#sur la route
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Carrefour (Quelque part, USA)
#usa#untied states of america#united states#états-unis#états-unis d'amérique#america#amérique#travel#voyage#photography#photographie#travel photography#photographie de voyage#noir et blanc#black and white#lost#perdu#travel usa#voyage aux usa#on the road#sur la route#photographers on tumblr
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Bonjour đ
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THROWBACK THURSDAY LIVRESQUE : Un livre de votre PAL depuis trop longtemps !
Jâai trouvĂ© ce rendez-vous livresque chez My-Book., qui a poursuivi elle-mĂȘme lâidĂ©e crĂ©atrice de Bettie Rose Books. LâidĂ©e est de prĂ©senter une ancienne lecture tout en suivant le thĂšme prĂ©Ă©tabli chaque semaine⊠que voici : A lâoccasion de la journĂ©e de la procrastination, le 25 mars, le thĂšme de cette semaine nous incite Ă sortir un roman de notre PAL depuis trĂšs longtemps. Jâai trouvĂ© leâŠ
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bwahaha, we just crossed the viaduc de millau and the mountain after that, and it's official, we're heading back north đ
đ€Ł
cloooouds
Happy Birthday â*ăïŸïœ„*\(^O^)/*ăïŸïœ„*â
I hope it's a fantastic day!
thank you so much, lovely!!! i'm spending the day on the road with my partner ;D we're driving back home from the south of france to the north, completely vertically, right through the middle.
1) on the road just now
2) my partner's family home
3) his grandma's house just next to it.
đđđ we'll back in july đ
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YES NIQUE LES FACHOS
LE MOMENT EST VENU DE COURIR A POIL DANS LA RUE, CE SOIR ON VA MANGER DU RIZ BORDEL
ALSO CASSE-TOI HANOUNA CASSE-TOI DE LA
#Bon je sais qu'on sera fixés que demain matin mais vas-yyyyyy#up the baguette#what the france#french politics#Also jamais de la vie j'aurai les couilles de me balader à walp et sur une route pas éclairée#upthebaguette#whatthefrance
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Du coup arsenic nique nique s'en allait tout simplement
Routier, pauvre et chantant (genre le mec il fait le clown sur les autoroutes JSP)
En tout chemin, en tout lieu, il ne parle que du bon dieu (j'crois c'est Sunny đ°đ°đ°đ°đ°) (genre Sunny c'est JĂ©sus quoi)(hĂ© ça colle bien, comme Sunny, le Soleil, et tout)(attends Sunny c'est Louis XIV ?! đ±)
Asenic qui nique nique ne parle que de Louis XIV???
Chuis fatigué pardon
Arsenic qui ne parle que de Sunny jusque-là c'est in character... Louis XIV jsuis pas trop sûr non,
(((quoique pour Nick c'est probablement un roi et le centre du monde)))
(mec t'es probablement la seule autre personne à parler français dans ce fandom. t'étais déjà cramé tkt)
#ask#tosteur-gluteal#omori#arsenic#j'imagine trĂšs bien nick faire le con sur la route (en train d'Ă©craser quelqu'un qui a regardĂ© sunny pendant plus de deux secondes)#apologies to our non-french speaking audience. your program will resume shortly#la fatigue a l'air d'avoir des effets intĂ©ressants sur toiâ
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Tiens, on est le 21 avril aujourd'hui?
Ca va faire l'anniversaire des 22 ans de Jean-Marie au second tour et oĂč pas mal de personnes censĂ©es se sont rendues compte qu'il y avait toute une frange de cons en France : "moi pas content moi mettre coup de pied dans fourmiliĂšre alors moi voter pour vieux monsieur qui a formĂ© son parti avec des anciens Waffen-SS et qui a torturĂ© en AlgĂ©rie et compare les homosexuels au "sel dans la soupe" parce que moi vraiment pas content "
Et depuis on a de plus en plus de cons à tous les niveaux - mais bon, je reste un blog fandom donc parler trop de politique ça va me transformer en bloc de sel géant.
Par contre, avec le fandom actuel sur Fodlan, ben je vois que c'est une tendance de fond apparemment, et ça dépasse nos frontiÚres (ouais on est pas les seuls cons au monde! Youpi!) et c'est toujours aussi inquiétant - je ne parle pas des délurés dans leur caniveau dans un certain serveur de Discord(e) - mais juste un commentaire banal genre :
"J'ai vraiment aimé ta fic du coup j'ai écris la mienne!"
Je me sens un peu flattée qu'un des trucs randoms que j'avais posté ai pu rendre des gens contents ?
"Du coup j'ai aussi repris l'idée de Lycaon l'hybride Nabatéen"
Cool, enfin c'est pas juste moi, les demi dragons, c'est un peu une tradition dans FE et les mondes de fantasy, et puis Fodlan le sous-entend avec certains persos et dialogues et...
"Alors dans mon idée, les hybrides tombent tout le temps malade, jusqu'à que leur descendance ait moins de sang de Nabatéen parce que c'est ça qui les rend fragiles"
... Attends, quoi ??
(gros gros sel sous la coupure)
Moi dans mes délires c'est l'histoire clichée du "il a du sang de créature magique donc ça les rends plus forts/demi-dieux etc etc" avec l'analogie traditionnelle du "ben s'ils peuvent faire des bébés c'est qu'ils ont pas si différents et les deux peuples peuvent s'entendre au lieu de se foutre sur la gueule tout le temps" - il n'a jamais été question de "oui ben l'hybride est mal foutu génétiquement parce que le sang d'une des races n'est pas bon et il survit que s'il se débarrasse de sa partie "autre" " !
Et puis merde, je sais qu'on est dans une fanfic et une oeuvre de fiction, mais c'est super inconfortable de lire ce genre de trucs! Sans rentrer dans les "théories" à la con, ce genre de saloperies a été utilisé dans la vraie vie pour justifier de la merde!
Enfin quoi, on est sur de la fiction, mais on explique que "il est malade parce qu'il n'est pas de sang pur ??" Et ça c'est censĂ© ĂȘtre, genre, normal, et pas un twist oĂč en fait c'est un super raciste qui a "crĂ©Ă©" cette maladie pour garder des gens "purs"? C'est juste, euh, "naturel"????
oui bon j'ai relu bleach récemment
Comment un de mes posts a pu inspirer ça?
Tiens, ça me fait penser à cette autre fic qui m'intéressait bien aussi :
Guerre des HĂ©ros? Check
Willy ? Check
Lycaon est un hybride? Triple check
Et puis dans les notes de l'auteur "ah oui c'était compliqué pour l'élever en tant que bébé, mais une fois qu'il avait passé sa phase de nabatéen* ça passait"
*Ok, c'est de l'anglais et j'ai peut-ĂȘtre mal compris le "grew out of his nabatean traits" ???
Bordel ça commençait tellement bien, et ça finit comme les épinards de la cantine.
Encore une fois, on est sur de la fanfic alors bon, si quelqu'un écrit sur quelque chose ça ne veut pas forcément dire qu'il est d'accord avec tout ce qu'il écrit ou veut les promouvoir, j'entends bien.
Mais tout de mĂȘme, je trouve que parler de ça, dans un fandom qui comporte des latrines comme ce fameux sous-serveur, et dont l'oeuvre principale est centrĂ©e autour d'une "waifu qui est en fait mĂ©chant mais trop kawaii alors tu te sens tristoune de la dĂ©gommer mais comme elle trop kawaii personne va lui dire de la boucler ou tout ceux qui le font sont dĂ©peints comme des vilains pas beaux mĂ©chants qui Ă la fin trouvent qu'elle avait pas tort" dont le leitmotiv reste tout de mĂȘme la volontĂ© de dĂ©barrasser le monde du "sang de dragon" (Et personne dans le jeu ne tique ou ne remarque ça pour sortir - Ă l'Ă©poque ce que j'aurais appelĂ© une tarte Ă la crĂšme mais vu le fandom et les temps actuels ce n'est en fait pas si commun??? - "le racisme ce n'est pas bien" et que tous les persos mettent Ă leur sauce des "oui mais c'est vrai que le sang de dragon ce n'est pas bien"!) franchement c'est trĂšs trĂšs bof.
Est-ce que ces "thĂ©ories racialistes" sur les "hybrides NabatĂ©ens" c'est juste de la libertĂ© littĂ©raire dans le genre de la "darkfic" ou du "dead dove do not eat", ou est-ce que ce sont des effluves nausĂ©abondes qui Ă©manent des toilettes, ou des personnes qui ont jouĂ© au jeu et ne se rendant pas compte des Ă©normitĂ©s de Dedel - qui sont malgrĂ© tout passĂ©es sous silence par les dĂ©veloppeurs et scĂ©naristes eux-mĂȘmes parce qu'il faut vendre des goodies ?
Ăa me gonfle parce que normalement, je me dis toujours qu'il faut consommer des choses auxquelles on est pas forcĂ©ment attirĂ©s dĂšs le dĂ©part pour Ă©largir ses horizons et peut-ĂȘtre apprĂ©cier d'une autre maniĂšre quelque chose - mais avec cet univers, avec un fandom (et des jeux) qui nous bassinent en long, en large et en travers "ouin ouin tout ce qui ne va pas dans le monde c'est Ă cause du sang de NabatĂ©ens" et chie sur, ben, les persos NabatĂ©ens eux-mĂȘmes, une fic qui a part sur un postulat "les hybrides NabatĂ©ens existent, mais ne sont pas viables/en bonne santĂ©/gĂ©rables s'ils ont trop de sang NabatĂ©en", je ne peux/veux plus les lire/voir/Ă©couter.
Comme pour l'utilisateur de Tumblr que j'avais bloquĂ©, sans avoir jamais interagit avec cette personne, mais parce que j'avais lu un billet en mode "oulala rien que de penser Ă Dedel qui aurait du sang de NabatĂ©en [encore dans un contexte de demi-nabatĂ©ens] ça me rend physiquement malade!" parce que, non seulement, ben ça veut dire que cette personne n'a visiblement pas compris ce qu'est un EmblĂšme dans le jeu, et surtout, parce que ce genre de trucs avec le fandom de FE16, avant mĂȘme que je ne dĂ©couvre le trou Ă fange qu'est le sous-serveur de la Discorde, c'est un gros gros signe que cette vision qu'Ă cet utilisateur du jeu et la mienne sont tellement incompatibles qu'on ne pourra jamais discuter sereinement dessus, donc blocage automatique.
Je vois le "fandom" comme quelque chose de relaxant oĂč j'ai envie d'ĂȘtre chill et de juste, apprĂ©cier des trucs plutĂŽt que de rĂąler (j'ai dĂ©jĂ la vraie vie pour ça), mais lĂ c'est juste, je pense, de la dĂ©ception (une origo gentis sur les Hresvelg! Un des trucs sur lesquels j'avais dĂ©blatĂ©rĂ© il y a longtemps! C'est tellement gĂ©nial de voir que quelqu'un d'autre a eu l'idĂ©e d'en faire une! Si seulement il n'y avait pas eu ce foutu commentaire "et en fait les mĂ©tisses sont malades parce qu'ils ne sont pas viables Ă cause du sang de l'un de leurs parents mais si ce sang se dilue ils vont mieux"...) et la simple coincidence qu'aujourd'hui on est le 21 avril qui vaut ce bloc de sel.
#french post#rant#attention c'est salĂ© il faut prendre un citron#pour les fanfics en gĂ©nĂ©ral je suis plus en mode j'aime pas je lis pas et puis voilĂ chacun ses gouts#mais le 'c'est Ă cause du sang de cette race que les petits mĂ©tisses sont malades les pauvres' c'est complĂštement lunaire#il y a des thĂ©ories de merde qui circulent actuellement dans la vraie vie et utilisent ça#je pense quand mĂȘme qu'il y a une diffĂ©rence entre faire de la fiction sur des demi dieux qui vivent des aventures et ont des pouvoirs#grĂące au sang d'une race d'ĂȘtres fantastiques#et une fiction oĂč on t'explique que des demi-humains sont malades parce qu'ils ne sont pas humains#Ă cause du sang 'autre' qu'ils ont mais que si ce sang est diluĂ© leur futurs enfants iront mieux#et que par ailleurs ce 'sang autre' est dĂ©criĂ© dans l'oeuvre de base comme la lie de la sociĂ©tĂ© et la source de tous les maux#je pense que je vais rendre en muet cette fic sur Ao3#je ne sais pas ce qui m'a le plus agacĂ©e avec cette histoire#le fait que je suis déçue par une fic mais bon il reste toujours l'adage du si t'es pas contente t'as qu'Ă Ă©crire#ou le fait de tomber sur une fanfic rĂ©digĂ©e par radio courtoisie#Allez pour la route je mets les tag#FE16#fandom woes
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Moi : conduis la voiture dans la forĂȘt
Mon mec (qui fait souvent des blagues) : attention lĂ -bas il y a un chevreuil
Moi : lol trĂšs drĂŽle
Lui : mais ralentis !!!!!!
Moi qui pile car j'ai enfin vu le chevreuil : mais je croyais que tu blaguais !!!!!
Lui : oui mais je blague pas sur les chevreuils enfin !
#âje blague pas sur les chevreuilsâ#le truc le plus drĂŽle que j'ai jamais entendu#le chevreuil est sain et sauf je l'ai laissĂ© traverser la route en toute sĂ©curitĂ©
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Perdu (Quelque part, USA)
#nevada#usa#états-unis#états-unis d'amérique#united states#united states of america#travel#voyage#photography#photographie#travel photography#photographie de voyage#noir et blanc#black and white#travel usa#voyage aux usa#road trip#road#route#sur la route#on the road#lost#perdu#photographers on tumblr
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Jour 3...continuer notre parcours en passant par les vignes. S'y arrĂȘter quelques instants, afin de profiter du soleil đ
Et puis terminer notre Ă©tape dans une citĂ© mĂ©diĂ©vale. Un lieu chargĂ© d'histoire, une Ă©glise ou notre Jeanne est venue prier. Se perdre dans ces rues aux constructions entremĂȘlĂ©es de verdure.
DĂ©couvrir notre nid. Une incroyable maison d'hĂŽtes, oĂč l'on pourrait se croire hors du temps. Un concentrĂ© de beautĂ© et d'Ă©lĂ©gance.
J'ai AdorĂ©, merci mon â€ïž pour ce merveilleux moment.
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can you fw L'Escargot with me for 6 minutes
youtube
#Je soufflerai dedans⊠elle qui prend si bien l'vent⊠Cette voile de libertĂ© la sagesse est au largeâŠ#Sur des routes d'ailleurs⊠ronronne mon moteur⊠Je vole les grandes surfaces qui gĂąchent mon paysageâŠ!#neigh (blabbers)#Youtube
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Acte 5 de âTout ce que je veux, c'est te revoirâŠâ
Bon, retour Ă l'histoire des Fraldarius avec la suite de cette histoire... et retour du running gag "j'avais dis dans le dernier billet que le prochain serait le dernier mais en fait non", il va encore avoir un autre billet car cette histoire fait maintenant 600 pages alors qu'elle Ă©tait censĂ©e ĂȘtre courte. Je sais, moi aussi.
Enfin bon ! On reprend juste aprÚs les derniers évÚnements du dernier billet : Lambert est de plus en plus isolé avec Gautier qui s'allie à Sreng et fait sécession, Ivy et Oswald qui prennent les choses en main de leur cÎté tout comme Ludovic et les habitants de Fhirdiad, Lambert qui a ce qu'il mérite, et Félix qui a enfin retrouvé Rodrigue et Alix.
Comme toujours avec cette histoire, fans de Lambert, Rufus et Gustave, ou ceux qui voient le Royaume comme un gros bloc monolithique avec tout le monde qui suit le roi sans réfléchir, passez votre chemin. Ils sont trÚs clairement antagonistes dans cette histoire, et Lambert va tomber encore plus bas dans la partie 6 alors, ne vous faites pas de mal en lisant cette histoire. Il y en a plein d'autres qui vous correspondront surement mieux ailleurs sur Tumblr et AO3.
Et comme toujours, coucou à @ladyniniane ! J'espÚre que ça te plaira !
LachĂ©sis fit craquer sa nuque sur sa monture, Ă©puisĂ©e alors que le soleil se couchait derriĂšre Fhirdiad. Sa sĆur et elle avaient passĂ© des semaines Ă courir dans tout le domaine royal pour rĂ©cupĂ©rer les ordinaires, et elles avaient dĂ» arracher les sommes rĂ©clamĂ©es piĂšce de cuivre par piĂšce de cuivre !
« DĂ©esse ! Quelle plaie ! Heureusement que nous Ă©tions en mission pour les Blaiddyd sinon, le nom de notre famille aurait Ă©tĂ© terni Ă jamais⊠encore plus chez les nobles qui ne veulent mĂȘme pas mettre la main Ă la bourse⊠rĂąla ThĂšcle, Ă©puisĂ©e. Et DĂ©esse ! Quelle mauvaise gestion !
â Nous sommes dâaccord, nos petits gĂšrent mieux leur argent de poche, marmonna LachĂ©sis. Pour les baillis qui ont Ă©tĂ© nommĂ© par Sa MajestĂ© Ludovic ou quand Nitsa Ă©tait encore lĂ pour Ă©viter les catastrophes, pas de problĂšme, câĂ©tait propre, mais pour ceux nommĂ©s par Lambert, je prĂ©fĂšre Ă©viter de commenter de peur dâĂȘtre impolie.
â CâĂ©tait gĂ©rer avec les pieds oui⊠Nitsa serait morte de honte⊠comment elle a pu tomber amoureuse dâun homme pareil ? Maman nâavait pas tort quand elle disait quâavoir donnĂ© HĂ©lĂ©na en mariage Ă Lambert, câĂ©tait comme donner de la confiture Ă un cochon, sauf que le cochon Ă lâexcuse dâĂȘtre un cochon pour mettre ce qui est bon pour lui partout, pas Lambert.
â Fallait surtout demander Ă Myrina vu quâelles ne se cachaient rien toutes les deux mais, si jâai bien compris de mon cĂŽtĂ©, câĂ©tait surtout grĂące Ă lâannĂ©e Ă Garreg Mach oĂč ils se sont beaucoup rapprochĂ©s⊠et puis, sur la fin, ça sentait mauvais leur mariage, mĂȘme elle commençait Ă se dĂ©tacher⊠elle lui a mĂȘme interdit dâentrer dans sa chambre alors quâelle accouchait, câest Myrina qui lui a tenu les mains avec Effrosyni alors quâelle mettait son fils au monde, ça veut tout direâŠ
â Ăa aurait Ă©tĂ© mieux si Sa MajestĂ© Ludovic avait pu mettre en Ćuvre son idĂ©e de monarchie Ă©lective⊠et si Nitsa avait eu le temps dâenvoyer les papiers du divorce dans sa tĂȘte dâahuriâŠ
â Tout ce quâil mĂ©ritait si tu veux mon avis. Il lâa Ă©puisĂ©e jusquâĂ lâos, » gronda lâainĂ©e, les mauvais souvenirs et la peur pour sa sĆur refaisant surface, la voyant perdre des forces de jour en jour, comme une chandelle nâayant plus ni cire ni mĂšche. « Nitsa avait toujours eu la santĂ© de maman⊠je mâen souviens, elle nâĂ©tait jamais tombĂ©e malade⊠pas une seule fois⊠mais quand elle sâest mariĂ©e⊠je ne sais pas, câĂ©tait comme si Lambert Ă©tait un vampire et lui aspirait la moindre goutte de sang et de vitalité⊠elle Ă©tait Ă©puisĂ©e et affaiblie tout le temps⊠enfin, normal quand elle avait son travail et celui de son mari Ă faire car, elle devait toujours passĂ© derriĂšre luiâŠ
â Quand on sait ça, ce nâest pas Ă©tonnant quâelle ait eu autant de mal Ă mettre le petit prince au monde⊠elle qui voulait tant avoir un enfantâŠ
â Et encore, il ne serait peut-ĂȘtre jamais nĂ© si Dame FĂ©licia nâavait pas Ă©tĂ© aussi prĂ©venante avec elle et Sa MajestĂ© Ludovic aussi soucieux dâelle⊠enfin, on en reparlera plus tard, on doit retourner supporter « lâahuri en chef » directement Ă Fhirdiad⊠les ramena Ă la rĂ©alitĂ© LachĂ©sis.
â Je mâĂ©tais contentĂ© de lâappeler « lâahuri » mais, ça lui va bien aussi. En tout cas, je plains Rodrigue qui a dĂ» le supporter tout ce temps ! Surtout quâon ne peut pas lâouvrir avec Rufus ! RĂąla ThĂšcle.
â Sâil croit que je vais la boucler sur la gestion de leurs comptes, il se met le doigt dans lâĆil jusquâau coude et continue Ă sâenfoncer, grogna lâainĂ©e de la fratrie. Câest un gosse immature et irresponsable mais, il va falloir le faire grandir Ă coup de pied au cul Ă ce stade. Autant lâun que lâautre.
â Si toi, tu commences Ă devenir grossiĂšre, câest quâils sont fichus. Enfin bon, je propose quâon passe Ă la taverne avant dâaller au palais, histoire de voir comment les choses ont Ă©voluĂ©es Ă la capitale. En plus, il est tard, les enfants se couchent tĂŽt.
â Hum⊠tu as raison, faisons ça, » accepta LachĂ©sis. « Les citoyens de Fhirdiad seront surement plus bavards loin des larbins de Rufus. »
Les deux sĆurs se turent en entrant Ă la capitale, se faisant discrĂštes, mĂȘme si les gardes des portes les reconnurent tout de suite. Cependant, ils acceptĂšrent trĂšs vite de ne pas les annoncer â mĂȘme trop vite â et les encouragĂšrent plutĂŽt Ă aller Ă la taverne dit du pĂšre Mercier ce soir.
« On vous jure ! Si vous voulez avoir lâavis de la personne la plus lucide de tout Fhirdiad sur la situation du Royaume, il faut aller lĂ -bas ! Lui assura le soldat avec un gros accent de Dominic, surement un qui avait Ă©tĂ© levĂ© en masse par Rufus. Vous ne serez pas déçues, croyez-nous ! Et il faut que vous entendiez tout ce qui sâest passĂ© ici ! Câest juste Ă peine croyable ! »
Les deux sĆurs esquivĂšrent son insistance en jurant quâelles allaient y rĂ©flĂ©chir, mĂȘme si elles se mĂ©fiaient de cette proposition. Vu les antĂ©cĂ©dents de Rufus, cela pouvait ĂȘtre un guet-apens⊠mais dâun autre cĂŽtĂ©, cette taverne Ă©tait trĂšs frĂ©quentĂ©e par des soldats de Fraldarius et de Charon, et le propriĂ©taire serait fiable alors, peut-ĂȘtre⊠elles iraient peut-ĂȘtre avec quelques gardes⊠surtout quâelles savaient se dĂ©fendre, en particulier dans des espaces confinĂ©s⊠et quand elles virent lâĂ©tat de la capitale, elles se dirent quâelles nâavaient rien Ă perdre Ă connaitre lâavis des habitantsâŠ
Les rues Ă©taient sombres et mal entretenues, avec des ordures qui bouchaient les Ă©gouts et transformaient la chaussĂ©e en mare de boue putride. Les seules personnes bien nourries Ă©taient les rats festoyant au milieu des immondices, et les ratiers chargĂ©s de les chasser, mĂȘme sâils manquaient trĂšs clairement de chat pour tous les exterminer. Sinon, les faces Ă©taient Ă©maciĂ©es, creusĂ©es par la faim et la fatigue, les yeux vides dâusure aprĂšs tout ce qui sâĂ©tait passĂ© ces derniĂšres semaines⊠le terrain parfait pour le dĂ©veloppement dâune Ă©pidĂ©mieâŠ
« Un seul malade⊠un seul⊠et la peste est de retour⊠câest pas vrai ! Enragea LachĂ©sis. On avait dit et rĂ©pĂ©tĂ© que la somme quâon laissait Ă lâentretien des Ă©gouts ne devaient pas ĂȘtre utiliser pour autre chose ! On court Ă la catastrophe ! »
Les deux sĆurs passĂšrent sur la place principale pour voir si rien nây Ă©tait placardĂ©, nâespĂ©rant mĂȘme plus que Rufus nây fasse pas Ă©talage de sa cruautĂ© et de son incompĂ©tence. Une grande affiche sây trouvait bien, juste Ă cĂŽtĂ© du gibet oĂč se balançait un corps ballotĂ© par le vent, se dĂ©composant dĂ©jĂ . Il aurait dĂ» ĂȘtre dans une fosse commune depuis longtemps⊠mĂȘme pas par compassion envers un criminel (et les Charon seraient curieuses de savoir si ce crime en Ă©tait un aux yeux de la loi ou de ceux de Rufus), juste par mesure de salubritĂ© public histoire que la pourriture ne contamine par lâeau ou les personnes qui passaient Ă cĂŽté⊠et Ă la lecture du placard, cela les Ă©tonna presque quâil nây ait pas plus de monde pendu au gibet⊠DĂ©esse, Rufus Ă©tait allĂ© jusquâĂ ressortir la rĂ©glementation de Clovis ! Heureusement que les juges ne devaient pas la respecter sinon, ce serait une vĂ©ritable boucherie ! Comment Rodrigue avait pu laisser passer ça ?! Enfin, connaissant Rufus⊠et siâŠ
« On y va ce soir ? Proposa ThÚcle.
â Ăa me semble plus que nĂ©cessaireâŠÂ » marmonna LachĂ©sis.
SâĂ©quipant tout de mĂȘme dâune armure sous leur manteau et leurs habits de fonctionnaires, ainsi que de gantelets rapides Ă mettre, les deux sĆurs se rendirent Ă la taverne du pĂšre Mercier en compagnie de quelques gardes de confiance. LâĂ©tablissement Ă©tait plein Ă craquer, toutes les tables discutant vivement entre elles, mĂȘme si le ton se fit plus bas quand leur groupe passaient Ă portĂ©e de voix. Le soldat de la porte les vit passer depuis sa table, sauta de sa chaise et les conduisit au bar oĂč se trouvait le patron de lâĂ©tablissement, le hĂ©lant sans hĂ©siter.
« Eh ! Mercier ! Elles sont là  !
â Ah ! Bonsoir mes dames. Je vous sers un verre dâeau ? Leur proposa-t-il simplement. Je nâai plus rien dâautre.
â Bonsoir, et ne vous en faites pas pour cela, lui assura LachĂ©sis. On aimerait surtout vous poser des questions sur ce qui a bien pu se passer Ă Fhirdiad, et ce nâest surement pas Rufus qui nous dira la vĂ©ritĂ© alors, on aimerait avoir la version des citoyens de la ville.
â Elle pourrait parler Ă lâalbinois, il sait de quoi il parle. Et câest les Charon, elles crachaient aussi sur le Lambert et le connard.
â Hum⊠je sais pas, il a pas mal toussé⊠et imagine siâŠ
â Non, câest bon, ne tâen fais pas, ça ira. Câest juste mes poumons qui sont fragiles⊠et lâair ambiant en ville ne mâaide pasâŠ
Un jeune homme dâun peu moins de vingt ans sortit de lâarriĂšre-boutique, enveloppĂ© dans une couverture mais, la main qui la tenait Ă©tait couverte dâencre. Au nom de la DĂ©esse⊠câĂ©tait fou Ă quel point il pouvait ressembler Ă Sa MajestĂ© Ludovic dans sa jeunesse ! LachĂ©sis Ă©tait petite Ă lâĂ©poque du coup dâĂtat contre le roi Clovis mais, elle Ă©tait sĂ»r que ce jeune albinois aurait pu se faire passer pour le roi Ă cette Ă©poque⊠le pĂšre Mercier se tourna vers lui, le soutenant doucement, prĂ©venant avec inquiĂ©tude.
â Fait tout de mĂȘme attention Ludovic, lâair de Fhirdiad semble ĂȘtre encore plus mauvais pour toi que pour nous autres⊠ça doit te changer de celui dâAlbinĂ©aâŠ
â Oui, il est bien meilleur lĂ oĂč je vivais avant mais, ne tâen fais pas, je peux tenir. On mâa prĂ©venu de votre arrivĂ©e, jâimagine que vous ĂȘtes les filles de la matriarche Catherine Charon, LachĂ©sis et ThĂšcle, les salua-t-il. Ludovic Hange, albinois et scribe au palais, on mâa beaucoup parlĂ© de vous.
â Enchantïżœïżœ Citoyen Hange, le salua LachĂ©sis Ă la maniĂšre charonis. Nous aurions des questions Ă vous poser sur lâĂ©tat de la capitale. Que sâest-il passĂ© pendant notre absence ? On se croirait de retour Ă lâĂ©poque de Clovis ou dâavant les grands travaux dâassainissement.
â Une dĂ©cision de Rufus, les sommes allouĂ©es Ă lâentretien des canalisations et des Ă©gouts ont Ă©tĂ© redirigĂ©s vers le maintien de lâunitĂ© du Royaume, et la future expĂ©dition punitive contre Gautier⊠dĂ©clara-t-il en sâasseyant face aux deux sĆurs, ajoutant en les voyant Ă©carquiller les yeux, elles nâavaient pas dĂ» avoir de nouvelles de la capitale pendant plusieurs semaines. Enfin, commençons par le commencement avec ce qui sâest passĂ© aprĂšs votre dĂ©partâŠ
Ludovic et les fhirdiadais rĂ©sumĂšrent les derniers Ă©vĂšnements aux charonis, dĂ©taillant seulement les Ă©lĂ©ments les plus importants. Ă la fin de leur histoire, ThĂšcle passa sa main sur son visage, fatiguĂ©e rien quâĂ entendre tout ceciâŠ
â DĂ©esse⊠quelle honte pour Faerghus⊠il est tellement incompĂ©tent quâil vaut mieux ĂȘtre transformĂ© en loup que de le subir ! Et pauvre FĂ©lix quand il va voir son pĂšre et son oncle arrivĂ©s devant lui en Ă©tant des loups ! Et ces mĂ©thodes de gouvernement⊠câest pas le fils de son pĂšre, mais de son grand-pĂšre⊠autant pour Rufus que pour Lambert⊠câest une honte dâaussi mal gĂ©rĂ© ses caisses et son Royaume⊠quâest-ce que je dis, il ne doit mĂȘme pas savoir ce quâil se passe dans son propre palais alors, dans tout Faerghus, nây pensons mĂȘme pas ! Tu mâĂ©tonnes que les Gautier se soient barrĂ©s chez les srengs ! Et bien en plus si le nouveau margrave a acceptĂ© dâespionner le roi pour que leurs Ă©missaires puissent mesurer Ă quel point il est incompĂ©tent ! Et pour quâil admette nous avoir espionner, il ne doit plus en avoir rien Ă cirer de Faerghus ! On se retrouve avec le garde-frontiĂšre du cĂŽtĂ© ennemi Ă cause des conneries de Lambert et Rufus !
â Nous sommes bien dâaccord⊠dĂ©clara Ludovic en hochant la tĂȘte. Jâimagine que la situation dans le domaine royal nâest guĂšre plus reluisante.
â Non⊠pour rĂ©sumer rapidement, il nâa plus un sou en caisse dans une bonne partie du domaine royal et on a dĂ» arracher la moindre piĂšce de cuivre Ă tous les commerçants et bourgeois vu que Rufus veut des espĂšces sonnantes et trĂ©buchantes, pas des paiements en nature, sauf si câest des fournitures militaires. Au moins, on a pu Ă©pargner les paysans les plus pauvres qui nâont pratiquement jamais vu une piĂšce de monnaie de leur vie mais sinon, on a fait raquer tout le monde, du bailli au commerçant en passant par le curĂ©. Autant vous dire que cela a encore plus sali lâimage du roiâŠ
â Et encore LachĂ©sis, ça, câest pour les ordinaires, image ce que cela aurait Ă©tĂ© si on avait dĂ» rĂ©colter les extraordinaires dans tout le Royaume, lui rappela sa sĆur. LĂ , câest bon, tout le monde ressortait encore plus les fourches quâils ne le font dĂ©jĂ avec les levĂ©es en masses dâhommes et de vivres, et on reviendrait Ă lâĂ©poque des Grandes Jacqueries dâavant lâindĂ©pendance. On se dirige vers ça de toute maniĂšre⊠enfin, on devait dĂ©jĂ engueuler Lambert mais, on va encore plus lui arracher le crĂąneâŠ
â Il invoque HĂ©lĂ©na pour nous dire de nous calmer comme il lâaurait fait avec Sylvain, je ne rĂ©ponds plus de rien⊠ajouta lâainĂ©e. Tenter de le convaincre de parler en invoquant son ami FĂ©lix, alors que câest Lambert lui-mĂȘme qui a mis la famille de ce gosse en miettes. On va avoir du boulot pour relever le niveau de la capitale⊠au moins pour Ă©viter que notre sĆur soit la femme de lâhomme qui a menĂ© Faerghus Ă sa perte, il a dĂ©jĂ assez souillĂ© sa tombe comme çaâŠ
â Hum⊠si je puis me permettre, je crois que ce nâest pas la peine de vous dĂ©menez pour cette raisonâŠ
Les deux sĆurs se tournĂšrent vers une femme de lâĂąge de LachĂ©sis, proche de la cinquantaine, accoudĂ©e au bar alors quâelle serrait son verre dans ses mains. Un jeune bucheron blessĂ© Ă la tĂȘte sâapprocha dâelle, posant sa main sur ses Ă©paules.
â Que veux-tu dire maman ? Tu sais quelque chose en rapport avec la reine ?
â La question, câest plutĂŽt quelle reine⊠la femme tourna la tĂȘte vers les sĆurs et Ludovic, lâair sombre et blasĂ© quand elle annonça. Le roi sâest remariĂ©, ça fait dĂ©jĂ des annĂ©es Ă prĂ©sent. Le petit prince avait trois ans quand câest arrivĂ©âŠ
LachĂ©sis et ThĂšcle nâen crurent pas leurs oreilles quand cette femme leur annonça une nouvelle pareille. Non⊠câĂ©tait pas possible⊠leur famille gĂ©rait tous les papiers et lâadministration du Royaume, ils Ă©taient les gratte-papiers de la couronne depuis des gĂ©nĂ©rations ! Ils auraient forcĂ©ment dĂ» voir les papiers dâun maudit mariage ! MĂȘme morganatique !
â Quoi⊠ne put sâempĂȘcher de lĂącher la cadette avant de demander. Comment pourriez-vous ĂȘtre au courant ? Nous nâavons jamais rien vu qui allait dans ce sens ! Avez-vous une preuve de ce que vous avancez ?
â Câest parce que la Dame numĂ©ro deux vivait en recluse, mĂȘme si elle apparaissait parfois officiellement. CâĂ©tait Patricia Arnim, la « sĆur » de CornĂ©lia Arnim, marmonna-t-elle en faisant des guillemets autour du mot sĆur. Hein⊠connerie, elles sont aussi sĆurs que vous et moi. Tout ce qui existe dans le Royaume sur cette femme est faux. Je suis bien placĂ© pour le savoir, jâĂ©tais une de ses servantes, et croyez-moi que si la paye Ă©tait suffisamment gĂ©nĂ©reuse pour que je ne rĂ©vĂšle jamais son secret, vu le tempĂ©rament de chien de cette femme et comment le roi mĂšne sa barque en ce moment, jâen ai plus rien Ă cirer. Et comme preuve, je dirais simplement quâune nourrice normale nâa pas un carrosse attitrĂ© pour un voyage dans un autre pays, alors que toutes les autres sâentassent avec les autres domestiques. Elle avait eu le droit Ă une voiture pour elle toute seule car, elle a tannĂ© le roi pour en avoir une afin de voyager avec plus de confort, et en privĂ©, elle disait que câĂ©tait Ă©galement pour donner plus de travail aux ducs de Fraldarius. Sa MajestĂ© les avait mis dans la confidence pour avoir leur avis apparemment. Ils Ă©taient contre mais, Lambert ne les a pas Ă©coutĂ©s, Ă©videmment⊠Patricia et eux ne sâapprĂ©ciaient pas de base dâailleurs, avant que cela tourne Ă la guerre ouverte aprĂšs ce qui est arrivĂ© au louveteau de la famille, quand il a failli ĂȘtre brĂ»lĂ© vif par Volkhard von Arundel.
â Patricia Arnim⊠marmonna LachĂ©sis, pesant les arguments et informations qui arrivaient en essayant de ne pas se laisser influencer par son propre ressenti envers Lambert. Je voie de qui il sâagit et certes, le mariage avec une adrestienne de rang aussi modeste aurait pu ĂȘtre lâobjet de contestation. Nous nâignorons pas que nombre de grandes familles ont voulu succĂ©der Ă notre sĆur mais, malgrĂ© cette diffĂ©rence de rang, le mariage avec une roturiĂšre nâest pas interdit pour le roi. Cela aurait Ă©tĂ© dâun ridicule consommĂ© quand le roi Loog lui-mĂȘme Ă©tait un fils bĂątard ayant passĂ© tout le dĂ©but de sa vie Ă gagner sa pitance comme laboureur, et quand la quasi-totalitĂ© de ses proches alliĂ©s Ă©taient Ă©galement des enfants illĂ©gitimes ayant vĂ©cu comme des roturiers et Ă©taient mariĂ©s Ă des roturiers. MĂȘme si nos relations avec lâEmpire sont tendues, si cette Patricia Arnim a coupĂ© tous les liens avec Adrestia et quâelle a Ă©pousĂ© tous les intĂ©rĂȘts de Faerghus, il nây aurait eu aucun problĂšme Ă ce quâelle convole avec le roi, surtout si elle est roturiĂšre, ce nâest pas la haute noblesse adrestienne, et CornĂ©lia a rendu de grands services Ă la capitale et a une position considĂ©rable. Ils se seraient mariĂ©s de maniĂšre morganatique, certes, au moins pour Ă©viter des problĂšmes de succession avec notre neveu mais, Dimitri restera toujours le premier-nĂ© du roi, avec un emblĂšme et sa mĂšre est la fille de la quatriĂšme famille du Royaume en importance, et Ă octante-quatorze voix prĂšs, ça aurait Ă©tĂ© notre ancĂȘtre Sybille qui aurait Ă©tĂ© Ă©lu reine Ă lâindĂ©pendance. Sa position dâhĂ©ritier est donc complĂštement inattaquable, sauf si la nouvelle reine Ă©tait une fille dâempereur, de roi ou de shah, ce qui ne semble pas ĂȘtre le cas, et quâelle aurait eu un enfant avec un emblĂšme majeur, ce qui nâest jamais arrivĂ©, la DĂ©esse soit louĂ©e. Quel intĂ©rĂȘt a autant cachĂ© cette union ? Nous lâaurions certes mal pris sur le coup dans notre famille mais, la pĂ©riode de deuil Ă©tait passĂ© et si elle Ă©tait digne de succĂ©der Ă HĂ©lĂ©na, nous lâaurions acceptĂ©, mĂȘme si je doute quâelle le soit si mĂȘme les ducs de Fraldarius ne lâapprĂ©ciaient guĂšre. Et vous avez Ă©galement dit quâelle nâĂ©tait pas vraiment la sĆur de CornĂ©lia Arnim, câest exact ?
â Oui Dame Charon, elle prĂ©tend ĂȘtre sa sĆur pour se cacher, et câest justement lĂ le problĂšme, câest quâelle est une membre de la famille impĂ©riale dâAdrestia mais, pas par le sang, par alliance. CâĂ©tait une ancienne concubine de lâempereur Ionius, Anselma von Arundel, ainsi que la mĂšre dâune de ses hĂ©ritiĂšres, la princesse Eldegard qui a lâemblĂšme de Seiros. Cependant, Anselma a fui lâEmpire suite Ă une crise et des tensions au sein du harem et elle est venue se rĂ©fugier auprĂšs du roi. Ils se sont rapprochĂ©s et sont tombĂ©s amoureux lâun de lâautre, ce qui les a amenĂ©s Ă convoler ensemble. Câest pour ça quâelle a dĂ©fendu Arundel bec et ongle alors quâil a failli brĂ»lĂ© vif un gosse, dâun parce que câĂ©tait son grand frĂšre, et de deux parce quâil avait ramenĂ© dans ses bagages la fille dâAnselma, Eldegard, pour la protĂ©ger dâune autre pĂ©riode de crise Ă Embarr et la ramener Ă sa mĂšre. Sans cette sombre affaire, Sa MajestĂ© aurait mĂȘme souhaitĂ© quâEldegard reste indĂ©finiment Ă Fhirdiad pour faire plaisir Ă sa femme.
â Attendez⊠la coupa ThĂšcle. Vous voulez dire que non seulement, Lambert est mariĂ© Ă une Ă©pouse de lâempereur et donc, câest de la bigamie vue que ses concubines sont attachĂ©es Ă lui Ă vie, qui est aussi la mĂšre dâune potentielle future impĂ©ratrice⊠cinquiĂšme dans lâordre de succession mais quand mĂȘme, câest tout Ă fait possible quâelle le devienne Ă©tant donnĂ© que les empoisonnement sont monnaie courante dans le harem⊠quâelle est la sĆur dâun noble frontalier qui a Ă©tĂ© exilĂ© Ă vie de Faerghus aprĂšs une tentative dâhomicide sur mineur avec circonstances aggravantes⊠quâelle est ici sous un faux nom et avec de faux papiers, ce qui est complĂštement illĂ©gal⊠le tout pour la cacher de son premier mari, ce qui est comprĂ©hensible aux demeurants vu ce quâelle a dĂ» vivre mais, on nâaurait jamais pu nier ĂȘtre au courant de sa situation si sa vĂ©ritable identitĂ© Ă©tait dĂ©couverte un jour, ce qui aurait Ă©tĂ© un casus belli de premier choix pour Ionius, encore plus si Lambert refusait de la renvoyer de lâautre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre⊠et en plus, il voulait garder la propre fille dâIonius, qui a les dents longues comme pas possible, qui ne nous a pas attaquĂ© Ă son arrivĂ©e sur le trĂŽne uniquement parce quâil avait peur de Sa MajestĂ© Ludovic mĂȘme sâil avait la tuberculose et a dĂ» trĂšs vite faire face Ă de grandes oppositions en interne, dans le Royaume ? Dans son propre palais auprĂšs de son fils qui plus est alors, si Ionius dĂ©cide dans sa grande mansuĂ©tude de ne pas nous attaquer pour retenir sa fille en otage, il se contente de lâenlever, il pourrait enlever le fils de notre sĆur au passage ? Câest bien ce que vous venez de nous dire ?!
â Oui, mĂȘme si tout est au passĂ©, elle est morte dans la TragĂ©die de Duscur⊠enfin, câĂ©tait bien mĂ©ritĂ©, elle poussait le roi Ă y aller⊠elle sâĂ©tait Ă©loignĂ©e de lui aprĂšs quâil ait exilĂ© son frĂšre pour tentative de meurtreâŠ
â âŠAprĂšs quâon lui ait mis la dĂ©cision de justice dans les mains pour le forcer Ă prendre une dĂ©cision vous voulez dire, la corrigea LachĂ©sis en maugrĂ©ant, comprenant mieux le bourbier oĂč câĂ©tait enfoncĂ© Lambert quatre ans auparavant. On ne lâaurait pas forcĂ© Ă se dĂ©cider, il serait encore en train de rĂ©flĂ©chir si oui ou non, il fallait exiler un homme qui a tentĂ© de tuer un gosse de neuf ans sans raison. Enfin, si câĂ©tait le frĂšre de sa⊠de sa femme⊠pas Ă©tonnant quâil ait autant hĂ©sitĂ© Ă le bannir, mĂȘme si câĂ©tait une sentence extrĂȘmement clĂ©mente pour son cas⊠nous qui croyons que câĂ©tait Ă cause de son habitude de dĂ©tester mettre les mains dans la boue et se les salir, câest encore plus pathĂ©tique quâon ne le pensait⊠il dĂ©lĂšgue toujours ce genre de jugement, que ce soit aux Fraldarius ou nous⊠DĂ©esse, Nitsa doit se retourner dans sa tombe ! Arundel mettait mĂȘme son fils en danger ! Il aurait trĂšs bien pu recommencer et brĂ»ler vif Dimitri aprĂšs avoir Ă©tĂ© Ă deux doigts de tuer FĂ©lix ! Tout ça pour les beaux yeux de cette femme ?! Et câĂ©tait quoi son rapport avec Duscur quâon en finisse ?
â Et bien, elle a dit quâelle voulait le suivre en Duscur, et que ce serait lâoccasion de renouer ensemble pendant ce voyage⊠si jâai bien compris, le seigneur Alix est venu lui voler dans les plumes Ă ce sujet et le seigneur Rodrigue a aussi tentĂ© de le faire revenir Ă la raison concernant Son Altesse mais, rien Ă faire, le roi nâĂ©coutait que Patricia et son frĂšre⊠alorsâŠ
Le bruit du poing de ThĂšcle qui sâabattit sur le comptoir la fit taire, son visage furieux Ă©clairĂ© par son emblĂšme. Elle Ă©tait hors dâelle⊠tout⊠toutâŠ
â Tous ces morts⊠ma grande sĆur⊠mon petit frĂšre⊠ma propre fille⊠mes neveux et niĂšces, mes beaux-frĂšres et belles-sĆurs⊠nos citoyens⊠tous ces gens⊠tous ces gens sont morts parce que cet abruti voulait absolument renouer avec sa femme, femme qui est un risque pour la sĂ©curitĂ© nationale au passage, qui a eu le culot de le pousser dans cette direction parce quâelle nâĂ©tait pas contente car pour une fois, Lambert a agi en roi et banni quelquâun de dangereux et encore, uniquement parce que notre famille Ă©tait sur ces talons avec une Myrina furieuse derriĂšre lâĂ©paule ! Câest ce que vous ĂȘtes en train de nous dire ?!
La servante hocha la tĂȘte, provoquant encore plus lâire des deux sĆurs. Se reprenant un peu, LachĂ©sis demanda, mĂȘme si elle ne se faisait guĂšre dâillusion lĂ -dessus, histoire de voir Ă quel point Lambert avait crachĂ© sur tout, autant son rĂŽle de roi, de pĂšre et de mari.
â Au moins⊠est-ce quâau moins, elle Ă©tait digne dâHĂ©lĂ©na ? Lambert, je nâen parle pas, seule une truie est digne de lui, et se serait insultĂ© la truie de lui imposer un mari pareil mais, est-ce quâau moins humainement, cette Patricia ou Anselma Ă©tait digne de la grande reine quâĂ©tait ma sĆur ? Est-ce quâelle Ă©tait digne dâĂȘtre la belle-mĂšre du fils dâHĂ©lĂ©na et a Ă©tĂ© une aussi bonne mĂšre pour lui que notre Nitsa lâaurait Ă©tĂ©Â ?
â HĂ©las non⊠au dĂ©but, ça allait mais, je pense quâelle Ă©tait un peu intimidĂ©e et encore choquĂ©e par ce quâelle avait fui, elle tentait mĂȘme de se lier dâamitiĂ© avec les Fraldarius. Mais assez vite, sa vraie nature est ressortie⊠elle Ă©tait capricieuse, il fallait sans cesse que tout ce quâon faisait corresponde exactement Ă ce quâelle voulait, mĂȘme si câĂ©tait impossible Ă rĂ©aliser. Ăa devait ĂȘtre pile ce Ă quoi elle pensait et ce quâelle voulait sinon, elle nâacceptait rien, que ce soit sa nourriture, ses vĂȘtements, la dĂ©coration de ses appartements ou mĂȘme la rĂ©alitĂ©. Les Fraldarius lui disaient souvent non et la ramenaient sur le sol de Fodlan alors, elle ne les aimait pas, point. Et elle Ă©tait aussi extrĂȘmement jalouse, mĂȘme des gens qui ne peuvent plus rien lui prendre⊠je pense que câest une habitude quâelle a pris au harem impĂ©rial mais, elle ne supportait pas que Lambert parle de sa premiĂšre femme devant elle, mĂȘme si câĂ©tait au prince, alors que Sa MajestĂ© HĂ©lĂ©na est sa mĂšre. Un autre point de friction avec les Fraldarius dâailleurs, ils ne se gĂȘnaient pas pour parler de Dame HĂ©lĂ©na devant elle. Donc non, elle nâĂ©tait pas digne de lui succĂ©der Ă la place dâĂ©pouse de roi⊠câest pour ça que jâen ai plus rien Ă secouer de balancer tout ça, jâai Ă©tĂ© chassĂ© sans salaire maintenant quâelle est morte, câĂ©tait une patronne horrible et Lambert fait nâimporte quoi, il ne mĂ©rite pas que je me taise !
â Cette femme est jalouse au point dâenvier une morte ? Et au point dâinterdire Ă son mari de parler Ă son enfant de sa mĂšre qui ne lâa jamais connu ? Mais achevez-nous Ă ce stade dâindignitĂ©Â !
â Jâignorais Ă©galement tout cela, marmonna Ludovic aprĂšs ThĂšcle, attentif sans rien laisser transparaitre. Enfin, en cherchant un peu, on devrait retrouver ce qui est liĂ© Ă cette Patricia, Anselma ou peu importe. En tout cas, Lambert prouve une fois de plus quâil pense plus Ă ce quâil veut lui et son entourage proche, quâĂ ce dont le Royaume a besoin. Il y a eu un conflit avec lâEmpire autour du plateau de Brionnic, nâest-ce pas ? Alors, autant Ă©viter un maximum de donner plus dâargument Ă Ionius pour convaincre son ministre des armĂ©es de nous attaquer, encore moins pour « sauver » une personne ou deux au dĂ©triment de milliers dâautres.
â Dans les deux cas, il aura de nos nouvelles dĂšs demain, croyez-nous sur parole, menacĂšrent les deux sĆurs, furieuses et humiliĂ©es.
Elles descendirent dâune traite leur verre quâavait rerempli le pĂšre Mercier pour se calmer, puis les remerciĂšrent pour ses informations et de repartirent, elles avaient une longue nuit qui les attendaient, surtout quâelles avaient bien lâintention de prendre Lambert au saut du lit. LâĂ©lĂ©ment crucial dâune embuscade Ă©tait lâeffet de surprise qui empĂȘchait de sâorganiser correctement et de se dĂ©fendre, faute de renseignement ou de prĂ©paration insuffisante.
Cette caricature de roi avait envoyé leur famille à la mort dans une embuscade à cause de sa stupidité, il méritait de se prendre un retour de bùton équivalent.
De son cĂŽtĂ©, le pĂšre Mercier regarda Ludovic poser encore quelques questions Ă la femme, tout en prenant des nouvelles du bucheron avec qui il avait combattu au marchĂ© noir, Tristan, mĂȘme sâil lui passa une tisane avec un peu de menthe forte trouvĂ©e Ă lâorĂ©e de la forĂȘt. Lâodeur fraiche lui dĂ©bouchait bien les bronches, mĂȘme si câĂ©tait mettre un bandage sur une jambe de bois. Lâair mĂȘme de la ville attaquait ses poumons sans pitiĂ©, comme sâil les pourrissait Ă lâintĂ©rieur mĂȘme de son corps⊠ça devait le faire souffrir horriblement mais, Ludovic ne montrait rien et gardait la tĂȘte haute malgrĂ© toutâŠ
« Le drame de Ludovic, câest dâavoir un corps aussi fragile et dâĂȘtre mal-nĂ© malgrĂ© son emblĂšme⊠songea-t-il en lui donnant le breuvage tout chaud. Il serait nĂ© dans une grande famille, il aurait fait un excellent seigneur, mĂȘme sâil aurait eu un rĂšgne court si sa santĂ© ne suivait pasâŠÂ »
Le jeune homme prit le verre en le remerciant, le tavernier décryptant son sourire si discret mais reconnaissant.
« Je vous rendrais votre gentillesse, je vous le promets, » souffla Ludovic une fois ses bronches dégagées.
Le connaissant, le pĂšre Mercier nâen doutait pas une seconde.
*
Quand il ouvrit les yeux, Lambert mit un peu de temps Ă comprendre oĂč et quand il Ă©tait. Il faisait sombre, la nuit ne devrait pas tarder Ă tomber et des nuages recouvraient le soleil, plongeant le ciel dans lâobscuritĂ© profonde et dans un torrent de pluie dĂ©mentielle⊠on se croirait en plein milieu de la nuitâŠ
Une petite flamme sâalluma dans le coin de ses yeux, Ă©clairant tout son monde alors quâil se rendait compte quâil Ă©tait dans la grande salle de Garreg Mach⊠HĂ©lĂ©na la tenait dans sa main, illuminant une table oĂč Ă©tait assis Rodrigue et Alix cĂŽte Ă cĂŽte en se partageant un livre, faisant face Ă sa premiĂšre Ă©pouse et FĂ©licia ainsi quâIvy qui Ă©tait assis Ă lâenvers sur une chaise, les bras croisĂ© sur le dossier et la tĂȘte dessus⊠câĂ©tait Ă la fois si proche et si lointain⊠à peine vingt ans pourtant et tant de chose avait changé⊠Lambert se souvient alors de ce jour-lĂ , Ă lâacadĂ©mie des officiers⊠un orage de tous les diables les avaient obligĂ©s Ă passer leur dimanche Ă lâintĂ©rieur alors, en se perdant dans la bibliothĂšque en cherchant de quoi lire pour passer le temps, les jumeaux Ă©taient tombĂ©s sur un recueil de chant de Faerghus. Ils sâĂ©taient donc amusĂ©s Ă chanter les diffĂ©rents airs du recueil une bonne partie de lâaprĂšs-midi pour tout le monde, une petite troupe finissant par se former autour dâeux pour les Ă©couter. Leur voix avait toujours Ă©tĂ© magnifiqueâŠ
La lumiĂšre de la flamme Ă©claira le visage halĂ© dâHĂ©lĂ©na, faisant revivre ses yeux dâaigue-marine et sa longue chevelure blonde tressĂ©e, notant avec nostalgie et regret quâelle partageait sa criniĂšre indomptable avec leur fils⊠son visage Ă©tait Ă la fois si semblable et si diffĂ©rent de celui de Patricia⊠comme Ă©clairĂ© par une chandelle, on ne pouvait que voir son calme, son sĂ©rieux et son doux sourire Ă la fois si rare et si prĂ©cieux⊠elle rayonnait force et de santĂ© dans chaque morceau de son ĂȘtreâŠ
« HĂ©lĂ©naâŠÂ »
Le veuf leva la main, la tendit vers sa premiĂšre Ă©pouse, cherchant Ă se rapprocher de sa douce chandelle qui lui avait rĂ©chauffĂ© les mains tant de fois, le guidant sur le bon chemin avec sa lumiĂšre rassuranteâŠ
Les jumeaux changĂšrent alors dâair, se mettant Ă entamer la « Supplique de Fraldarius », mĂȘme si aucun des deux nâaimaient les hypothĂšses autour de cette chanson. Ils apprĂ©ciaient la chanter pour toutes les Ă©motions Ă lâintĂ©rieur mais, trouvait que lâinterprĂ©tation des Ă©rudits autour ne collait vraiment pas Ă ce quâils ressentaient dans les parolesâŠ
« Dans la nuit sans étoile, le vent mugit dans le noir,
Les ronces mâĂ©corchent et mâenserrent en riant,
Les chaines cruelles boivent sans soif mon sang,
à dieux, à la lune je ne peux que hurler mon désespoir, »
La voix des jumeaux sâimmisça dans ses pensĂ©es, les parasitant avec leurs paroles Ă©tranges et inquiĂ©tantes alors que la flamme dans les mains dâHĂ©lĂ©na faiblissaitâŠ
Deux yeux bleus dâeau percĂšrent la pĂ©nombre, avant quâen nâĂ©merge une silhouette longiligne, forte et presque invisible dans lâobscuritĂ©, avant quâil ouvre une gueule Ă©carlate, remplie de longs crocs comme dâimmenses croissants de lune, coupants comme des sabres⊠Lambert sâĂ©cria alors, mĂȘme sâil le reconnut tout de suite, mort de peur pour son Ă©pouse.
« Héléna ! Attention ! »
« Dans le froid de lâhiver, la bise se moque de moi,
Tous mes os se figent un par un,
Ils se pĂ©trifient jusquâĂ la fin,
Ă dieux, Ă la lune je ne peux que hurler mon effroi,
Cependant, le loup se contenta de lui donner un petit coup de truffe Ă la jeune femme, attirant son attention avant de lui montrer un chemin. Sans hĂ©siter malgrĂ© sa mĂ©fiance naturelle, peut-ĂȘtre parce quâelle reconnaissait ses yeux dâeau, HĂ©lĂ©na le suivit sans hĂ©siter, sâenfonçant dans un couloir sombre avec lui.
Fou dâinquiĂ©tude et de peur que ça dĂ©gĂ©nĂšre aprĂšs sa crise de colĂšre, Lambert les suivit en courant, essayant de les rattraper mais, quand il sortit du boyau, il nâĂ©tait plus Ă Garreg Mach⊠non⊠non⊠il Ă©tait de nouveau entourĂ© des corps DuscurâŠ
HĂ©lĂ©na portait Ă prĂ©sent sa longue robe blanche et bordeaux, brodĂ© de son emblĂšme et de lâastre cĂ©rulĂ©en, ses longs cheveux dĂ©nouĂ©s battant en silence dans le vent Ă la fois brĂ»lant et glaciale, portant ses mots Ă©tranglĂ©s alors quâelle se baissait vers les mortsâŠ
« Nia⊠MomonâŠÂ »
Elle se releva, ses gestes saccadĂ©s faisant penser Ă ceux dâune poupĂ©e dĂ©sarticulĂ©e, choquĂ©e en dĂ©couvrant dâautres corps portant leur emblĂšme, des visages dâadultes quâelle nâavait connu que pendant leur enfance, des gardes et des fidĂšles de sa familleâŠ
« Tous⊠tout le mondeâŠÂ »
Sa voix sâĂ©trangla dâun coup alors quâelle sâĂ©lançait vers la derniĂšre personne que Lambert aurait voulu quâelle voie, nâarrivant pas Ă la rejoindre avant quâelle ne trouve la tĂąche bleu roi dans cet ocĂ©an de blanc et de brun-rougeâŠ
« Oh non ! Dimitri ! »
HĂ©lĂ©na se prĂ©cipita vers lui en enjambant les corps comme elle pouvait, le prenant tout de suite dans ses bras en utilisant la magie de soin, murmurant Ă leur fils, mĂȘme sâil ne pouvait pas lâentendre, brĂ»lĂ© et Ă©tranglĂ© de fumĂ©eâŠ
« Dimitri⊠tient bon⊠tient bon⊠je vais te soigner⊠MitsosâŠÂ »
« Dans le noir des tĂ©nĂšbres, mĂȘme le soleil cruel est ennemi,
Mes yeux déjà asséchés de larmes brûlent,
à sa vue dont ils ne supportent plus la férule,
Ă dieux, Ă la belle lune jâhurle, elle est ici ma seule amie. »
Le loup rĂ©apparut, sâasseyant Ă ses cĂŽtĂ©s en passant sa truffe sur les cheveux calcinĂ©s du blessé⊠HĂ©lĂ©na se tourna vers lui, le fixant droit dans les yeux, telle quâelle Ă©tait avant sa mort. Sa peau semblait livide malgrĂ© son teint halĂ©, des cernes sombres et profondes balafrant son visage, ses longs cheveux hirsutes et cassants comme de la paille⊠tel que la peste lâavait laissĂ©âŠ
« Tel que toi, tu lâas Ă©puisĂ©e⊠susurra le loup sans quâHĂ©lĂ©na semble lâentendre, cette derniĂšre lui demandant sans hĂ©siter.
â Qui⊠qui a fait ça Ă mon fils ?
Sans un mot, le loup tourna alors son regard vers Lambert, retroussant ses babines dans un sourire satisfait quand HĂ©lĂ©na se redressa, fixant son mari alors que son visage choquĂ© changeait, sâenflammait de colĂšre, le criblant du regard avec fureur.
« à Lune, grande lune si belle qui mâĂ©coute toujours chaque nuit,
Ce soir, malgrĂ© les ronces qui mâĂ©tranglent et toujours me lacĂšrent,
Je te hurle mon désespoir, je te hurle ma rage, je te hurle ma priÚre,
à Lune, entend mon sort hurler au fond de cette prison de suie ! »
â Lambert⊠comment as-tu pu⊠comment as-tu pu emmener notre fils ici⊠comment as-tu pu emmener mon fils dans une expĂ©dition aussi dangereuse ?! Tu aurais dĂ» le laisser au palais en sĂ©curitĂ©Â ! Il nâavait rien Ă faire dans une expĂ©dition pareille !
â HĂ©lĂ©na⊠je⊠je te jure que je ne pensais pas que ce serait aussi dangereux pour lui⊠lui promit-il en essayant de sâapprocher dâelle, ouvrant ses bras. Jâaurais su, jamais je ne lâauraisâŠ
â Tout le monde tâa prĂ©venu, le coupa-t-elle en se fermant, se mettant entre Lambert et Dimitri, comme pour le protĂ©ger. Myrina tâa dit et rĂ©pĂ©tĂ© que ce passage Ă©tait trĂšs dangereux et quâil ne fallait surtout pas tâattarder dans ce piĂšge Ă rat. Kimon tâa dit que tes lettres Ă©taient mal faites et tes promesses irrĂ©alistes alors, il fallait travailler Ă nouveau avec les ambassadeurs pour trouver des accords plus rĂ©alistes mais que dans tous les cas, cela allait abimer nos relations avec Duscur, ce qui incitait Ă encore plus de vigilance. LachĂ©sis tâa dit plusieurs fois quâil fallait faire arrĂȘter Kleiman et le mettre sous les verrous afin dâĂ©viter quâil nâaggrave encore plus la situation, et ThĂšcle quâelle avait besoin de plus de temps pour examiner son cas pour le juger. Tu as refusĂ© et rĂ©sultat, il continue Ă massacrer dâautres ĂȘtres humains sur la frontiĂšre sans que tu ne remarques rien et avec lâaccord de Rufus. Rodrigue tâa rĂ©pĂ©tĂ© plusieurs fois Ă quel point câĂ©tait dangereux pour Dimitri de lâemmener, et Ă quel point ils nâavaient pas le temps de tout prĂ©parer correctement pour assurer au maximum la sĂ©curitĂ© de tout le convoi, Alix aussi te lâa encore rĂ©pĂ©tĂ© avec force. Mais tu nâas Ă©coutĂ© personne et maintenant, tout le monde est mort par ta faute ! Tu as le sang de notre propre enfant sur les mains !
â HĂ©lĂ©na⊠je⊠jeâŠ
« MĂȘme si je suis prisonnier, je mâĂ©vaderai !
MĂȘme si je ne suis plus que mon dĂ©sespoir, je mâen servirai !
MĂȘme couvert de chaines, jusquâĂ la derniĂšre je les lacĂ©rerai !
à lune ! Au pire des maléfices je me sacrifierai ! »
Il tenta encore de sâapprocher malgrĂ© tout mais, sa premiĂšre Ă©pouse enflamma ses mains avant de les serrer en poing, prĂȘte Ă frapper pour dĂ©fendre Dimitri derriĂšre elle, tout semblable Ă plusieurs reprĂ©sentations de la Flamme PassionnĂ©e, protĂ©geant les siens en sâenflammant elle-mĂȘme. La douce chandelle semblait ĂȘtre tombĂ© dans lâhuile, se propageant partout autour dâeux pour plonger la vallĂ©e Ă©troite dans des flammes bleues, embrasant un grand bĂ»cher funĂ©raire pour les morts et un cocon protecteur pour Dimitri.
Lambert paniqua, sentit ses doigts fondre dans cette fournaise de plus en plus infernal, emportant HĂ©lĂ©na Ă qui Dimitri sâaccrochait Ă prĂ©sent, le laissant seul. Il crut entendre la voix de Patricia au loin, lâappelant vers elle mais, ses appels ne firent que rendre les flammes encore plus fortes, plus cruelles, creusant sa peau alors quâil tentait en vain de trouver une issue, un passage, une Ă©chappatoire⊠nâimporte quoi qui pouvait le faire sortir dâici !
« Que les dieux qui mâabandonnent me haĂŻssent aujourdâhui,
Car moi la pauvre créature enfermée sort ses crocs acérés,
MĂȘme si devenir une bĂȘte est le pire des sorts Ă redouter,
Je suis prĂȘt Ă en ĂȘtre une pour sortir de cette prison honnie ! »
En levant les yeux, suivant lâorigine du chant qui rĂ©sonnait tout autour de lui, lâhomme vit Ă nouveau le loup le fixer depuis le sommet des ravins, la tĂȘte sur ses pattes, souriant toujours Ă pleines dents en le voyant se dĂ©battre, se tortiller dans les flammes en essayant en vain de sâĂ©chapper.
« ToiâŠÂ ! »
EmportĂ© par sa propre colĂšre de la farce grotesque que lui imposait le loup qui avait remplacĂ© son ami, Lambert arriva Ă trouver assez dâĂ©lan pour sauter, attraper le rebord de la falaise et Ă se hisser lĂ oĂč Ă©tait la bĂȘte cruelle, rien que pour lui faire ravaler son sourire aprĂšs avoir montĂ© HĂ©lĂ©na contre lui. CâĂ©tait sa faute sâil cauchemardait Ă ce point ! CâĂ©tait sa faute si elle Ă©tait aussi en colĂšre et fatiguĂ©e !
Cependant, quand il arriva Ă se hisser au sommet battu par le blizzard, le loup sâĂ©tait un peu Ă©loignĂ©, riant toujours Ă la maniĂšre de Foa alors quâil se relevait, un rire saccadĂ© et malade, comme sâil se moquait de lui, le trouvait pathĂ©tique de tenter de lâattraper.
« Reviens ! Reviens et rends sa place Ă âŠ
â Seulement si tu arrives Ă me rattraper ! Ghia ! Ghihi ! Ghihihi ! Que la Lune voie qui gagne ! »
Il repartit en riant, tĂąchant la blancheur Ă©clatante des lieux avec sa noirceur de tĂ©nĂšbres, le forçant Ă sâenfoncer dans le blizzard. Lambert le suivit comme il pouvait mais, il Ă©tait bien plus lourd que lui, ses pas sâenfonçant dans la neige Ă©paisse, le noyant presque dans la poudreuse tranchante, alors que le loup courrait Ă vive allure sur le manteau neigeux et craquant, seules de lĂ©gĂšres traces de pattes vite recouvertes par le blizzard marquant son passage alors quâil chantait Ă nouveau.
« La roue du destin tourne et tourne,
Les routes se mĂȘlent et sâentremĂȘlent,
Les saisons passent et vite trépassent,
On ne reconnait plus rien du tout !
Je cherche mon chemin ! SâĂ©cria le pauvre fol,
De quel chemin parles-tu ? Répondit la Lune
Le glorieux chemin que mâa destinĂ© la fortune !
Quâil est orgueilleux ! Ce pauvre fol est frivole !
Car notre chemin nâest jamais par un autre tracĂ©,
Il est toujours fait de milles et milliers de pas bien décidés,
Il est toujours soigneusement pavé par notre seule volonté,
Tu as toi-mĂȘme dĂ©cidĂ© par tes choix de te blesser !
Mon pauvre fol orgueilleux ! Ta pitoyable erranceâŠ
âŠnâest que le rĂ©sultat de ta propre ignorance ! »
« Tais-toi ! Câest faux et tu le sais ! Je nâai jamais dĂ©cidĂ© que tout tournerait ainsi ! Jamais je ne voulais queâŠ
â Mais tu as tout de mĂȘme dĂ©cidĂ© que tu mĂšnerais le Royaume Ă sa perte.
Lambert sâarrĂȘta net, figĂ© en dĂ©couvrant son pĂšre au sommet de la montagne, Areadbhar luisant dans ses mains, en grand habit de monarque, la couronne dâor de Loog ceignant son front, illuminĂ© par la Lune⊠aprĂšs avoir rencontrĂ© Blaiddyd en personne, Lambert ne pouvait que voir que Ludovic avait exactement les mĂȘmes yeux que leur ancĂȘtre⊠le loup Ă©tait lĂ aussi, allongĂ© aux cĂŽtĂ©s de lâancien roi, toujours aussi satisfait de lui-mĂȘme, le narguant toujours⊠câĂ©tait encore plus cruel de sa part en sachant ce que son pĂšre allait lui faire remarquerâŠ
â Regarde Lambert, lui ordonna son pĂšre en montrant la vallĂ©e en contrebas. Regarde le rĂ©sultat de ton indĂ©cision et de tes dĂ©cisions. Regarde les consĂ©quences de tes actes.
Bien obligĂ© dâavancer, lâhomme obĂ©it et regarda au bas de la colline. Tout Ă©tait sombre, tout Ă©tait plongĂ© dans le noir sans aucun soleil Ă lâhorizon⊠comme sans lendemain⊠il nây avait personne aux alentours, juste des ombres indĂ©finis, comme vidĂ© de toute vieâŠ
â Non⊠il y a encore de la vie en Faerghus⊠on arrivera Ă se relever⊠onâŠ
â Tu rĂ©pares ce que tu as brisĂ© toi-mĂȘme, rĂ©pliqua Ludovic avec sa voix froide, serrant Areadbhar entre ses mains. Jâavais laissĂ© derriĂšre moi un Royaume sain, prospĂšre aprĂšs tant dâannĂ©e de guerre et de terreur⊠toute ma vie, jâai travaillĂ© afin que le rĂšgne de mon pĂšre ne se rĂ©pĂšte pas⊠que tant de personnes ne subissent pas Ă nouveau de telles atrocitĂ©sâŠ
â Mais je nâai jamais voulu faire le moindre mal Ă mes sujets ! Je ne les ai jamais entrainĂ©s dans des guerres sanglantes !
â Non, en effet. Mais tu mĂ©prises leurs vies tout autant que lui, bien que ce soit de maniĂšre diffĂ©rente. Clovis se moquait Ă©perdument de la vie des autres, seule la sienne comptait, et il les envoyait Ă lâabattoir sans hĂ©siter ou remord. Toi, Ă cause de ton inconscience et de ta naĂŻvetĂ©, tu agis sans prendre en considĂ©ration les risques quâencours tout le monde, car tu es persuadĂ© que tout se passera bien et que sinon, ce sera possible de rĂ©parer ce que tu as brisĂ©, alors que rien ne peut rendre une vie perdue ou rĂ©parer cette absence⊠le tout en Ă©coutant de moins en moins les voix qui sâĂ©levaient contre toi et te conseillaient dâĂȘtre plus prudent, et en nâĂ©coutant que les personnes qui ne cherchaient quâĂ profiter de la situation⊠souffla-t-il en passant sa main sur la tĂȘte du loup, avant de le fixer droit dans les yeux. Et vois oĂč tout ceci tâa mené⊠mon plus grand regret est dâĂȘtre mort aussi tĂŽt, trop vite pour tâempĂȘcher dâaccĂ©der au pouvoir. Tu nâas pas les Ă©paules pour ĂȘtre roi, tu nâes pas fait ni digne dâune telle tĂąche, » sanctionna-t-il alors que du sang tuberculeux coulait de sa bouche, comme quand il retenait ses toux avant de mourir, mais il restait malgrĂ© tout droit et ferme, seuls ses poings tremblant de colĂšre. « à cause de ma propre faiblesse, jâai laissĂ© le Royaume entre les mains dâun inconscient qui a tout dĂ©truit sur son passage en Ă©tant persuadĂ© de bien agir, et cela lâa conduit Ă sa ruine. Le Royaume est meurtri par le deuil, la colĂšre et le ressentiment, la faim le gangrĂšne, la maladie guette dans la pĂ©nombre, attend son heure pour tourmenter encore plus notre peuple⊠il se dĂ©lite mĂȘme, Gautier est dĂ©jĂ en train de faire sĂ©cession vers Sreng oĂč ils ne seront plus obligĂ©s dâobĂ©ir Ă tes ordres lunaires, et que crois-tu qui se passera quand Fraldarius apprendra ce que tu as fait Ă ses ducs ? Quand ils verront Rodrigue et Alix revenir sous la forme de loups tourmentĂ©s par le dĂ©sespoir ? Que pensera GalatĂ©a en voyant que Rufus les a dĂ©jĂ abandonnĂ©s ? Charon en voyant ta mauvaise gestion et quand ils apprendront lâaffront que tu as fait Ă leur sĆur ? Que penses-tu ce qui va arriver Ă Faerghus aprĂšs tout ce que tu as fait et laissĂ© faire ?
Lambert ne rĂ©pondit pas, regardant son pĂšre sans savoir quoi dire⊠à part pour le fait que les Charon nâapprendront jamais pour Patricia, encore plus maintenant que⊠il avala sa salive en repoussant tout ce qui avait pu lui arriverâŠ
â Et elle, elle est partie volontairement dans un voyage quâelle a voulu. Elle nâa pas Ă©tĂ© arrachĂ© de force Ă ses proches.
Lâhomme jeta un regard au loup, Ă prĂ©sent debout en regardant au loin, semblant chercher quelque chose dans les flammes. De prĂšs, on voyait ses cĂŽtes saillantes, des blessures sanguinolentes tachant sa fourrure de nuit, que ses grands yeux de chat Ă©taient rougis de larmes⊠Ludovic se baissa vers le loup pour passer ses mains sur la tĂȘte du loup, doux et calme, moins froid avec lui quâil ne lâavait jamais Ă©tĂ© avec presque personne dâautre⊠mĂȘme si Lambert savait en son for intĂ©rieur que son pĂšre avait Ă©tĂ© chaleureux avec lui, souvent mĂȘme avant que la politique et la question de la succession nâenvenime leur relation, il ne put empĂȘcher la jalousie de ronger son cĆur, sachant Ă quel point Ludovic aurait prĂ©fĂ©rĂ© que ce soit ce loup son hĂ©ritier plutĂŽt que luiâŠ
â Que de vies perdues et ruinĂ©es Ă cause de ton inconscience et de ma propre faiblesseâŠ
Le loup passa un coup de langue sur la joue de Ludovic, avant que lâancien roi ne se relĂšve et le regarde dans les yeux, sa colĂšre gelant Lambert sur place.
â Que pensais-tu accomplir en te comportant en tyran nâĂ©coutant que ses ennemis ?
Lambert nâeut pas le temps de rĂ©pondre, Ludovic disparut dans un tourbillon de neige, le lacĂ©rant de toute part alors que tout devenait de plus en plus sombre tout autour de lui⊠le plongeant dans les tĂ©nĂšbres les plus froides et terrifiantesâŠ
Un fredonnement incomprĂ©hensible grouilla dans lâobscuritĂ© humide, le glaçant malgrĂ© sa familiaritĂ©âŠ
Les tĂ©nĂšbres se dissipĂšrent Ă peine, alors que Lambert Ă©chouait dans une forĂȘt noueuse et sombre⊠il faisait tellement humide, on se serait cru dans lâeau tellement lâair en Ă©tait saturé⊠ces bois nâĂ©taient pas Ă©clairĂ©s par le soleil, seule la lune, lâAstre CĂ©rulĂ©en et les Ă©toiles tĂąchaient la nuit, Ă©claboussant les branches noires et emmĂȘlĂ©es les unes les autres de leur lueur blafarde⊠ce nâĂ©tait mĂȘme pas ce qui illuminait vraiment sa vision, mais une forme blanche au fond du chemin, appelant encore et encore quelque chose mais, Lambert ne comprenait pas un seul mot de ce que disait la silhouette, floue comme un reflet dans une flaque⊠il sâapprocha, hĂ©sitant avant de vraiment de retrouver le loup qui reprenait forme humaine en chantant toujoursâŠ
« Au clair de la lune, le vent chante,
Tu pleures dans cette forĂȘt de cendres,
Les nuages vont alors tous descendre,
Pour que plus jamais, le mal te hante.
Au clair de la lune, les loups murmurent,
Sans un bruit, ils sâapprochent de tes blessures,
Ils tâentourent, te rĂ©chauffent avec leur fourrure,
Cette protection si douce te rassure.
Au clair de la lune, la forĂȘt te protĂšgera toujours ici,
Aux hurlements des loups, la brise te réconforte,
Tous pansent tes blessures et au loin les emporte,
Dans leur rassurante Ă©treinte, enfin tu tâendors guĂ©ri. »
Rodrigue Ă©tait apparu face Ă lui, tout diffĂ©rent de celui quâil Ă©tait avant de se transformer. Ses joues Ă©taient de nouveau pleines, ses gestes plus assurĂ©s et prĂ©cis, ses pas bien plus stables, son dos bien droit, son maintien fier et royal⊠il semblait Ă nouveau en pleine santĂ©, comme avant⊠une grande peau du loup recouvrait ses Ă©paules comme une grande cape, cachant un peu son habit sarcelle et blanc pur, le rendant presque lumineux au milieu des tĂ©nĂšbres. Son chapelet Ă©tait autour de son cou plutĂŽt que sur son poignet droit, lâemblĂšme de Fraldarius reposant sur son cĆur, de nouveau en bon Ă©tat alors quâavec le temps, lâhomme lâavait tout abimĂ© Ă force de faire rouler les perles et de serrer les breloques dans ses priĂšres⊠Un cercle dâargent ornĂ© de pierres de lune ceignait ses boucles noires, vibrant presque avec sa peau si pale⊠il avait lâair dâun meneur de loup, comme un ĂȘtre de lĂ©gende sorti tout droit dâune chanson de geste⊠le roi de la forĂȘt et de la nuit venant voir en personne qui avait osĂ© franchir la frontiĂšre de son RoyaumeâŠ
Ses yeux de chat se posĂšrent sur Lambert, profond comme le lac, illisibles⊠ce nâest quâĂ ce moment-lĂ que lâhomme se rendit compte que le loup⊠lâhomme face Ă lui⊠Rodrigue⊠peut-ĂȘtre⊠avait un foulard autour de lui, fait pour porter un enfant, vide, ainsi quâune besace surement remplie de quoi soigner⊠il devait encore le chercher partoutâŠ
« Que⊠que veux-tu ? Demanda Lambert. Câest toi qui as provoquĂ© tout ceci, nâest-ce pasâŠÂ ?
â Quoi donc ?
â Tout ce qui vient de se passer ! HĂ©lĂ©na ! Ludovic ! Duscur ! Dimitri ! MĂȘme la voix de Patricia ! Câest toi qui me les as montrĂ©s ! Câest toi qui les as amenĂ©s ici et les monter contre moi !
â Toi ou moi ?
â Quâest-ce que tu veux dire ? Explique-toi Ă la fin ! Et pourquoi tu te riais de moi tout Ă lâheure ?!
â Est-ce tes actions ou les miennes qui les ont rendus furieux ? Personnellement, jâai ma rĂ©ponse, se moqua-t-il avec un sourire quâil nâavait jamais vu sur le visage de Rodrigue. Dans tous les cas, câest bien mĂ©ritĂ©. Ce mĂ©pris et ce rejet sont tout ce que tu mĂ©rites.
Lambert eut un mouvement de recul face Ă son ami. MĂȘme sâil Ă©tait redevenu humain, tout son comportement ressemblait Ă celui dâun loup tournant autour de sa proie, lâĂ©puisant avant de sauter sur elle et lui rompre le cou pour la dĂ©vorerâŠ
Rodrigue voulait le dĂ©vorer⊠il attendait le moindre signe de faiblesse pour lui sauter dessus et finir de le dĂ©capiter, il en Ă©tait sĂ»râŠÂ !
â Comment as-tu pu changer comme ça⊠osa demander Lambert. Nous⊠nous Ă©tions amisâŠ
â Amis⊠rĂ©pĂ©ta-t-il en posant sa main sur son menton, lâĂ©tudiant avec un mĂ©lange de mĂ©pris et de sarcasme, jouant encore avec lui en le faisant attendre. Amis ou outils⊠tu nâas fait que mâutiliser pour faire ton travail Ă ta place, tout comme Rufus⊠mâĂ©puiser jusquâĂ la derniĂšre goutte de force et dâespoir⊠comme tu lâas fait pour HĂ©lĂ©na⊠puis tu mâas tout pris⊠tout⊠tu mâas pris tout ce qui comptait pour moi, le tout en souriant tout le temps et en Ă©tant persuadĂ© de le faire pour le bien de tous, alors que tu ne faisais que satisfaire tes propres dĂ©sirs et ton Ă©gocentrismeâŠ
â Tu sais bien que je ne pensais pas Ă mal⊠marmonna encore Lambert en dĂ©tournant le regard, ne pouvant pas supporter de voir ce quâĂ©tait devenu son ami, ce regard froid et cruel sur son visage dâhabitude si gentil et chaleureux. Je ne pensais pas que je te faisais souffrir au point de teâŠÂ !
â Allons, relĂšve la tĂȘte, lui ordonna-t-il sur un ton amical et enjouĂ©, encore plus terrifiant que tout le reste ici, comme si tout ceci nâĂ©tait quâun jeu pour lui. Ait au moins le courage de regarder tes victimes en face quand elle vienne te demander des comptes. Et tu ne savais pas que tu me faisais souffrir ? RĂ©pĂ©ta-t-il. Tu ne savais pas quâemmener mon enfant et mon compĂšre de force dans un voyage aussi dangereux me faisait souffrir ?
Il fit un premier pas de loup dans sa direction.
â Tu ne savais pas que nous forcer Ă tous la main dâenvoyer nos sujets et nos proches Ă la mort nous faisait souffrir ?
Un autre pas.
â Tu ne savais pas Ă quel point ĂȘtre obligĂ© de te laisser autant de pouvoir sur Glenn me faisait souffrir ?
Encore un autre pas.
â Tu ne savais pas quâagir comme si la mort de son pĂšre nâĂ©tait pas importante pour Dimitri, que tu traites la mort aussi Ă la lĂ©gĂšre me faisait souffrir ?
MalgrĂ© la menace, Lambert Ă©tait incapable de bouger, happĂ© par le tourbillon de question de lâentitĂ© face Ă lui, harponnĂ© par ses yeux si bleu posĂ©s sur lui.
â Tu ne savais pas que devoir tout faire pour encore rĂ©parer tes erreurs Ă ta place me faisait souffrir ?
Rodrigue était maintenant face à lui, posant encore et encore des questions avec ce sourire de loup, de plus en plus sombre et menaçant, semblant immense malgré sa plus petite taille.
â Tu ne savais pas que travailler pour lâhomme qui a tuĂ© mon fils et mon compĂšre me faisait souffrir ?
Rodrigue leva ses mains, armées de longs ongles semblables à des griffes, souriant toujours, la lune se reflétant sur ses crocs blancs.
â Tu ne savais pas que mâarracher mon louveteau et mon frĂšre me faisait souffrir ?
Il enroula ses doigts griffus autour de sa gorge, le tirant jusquâĂ ce quâil soit front contre front en crachant la derniĂšre question.
â Tu ne savais pas Ă quel point je te hais pour mâavoir tout prit ? Ă quel point je te hais de toute mon Ăąme depuis ce jour oĂč tu es rentrĂ© sans eux ? Que tu es naĂŻf⊠câest Ă vomirâŠ
Il serra en grognant, son sourire et son masque abandonnĂ©, ne laissant quâune Ă©motion brute de haine, de dĂ©gout et de dĂ©testation gravĂ© au plus profond de sa voix et de son ĂȘtre.
â Rends-les-moi⊠rends-les-moi ! Rends-moi tout ce que tu mâas volĂ©Â !
â Rodrigue ! » Protesta Lambert en tentant de se libĂ©rer, accrochant ses propres mains Ă celles de lâhomme en Ă©chouant Ă le faire lĂącher prise malgrĂ© sa force⊠est-ce quâil Ă©tait vraiment devenu un ĂȘtre surnaturel pendant quâil sâĂ©tait transformĂ©Â ?! Il semblait sortir dâun autre monde ! « Je tâen supplie ! Calme-toi !
â Rends-les-moi ! Je veux mes enfants ! Je veux ma famille ! » SâĂ©cria-t-il, tout croc dehors, en serrant encore plus fort, assez pour le griffer⊠du sang coulait le long de sa gorge⊠il Ă©tait sur le point de lâĂ©gorger ! « Tu as rĂ©pandu le sang de Glenn et de Nicola pour survivre comme le vampire que tu es ! Câest Ă cause de toi quâils sont morts ! Rends-les-moi tous les deux !
â Je ne peux pas ramener les morts !
â Il fallait y penser avant ! Tu nous demandes lâimpossible alors, fait-le aussi ! Câest leur sang qui te permet de vivre aujourdâhui ! Rends-le-leur ! Rends-leurs tout le sang que tu leur as volĂ©Â !
â Rodrigue⊠tu mâĂ©trangles !
â Rends-moi Glenn ! Rends-moi Nicola ! Et surtout, rends-moi FĂ©lix ! Rends-moi mon louveteau ! Tu es allĂ© jusquâĂ me prendre mon seul enfant qui me restait ! La derniĂšre personne que FĂ©licia a rencontrĂ©e et aimĂ©e plus que sa vie avec Glenn ! Tu nous as pris notre dernier petit ! La personne que jâaime le plus au monde ! Tu as mĂȘme osĂ© mâarracher FĂ©lix par caprice aprĂšs avoir tuĂ© Glenn par inconscience ! Je veux retrouver mon louveteau ! Rends-le-moi !
â Rodrigue ! Je⊠Lambert haleta, ayant du mal Ă parler, perdant de plus en plus dâair. Je ne peux pas le rĂ©cupĂ©rer comme ça⊠Dimitri doit vouâŠ
â Rends-moi mes fils ! Rends-moi le seul fils qui tâa Ă©chappĂ©Â ! Rends-moi FĂ©lix ! ArrĂȘte de te comporter comme un enfant gĂątĂ© et rends-moi FĂ©lix ! Je veux ma famille ! Lui, tu ne pourras pas me le voler ! Pas lui aussi ! Je ferais tout pour rĂ©cupĂ©rer mon enfant ! Tout ! » Lui jura-t-il en serrant encore plus fort ! Il allait finir par faire sauter sa tĂȘte en dĂ©chirant son cou ! « Alors, rends-le-moi ! Maintenant !
â Rodrigue ! Par pitiĂ©Â ! ArrĂȘte ! »
Lambert se rĂ©veilla dâun coup en hurlant, reprenant son souffle Ă grandes bouffĂ©es sans pouvoir sâempĂȘcher de presser ses mains contre sa gorge, sâattendant pratiquement Ă sentir du sang et des entailles profondes sous ses doigts⊠il sentait encore les mains de son ami la saisir et serrer⊠lui hurler de lui rendre sa famille⊠lui hurler sa haine⊠non⊠ce nâĂ©tait pas possible⊠Rodrigue ne pouvait pas le considĂ©rer ainsi⊠le haĂŻr avec autant de force⊠ce nâĂ©tait quâun cauchemar⊠rien quâun cauchemar⊠rien de plusâŠ
Pourtant, il entendait encore le cri, le hurlement du loup rĂ©sonnĂ© dans la nuit alors quâil sâĂ©chappait enfin de ce rĂȘve Ă©trangeâŠ
« Je te hais ! »
Lâhomme fit tout pour repousser ce mensonge⊠câĂ©tait un mensonge, câĂ©tait forcé⊠Rodrigue ne pouvait pasâŠ
MalgrĂ© tout, le rĂȘve continua Ă le hanter une bonne partie de la matinĂ©e, tellement quâil finit par se rĂ©soudre par aller voir Rufus pour en parler malgrĂ© tout⊠il avait beau jurer quâil nâavait rien Ă voir avec les exactions de Kleiman, que câĂ©tait juste un appui de circonstance pour une situation trĂšs tendue qui demandait tous les bras disponibles pour sâen sortir, Lambert ne pouvait sâempĂȘcher de ressentir une certaine apprĂ©hension avec lui⊠comme si quelque chose dans ses mots sonnaient faux⊠cependant, Rufus restait son grand frĂšre⊠son grand frĂšre Ă qui il pouvait tout dire et tout partager, mĂȘme les choses les plus inavouables ou gĂȘnantes⊠son grand frĂšre qui lâavait toujours mis en confiance, pour le meilleur comme pour le pire mais, câĂ©tait dĂ©jĂ beaucoup quand on passait derriĂšre un roi de la stature de Ludovic⊠il ne pouvait pas sâempĂȘcher de lui faire confiance pour quelque chose dâaussi Ă©trange quâun rĂȘve pareil⊠mĂȘme si ça concernait Rodrigue et quâil nâignorait pas leur antipathie rĂ©ciproqueâŠ
Lambert alla dans le bureau de son frĂšre mais, en voyant quâil nâĂ©tait pas lĂ , il dĂ©cida de lâattendre, il ne devrait pas sâabsenter bien longtemps⊠Rufus travaillait bien plus quâavant la TragĂ©die, il avait aussi droit de prendre une pause de temps en tempsâŠ
« MĂȘme sâil aurait pu en accorder aussi Ă Rodrigue⊠enfin, câest fait maintenantâŠÂ »
Une petite cassette dans un coin du bureau attira lâattention de lâhomme. Elle Ă©tait tout simple, dĂ©corĂ© de quelques vrilles vĂ©gĂ©tales mais, il la reconnaitrait entre mille⊠Rufus y tenait beaucoup⊠la seule fois oĂč il avait disputĂ© Dimitri, câĂ©tait quand il avait voulu la rĂ©cupĂ©rer pour quâelle soit le coffre au trĂ©sor dâun roi malĂ©fique dans un de ses jeux⊠mĂȘme Lambert nâavait jamais vu ce qui avait Ă lâintĂ©rieur⊠il sâĂ©tait toujours imaginĂ© quâil sâagissait de la correspondance intime de son frĂšre, dâoĂč son angoisse que qui que ce soit voit le contenu de cette cassette⊠mĂȘme si Rufus avait aussi promis avec aplomb de lui montrer son contenu quand il reviendrait triomphant de Duscur⊠bon, pour le triomphant, câĂ©tait ratĂ© maisâŠ
« Non⊠câest Ă lui⊠câest sa vie privĂ©e⊠il me le montrera quand il voudraâŠÂ »
Mais câĂ©tait si tentant⊠et Rufus lui avait dit quâil lui montrerait en plusâŠ
Il ne perdait rien Ă juste la manipuler un peuâŠ
La premiĂšre chose qui Ă©tonna Lambert en la prenant dans ses mains Ă©tait le poids de la boite. Elle semblait pleine Ă ras bord sâil se fiait Ă son poids, alors quâelle semblait plus lĂ©gĂšre quand Rufus lui avait montrĂ© la derniĂšre foisâŠ
« Quâest-ce qui a bien puâŠÂ »
Il ne put rĂ©sister et força la boite, lâouvrant sans souci avec sa force.
La cassette ne contenait que du papier, des lettres mĂȘmes Ă premiĂšre vue mais, ce qui Ă©tonna Lambert, câĂ©tait quâil ne sâagissait pas de lâĂ©criture soignĂ©e de Rufus⊠non⊠elle Ă©tait bien plus biscornu, comme Ă©crite par quelquâun de plus jeune ou un gaucher Ă©talant lâencre avec sa main en rĂ©digeant⊠et il y avait plusieurs scriptesâŠ
MĂȘme sâil se força Ă penser quâil sâagissait des lettres de ses amants, des soupçons empoisonnĂšrent le cĆur de Lambert alors quâil dĂ©pliait une missive au sceau dĂ©jĂ cassĂ©âŠ
« Papa, pourquoi tu ne mâĂ©cris plus ?! Jâai plus de nouvelles de toi depuis des semaines ! Quâest-ce qui se passe ?! »
« Câest lâĂ©criture de FĂ©lix ! Mais quâest-ce quâune de ses lettres pour son pĂšre fait lĂ Â ?! »
Lambert en sortit une autre, reconnaissant lâĂ©criture dâAlix, le dĂ©but de la lettre Ă©tant dans le mĂȘme ton que la prĂ©cĂ©dente.
« Rodrigue, je sais que tu ne vas pas bien, je le sens, je sens que tu es mal et que ça ne sâamĂ©liore pas⊠je ne sais pas pourquoi je nâai plus de lettre de toi, est-ce que câest Ă cause de ça ? »
Son sang se gelant de plus en plus, Lambert en sortit deux autres, portant cette fois lâĂ©criture de Rodrigue, destinĂ©es Ă son fils et Ă son frĂšre, Ă©galement dĂ©cachetĂ©es comme si elles avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ© lues. Son ami parlait de ses mĂȘmes inquiĂ©tudes, des lettres qui nâarrivaient pas et de son inquiĂ©tude⊠MĂȘme demande, mĂȘme inquiĂ©tude⊠DĂ©esse ! Quâest-ce quâelles faisaient lĂ Â ?!
« Non ! On mâa volĂ© mes lettres ! Alix a demandĂ© Ă Ivy de lui faire passer une lettre de sa part oĂč il disait quâil nâen recevait plus de ma part, alors que je lui Ă©cris tous les jours et lui aussi ! Quelquâun vole les siennes et celles de FĂ©lix ! Câest pour ça que je nâai plus de nouvelles ! »
Il entendait encore le gĂ©missement paniquĂ© de Rodrigue, tout le dĂ©sespoir quâil nâavait pas perçu au dĂ©part dans sa voix, toute lâinquiĂ©tude et la peur qui se mĂȘlaient ensemble Ă lâintĂ©rieurâŠ
« Rufus ne peut tout de mĂȘme pas ĂȘtreâŠÂ »
Cependant, malgrĂ© tous ses efforts pour trouver des excuses Ă son frĂšre, Lambert dut se rendre Ă lâĂ©vidence en se rendant compte que toute la correspondance volĂ©e de Rodrigue Ă©tait là ⊠les lettres quâil avait envoyĂ©es, celles quâil avait reçu⊠tout⊠tout Ă©tait lĂ Â ! Tout Ă©tait ouvert ! Rufus nâavait tout de mĂȘme pas tout lu ?!
Aucun doute, câĂ©tait lui le voleur de leur correspondance⊠mais⊠mais pourquoi ? Pourquoi faire ça ? Pourquoi faire quelque chose dâaussi cruel ?! Rufus dĂ©testait Rodrigue et Alix de toute son Ăąme Ă cause de Ludovic mais, pas Ă ce point tout de mĂȘme !
Lambert pensait ne pas pouvoir ĂȘtre plus horrifiĂ© mais, quand il vit des papiers roulĂ©s tout au fond de la cassette, semblant plus anciens et usĂ©s, mĂȘme tĂąchĂ©s de sang pour certains, un doute noir lui dĂ©vora le cĆur⊠non⊠non⊠nonâŠ
Il attrapa un rouleau et le dĂ©roula en tremblantâŠ
« à mon Royaume, que jâai toujours dĂ©sirĂ© servir au mieuxâŠÂ »
Lâhomme ne put que reconnaitre lâĂ©criture de son pĂšre, la plume tremblante de Ludovic⊠le parchemin Ă©tait mĂȘme tĂąchĂ© de ses crachats de sang Ă cause de sa tuberculoseâŠ
Comme happĂ© par le rouleau, Lambert ne put sâempĂȘcher de continuer Ă lire les mots, mĂȘme sâil se doutait du contenu⊠voir mĂȘme le redoutait plus encore que les fantĂŽmes et les cauchemarsâŠ
« MalgrĂ© lâhorreur, je nâai jamais oubliĂ© le rĂšgne de mon pĂšre. Toute ma vie durant, je nâai jamais oubliĂ© ces rues couvertes de sang, la terreur et la faim mais, ce qui me marqua le plus Ă©tait son aplomb. Clovis Ă©tait persuadĂ© dâĂȘtre dans son bon droit et ne le cachait pas. MĂȘme si ces actes Ă©taient immoraux, il sâappuyait sur la loi en la dĂ©tournant Ă son profit, devenant inarrĂȘtable dans sa position de roi pour commettre toutes ses exactions. DĂšs lors, mon seul objectif fut de mettre Faerghus Ă lâabri dâun autre souverain tel que lui. « ProtĂ©ger et servir le peuple du Saint-Royaume de Faerghus », tel a Ă©tĂ© la devise qui a guidĂ© chacun de mes pas avec lâaide de mes proches pour que jamais, je nâen dĂ©vie un seul instantâŠ
Lambert sentir son cĆur battre Ă toute vitesse dans sa poitrine. Ce⊠ce parchemin⊠câĂ©tait le testament de son pĂšre⊠câĂ©tait le testament de Ludovic ! CâĂ©tait Rufus qui lâavait pendant toutes ses annĂ©es ?!
Cependant, une grande crainte demeurait : comment empĂȘcher un autre Clovis dâarriver ? Comment empĂȘcher quâun autre souverain tel que lui ne monte sur le trĂŽne ? Ne soit imposer par le hasard cruel de la naissance ? Clovis Ă©tait le fils ainĂ© de sa mĂšre et malheureusement pour lâorgueil de notre lignĂ©e, elle nâĂ©tait guĂšre plus recommandable que son fils. Elle Ă©tait seulement quâun peu plus discrĂšte que lui mais, possĂ©dait les mĂȘmes torts, centrant de plus en plus de pouvoir sur elle-mĂȘme au dĂ©triment de ses contradicteurs mais, par ce geste, elle dĂ©truisait de prĂ©cieux garde-fous qui pouvaient endiguer les exactions du pouvoir royal, soigneusement construit par Loog le Lion et sa fille Sophie la Sage. Ces deux souverains ont Ă©tĂ© Ă©lus avec peu dâavance, savaient quâils devaient composer avec lâensemble de leur royaume et de leur peuple pour faire grandir Faerghus sans plus de violence aprĂšs la guerre, que des contradicteurs nâĂ©taient point des ennemis Ă anĂ©antir mais, des personnes nĂ©cessaires Ă toute remise en question de chaque action, afin de peser le pour et le contre puis, changer dâavis ou camper sur ses positions une fois que nous ayons entendu tous les arguments.
Le passage Ă la succession filiale nous a assenĂ© un coup majeur, nous avons commencĂ© Ă nous croire tel les Hresvelg, choisis par la DĂ©esse pour rĂ©gner et le pouvoir nous ait montĂ© Ă la tĂȘte. Notre objectif nâĂ©tait plus de servir notre peuple comme lâavait voulu le roi Loog, mais que notre peuple nous serve afin de gagner de plus en plus de pouvoir, centralisant toujours plus les fonctions de commandement sur notre propre personne et dĂ©pouillant nos adversaires des armes qui leur permettait de nous arrĂȘter quand nos actions devenaient dangereuses pour notre peuple. Au comble de notre hubris, nous avons mĂȘme commencĂ© Ă traiter toute une lignĂ©e comme des objets jetables, des boucliers qui ne servent quâĂ prendre les coups Ă notre place pour que nous puissions survivre, pendant que cette famille portait perpĂ©tuellement le deuil de tous ses membres sacrifiĂ©s aux Blaiddyd⊠Nos ancĂȘtres doivent rougir de honte devant notre dĂ©cadenceâŠ
Jâaimerais dire que tout ceci sâest arrĂȘtĂ© avec la mort de mon pĂšre mais, je ne me fais guĂšre dâillusion. Le hasard fait quâĂ chaque fois, Ă chaque naissance, Ă chaque gĂ©nĂ©ration, il y aura toujours un risque quâĂ nouveau, un autre Clovis naisse. Je nâai Ă©chappĂ© Ă la dĂ©cadence de ma famille que grĂące Ă mon corps faible malgrĂ© mon emblĂšme, inapte Ă la guerre et facilement malade, ce qui mâa permis de vivre au sein dâune famille aimante et normale, pour qui je ne ressent que de lâaffection, et que je ne remercierais jamais assez pour leur accueil et leur amour, mĂȘme si je les ai Ă mon tour meurtri dâun deuil dont je porte la responsabilitĂ© et la culpabilitĂ© chaque jour.
Jâai tout fait pour bien Ă©duquer mes enfants, pour les emmener au plus loin des conceptions de leur grand-pĂšre et leur inculquer que ce nâest pas le peuple qui doit servir le roi, mais le roi qui doit toujours servir son peuple en premier lieu. Cependant, je me suis rendu compte que cela ne faisait pas tout⊠Mon fils Lambert est un homme au grand cĆur, gentil et chaleureux, ainsi quâun guerrier accompli Ă la force extraordinaire. Je suis fier de ses prouesses au combat et heureux dâĂȘtre son pĂšre malgrĂ© notre relation compliquĂ©e. Il reste mon fils et je lâaime de tout mon cĆur mais, cette amour ne peut masquer lâampleur de ses dĂ©fauts moraux.
Il est chaleureux mais, Ă©galement nĂ©gligent et naĂŻf. MalgrĂ© tous mes efforts, jamais je ne suis arrivĂ© Ă lui faire comprendre quâon ne peut aider tout le monde, quâil fallait choisir qui aider car, tout le monde nâa pas besoin dâaide de la mĂȘme maniĂšre et quâil fallait concentrer le soutien au plus faible mais, dans une vision naĂŻve de lâĂ©galitĂ©, il reste persuadĂ© que le mieux Ă faire est dâaider tout le monde Ă part Ă©gale, sans se soucier du contexte de dĂ©part, ce qui le rend trĂšs inefficace et indĂ©cis dans des situations oĂč il doit justement trancher un conflit sans pouvoir satisfaire tout le monde. Sa nĂ©gligence envers ses proches combinĂ©e Ă cette naĂŻvetĂ© et son entĂȘtement pousse ces derniers Ă devoir ajuster tout ce quâil fait, rattrapant avec les quelques pouvoirs que nous leurs avons laissĂ©s ou rendus ce quâils peuvent pour Ă©viter de lĂ©ser le Royaume.
La premiĂšre victime de cette situation est malheureusement ma belle-fille, HĂ©lĂ©na. Câest une femme brillante, avec un grand avenir devant elle, sachant convaincre mĂȘme les plus entĂȘtĂ©s comme son mari mais, cela est se fait au prix de grands efforts et de longues nĂ©gociations qui ont malheureusement eu raison de sa santĂ©. Puisse-t-elle me pardonner un jour de lui avoir imposer un tel Ă©poux, elle qui mĂ©ritait de pouvoir monter bien plus haut que de se contenter dâĂȘtre lâombre balayant derriĂšre le roi. Elle attend Ă prĂ©sent leur enfant, et jâespĂšre pouvoir vivre assez longtemps pour pouvoir rencontrer ce petit ĂȘtre que mon cĆur sait dĂ©jĂ ĂȘtre exceptionnel, que jâaimerais de tout lâamour quâil reste dans ma carcasse rongĂ©e par la tuberculose, mais mon esprit ne cesse de me rappeler Ă lâordre, de me demander sâil ne risquerait pas dâavoir hĂ©ritĂ© des dĂ©fauts de son pĂšre plutĂŽt que des qualitĂ©s de sa mĂšre⊠et dans le mĂȘme souffle, mâexcuser envers lui et sa mĂšre de leur imposer un pĂšre que je sais ĂȘtre aussi nĂ©gligent. Je prie pour que la paternitĂ© le rende au moins responsable et prudent avec la santĂ© de son enfant pour que jamais, il ne le mette en danger.
Au fil du temps, il sâest imposĂ© Ă moi une chose : jamais mon fils ne doit monter sur le trĂŽne. Cette nouvelle position peut autant le rendre plus responsable, enfin lui faire prendre conscience des choses mais, je sais que cet optimisme nâest nourri que par mon affection, et je ne puis mâappuyer uniquement sur elle pour confier le destin de Faerghus Ă qui que ce soit. Ma raison ne peut que me rappeler Ă quel point le risque quâil prenne encore plus confiance en lui ne le mĂšne sur une pente glissante, une pente oĂč il nâĂ©coutera plus personne, mĂȘme ses amis les plus chers Ă son cĆur et ne se fassent manipuler par des ennemis qui sauront profiter de ses failles. HĂ©lĂ©na sâĂ©puise bien assez chaque jour pour Ă©viter que cela arrive, je ne veux pas lui causer encore plus de tort.
Aussi trouverez-vous dans les papiers accompagnant ce testament la procĂ©dure complĂšte Ă suivre pour que le prochain souverain soit Ă©lu, Ă la maniĂšre de Loog le Lion et de sa fille Sophie. Câest un projet qui me tient Ă cĆur depuis des annĂ©es et que je voulais mettre en place depuis mon accession au trĂŽne mais, mon corps me trahit avant que je ne puit lâorganiser moi-mĂȘme. Il est Ă peine fini mais, mes poumons me tuent lentement, rongent ma vie et lâabsorbent pour nourrir la tuberculose quâils abritent. Je vous prie de pardonner mon inconscience et mon retard, tout le temps que jâai mis avec mes proches Ă conclure ce systĂšme et de ne pouvoir le mettre en place moi-mĂȘme. Ainsi, ce sera aux citoyens de Faerghus de choisir eux-mĂȘmes le souverain qui leur convient, et ainsi, ils Ă©chapperont aux cruels hasards de la naissance, ainsi que de nouveaux garde-fous pour Ă©viter tout dĂ©bordement tel que le pays en a connu sous trop de mes ancĂȘtres.
Ainsi, en mon Ăąme et conscience, je me dois de lâadmettre et reconnaitre que dans la situation actuelle, si je devais voter pour Ă©lire le prochain roi, ma voix irait aux jumeaux Rodrigue Achille Fraldarius et Alix PersĂ©e Fraldarius. Selon mon expĂ©rience, mon esprit et ma propre rĂ©flexion, ainsi que lâobservation de leurs parcours et dĂ©cisions antĂ©rieurs, ils sont les plus Ă mĂȘme de prendre soin du Royaume pour le mener vers un jour meilleur.
Quant Ă mes fils, je me doute que Rufus ne me pardonnera surement jamais de refuser le trĂŽne Ă son frĂšre. Lambert est de loin la personne quâil aime le plus au monde, et je remercie la DĂ©esse que mes fils sâentendent si bien mais, la raison doit lâemporter sur lâaffection. Bien que je ne puisse pas arracher notre domaine Ă son contrĂŽle, il sera au moins entourĂ© par des conseillers et des baillis dont la fidĂ©litĂ© est acquise Ă notre peuple et non Ă notre famille, et je ne doute point que les Charon sauront fournir des personnes compĂ©tentes et fidĂšles Ă HĂ©lĂ©na. Je ne puis quâespĂ©rer quâelle trouvera quelquâun qui lâaidera Ă Ă©chapper Ă tout ceci et si la situation sâempirerait encore, la force de quitter une personne ne lui apportant rien dâautre que de lâĂ©puisement malgrĂ© ses sentiments pour Lambert.
Beaucoup diront sans doute que ces lignes ne sont que folies, nourries par la tuberculose qui me rongerait lâesprit mais, je jure devant la DĂ©esse avoir encore toute ma tĂȘte. Toute ma vie, jâai travaillĂ© pour ĂȘtre digne des habitants du Saint-Royaume de Faerghus, digne de ce peuple fort et courageux qui sâest rĂ©voltĂ© contre lâinjustice et la cruautĂ© de lâempereur pour faire nation et vivre selon ses propres aspiration, digne de ce hasard qui mâavait Ă©lu roi dâun si grand peuple. Je suis conscient que lâĂ©lection du roi ne rĂšglera pas tous les problĂšmes de notre pays, beaucoup de travail doit encore ĂȘtre fait avant que les sujets⊠que dis-je, les citoyens de Faerghus vivent dans un pays sain et absout des difficultĂ©s que nous connaissons Ă prĂ©sent. Jâai commencĂ© Ă tracer cette voie tout en reconstruisant le Royaume Ă partir des dĂ©combres quâa laissĂ© Clovis dans son sillage, je regrette de ne pouvoir plus avancer alors que mon corps me trahit. Je garde cependant lâespoir que les prochains souverains qui me suivront sauront tous avancer dans cette direction. Si tel que je lâespĂšre, Rodrigue Achille et Alix PersĂ©e Fraldarius, sont Ă©lus, jâai peu de doute sur le fait quâils sauront ĂȘtre dignes de cette mission.
Je vous souhaite une vie longue, heureuse et en sĂ©curitĂ© Ă tous. JâespĂšre de tout mon cĆur que mes fils continueront Ă grandir et sâamĂ©lioreront avec le temps, bien malgrĂ© tous mes doutes. On dirait bien que ma raison ne peut pas complĂštement prendre le pas sur mon affection, et me pousse Ă croire Ă un avenir radieux pour eux. Je prie Ă©galement pour que mon successeur connaisse un long rĂšgne de paix, une paix que mĂ©rite ce Royaume si rĂ©silient malgrĂ© toutes les difficultĂ©s quâil a vĂ©cues.
En mon Ăąme et conscience.
Ludovic le TroisiÚme Clodomir Blaiddyd, dit le Prudent. »
Lambert se laissa tomber sur la chaise au fur et Ă mesure de la lecture, ne pouvant sâempĂȘcher de relire plusieurs fois tout le rouleau. LâĂ©criture Ă©tait tremblante, saccadĂ© comme si Ludovic sâĂ©tait arrĂȘtĂ© plusieurs fois Ă cause de ses toux, le parchemin tĂąchĂ© de sang tĂ©moignant quâil avait encore dĂ» en cracher, rendant la fin pratiquement illisible sous le sang, les tĂąches et lâencre baveuse, comme si on avait roulĂ© le testament avant quâelle nâait fini de sĂ©cherâŠ
« Ainsi, en mon Ăąme et conscience, je me dois de lâadmettre et reconnaitre que dans la situation actuelle, si je devais voter pour Ă©lire le prochain roi, ma voix irait aux jumeaux Rodrigue Achille Fraldarius et Alix PersĂ©e Fraldarius. Selon mon expĂ©rience, mon esprit et ma propre rĂ©flexion, ainsi que lâobservation de leurs parcours et dĂ©cisions antĂ©rieurs, ils sont les plus Ă mĂȘme de prendre soin du Royaume pour le mener vers un jour meilleur. »
Lâhomme ne pouvait sâempĂȘcher de relire ce passage encore et encore. Les noms Ă©taient recouverts dâune Ă©norme tĂąche de sang assez Ă©paisse, ce serait surement illisible dans quelques annĂ©es quand le parchemin aura encore vieilli mais, malgrĂ© tout, Lambert ne pouvait que les dĂ©crypter, les relisant encore et encore.
Son pĂšre lâavait complĂštement dĂ©shĂ©ritĂ© au profit de Rodrigue et Alix.
Des souvenirs parasites refaisaient surface, rappelant des sĂ©ances de travail les rĂ©unissant tous, autant HĂ©lĂ©na que les jumeaux. Lambert parlait beaucoup mais, se faisait souvent rappeler Ă lâordre et rĂ©expliquer les choses. Face Ă lui, Rodrigue analysait les situations en a rien de temps, devinant facilement lâorigine des tensions, pendant quâAlix proposait des solutions et HĂ©lĂ©na le cadre pour les mettre en place. Lâimpression dâĂȘtre Ă la traine malgrĂ© toutes les explications⊠le regard fier de son pĂšre qui couvait les jumeaux en disant quâils ressemblaient Ă leurs parents⊠mĂȘme si Lambert nâavait jamais voulu ressembler Ă Ludovic Ă cause de leurs diffĂ©rences de caractĂšre, encore moins Ă sa mĂšre assoiffĂ©e de sang, il ne put sâempĂȘcher de les envier⊠de vouloir entendre le mĂȘme compliment sur son travail⊠comme eux deux⊠voir son pĂšre ĂȘtre fier de lui ainsiâŠ
Ludovic lui faisait si peu confiance quâil aurait prĂ©fĂ©rĂ© confier aux jumeaux de Fraldarius son prĂ©cieux royaume, ce Ă quoi il tenait le plus au monde et pour lequel il sâĂ©tait battu comme un lion depuis toujours⊠disait mĂȘme quâil sâexcusait envers HĂ©lĂ©na de lâavoir mariĂ© Ă lui⊠quâelle aurait mĂ©ritĂ© mieux que balayer derriĂšre luiâŠ
Ă cette lecture, plusieurs souvenirs prirent une teinte diffĂ©rente, mĂȘme les plus anodins. MĂȘme si Ludovic lâavait enlacĂ© plusieurs fois pendant son mariage, Lambert ne put que noter quâil lâavait aussi fait une fois avec Rodrigue et FĂ©licia, leur souhaitant quelque chose quâil nâavait pas entendu, mĂȘme si le sourire de Rodrigue trahissait que câĂ©tait des vĆux plutĂŽt que des recommandations⊠sa proximitĂ© bien plus calme avec les jumeaux, ainsi quâavec HĂ©lĂ©na, les longues heures oĂč ils pouvaient discuter tous les deux, alors que Lambert avait du mal Ă lui parler longtemps, cela finissait souvent en dialogue de sourd des deux cĂŽtĂ©s⊠mĂȘme des souvenirs dâenfance prenaient un gout amer, les fois oĂč son pĂšre se penchait vers eux pour leur parler, son regard attentionnĂ©âŠ
Est-ce que⊠est-ce que Ludovic⊠est-ce que son propre pĂšreâŠ
« Non⊠faut que je me reprenne⊠câest la tuberculose⊠elle lui a fait perdre tous ses sens⊠Ludovic mâaimait aussi⊠il le dit dans son testament alors quâil nâa aucun sens⊠et quand nous Ă©tions petit, câĂ©tait surtout de la culpabilitĂ© pour les jumeaux⊠Ludovic ne sâest jamais pardonnĂ© la mort de Guillaume. Il en a toujours pris la responsabilité⊠mĂȘme ici, il le dit⊠ce quâil ressentait, câĂ©tait surement de lâaffection, mais aussi de la pitiĂ© et de la culpabilité⊠il sâen voulait pour la mort de leur pĂšreâŠÂ »
« Câest ma faute⊠jâaurais dĂ» ĂȘtre plus prudent et mieux anticipĂ© les risques⊠Guillaume aurait survĂ©cu et les Fraldarius nâauraient pas Ă©tĂ© encore endeuillĂ© par notre faute⊠à cause de mon inconscience, Guillaume est mort⊠lui avait dĂ©jĂ dit Ludovic sur la fin de sa vie, le visage encore plus sombre que dâhabitude, son deuil ressortant encore vingt ans plus tard. JâespĂšre que tu nâauras jamais Ă porter une telle responsabilité⊠autant ce deuil que la mort dâun de tes sujets. »
« Porter une telle responsabilité⊠le deuil dâun Fraldarius et dâun de mes sujets⊠si tu savais pĂšre⊠si tu savais ce que jâai faitâŠÂ »
Lambert relisait encore et encore le testament, ainsi que les autres travaux cachĂ©s dans cette cassette, presque compulsivement pour tenter de comprendre son pĂšre, lâentendre peut-ĂȘtre le sermonner pour ce quâil avait fait, vouloir le faire parler mĂȘme depuis sa tombe pour savoir quoi faire de ce testament dans une situation pareille, sâil devait le rĂ©vĂ©ler et lâappliquer dĂšs maintenant mĂȘme si câĂ©tait Ă©vident que tout avait Ă©tĂ© Ă©crit sous la dictĂ© de la tuberculose mais, est-ce que cela ne ferait pas exploser le Royaume Ă un moment pareil ?! Enfer ! Il ne savait mĂȘme pas sâil voulait que Rodrigue, Alix ou HĂ©lĂ©na soient lĂ pour en discuter vu comment Ludovic parlait dâeux ! Mais il avait tellement besoin de leurs bons conseils !
Cependant, la seule personne qui passa la porte nâĂ©tait ni le Rodrigue quâil connaissait qui saurait gĂ©rer la situation, ni Alix prĂȘt Ă lui remettre les pendules Ă lâheure, ou HĂ©lĂ©na lui prĂ©senter les diffĂ©rents chemins possibles en le conseillant pour le pousser vers le bon, mais câĂ©tait Rufus. Rufus qui avaitâŠ
RĂ©cupĂ©rant plus dâĂ©nergie que jamais depuis la TragĂ©die, Lambert se redressa dâun coup en montrant les lettres et le testament, fou de rage et de trahison.
« Rufus ! Tu peux mâexpliquer ?! Quâest-ce que ça faisait dans ta cassette ?!
â Tu lâas ouverte ?! Couina pratiquement son frĂšre, pris au dĂ©pourvu par la question furieuse.
â Tu mâavais dit que tu me la montrerais aprĂšs le voyage ! Et nâessaye pas dâesquiver la question ! Quâest-ce que la correspondance de Rodrigue, Alix et FĂ©lix fait dans ta cassette ?! Et pourquoi le testament de notre pĂšre et ses travaux sur la monarchie Ă©lective y sont aussi ?! Câest toi qui as appelĂ© les secours quand Ludovic sâest effondrĂ© Ă cause de sa tuberculose ! Est-ce que tu en as profitĂ© pour voler son testament et ses travaux ?!
â Calme-toi Lambert, je peux tâexpliquer. Ludovic ne mâa pas laissĂ© le choix⊠il ne savait plus ce quâil faisaitâŠ
â Comment ça ? En quoi ? Et ça ne me dit pas pourquoi tu as cette correspondance ! Rodrigue lâa cherchĂ© partout !
â Ludovic allait te dĂ©shĂ©riter pour donner le pouvoir aux fils de Guillaume ! Il allait dĂ©truire notre famille pour prĂ©fĂ©rer celle de son soi-disant grand frĂšre ! Il nâavait aucun respect pour toi ! Il ne pensait quâĂ ces foutus jumeaux quâils mettaient sur un piĂ©destal en te dĂ©nigrant, car il aurait voulu quâils soient Ă ta place ! CâĂ©tait pour te protĂ©ger !
Rufus lâavait pratiquement crachĂ© avec tout le venin, toute la haine quâil ressentait pour Ludovic et pour les jumeaux. Il continua, incontrĂŽlable.
â Ludovic te dĂ©testait ! Tu viens de le lire non ?! Il nâavait aucune confiance en toi ! Il te crache dessus dans tout ce foutu papier ! Tu es roi ! Câest toi qui devais devenir roi ! Câest ton hĂ©ritage ! ça nous appartient ! Notre famille est la famille royale de Faerghus depuis le dĂ©but du Royaume ! Câest Loog qui a menĂ© la rĂ©volte des BĂątards et en a fait la guerre du Lion et de lâAigle ! Câest lui qui a gagnĂ©Â ! Câest lui qui a Ă©tĂ© acclamĂ© vainqueur ! Personne dâautre ! Et lui, parce quâil a rencontrĂ© un mauvais roi dans toute sa vie, il en fait une gĂ©nĂ©ralitĂ© et il a voulu tout dĂ©truire sur son passage ! Et il a voulu donner le pouvoir Ă ces foutus jumeaux car câĂ©tait les fils de Guillaume ! Il se cachait derriĂšre son petit doigt en disant quâils Ă©taient plus compĂ©tents que toi mais, câest de la connerie ! Il ne voyait que les fils de Guillaume en eux ! Rien dâautre ! CâĂ©tait les fils de son grand frĂšre alors, tout devait leur revenir ! Il ose mĂȘme cracher sur ton mariage ! Soi-disant que tu avais Ă©puisĂ© HĂ©lĂ©na et fait perdre la santĂ©Â ! Il Ă©tait malade et il a perdu lâesprit ! Tu nâas jamais fait ça ! Tu y tenais Ă HĂ©lĂ©na mĂȘme si elle Ă©tait trop bien pour toi ! CâĂ©tait juste la petite crĂ©ature de Ludovic et de la matriarche Catherine lĂ pour te faire faire ce quâeux voulaient ! Et mĂȘme si câĂ©tait sa crĂ©ature, tu ne lui aurais jamais fait de mal ! Il dĂ©lirait ! Et il a osĂ© me dire de faire ce qui est bon pour le Royaume et pas pour moi-mĂȘme ! CâĂ©tait lui qui faisait tout avoir ce que lui voulait au dĂ©pend du Royaume ! Tout ce que jâai fait, câĂ©tait pour te protĂ©ger ! âŠ
Lambert le fit taire en posant ses mains sur les Ă©paules, le regardant droit dans les yeux en lui demandant.
â Dâaccord pour le testament. Je veux bien comprendre ton raisonnement, mĂȘme sâil est complĂštement faux. Notre pĂšre apprĂ©ciait les jumeaux mais, pas plus que nous. On Ă©tait ses fils et il nous aimait tous les deux, je le sais. Pour les jumeaux⊠câĂ©tait compliqué⊠tu sais bien quâil sâest toujours senti coupable de la mort de Guillaume alors, il tentait de compenser envers eux mais, ce nâĂ©tait pas de lâaffection⊠juste de la culpabilité⊠rien de plus, jâen suis sĂ»r⊠tout comme HĂ©lĂ©na, il pensait juste quâelle ferait une bonne reine pour Faerghus et il a vu juste, pas la peine dâen faire sa crĂ©ature⊠mais, je te comprends aussi. Tu es mon grand frĂšre, tu pensais que Ludovic voulait me faire du mal en me dĂ©shĂ©ritant, mĂȘme sâil avait sans doute ses raisons Ă lui et que tu nâavais pas Ă voler son testament. Jâaurais voulu le lire honnĂȘtement, mĂȘme si ça mâa fait trĂšs mal de voir Ă quel point il ne me faisait pas confiance vis-Ă -vis du Royaume, encore plus maintenant⊠je ne sais mĂȘme pas si je lâaurais appliquĂ©, câest Ă©vident que câest la tuberculose qui lui a fait Ă©crire tout ça⊠je veux dire, regarde un peu lâĂ©tat du parchemin ! Il est couvert de crachat de sang ! Il ne savait plus du tout ce quâil faisait ! ça aurait Ă©tĂ© facile de le faire casser⊠Mais ce que je ne comprends pas, câest pourquoi tu as volĂ© la correspondance de Rodrigue, Alix et FĂ©lix ? Pourquoi tu as fait ça ? Elle est mĂȘme ouverte alors, tu lâas surement lu⊠pourquoi ? CâĂ©tait inutile et cruelâŠ
Le visage de Rufus sâassombrit, essayant dâĂ©viter le regard de Lambert alors quâil marmonnait.
â Il te conseillait mal et te poussait Ă prendre de mauvaises dĂ©cisions, comme quand tu as envoyĂ© Dimitri Ă Charon. Il aurait dĂ» rester ici. Je pensais quâil finirait par partir si je le fatiguais assez alors, je lui ai pris ces lettres, pour le motiver encore plus Ă rentrer chez lui.
â CâĂ©tait mon idĂ©e dâenvoyer Dimitri Ă Charon, et on a bien fait, il guĂ©rit bien mieux avec le bon air de la montagne quâici. Et si tu voulais le faire partir, pourquoi tu as dit que câĂ©tait une bonne idĂ©e quâil se soigne ici ? Tu aurais plutĂŽt dĂ» lâencourager Ă partir, non ? Rufus⊠il soupira, nâen pouvant plus de tout ceci, trop de question tournant dans sa tĂȘte et voulant juste une rĂ©ponse. Ăcoute⊠je tâai toujours fait confiance et ta parole est vraiment trĂšs importante pour moi. Tu es mon grand frĂšre et je sais que je peux toujours compter sur toi. Câest pour ça que je suis trĂšs souvent ce que tu me conseilles de faire, car je sais que je peux te faire confiance mais⊠mais en ce moment, jâai lâimpression que⊠que câest plus compliquĂ©. Dâabord, il y a la maniĂšre dont tu as traitĂ© Rodrigue, puis tu as remis des peines de Clovis pour la justice, puis il y a Kleiman qui arrive au palais et prend part Ă tout alors que câest lui qui a commencĂ© toute cette histoire, puis on retrouve un sac rempli de tĂȘtes humaines dans leurs appartements et ils repartent en trombe, et maintenant, je retrouve la correspondance volĂ©e de mon meilleur ami et le testament de notre pĂšre dans ta cassette. Par pitiĂ© Rufus, dit moi la vĂ©ritĂ©, quâest-ce qui se passe dans ta tĂȘte ? Lâimplora-t-il en redoutant le pire. Jâaimerais te faire confiance mais, ça devient trĂšs difficile avec tout ça !
â Tu ne voyais pas le vrai visage Rodrigue⊠marmonna-t-il.
â Câest-Ă -dire ? Explique-toi Ă la fin !
â CâĂ©tait un enragĂ© lui aussi ! Toujours Ă faire ce quâil voulait et Ă avantager son fief, toujours Ă te dire non, toujours Ă nous mettre des bĂątons dans les roues, toujours Ă ĂȘtre apprĂ©ciĂ© de tous et de Ludovic le premier ! Je ne sais pas par quel malĂ©fice il rĂ©ussissait, autant lui quâAlix mais, ils ont toujours eu la faveur de tous, ils ont toujours rĂ©ussi partout et charmĂ© tout le monde Ă tes dĂ©pends ! Alors quâils ont toujours Ă©tĂ© plus faible que toi et ce ne sont que des ducs ! Ce ne sont que des ducs et que fait cet imbĂ©cile de Jacque quand il leur demande de les prendre Ă leur service, pour rĂ©parer sa « faute » dâavoir laissĂ© FĂ©lix seul avec Arundel sans imaginer quâil pourrait lâattaquer ? Il sâagenouille devant eux en leur demandant Ă rentrer dans leur garde pour rattraper son erreur, alors quâil est Ă ton service ! Ils se comportaient quasiment comme des rois ! Câest pas quâils sont devenus des loups, câest que leur apparence ressemble enfin Ă ce quâils sont vraiment ! CâĂ©tait tout ce quâil mĂ©ritait !
Lambert eu alors un mouvement de recul, comme si son grand frĂšre câĂ©tait transformĂ© dâun coup en monstre, comprenant dâun coup tout ce qui Ă©tait arrivĂ© Ă son ami et pourquoi il avait dĂ» subir tout ceci, tout son corps fondant dâun coup comme neige au soleil.
â Tu leur as volĂ© leurs lettres par haine⊠tu voulais le faire souffrir⊠câest ça ? Tout ce que tu voulais, câest faire souffrir Rodrigue⊠tout ça car⊠carâŠ
Sans attendre de rĂ©ponse et un nouveau mensonge de la part de Rufus, Lambert partit sans se retourner, ne voulant pas en entendre plus, serrant la cassette et son contenu contre lui, sây accrochant presque comme Ă une ancre, mĂȘme si elle le noyait par sa simple existence. Comment⊠comment son frĂšre avait-il pu⊠comment avait-il pu ĂȘtre aussi ignoble juste parce que⊠parce que leur pĂšre apprĂ©ciait beaucoup les jumeaux ? Tout ça pour ça ?! Pour un ressentiment envers quelquâun de mort depuis quatorze ans et alors le Royaume Ă©tait au plus mal ?! Toute cette souffrance pour ça ? Par haine ?! Quâil ait vu ça comme une petite mesquinerie ne lâĂ©tonnerait mĂȘme plus Ă ce stade !
« Alors, mĂȘme mon propre frĂšre peut me trahir⊠Rufus⊠alors qui⊠qui est encoreâŠÂ »
« Est⊠ta⊠fauteâŠÂ ! »
« Tu nâas Ă©coutĂ© personne et maintenant, tout le monde est mort par ta faute ! Tu as le sang de notre propre enfant sur les mains ! »
« Que pensais-tu accomplir en te comportant en tyran nâĂ©coutant que ses ennemis ? »
« Je te hais ! »
Seuls les cris et le jugement lui rĂ©pondirent⊠les doigts des fantĂŽmes finissant le travail de cette hache en lâĂ©tranglant encore et encoreâŠ
En arrivant dans son bureau avec lâespoir de pouvoir se poser une seconde et rĂ©flĂ©chir Ă tout ce qui câĂ©tait passĂ©, il trouva LachĂ©sis et ThĂšcle, visiblement furieuses malgrĂ© la façade de froideur.
Lâhomme avait lâimpression dâobserver la scĂšne de loin, comme sâil nâen faisait pas partie, spectateur de cette farce quâil avait Ă©crit lui-mĂȘme.
Les deux sĆurs lâinformĂšrent que lâĂ©tat des comptes Ă©tait catastrophique et que les baillis quâil avait choisis lui-mĂȘme Ă©taient des incompĂ©tents.
« Je comprends⊠je ferais plus attentionâŠ
â Il fallait le faire avantâŠÂ »
LachĂ©sis lui apprit quâelles savaient tout ce qui sâĂ©tait passĂ© Ă la capitale pendant leur absence, Ă quel point câĂ©tait une honte pour tout Faerghus et quâelles avaient donc dĂ©cidĂ© de retourner dans leur famille.
« Ce serait prĂ©fĂ©rable pour le Royaume que vous restiezâŠ
â Pour finir transformer en loup nous aussi et user jusquâĂ la corde par votre incompĂ©tence ? Il en est hors de question. »
ThÚcle ajouta que comme le voulait la coutume pour les magistrats en fin de carriÚre, elles rapporteraient à Charon tous leurs documents, leurs notes et leurs archives de la capitale, ainsi que leurs hommes et une grande partie de leur vivre selon le précédent instauré par Sylvain le Renard.
« Les Gautier en ont eu le droit, je me voie mal vous le refuserâŠ
â Bien. »
Et enfin, elles enfoncĂšrent un dernier clou dans son cercueil en lui crachant au visage quâelles savaient pour Patricia, quâelles savaient ce quâil avait osĂ© donner comme belle-mĂšre Ă leur neveu, tous les dangers auxquels il avait exposĂ© le Royaume en lâĂ©pousant, et que les Charon nâoublieraient pas cette insulte envers deux dâentre eux.
« Pourquoi ? Finit par demander ThĂšcle, essayant de comprendre. Pourquoi avoir exposĂ© le Royaume Ă de tels danger pour une seule femme indigne de succĂ©der Ă notre sĆur ?
â Je lâaimais⊠rĂ©pondit lâhomme dans un souffle sans Ă©nergie.
â Si vous lâavez traitĂ© comme HĂ©lĂ©na, pauvre femme, cracha LachĂ©sis. Et ce nâest guĂšre une raison suffisante pour faire planer un risque dâinvasion sur la tĂȘte de tous vos sujets. Notre sĆur rougirait de honte en voyant votre dĂ©chĂ©ance. »
Et quâest-ce quâil pouvait bien rĂ©pondre à ça ? Quâest-ce quâil pouvait bien rĂ©pondre dâautre ? Comment il pouvait se justifier ? Toutes ses dĂ©cisions lui semblaient faciles, bancales et inutiles maintenant quâon lui demandait des comptes sur chacune dâentre ellesâŠ
Devant son silence, les deux sĆurs lui jetĂšrent Ă nouveau un regard mauvais avant de se dĂ©tourner, partant en claquant la porte.
Lambert leva les yeux vers la chaise face Ă lui, mĂȘme sâil savait quâelle Ă©tait complĂštement vide, espĂ©rant trouver quelquâun, une Ăąme bienveillante, un peu dâaide comme il en avait toujours trouvĂ© Ă ses cĂŽtĂ©s.
Seul le Rodrigue de son cauchemar rĂ©pondit Ă sa supplique, le toisant de haut avant de lui grogner au visage, le lacĂ©rant de ses griffes, gravant ses mots dans sa peau avec ses crocs Ă chaque souffle, chaque morsureâŠ
« Il fallait y penser avant. »
Pour la premiĂšre fois de sa vie, Lambert se sentit terriblement seulâŠ
*
Rodrigue passa sa main sur sa fourrure, lâapprochant pour la premiĂšre fois depuis quâils sâĂ©taient retransformĂ©s quelques jours auparavant. Alix et lui sâĂ©taient reposĂ© et avaient recommencĂ© Ă prendre en main le duchĂ©, reconnaissant envers lâexcellent travail de LorĂ©a qui avait su le maintenir et rĂ©sister aux insistances de Rufus. Mais depuis cette nuit, il ne lâavait toujours pas touchĂ© Ă nouveau, contrairement Ă son frĂšre⊠ni mĂȘme se regarder dans un miroir sans col, son cou Ă prĂ©sent recouvert dâune grande marque sarcelle, lâentourant tout entier comme un collier⊠il nâavait pas trop de sĂ©quelle Ă part ses sens plus forts, surtout sa vue de nuit, son gout pour la viande encore plus prononcĂ©, et il Ă©tait encore plus dans la tĂȘte de son jumeau, plus souvent, mĂȘme sâils nâĂ©taient pas sĂ»r que câĂ©tait Ă cause de leur Ă©tat dâesprit actuel ou si ce serait permanent⊠pour ce qui Ă©tait positifâŠ
La fourrure Ă©tait douce sous ses doigts, Ă©paisse et moelleuse, comme pour accueillir un petit voulant faire sa sieste dans un endroit chaud oĂč il serait en sĂ©curité⊠bien plus rassurante que ce collier gravĂ© dans son cou, apparut un jour aprĂšs quâil ait retrouvĂ© sa forme humaine⊠en regardant au niveau de la gorge de sa fourrure, il arrivait Ă distinguer le mĂȘme motif que sur sa propre peauâŠ
« Tu peux attendre encore un peu si tu ne te sens pas prĂšs, lui assura Alix, comme toujours Ă ses cĂŽtĂ©s. Ăa nâa eu aucun effet sur moi mais, câest toi le magicien et la source de la transformation. Tu es restĂ© en loup bien plus longtemps que moi. On ne sait pas comment tu vas rĂ©agir avec ta magieâŠ
â âŠje ne prĂ©fĂšre pas⊠jâai peur de la fuir si je repousse trop⊠les semaines qui ont passĂ© sont dĂ©jĂ flous, je ne veux pas avoir lâimpression que lâavenir le sera aussi Ă cause de cette fourrure⊠au moins, on sait comment me ramener si je me transforme Ă nouveau en lâayant sur les Ă©paulesâŠ
â Dans tous les cas, on va mettre un moment avant de se remettre complĂštement de tout ça mais, si câest ce que tu veux, câest toi qui te sens.
Le pĂšre lui serra la main en rĂ©ponse, comme quand ils Ă©taient petits pour ne pas se sĂ©parer, cherchant de la force dans sa prĂ©sence avant de draper la fourrure noire sur ses Ă©paules. Elle nâĂ©tait pas trĂšs lourde malgrĂ© son ampleur, lâenveloppant complĂštement des pieds Ă la tĂȘte⊠malgrĂ© ses craintes, il y avait un cĂŽté⊠apaisant Ă ce poids, comme un bouclier qui le protĂ©geait⊠mais, rien ne se passait, rien dâĂ©trange, il restait bien humain⊠au moins, cela confirmait que cela ne ferait pas comme avec celle des selkies, il ne se transformerait pas dĂšs quâil mettait cette peauâŠ
â Il nây a rien⊠souffla-t-il de soulagement. Il nây a rienâŠ
â Câest dĂ©jĂ un bon dĂ©but, lui assura Alix.
Voulant en finir aussi avec cette crainte, Rodrigue fit craquer un Ă©clair dans sa main, faisant un exercice simple en le passant dâune paume Ă lâautre, avant de le faire disparaitre et de le remplacer par un sort de foi, le nosferatu brillant entre ses doigts avant quâil ne lâĂ©touffe. Rien non plus pour la magie de base⊠et il ne pourrait pas tester la magie de plus haut niveau aujourdâhui, Pierrick lui interdisait encore et son corps sortait dâune rude Ă©preuve, il ne devait pas le maltraiter encore plusâŠ
Ses Ă©paules retombant de soulagement, lâhomme sâautorisa un instant de rĂ©pit, se laissant tomber sur son lit avec la fourrure. Alix mit aussi la sienne sur ses Ă©paules, avant dâen mettre un pan sur celle de son frĂšre, ce dernier faisant exactement la mĂȘme chose avant de se laisser tomber Ă©paule contre Ă©paule cĂŽte Ă cĂŽte.
â Il ne sâest rien passé⊠la DĂ©esse soit louĂ©e⊠il ne sâest rien passĂ©âŠ
â Ouais, on va rester humains pendant un bon moment on dirait⊠tant quâon est tous les trois, on le resteraâŠ
â Oui⊠arriva Ă sourire une seconde lâainĂ© avant dâavouer, redevenant plus sombre. Je ne me souviens presque rien de ces derniĂšres semaines⊠juste de quand je tâai retrouvĂ©, quand on a retrouvĂ© FĂ©lix et mon envie de le revoir⊠de tous vous revoir⊠tous⊠souffla-t-il, le cadet comprenant que trop bien le « tous ». Le reste⊠impossible de le voir correctementâŠ
â âŠComme si câĂ©tait baignĂ© de brume⊠complĂ©ta Alix. Câest pas bien plus net de mon cĂŽté⊠aucune idĂ©e si câest une bonne ou une mauvaise chose⊠dâun cĂŽtĂ©, jâaimais courir partout avec toi mais, je nâai pas envie de me souvenir de tout ce que jâai dĂ©chirĂ© avec les dents⊠bon, baffer Rufus, câest pas mal comme souvenir mais, dâavoir le gout de son sang dans la bouche quand je lui dĂ©chiquetais le bras, moins ⊠ni de quand je tâentendais pleurer et chanter tous les soirs en suppliant car, tu Ă©tais seul et quâon voulait se revoirâŠ
â Ăa, câest difficile Ă oublier⊠surtout tout ce qui sâest passĂ© avant quâon se transforme⊠Rodrigue se recroquevilla dans sa fourrure, comme si elle le protĂ©gerait Ă nouveau de cet homme. Ă DĂ©esse et Lune⊠cela faisait si mal⊠je⊠câĂ©tait comme si cela les amusait tous de me dĂ©chiqueter le cĆur⊠je nâen pouvais plus⊠cette transformation⊠câĂ©tait plus une cachette et un Ă©chappatoire quâune vraie solution⊠juste pour ne plus souffrirâŠ
â Câest normal⊠tout depuis des mois⊠câĂ©tait juste un cauchemar Ă©veillĂ©, autant en tant quâhumain que loup⊠enfin, câest fini maintenant⊠on ne les reverra pas de sitĂŽt⊠je ne les laisserais plus te faire plus de mal, câest promis, lui jura Alix sans hĂ©siter.
â Moi aussi, je te protĂ©gerais⊠dâeux tous et de leurs ordres absurdes⊠autant toi que FĂ©lix⊠plus rien ne vous arrivera⊠pas tant que je serais lĂ âŠ
Ils restĂšrent encore quelques instants lâun contre lâautre, quand ils flairĂšrent lâodeur du louveteau, arrivant Ă grands pas, une bonne odeur de groseilles fraiches avec lui⊠câĂ©tait la saison aprĂšs tout et ils aimaient tous ces fruits dans la familleâŠ
« Papa ? Alix ? Vous ĂȘtes lĂ Â ? Demanda FĂ©lix en passant la tĂȘte dans la chambre de son pĂšre.
â Oui, entre FĂ©lix, » lâautorisa en souriant Rodrigue, toujours soulagĂ© de le voir, son instinct lui rĂ©pĂ©tant encore et encore de le garder auprĂšs de lui, lui rappelant Ă quel point il avait Ă©tĂ© proche de le perdre, encore plus renforcĂ© par la perte de Glenn si peu de temps auparavant⊠leur famille avait subi trop de chose en trop peu de tempsâŠ
« Il y a encore plein de groseilles dans la forĂȘt, mĂȘme si vous avez surement dĂ©jĂ devinĂ©, anticipa-t-il, avant de se refermer un peu en voyant les jumeaux dans leur fourrure. Tu lâas mise ?
â Oui⊠je devais le faire⊠pour savoir⊠et pour le moment, rien nâa changĂ© et cela nâa aucun effet sur moi, mĂȘme quand jâutilise de la magie faible, ne tâen fais pas, lui jura-t-il. Pour le moment, je la contrĂŽleâŠ
â Dâaccord⊠mais fait attention quand mĂȘme. »
Il les rejoignit et Rodrigue ne put sâempĂȘcher de le tirer sur ses genoux, voulant juste rester au plus prĂšs de son fils⊠mĂȘme sâil faisait tout pour ne pas devenir envahissant, il Ă©tait devenu trĂšs collant une fois redevenu humain, cherchant toujours une trace rĂ©cente du passage de ses proches, le simple fait de les savoir prĂšs de lui, quâil pourrait arriver rapidement pour les aider et les protĂ©ger⊠heureusement que ses sens Ă©taient devenus aussi aiguisĂ©s que ceux des loups, cela aidait dans ce genre de situation⊠pas plus tard que la semaine derniĂšre, il nâavait pas vu FĂ©lix de toute la matinĂ©e alors, le pĂšre sâĂ©tait mis Ă paniquer en lâappelant de toutes ses forces et Ă retourner toute la piĂšce oĂč il Ă©tait afin de trouver une trace de son petit⊠heureusement que LorĂ©a avait pu vite lui remettre les idĂ©es en place, Rodrigue priant pour que FĂ©lix nâait pas vent de ce qui sâĂ©tait passé⊠il avait trop peur que son petit culpabilise comme quand il lâavait retrouvé⊠mais FĂ©lix avait senti que quelque chose nâallait pas et avait fait si attention au moindre de ses faits et gestes que Rodrigue lui avait avoué⊠tout le monde portait des pommes de senteurs avec un parfum spĂ©cifique Ă prĂ©sent, histoire que lâodeur soit plus prĂ©sente et que les jumeaux ne fassent pas une autre crise⊠câĂ©tait presque une obsession Ă ce stade, encore plus que pour Alix⊠dâaprĂšs Pierrick, câĂ©tait Ă cause de la sĂ©paration trop violente avec sa famille, surtout aussi peu de temps aprĂšs la mort de Glenn⊠il les avait dĂ©jĂ perdu une fois alors, son esprit refusait et craignait plus que tout que cela recommenceâŠ
« LĂ aussi, seul le temps vous permettra Ă tous les deux de guĂ©rirâŠÂ »
Rodrigue priait pour que le mĂ©decin dise vrai⊠au moins, les pommes de senteur les avait un peu aidĂ©s, câĂ©tait un dĂ©butâŠ
Pour oublier son angoisse et plus profiter de la prĂ©sence de son fils, le pĂšre croqua dans une des baies fraichement cueillies et passĂ© Ă lâeau du lac, souriant en retrouvant le gout acide quâils aimaient tous.
« Elles sont trÚs bonnes, merci beaucoup Félix.
â Avec tout ça, on avait manquĂ© le dĂ©but des fruits rouges ! On a du retard Ă rattraper ! En plus, depuis quâon envoie plus rien Ă Fhridiad, Ă©trangement, on a des rations plus grosses pour manger, qui lâeut cru ? Se moqua un peu Alix.
â Tout le monde, et tout le monde mange mieux maintenant, câest mieux, rĂ©pliqua FĂ©lix en avalant une baie. On est allĂ© en chercher avec Cassandra avant quâelle nâaille aider la patrouille aĂ©rienneâŠ
Cependant, malgrĂ© tout, Rodrigue ne pouvait que voir lâair sombre sur le visage de son fils, un peu ailleurs.
â Il y a quelque chose qui ne va pas FĂ©lix ? Lui demanda-t-il alors, sachant que le laisser tout seul avec des pensĂ©es sombres nâapporterait rien de bon.
â Câest rien⊠câest juste que⊠dâhabitude⊠il fit une pause, cherchant ses mots avant de dire, ces mots si simples qui Ă©taient aussi les plus difficiles. Câest avec GlennâŠ
Les jumeaux ne comprirent que trop bien, entendant presque lâainĂ© des deux louveteaux dire Ă quel point son petit frĂšre Ă©tait adorable de leur apporter des baies, juste pour le voir sâĂ©nerver Ă cause des taquineries, puis de le remercier en apprĂ©ciant les fruits avec eux, mĂȘme tous les jours⊠encore plus une fois revenu alors que du cĂŽtĂ© de Fraldarius, les choses commençaient Ă se tasser aprĂšs la TragĂ©die, les gens Ă©taient surtout remontĂ© contre les derniĂšres exactions de la capitale et tournaient toute leur rage contre la famille royale rendu responsable de tous les deuils, et mĂȘme sâils Ă©taient dans une situation pĂ©rilleuse de quasi rĂ©volte contre le pouvoir royal, les choses allaient mieux en interne. La disette sâĂ©loignait de plus en plus de leurs foyers mais, les fantĂŽmes demeuraient, plus prĂ©sent que jamais aprĂšs le choc et les semaines mouvementĂ©s pour survivre⊠il devait encore plus hantĂ© FĂ©lix⊠câĂ©tait la premiĂšre fois quâil vivait le deuil de quelquâun dâaussi proche de lui⊠il Ă©tait trop petit pour celui de FĂ©licia⊠il lâĂ©tait encore⊠la mort arrivait toujours trop tĂŽtâŠ
Rodrigue posa alors sa main dans son dos, protecteur, alors quâil murmurait.
â Oui⊠il devrait y avoir GlennâŠ
â Câest pas juste⊠il devrait ĂȘtre là ⊠pourquoi câest sa chambre Ă lui qui est vide ?
â Câest toujours injuste, encore plus dans une situation comme celle-ci, souffla-t-il en lui frottant le dos, sentant que ses larmes nâĂ©taient pas loin. Câest toujours dur et ça fait mal⊠il nây a que le temps et le soutien qui peuvent guĂ©rir ce genre de plaie, mĂȘme si elle reste toujoursâŠ
â Combien de temps ?
â Cela dĂ©pends des gens⊠et tu nâas pas besoin de ne plus avoir mal tout de suite⊠il faut que tu prennes le temps quâil te faut pour guĂ©rir⊠pour ne pas ĂȘtre obsĂ©dĂ© par la mort de la personne, et arriver Ă se raccrocher aux bons souvenirsâŠ
â Mais ça fait mal⊠je veux Glenn⊠je veux quâil revienne⊠mais je ne veux pas avoir mal⊠marmonna FĂ©lix en se serrant un peu plus contre son pĂšre, se cachant dans son Ă©treinte, comme si la tristesse et le deuil ne le trouveraient pas Ă lâintĂ©rieur.
â Mais si tu bouches tes Ă©motions ou fait tout pour ne pas ĂȘtre triste, ça va exploser un jour ou lâautre, ajouta Alix en passant sa main sur la tĂȘte de son neveu. On a mis un an avant dâaccepter que notre pĂšre ne reviendrait pas, ça pourrait prendre plus de temps, et câest pas grave. Le tout, câest que tu ne te noies pas tout seul dedans, et que tu ne tâisoles pas sinon, ça va te dĂ©vorer aussi. Le tout, câest que ton deuil ne te tire pas vers le bas et que tu arrives Ă aller mieux.
â Le principal, câest de ne pas rester seul avec sa propre souffrance et sa tristesse, câest le meilleur moyen pour sombrer. Tant que nous restons tous ensemble, nous arriverons Ă surmonter cette Ă©preuve⊠quâen penses-tu louveteau ?
â Dâaccord⊠moi aussi, je resterais avec toi papa⊠et avec toi aussi Alix⊠leur jura FĂ©lix, restant encore dans lâĂ©treinte rassurante. « La meute est forte ensemble »⊠câest ce que disait GlennâŠ
â Il avait bien raison, » sourit un peu Rodrigue malgrĂ© la tristesse, essayant de sâaccrocher aux souvenirs de son fils ainĂ© souriant alors quâils Ă©taient en famille.
Ils passĂšrent un peu de temps ensemble, les jumeaux nâayant pas encore retrouver assez de force pour travailler toute la journĂ©e, mĂȘme sâils avaient repris. Ils ne pouvaient pas laisser tout le travail de gestion du duchĂ© uniquement Ă LorĂ©a, ils devaient le reprendre en main mais, Pierrick les mettait en garde contre le risque de rechute. Mieux valait Ă©viter de trop forcer pour le moment.
FĂ©lix continuait de leur montrer les leçons quâil avait pu faire pendant ces derniĂšres semaines. Rodrigue sourit en voyant tout le travail de son fils, fier de voir quâil sâĂ©tait accrochĂ© malgrĂ© tout pour continuer Ă ĂȘtre assidu dans ses Ă©tudes. Tout ceci lui serait trĂšs utile quand il serait grandâŠ
Ils entendirent tous un grondement sortir de sa poitrine.
Sur le coup, lâhomme ne comprit pas trop, commençant Ă sâinquiĂ©ter de ce que cela voulait dire quâil pouvait faire ce bruit et comment il avait pu le faire physiquement, jusquâĂ ce quâaprĂšs avoir Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© comme eux, son louveteau se mette Ă sourire en dĂ©clarant.
« Tu ronronnes comme un chat !
Il sourit alors, passant sa main sur la tĂȘte de son petit en soufflant, moins anxieux que tout Ă lâheure Ă cause de ce grondement.
â Câest parce que je suis trĂšs fier de toiâŠÂ »
*
Quand les cĂŽtes de Kleiman sortirent de lâhorizon, Ivy regarda tout autour dâelle, tentant dâĂ©valuer encore une fois les forces en prĂ©sence. Il y avait son navire autant fait pour le commerce que pour les combats maritimes, mais aussi tout un tas dâembarcations diverses et variĂ©es, autant de pĂȘche en haute mer que de cabotage, de grands commerces ou fluviales qui avaient osĂ© les suivre sur des eaux bien plus houleuses. Tout le monde savait que Kleiman Ă©tait dangereux, câĂ©tait Ă©vident, et plus personne ne pouvait entrer dans sa ville sans que plusieurs marins ne disparaissent alors, entre ça, la colĂšre gĂ©nĂ©rale contre lâinaction du pouvoir royal, et les talents dâorateur dâOswald, les marins de toute la cĂŽte nord-ouest de Faerghus les avaient rejoints. Plusieurs langskips srengs glissaient Ă toutes vitesses devant eux, ayant mĂȘme eu le temps de se rendre en Duscur pour rendre les tĂȘtes des morts Ă leurs frĂšres afin quâils puissent avoir les hommages funĂ©raires, mais aussi les informer de lâobjectif de cet escadron de marine hĂ©tĂ©roclite, autant pour avoir des renforts que pour Ă©viter quâils ne croient Ă une autre invasion. Bon, officiellement, les duscuriens nâavaient rien rĂ©pondu pour ne pas encore plus compliquĂ© leurs relations avec Faerghus mais, plusieurs navires de grandes guildes commerçantes avaient pris la mer avec des cargaisons diverses pour les rejoindre, avec la complaisance discrĂšte dâun chef local.
MĂȘme aprĂšs une vie entiĂšre Ă parcourir toutes les mers, Ivy avait rarement vu une compagnie aussi hĂ©tĂ©rogĂšne, une bonne partie parlant mal la langue des autres mais, le langage des ports permettait de se comprendre entre eux afin de manĆuvrer efficacement tous ensemble.
Tout ce monde acceptait de coopĂ©rer dans un seul but : arrĂȘter Kleiman et sa soif de sang, autant duscurien que des simples passants dans sa ville.
« Qui aurait pu croire que tout ceci pourrait arriver et quâon serait entrainĂ© dans une histoire pareille⊠marmonna Ivy.
â Recommencer est un meilleur mot quâarriverâŠ
Elle regarda Oswald, son regard sombre braquĂ© vers la cĂŽte. Il Ă©tait en habit simple dâarcher, bien protĂ©ger par son armure, son carquois rempli de flĂšche, comme un soldat ordinaire, Ă lâexception de la capuche tout autour de sa tĂȘte pour Ă©viter quâon le reconnaisse. Elle ne lâavait jamais vu aussi renfermĂ© sur lui-mĂȘme, mĂȘme si ses yeux restaient dĂ©terminĂ©s.
â Les cinq messagers ne sont pas revenus. Ils auraient dĂ» revenir depuis au moins trois jours alors quâon demandait juste Ă Kleiman de sïżœïżœïżœexpliquer sur la disparition de vingt-sept personnes. Ma main au feu, nous retrouverons leur tĂȘte sur une pique au-dessus des portes du port⊠ou alors, il va nous les renvoyer couper en morceaux⊠câĂ©tait dans les « bonnes » habitudes de Clovis⊠jâespĂ©rais que tout ceci se serait terminĂ© une fois que Clovis a Ă©tĂ© dĂ©capitĂ© et envoyĂ© dans le caveau des criminels⊠Justine aussi disait que câĂ©tait terminé⊠quâon aurait pu se dire que nos enfants ne vivraient jamais des choses pareilles, mais tout recommence encore⊠il serra le poing sur son carquois. Ludovic doit se retourner dans sa tombe en voyant la dĂ©chĂ©ance de son sang.
Ivy hocha la tĂȘte, comprenant le tourment qui lâhabitait. Oswald avait surement vu plus de choses dans sa vie que bien des gens avec qui il avait grandi, leur avait mĂȘme survĂ©cu pour la plupart, et il avait survĂ©cu au rĂšgne de Clovis sans que lâAlliance ne soit envahi avec Justine von Daphnel. Il aurait surement prĂ©fĂ©rĂ© finir sa longue vie sans devoir affronter tout ça.
â On a ça maintenant alors, mieux vaut le rĂ©gler maintenant avant que ça nâempire et tant quâon le peut encore. En plus, les espions srengs ne se sont pas fait repĂ©rer depuis quâils sont infiltrĂ©s et ils ont pu saboter les chaines qui protĂšgent lâentrĂ©e du port. On est aussi arrivĂ© Ă avoir une bonne idĂ©e dâĂ quoi ressemble lâintĂ©rieur des murailles avec les corbeaux des srengs, et comme vous lâavez dit, on voit dâici que Kleiman est un seigneur mineur avec juste une grosse maison qui nâest pas construite comme une forteresse, ça devrait nous simplifier la tĂąche, mĂȘme si on doit faire attention Ă ce quâil nous rĂ©serve.
Oswald hocha la tĂȘte, arrivant Ă fendre un lĂ©ger sourire.
â Vous avez raison. Si les messagers ne reviennent pas, raison de plus pour se dĂ©pĂȘcher avant que les espions nây passent aussi. Nous devons arrĂȘter tout ceci, au moins en coupant la tĂȘte du pire, et je fais confiance aux faerghiens pour finir dâarracher les racines du mal. Pour le moment, concentrons-nous sur la bataille qui nous attend. Merci capitaine.
â Câest normal.
â Eh ! Les leicesters !
Oswald baissa la tĂȘte vers le navire duscurien juste en-dessous de lui, la capitaine leur hurlant que câĂ©tait lâheure. Ivy rĂ©pondit quâils Ă©taient prĂȘts.
Les navires se mirent alors en ordre de bataille comme ils pouvaient malgrĂ© leurs diffĂ©rences de structures et dâexpĂ©rience, celui dâIvy et des quelques corsaires expĂ©rimentĂ©s menant les autres afin de les protĂ©ger, leur coque Ă©tant faite pour rĂ©sister Ă des assauts. Entre eux, les navires srengs avaient rangĂ© leurs voiles afin dâĂȘtre plus discrets, se cachant pour que les dĂ©fenseurs ne les voient pas foncer vers les chaines sabotĂ©es. DerriĂšre, en seconde ligne, les navires plus fragiles se tenaient prĂȘts. DotĂ©s de rames, ils seraient chargĂ©s de tous les emmener dans le port, plus rapide et maniable que les grosses caravelles Ă voiles. Leur objectif Ă©tait au moins dâatteindre le port, puis sâenfoncer en ville jusquâĂ la maison seigneuriale. Une fois lĂ -bas, il faudrait capturer Kleiman et ses hommes de confiances au plus vite et le mettre aux arrĂȘts avant quâils ne puissent sâenfuir.
Ils devaient ĂȘtre rapide, prĂ©cis et tout faire pour Ă©viter de trop grosses pertes Ă cause de leurs forces limitĂ©es et trĂšs diverses. Il nâaurait droit quâĂ un seul essai sinon, la corde tendue qui les tenait tous ensemble cĂšderait et ils se disperseraient surement sur le champâŠ
« Comme quand on a une proie qui ne nous a pas repĂ©rĂ©s dans notre ligne de mireâŠÂ »
Oswald empoigna plus fermement son arc, faisant une priĂšre aux Braves et Ă sa bonne amie Justine. Il ne louperait pas sa cible.
Les navires sâĂ©taient approchĂ©s Ă portĂ©e de voix quand un homme leur hurla depuis le haut des remparts.
« Halte-là navires ! Que faites-vous ici !
â Nous sommes de la corporation des marchands de Faerghus et des navigateurs venus dâautres horizons ! SâĂ©cria la capitaine qui avait Ă©tĂ© Ă©lue pour les reprĂ©senter, une pure faerghienne, afin de mettre les gardes plus en confiance que si câĂ©tait des Ă©trangers qui arrivaient en masse sans aucun reprĂ©sentant faerghien. Nous avons envoyĂ© cinq messagers auprĂšs de votre seigneur afin de lui demander pourquoi des matelots et des civils disparaissaient aussi souvent dans ce port ! Etant donnĂ© quâils ne sont pas revenus depuis trois jours, nous sommes venus en masse lui demander de rĂ©pondre Ă nos questions et de faire en sorte que ces disparitions cessent !
â Et notre seigneur les a envoyĂ©s paitre ! Nous nâavons Ă rĂ©pondre que devant son seigneur Mateus et le roi !
â Mais un seigneur, aussi petit soit-il, se doit aussi dâassurer la sĂ©curitĂ© sur ses terres ! Sâil ne remplit pas ce devoir, nous pouvons venir directement lui demander des comptes ! En vertu de ce droit, nous voulons lui parler tous autant que nous sommes ! Et sâil les a repoussĂ©s, oĂč sont passĂ©es ces cinq personnes ?!
â Ce nâest pas notre problĂšme ! Foutez le camp maintenant ! Ou nous emploieront la force contre vous ! Que vous soyez faerghiens, leicesters, ou des meurtriers de duscuriens ! Nous sommes dĂ©jĂ trĂšs clĂ©ments de ne pas avoir incendiĂ© les navires qui transportent les assassins de nos frĂšres !
Il eut quelques minutes de concertations entre les bateaux, autant pour vĂ©rifier que tous Ă©taient prĂȘt discrĂštement, que pour Ă©viter que les dĂ©fenseurs se mĂ©fient, ainsi que pour donner un peu plus de temps aux espions Ă lâintĂ©rieur de finir leur travail. La femme finit par hurler, en cĆur avec tous les autres navires qui hurlĂšrent dans leur langue respective.
â Nous refusons !!! Nous rentrerons !!! Et nous libĂ©rerons nos camarades !!!
â Vous choisissez donc de finir par le fond ! ArbalĂ©triers ! En position !
â Navigateurs du Midgard ! Cria Oswald en sreng. Ă vous !
â On a vu ! Que Thor combatte Ă nos cĂŽtĂ©s ! RAMEZ !!!
Tous les capitaines srengs abattirent le dos de leurs armes sur le tambour des rameurs, donnant le signal de départ.
Les navires cachĂ©s filĂšrent tout de suite vers les portes, glissant Ă toutes vitesses sur les eaux vers les dessous de la porte, sâattaquant tout de suite Ă la chaine qui le fermait. Normalement, des assommoirs Ă©taient placĂ©s juste au-dessus des chaines pour contrer ce genre dâattaque sans devoir passer la tĂȘte au-dessus des crĂ©neaux maisâŠ
â Les assommoirs ont Ă©tĂ© bouchĂ©s ! On a Ă©tĂ© sabotĂ©Â !
« Les espions srengs nâont pas volĂ© leur rĂ©putation dâĂȘtre plus redoutables Ă dix quâune armĂ©e de dix mille soldats ! »
Un Ă©norme trait passa tout prĂšs dâeux, endommageant le bastingage. Le prochain tir atteindrait leur coque, câĂ©tait sĂ»r ! Oswald repĂ©ra aussi vite quâil put la meurtriĂšre oĂč devait ĂȘtre cachĂ© une arbalĂšte de tour, prĂȘte Ă enfoncer leur pont. Il leva tout de suite son arc, se concentra sur la trajectoire quâavait empruntĂ© le trait, et tira sans hĂ©siter. La flĂšche arriva Ă passer la meurtriĂšre et Ă©tant donnĂ© quâaucun carreau dâarbalĂšte ne suivit le premier, il avait dĂ» toucher le responsable de lâarme. Kleiman Ă©tait officiellement un seigneur sans beaucoup de ressource, il ne devait pas avoir les moyens dâavoir plusieurs engins de guerre aussi puissant et couteux quâune arbalĂšte de tour, ni beaucoup dâhomme aptes Ă la manier. Les assaillants devraient ĂȘtre tranquilles un moment avant que les dĂ©fenseurs nâarrivent Ă trouver quelquâun dâautre pour la rĂ©armer et lâutiliser.
Au bout de quelques minutes, le cri rauque dâun cor se fit entendre.
â Le signal ! Aux navires Ă rames ! SâĂ©poumonna Ivy en quittant son poste en rassemblant ses hommes, Noce rĂ©pĂ©tant ses ordres en volant de partout.
Oswald obĂ©it, sautant lui-mĂȘme dans le premier navire qui arriva avec la capitaine. Une fois la chaloupe pleine, les marins se mirent tous sur les rames, ramant au rythme du tambour pour sâharmoniser entre eux. Les minutes sans pouvoir rien faire dâautres quâattendre paraissaient interminables, Ă la fois dans lâattente dâarriver et prĂȘt Ă contre-attaquer dĂšs quâun ennemi Ă©tait Ă portĂ©e de flĂšche.
Une fois les portes et les chaines passĂ©es, lâarcher put mieux voir lâaspect de la ville. Effectivement, petite ville sans trop de moyens et avec des voisins pas trop agressifs⊠il nây avait mĂȘme pas de quais pour dĂ©barquer, seulement une jetĂ©e oĂč sâĂ©chouaient les bateaux de pĂȘche mais, ça les arrangeait.
Les marins attendirent à peine que la coque des chaloupes soient à terre, sautant sans hésiter au sol pour continuer à avancer vers la maison seigneuriale.
« Navires srengs ! Navires duscuriens ! Occupez-vous de tenir les rues ! » Leur rappela Oswald avant de descendre à terre. Les habitants sortiraient moins pour se défendre en voyant des ennemis occuper le terrain, ce qui éviteraient des heurts avec la population de la cité.
Suivant Ivy quâil couvrait avec ses flĂšches et remerciant son emblĂšme de lâempĂȘcher dâĂȘtre trop fatiguĂ© malgrĂ© ses os qui vieillissaient, Oswald et les autres fodlans sâĂ©lancĂšrent dans la rue principale avant dâentrer dans la maison seigneuriale, peu empĂȘcher par la garde dĂ©jĂ occupĂ©e sur le port, et la quelque vingtaine dâhommes restant nâĂ©tait guĂšre suffisante pour arrĂȘter une grosse centaine de marins dĂ©terminĂ©s.
Une odeur de cadavre et de corruption piqua les narines des assaillants dĂšs quâils rentrĂšrent dans la cour.
« Cette odeur⊠Attention ! Les mages noirs sont ici ! Restez sur vos gardes ! Rappela le grand-duc alors que son emblÚme se calmait une seconde, ayant déjà prévenu tous les navires que Kleiman pourrait utiliser une magie interdite.
â Oswald ! LĂ -haut !
Lâarcher regarda dans la direction quâIvy lui disait, rĂ©agit au quart de tour quand il vit un Ă©clat de magie noire se former et dĂ©cocha une flĂšche dessus, la faisant exploser au-dessus dâeux avant que le sort ne touche qui que ce soit. Dans le mĂȘme temps, Ivy passa sur le cĂŽtĂ© de lâarcher, embrochant un ennemi fonçant sur lui sur le fil de son Ă©pĂ©e, surveillant derriĂšre son Ă©paule pendant quâOswald surveillait le ciel en ordonnant.
â Par ici ! Vite ! Ils sont surement Ă lâintĂ©rieur !
AprĂšs avoir enfoncĂ© la porte, les marins entrĂšrent en trombe dans la grande salle oĂč ils trouvĂšrent Kleiman, entourĂ© de ses conseillers et de plusieurs mages Ă©tranges, avec des motifs qui disaient quelque chose Ă OswaldâŠ
« Les mages noirs de lâĂ©poque de la guerre du Lion et de lâAigle ! Ils portaient ses motifs-lĂ Â ! MĂ©fiez-vous des gens en noir ! Câest les plus dangereux ! »
Comme pour souligner ce quâil venait de dire, une magicienne commença Ă charger un sort et le lança en vitesse, balayant un marin en un instant, puis un autre qui tentait de lâattaquer par derriĂšre. Le sort ne toucha quâeux mais, il ne laissa que des sortes de momie complĂštement dessĂ©chĂ©es, comme vidĂ©es dâeau, de sang et dâĂ©nergie vitale, tombant au sol dans un fracas dâos morbide, provoquant la panique et la fuite dâune partie dâentre eux pour Ă©viter dâĂȘtre le suivant.
Ivy tira Oswald derriĂšre un escalier pour se protĂ©ger des sorts, lâaidant alors que la fatigue retenue par lâemblĂšme commençait Ă lâengourdir et brĂ»ler ses muscles vieillissants⊠CâĂ©tait pas vrai ! Pile au pire moment ! Sans lâInfaillible pour continuer Ă le stimuler mĂȘme pendant un temps calme de la bataille, il disparaissait de plus en plus vite ! Il ne devait pas lĂącher maintenant ! La magicienne noire sâapprocha comme si elle ne craignait pas de se prendre une flĂšche ou un projectile, observant tout autour dâelle avec un petit sourire vicieux, les provoquant sans vergogne. Elle empestait la magie noireâŠ
« Les insectes tentent de se dĂ©battre Ă ce que je voie⊠susurra-t-elle avant dâajouter en regardant dans leur direction. Enfin, on a aussi un insecte plutĂŽt rare⊠ça fait longtemps que je nâavais pas eu lâoccasion dâattraper un emblĂšme majeur⊠allons petit emblĂšme majeur⊠montre toiâŠÂ »
« Merde ! Câest quoi cette femme ?! Enragea Ă mi-mot Ivy. Votre emblĂšme a disparu avant quâon entre ! Et elle a fait quoi Ă ces gars ?! Câest ça les effets de la magie noire ?!
â Elle porte les mĂȘmes motifs que ceux du bataillon puant⊠haleta Oswald. Et câest bien elle qui sent la magie noireâŠ
â Ah ça pour puer, elle pue⊠elle comme tous les autres qui ont ce motif dâĆilâŠÂ »
« Allons⊠lequel dâentre vous est lâemblĂšme majeur ? HonnĂȘtement, il mâintĂ©resse plus que vous tous rĂ©unis alors, on peut faire deux choses. Soit, je vous attrape un par un et je vous transforme tous comme les deux insectes qui tombent en poussiĂšre sur le plancher pour faire le tri, lâemblĂšme majeur rĂ©sistera mieux Ă mes sorts, soit vous me livrez et je vous laisse tous partir en vie.
Un silence retentissant tomba dans la piĂšce, juste occupĂ©e par Kleiman et ses hommes en train de se dĂ©battre contre la porte de la trappe qui devait leur servir Ă sâenfuir, bloquĂ©e par une hache qui avait volĂ© quand les assaillants Ă©taient entrĂ©s. Ivy et Oswald Ă©changĂšrent un regard lourd alors que la femme continua, sâĂ©changeant la mĂȘme question ainsi que la mĂȘme rĂ©ponse.
â Cela me semble un marchĂ© correct. De toute façon, de misĂ©rables insectes tel que vous ne pourrez jamais battre un ĂȘtre qui vous est aussi supĂ©rieur tel que moi, vous venez de le voir par vous-mĂȘmes alors, saisissez donc votre chance de survivre et de continuer votre pitoyable existence. Il suffit juste de me donner lâemblĂšme majeur. Vous avez la parole de Bias, la Meneuse ĂruditeâŠ
Elle fut exaucĂ©e quand Ivy poussa aussi violemment quâelle put Oswald hors de leur cachette, le plus loin possible dâelle. Le vieil homme se recroquevilla sur lui-mĂȘme, la face tournĂ©e vers le sol, sa capuche dĂ©faite laissant voir ses cheveux gris et sa fatigue rendant le moindre de ses mouvements tremblants et incertains, se tenant la poitrine comme si son cĆur Ă©tait sur le point de lĂącher Ă cause de toutes ses Ă©motions.
La femme eut un sourire carnassier, sâapprochant du vieillard en dĂ©clarant.
â Ăvidemment, vous prĂ©fĂ©rez vivre, câest bien. Vous avez un minimum dâinstinct de survie mais bon, câest la base pour les bĂȘtes. Et dommage, lâemblĂšme majeur est dĂ©crĂ©pit et ancien, il ne va plus survivre longtemps et nâa sans doute plus la force de sa jeunesse⊠les bĂȘtes de votre genre vieillisse si vite⊠marmonna-t-elle en se baissant vers lui. Enfin, câest devenu si rare les majeurs Ă prĂ©sent, on fera avec⊠vient doncâŠ
Avant quâelle nâait pu finir sa phrase, Oswald se retourna dâun coup et lui envoya le pot minuscule autour de son cou en plein visage, libĂ©rant toute la poudre urticante quâelle contenait, puis lâhomme enfonça la pointe dâune de ses flĂšches en plein dans lâĆil, lui transperçant surement le crĂąne. Bias siffla de douleur en se redressant mais, avant quâelle nâait pu sâen dĂ©barrasser ou attaquer Ă nouveau, une Ă©pĂ©e lui traversa tout le dos pour ressortir de sa poitrine.
â Pour un ĂȘtre supĂ©rieur, tâes aussi fragile que les « insectes » quâon est, marmonna Ivy.
Elle serra le manche de son Ă©pĂ©e puis, la ressortit dâun coup du corps de la magicienne, laissa un sang rouge trĂšs sombre, presque noir sâĂ©couler sur le sol alors que Bias sâeffondrait, morte comme tout le monde le serait aprĂšs une blessure pareille. Les autres mages avec les mĂȘmes motifs quâelles se mirent tous Ă paniquer, laissant le temps aux autres assaillants de les maitriser avec Kleiman et le reste de ses sbires.
Reprenant son souffle, Ivy sâapprocha Oswald en lui demandant.
« Tout va bien ?
â Oui, ça va, mĂȘme si ce genre de cabriole nâest plus de mon Ăąge, rĂ©pondit-il en cherchant un peu son Ă©quilibre Ă cause de la fatigue.
â Bah, pour un gars de quatre-vingts balais, vous vous en sortez plutĂŽt bien, lui assura-t-elle en lâaidant Ă se rester debout avant dâavouer, mĂȘme si jâai eu peur que vous ne vous repreniez pas assez vite.
â Jâai encore quelques ressources on dirait⊠il eut un sourire en voyant Kleiman ligotĂ© avec ses sous-fifres, alignĂ©s le long du mur et dĂ©sarmĂ©s. Au moins, nous les avons attrapé⊠Jâai bien fait de vous faire confiance. »
*
Une fois Kleiman capturĂ©, la plupart des gardes sâĂ©taient rendus sans trop de difficultĂ©s, Ă©puisĂ©s par les derniers Ă©vĂšnements, mĂȘme si une partie sâĂ©tait battue jusquâau bout en visant particuliĂšrement les duscuriens ou toutes personnes avec une peau un peu sombre, soit Ă peu prĂšs nâimporte qui qui passait son temps dehors. Ceux-lĂ avaient refusĂ© de se rendre et avaient prĂ©fĂ©rĂ© se faire tuer plutĂŽt que capturer. Bon, au moins, câĂ©tait dĂ©jĂ un problĂšme de rĂ©gler pour le coup, aussi sordide la conclusion pouvait lâĂȘtre. Leur patron Ă©tait tout aussi loquace quâeux, refusant de dire quoi que ce soit quand Oswald, Ivy et tous les autres le pressĂšrent de question, se murant dans le silence. On le menacerait de lui arracher la langue quâil ne parlerait pas, mĂȘme au sujet de cette Bias.
Et enfin, il restait le groupe de mages Ă©tranges avec ce motif dâĆil sur eux, rendus inoffensif grĂące Ă des menottes duscuriennes bloquant leur magie. Au dĂ©but, Ivy crut quâil faisait partie dâun peuple vivant Ă Morfis Ă cause de leur peau extrĂȘmement pale, pratiquement cadavĂ©rique, combinĂ©e Ă leur couleur dâyeux et de cheveux trĂšs rares mais, ils ne parlaient pas la mĂȘme langue quâeux. Enfin, ils semblaient comprendre le fodlan mais, pas moyen de les faire parler eux aussi.
« RrrrhhhaaaaâŠÂ ! Pas moyen de les faire passer Ă table ! Enragea Ivy aprĂšs une nouvelle tentative de les interroger. Soit ils restent muets comme des carpes, soit ils nous insultent en nous traitant dâinsecte !
â Câest vrai quâils nâont pas lâair de vouloir parler mais, restons patient, une partie semble plus se taire par peur que par dĂ©fi. Ils sont tout maigre et dĂšs quâon les approche ou Ă©lĂšve un peu la voix, ils se recroquevillent sur eux-mĂȘmes quand on arrive comme des personnes battues, fit remarquer Oswald. Les deux qui nous insultent constamment semblent ĂȘtre les sous-chefs aprĂšs cette Bias et encadrer les autres. Tant quâils seront lĂ , ils ne diront rien.
â Hum⊠alors, autant les sĂ©parer et tous les sĂ©parer, au moins les chefs de file. Les langues devraient se dĂ©lier un peu sans eux.
â Oui, et il faut Ă©galement bien les traiter, cela les mettra en confiance pour quâils nous expliquent ce qui se passe ici et nous ouvrent les portes qui nous rĂ©sistent encore⊠avec ce genre de personne, un bon repas et de lâattention est le meilleur moyen de les faire parlerâŠÂ »
Sans hĂ©siter, ils isolĂšrent les chefs de file, puis firent attendre un peu les autres en leur donnant un repas maigre pour le midi. Ce temps seuls avec eux-mĂȘmes et sans nouvelle les angoisseraient sans doute, ils se demanderaient ce qui allait arriver Ă leurs chefs dâun cĂŽtĂ© et Ă eux de lâautre, ce qui rendraient tout geste bienveillant Ă leur Ă©gard plus fort.
Le soir, Oswald leur fit apporter une miche de pain chacun, un grand bol de soupe et une pomme, tout en prĂ©cisant Ă ceux qui leur donnerait dâĂȘtre agrĂ©ables avec eux. Le petit groupe de sept personnes se tenaient recroquevillĂ©s dans un coin, Ă©vitant la lumiĂšre du soleil couchant, fuyant mĂȘme la lumiĂšre de la bougie en mettant leurs mains sur leurs yeux. AprĂšs tout ce quâil avait vu ces derniĂšres semaines, Oswald devait avouer quâil serait presque prĂȘt Ă croire quâils Ă©taient comme les vampires des lĂ©gendes craignant la lumiĂšre mais, sâil se fiait Ă leur rĂ©action quand ils avaient Ă©tĂ© emmenĂ©s ici, câĂ©tait plus quâils Ă©taient trĂšs sensibles Ă la lumiĂšre, comme des crĂ©atures des cavernes.
« Veuillez mâexcuser, je ne voulais pas vous faire mal, sâexcusa-t-il en soufflant sa chandelle, la remplaçant par une petite boule lumineuse plus tamisĂ©e. Cela vous convient mieux ?
â ⊠oui⊠câest pour nous ? Demanda un homme en montrant les plateaux avec mĂ©fiance.
â Oui, câest votre repas pour ce soir. Vous pouvez manger Ă votre saoul, leur assura-t-il, ne vous gĂȘner pas.
â De la nourriture dâinfĂ©rieur, marmonna une femme, le nez retroussĂ© de dĂ©gout.
â Câest ça ou vous sautez Ă la corde alors, fait pas la fine bouche, grogna Ivy, son poignard et son Ă©pĂ©e Ă sa hanche afin de dissuader le moindre soupçon dâattaque sur Oswald.
â Une bĂȘte qui nâa mĂȘme pas dâemblĂšme nâest quâun insecte, rĂ©torqua-t-elle avec bravache.
Cependant, Ă part ses deux-lĂ , les autres prirent leur propre assiette, tremblant un peu dâapprĂ©hension avant de gouter leur soupe. Une dâentre elle eut lâair Ă©tonnĂ©, regardant son simple bol de brouet comme si elle tenait le plus grand festin de tout Fodlan entre ses mains, avant dâen reprendre une cuillĂšre sans hĂ©siter.
â Vous apprĂ©ciez on dirait, lui sourit Oswald, affable. Câest encore meilleur si vous mettez du pain avec.
Elle le regarda avec des yeux ronds, se recroquevillant Ă nouveau quand il lui adressa la parole mais, elle lâĂ©couta, plongeant sa miche dans sa soupe avant de le croquer, ayant Ă son tour un grand sourire en disant quelque chose dans sa langue qui devait se traduire par « câest bon », avant de dĂ©clarer en fodlan.
â Câest bon.
Elle se fit cependant tout de suite reprendre par la femme qui avait traitĂ© Ivy dâinsecte, la rĂ©primandant sĂ©vĂšrement Ă son ton mais, lâhomme Ă cĂŽtĂ© de celle qui apprĂ©ciait son repas dĂ» la dĂ©fendre car, lâorgueilleuse se tut et se rĂ©signa Ă manger son propre repas en ronchonnant. Ils parlaient entre eux une langue Ă©trange⊠ça ne ressemblait ni au fodlan, ni Ă lâalmyrois, ni au sreng, ni au duscurien, ni Ă aucune langue quâOswald avait entendu pendant sa vie. Soit ils venaient vraiment de contrĂ©es reculĂ©es, soit ils avaient dĂ©veloppĂ© leur propre langage pour communiquer discrĂštement ensemble.
Celle qui les avait remerciĂ©s finit la premiĂšre en savourant sa pomme aprĂšs avoir demandĂ© ce que câĂ©tait, puis dĂ©clara.
â Merci pour ce repas. CâĂ©tait trĂšs bonâŠ
â Câest normal. Je suis content que cela vous ait plu⊠est-ce que je peux vous demander votre nom ?
â ⊠matricule 456.
â Un matricule ? Vous nâavez pas de prĂ©nom Ă vous ?
â Non, lâAgastya et les grands Meneurs nous interdisent de dire notre nom.
â Ah ? Et pourquoi donc ?
â Câest ainsi, ils nous lâinterdisent. Ils sont les seuls Ă avoir le privilĂšge dâen porter un. Les ouvriers comme nous ne portent quâun matricule. Câest dĂ©jĂ un grand honneur pour des infĂ©rieurs tel que nous dâavoir un numĂ©ro attribuĂ© par le Grand AgastyaâŠ
â Câest dĂ©bile, ça vous rĂ©duit Ă un numĂ©ro alors que vous ĂȘtes des humains, comme eux, marmonna la capitaine. Y a que les bagnards et les criminels qui ont des matricules, et câest pour bien leur rappeler que leurs actes sont tellement horribles quâils sont Ă peine humains.
â Un insecte ne peut pas comprendre que lâon doit le respect aux esprits supĂ©rieurs tel que les grands Meneurs et surtout envers lâAgastya, grogna lâorgueilleuse en faisant mine de les regarder de haut, mĂȘme si Ivy la reprit Ă nouveau.
â Alors, si nous, on vous appelle par votre matricule, on vous est supĂ©rieur Ă©tant donnĂ© que câest les « esprits supĂ©rieurs » qui vous appelle par des numĂ©ros et on est leur ait supĂ©rieur car en plus dâavoir un prĂ©nom avec un titre, on a en plus un nom de famille alors quâeux nâen ont pas. Si on est des insectes Ă ce point, on peut vous appeler par un prĂ©nom, et câest plus agrĂ©able pour tout le monde.
â De plus, chez nous, câest trĂšs impoli dâappeler quelquâun par un numĂ©ro, câest comme ça quâon parle des criminels comme vient de le dire le capitaine Drake. Par exemple, je mâappelle Oswald, enchantĂ© de faire votre connaissance, dĂ©clara-t-il en levant sa main droite. Et vous ?
Lâorgueilleuse foudroya la plus bavarde du regard, lui interdisant de parler mais, au bout de quelques secondes et hĂ©sitations, elle leva Ă son tour sa main pour la poser sur son front en dĂ©clarant, avant de serrer celle de lâhomme.
â Alors⊠Pomme⊠ou Soupe⊠câest bon⊠enchantĂ© de faire votre connaissance Oswald.
â Moi de mĂȘme. Et Pomme est un joli prĂ©nom.
Lâhomme qui lâavait dĂ©fendu Ă©carquilla les yeux en la voyant serrer la main dâOswald, lui demandant quelque chose dans leur langue en paniquant, mĂȘme si Pomme rĂ©pondit en lui montrant sa paume.
â Bah non⊠y a rien, tu voies ?
Il eut lâair Ă©tonnĂ©, puis demanda, visiblement sans voix par cette simple poignĂ©e de main.
â Je⊠je peux aussi ?
â Bien sĂ»r. EnchantĂ©âŠÂ ?
â Je ne sais pas⊠Ivy ? Câest joli⊠si deux personnes ont le droit de porter le mĂȘme prĂ©nomâŠ
â Bien sĂ»r, on ne sâen sortirait plus sinon mais, câest plus un prĂ©nom de femme mais, tu pourrais tâappeler Vivian ? Lui proposa la capitaine. On reste dans les mĂȘmes sonoritĂ©s comme ça.
Il hocha la tĂȘte avant de serrer Ă son tour la main dâOswald avec apprĂ©hension, avant de la retirer avec Ă©tonnement en voyant quâelle Ă©tait toujours comme avant. Les trois qui nâavaient rien dit suivirent aussi en se prĂ©sentant en utilisant apparemment des mots de leur langue, qui eurent la mĂȘme rĂ©action.
â On⊠on nous avait toujours dit que pour des ouvriers tels que nous, toucher une bĂȘte avec un emblĂšme majeur nous brĂ»lerait⊠surtout les tarĂ©s comme moi et matri⊠Vivian⊠avoua Pomme en regardant leurs mains Ă tous. Que le sang des enfants de la Noyeuse nous dĂ©vorerait les mains si on le faisait⊠quand câest lâemblĂšme mineur, ça piquerait comme du salpĂȘtre mais, que les emblĂšmes majeurs brĂ»leraient comme le soleil⊠que seuls les esprits supĂ©rieurs comme les grands Meneurs et lâAgastya Ă©taient assez forts pour rĂ©sisterâŠ
â Et bien, je dois avouer que câest la premiĂšre fois que jâentends une telle histoire ! Je vous rassure, je nâai jamais brĂ»lĂ© personne en leur serrant la main ! » Sâesclaffa Oswald, riant Ă moitiĂ© noir. Ces personnes avaient Ă©tĂ© maintenus dans lâignorance, surement pendant des annĂ©es afin de mieux les contrĂŽler, comme dans les sectes les plus dangereuses. Quâils ne se rendent mĂȘme pas compte de ce quâils faisaient ne lâĂ©tonnerait mĂȘme pas vu ce quâil avait devant le nez. Enfin, ça les rendrait plus facile Ă manipuler maintenant quâils voyaient de leurs yeux des preuves de ces mensonges.
Ils finirent tous de manger, le remerciant dans leur langue et en fodlan, avant que le grand-duc ne leur avoue, lâair sombre.
« Merci pour votre confiance. Je dois ĂȘtre honnĂȘte avec vous, lâheure en ville est trĂšs grave. ĂnormĂ©ment de marins ont disparus dans ce port et nous avons des raisons de penser que votre employeur, Kleiman, est Ă lâorigine de ses disparitions. Ă lâorigine, nous sommes venus ici pour retrouver ces disparus et Ă©viter quâil y en ait dâautres. AprĂšs la dĂ©monstration de force de cette femme, Bias, nous sommes tous trĂšs inquiets pour eux. Ătant donnĂ© que vous Ă©tiez en train de vous enfuir avec lui, nous avons toutes les raisons de penser que vous ĂȘtes leurs complices, et vous risquez dâĂȘtre punis de la mĂȘme façon quâeux, mĂȘme si vous nâĂ©tiez que des exĂ©cutants⊠leur apprit-il, voyant leurs joues blĂȘmir de plus en plus au fil de ses mots. Cependant, si vous acceptez de nous aider, on pourra sâarranger pour vous Ă©viter de finir comme lui. Par contre, il va falloir nous aider Ă retrouver les disparus et nous dire tout ce que vous savez.
Oswald les observa, voyant toute lâhĂ©sitation se peindre sur leurs visages anxieux. Pomme finit par ouvrir la bouche, tremblante comme une feuille.
â DâaccâŠ
â Non !!! âŠ
Celle qui les avait traitĂ©s dâinsecte sâĂ©nerva, reprenant violemment la jeune fille qui se dĂ©composa, morte de peur mais, Oswald intervient, alors quâIvy faisait reculer la femme en colĂšre.
â Cause correct aux tiens, câest pas des chiens.
â La capitaine Drake a raison, on ne parle pas comme ça aux autres. Ăcoutez, je voie que vous avez peur et quâelle vient de vous menacer mais, si vous nous aider et nous avouez tout ce qui sâest passĂ© ici, nous vous aiderons et vous ne serez pas en danger, vous avez ma parole.
Pomme le dévisagea, demandant en tremblant, Vivian se tenant à elle en serrant leurs mains ensemble.
â MĂȘme contre lâAgastya ? MĂȘme contre lâĂȘtre le plus puissant ? LâAgastya est lâAgastya, lâincarnation de la connaissance et de la puissance sur terre, le chef suprĂȘme des terres de la Grande Sphygi quâil dirige⊠per⊠personne ne doit lui dĂ©sobĂ©ir, le questionner ou lui rĂ©sisterâŠ
â Oui, mĂȘme contre lui sâil veut vous faire du mal ou vous forcer Ă faire des choses que vous ne voulez pas. Câest lui qui vous a racontĂ© lâhistoire que si vous touchiez quelquâun avec un emblĂšme mineur, vous serez brĂ»lĂ©Â ?
Pomme se mordit la lĂšvre avant dâhocher la tĂȘte.
ïżœïżœïżœ Pour quelquâun qui sait tout, il vous a dit de sacrĂ©s mensonges, leur fit remarquer Ivy avec un air narquois aprĂšs Oswald. Et sâil est aussi fort que cette Bias, on devrait sâen sortir, on a eu quâĂ lui balancer de la poudre urticante dans la gueule et Ă lâembrocher avec une Ă©pĂ©e pour la battre. MĂȘme si votre Agastya est plus fort, on devrait arriver Ă le battre en faisant fonctionner nos neurones. Alors, faites ce que vous pensez ĂȘtre juste selon vous, pas selon votre Grand Con si gĂ©nial quâil est obligĂ© de mentir en permanence pour se faire obĂ©ir car, un peuple qui rĂ©flĂ©chit, câest chiant Ă gĂ©rer.
â Agastya⊠crrrrĂ©tin⊠marmonna Noce sur son Ă©paule.
La jeune femme finit par craquer, hochant la tĂȘte alors quâelle prenait peut-ĂȘtre une des premiĂšres dĂ©cisions de sa vie.
â Je vous montrerais et vous dirais tout⊠maintenant que la Meneuse Ărudite est morte, sa magie ne devrait plus rien verrouiller⊠Juste⊠juste je ne veux pas retourner Ă Shambhala.
â Moi aussi, je veux bien vous aider, ajouta Vivian. Mais par pitiĂ©, ne nous renvoyez pas lĂ -bas⊠ils nous tueront pour vous avoir parlĂ©sâŠ
â Cela devrait pouvoir se faire, leur assura Oswald.
Les deux mages se levĂšrent, sous le regard effrayĂ© des trois qui avaient serrĂ© la main du descendant de Riegan, et celui dĂ©sapprobateur des deux derniers mais, ils restĂšrent fermes sur leur dĂ©cision et les suivirent hors de la piĂšce. Les deux amis â peut-ĂȘtre⊠ça ressemblait Ă de lâamitiĂ© selon le grand-duc mais, il nâĂ©tait pas sĂ»r quâils sachent mĂȘme ce que câĂ©tait⊠â les ramenĂšrent dans la grande piĂšce centrale, leur disant que leur « laboratoire » Ă©tait sous la grosse dalle par oĂč Kleiman et eux-mĂȘmes avaient tentĂ© de sâenfuir. Avec lâaide de plusieurs forgerons et tailleurs de pierre de la ville, ils arrivĂšrent Ă la forcer malgrĂ© les dĂ©formations, puis des hommes en armes descendirent les premier, suivit dâIvy, Oswald, Pomme et Vivian.
Le boyau Ă©tait assez Ă©troit, Ă peine large comme un chevalier en armure, mais pour des personnes aussi maigres et de petite taille que les deux mages, cela restait praticable. Aucune torche nâĂ©clairait lâendroit, remplacĂ© par des sortes de longs rubans luisant, encastrĂ©s de chaque cĂŽtĂ© du couloir, indiquant le chemin dans la pĂ©nombre. Si câĂ©tait les lumiĂšres auxquels ils Ă©taient habituĂ©s et quâils passaient beaucoup de temps sous terre, ce n'Ă©tait pas trĂšs Ă©tonnant quâune flamme leur fasse mal aux yeux, manque dâhabitude⊠une odeur de plus en plus nausĂ©abonde envahissait leurs narines alors que les deux mages baissaient la tĂȘte, gagnĂ©s par la honte⊠une odeur de cadavre et de fumĂ©e⊠de magie noireâŠ
Le groupe marchait depuis quelques minutes quand Oswald commença Ă entendre les hoquets de stupeurs des hommes dâarmes devant eux, avant quâil ne voie le laboratoire de lui-mĂȘme, ne pouvant contenir son incomprĂ©hension mĂȘlĂ©e dâhorreur Ă son tour. Le boyau dĂ©bouchait dans une Ă©norme cavitĂ© Ă©clairĂ©e par des pierres semblables aux veines luisantes, Ă©clairant un ensemble de table semblable Ă celle des chirurgiens mais, avec dâĂ©normes attaches pour tenir les membres, lâodeur de sang sĂ©chĂ© et de chair putrifiĂ© rendant lâair pratiquement irrespirables prenant tout son sens en les voyant. Plus au fond, il y avait un couloir avec deux cĂŽtĂ©s bien distincts : Ă leur gauche, il y avait des rangĂ©es de dizaine de tubes transparentes comme du verre oĂč flottaient des sortes de boules, et Ă droite, un damier de pressoirs Ă©normes, de sorte de cuves surplombĂ©s de cheminĂ©, et de grands casiers entre les deux.
CâĂ©tait ordonnĂ© au cordeau⊠presque scientifiquementâŠ
« Quâest-ce quâil y a dans les cuves et les casiers ? Osa demander Oswald, son sang se gelant de plus en plus en devinant ce quâils contenaient.
â Vos semblables quâon a rĂ©cupĂ©rĂ© encore vivant au projet Delta qui a eu lieu quelques lieux plus Ă lâouest, et des personnes sur le port, dont je mâoccupe, rĂ©pondit Pomme avec une toute petite voix, les yeux baissĂ©s, serrant sa tresse rose vif dans ses mains. Dans les casiers, câest les corps des morts dont sâoccupe Vivian. On est deux dĂ©faillants alors, on a la tĂąche de sâoccuper de vos semblables, que ce soit pour les maintenir en vie pour moi ou se dĂ©barrasser des restes pour Vivian⊠câest ce qui est le plus dĂ©gradant.
â Et quâest-ce qui est pas dĂ©gradant pour vous ? » Demanda un soldat duscurien en regardant la scĂšne avec horreur, conscient que plusieurs de ses frĂšres et sĆurs avaient dĂ» passer par cette sale macabre. Au nom des Braves, heureusement que les murs ne pouvaient pas parler, mĂȘme si le simple fait dâimaginer tout ce qui avait pu se produire ici rendait ce silence encore plus insupportable et dĂ©rangeant⊠câĂ©tait presque⊠bien trop calmeâŠ
« Assister la Meneuse Ărudite⊠rĂ©pondit difficilement Vivian.
â Câest-Ă -dire ? Demanda Ivy, tenant quelques minutes Noce contre sa poitrine pour quâil se calme malgrĂ© lâodeur atroce et le manque de lumiĂšre.
â Projet Alpha⊠continua le mage. Endurcissement des corps et transformation des mĂ©tabolismes⊠étude de sujets vivants pour comprendre leur fonctionnement interne et lâutiliser afin de faciliter les expĂ©rimentations des MeneursâŠ
â Attendez⊠vous ĂȘtes en train de nous dire que vous dĂ©coupiez des gens vivants ?! Mais quel ĂȘtre humain peut ĂȘtre assez tordu pour faire une chose pareille Ă ses semblables ?! SâĂ©nerva-t-elle, Noce contre elle.
â Nous ne sommes pas humains⊠pas comme vous en tout casâŠ
â Oui, esprits supĂ©rieurs, infĂ©rieurs, insectes⊠tout ça, on connait, vos copains nous lâont dit tout Ă lâheure, les coupa Ivy, furieuse et dĂ©goutĂ©e, regardant de partout autour dâelle comme si elle cherchait quelque chose. Mais personne ne se sent mal de juste dĂ©couper des gens encore en vie ?! Vous nâavez pas dâempathie pour eux ?!
â Câest quoi lâempathie ?
Ivy dĂ©visagea Pomme, ne sachant pas si elle devait ĂȘtre en colĂšre ou comprĂ©hensive. Aux yeux de cette mage, câĂ©tait une question parfaitement normale, elle la posait presque en toute innocence, ne sachant mĂȘme pas ce que câĂ©tait alors que pour la plupart des gens, câĂ©tait tout de mĂȘme la base les Ă©motions et les sentiments. Vu le niveau, câĂ©tait mĂȘme limite Ă©norme quâelle ait juste osĂ©e la poser sa questionâŠ
â Lâempathie, câest la capacitĂ© Ă se mettre Ă la place des autres pour les comprendre et agir en consĂ©quence, expliqua-t-elle lentement en laissant Noce regagner son Ă©paule. Par exemple, quand quelquâun a mal, tu comprends ce que ça fait et tu tentes de lâaider normalement.
â Ah, câest comme pour les dĂ©faillants comme nous deux alors, comprit Vivian. Câest pour ça quâon sâoccupe des⊠des « stocks »⊠câest pour corriger nos dĂ©faillances et nos tares Ă forceâŠ
â Vous voulez dire que lâempathie, câest pas normal chez vous ? Demanda une guerriĂšre sreng, sans voix.
â Non, câest les dĂ©faillants et les insectes qui sâen font pour les autres. Quand des ouvriers comme nous tombent, tu les laisses par terre, ils nâĂ©taient pas dignes du Grand Plan de lâAgastya⊠mĂȘme les Meneurs⊠nous avons Ă©chouïżœïżœ, on sera juste remplacĂ©s par dâautres matricules⊠en particulier ceux comme nous qui sont tarĂ©sâŠ
â Câest-Ă -dire ? Vous avez des problĂšmes physiques ou mentaux ?
â Non, on serait inepte au travail, on serait dĂ©jĂ mort depuis longtemps, on ne servirait Ă rien Ă la cause, câest notre Ăąme notre problĂšme⊠on ne sait pas pourquoi⊠juste⊠ça fait mal de voir tout ça⊠marmonna Vivian, complĂštement perdu, tordant ses longs doigts blancs ensemble alors quâil secouait la tĂȘte, agitant ses boucles orange qui cachait ses yeux de la mĂȘme couleur perdus dans le vague. On ne sait pas⊠on ne sait pas⊠mais, on ne peut pas sâen empĂȘcher⊠câest comme si on avait des Ă©pingles dans la poitrine⊠ça fait un peu moins mal quand on leur ferme les yeux et on les met correctement mais, ça fait toujours mal de les entendre⊠mĂȘme quand on les entend depuis toujours⊠et on arrive pas Ă se concentrer uniquement sur le Grand Plan selon le dĂ©sir de lâAgastya⊠on ne sait pas ce qui ne va pas chez nous⊠on est comme le Traitre Abominable dont on doit taire le nom⊠on arrive pas Ă ĂȘtre ce quâon nous demande ĂȘtreâŠ
â Câest pas une tare alors, câest juste que vous nâavez pas Ă©tĂ© cassĂ© par cet Agastya, rĂ©pliqua Oswald sans hĂ©siter. Câest normal de ressentir de lâempathie pour les autres et dâĂȘtre mal quand des choses horribles leur arrivent comme⊠comme tout ce qui a pu se passer ici. Ce Traitre Abominable devait ĂȘtre comme vous et ĂȘtre capable de ressentir de lâempathie malgrĂ© tout ce qui lui Ă©tait arrivé⊠au contraire, soyez fier de lui ressembler.
Pomme et Vivian Ă©changĂšrent un regard, perdus, mĂȘmes sâils firent un signe de tĂȘte qui ressemblait Ă un acquiescement pour eux. DĂ©esse⊠des ĂȘtres vivants incapables de ressentir de lâempathie ou faisant tout pour lâĂ©liminer⊠câĂ©tait la premiĂšre fois quâil voyait une telle choseâŠ
Une fois Ă peu prĂšs remis de ce quâils venaient dâapprendre, ils se mirent Ă prendre possession des lieux et Ă sâorganiser pour sortir les rescapĂ©s de cet enfer au plus vite. DâaprĂšs Pomme, le liquide oĂč ils Ă©taient les maintenait en vie et Ă©vitait que leurs blessures sâaggravent mais, elle comprit Ă peu prĂšs pourquoi câĂ©tait important pour eux de les extirper de ces bocaux.
« Quel Ă©tait le but de ce « plan Delta » dont viennent toutes ses personnes ? Lui demanda Oswald pendant quâIvy et un soldat tiraient une des messagers quâils avaient envoyĂ©s auprĂšs de Kleiman de sa cuve, Ă©talant lui-mĂȘme une couverture oĂč lâallonger.
â Je ne connais pas les dĂ©tails mais, si jâai bien entendu ce que disait la Meneuse Ărudite, ce nâĂ©tait pas pour nous faire des stocks de cobaye⊠dâaprĂšs elle, câĂ©tait pour plonger cette partie des protĂ©gĂ©s de la Noyeuse dans la discorde et le chaos, afin de mieux les infiltrer et de pouvoir faire avancer le Grand Plan. Une autre meneuse est dans votre capitale Ă vous alors, le chaos lâaidera Ă avoir plus dâinfluence⊠expliqua Pomme en dĂ©plaçant des pierres sur une surface rocheuse, semblant actionner des mĂ©canismes par ses quelques gestes alors quâelle ne pouvait toujours pas utiliser de magie.
â Et vous connaissez le nom de cette meneuse ? Son vrai nom je veux dire, comme Bias.
â ⊠nous, nous lâappelons « Grande Savante » et son prĂ©nom, câest PĂ©riandre mais, ce nâest pas sous ce nom que vous la connaissez⊠et quâelle a pris la place de quelquâun dâimportant⊠on peut prendre lâapparence des autres de⊠je vous expliquerait aprĂšs mais, vous la prenez pour quelquâun dâautre dont elle a volĂ© le visage et lâidentité⊠je nâen sais pas plus, je nâai jamais Ă©tĂ© sous ces ordres, cela fait des annĂ©es que je suis dĂ©vouĂ©e au service de Bias⊠la Meneuse Ărudite ! La Meneuse Ărudite ! Pardon !
â Allons, ne vous en faites pas, elle est morte Ă prĂ©sent, elle ne pourra plus vous faire de mal car, vous lâappeler par son prĂ©nom. Et merci, câest dĂ©jĂ beaucoup dâinformations qui nous seront trĂšs utiles, » lui assura Oswald, dĂ©jĂ bien content dâavoir trouvĂ© quelquâun dâun peu plus bavard que Kleiman.
Ils continuÚrent à avancer et à tirer les rescapés de Duscur et des enlÚvements à Kleiman, quand Ivy se figea, regardant une cuve un peu plus loin.
« Ivyyyy⊠appela Noce, solidement accrochĂ© Ă lâĂ©paule de son amie.
Elle courut alors dâun coup vers cette cuve, appelant tout de suite Pomme qui arriva sur ses talons avec Oswald.
â Il est en vie ? Par pitiĂ©, dit-moi quâil est en vie et quâil va vivre⊠dĂ©clara-t-elle, entre le grognement et la supplique, jetant des regards angoissĂ©s Ă celui qui dormait dans ce bocal.
Il sâagissait dâun jeune homme recroquevillĂ© sur lui-mĂȘme, ses bras forts entourant ses jambes pour les tenir contre sa poitrine pale et couverte de cicatrice de brĂ»lures, surement mortelles si la technologie des « agarthans » â soit le nom de leur peuple ou de leur secte si Oswald avait bien compris â ne lâavait pas sauvĂ©. Sa peau Ă©tait trĂšs pale, contrastant avec ses longs cheveux noirs et bouclĂ©s, retenus dans une Ă©paisse tresse qui flottait autour de lui. En le voyant, il comprit tout de suite la raison de la panique dâIvyâŠ
« Câest fou ce quâil ressemble Ă son pĂšreâŠÂ »
â Oui, il lâest. De peu mais, il vivra. PĂ©riandre et Myson avaient dit quâon aurait bientĂŽt dâautres membres de la mĂȘme famille avec un emblĂšme mineur et un emblĂšme majeur alors, il fallait le laisser de cĂŽtĂ© pour comparer les trois alors, je lâai mis au fondâŠ
â Dâaccord, tu mâexpliqueras en dĂ©tail tout ce que tu sais aprĂšs mais avant, il faut quâon le tire de lĂ Â !
â Bien sĂ»r.
Pomme rĂ©pĂ©ta la mĂȘme sĂ©rie de mouvements sur la plaque que tout Ă lâheure, pendant quâIvy et lâautre soldat tiraient lâhomme inconscient de sa prison de verre, enlevant dans un ordre bien prĂ©cis les tubes qui le reliaient Ă sa cuve en trouvant heureusement une respiration qui agitait encore sa poitrine.
La capitaine lâallongea dĂ©licatement sur la couverture quâavait Ă©tendu Oswald, lâinstallant bien avant de lui tourner la tĂȘte, comme un noyĂ© pour Ă©viter quâil ne recrache le liquide de la cuve sur lui ou quâil reste bloquĂ© dans ses poumons. Puis, tout doucement, les deux leicesters le tournĂšrent sur lâĂ©paule, lâaidant Ă vomir.
â Allez⊠grogna Ivy, tendu comme un cordage de navire. CracheâŠ
â ⊠k⊠kof ! Kof ! Kreuf !!! KraâŠ
Le jeune homme rendit tous le liquide bleu luisant prĂ©sent en lui, crachotant encore alors quâil essayait de parler.
â Attention, te presse pas trop, tâĂ©touffe pas alors que tu as encore de lâeau dans les poumonsâŠ
â I⊠Ivy⊠câest⊠mais que⊠les yeux de chat du jeune homme sâĂ©carquillĂšrent encre plus, mĂȘme si leurs iris bleu dâeau restaient encore floues, sâaffolant Ă cause des derniĂšres choses quâil avait vu, surement induit en erreur par lâodeur de sang omniprĂ©sente. Non⊠non⊠tu dois⊠les flammes⊠le sort⊠Dimitri⊠tout⊠ce⊠krreeeuufffâŠÂ ! Kof ! Kof !
â Eh ! Je tâai dit de ne pas tâĂ©touffer ! Le rappela-t-elle Ă lâordre alors quâil crachait encore. DĂ©jĂ que tâes une vraie pierre, va pas tâĂ©touffer mĂȘme Ă terre ! Pour rĂ©sumer trĂšs vite, mĂȘme si ça câest mal fini, Dimitri va bien, et mĂȘme si tâas dĂ» en voir, tu es en sĂ©curitĂ© maintenant.
â En⊠mais⊠mais commentâŠÂ ? Je⊠quâest-ce⊠quâest-ce qui sâest passĂ©âŠÂ ? OĂč⊠oĂč est-ce quâon est ? Mon⊠mon pĂšre est lĂ Â ? Et⊠et FĂ©lix ? Tu sais sâils vont bienâŠÂ ? Et AlixâŠ
â LĂ aussi, trĂšs longue histoire mais, on va tout te raconter mais pour lâinstant, tu dois te reposer. Je te raconterais tout quand tu te seras un peu remis. Dâaccord Glenn ?
Les yeux du jeune homme rencontrĂšrent ceux de la meilleure amie de sa mĂšre, cherchant quelque chose de familier et de rassurant⊠il voulait presque lâentendre raconter ces derniĂšres anecdotes de voyage, leur dĂ©crire ses mĂ©saventures dont elle se tirait toujours et si tout câĂ©tait passĂ© comme ça lâarrangeait Ă Almyra⊠juste pour retrouver quelque chose de normal⊠tout Ă©tait tellement flou dans sa tĂȘte⊠la derniĂšre chose dont il se souvenait, câĂ©tait des flammes de partout, des cris, et des mages Ă©tranges qui le tiraient du mĂ©lange de boue, de suie et de sa propre mare de sang⊠de la sorte de potion immonde quâils lui firent boire⊠puis, plus rien, un grand noir vide et glaçant⊠il avait tellement de questions⊠mais Glenn nâarriva quâĂ supplier Ivy avant de sâĂ©vanouir Ă nouveauâŠ
â Je veux rentrer chez moi⊠je veux mon pĂšre⊠FĂ©lix⊠et Alix⊠je veux retrouver⊠ma familleâŠ
â Bien sĂ»r, je te ramĂšnerais chez toi, je te le promets, lui jura Ivy en passant sa main sur sa tĂȘte.
Glenn se laissa alors happer Ă nouveau par le sommeil, assez confiant en Ivy pour savoir quâelle tiendrait paroleâŠ
#fe3h#Ă©criture de curieuse#route cf + divergente canon#plus ou moins#j'espĂšre que ça vous plait surtout !#on reprend en douceur aprĂšs la FE OC Week !#C'Ă©tais prĂȘt depuis un moment mais je voulais faire que 5 billets Ă la base jusqu'Ă voir le nombre de page et oui...#mieux vaut faire ça en un billet supplĂ©mentaire... ce sera mieux et moins condensĂ© en reblog#La distribution de claque recommence ! J'ai beaucoup aimĂ© Ă©crire la scĂšne de rĂȘve ! J'espĂšre qu'elle vous plaira !#(c'est les scĂšnes que je prĂ©fĂšre en gĂ©nĂ©ral : les scĂšnes de rĂȘve ou irrĂ©alistes oĂč les persos sont en plein trip#On peut mettre la rĂ©alitĂ© au placard et y aller Ă fond sur les symboles et les choses irrĂ©alistes tout en gardant la logique propre des rĂȘv#diatribe des avertissements inspirĂ©e par une conversation avec un ami hors Tumblr qui a passĂ© +30 minutes Ă cracher sur un jeu#auquel il n'a pas jouĂ© depuis 20 ans et qu'il dĂ©teste mais qu'il ne peut pas s'empĂȘcher de cracher dessus en disant que c'est de la m*#avec quelqu'un -moi- qui aime ce jeu vu que c'est sa sĂ©rie de coeur alors pas trĂšs agrĂ©able Ă vivre et ça donne envie de rappeler :#Eh... [nom censurĂ©]... ou le dernier jeu est mal fichu. Et si tu n'aime pas cette licence on peut parler d'autre chose...#donc bref : vous aimez pas un truc ou vous n'adhĂ©rer pas Ă un truc soit ne lisez pas soit Ă©vitez de le tartiner Ă la figure de gens l'aiman#ou alors assumez que vous avez donnĂ© une chance Ă quelque chose que vous doutez ne pas aimer pour voir#Enfin fin du nĂ©gatif bonne lecture Ă tous !
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Combien de larmes ont coulĂ© devant ce film?đ
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y'a que des suisses sur l'autoroute c'est quoi ça, toutes les deux voitures on voit au moins trois voitures suisses, tellement qu'on s'amuse à celui ou celle qui en comptera le plus jusqu'à Toulon ddhdh. vous venez faire votre business de chocolats pour Pùques ou quoi
#pas d'insultes envers la suisse j'aime beaucoup ce pays#tellement que je ne leur ai gardĂ© aucune rancĆur quand ils nous ont Ă©liminĂ©s de la coupe d'Europe et ĂA ça veut dire beaucoup sur moi#au fait vous devez lire ce post avec l'accent marseillais. c'est mon accent donc c'est la rĂšgle.#bref trop d'heures de route pour aujourd'hui je suis fatiguĂ©e je crois#frenchblr#french side of tumblr#france#tumblr français#french user#french blogging
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