon d’exploration et à la Garnison sont toujours médiocres. Pourquoi s’embêter à récupérer du mauvais thé ?
- Même si le thé est une gourmandise, c’est un produit qui rentre dans le corps. Si quelqu’un tombait malade, on chercherait un coupable. »
Annie se tenait à l’écart du groupe des nouvelles recrues. Elle cherchait un moyen d’échapper à cette pitoyable mission.
… Tout ceci est stupide.
*
Les recrues se dispersèrent. Annie fut la dernière à partir ; elle se retourna par hasard. La porte de la salle avait été laissée entrebâillée - peut-être par les officiers pressés de se retrouver seuls.
… Tiens, aucun d’entre eux ne boit aujourd’hui ?…
Annie jeta un coup d’œil à l’intérieur et ce qu’elle vit l’intrigua. Elle laissa ses camarades partir devant et tendit l’oreille, tapie dans l’ombre.
« … Ainsi, tu crois qu’on va réussir à le retrouver ?
- Il n’y a pas trente-six mille endroits où il a pu être envoyé ! Ce n’est qu’une question de temps. Le plus embêtant, en revanche, c’est qu’une partie du thé a déjà été envoyée au Bataillon d’exploration. »
La discussion des officiers portait sur le thé impropre à la consommation. Cette recherche de thé semblait leur tenir à cœur ; or, il n’était pas dans leur habitude de manifester autant de zèle. De plus, des membres des Brigades spéciales si haut placés qu’Annie ne les avait jamais vus travailler auparavant, s’agitaient et faisaient les cent pas dans la salle.
Le Bataillon d’exploration…
« C’est à Erwin que nous aurons affaire ! S’il le trouve, il peut s’en servir contre nous un jour.. »
Des amis d’Annie se trouvaient dans le Bataillon d’exploration. Par ailleurs, d’après ce qu’elle entendait, cette histoire de thé pouvait potentiellement devenir un scandale majeur, capable de nuire aux Brigades spéciales.
Ce n’est que du thé. Pourquoi s’en soucier à ce point ? Je crois bien… que je devrais me renseigner sur cette affaire.
Par expérience, Annie savait qu’obtenir un supplément d’informations n’était pas de trop : elle pourrait s’en servir à son profit si les choses tournaient mal. Elle informa ses camarades qu’elle se mettait au travail, puis se dirigea vers la salle des archives.
*
… Le jour où le thé que nous sommes censés récupérer a été expédié, les hauts gradés devaient avoir un rendez-vous avec des membres influents du Culte du mur. Or… leur planning a été modifié immédiatement après l’envoi des colis.
Par chance, les membres des Brigades spéciales avaient tout le temps nécessaire pour tenir des registres. Ils conservaient des informations plutôt détaillées sur les colis qui transitaient.
Voici le rapport, établi la veille de l’envoi, concernant les dons de nobles… Ces derniers ont donné de l’argent, mais aussi… des bijoux ?
« Hé, Annie ! Crois-tu trouver une piste en parcourant les documents avec cette tête ? Tu dors les yeux ouverts ou quoi ?
- Ouais, peut-être.
- Mon Dieu, que tu peux être barbante ! »
Annie répliqua aux remarques sarcastiques d’un autre soldat des Brigades spéciales, avant de consulter de nouvelles archives.
Et l’endroit où ces bijoux ont été entreposés…n’est renseigné nulle part ? Les bijoux n’ont jamais vu l’entrepôt ; ils ont été placés ailleurs…
Annie devina aisément où ces bijoux avaient été cachés.
« ...Je comprends à présent. » murmura-t-elle afin de ne pas être entendue.
Elle referma le registre. Elle venait d’éclaircir l’affaire… et elle n’avait pas l’intention de travailler davantage.
*
« Tu penses être sur une piste, Annie ? Cela fait un moment que tu as le nez plongé dans le même registre. » s’enquit un camarade qui prenait son travail au sérieux. Il fondait ses espoirs sur Annie. Or, cette dernière n’avait aucune intention de lui révéler la vérité.
… Je ne dois pas attirer l’attention des autres. Je vais l’envoyer balader.
« … Je n’ai rien trouvé d’intéressant.
- Je le l’avais dit, elle se tournait les pouces et faisait juste semblant de travailler. Il n’y a que toi qui prends cette mission au sérieux, Marlowe. »
Marlowe détourna son attention d’Annie quand il se rendit compte qu’une recrue piquait un somme juste à côté d’elle. Il devint rouge de colère. Annie ne put s’empêcher de lui révéler une information quand elle vit que le ton allait monter.
« Ce que les officiers recherchent… est probablement loin, bien loin d’ici, en ce moment. Les soldats des Brigades qui sont sur place devraient s’en charger...
- Ce n’est pas une raison pour qu’on tire au flanc !!! Peuh…. »
Visiblement, les paroles d’Annie n’aidèrent pas Marlowe à prendre conscience du fond du problème ; il restait fixé sur l'accomplissement de la mission qu’on lui avait confiée. Soit c’était un idiot, soit ce que l’on pouvait appeler un homme honnête. Annie savait qu’il existait des gens appartenant à cette espèce.
Si c’est au Bataillon d’exploration que la cargaison a été envoyée… ce n’est pas à moi de jouer les justiciers.
Annie se disait également que la personne qu’il fallait pour mettre à jour cette affaire de corruption appartenait forcément à la catégorie des gens honnêtes.
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SHORT STORIES 2 - Histoires au cœur de la nuit (aux environs de minuit) - Chap. 16 : Eren Jäger
Une histoire tournée vers le passé
Minuit approchait dans l’ancien siège du Bataillon d’exploration. Les membres de l’escouade tactique du Bataillon, plus connue sous le nom d’escouade Livaï, s’étaient équipés et rassemblés dans une salle où ils se préparaient pour être en mesure de tester les pouvoirs d’Eren, leur sujet d’étude.
« Hansi et le Caporal sont en retard, murmura nerveusement Eren.
- Ils sont sans doute occupés à donner des détails aux gradés. Après tout, mener des expériences de nuit est dangereux, précisa Petra pour tenter de le rassurer.
- C’est vrai, Eren. Nous ne te connaissons qu’à travers la lecture de rapports. On ne sait pas vraiment qui tu es. D’ailleurs, pourquoi ne pas nous en dire plus sur toi pendant que nous attendons ? » proposa Erd, leur chef.
Tout le monde se tourna vers Eren.
« Quoi ? Mais je ne sais pas quoi dire…
- Tu peux raconter n’importe quoi, même des choses anodines. Par exemple, une anecdote du temps où tu étais dans les Brigades d’entraînement. » proposa Gunther d’un ton décontracté pour l’encourager à parler.
Les pouvoirs exceptionnels d’Eren ne lui donnaient pas le droit de désobéir à ses aînés.
« … Bon, très bien.
- Tu as intérêt à nous amuser, le bleu !
- Arrête de te montrer aussi odieux, Auruo. Tais-toi et écoute ce qu’il a à dire ! »
Eren but une gorgée de thé avant de commencer…
*
« Mon père était médecin… et je considère que je suis né dans une famille plutôt privilégiée. Le fait d’accueillir Mikasa après la mort de ses parents n’a pas vraiment changé notre train de vie. »
Eren commença à se remémorer l’ensemble de sa vie, courte mais mouvementée.
« Ah, tu veux parler de la recrue qui fusillait du regard le Caporal quand il te donnait des coups de pied ?
- Oui, elle fait partie de ma famille… Et elle, elle a perdu sa famille à deux reprises. »
Les soldats qui l’écoutaient comprenaient mieux à présent : la réaction effrontée de la jeune fille durant le procès était liée à sa volonté de protéger les personnes les plus importantes pour elle. Rien d’anormal là-dedans.
« Après tout, elle a grandi au sein d’un foyer chaleureux qu’elle vu être anéanti sous ses yeux...
- Oui. Et ensuite, nous nous sommes retrouvés dans un camp. »
*
Eren et Mikasa, encore petits et accompagnés de leur ami d’enfance, Armin, s’étaient entraidés pour survivre dans le camp où l’on cultivait des terres arides pour essayer de faire pousser la moindre petite denrée.
« Déjà à cette époque… Mikasa avait une force phénoménale. Elle pouvait déblayer des rochers - qui donnaient même du fil à retordre à des adultes - à l’aide d’un simple levier.
- Elle n’a donc pas trahi sa réputation une fois rentrée dans les Brigades d’entraînement.
- C’est vrai. Nous avons fait les démarches pour y rentrer tous les trois au même moment. L’entraînement était dur au début… mais, grâce à cela, nous avons acquis les compétences nécessaires pour faire face aux titans. »
Eren serra le poing et repensa aux heures innombrables qu’ils avait passées à s’entraîner. A cette époque, il était tellement occupé à garder la tête hors de l’eau à tout prix qu’il voyait à peine ce qui se passait autour de lui.
« C’est vrai… J’ai pu rencontrer beaucoup de jeunes gens de mon âge, qui avaient des histoires très différentes…. Je crois bien que c’était une bonne expérience aussi. »
Annie, qui ne parlait pas beaucoup, mais qui lui avait appris des techniques de combat au corps à corps. Reiner, qui, de tous, était celui qui se comportait le plus en soldat et qui avait gagné la confiance de tout le monde. Jean, avec qui il avait toujours été en désaccord, mais dont l'habileté à manier le dispositif de manœuvre tridimensionnelle était une source d’inspiration…
En y repensant, Eren se rendait compte que c’était certainement dans les Brigades d’entraînement qu’il avait appris pour la première fois à se sociabiliser.
*
« Ah… Ouais, tu étais juste une recrue ordinaire au final. Les recrues de ma promotion étaient des gens importants à mes yeux aussi.
- Hé, Petra ! Et que penses-tu des potes que tu t’es faits ici, dans le Bataillon d’exploration ? » plaisanta Erd.
Petra souriait depuis qu’Eren avait fini de parler.
« Tu sais déjà ce que j’en pense ! Vous êtes tous chers à mes yeux. »
En voyant les marques de confiance que ses aînés s’échangeaient, Eren baissa tout à coup les yeux. Il ne savait encore rien des autres membres du Bataillon d’exploration.
« Est-ce que… moi aussi… je deviendrai, un jour, un camarade en qui vous avez confiance ?
- Peuh. Cela dépendra de toi…
- Je croyais t’avoir dit d’arrêter de parler sur ce ton…Honnêtement, Eren, on te connaît encore assez mal. Cependant, après avoir entendu ce que tu viens de raconter, j’ai le sentiment que c’est possible.
- Merci...beaucoup. »
Au moment où Eren prononça ces mots, les soldats entendirent la porte s’ouvrir. Tout le monde se retourna.
« Désolés de vous avoir tous fait attendre !
- Nous avons obtenu l’autorisation. On va commencer l’expérience. »
Les membres de l’escouade Livaï saluèrent leurs supérieurs, qui venaient de les rejoindre. Au milieu d’eux, Eren était devenu un soldat comme les autres.
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SHORT STORIES - A l’abri de la pluie - Chap. 06 : Nanaba et Hansi Zoe
Une pluie froide s’était mise à tomber dans la matinée.
Dans le Bataillon d’exploration, plus un soldat a de l’ancienneté – s’il y arrive -, plus on lui donne de la paperasse à faire. Nanaba eut envie de soupirer en voyant les piles de documents qui l’attendaient.
Erwin et Mike ont encore plus de travail que moi. Il faut que je me ressaisisse.
Nanaba était un soldat vétéran du Bataillon d’exploration : elle servait en son sein depuis plus de cinq ans. A travers les carreaux de la fenêtre de son bureau - qui étaient embués en raison de la différence de température entre l’intérieur de la pièce et le monde pluvieux et glacé au dehors - Nanaba aperçut une silhouette familière et chancelante. Elle se leva brusquement.
« … Hansi ?! »
*
« Tu as décidé d’aller faire un tour pour te rafraîchir ? Tu n’as même pas de quoi te protéger de la pluie !
- C’est que… mes spécimens n’étaient pas très réactifs aujourd’hui... C’est dommage. Il sont tellement mignons. »
Hansi ne se baladait pas : elle déambulait, ça et là, en titubant, comme un mort sorti tout droit de sa tombe. Nanaba avait récupéré Hansi et l’aidait à se sécher à l’intérieur.
En principe, ce n’était pas le rôle de Nanaba de s’occuper d’Hansi. Mais les deux anciennes du Bataillon entretenaient une bonne relation. Un lien unique se tissait entre les soldats qui sortaient des murs et revenaient en vie.
« Je vais te parler franchement. Tu es censée être chef d’escouade, non ? Tu ne peux pas t’amuser à vagabonder, complètement trempée, sous la pluie. Ce n’est pas un bon exemple à donner.
- Chef d’escouade, tu dis ?... Ouais, je suis chef d’escouade, à ce qu’il paraît. »
Hansi enleva brusquement la serviette qui lui avait servi à se sécher la tête, révélant une tignasse dans un état encore plus déplorable que d’habitude. On aurait dit que toute la tête d’Hansi s’affaissait.
*
« Tu ne crois pas que tes réactions émotionnelles sont exagérées ?
- Ouais… peut-être un peu. »
Hansi rendit à Nanaba la serviette mouillée avec laquelle elle venait de s’essuyer le corps. Elle s’approcha ensuite de la fenêtre :
« Les grades du Bataillon d’exploration correspondent simplement au nombre d’années où on a réussi à survivre, pas vrai ?
- Oui… C’est vrai. » répondit Nanaba.
Elle ne comprenait pas où Hansi voulait en venir. Elle fronçait les sourcils. Hansi lui tourna le dos et suivit des yeux les gouttes qui ruisselaient le long de la vitre.
« En d’autres termes, on monte en grade parce qu’un nombre important de nos camarades y laissent la vie. Quand je joue mon rôle de chef d’escouade… je me prends parfois à penser à ce genre de choses.
- … Ce que tu dis est vrai. »
Les gouttes qui coulaient le long de la vitre ressemblaient à des larmes sortant des yeux d’Hansi – bien que son visage fût caché derrière ses lunettes. En voyant cela, Nanaba se leva.
« Bien sûr que c’est vrai. Cependant… c’est précisément pour cette raison que nous sommes chargés d’une mission particulière en tant que vétérans.
- Hein ?
- C’est aussi pour honorer la mémoire de nos camarades morts au combat…. que les vétérans doivent guider comme il se doit les jeunes soldats ! Du moins, afin d’éviter d’autres morts inutiles. » déclara gaillardement Nanaba en donnant une tape dans le dos d’Hansi.
*
« C’est pourquoi, Hansi, tu ne devrais jamais te mettre dans un état lamentable. Même si nous sommes à l’intérieur des murs. Tu vas inquiéter les soldats de la quatrième escouade - et tu inquièteras aussi les autres soldats, dans une certaine mesure.
- Tu as raison. »
Hansi ôta ses lunettes et les essuya avec sa manche. Elle les replaça sur son nez et croisa le regard de Nanaba. Elle avait retrouvé son visage habituel : brûlant de curiosité.
« Je jouais peut-être un peu la comédie… Je vais retourner de ce pas à mes recherches. Collecter des données sur le comportement des titans par temps de pluie est utile aussi !
- Attends ! Tu devrais au moins te couvrir ! »
Hansi bondit hors de la pièce et courut à l’autre bout du couloir. Elle n’entendit peut-être pas les conseils de Nanaba.
Ainsi, voilà sur quoi est juché un vétéran… les cadavres entassés de ses anciens camarades.
Nanaba ferma la porte et réfléchit aux paroles d’Hansi.
Ce que j’ai dit est valable pour moi aussi... Il faut que je sois à la hauteur. Afin de prouver que leur mort et ma survie n'étaient pas vaines.
Nanaba hocha légèrement la tête tandis que la pluie interminable continuait de s’abattre sur le rebord du toit et sur la fenêtre, puis elle se remit au travail.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 06 : Le point de vue de Nifa
L’affaire du laboratoire saccagé (3/3)
Le laboratoire d’Hansi avait été saccagé, bien que la pièce fût fermée à clé sans possibilité d’entrer ou de sortir. Hansi, qui se trouvait à l’intérieur, n’avait aucun souvenir de ce qui s'était passé. Tout le monde cherchait à éclaircir ce mystère.
Nifa travaillait sous les ordres d’Hansi. Elle déclara avoir apporté à sa supérieure des outils en vue de l’expérience que cette dernière s’apprêtait à faire, quelques instants avant que la pièce ne fût fermée à clé.
« Tu peux poser le module n°1 - la bûche à taille réduite - devant cette étagère de livres. Le module n°2 - le balancier – doit être placé devant le bureau. Et mets le module n°3 - le piège à fils - près de l’autre étagère ! »
La pièce était loin d’être grande, mais Nifa y déposa, les uns après les autres, les modèles réduits qui devaient servir à fabriquer le piège.
Est-ce vraiment une bonne idée d’amener ces machins ici… ?
D’un autre côté, leurs ressources n’étaient pas illimitées. Ils étaient obligés de faire au moins quelques expériences avec des modèles réduits avant d’entreprendre quoi que ce soit à plus grande échelle. Nifa le savait ; c’est pourquoi elle avait obéi aux ordres d’Hansi.
*
« J’aimerais rester seule pendant un certain temps. Je vais m’enfermer à clé, d’accord ? Si quelqu’un vient, tu t’occupes de lui, Nifa. S’il s’agit de documents administratifs ou autres, et que ce n’est pas urgent, donne-les à Moblit ! » dit Hansi avant de changer ses lunettes de vue pour des lunettes de protection.
Elle semblait prête à plonger tête baissée dans ses recherches.
Le chef d’escouade n’a même pas dormi la nuit dernière… La laisser seule ne m’enchante pas vraiment, mais bon…
Nifa s’inquiétait pour son chef d’escouade. D’un autre côté, elle avait confiance en Hansi, qui avait survécu plus d’une fois à des situations de danger mortel.
« S’il vous plaît, ne faites rien de déraisonnable !
- Le mot déraisonnable ne fait-il pas partie du quotidien des soldats du Bataillon ?
- Mais nous sommes à l’intérieur des murs ! Je viendrai vous chercher quand il sera l’heure de faire une pause. »
Hansi lui assura qu’elle allait s’en sortir, à condition qu’on lui apporte les derniers outils dont elle avait besoin. Nifa et les autres soldats de l’escouade devraient simplement gérer le reste. Nifa se résolut enfin à partir. Elle ferma la porte et entendit Hansi la verrouiller de l’intérieur.
*
Petra ressentit un choc en entendant parler des prototypes et elle bondit sur ses pieds.
« Vous avez testé de lourds balanciers et des pièges à bûche en intérieur ?! N’est-ce pas extrêmement dangereux… ?
- Ils sont à taille réduite ; ce sont des prototypes. Le plus grand fait la taille de cette chaise. » répliqua Hansi en utilisant ses bras pour montrer la taille des prototypes.
Livaï restait abasourdi :
« Pourquoi as-tu fermé la porte à clé ? Tu ne t’es pas dit que personne ne pourrait venir t’aider en cas d’accident ?
- C’est vrai ! Vous auriez dû demander au moins à quelqu’un… »
Quand Nifa entendit Petra, elle se rappela que la jeune soldate valorisait fortement le travail d’équipe.
… Mais cela ne voulait pas dire que les camarades de Nifa, de leur côté, ne s’occupaient pas les uns aux autres.
« Je travaille à l’élaboration de pièges qui peuvent se déclencher par inadvertance. Si jamais une personne, n’étant pas au courant de ce que j'étais en train de faire, entrait dans le laboratoire et activait par hasard un piège, cela pourrait être dangereux. »
… Voilà le genre de personne qu’est Hansi.
Même si on pouvait croire qu’Hansi était complètement absorbée par son projet, en réalité elle pensait également aux autres. C’était cet altruisme qui avait causé l’incident. Les autres soldats de l’escouade d’Hansi se firent la même réflexion que Nifa. Ils se sentirent en partie responsables de ce qui était arrivé.
« … L’un d’entre nous aurait dû rester avec elle.
- Ne vous en faites pas pour moi ! Je suis encore en vie. J’ai simplement un trou de mémoire. Nifa, tu as bien dit que tu avais deviné ce qui s’était passé ? Explique-nous !
- Allons sur place ! »
A moins que la vérité ne soit révélée, Hansi continuerait d’être tenue comme responsable de l’incident. Nifa savait qu’elle allait devoir apporter des preuves à sa théorie. Ainsi, elle se rendit, accompagnée de ses supérieurs et de ses camarades d’escouade, à l’endroit où tout avait eu lieu.
*
La pièce était toujours en pagaille, mais Nifa posa immédiatement les yeux sur un morceau de bois qu’elle s’empressa d’aller ramasser.
« Regardez ! Vous avez changé la taille de la maquette, n’est-ce pas ?
- Oh… Maintenant que tu le dis... »
Nifa leur montrait un étai censé maintenir un prototype posé au sol ; mais un morceau de table y était accroché.
« C’est vrai, l’expérience à taille réduite était concluante ; j’ai donc voulu modifier l’échelle pour essayer de toucher un titan de 7 à 8 mètres… J’ai mis le piège à balancier sur le bureau… et c’est à ce moment-là que l’accident s’est produit. »
En entendant cela, Moblit examina minutieusement le bureau et la taille du piège, compara celle-ci à la taille d’Hansi et arriva à la même conclusion que Nifa.
« La bûche de ce balancier a dû tomber sur vous et vous frapper à la tête, Chef d’escouade. Voilà pourquoi vous avez perdu connaissance…
- Ensuite, la base s’est effondrée et le balancier est venu frapper l’étagère…
- … Et tous les livres sont tombés sur le matériel de recherche, d’où cette pagaille… Permettez-moi, Chef d’escouade... »
Pour vérifier sa théorie, Nifa se mit sur la pointe des pieds et plongea les mains dans la chevelure perpétuellement attachée d’Hansi.
« Vous avez une énorme bosse sur la tête !
- Ah, oui. Vous savez, parfois on se cogne à des endroits où ne sent pas vraiment cette bosse.
- C’est possible, mais bon... »
Il était évident que l’amnésie passagère d’Hansi expliquait également le fait qu’elle n’avait pas senti la douleur.
« … Nous aussi, nous allons écrire une lettre d’excuse. C’est l’ensemble de l’escouade qui a eu l’idée de ce piège, après tout. »
Tout le monde approuva et s’attaqua au nettoyage de la pièce sans plus tarder.
« Je vais accepter la sanction pour ce qui est arrivé. Quoi qu’il en soit, nous avons appris que cette arme, même sous forme de modèle réduit, peut servir contre les humains.
- Avant tout, pouvez-vous, s’il vous plaît, aller voir un docteur et faire examiner cette bosse ?
- Avec un peu de chance, une fois que nous aurons commencé à ranger, nous nous rendrons compte que peu de matériel a été détruit. » dit Nifa avant de pousser Hansi hors de la pièce.
« Désolée… Je vous revaudrai ça ! » lança le chef d’escouade.
Les soldats se contentèrent de hausser les épaules tout en commençant à ramasser les livres et à rassembler les bouts de bois.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 03 : Le point de vue d’Ymir
L’affaire des patates cuites disparues (3/3)
Alors comme ça, Christa et moi sommes dans deux escouades différentes demain pour la marche logistique.
Quelques heures avant que l’affaire sensationnelle des patates disparues ne soit découverte...
On va devoir marcher très longtemps, mais il y a peu de nourriture….Ça a l’air assez ardu. La connaissant… elle va sûrement donner sa ration à une recrue de bas-étage.
Seule en allant chercher de l’eau, Ymir était plongée dans ses pensées. Elle passa alors devant l’entrepôt, un seau à la main.
Ce sont… des soldats de la Garnison ? Ils se tournent les pouces pendant leur service ?
« Hé, vous ne surveillez pas l’entrepôt ?
- Qui voudrait voler cette nourriture infâme qu’on sert aux recrues ? »
Ymir eut un signe d’agacement en observant les soldats bavasser.
On dirait qu’ils se foutent de tout… Attends une minute...
Une idée lui traversa l’esprit. Si un incident se produisait, des gardes aussi peu scrupuleux dans leur travail chercheraient sûrement à étouffer l’affaire.
*
Puis, après le dîner, ce jour-là.
Je me sens mal vis-à-vis de Sasha. L’avoir envoyée à la cuisine comme ça… Mais elle n’aura qu’à tenir le coup. Des soldats sont en train de faire les chargements pour demain et d’équiper les chevaux. Si seulement je pouvais glisser ces machins dans un des sacs...
Ymir se dirigea vers l’écurie en faisant attention à ne pas être vue. Une voix surgit alors de nulle part, du côté des chevaux qui attendaient.
« … C’était donc toi.
- Armin ! … Qu’est-ce que tu fais ici ?
- Et toi, Ymir ? Pourquoi es-tu dans l’écurie ?
- J’sais pas… Pourquoi tu ne réponds pas à ma question en premier ? »
Le jeune homme de petite taille dardait un regard insistant et résolu sur sa camarade (un regard qui contrastait avec sa corpulence).
« Je… me cachais pour avoir une discussion avec la personne qui allait se montrer ici, à cette heure tardive. »
Quand il comprit qu’Ymir n’allait rien lui répondre, Armin expliqua tout le raisonnement qui l’avait amené à faire cette supposition.
« … L’affaire des patates disparues ne se résumait pas à un vol de nourriture commis par quelqu’un qui voulait manger en douce. Dans l’histoire, c’est une grosse quantité de patates qui a été volée.
- … C’est pas cool, ça. Tu crois que ce sont des bandits ?
- Des bandits intéressés par l’argent n’auraient pas volé quelque chose qui ait si peu de valeur… Je crois qu’il s’agit en fait de quelqu’un qui avait besoin de nourriture pour l’entraînement. »
Armin baissa la tête quelques instants, avant de regarder Ymir droit dans les yeux.
« C’était une supposition hasardeuse… mais je me suis dit que si une recrue voulait cacher des denrées, elle les mettraient dans le fourrage des chevaux. De cette façon, elle pourrait même les transporter à dos de cheval vers un autre endroit. C’est pour cette raison que j’étais ici ; j’attendais que cette recrue arrive à l’écurie.
- Comment crois-tu que je m’y suis prise pour les voler, alors ?
- Ce n’est qu’une supposition… mais quand tu devais aller chercher l’eau, tu as rempli ton seau et tu as jeté son contenu près de l’entrepôt. Ensuite, tu as rempli le seau de pommes de terre et tu es allée les cacher dans le fourrage. Le sol autour de l’entrepôt était mouillé : c’est la preuve que tu as bien vidé ton seau à cet endroit. »
Ymir laissa échapper un profond soupir en entendant Armin éclaircir toutes les zones d’ombre de l’affaire.
*
« Et donc ? Est-ce que tu vas me balancer ?
- Je veux… te laisser décider. Tu n’aurais pas eu besoin de voler une caisse de patates entière si c’était pour ton seul bénéfice. »
Armin poursuivit ses explications ; il y avait du dépit dans sa voix, comme s’il était responsable de ce qui était arrivé.
« Est-il possible… que tu aies pris le risque de te faire attraper en volant toute une caisse afin que les autres puissent en profiter ?
- Tu crois vraiment que j’ai un si grand cœur ?
- Tu n’as pas besoin d’autant de patates, à moins que tu ne veuilles en donner aussi aux escouades de tes camarades comme Christa ou Sasha.
- Hmm… Vraiment ? »
Ymir se gratta la tête et se tourna pour regarder les patates volées ; elle semblait se demander ce qu’elle devait faire. Maintenant qu’elle était démasquée, peut-être valait-il mieux les rendre de bonne grâce.
D’un autre côté, si l’exercice d’entraînement est maintenu, elle va…
« Grâce cette affaire, j’ai réalisé que la quantité de nourriture dont on disposera demain pour l’entraînement n’est pas suffisante. »
On aurait dit qu’il avait anticipé les pensées d’Ymir ; il sortit son carnet et lui montra les notes qu’il avait prises. Il avait établi un plan détaillé qui devait permettre d’arriver au bout de l’exercice d’entraînement avec la faible quantité de nourriture fournie.
« J’ai essayé de réfléchir à des préparatifs. D’après mes calculs, on pourrait s’en sortir… Qu’est-ce que tu en penses ?
- Est-ce que tu vas raconter ce que j’ai fait à Chri... à tous les autres ? »
Armin hocha la tête. Ymir se dit que si ce plan avait été élaboré par Armin lui-même, il fonctionnerait d’une manière ou d’une autre.
« Je vais ramener les patates. S’il le faut, j’accepterai la punition, quelle qu’elle soit… parce que j’ai confiance en tes calculs.
- Tu es vraiment quelqu’un de bien, Ymir. C’est pour tes amies que tu as fait...
- Je l’ai fait pour moi. Maintenant, dégage ! Je vais ramener ces patates. » le coupa Ymir tout en indiquant la direction de l’entrepôt au cheval qui portait les sacs qu’elle avait remplis.
Elle n’aimait pas l’idée d’avoir à s’expliquer auprès des soldats de la Garnison et de devoir les supplier, mais, quoi qu’il en soit, elle se sentait plus légère. Comme si un sujet de préoccupation tenace qui lui avait pesé sur le cœur s’était envolé.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 02 : Le point de vue d’Armin
L’affaire des patates cuites disparues (2/3)
Cette journée était somme toute banale jusqu’à ce que surgisse l’affaire des patates cuites disparues. En guise de punition pour cette disparition, le repas des recrues avait été réduit en quantité et tout le monde était alors dépité.
« Nous avons moins à manger pour le dîner ; et tout ça à cause de Sasha ! »
Si l’on se fiait au témoignage de Conny, c’était à cause du vol de nourriture commis par Sasha qu’ils avaient tous été punis. Cependant...
Quelque chose cloche… Comment est-ce possible ?...
Armin n’était pas satisfait de l’explication fournie par Conny.
Se nourrir est une question de vie ou de mort quand on est soumis à un entraînement aussi rigoureux que le nôtre. Punir les camarades d’escouade qui aurait dû surveiller Sasha peut se comprendre, mais réduire la portion de tout le monde… ?
« Ah ! murmura Armin. Impossible… que Sasha soit responsable de ce pourquoi nous avons été punis. »
*
« Qu’est-ce que tu viens de dire, Armin ?
- Sasha a avoué elle-même qu’elle avait pris les patates.
- Oui. Je suis certain qu’elle a bien pris les deux patates qui étaient en train de cuire. Cependant… il faut que je vérifie quelque chose. »
Après le repas, Armin et quelques recrues intéressées par l’affaire se rendirent ensemble à la réserve de nourriture.
« En entendant la version de Conny, l’instructeur en aurait conclu que Sasha était coupable, pas vrai ? Ainsi, il n’avait qu’à se contenter de la punir. Mais il ne l’a pas fait. Je crois en effet... qu’il ne le pouvait pas.
- …Et tu penses trouver un piste dans l’entrepôt. »
Motivées par les suspicions d’Armin, les recrues fouillèrent tout le bâtiment.
Tandis que l’entrepôt où étaient gardées les denrées rares, telles que les morceaux de viande, était fermé à clé et surveillé en permanence, ceux où se trouvaient le blé, les pommes de terre et autres, étaient presque accessibles à n’importe qui. Les caisses contenant les provisions étaient simplement empilées les unes sur les autres. Il était facile d'aller y fouiner.
« Qu’est-ce que c’est ? Une caisse vide… ? J’imagine qu’elle n’a pas encore été balancée à cause des quelques patates qui sont au fond. » s’étonna Reiner.
Habituellement, les caisses sont pleines quand elles arrivent à la cuisine. Pourquoi n’y-a-t-il que quelques patates dans celle-ci ? Je me demande… si on peut trouver d’autres indices.
Armin examina attentivement la caisse en bois que Reiner lui désignait du doigt, puis évalua grosso modo son volume. C’est alors qu’un vérité lui sauta aux yeux :
« … Il est évident qu’une seule caisse de pommes de terre pèse plus du double du poids de Sasha… Même si c’est une sacrée morfale, elle ne peut pas manger plus de la moitié de ce qu’elle pèse.
- Hé, attends une minute ! Dans ce cas, cela voudrait dire que les patates ont été volées… dans cet entrepôt ?! »
Armin hocha la tête sans dire un mot. Tandis que ses camarades commençaient à s’agiter, il resta curieusement calme pendant qu’il réfléchissait à la situation.
*
Plusieurs minutes s’écoulèrent. Les yeux d’Armin se posèrent sur le groupe de soldats qui passaient pour faire leur ronde.
« Je crois… que la ronde est la clé dans cette affaire. »
Il adressa un salut de loin aux soldats afin de ne pas attirer leur attention, puis sortit de l’entrepôt pour trouver d’autres indices. Ce faisant, il continuait toujours de réfléchir.
« Si les patates ont été volées avant d’arriver à la cuisine, ce sont les soldats chargés de les surveiller qu’on devrait punir. Cela donnerait une mauvaise image de nos aînés, qui ont l’habitude de se comporter comme s’ils étaient supérieurs à nous… Ce qui explique pourquoi ils ont cherché à étouffer une partie de l’affaire. »
Eren était à côté d’Armin. Il se mit en colère :
« Tu veux dire que l’instructeur nous a fait son laïus bidon et généraliste sur la responsabilité partagée au lieu de nous dire ce qui s’était vraiment passé – tout ça pour protéger ces types ?
- Est-ce que cela signifie que le véritable coupable est un voleur venant de la ville ou d’ailleurs ?
- Pourquoi s’embêter à voler de simples patates si on réussit à s’introduire dans la caserne ? Il doit y avoir des objets plus intéressants à voler.
- Donc, il y a une raison précise pour laquelle on a préféré voler ces patates... »
Armin réfléchit pendant que ses camarades échangeaient leurs idées. Il savait bien que le fait de trouver le coupable ne leur rendrait pas leur dîner, mais il n’était pas du genre à laisser un mystère non résolu.
*
Il fallait une motif particulier pour prendre le risque de se faire arrêter en ne volant que de patates. Le criminel qu’Armin se représentait ne devait pas être motivé par l’appât du gain.
… Notre marche logistique d’entraînement commence demain.
« Tu as trouvé quelque chose, Armin ? »
Armin hésita à leur faire part de ses réflexions.
La capacité à approvisionner les lignes de front… Un entraînement pour juger notre capacité à gérer la nourriture et les ressources… Si l’on voulait avoir un avantage sur les autres, on aurait besoin de nourriture pour l’exercice. En d’autres termes… le coupable est une des recrues.
Il ne voulait pas accuser un camarade devant tout le monde (même sans donner de nom précis) et prendre le risque que la situation dégénère. S’il venait bien de toucher du doigt la vérité, pensa-t-il, il lui faudrait d’abord parler et s’expliquer avec ce camarade.
« Hé, Armin ! Il y a des traces de pas, ici.
- Mais il y en a beaucoup trop. Impossible d’identifier à qui elles appartiennent. »
Des traces de pas autour de l’entrepôt. Et elles sont fichées… dans la boue ?
Alors que toutes les recrues tendaient le cou pour voir les traces éclairées à la bougie, Armin resta à part et il se mit à rire silencieusement.
« C’est donc ça !…
- Tu as trouvé l’identité du voleur ?
- Ce n’est pas quelqu’un de dangereux. Je vais aller m’en assurer par moi-même. »
Armin décampa sous les yeux médusés de ses camarades et disparut dans la nuit.
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SHORT STORIES 2 - Affaires choisies - Dossier n° 01 : Le point de vue de Conny
L’affaire des patates cuites disparues (1/3)
Lors d’une pause entre deux sessions d’entraînement…
Conny voulut prendre un raccourci, mais il se trompa de chemin et se trouva à passer devant la cuisine.
Sasha ? Qu’est-ce qu’elle fait ici ?
Par la porte entrouverte, il aperçut Sasha, une de ses camarades, en train de fouiner. Conny se demanda ce qu’elle pouvait bien faire là. Au moment où il s’arrêta devant la porte, Sasha remarqua sa présence et laissa échapper un cri de surprise.
« Co...Conny ? Tu as tout vu ?!
- Hein ? Vu quoi ? »
Conny n’avait pas eu le temps de voir ce que Sasha faisait. Mais il avait une vague idée sur la question. Elle était probablement encore en train de grignoter en douce.
*
« Heu ? C’est tout ce qu’on nous donne à manger ce soir ?!
- Est-ce qu’il t’arrive d’écouter, Conny ? L’instructeur vient de nous dire qu’on était tous punis et qu’on n’aurait qu’un seule assiette par personne pour le dîner, parce que quelqu’un a mangé en douce une grosse quantité de patates. »
Ce n’est qu’une fois arrivé à la moitié de son repas que Conny se rendit compte de la tension qui régnait dans la salle.
Jean avait l’air dégoûté au plus haut point en regardant Sasha, qui agissait comme une vraie coupable :
« Je vous l’ai déjà dit : ce n’est pas moi !
- C’est difficile à croire. »
Conny lui-même doutait de Sasha. Il se disait que les idiots comme elle (c’était l’hôpital qui se foutait de la charité) ne savaient pas mentir. A ce moment-là, Marco se tourna vers lui :
« Au fait, tu n’as pas dit que tu avais pris un raccourci et que tu étais passé devant la cuisine dans l’après-midi, Conny ? Tu es arrivé presque en retard à l’entraînement… As-tu vu quelque chose là-bas ?
- Ah… euh.. Je ne sais pas.
- Comment ça ? Tu ne sais pas ? Tu dois au moins te rappeler s’il y avait quelqu’un ou non. »
Conny n’arrivait pas à trouver ses mots pour répondre. Armin, plongé jusque-là dans une profonde réflexion, se mit à parler :
« C’est juste une hypothèse… mais, Conny… est-ce que.. »
Il employa alors les mots exacts que Conny n’avait pas réussi à formuler. Tous les autres furent surpris.
*
« ...Tiens, prends ça et ne dis rien à personne !
- Une patate ? Tu ne l’as pas volée, au moins ? »
Dans la cuisine, Sasha tenait deux pommes de terre encore chaudes dans les mains ; elle voulait en offrir une à Conny.
« Non, je ne l’ai pas volée ! Je suis ici uniquement parce que c’est mon tour d’aller chercher l’eau !
- Je vois bien que tu as dû les prendre de cette casserole. Sinon pourquoi faudrait-il que je me taise ? Si je ne dis rien , je vais me faire punir moi aussi et j’aurai moins à manger ! »
Il avait entièrement raison, mais à peine eut-il fini de parler que Sasha avait englouti une des pommes de terre. Il n’y avait pas de retour en arrière possible désormais.
« Ce n’est pas comme si je pouvais la remettre à sa place… Personne ne s’en plaindra tant que tu ne diras rien, Conny. Au fait, notre prochaine session d’entraînement est à quelle… Oh, j’entends la cloche !
- … Zut ! On va être en retard ! »
Sasha ne fit qu’une bouchée de la deuxième pomme de terre et sortit en courant. Même si Conny voulait protester, sa priorité était de ne pas être en retard à la prochaine session d’entraînement. Il trouva étrange que l’incident n’eût pas de suite.
*
Conny confirma les propos d’Armin, qui le défendait, puis il exposa tous les détails de cette scène. Les autres le regardèrent, puis ils se prirent la tête dans les mains :
« Ainsi, tu as laissé Sasha t’embobiner ?
- Pourquoi vous dites ça ?!
- C’est ce que tu viens d’avouer ! »
Sasha avait l’air paniquée à présent :
« Oh ! Que… De quoi est-ce que vous parlez ?... J’étais dans la cuisine uniquement pour prendre de l’eau… C’est à ce moment-là que j’ai vu Conny… et…
- C’est notre faute ! Nous étions censées aller chercher l’eau nous aussi, mais quelqu’un nous a arrêtées pour nous demander de l’aide. Nous avons donc laissé Sasha aller toute seule à la cuisine… »
Christa essayait d’endosser une part de responsabilité avec cette excuse peu convaincante. Alors que toute l’assemblée était prête à faire payer Sasha, seul Armin semblait encore dubitatif.
« Il est impossible… que Sasha ait pu faire ça.
- Qu’est-ce que tu viens de dire, Armin ? »
Conny était surpris par la déclaration de son camarade. Mais Armin avait toujours été capable d’expliquer n’importe quelle situation avec des mots simples. Conny attendait la nouvelle conjecture d’Armin en espérant qu’il leur dévoile une vérité cachée.
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SHORT STORIES - A l’abri de la pluie - Chap. 05 : Christa Lenz et Sasha Braus
La jeune fille courait sur un chemin cabossé et gorgé d’une pluie tombée sans prévenir. La boue rejaillissait sur ses bottes et il était évident qu’elle allait bientôt atteindre son équipement de manœuvre tridimensionnelle. La jeune fille s’engouffra dans le premier bâtiment qu’elle vit et souffla bruyamment :
« Je crois bien que je suis à l’abri ici...
- Cha va aller. Y’a pas d’fuites.
- Aaaah ! »
Au moment où la belle Christa passa les doigts dans sa chevelure blonde trempée, elle sursauta en entendant derrière elle la voix de quelqu’un qui avait la bouche pleine.
« Sasha ! Qu’est-ce que tu fais ici ?!
- Euh, je sais pas. Ce qui est sûr, c’est que je ne suis pas en train de grignoter de la nourriture volée. »
En entendant cela, Christa se rendit compte qu’elle se trouvait dans la réserve de nourriture.
« J’étais proche de la caserne… mais il faisait trop sombre, je ne savais pas où j’étais. » expliqua Sasha.
Elle pencha la tête en arrière et avala ce qu’elle avait dans la bouche. Puis elle demanda :
« Tu participais à un exercice d’entraînement facultatif, Christa ? Ymir s’inquiétait pour toi parce que tu n’étais pas rentrée pour le repas.
- Ouais… Il faudra que je m’excuse tout à l’heure… Attends, vous avez donc déjà mangé ? Et tu es encore en train de... »
Sasha cachait quelque chose derrière son dos : c’était à coup sûr de la nourriture prise dans la réserve.
« Tu es sérieuse ? demanda Christa en mettant les mains sur les hanches. Tu sais que tu ne devrais pas voler !
- Euh… eh bien… c’est la pluie.
- Quoi ? »
Sasha détourna les yeux de Christa pour regarder la fenêtre couverte de pluie.
*
« Les jours de pluie… me rendent nerveuse.
- Comment ça, « nerveuse » ….? »
Christa remarqua que Sasha, qui était toujours de bonne humeur, affichait alors un air grave et déprimé. Elle posa une main sur le dos de sa camarade :
« Pourquoi ? Il n’y a pas de raison d’être nerveuse à cause d’un peu de pluie.
- Oui, c’est vrai aujourd’hui. Cependant…, répondit Sasha, le regard vide et posé sur la fenêtre qui les séparait des ténèbres. Quand on chasse sous la pluie, on ne voit pas la piste qu’on suit.
- Quand on chasse ?... des animaux ? »
Christa voyait Sasha de profil : elle hochait la tête. Christa se rappela qu’elle était originaire d’un village qui subsistait de la chasse au gibier.
« Pas seulement la piste… La pluie efface tout : des pas silencieux, toute présence qu’on pourrait sentir…
- Ainsi, tu es anxieuse car il est difficile de chasser quand il pleut ?
- Oui. Les jours de pluie… on ne sait pas si on va avoir à manger le soir ou pas. »
Ah... Sasha n’est donc pas une simple morfale. Elle a connu une mode de vie précaire… C’est pour ça qu’elle se sent nerveuse quand elle n’a pas de nourriture.
*
Même si Christa comprenait, elle contracta son visage pour avoir l’air en colère :
« Mais les choses ont changé aujourd’hui, n’est-ce pas ? Nous sommes des soldats et nous mangeons à notre faim. Pas vrai ? »
Elle donna une claque dans le dos de Sasha et lui agrippa le bras. Elle prit délicatement le morceau de pain que Sasha tenait et le remit à sa place.
« Tu n’as pas besoin d’être nerveuse. Nous sommes à tes côtés désormais. Alors, arrête de voler et retournons à la caserne ensemble, d’accord ?
- M...mais…
- Je n’ai toujours pas mangé mon repas, tu te souviens ? Je t’en donnerai la moitié.
- V.. vraiment ?!
- Ouais. Donc, plus question de voler !
- Tu es un ange !... »
Sasha ouvrit de grands yeux ronds et se jeta au cou de Christa. On aurait dit un petit chien, et Christa ne put s’empêcher d’éclater de rire.
« Allez, on y va !
- Oui, mademoiselle Christa ! »
L’humeur morose de Sasha avait disparu en un instant. Ses yeux étincelaient à présent.
« Mais ce serait dommage de laisser ça ici. Je vais juste le prendre dans…
- Non ! »
Christa dut se retenir de rire en tirant la main de Sasha vers l’arrière. Les yeux de cette dernière, fixés sur la caisse pleine de nourriture, semblaient remplis de regrets.
La pluie tombait toujours. Les deux filles ouvrirent la porte de l’entrepôt et coururent ensemble sur le chemin boueux en direction de la caserne.
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