#les gens du théâtre
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Nopes et Fodlan en général, c'est un exercice de yoga pour apprendre à rester zen lol
D'un côté tu as une sorte de traditionnel et assez intéressant linéaire avec des personnages qui racontent, souvent, quelque chose qui est contredit par les éléments que tu vois dans le monde, les bouquins, les petits textes "d'environnement" et tout...
Mais le drame, c'est que les personnages restent statiques, et au bout d'un moment tu te demandes juste, okay bon il a dit sa connerie, moi en tant que joueur j'ai vu l'inverse, est-ce qu'il va s'en rendre compte ou non? Et...
Non (on a tous reconnu Claude lol) : il part d'un postulat "Eglise caca", apparemment apprend que c'est un peu plus compliqué que ça, mais fini sur un "j'aimerais bien que vous, joueur, vous chanigez le monde pour faire en sorte qu'il y ait plus de tolérance parce qu'avant c'était pas ça, puisque Eglise caca".
...
Et dire qu'il nous pond cette bouse après avoir eu l'ultime révélation, de la part de Rhea elle-même, sur la raison de ses secrets et le fait que les Nabatéens chantaient kumbaya en rond et se sont quand même fait démolir parce que leurs oreilles sont pointues et que ça peut faire des fléchettes super stylées, c'est... décevant.
Donc d'une part on a cette chose immonde de "oui mais les persos tu les aimes et ils peuvent pas grandir (sauf une partie du cast qui est dans le nord mais ils sont vilains pas beau) donc entre le scénario et Hilda qui est encore en train de se plaindre qu'on lui donne trop de travail et qui est contente d'être une feignasse alors qu'on vient de faire une carte où il est révélé que sa maison """"embauche"""" des gamins almyriens en leur donnant un minimum de gîte et de couvert qui doivent eux quasiment se tuer à la tâche pour faire des corvées, ben Hilda est plus importante! Achètes son alt en bikini pour FEH stp!"
Et d'autre part, évidemment, Dedel elle-même!
C'est marrant parce qu'au début je pensais naivement que le scénario et le sentiment d'inachevé de cet opus (FE16) était dû au fait qu'on avait encore un avatar qui devait être le centre du monde - et si je maintiens que certains choix scénaristiques (comme des dialogues de soutien???) sont clairement motivés par ça - en fait ce n'est pas Billy le centre de Fodlan pour les développeurs, c'est Dedel!
Dimitri est foufou et vilain parce qu'il veut trucider Dedel? Ben quand il redevient gentil, il ne veut plus la décapiter! Ouais!
Claude geint quand il s'agit de dégommer Dedel "on a des buts pas si différents en fait! Moi je veux mettre un terme aux discriminations, et toi tu veux tuer Flayn parce qu'elle n'est pas de la bonne race. C'est tout pareil!" et sa route a quand même la perle, avec Lys qui est en mode "on doit dégommer Thales et compagnie pour Dedel aussi qui était une pôvre victime :'(". A vomir.
Le truc le plus marrant, c'est que la route de Dedel est celle qui, à mon sens, dépeint les critiques de Rhea de façon la plus réelle : elle est énervée et peinée et détruite petit à petit par la guerre qui fait rage parce qu'il faut la détruire, comme elle est caca, mais au moins avec les voix JP, j'ai l'impression que oui, on fait une boulette et le joueur se prend tout ce torrent d'émotions et de doutes dans la face, et c'est pas Dedel avec sa rhétorique puante "oui mais ce ne sont pas des humains et les oreilles pointues sont un mal qui ronge notre monde depuis des siècles il faut toutes les exterminer" qui fait passer la pilule.
Du coup, les développeurs ont misé sur le côté "self insert" de Billy avec Rhea qui se focalise sur eux - au lieu de Dedel - pour montrer qu'elle est méchante, elle vous crie dessus :'(
En tous cas ça a marché avec quelques joueurs outre-atlantique, et Rhea caca "parce qu'elle me regarde mal, et m'a dit que je n'étais qu'un raté ouin ouin le pnj il est vilain avec moi môman".
Et puis dans SS, ben on finit par avoir Rhea elle-même, dans son soutien, qui avalise les merdouilles de Dedel en pensant que la guerre était de sa faute (ben oui!) pour dédouanner l'élève pour laquelle le joueur est censé se sentir mal.
Bref, on a deux jeux où des persos, dont Dedel la première, font de la merde, 36k occasions de la part de personnages - qui ne manquent pas de répartie creuse quand il s'agit de dire qu'une organisation bannie depuis des siècles d'un endroit est mauvaise parce qu'elle n'aide pas les gens de cet endroit (coucou Doro!) ou qu'elle discrimine entre les gens (coucou Claude!) - de les corriger, mais non.
Dedel ne pourra jamais faire face à quelqu'un qui lui explique en trois points que son plan c'est de la merde - il n'y a rien qu'à voir Ferdie qui fait des ronds de jambe pour lui expliquer le concept de l'école (oh mais oui dedel, je suis sûre que tu y as pensé n'est ce pas? Qu'est ce que tu es douée!) - parce que quiconque s'oppose à Dedel, dans les jeux "Fodlan", ben c'est quelqu'un de méchant, à la fin, tout le monde doit aimer ou au moins avoir de la sympathie pour elle (dédicace à @ladyniniane qui, à mon sens, a écrit une façon réaliste d'envisager les "pourparlers" d'avant bataille de la route des Lions de Saphir, au lieu d'avoir le débat sur le plat de la cantine ce midi que nous ont pondu les développeurs).
Et parfois, on arrive à des absurdités que certains joueurs relèvent comme le "mais pourquoi les gens ils sont pas contents quand je leur roule dessus et leur explique qu'il sont des sous-humains comparés à moi et mes compatriotes?" ou le fameux "no u" quand Dimitri lui demande d'arrêter de trucider ses sujets.
Donc pour répondre à ton Claude sur le montage, oui, selon les "scénaristes", ont est censés être tristoune pour Dedel (Lobotogard est pour moi la façon la plus moche de lui empêcher d'assumer ses actes de merde) et toujours vouloir acheter des polochons à son effigie, quitte à sacrifier la qualité scénaristique des jeux.
Rewatching Shez's supports with Edelgard, it kind of irritates me that Edelgard looks upset after Shez points out that the average farmer probably hates her for the war. Like, ma'am you knew this would lead to mass death and a lot of people not being fans of yours, and considering Hubert also points out the Edel's policies are meant to benefit nobles who give her money and troops and keep down the commonfolk, she shouldn't be surprised by this answer. Shez even softens the comment by saying "you must have a good reason" but it's like Edelgard can't handle hearing any kind of real criticism from people she respects (or claims to). I think it's another player-pandering thing, can't have the Lord be mad at you, but it just makes Edelgard look like a thin-skinned whiner who can't handle the harsh criticisms that her actions are going to bring her. At least when she went on about "her path of blood and death" in 3 Houses she seemed to have some sense of "yeah people will hate my guts." Idk it probably comes down to the developers being scared to have someone truly criticize Edelgard without pushback.
That supports irks me for other reasons lol, basically the fact that Barney points out how water is wet (something Supreme Sailor Fuku apparently missed, as you noticed) but within 1 convo they completely drop that plot line and get along with her plans because, eggtivation means that someone as bland as Barney - who could represent common sense - must also be drowned under liters of Hresvelg Grey.
Imo, it's not "your lord cannot be mad at you", but again and again with the Fodlan games, "no one can be mad at Supreme Leader, not even you(r self insert character)".
FWIW, FEH got her writing right - faced with contradictions and criticism, Supreme Leader ragingly storms out of a conversation when the characters aren't from Fodlan and thus cannot be eggtivated (or when the Fodlan team isn't writing them?).
Given how her Nopes' Big B's support basically has her say "you're either with me or against me", no wonder why criticism, at least in Nopes, is something unknown for her, hell, Ferdie must behead his father to demonstrate times after times that he and House Aegir aren't her enemies - in a way, even with the twist they added (let's ally with those icky disgusting beasts to get rid of uncle, and THEN we will free Fodlan from their scaly grasp!) Nopes wrote Supreme Leader to be even more uncompromising and more bull-headed than ever, if in Houses she had a modicum of self-awareness (she's still the Adrestian Emperor though!), in Nopes it's written away.
#lilias42#un petit peu de sel pour débuter la soirée#c'est déjà vu et revu dans les JRPGS le worldbuilding qui contredit ce que les persos jouables pensent#et les joueurs avertis s'en rendent compte#mais il y a toujours un moment où les persos jouables se rendent compte qu'ils se sont trompés!#parfois c'est super bien scénarisé comme dans la saga baten kaitos#et parfois un peu moins#mais là? On a l'impression que les persos évoluent dans leur propre monde et n'interagissent pas avec le Fodlan qu'on voit#sérieux à quoi ça sert d'apprendre qu'il existe une pièce de théâtre ancienne où des humains fantasmaient sur des Nabatéens#si aucun perso ne mentionne l'existence des Nabatéens?#Enfin moi ça me sert pour des fanfics ou autres UAs#mais pour des développeurs? Soit ça sert à faire joli et c'est du temps de codage payé pour rien#soit c'est un indice que Dedel raconte de la merde mais au final tout le monde s'en fout donc on en revient au même point#des gens ont été payés pour faire un lore qui n'est même pas touché dans le jeu#encore une fois vu que c'est mon hyperfixation dans ces opus pour moi ça me va#mais enfin je sais qu'IS ne fait pas des jeux que pour moi lol#donc je me demande par exemple Willy et Lycaon#pourquoi les inclure dans le worldbuilding et sous entendre que Dedel pourrait avoir des oreilles pointues si c'est pour que cet élément#ne soit repris par aucun personnage même pas dans un soutien#et que ça serve juste à remettre en cause la version de dedel sur ce que Willy aurait transmis de générations en générations?#et encore une fois cette remise en cause ne rime à rien puisque les devs ne laissent pas à Rhéa une seconde pour parler d'autre chose#que du joueur et de son importance pour elle et le monde en tous cas dans FE16?#j'ai rien contre le gars mais enfin#on connait le nom du l'orphelin que Matthias Gautier recueille après la mort du chef de clan Sreng#mais on ne sait pas si les persos jouables de Fodlan savent qu'il existe des non-humains pacifiques dans le continent#ou si Rodrigue a déjà vu une tortue géante et ce qu'il pense des 'enfants de la déesse'#FE16#rant
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"Les JO, c’est super. Mais pour qui et à quel prix ? [...]
Les fan zones sont pleines de gens qui rient et pleurent ensemble devant les transmissions des épreuves ; 5 200 personnes ont été expulsées de squats et de campements de rue en Île-de-France en un an et envoyées en région sans solution de logement.
Les transports publics roulent bien et les agent·es d’accueil sont plebiscité·es pour leur bonne humeur ; les émissions de CO2 des Jeux olympiques de Paris (JOP), 1,58 million de tonnes au minimum, seront l’équivalent de ce que rejettent 150 000 personnes en France en un an.
Des athlètes couronné·es sont d’anciens enfants placés ou ont grandi dans des quartiers pauvres ; le prix des places pour la cérémonie de clôture des Jeux va de 250 à 1 600 euros – plus qu’un mois de salaire minimum.
C’est officiellement la trêve olympique, et la délégation ukrainienne a remporté deux médailles d’or (sabre et saut en hauteur), ainsi qu’une de bronze (lutte gréco-romaine), qui deviennent des symboles de résistance face à l’agression militaire russe ; les bombardements israéliens n’ont pas cessé à Gaza, visant une école transformée en refuge le 10 août, veille de la clôture des Jeux, tuant près de cent personnes selon un premier bilan. [...]
La vasque et sa flamme olympique en LED et vapeur d’eau flottant au-dessus des Tuileries émerveillent le public ; les enfants du quartier Pleyel à Saint-Denis vont subir les pots d’échappement de la voie vers l’autoroute construite collée à leur école pour les JOP.
Imaginaire collectif coupé en deux
Cette liste pourrait s’allonger encore et encore. Dans ces conditions, quelles conclusions en tirer sur la portée de l’événement ? [...]
Une situation peut être à la fois agréable et pourtant néfaste. On peut aimer boire du Coca-Cola ou de la vodka, cela n’empêche pas que ce soit mauvais pour la santé ; adorer voyager vers des pays lointains alors que les trajets en avion contribuent à la destruction du climat [...]. Les émotions, aussi fortes soient-elles, ne suffisent pas à façonner la réalité.
En 2015, les chercheurs Stefan Aykut et Amy Dahan parlaient de « schisme de réalité » pour décrire les négociations climat, car elles voulaient réduire les gaz à effet de serre sans s’attaquer à leurs principales émettrices, les industries fossiles. Elles avaient créé un théâtre de discours sans prise directe avec le problème à résoudre.
À sa manière, Paris 2024 aura été un schisme de réalité : il y a une dissociation entre le spectacle, excitant, prenant, populaire, et les conditions de sa fabrication, brutales, excluantes, coûteuses et injustes. C’est un déchirement sensible. Le sentiment d’une immense réussite s’entend dans les déclarations des organisateurs et des dirigeants politiques. La fierté et la joie s’expriment un peu partout, aux repas familiaux, entre collègues, avec ses voisins, sur les réseaux sociaux, dans les médias. Mais qui écoute la complainte, la colère et les douleurs de celles et ceux qui ont été éjecté·es de la fête ?
Si le prix à payer en « nettoyage social », en élitisme commercial (le prix des billets, du merchandising et d’un séjour à Paris) et en destructions environnementales (climat, arbres coupés au parc Georges-Valbon, jardins ouvriers détruits à Aubervilliers et pollution de l’air à Saint-Denis), est considéré comme acceptable, le risque est d’abaisser les critères d’exigence démocratique, sociale et écologique pour la suite.
Car si un pouvoir peut décider un tel événement sans consulter la population, en cédant aux exigences d’une association croulant sous les accusations de corruption (le CIO), en engageant au moins 10 milliards d’euros sans transparence sur le coût final en argent public, et en multipliant les promesses écologiques intenables, alors pourquoi ne pas continuer ?"
#french#en français#upthebaguette#french side of tumblr#paris 2024#olympics#bee tries to talk#france#ecology#pollution#classism
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Au cirque aujourd'hui y a eu le briefing du spectacle d'halloween, et ce sera génial.
C'est dans un village qui organise chaque année une balade nocturne avec des petits spectacles, du chant, du théâtre, etc à plusieurs endroits, on avait déjà participé l'année dernière, on incarnait un cirque traditionnel sur le déclin.
Cette année, on a enrichi l'histoire : des rumeurs circulent sur ce cirque qui déclinait depuis le décès d'Augusto, le père fondateur. Viviane, sa veuve, la voyante, aurait réussi à devenir immortelle. Elle aurait ensuite tenté de ramener son défunt mari à la vie mais a d'abord voulu s'entraîner sur le personnel du cirque. Tentatives échouées, puisque nous sommes tous devenus un peu morts, un peu vivants, on ne sait pas trop. Notre envie de spectacle toujours aussi vive par contre, et dès que nous voyons le public arriver, nous l'encerclons et nous lui montrons nos talents.
Notre piste fait 100m de long, le public arrive d'un côté, est mis dans l'ambiance par la première scène, une dispute entre Monsieur Loyal et sa femme à barbe. Les garçons de salle distribuent des vieilles gazettes qui titrent que tout le cirque est devenu fantomatique, que les tigres ont mangé nos restes et que nous sommes pourtant bien là, qu'un sort s'est abattu sur nous et que la menace règne toujours derrière ce gros rideau de velours, alors prenez garde à Viviane si vous osez franchir ce rideau.
Quand le rideau s'ouvre, l'obscurité est pesante et nous voyons arriver ce public, sans trop y croire. Est ce qu'ils nous voient vraiment ? On les fait participer un peu, on les approche, on les encercle, on les regarde de près. Puis les lumières de la première partie de la piste s'allument et les tissus, trapèzes, cerceaux et cordes lisses s'activent, accrochés aux arbres. Pendant ce temps, les autres groupes vont se mettre en place. Le spectacle aérien dure quelques minutes et les lumières s'éteignent alors que la suite s'allume pour le spectacle de jonglerie et équilibre. Puis après quelques minutes, les lumières s'éteignent de nouveau et d'autres s'allument pour emmener le public un peu plus loin. Pendant ce temps, des artistes déambulatoires se promènent en échasses, impliquent des gens dans des tours de magie... 4 grosses scènes s'enchaînent, agrémentées des déambulatoires, jusqu'à la fin de la rue et le spectacle de jonglerie feu. C'est là que je serai, avec mon staff, mon ado, ses bâtons enflammés et une amie qui aura ses bolas.
Après ces 4 scènes, les 50 artistes du cirque se retrouvent sur la place pour une chorégraphie dans un chapiteau sans mur, uniquement composé d'une structure et de lumière. A la fin de cette chorégraphie, Viviane nous envoie tous pour de bon chez les morts.
Voilà voilà ^^ moi je joue l'une des filles d'Augusto et de Viviane. J'ai deux soeurs jumelles siamoises qui jonglent et mon frère est l'homme fort, j'ai un tempérament plutôt ténébreux, secret, énigmatique, je sais toutes les histoires de famille, j'ai une oreille partout mais je garde tout pour moi. Je fais des "chuuuuut" aux gens avec des yeux plutôt effrayants. J'écoute leurs conversations et je les regarde avec un air bizarre.
Et du coup ce samedi, c'est la première répétition, JE JONGLE AVEC DU FEU ET UN BATON D'1M50 BORDEL DE MERDE.
#omg omg omg#je vais jongler avec du feu#c'est putain de badass#j'adore#j'ai très peur#mais j'adore#aaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhh
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Aux trois questions qui sous-tendent les demandes du sujet en analyse:
•pouvoir aimer et être aimé,
•l’authenticité,
•l’indépendance,
c’est le deuxième point sur lequel nous voudrions attirer l’attention aujourd’hui, à savoir l’authenticité, pour essayer de dissiper un contresens massif, que Freud dénonce avec la plus grande force dans son Malaise dans la civilisation, et sur lequel Lacan revient pour y insister dans L’éthique... il s’agit du statut des "émotions".
Le discours dominant exalte le culte des émotions.
En témoigne l’aura du signifiant «émotion» dans les médias où la viabilité d’une émission (et même d’une information) se juge au degré d'émotion qu’elle est susceptible de susciter.
Cette dérive s’est propagée jusque dans l'enseignement où "l'émotion" des élèves est valorisée au détriment de leurs connaissances: "ce n'est pas ce que je ressens" est une objection qui autorise désormais l'élève à contredire son prof de philo...
C’est ainsi que par une curieuse rétroversion qui prend le contrepied d’un aboutissement logique de trente siècles de civilisation, on dit désormais se croire vivant "parce qu’on ressent", alors qu’il est connu depuis la haute antiquité que "le ressenti ment" et que les sensations manifestent, par leur fixation dans une signification, un etat de mort psychique, dû au fait que l’é-motion est "status", un mouvement immobilisé, qui s’oppose à la pensée logique, dialectique qui, elle, reste du côté du mouvement, du jeu incessant des métamorphoses et de la vie.
Si l’émotion est devenue à ce point un signifiant-phare du capitalisme de la bien-pensance, c’est que la communion par «les émotions» est ce qui vient se substituer à l’absence de lien social, et si des matchs de football ou des obsèques de vedettes de variétés suscitent tant de ferveur, c’est par l’illusion que ces "événements" montés en épingle nourrissent chez le spectateur l’illusion d’appartenir de plein droit à une communauté organique, le rassurant sur son "identité" toujours en souffrance...
Freud, qui dès L’esquisse (Entwurf) en 1895 décrivait avec précision la topologie de la subjectivité en tant qu’appareil neuronique soumis au principe de plaisir et au principe de réalité (processus primaire et processus secondaire), n’a jamais varié sur ce point: les émotions masquent au sujet la vérité de son désir, là où se joue le théâtre vrai qui déroule les fils de sa destinée.
Toutes les émotions sont menteuses (sauf l’angoisse, qui est un affect qui ne ment pas...), qu’est ce que ça veut dire?
Laissons la parole à Lacan, dans L’éthique..: "Je dirai, le Chœur, ce sont les gens qui s’émeuvent.
Donc, regardez-y à deux fois avant de vous dire que c’est vos émotions qui sont en jeu dans cette purification.
Elles sont en jeu quant à la fin, à savoir que non seulement elles, mais bien d’autres, doivent être par quelque artifice apaisées, mais ce n’est pas pour autant qu’elles sont plus ou moins directement mises en jeu.
Elles y sont sans aucun doute, vous êtes là à l’état - en principe - de matière disponible, mais d’un autre côté aussi, de matière tout à fait indifférente.
Quand vous êtes le soir au théâtre, vous pensez à vos petites affaires, au stylo que vous avez perdu dans la journée et au chèque que vous aurez à signer le lendemain.
Ne nous faisons donc pas trop de crédit.
Vos émotions sont prises en charge dans une saine disposition de la scène.
C’est le Chœur qui s’en charge.
Le commentaire émotionnel est fait, c’est ce qui fait la plus grande chance de survie de la tragédie antique.
Il est fait, il est juste ce qu’il faut bêta, il n’est pas sans fermeté non plus, il est bien humain.
Vous êtes donc délivrés de tous soucis."
Et encore:
"Quand Freud est en cours de son auto-analyse, il écrit, dans une courte lettre, la lettre 73 [lettre 144, 31 Oct. 1897, p. 349, PUF 2006.] :
«Meine Analyse geht weiter. Mon analyse se poursuit, elle reste mon intérêt principal. Tout en restant encore obscurs, certains problèmes appellent, mais le problème dont il s’agit met là-dessus quelque chose, un sentiment de confortable.
C’est - dit-il - comme si on avait à prendre, à puiser dans une chambre à provision, et à en tirer des choses, ce dont on a besoin.
Le désagréable - dit-il - ce sont die Stimmungen».
[À savoir les états - au sens le plus général que nous pouvons donner à ce mot qui a sa résonance spéciale en allemand - les états d’humeur.
Il s’agit à proprement parler des sentiments, des états de sentiment qui de leur nature, essentiellement, couvrent, cachent - quoi ? - die Wirklichkeit, la réalité.
C’est en termes d’interrogation sur cette Wirklichkeit, sur cette réalité, que Freud interroge ce qui se présente à lui comme Stimmung.
Et la Stimmung, de par sa nature, est ce qui lui dévoile ce ce qu’il a là dans son auto-analyse à chercher."
Le recours aux émotions laisse croire à une vérité d’ordre supérieur qui serait contenue dans la spontanéité, associée à l’authenticité, qui prendrait le pas sur la réflexion et sur la pensée, or ce qui dans nos sociétés infantilisées, se couvre sous le nom trompeur de "spontanéité" n'est en vérité rien d'autre que la propension infantile à se laisser aller à ses impulsions immédiates...
Pour Kant, "se laisser aller à ses impulsions immédiates" est l'indice que nous ne sommes pas libres mais enchaînés au lien causal qui nous relie à la chaîne des causes et des effets.
La spontanéité authentique, telle qu'elle fut redéfinie par l'idéalisme allemand, ne peut pas avoir lieu sans un moment de réflexivité: ce qui semble me venir de l'extérieur ne me détermine que dans la mesure où je l'aurai toujours déjà fait mien, autrement dit les raisons externes (les prétextes à mes actes) ne comptent que si je les "accepte déjà comme miennes", ainsi la détermination de mon sujet par autre chose (cause), que je présente comme extérieure («ce n’est pas de ma faute,,,») est toujours déjà une autodétermination de mon sujet lui-même.
C'est ainsi que toute référence à ma nature immédiate («je suis comme ça, qu'y puis-je...».) est fausse, mon rapport à mes propres impulsions ne me détermine que dans la mesure où je les ai déjà reconnues comme miennes, où je les assume comme miennes, voilà pourquoi je suis entièrement responsable de mes actes (et de mes paroles) même si je ne peux jamais en connaître, à l'avance, les conséquences...
Les émotions, comme les sensations, les sentiments, les affects, les perceptions... restent donc à interpréter, de la même manière qu’on interprète un rêve, grâce aux procédés mis à jour par Freud du déplacement, de la condensation, de l’inversion, car si les «émotions» nous trompent, c’est en nous masquant la réalité en tant que Wirklichkeit, en constituant une échappatoire commode, rationnalisante et cependant imaginaire, de ce qui est réellement en jeu à ce moment-là dans le Symbolique, la logique des pensées qui s’enchaînent dans l’inconscient...
Si l'esclavage antique tenait sa main d’œuvre avec de vraies chaînes, le servage avec l'impossibilité d’accéder à la propriété, la "démocratie" du capitalisme de la bien-pensance tient son peuple à l’aide de ses propres "émotions", car l'émotion est aujourd’hui la plus sûre garantie contre la pensée de l’inconscient...
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Hello my old friend
Oh Capitaine, mon Capitaine...
Cette réplique du Cercle des Poètes Disparus résonne toujours.
Pour la première fois en France, le Théâtre Antoine adapte le film, avec dans le rôle du magnétique John Keating, Stéphane Freiss.
Ce professeur charismatique et iconoclaste inspire ses jeunes élèves s'ouvrant à la vie, loin du carcan des conventions qu'incarne leur établissement.
Histoire émouvante et contemporaine, la pièce célèbre l'amitié, l'émancipation, la transmission au moment où se dessinent personnalités et destins.
Un cri à la vie ! Un cri à la Liberté ! Carpe Diem ! Carpe Diem !
Auteur : Tom Schulman
Artistes : Stéphane Freiss, Ethan Oliel, Hélie Thonnat, Audran Cattin, Maxence Seva, Pierre Delage, Maxime Huriguen, Yvan Garouel, Olivier Bouana
Metteur en scène : Olivier Solivérès
J’ai adoré la pièce! Les jeunes sont incroyables, le prof est inspirant et l’histoire est toujours actuelle.
Avant le début ils ont même fait monter les gens sur scènes pour danser :)
Gros coup de ♥️
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Vendredi 8 mars : j’ai regardé avec joie les vidéos des manifs féministes en France, en réalisant au fur et à mesure que ça allait être moins la folie ici.
Et il m’a fallu un peu de motivation parce qu’il pleuvait des cordes à Chicago. J’ai foncé au musée de l’architecture histoire d’avoir quelques infos en plus sur cette ville. Maintenant que presque tout est bétonné, le projet est de mettre le plus de verdure partout. Et j’ai vu le projet de réhabilitation de la tour Montparnasse pour la verdire également !
J’ai pris le bus, avec la ficelle le long de la fenêtre sur toute la longueur du bus pour demander l’arrêt :-) pour aller au musée de l’histoire de Chicago.
Ça ne parlait pas des Irlandais mais plutôt des polonais arrivés à Chicago dans les années 1830, pendant la guerre avec la Russie (toujours les mêmes …). Même si certains sont repartis vivre en Pologne, d’autres sont arrivés à chaque nouveau conflit international. Tout ça ressemble à la population dans The Wire 🧐
J’ai rejoins un rassemblement contre une fausse clinique qui va bientôt ouvrir à Chicago. Le genre de clinique qui n’a aucune certification médical mais qui reçoit des femmes et donne son point de vue sur l’avortement par exemple, sans pouvoir prodiguer plus d’aide. Les panneaux sont un peu confus mais j’étais bien avec des pro-choix donc des gens qui soutiennent le droit à l’avortement, à l’accès aux soins pour toustes… Il y a une marche dimanche après midi, j’espère y trouver un peu de l’énergie que jamais vu dans les vidéos françaises !!!
Les vitrines des plombiers français n’ont qu’à bien se tenir ^^, c’était juste à côté de la pizzeria où j’ai dîné avec Kara, une couchsurfeuse. On est allé dans un bar a jeux d’arcades avant d’assister à un show de speed-théâtre-semi-impro-queer (je ne sais pas quoi dire d’autre) plutôt fun!
#Chicago#pizza#rainy day#Chicago history museum#chicago architecture#march 8th#neotheater#georgesdeepdish#couchsurfing#niceday#travel#loveamerica#holidays#usa
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MESSAGE IN A BOTTLE (forum camping/low fantasy)
inspiration the white lotus, hsmtmts, the odyssee, gossip girl.
CONTEXTE.
“lundi, c’est aquabike,
mardi, c’est randonnée dans les bois,
mercredi, c’est bronzette sur la plage,
jeudi, c’est cours de poterie avec les amis,
vendredi, c’est initiation au tai-chi
samedi, c’est soirée au camping,
dimanche, c’est pic-nic avec les voisins
et après ?
et après c’est la même chose,
lundi, c’est tournoi de volley-ball,
mardi, c’est veillée autour d’un feu de camp à faire griller les chamallows
mais on repart quand ?
pourquoi tu veux repartir ? on est pas bien là,
on est bien là, oui”
tel un cirque itinéraire, le campus du lotus blanc s’était installé ici-là pour une durée de quelques mois. Il attirait les foules, offrant un complexe et des infrastructures sans pareilles et les gens restaient, sans trop savoir pourquoi, goûtant les mets les plus somptueux à base de lotus. et puis lorsqu’il y en avait plus, c’était la fin des vacances, tous pliaient bagages et reprenaient leur vie jusqu’à ce que le lotus blanc apparaisse à un autre endroit du globe.
Le camping, c’est le théâtre de la découverte de soi, de la découverte des autres, des rencontres amicales ou amoureuses, des drames soudains, du divertissement sans borne, des limites franchies allant jusqu’aux plus noires envies.
vous aussi, rejoignez le lotus blanc parce qu’on sait pas jusqu’’à quand ça durera, ni où ça nous mènera.
PRESENTATION DU FORUM.
MESSAGE IN A BOTTLE (MIAB) est un forum de type camping se voulant être éphémère, c’est-à-dire qui dure entre 4/5 mois et après ? si ça marche, l’endroit, le décor, tout change, vous pourrez conserver vos personnages ou en changer car le lotus blanc se veut être itinérant.
c’est aussi un forum qui se veut être chill, pas de mots ou de lignes exigées, on répond quand on veut, à son rythme. Les rps courts sont plutôt privilégiés, en plus des différents moyens de communication qui seront mis en place. Des animations inrp seront là pour satisfaire à la fois celleux qui n’ont pas trop le temps de se consacrer au forum ainsi que celleux qui veulent s’investir à fond. le but (même si c’est toujours une douce utopie) c’est que chacun.e y trouve son compte.
A CE STADE
Je lance l’idée, je suis seul à bord avec mon petit imaginaire et mes petites mains pour écrire, évidemment, je cherche un à deux compères qui seraient partant.e.s pour se lancer dans l’aventure (à savoir que je vise personnellement une ouverture fin avril). Je cherche aussi quelqu’un qui serait prêt à coder/grapher, sans forcément être dans le staff s’iel ne veut pas. évidemment avoir déjà administrer est un plus et se montrer communicatif aide aussi.
bref si ça vous intéresse, go go go et mpottez moi.
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La LITTÉRATURE FRANCO-ONTARIENNE EST UNE LITTÉRATURE D'ACCUEIL (Conférence donnée à l'Université de Windsor, octobre 2023)
Je suis honoré de pouvoir dire quelques mots sur ce que je considère comme une littérature d’accueil. J’aime bien le concept de « littérature du vaccum » qui veut dire une littérature existant dans un contexte social et politique vide ou incomplet. C’est un concept conçu et défini par le poète et essayiste franco-ontarien Gaston Tremblay.
Je cite ici son propos écrit sur la page de l’Institut canadien sur les minorités linguistiques :
« L’implosion des institutions sociales canadiennes-françaises, lors de la Révolution tranquille, crée un tel vide dans les régions limitrophes du Québec que la nouvelle garde franco-ontarienne s’inscrit dans le courant contre-culturel nord-américain. Certes, ce premier mouvement d’identification à la contre-culture sera suivi d’un retour aux sources, mais il se fait alors par le biais du patrimoine régional, plutôt que par l’exploitation du corpus littéraire canadien-français traditionnel. C’est donc après une double rupture, dans un vacuum institutionnel et idéologique, que la littérature franco-ontarienne se développe. »
Je souscris à ce concept car c’est la réalité quotidienne de tout Franco-ontarien qui écrit. Il y a en effet peu d’institutions qui permettent aux gens de lettres de l’Ontario français d’être considérés comme des écrivains du centre. Nous sommes des écrivains et des écrivaines de la marge. Les institutions qui existent politiques et sociales sont fébriles et se battent elles-mêmes pour leur survie. Ce constat fait de la littérature franco-ontarienne, une littérature des espaces clos et ponctuelle. Ponctuelle dans le sens qu'elle existe à des endroits précis. Pour constater qu’elle est en vie, il faut aller là où elle a pris la parole, au Théâtre du Nouvel-Ontario par exemple ou là où on lui accorde la parole, par exemple à la bibliothèque métropolitaine de Toronto. Ensuite, la littérature franco-ontarienne semble disparaître, elle est là mais peu visible et donc certains pourraient penser qu’elle est inexistante ou morte. Pour s’assurer de sa survie, il y a ces moments ponctuels qui sont vitaux, surtout pour les spécialistes et les universitaires afin de constater que rien de mal n’est arrivé à la littérature du vaccum. Elle est toujours vivante. Ces moments ponctuels sont les salons du livre et les conférences universitaires en Ontario.
C’est en jetant les bases de la littérature franco-ontarienne dans les années soixante-dix que les Franco-Ontariens définissent le cadre de ce qui sera leur littérature. Ils sont inspirés par la contre-culture, mouvement qui déboulonne les institutions culturelles formelles et ouvre les portes aux expériences artistiques en tout genre. Les différentes vagues qui suivent la contre-culture, notamment l’influence du folklore franco-ontarien, a permis à la littérature franco-ontarienne d’imposer son existence dans une société anglophone dense et compacte.
Les arts franco-ontariens actuels tels qu’on les connait permettent d’affirmer une chose. La lutte pour son existence est faite. Comparé au siècle dernier et celui d’avant, il est possible d’affirmer que la littérature franco-ontarienne a une voix unique et singulière. Il suffit de consulter le site Web du Conseil des Arts de l’Ontario pour trouver des services offerts aux artistes franco-ontariens, services qui n’existaient pas dans les années mille-neuf-cent soixante-dix. Mais exister est une chose, vivre en est une autre. C’est ce combat permanent pour sa vie et sa survie qui fait de la littérature franco-ontarienne, un art face à son péril de façon constante.
Le poète et essayiste Gaston Tremblay aime citer Roger Bernard qui a dit « On ne naît pas Franco-Ontarien, on le devient ». Je suis d’avis que même si le droit héréditaire existe, il n’exclut en rien le droit littéraire d’être franco-ontarien. J’insiste sur le terme « droit littéraire » car ce droit peut apparaître et disparaître dans le sens où l’écrivain francophone de l’Ontario qui a déménagé en Colombie britannique et y vit depuis dix ans peut ne plus se définir comme Franco-Ontarien. Si en plus, son œuvre se poursuit ailleurs, il obtient le droit littéraire de se définir autrement.
J’en veux pour preuve un article du Journal Le Devoir daté du 17 octobre 2015. On y interviewait Patrices Desbiens, un des piliers de la littérature franco-ontarienne. Il dit en répondant à un journaliste québécois, je cite :
« Il y a du monde qui pense encore que je vis ce qui est dans Sudbury. Ce n’est plus mon monde, ça », raconte au bout du fil le Franco-Ontarien né à Timmins, qui habite Montréal depuis 1993. « J’étais là dans le temps, faque j’écrivais ce que je voyais. Maintenant, je suis ici, faque j’écris ce que je vois ici. »
Ce commentaire ne peut être celui d’un écrivain français, irlandais, ou japonais. Ce phénomène n’est possible que dans la « littérature du vacuum », celle où l’identité est en permanence menacée par le vide. L’identité littéraire de Patrice Desbiens, même si elle est ancrée en Ontario, reste volatile. Il exerce ainsi son droit de définition de lui-même sans que cela ne soit invraisemblable. C’est ce qui différencie les écrivains franco-ontariens, des écrivains français ou allemand. Eux restent éternellement des écrivains français ou allemands, même s’ils émigrent.
Cette fragilité indéniable de l’identité littéraire franco-ontarienne est également sa force. Elle empêche les dérives sectaires. Nous ne sommes pas sur un territoire où la majorité est opprimée comme au Québec durant les années de la grande noirceur. Nous sommes sur un territoire de minoritaires. L’existence prend donc une autre connotation, le mot pays possède un autre sens. Jean-Marc Dalpé dans « Les murs de nos villages » dit ceci :
« Les murs de nos villages nous hurlent comme les chiens enragés : Prenez-le, Prenez-le, Prenez-le, Prenez-le le pays Prenez-le dans vos mains Prenez-le dans vos bras dans vos ventres dans vos cœurs Dansez avec le pays »
Le pays a ici une autre signification. Il s’agit aussi bien du mien que de celui qui est natif de Timmins et qui parle français. Dans ce contexte, l’identité ne se fait pas par rapport à l’hérédité mais à la langue et la culture. Autrement dit aucun passeport, aucun discours national ne peut prétendre résoudre la question identitaire du Franco-Ontarien.
C’est une force, cette précarité littéraire, ce microcosme, car il s’ouvre presque naturellement à ceux et celles comme moi qui apportent leur sensibilité de minorité francophone aux origines africaines ou autres. La porosité de l’édifice crée un système de vase communicant et l’écrivain franco-ontarien issu d’une minorité s’identifie facilement à la littérature du vaccum.
Je donnerai un exemple dans la définition des organismes. Si vous prenez L’UNEQ, l’Union des Écrivaines et des Écrivains Québécois. Elle a pour mandat la défense des droits socio-économiques des auteurs et auteures du Québec et la valorisation de la littérature québécoise. Nous pouvons pointer du doigt sur une carte où se situe le Québec. Mais quand on parle de l’Association des auteures et auteurs de l’Ontario français, on ne peut encercler l’endroit précis de l’Ontario français. Cette flexibilité, qui peut être perçue comme une nébulosité pour certains, est une occasion pour toute minorité d’utiliser cet état de fait pour exister.
Depuis 2017, il existe un organisme appelé Mosaïque culturelle à Ottawa. Son mandat est « d’assurer le rayonnement de la culture des communautés afro-descendantes francophones au sein de l’Ontario et créer une plateforme d’échange à travers le Canada francophone et la francophonie internationale. » Cet organisme utilise cette flexibilité pour s’émanciper et voler de ses propres ailes. Par exemple, Mosaïque culturelle est présente au Salon du livre africain de Paris chaque année. Il ne s’agit de s’affranchir d’une tutelle. Il s’agit de se faire porteur d’un message comme un pigeon-voyageur et d’en rapporter un à cette communauté éparpillée qu’est l’Ontario français.
En tant qu’écrivain de l’Ontario français, nous sommes ce que nous voulons être. Aucun politicien ne peut encadrer nos propos, y mettre une teinte idéologique puisque l’Ontario français n’a ni gouvernement, ni ministre de la Culture. Souvent, le ministre de la culture de l’Ontario ne parle pas français.
Maintenant, je donnerai un aperçu de mon expérience pour illustrer la relation toute particulière que j’estime avoir avec la littérature de l’Ontario français. Vers la fin des années 80, j’ai rencontré à la bibliothèque métropolitaine de Toronto, un écrivain en résidence du nom de Paul Savoie à qui j’ai montré mes textes poétiques. Il a été d’une grande gentillesse et d’une grande aide pour le jeune écrivain que j’étais. Il m’a prodigué des conseils. Ce fut l’accueil premier d’un minoritaire par un autre minoritaire. Paul Savoie est au départ un Franco-Manitobain. Ici, il y a déjà une introduction à la générosité de la littérature franco-ontarienne. Quelqu’un qui a bénéficié de cette générosité m’a accueilli au sein de sa famille d’adoption.
Paul Savoie organisa une soirée de poésie et m’invita. Je lus des textes en compagnie de qui ? Jean-Marc Dalpé. C’était en 1987 et il venait de publier sa fameuse pièce de théâtre « Le Chien » qui allait lui valoir le Prix du Gouverneur général. Ensuite, je décide par un concours de circonstance de m’inscrire à l’Université Laurentienne en littérature française. Je tombe dans le cours d’introduction à la littérature d’un certain Fernand Doré, une personnalité phare dans l’émergence de la littérature franco-ontarienne.
Je dirais quelques mots sur lui, juste pour que les lecteurs qui ne savent pas de qui je parle aient une idée du personnage. C’était un professeur de Lettres à l’Université Laurentienne et un auteur également d’essais fort captivants sur la littérature franco-ontarienne. Mais surtout il fut une inspiration pour le mouvement d’émancipation de la littérature en Ontario français. Il est à l’origine de plusieurs mouvements artistiques comme CANO (Coopérative des Artistes du Nouvel-Ontario), de Prise de Parole, maison d’édition née pour exprimer la parole des francophones d’ici. Il participe aussi à la création du TNO, Théâtre du Nouvel-Ontario. Provocateur dans son style d’enseignement, il titillait les étudiants, leur lançait des défis à demi-mots pour voir si nous comprenions la matière et pour communiquer sa passion. Il m’a eu comme étudiant dans plusieurs cours et j’ai pu bénéficier de son savoir et de ses encouragements surtout dans mes articles dans le journal étudiant. Fernand Dorais était jésuite et il venait du Québec.
J’ai également connu Robert Dixon, autre personnalité importante, ce fut aussi mon professeur. Précis, éloquent même, il avait une patience infinie pour expliquer la poésie, surtout la poésie d’ici. Il est l’auteur d’un texte-phare « Au Nord de notre vie ». Ce texte a été repris par le groupe de musique franco-ontarien CANO. Robert Dixon a reçu le prix du Gouverneur général pour « Grand Ciel Bleu Par Ici » en 1997. Robert Dixon était au départ un anglophone. Il avait des parents d’origine hollandaise. Mais il joua un rôle déterminant dans la construction de ce qui est la littérature franco-ontarienne d’aujourd’hui.
Il y en a eu d’autres. Toutes ces personnes m’ont accueilli les bras ouverts car pour eux, la littérature franco-ontarienne est une littérature d’accueil. C’est une des composantes de ce qui fait sa structure. Elle ouvre ses bras et tend l’oreille. C’est une littérature inclusive.
Un individu comme moi a toujours été minoritaire. Je suis né à Montréal mais je suis originaire du Rwanda. Mes parents avaient fui ce pays en 1959 car minoritaires, ils subissaient des vexations qui se transformèrent en tueries jusqu’au génocide de 1994. Dans les pays africains où j’ai grandi, j’étais différent, toujours minoritaire. En revenant au Canada, ça n’a rien changé. Je le suis encore. Donc, j’estime que personnellement, il m’a été facile de comprendre et d’adhérer à la démarche littéraire franco-ontarienne.
Il faut que je souligne que la littérature de la majorité a tendance depuis longtemps à s’accaparer des écrivains de la minorité pour en faire les leurs. Le cas le plus emblématique est Gabrielle Roy. Certes, elle a écrit au Québec mais certains de ses livres parlent du Manitoba, son lieu de naissance et où elle avait grandi. De nos jours, il y a de plus en plus de résistance. Des écrivains comme Jean-Marc Dalpé ou Daniel Poliquin s’affirment davantage comme écrivains franco-ontariens même quand il y a une tentative de récupération de la part de la littérature majoritaire, québécoise dans ce cas. Ceci est un bon signe et je souhaite que cela perdure.
Je vous ai parlé de l’organisme Mosaïque culturelle, je dois aussi dire quelques mots sur une maison d'édition dans la banlieue de Toronto qui vient de fêter ses 5 années d’existence. Elle s’appelle Les éditions Terre d’accueil. Sur sa page de son site Internet, on peut lire ceci comme définition : « Éditeur d’auteurs immigrants au Canada, les Éditions Terre d’Accueil publient, pour tous les groupes d’âges, des œuvres littéraires en accompagnant au mieux ses auteurs dans le processus de publication et de promotion. Elles donnent ainsi une voix aux immigrants canadiens, une voix qui fait résonner leurs réalités auprès des lecteurs francophones. »
D’ailleurs, mon roman « Toronto, je t’aime » est réédité par cette maison d’édition. Je trouve que le nom de cet éditeur « Terre d’accueil » illustre parfaitement mon propos. Il y a de la place pour tous et il ne s'agit pas de remplacer mais de contribuer du mieux qu’on peut à cette littérature du vaccum. Ce qui est remarquable est que parmi le catalogue de cette maison d’édition, il y a un livre sur les aînés de la région du Durham qui s’intitulent « Les visages de la Francophonie » de Durham. Il y a donc un besoin de créer des ponts entre ceux qui nous ont précédés et ceux qui sont en train de poursuivre le développement de cette littérature.
Avant de terminer cette conférence, je vais aborder la contribution de l’écrivain et de l’écrivaine de race noire à la littérature franco-ontarienne.
Depuis qu’Aimé Césaire, Léopold Sédar Senghor et Léon Gontran Damas décidèrent d’utiliser la langue française comme une arme contre l’oppression grâce au mouvement de la négritude, le francophone de race noire a indéniablement plongé sa plume dans une encre quelquefois fielleuse mais surtout sans complexe.
Nous, francophones de race noire, nous nous approprions la langue dans un combat qui reste titanesque car l’ancien colon refuse de reconnaître que nous avons modernisé la parole française, nous l’avons engrossée, inoculée du venin de la vérité sur ce que nous sommes, c’est-à-dire des êtres humains à part entière. Nous sommes aussi très inventifs dans nos textes car nous n’avons de compte à rendre à personne, Aucune chapelle, aucun conclave ne dicte nos mots. Quand on lit Alain Mabanckou ou Fatou Diome, on peut constater qu’ils se permettent d’innover ou d’africaniser cette langue avec beaucoup de goût.
Ramenons le débat dans un contexte francophone de l’Ontario. Les francophones de race noire ou issus de la colonisation sont également dans une contribution innovante. Dans la musique, on peut citer Yao, spécialiste du slam ; il y en a d’autres dans la poésie, Gabriel Osson ou dans la fiction Melchior Mbonimpa. Cela n’enlève rien aux auteurs franco-ontariens qui ont commencé dans la contre-culture et avec la musique du groupe CANO. Ce sont des précurseurs, les Robert Dickson et Jean-Marc Dalpé. Les francophones originaires d’ailleurs, notamment de l’Afrique, se sont joints à leur voix. Ils ont peut-être un autre accent et des préoccupations pas toujours identiques, cependant ils ont indéniablement un point commun : le besoin de dire en français leur vérité, leur hantise et leur rêve.
En ce qui concerne la hantise, le besoin de survivre en français, j’estime que le poète Patrice Desbiens a écrit de beaux textes pour décrire l’oppression anglophone ou encore le malaise de sa propre identité (L’homme invisible/The invisible man, 1981). Si vous prenez la pièce de théâtre « French Town » de Michel Ouellette, il est également question de l’identité difficile à porter d’une famille franco-ontarienne dans le nord. Ou relisez « L’Obomsawin » de Daniel Poliquin et vous constaterez que l’auteur montre le mal-être d’une communauté francophone qui cherche à justifier ses difficultés identitaires en pointant du doigt un bouc-émissaire.
Les écrivains franco-ontariens de race noire ont aussi des plaies non cicatrisées qui façonnent la plume des auteurs noirs. Il y a des plaies urbaines comme la violence policière et la discrimination à l’emploi. L’auteur francophone de race noire ressemble à cet homme noir secouant un chiffon rouge dans le tableau de Théodore Géricault, Le radeau de la Méduse (1818-1819). Il est le plus haut perché, aidé par d’autres naufragés et tente d’attirer l’attention d’un bateau salvateur à l’horizon.
La littérature franco-ontarienne est donc la rencontre des écrivains et écrivaines venus d’univers différents mais qui ont la liberté d’exprimer leurs préoccupations et leurs hantises dans un même vecteur, un creuset ouvert à autrui, un territoire sans véritable frontière infranchissable, plutôt un pays sans passeport. Une littérature porteuse de fraternité universelle. Merci.
Didier Leclair, écrivain
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Il y a quelquefois, très souvent même, disons la plupart du temps, une comédie de l'amour qui vaut pour presque tous les couples. Et ce sur ce point aussi j'ai changé d'avis, beaucoup. La plupart des gens restent ensemble soit parce qu'ensemble on a moins peur, soit parce qu'on vit mieux avec deux salaires qu'un seul, soit à cause des enfants, soit pour beaucoup de raisons qu'on ne tire pas au clair, mais qui témoignent d'un choix, même s'il est irraisonné, et d'une prise de position claire même si elle est difficile, sinon impossible à exprimer.
" Vous ne pouvez pas le comprendre", disent-ils. Ou : " Je ne sais pas moi-même ce qui me fait rester là, mais je ne peux pas faire autrement."
Ce ne sont pas des gens qui s'aiment, ces gens, mais c'est déjà de l'amour qu'il y a entre eux. [...]
Parfois on est horrifié par certains couples : l'homme est grossier, bestial, la femme se plaint à qui veut l'entendre d'endurer un enfer.
On se trompe souvent sur ces couples-là.
C'est le théâtre de l'amour qu'on croit extérieur à l'amour et c'est souvent faux.
Quand Bernard Pivot m'a demandé ce qui m' avait retenue auprès de cet amant chinois, j'ai dit : L'argent. J'aurais pu ajouter : le confort sidérant de l'automobile qui était un véritable salon. Le chauffeur. La libre disposition de l'auto et du chauffeur. L'odeur sexuelle du tussor de soie, de sa peau à lui, l'amant.
Ce sont des mises en condition d'aimer si vous voulez. Je l'ai aimé, après que je l'ai quitté, très exactement sans doute au moment où on m'a parlé du suicide de ce jeune homme, de cette disparition dans la mer. J'ai dû le savoir là, au milieu du voyage.
Je crois que l'amour va toujours de pair avec l'amour, on ne peut pas aimer tout seul de son côté, je n'y crois pas à ça, je ne crois pas aux amours désespérées qu'on vit solitairement.
Il m'aimait tellement que je devais l'en aimer, il me désirait tellement que je devais l'en désirer.
Ce n'est pas possible d'aimer quelqu'un à qui vous ne plaisez pas du tout, que vous ennuyez, totalement, je ne crois pas à ça.
Marguerite Duras, La Vie matérielle.
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Il a peut-être bien raison, Cioran, on se tue toujours trop tard, ç'aurait été extraordinaire, toutes ces années passées dans la sérénité la plus totale, oui, ç'aurait été grand, fabuleux, le paradis et j'ai comme la nostalgie de ces années ratées qu'il aurait fallu ne pas vivre, regret immense de tous ces jours manqués à ma mort, des jours perdus à tourner en rond sans trop savoir, et pourtant le bonheur était là, juste là, mais, par je ne sais quelle idiotie, une sorte d'espoir vil, pas de la lâcheté, non, et c'en est presque du cynisme (si tu savais), la conviction absurde que la vie quelque part, mais la vie n'est nulle part, et on le sait, la vie n'est que dans la tombe, et tous les jours, c'était tellement déconcertant, cette même gesticulation insensée, des grimaces de singe, des déclamations comme au théâtre, et pourtant ça c'était la réalité (ce qu'ils appelaient réalité), mais les gens comme moi, tous ces jours gâtés, on aurait pu tellement, mettre le point final, c'était comme un soleil de plomb sauf que la nuit jamais, et les cris, ah oui, les cris, un amas d'immondices à l'intérieur et moi j'avais la nausée, la nausée, la nausée mais personne, oui, il avait sans doute raison, il aurait mieux valu, les ciels ne crevaient jamais, c'était trop tard, cette langueur impudique parce qu'on n'avait pas pu, une journée au milieu des épaves.
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25 juillet
seule au tempelhofer feld au lieu d'être à la soirée flirt speed dating, j'avais peur que tout le monde ait 22 ans et que je me sente à la ramasse comme hier soir. plus ça va et plus j'envie intensément les couples en couple depuis longtemps qui vivent ensemble dans des apparts bien décorés avec leurs chiens et leurs collections de vinyles et qui partent en vacances ensemble dans des jolies chambres d'hôtel et font de la rando dans la montagne et aussi des road trips et ils ont pas besoin de se sentir coupables parce qu'ils sont pas allés à une soirée speed dating dans un bar queer de neukölln.
j'ai envoyé mon dossier pour le open call cet après-midi, ça m'a pris la moitié de la journée parce que j'ai hésité pendant trois heures avec ce truc de synthé, finalement j'ai laissé tomber parce que je me suis dit que ça me stresserait trop, trop d'incertitudes. ça me laisse un petit goût de regret dans la bouche mais ça m'empêche pas d'essayer ailleurs, dans une soirée open mic par exemple, y a moins d'enjeux et c'est pas grave si ça merde parce que je suis pas payée. c'est peut être plus prudent de débuter comme ça. surtout que j'ai toujours pas de synthé. j'ai passé le reste de la journée à bidouiller des trucs sur garageband au lieu de travailler sur mon livre. je m'en fous d'être une ermite maintenant, d. aussi est un ermite, on passe nos journées à l'appart mais on se voit pas parce qu'on est chacun dans notre chambre. quand je vois personne de la journée je me persuade qu'on m'en veut. par exemple ça fait deux jours que je suis persuadée que n. m'en veut parce qu'elle a dit que la cuisine était sale alors que c'est mon tour de faire le ménage mais comme je l'ai fait sur plusieurs jours entre-temps elle a eu le temps de se resalir. ça me stresse des trucs comme ça parce que j'ai une responsabilité envers les autres et dès que j'ai une responsabilité j'ai peur de mal faire et qu'on m'en veuille. toujours toujours peur qu'on m'en veuille. et puis d'abord je suis pas une ermite puisque je sors tous les soirs.
27 juillet
j'aime bien n'avoir aucun problème de sommeil ici. je viens encore de me lever à onze heures et j'ai aucun mal à m'endormir le soir et je me réveille pas la nuit ni à l'aube, sauf quand quelqu'un est en train d'avoir un orgasme. n. m'a dit que la catalan avait mis quatre jours avant de lui écrire et que son message était tellement sans intérêt qu'elle lui avait même pas répondu. dimanche soir quand on est rentrés du lac elle était d'une humeur massacrante parce qu'elle attendait qu'il lui écrive alors que moi dans ma tête après avoir couché ensemble ils avaient passé la journée ensemble à apprendre à se connaitre en se promenant dans un parc en rigolant beaucoup et puis il l'avait invité à passer la nuit chez lui parce qu'ils voulaient plus se quitter et il lui avait préparé à manger comme dans un téléfilm de tf1 parce que je vis dans ce monde-là moi.
hier soir au lieu d'aller à la dyke march je suis allée voir la soirée de performances de son école de théâtre et dès la première perf quand ils ont chanté hakuna matata déguisés en lions en poussant des cris aigus je me suis dit que la soirée allait être longue. au moins ça m'a donné un élan de motivation pour faire mon show. en comparant ce qu'ils faisaient avec toutes mes petites expériences de scène accumulées au fil des années je me suis sentie totalement légitime. y a eu beaucoup de numéros de chant de gens qui chantaient pas très bien et je trouvais ça trop touchant, j'avais la chair de poule à chaque fois, mais j'ai aussi la chair de poule quand je regarde the voice. ça me bouleverse d'entendre des gens chanter, même mal. je mourrais d'envie d'être à leur place.
une fille a lu un texte archi cringe sur son copain qu'elle aime d'amour mais quand j'ai appris qu'elle avait 18 ans je me suis excusée mentalement de l'avoir jugée. elle m'a dit i don't wanna brag but my boyfriend is kind of a rockstar and he writes songs about me and i write poems about him and for our birthdays we write songs and poems to each other ahhh. elle me faisait penser à une fille bizarre de ma classe que tout le monde détestait et puis un jour elle a fugué et on l'a plus jamais revue. elle disait que le cou des filles la rendaient folle, esthétiquement parlant, et que chez les garçons c'était la nuque, et puis elle a dit "bi, point d'interrogation?" tout ça d'une traite. ça m'a fait penser à moi à 18 ans quand je disais que ma partie préférée du corps des garçons c'était les omoplates et ma partie préférée du corps des filles c'était la clavicule, sans me douter une seconde que je pouvais être bi. (toujours fan des omoplates par contre) à 18 ans j'ai dit à pit que je l'aimais par sms juste avant les grandes vacances et puis j'ai pleuré pendant des jours jusqu'à ce que je parte faire mon stage au festival d'avignon où j'ai découvert le Monde des Artistes. ça fait pile quinze ans cet été! j'ai envie de lui écrire pour lui dire que je suis à berlin, peut être qu'il fait toujours de la musique et qu'il me mènera à des musiciens intéressants.
un type m'a reconnue de l'année dernière mais moi je me rappelais pas de lui et j'ai l'impression d'avoir été particulièrement pas sympa en le disant. comme si j'avais oublié d'utiliser le filtre "être sympa" en lui parlant. c'est pas un gros symptôme de l'autisme ça? en chemin je suis passée devant un endroit de thérapie corporelle/danse qui avait l'air bien mais en allant voir sur le site j'ai vu que c'était 105 euros la séance d'une heure, ou la moitié du prix d'un microkorg d'occasion. comme avec deux séances j'irai pas loin, mieux vaut acheter le microkorg et rester traumatisée. j'en ai parlé à n. et elle m'a dit qu'y avait des jeunes diplômé.es qui proposent des séances pas chères pour s'entrainer mais ça me fait un peu peur, vue l'épaisseur de mon dossier. je lui ai dit i have ptsd when i have to have fun. j'adore cette phrase, elle est trop hardcore. au moment où je l'ai dit on a croisé deux filles blondes à qui elle a dit bonjour ou au revoir je sais pas et donc ça a coupé la discussion en deux et c'était encore plus pathétique. c'est même pas tant have fun que let go en fait, parce que je peux très bien m'amuser en chantant toute seule dans ma chambre par exemple. c'est une histoire de contrôle. après avoir mangé notre sandwich au halloumi elle est retournée à l'école pour la fête et moi je suis rentrée pour aller regarder le replay de la cérémonie des jo. en chemin je me suis arrêtée pour prendre en photo un vieux bar berlinois authentique qui passait les jo sur une télé à l'intérieur et un vieux monsieur aux longs cheveux blancs s'est arrêté pour me laisser prendre ma photo, moi la touriste insupportable, alors je lui ai fait un grand sourire en lui faisant signe qu'il pouvait passer et il s'est dépêché de rentrer et c'était mon interaction préférée de la journée.
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De Emma à Bruce
Cher Bruce,
Oh, Bruce, Bruce, Bruce. Tu n’as pas idée (puisque tu es un journal et que tu ne sors jamais de la maison). J’ai passé la journée avec des Terrestres. Pas seulement des Terrestres. Des touristes. Tout bien considéré, je préfère le manoir hanté et maudit, merci.
La dernière fois que je t’ai écrit, nous avions découvert que le fantôme de Rupert pense qu’un objet ensorcelé se trouve dans cette propriété des Herondale sur Curzon Street ici à Londres. Après ça, nous n’en savons pas plus, ce qui va être un gros problème parce que les lignes de ley sont… tu sais… des lignes, alors les objets peuvent se situer n’importe où sur leur trajectoire. Mais une chose à la fois.
Il s’avère que le National Trust organise des visites de la maison de Curzon Street – et je suppose qu’un ancêtre des Herondale a eu l’intelligence d’enlever, ou au moins de dissimuler avec un puissant charme, tout ce qui faisait un peu trop Nephilim. C’est présenté comme la recréation d’une « maison typique du début du siècle », ce qui est assez proche de la période qui nous intéresse. Alors nous nous sommes déguisés en Terrestres (Julian a trouvé un superbe t-shirt vintage des Sex Pistols dans la Sensas Alcôve de l’Amour d’Arthur et Andrew Blackthorn) et avons acheté des tickets pour la visite de 14h le lendemain.
La visite de la demeure a prouvé que la décoration édouardienne serait plutôt jolie dans une maison moderne ! C’est lumineux et aéré, avec beaucoup de couleurs claires, d’agréables tissus à motifs, etc. Oh, et nous avons aussi compris que ce mouvement est complétement passé au-dessus de la tête de Tatiana, puisque Blackthorn House est tout l’opposé de lumineux et aéré. Julian a fait remarquer qu’elle n’a certainement rien changé après la mort de son père. Rien à voir avec Curzon Street : j’aimais beaucoup son atmosphère, c’était chaleureux. J’ai d’ailleurs pris une photo d’un papier peint pour demander à Tessa si elle se souvient d’où il vient et, euh, s’il est encore en vente peut-être. Que nous arrive-t-il ? Nous rénovons une maison. J’ai pris un coup de vieux.
La visite était sympa dirons-nous. Beaucoup de détails sur les différentes époques, les estampilles, les meubles. Les gens posaient des questions ridicules : un des couples américains a insisté pour savoir où se trouvait le piano et quand la guide a dit désolée, il n’y a pas de piano, ils se sont énervés et ont rétorqué qu’absolument toutes les maisons édouardiennes avaient un piano donc il devait y en avoir un. Elle a dû s’excuser un peu avant de passer à la suite. C’était embarrassant et je n’étais pas fière du peuple de mon pays.
Mais je ne faisais pas vraiment attention à tout ça. La maison était assez plaisante. Des tapis persans partout ! Un échiquier en ivoire ! Une baignoire en étain ! Oh, et il y avait une affiche de théâtre encadrée qui datait de cette époque et c’était évident qu’elle venait d’un cabaret de Créatures Obscures, c’était plutôt cool. Mais le plus important, c’est que rien de tout ça n’avait été ensorcelé par Tatiana.
J’ai passé la majeure partie de la visite à chercher des choses qui indiquaient clairement que des Chasseurs d’Ombres avaient vécu ici. Tout ce que j’ai vu, c’est quelques armes en guise de décoration, ce qui d’après la guide ne se faisait pas à l’époque. Mais bien-sûr, toi et moi, Bruce, nous savons que les armes en guise de décoration, c’est toujours quelque chose qui se fait. Mais comme Julian le dit souvent, parfois nous n’avons même pas besoin de charmes, parce que les Terrestres ne voient pas ce qu’ils ne veulent pas voir. Par exemple, la guide a parlé pendant des heures d’une magnifique sculpture en jadéite sur l’un des manteaux de cheminée et a expliqué que personne ne savait ce qu’elle était censée représenter. Alors que c’était, évidemment, un présentoir pour une épée qui a depuis longtemps disparu.
Enfin bref, nous
Mais attends…
Elle n’a pas disparu depuis longtemps. Je sais où elle est. Elle est sur la coiffeuse de l’autre côté de la pièce. Je la vois depuis mon siège.
J’ai littéralement eu des frissons en remarquant ça. Pendant la visite de la maison tout à l’heure, je pensais aux personnes qui avaient vécu là, James Herondale et Cordelia Carstairs, mais pour être honnête je n’ai ressenti aucun lien, aucune émotion pour eux là-bas. Ça s’explique peut-être par le fait que la maison avait été vidée de tous ses objets très personnels avant qu’elle ne devienne un musée. Mais aussi, simplement… le fait que je ne les connaissais pas. Contrairement à Tessa et Jem, évidemment, et à Magnus aussi, et bon sang, peut-être même à quelques autres sorciers, je ne sais pas. Mais moi, je ne les connaissais pas et je ne pourrais jamais les connaitre.
Mais tu sais qui d’autre les connaissait ? Cortana. J’aurais aimé pouvoir la prendre avec moi à Curzon Street. (Mais noooooon, Julian a décrété que nous ne prendrions que des armes que nous pourrions entièrement dissimuler. Et si la guide avait en fait été une Eidolon prête à nous bondir dessus ? Je l’aurais affrontée avec un couteau de botte plus petit que ce que j’utiliserais pour éplucher une pomme. Ça aurait tout de même été une Eidolon qui en connaissait un rayon sur le mobilier du début du siècle. ENFIN BREF, nous étions là-bas pour trouver un objet, alors reprenons cette histoire.)
Nous étions dans une des chambres et observions les rinceaux sur le lit, peu importe. La guide présentait des objets sur les tables de nuit, et le Détecteur s’est allumé avec un bruit démentiel.
La guide nous a lancé un regard noir. « Eteignez votre téléphone » m’a-t-elle dit, puis le groupe de visiteurs s’est allégrement dirigé vers une autre pièce pendant que je faisais semblant de chercher mon téléphone dans mon sac banane affreusement moche. Jules a pris le Détecteur, qui nous a mené à… une boite à musique sur l’appui de fenêtre. Une boite à musique vraiment laide. Enfin, pas exactement laide. Très surchargée, recouverte de bricoles, bien trop ornementée pour une boite à musique. Il y avait même une figurine de singe. Ça faisait beaucoup. Bref, c’était un parfait exemple du milieu de l’ère victorienne bla bla bla, mais c’était aussi un objet ensorcelé par Tatiana, et peut-être que quelqu’un l’appréciait suffisamment pour aller le chercher et le ramener là ???
Après ça, il nous a suffi d’attendre que les visiteurs s’éloignent pour nous camoufler avec un charme, nous emparer de la boite à musique et sortir discrètement, en espérant qu’aucun des employés n’ait le don de Seconde Vue. Ce n’était pas le cas. Donc maintenant nous avons une boite à musique que nous montrerons à Rupert demain matin et au sujet de laquelle nous interrogerons Tessa. J’espère que ça ne lui appartenait pas à elle ou à sa famille. Je pense qu’elle a de meilleurs goûts.
Voilà, c’est tout pour l’instant, Bruce. Je vais aller chercher Cortana pour que je puisse la toucher en étant dans le lit. Julian me taquine toujours quand je fais ça, mais ce soir ça me semble approprié. A plus tard.
Emma.
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction d’Eurydice Bluenight ©
Illustration de Cassandra Jean ©
Le texte original est à lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/682519835606958080/emma-to-bruce
#emma carstairs#julian blackthorn#cortana#jem carstairs#tessa gray#magnus bane#mundanes#sobh#tsc#the shadowhuter chronicles#cassandra clare#cassandra jean#secrets of blackthorn hall#terrestres#shadowhunters#bruce
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Je vais essayer de résumer rapidement ce qui m'énerve avec les Molières.
Je ne m'attarderai pas sur les blagues de mauvais goût, les gagnant.e.s qui n'ont pas le temps de faire des discours (oui c'est bien pire que pendant les Oscars où les Césars) et donc le manque de prise de position sur l'actualité artistique et politique alors que le théâtre est aujourd'hui un des seuls arts véritablement engagés. Je ne parlerai même pas du caractère ultra-parisien de la cérémonie qui oublie complètement que le théâtre se crée et vit aussi en dehors de Paris. Même les enseignants que j'ai à Nanterre en Master de Théâtre semblent oublier ce point : un de mes profs était choqué d'apprendre que j'avais déjà vu, il y a plus d'un an à Caen, un spectacle qui venait d'arriver à Paris. Non je ne parlerai pas de tout cela même si c'est détestable et que ça mériterait un post.
Je veux m'arrêter sur l'hypocrisie de cette cérémonie. Elle prétend récompenser et célébrer le théâtre et sa diversité mais elle ne fait que renforcer les stéréotypes et le système de domination malsain.
Je passe rapidement sur l'invisibilisation de certains corps de métier comme les dramaturges, les technicien.ne.s, les créateur.ice.s sons et lumières, les coiffeur.se.s, maquilleur.se.s, les costumier.è.s, les créateur.ice.s des décors... La moindre des choses serait de les récompenser, ils font le théâtre autant que les acteur.ice.s. Je passe également sur l'invisibilisation d'arts comme la marionnette et le cabaret qui méritent tout autant leur place dans la cérémonie.
Cette cérémonie ne récompense presque que des hommes et des femmes blanc.he.s (et je dis hommes et femmes en toute connaissance de cause et c'est surtout des hommes qui gagnent dans les catégories mixtes) dont les spectacles sont le plus conventionnels possible aussi bien artistiquement que politiquement. J'adore blaguer sur le manque de subtilité d'Ivo Van Hove mais au moins il essaye de faire dire quelque chose à son théâtre et il crée quelque chose même quand ça foire il essaye. Les spectacles récompensés ne prennent aucun risques et les personnes qui sont récompensées encore moins. La cérémonie qui doit célébrer l'audace et la diversité récompense le conformisme ou le consensuel et quand elle ne le fait pas et qu'elle récompense l'audace, elle récompense toujours les mêmes gens. Ce sont des gens qui le méritent mais ce sont toujours les mêmes. Des hommes et quelques femmes, blanc.he.s, talentueux.ses, important.e.s, mais toujours les mêmes.
Des artistes ultra talentueux et engagés comme Rebecca Chaillon, Mohamed El Kathib ou Adama Diop ne seront JAMAIS récompensés et quand ils le sont c'est pour leurs spectacles les moins engagés. Je pense là à Marcial Di Fonzo Bo qui a gagné son Molière pour son specatcle jeunesse sur Méliès "M comme Méliès" c'est un joli spectacle mais on parle d'un metteur en scène et acteur qui crée des spectacles sur les violences de guerre, sur le traumatisme de la dictature (il est Argentin), sur la situation de la communauté LGBTQIA+ en Amérique du Sud....
Et pour ce qui est de la partie artistique.... Je ne veux pas non plus m'étendre dessus mais même si ce sont des metteur.se.s en scène que j'aime et dont j'aime l'esthétique qui sont parfois nommés dans les spectacle de théâtre public (je ne vais pas ou peu au théâtre privé) je sais que ce ne sont pas les esthétiques les plus inventives. Je les aime mais je suis honnête. Les Molières ne le sont pas.
Cette cérémonie me dégoûte et cette année elle n'a fait que confirmer ce que je pense d'elle.
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Thème #5 (header + avatars) pour Backbone.
Blottis sous l’aile des Reaper’s Crows, San Diego s’anime, s’agite, théâtre de millions de vies qui s’élancent dans toutes les directions. Celle du Ring où se déroulent des combats illégaux résultant en gloire comme en argent. Celle des locaux de The Asso où on panse ses blessures, milite et se soutient mutuellement pour une San Diego meilleure, une San Diego moins criminalisée. Celle des petits malfrats, des gangs, qui labourent de leurs griffes l’Underground, à la recherche de richesses. Celle des motards, celle des corbeaux et du cuir, gardant autant captive que protégée cette ville qui les abrite tous. Celle des gens qui n’ont rien demandé, qui mènent leur vie en louvoyant, s’ils le peuvent, loin de tout ce bordel, dans l’espoir que la phrase “ça n’arrive qu’aux autres” continue de s’appliquer à leur cas.
City basé à San Diego, USA — Contexte entourant un club de motards criminalisés, des combats illégaux et des luttes sociales — forum privé (inscription sur invitations seulement) — 18 ans et + — Forum à avatars réels — aucune contrainte de mots — aucune exigence d'activité — système de TW obligatoire.
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perso à chaque fois que je vais à paris il fait moche il y a plein de monde et j'ai le temps de rien visiter, mais j'adore comment tu en parles ça donne l'impression que ça peut être sympa comme ville. ou en tout cas que tu l'aimes bien.
En fait c'est très particulier. Il fait globalement pas super beau et il y a énormément de monde partout, il faut l'apprivoiser et trouver les endroits à apprécier, mais il y a quelques coins qui sont vraiment des bulles sympas. Mais par exemple je déteste profondément les champs Elysées ou le quartier de l'opéra, qui sont juste hyper remplis de gens, de voitures, de bruits, d'odeur de saleté, et de magasins de grandes chaînes trop chères, et c'est des coins où pourtant beaucoup de touristes vont aller.
La vue du Trocadéro sur la tour Eiffel est magnifique et l'aquarium de paris sous le troca est très sympa, le théâtre Chaillot est génial pour sa programmation de danse, mais à pieds je préfère largement aller quelques rues plus loin autour du petit palais, ou aller au théâtre du rond point. Ou juste me casser de cet arrondissement qui est très nul en balade.
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« Il y avait eu des manifestations presque tous les jours pendant le mois de janvier 1934. (…) Pourtant, l’habitude aidant, on ne pensait pas que le 6 février serait plus grave que d’autres journées. (…)
À onze heures et demie, en sortant du théâtre, un spectacle singulier nous arrêta soudain : à l’horizon, quelque chose de lumineux dansait, au-dessus des têtes, semblait-il. Nous regardions sans comprendre ce feu balancé et noir : c’était un autobus, au Rond-Point, que l’on renversait. Et soudain, comme nous avancions, une foule énorme reflua soudain sur nous, des automobiles chargées de grappes d’hommes et de femmes roulèrent à grands sons de trompe, de vieilles dames se mirent à courir, les jambes à leur cou. Nous comprîmes que ce n’était pas une manifestation, mais une émeute.
Il y avait longtemps que Paris n’avait pas vécu une nuit pareille. Des milliers de gens, cette nuit-là, ne se couchèrent pas, ils erraient dans le vent froid, tout le monde se parlait, les ouvriers, les bourgeois, et des hommes disaient :
– Nous reviendrons demain avec des grenades.
Et il n’y avait plus d’opinions, et les communistes s’accordaient avec les nationalistes, et le matin l’Humanité avait publié un appel pour demander à ses troupes de se joindre aux Anciens Combattants. Une immense espérance naissait dans le sang, l’espérance de la Révolution nationale, cette Révolution dont le vieux Clemenceau avait dit qu’elle était impossible "tant que des bourgeois ne se seraient pas fait tuer place de la Concorde".
Elle se formait à travers cette nuit tragique, où couraient les bruits les plus divers, la démission du Président de la République, l’annonce de centaines de morts, la griserie, la colère, l’inquiétude. Au Weber, les blessés étaient étendus, et Mgr de Luppé, avec ses ornements épiscopaux, venait les bénir. Le couple divin, le Courage et la Peur, comme l’a écrit Drieu la Rochelle qui a si bien senti cette nuit exaltante, s’était reformé et parcourait les rues.
Aujourd’hui, nous pouvons penser que le 6 février fut un bien mauvais complot. Ces troupes bigarrées, jetées dehors sans armes, écoutaient leur seul instinct et non pas un ordre précis. Au centre, où aurait pu se trouver une direction, il n’y avait rien. On saura peut-être plus tard les négociations, les entrevues, auxquelles s’étaient décidés quelques chefs, dans les jours qui avaient précédé, ou ce jour même. Mais la foule les ignorait, et la suite montra bien que tout était vain et mal préparé.
Au matin du 7, Paris lugubre comme nous ne l’avons jamais vu, les marchands de journaux assiégés (beaucoup de feuilles n’avaient pas eu le temps d’adopter une version officielle des événements, donnaient leur première page à la majorité de la Chambre), on apprenait peu à peu la démission du ministère, et, contradictoirement, les perquisitions ou les enquêtes auprès des chefs nationalistes. L’après-midi, comme j’étais seul à Mil neuf cent trente-quatre, Paul Bourget me téléphonait pour me demander s’il était exact que Maurras était arrêté : c’est la seule fois où je l’ai entendu, il avait une voix essoufflée où tremblaient des larmes.
Mais déjà on annonçait l’arrivée du pacificateur, de M. Doumergue, ancien président de la République, dont le sourire était aussi célèbre que celui de Mistinguett. Le régime usait de l’un de ses vieux tours favoris.
C’était fini. Le 9, les communistes essayaient encore de sauver au moins la Révolution sociale. Jacques Doriot, chef du "Rayon communiste de Saint-Denis" lançait sur la gare du Nord de rudes garçons sans peur, qui tombaient sous les balles de la police. Mais déjà la pègre envahissait Paris, le 12 serait sa journée, tout était oublié de l’unanimité sociale et nationale.
Quelques jours plus tard, en ouvrant les journaux, on découvrait qu’à la veille de déposer dans l’affaire Stavisky, un magistrat, M. Prince, était trouvé mort sur une voie de chemin de fer près de Dijon, au lieu-dit de la Combe-aux-Fées. Là encore, il suffit de se reporter au moment même pour se rappeler l’unanime sentiment des Français : M. Prince avait été assassiné. Mais cet assassinat mettait en cause trop de gens, trop de seigneurs du régime. Au bout de quelques jours, on n’y comprenait plus rien, la thèse du suicide paraissait la plus forte, les experts se disputaient, les rapports de police remuaient d’étranges boues, et la mort du malheureux magistrat allait rejoindre dans l’ombre les autres morts mystérieuses de la IIIe République, de Syveton à Almereyda, à Maginot.
De ces querelles énormes, la France sortait irritée, sombre et prête, semblait-il, à toutes les aventures, – y compris les plus belles. Henri Béraud publiait dans Gringoire un admirable article sur "le Fusilleur" Daladier, et les journaux allemands annonçaient : "L’aube du fascisme se lève sur la France."
Pour nous, nous n’avons pas à renier le 6 février. Chaque année nous allons porter des violettes place de la Concorde, devant cette fontaine devenue cénotaphe (un cénotaphe de plus en plus vide), en souvenir de vingt-deux morts. Chaque année la foule diminue, parce que les patriotes français sont oublieux par nature.
Seuls les révolutionnaires ont compris le sens des mythes et des cérémonies. Mais si le 6 fut un mauvais complot, ce fut une instinctive et magnifique révolte, ce fut une nuit de sacrifice, qui reste dans notre souvenir avec son odeur, son vent froid, ses pâles figures courantes, ses groupes humains au bord des trottoirs, son espérance invincible d’une Révolution nationale, la naissance exacte du nationalisme social de notre pays. Qu’importe si, plus tard, tout a été exploité, par la droite et par la gauche, de ce feu brûlant, de ces morts qui ont été purs. On n’empêchera pas ce qui a été d’avoir été. »
Robert Brasillach, Notre avant-guerre, 1941
« 21 mars 1946. Hier nous avons lu à haute voix les poèmes de Robert Brasillach. Tout le monde avait la larme à l’œil. Nous étions écrasés par ces choses prodigieuses, tremblants d’émotion et de rage. Jamais encore, de ma vie, une œuvre poétique avait provoqué en moi pareils tressaillements. Alors, on passe aux autres, à ceux qui ont permis que Robert ne soit plus. Comme il est dit dans Macbeth : tous les parfums d’Arabie ne suffiront pas à laver cette tache de sang. »
« 13 avril 1946. Trois mois et un jour que je suis à Fresnes. (…) Hier les nouveaux jurés, les "bons" jurés qui ont remplacé les méchants des mois révolus ont encore condamné à mort deux policiers dont le crime est d’avoir fait consciencieusement leur devoir. On les y reprendra, les Français, à faire leur devoir, à obéir au gouvernement, être fidèles et loyaux. Puisque désormais, le fin du fin du civisme est de déserter devant l’ennemi ou de s’insurger contre le chef de l’État. Puisqu’on fait juge de mon manque de patriotisme un Ukrainien. Puisqu’on confie à un Letton le soin de rédiger (même pas en français) le monstre qui va servir de constitution à la IVe République. Puisque les tortionnaires du maquis ont décidé une bonne fois pour toutes que les nazis – et seulement les nazis – ont le monopole des tortures. Puisqu’on n’a indulgence et compassion que pour les pourris de la Collaboration, pour ceux qui n’ont marché que pour le tric et qu’on envoie au poteau systématiquement, les purs, les durs, les gonflés, les idéalistes. Puisqu’on flingue Robert Brasillach et qu’on souille les rues de Paris du nom de Mandel. Puisqu’on acclame Marty et qu’on accable les marins qui voulaient conserver une flotte à la France. But who cares ? comme disait Ruth, sophistique. Moi, je m’y intéresse encore un petit peu. Ça serait vexant que mes persécuteurs ne fussent que médiocrement infâmes et modérément imbéciles. Mais ils sont complets. Je les aurais faits sur mesure qu’ils ne seraient pas autrement. »
« 13 juin 1946. Je viens de lire un roman "existentialiste" écrit par la propre femme de l’héroïque M. J.-P. Sartre [Simone de Beauvoir]. Ou plutôt j’en ai lu 200 pages et je n’ai pu aller jusqu’à la 400e et dernière. Comment qu’ils sont ces messieurs-dames des Lettres de la Résistance ! Coucherai-je ? Ne coucherai-je pas ? Coucherai-je complètement ou un petit peu ? Ou sur les bords ? Ça ne te fait rien, surtout, ma chérie, que je couche avec ta petite copine ? Si ça te fait quelque chose, n’hésite pas à me le dire. Moi tu sais ça ne m’amuse pas. Mais la pauvre enfant ça l’aidera à se "réaliser". Et si ça te permet de te "réaliser" tu peux, toi aussi, coucher avec elle. Car le tout est de se "réaliser". Et pour se "réaliser", il faut coucher en long, en large et en travers, à pied, à et cheval et en voiture, dans le métro et sur la tour Eiffel. Etc. Etc. Un pays qui fusille Brasillach et qui met au pinacle une pareille littérature est assuré des plus glorieuses destinées. En somme tout va bien. Bien content de penser que les enfants grandiront loin de l’existentialisme et de ces fier-à-bras tondeurs de femmes. »
« 28 mars 1947. Je reprends ce cahier après des semaines d’interruption. Parce qu’il faut tout de même que j’exprime ma rage quelque part. Parce que tout le reste, je le dis à Fernande tous les jours. Parce que ce soir l’amiral de Laborde arrive à la cellule 77. Parce qu’on a condamné à mort, de sang-froid, sadiquement, sans l’excuse de la passion, un des plus glorieux marins français. Parce qu’on a revêtu ce héros d’une défroque de singe savant et emprisonné ses chevilles dans les fers des réprouvés. Parce que le pays qui tolère ça, qui approuve ça, se situe au-dessous de la plus barbare des tribus canaques. "Mon pays me fait mal", écrivait Robert Brasillach. Lui, du moins, il n’a pas vécu pour voir cette dégringolade dans l’ignominie, dans l’abjection. Le pays lui faisait mal pour bien peu de choses... » « 28 mars 1947. Je reprends ce cahier après des semaines d’interruption. Parce qu’il faut tout de même que j’exprime ma rage quelque part. Parce que tout le reste, je le dis à Fernande tous les jours. Parce que ce soir l’amiral de Laborde arrive à la cellule 77. Parce qu’on a condamné à mort, de sang-froid, sadiquement, sans l’excuse de la passion, un des plus glorieux marins français. Parce qu’on a revêtu ce héros d’une défroque de singe savant et emprisonné ses chevilles dans les fers des réprouvés. Parce que le pays qui tolère ça, qui approuve ça, se situe au-dessous de la plus barbare des tribus canaques. "Mon pays me fait mal", écrivait Robert Brasillach. Lui, du moins, il n’a pas vécu pour voir cette dégringolade dans l’ignominie, dans l’abjection. Le pays lui faisait mal pour bien peu de choses... »
Pierre-Antoine Cousteau
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