#Je veux dire. .. Collectively
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Decided to give in ... Hoarding names now
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La journée commençait bof parce qu'on avait prévu de faire "un truc" aujourd'hui mais on ne savait pas trop quoi, et c'est souvent comme ça que ça commence mal parce que moi je veux bien à peu près n'importe quoi pourvu qu'on passe par un magasin de bouquins ou de jeux, mais l'homme veut absolument visiter qqchose et bien manger et l'ado veut absolument faire les magasins sans être accosté par un vendeur, manger en vitesse et être de retour assez vite du coup ce matin je sentais venir la journée de merde au point que l'ado a failli rester seul à la maison et à la dernière seconde il a vu ce qu'il devait réchauffer pour manger à midi du coup il a décidé de venir, je ne sais pas comment je dois le prendre, mais il devait encore se laver alors on a pris le train suivant mais même celui-là on a failli le rater, ensuite j'ai râlé parce que "vous n'êtes pas foutus de prendre un peu sur vous alors soit je suis avec l'un OU l'autre, soit je passe des journées de merde quand vous êtes là tous les deux mais y a jamais moyen de passer une journée normale à trois, vous êtes deux boulets, bordel" bon ça les a fait réfléchir apparemment et la journée s'est bien passée jusqu'à un certain moment.
On a visité Train World à Schaerbeek, c'était énormissime, l'histoire des trains en Belgique depuis les locomotives à vapeur jusqu'aux années 70/80, des vrais vieux trains dans lesquels on pouvait rentrer, des vieux objets, des anciennes affiches, tout ça tout ça bref l'ado a trouvé ça mieux que ce qu'il pensait (il pensait que c'était un vieux musée poussiéreux avec des miniatures de trains), l'homme était content pcq sa proposition avait plu, et puis on a pris le tram vers le centre-ville, il y avait l'air-co donc génial, on a mangé un petit truc et on s'est baladé en faisant des photos, la Rue Neuve n'est plus que l'ombre d'elle-même mais il y a une chouette dynamique à Anspach, Ste Catherine, Les halles et vers la Grand Place. On est en pleine période des plaisirs d'été du coup il y avait des animations de rue et des acrobates sur la Grand Place. Elliott a reconnu un acrobate d'une troupe de cirque dont il suit l'actualité. Il est rentré dans des magasins, a trouvé sa pointure sur les nouvelles Nike mais a eu la flemme de dépenser ses sous alors il est sorti en râlant bah oui la vie est chère que veux-tu, et après ça il a eu faim, il a été fatigué, il a eu mal aux pieds (tu sens venir le truc où je lui dis que ok je mets la moitié sur les Nike parce qu'il se plaint subitement de ses pieds ?) (jamais de la vie mais bel essai) moi j'ai fini mon film de 72 photos, j'en ai entamé un nouveau et cette fois je n'ai pas mis un Kodak, j'ai mis un lomography avec un effet un peu patiné on verra ce que ça donne mais c'est aussi 72 photos, ça va prendre une blinde pour les faire, j'ai trouvé 5 cartes pour ma collection dans Weward malgré que ça les ennuyait de me suivre dans des rues pour trouver ces cartes et on a mangé un mochi près de la grand place, il était délicieux et j'avais envie de parler japonais au gars du mochi mais j'ai pas osé et pourtant je voyais bien qu'il galérait en français et pourtant je sais commander trois mochis en japonais, comprendre un prix, remercier et dire au revoir du coup j'étais un peu déçue de moi-même. Après on a chacun eu fini nos pellicules et ça tombait bien parce que l'ado commençait à saturer de marcher sans autre but que des photos et des cartes Weward (pour ça il était d'accord avec son père) on a déposé les pellicules au labo, je me suis acheté une dragonne colorée pour mon Pentax 17 et on a repris le train vers la maison. L'ado s'est assoupi 5 minutes sur mon épaule et a décrété que "ah finalement ça va j'étais juste un peu fatigué" et vous avez remarqué comme moi qu'on n'est rentrés ni dans un magasin de livres, ni de jeux.
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J'ai choisi ma robe de mariée et je voulais la commander à la boutique mais franchement la meuf qui s'en occupe ça se voit trop qu'elle me méprise et me prend pour une bouseuse... c'est une créatrice assez haut de gamme de robes (donc hors de prix lol) mais elle a fait une ligne de prêt à porter avec des robes moins chères donc je voulais taper là-dedans parce que j'adore ce qu'elle fait mais déjà pendant les essayages elle était hyper froide avec ma mère et moi, je lui avais donné le nom du modèle que je voulais essayer elle m'avait sorti un truc qui avait rien à voir alors j'ai dit "ah pardon c'est pas celle-ci" elle m'a dit "bah si" sur un ton cassant et moi j'étais là "ben non madame j'ai passé des heures à baver sur la page de la robe sur le site je sais comment elle s'appelle" donc elle a vérifié et j'avais raison mais elle s'est excusée à peine vraiment du bout des lèvres ça se voit trop qu'elle en a raf de la collection prêt à porter mais du coup pourquoi en faire une ptdr si tu veux garder ta clientèle de richou parisien ????????????? bref donc je l'ai appelée pour dire que je voulais commander, elle m'a envoyé un mail avec la facture les CGV tout ça en disant que la fabrication débute lorsque le virement est reçu mais j'ai pas compris si je devais tout payer ou seulement verser un acompte donc j'ai répondu à son mail en demandant ça + un délai indicatif de fabrication si elle peut me le donner et elle m'a pas répondu alors que ça fait une semaine... et j'attends qu'elle réponde parce que bah la somme complète c'est une grosse somme pour moi, même si ça représente genre un quart du prix des robes sur mesure qu'elle fait donc c'est que dalle pour elle, j'ai pas envie de la rappeler parce que quand elle me parle je me sens trop comme une paysanne humiliée par la reine mdr franchement si j'étais pas aussi emballée par la robe j'irai voir ailleurs directos !!!!!
#je suis deg d'ailleurs parce que j'ai essayé la même robe à la boutique d'occasion#la dame était adorable j'aurais trop aimé prendre chez elle mais la robe était trop serrée et elle m'a dit que c'était pas retouchable ouin
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Si je savais dessiner, je ferais Stan et Ford en mode Fraternité Falls (l'AU où ils sont tous les deux d'extrême-gauche).
T'as Ford, qui serait habillé un peu comme dans le canon, parce qu'il a déjà une gueule de coco des années 60/70 (et je dis ça en tant que petite-fille d'un coco des années 60/70) je veux dire, regardez Marchais (à gauche)
Le gars, il a une COLLECTION de cols roulés, de toutes les couleurs (mais surtout rouge) et sans doute des chemises blanches et deux, trois cravates à motifs.
Il a dans les poches tous les tracts des syndics et des antennes du pcf qu'il a faits dans le multiverse, parce que c'est clairement le genre de gars qui débarque dans une planète alien et qui s'insurge "attendez mais vous êtes pas syndiqués ???" et dès qu'il revient en 2012, il accroche un pins PCF et un pins CGT à son manteau.
Et puis, il a une écharpe rouge parce que. Parce que l'écharpe rouge quoi.
Et t'as Stan, habillé comme d'hab quand il bosse, mais qui en civil a encore sa veste en cuir des années 80, qui craque de partout, et sa veste en jean avec le plus de pins possible de groupes, de slogans genre ça
(Mabel voit ça et lui offre de nouveaux pins plus "in")
Et pour traîner à la maison, les vieux tee-shirts qui vont avec, genre le tee-shirt des Béruriers noirs.
#fraternité falls#je les vois tellement#gravity falls#ford et stan s'échangent des pins#c'est un appel à l'aide pitié que quelqu'un les dessine
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Salut ! D'habitude, je blogue en anglais, mais je viens tout juste de terminer ce livre en français, et je dois ABSOLUMENT en parler.
Le voilà :
Nous Sommes la Poussière, de Plume D. Serves. Photo prise ici avec la recommandation de Les Mots A La Bouche, la librairie queer à Paris. C'est pas là où je l'ai acheté d'ailleurs, mais dans Le Nuage Vert, librairie fantastique à Paris, car Paris est grande et a des magasins spécialisés comme ça (je viens de la campagne, pour moi, c'est du nouveau). J'avais demandé des livres queer des écrivains français (Les Mots A La Bouche) et des livres des écrivains français qui parlent des minorités, surtout queer ou handicapés (Le Nuage Vert), car je lis presque exclusivement en anglais, et je ne sais pas comment trouver le genre de livre que je cherche en autres langues, bien que je sache qu'ils existent de super choses.
Et ce livre-là, il était TELLEMENT BIEN, je ne peux pas dire.
La madame de Le Nuage Vert me l'a vendu comme science-fiction très léger, mais je trouve que c'est mieux décrit comme du réalisme magique. L'idée est qu'il y a cette condition qui fait matérialiser autour des gens un nuage des particules de poussière électromagnétiques, ce qui évidemment va impacter la qualité de vie. Ce qu'est pire, c'est tous les stigmas sociétaux qui viennent avec. En fait, c'est un handicap et traité comme un. Le personnage principal est une jeune femme diagnostiquée assez tard, qui vécut toutes ces discriminations, et s'engage dans de l'activisme pour les combattre. Elle est aussi lesbienne.
Et ce livre, il parle DE TOUT. Je n'ai jamais vu la monde dans laquelle j'existe représentée comme ça avant.
Il parle des difficultés de recevoir une diagnose, le sentiment de voir ta vie se passer sans toi, les différentes difficultés des gens qui sont diagnostiqués comme adultes vs comme enfants, le privilège de "passer", la discrimination que font face les couples handicapés qui veulent des enfants, les difficultés d'organiser un mouvement activiste, activisme violent vs non-violent, la médecine alternative, les difficultés qu'ont les parents à se faire croire si leur enfant a un handicap invisible, l'intersectionnalité des identités marginalisées et comment la société les criminalise... Je ne balgue pas, je pourrais encore continuer avec les sujet auquel il touche.
C'est super clair que l'écrivaine a des expériences personnelles dans ce milieu (son bio dit qu'elle est militante autiste et queer, et c'est vrai qu'on reconnait la communauté autiste dans celle des magnophiles). Je ne suis pas de tout, mais pas de toute une personne à faire des notes dans un livre, mais ici, j'ai passé toute la lecture à vouloir souligner des passages que OUI, REGARDEZ, C'EST EXACTEMENT COMME CA ! (Évidemment, je ne l'ai pas fait. Je ne prends pas de notes dans des livres.)
Aussi, j'aime bien le style de l'écriture. C'est assez léger comme structure, comme ce sont des chapitres courts interrompues de textes encore plus courts dans la première et deuxième personne, qui donnent voix à l'inventeur des mailles qu'ils forcent les gens à porter et a au moins deux personnes anonymes qui sont aussi en train d'essayer de vivre avec leur handicap (ou bien une personne différente chaque chapitre, ce n'est pas vraiment clair). C'est super, parce que ça aide beaucoup avec l'immersion et donne le sentiment qu'on parle d'une vraie communauté de gens, et aussi, ça permet de temps à se passer entre les chapitres. Donc la narrative est plus une collection de petits moments de la vie d'Elias, au lieu d'une narrative stricte qui progresse de A à B à C et puis c'est fini. C'est un bon choix, que rend le tout beaucoup plus réaliste.
En bref, c'est un super livre que je recommande fort de lire à tout le monde. Surtout si tu es un peu dans ce milieu de l'activisme qui se bat pour les droits de minorités. Ou si tu veux lire un bon livre d'un écrivain français.
#ce n'est pas la revue la plus claire comme je viens juste de finir la lecture#et j'ai toujours besoin d'un peu de temps pour sortir de l'euphorie de l'histoire#mais je peux déjà dire que ce sera un livre que je vais beaucoup recommander si je reçois l'opportunité#Nous Sommes la Poussière#Plume D. Severs#Écrivains français#Livres français#Recommandation de livre#Livres#Réalisme Magique#livres queer#livres avec des personnages handicapées
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WHAT REMAINS DESIGN (1/?)
Trouver l'inspiration et le ton
Ok alors, un peu de passif : avant que @frenchandfurious vienne me dire "j'ai encore envie de post apo puis TLOU arrive", on s'est amusée pendant 2/3 mois sur un projet de SF. Projet pour lequel j'avais déjà une maquette déjà bien avancée (que je posterais un jour). Donc faut me sortir un peu le nez des belles images spatiale et d'un thème sombre pour un univers désolé/abandonné.
Image pour une bannière ou un fond
Avant même de savoir sur quel genre graphique je vais partir, Margot me fait une collection d'image issu de Unsplash qui donneront le ton. On a toutes les deux la flemme de faire une bannière élaborée et moi je jure que par les design de forum avec une image simple.
Idée de structure
Après, on cherche des inspirations en web design. Moi je regarde ce qu'il se fait du côté de TLOU (UI du jeu, site concept...) et Margot plutôt du côté de Hunger Games, notamment du côté du studio Waston DG qui a toujours été une énoooorme source d'inspiration.
On se donne des indications et on dessine des trucs d'enfant de 8 ans qui découvrent l'anatomie du corps humain.
Il s'agit pas de copier exactement. C'est repérer des petits élément d'interface qui pourraient fonctionner sur Forumactif : une barre de lien rapide, boutons de connexion, PA, ...
Inspiration de forum
Margot fait le tour des forums aussi, voir ce qu'il se fait, ce qui marche bien ou non, des idées à reprendre (on a pas pour ambition de réinventer la roue).
On fait attention de tout sauvegarder, au passage. Si une idée nous plait réellement, on veut pouvoir demander aux créateurs si c'est ok et créditer plus tard.
Style graphique
De mon côté je précise mes idées. Je commence à accepter mon obsession pour le brutalisme et l'anti-design et par chance, c'est des styles qui irait très bien à un univers post-apo. Je veux à tout prix éviter de tomber dans le style grunge qui serait l'option facile mais veillotte.
Premières bases
Je me fixe sur une image (celle-ci à un côté abstrait tout en évoquant la nature et une sorte de moisissure, très dans le thème). Je bidouille des trucs avec la seule idée en tête que je veux quelque chose d'épuré (par flemmardise).
L'album ENSWBL de Foals a un mood parfait pour le contexte alors je m'amuse avec le titre de l'album. Puis d'un coup, pendant qu'elle m'observe sur figma (on peut stalk les gens bosser sur ce truc, a bless and curse), Margot me dit "C'EST BIEN CA".
Jusqu'à la fin de la maquettage, la deuxième bannière sera celle utilisé 💀 non centré, pas travaillé, mais eh y a l'idée.
Et c'est assez pour commencer ce que je déteste le plus : les catégories.
WHAT REMAINS
A noter : je fais ça seulement pour partager mon processus de conception (un peu overkill et loin d'être parfait). J'essaye juste de désacralisé un peu l'idée qu'on se fait des designs et partager quelques pistes de réflexion ❤
#what remains#templates#code#forumactif#forum code#french rpg#rpg français#skin#portfolio#blank theme
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Bilan de mon "pré-blocus" :
- j'ai dépensé bcp bcp bcp de sous
J'ai acheté : animal crossing, l'abonnement switch online, des nouvelles boucles d'oreilles, une paire de birk, bcp de sous-vêtements, deux tickets de trains aller-retour pour bx, tickets de tram (pcq ça me stress de frauder), des billets d'avions pour Dublin
- j'ai envoyé la partie théorique de mon mémoire à ma promotrice et j'avais trop l'impression d'avoir 12 ans et d'avoir envoyé un message pour dire à mon crush que je l'aimais j'étais giga stressée. Après je me dis que si j'envoie pas j'aurai pas de retours et je pourrais donc pas améliorer mon travail (je me fais violence là). Elle a aussi dit qu'on pouvait arrêter la collecte de données pour commencer les analyses mais jsp quelles analyses faire hihihihihi
- mes copines (uniquement J en fait) me met la pression avec E pour qu'on ait une discussion pcq moi je veux rien de sérieux et lui il est giga in love (il m'a offert des fleurs à notre 3e date) (après peut-on lui jeter la pierre je suis un être exceptionnel) et du coup pour notre date d'hier bah j'étais pas trop dans le mood pcq jsp j'étais tracassée je suppose bref on a tjr pas eu de discussion à la base moi j'en ressens pas le besoin mais comme J me renvoie une image négative de mes actions je me sens mal
- on va bientôt aller voir Aub à Dublin j'ai si hâte
- J'ai eu un gros coup de mou vis-à-vis d'A car j'ai vu sa sœur, sa grand-mère et son père dans la même journée et ouch mon ancienne vie, mon ancienne famille
- j'ai cassé le rétro de la voiture de ma mère et on a passé l'aprem a essayer de le changer (on a réussit)
- j'envisage de changer d'univ l'année pro (ça m'excite et me stress en même temps)
- je suis un peu mélancolique/nostalgique en cette fin d'année scolaire et fin de parcours universitaire là c'est une page qui se tourne je pense d'autant plus que depuis le début de mes années à l'univ j'étais avec A j'ai tjr connu que ça et là c'est ma dernière année et il fait plus partie de ma vie c'est un peu étrange
- fin du mois ma sœur aurait eu 20ans j'en reviens pas je me demande quelle genre de personne elle serait devenue j'ai envie de me dire que j'aurai été fière d'elle ça me brise un peu le cœur
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26 novembre
jour 4 du futur navigable et fertile mmh qu'est-ce que j'ai fait aujourd'hui? hier je me suis couchée à trois heures du matin parce que je me suis perdue dans mon journal du lycée à la recherche des cochons et de yannick mais c'est surtout mes jérémiades sans fin sur p. que j'ai trouvées et elle sont insupportables à lire. j'avais envie de me pousser violemment et de me dire mais vas-y PARLE-LUI BORDEL. ça aurait pu se passer tellement différemment. j'aurais pu être amie avec lui et avec d. et sécher les cours avec eux pour aller à tous les concerts d'indie rock des alentours au lieu de toujours y traîner f. but it didn't. j'avais envie de me pousser mais en même temps je me rappelle exactement de ce que je ressentais, de comment je voyais les choses, je me rappelle très bien du mur entre moi et le monde, entre moi et ce que je veux. je mentionne aussi un rdv chez une psy où je suis allée qu'une seule fois et qui m'avait dit comme tous les autres que j'étais pas d'une nature timide à la base et je me dis que peut être que je finirai par être une vieille extravertie et que ça me servira bien pour me faire facilement des amis quand on en aura besoin pour survivre collectivement à l'apocalypse en 2060.
cet après-midi après m'être plongée dans mon passé puis celui de n. (j'ai commencé son livre ce matin, un jour à berlin elle m'avait dit you're so weird. but in a good away! et vu ce qu'elle raconte dans son livre, je comprends pourquoi elle me trouve bizarre), je me suis plongée dans le passé de r. sans vraiment en avoir l'intention, j'écoutais le groupe dans lequel il joue pour voir si c'était bien et puis je me suis retrouvée à regarder des lives de 2014 où il était tout bébé et tout fou mais il est toujours tout fou, ils jouaient à l'ab et c'était en janvier et j'ai pas pu m'empêcher de comparer à mon janvier 2014 en crise absolue à paris, prête à abandonner mes études pour me laisser glisser dans ce qui allait devenir La Situation. et puis j'ai regardé des clips de son ancien groupe, des clips vraiment cool réalisés par une fille qui est suivie par toutes la lesbosphère francophone d'instagram et je me suis de nouveau dit mais qu'est-ce que t'as fabriqué pendant toutes ces années lara? dans un des clips il danse sur le toit d'un immeuble et puis il danse sur un chantier il danse mais il DANSE et je lui enviais sa liberté, sa façon d'être sans retenue, d'exploser dans tous les sens comme un feu d'artifice ou une chanson d'animal collective. la joie qu'il dégage aussi.
c'est une joie contagieuse parce que vers le soir je suis descendue dans la cuisine et j'y ai trouvée maman qui jurait en faisant claquer les casseroles mais elle avait allumé la radio qui passait du jazz joyeux et ça faisait un décalage bizarre, alors je suis discrètement remontée dans ma chambre et j'ai mis france musique pour continuer à écouter le jazz joyeux et j'ai commencé à danser, je dansais tellement fort que j'ai du poser mon pull parce que j'étais en nage. et puis j'ai commencé à trop me regarder dans la glace et à être prise de dégoût par mon corps, mon corps que je déteste de toutes mes forces parce que je me prive de sucre depuis un mois et rien ne change et je le déteste de me faire ça, ça me remplit de colère, je suis remplie de colère contre mon corps, et donc mon corps est en colère contre lui-même, ou je suis en colère contre moi-même, ou mon corps est en colère contre moi?? je sais pas, dans tous les cas y a beaucoup de colère. et puis j'ai arrêté de danser parce que j'étais démoralisée.
27 novembre
hier soir j'ai enfin regardé split que j'avais hautement anticipée mais j'avais visiblement oublié que ça restait une série france télévision et donc c'était un peu nul et j'étais un peu déçue. non seulement c'était filmé comme une série france télévision mais en plus c'était plus un manifeste qu'une série, on aurait dit que la série servait de prétexte pour dire et montrer des trucs qui sont très peu ou jamais représentés dans les médias, et évidemment que c'est très bien de faire ça, mais ça suffit pas pour faire une bonne oeuvre de fiction, je pense, sorry iris brey. en plus les actrices jouaient mal. voilà donc j'étais déçue et ça a pas du tout réussi à me détourner de mon chemin hétérosexuel comme ce que la série m'avait promis, mais y a tout de même une scène qui m'a marquée. on y voit le personnage joué par jehnny beth dire à alma jodorowsky qu'elle pas l'habitude, quand alma pose ses bagues pour s'apprêter à la pénétrer, mais elle dit qu'elle en a envie donc elle la laisse faire et on dirait qu'elle jouit, mais après elle se met à pleurer et puis le perso d'alma lui demande si elle pense que c'est à cause de son viol quand elle avait douze ans qu'elle est devenue lesbienne, parce qu'elle dit qu'elle a jamais couché avec un homme, mais je sais plus si c'est la même scène. ce matin dans la salle de bain quand j'ai changé ma serviette j'y ai repensé et j'avais envie de lui demander si elle non plus elle mettait jamais de tampons.
jour 5 de mon futur FERTILE ET NAVIGABLE JE VAIS ÊTRE PUBLIÉE DANS LA REVUE SABIR!!!! j'y croyais absolument pas parce que je me disais que mon texte était pas assez expérimental master de création littéraire, et puis si. j'ai crié de joie en réalisant que c'était pas un mail de refus. je l'ai dit à personne sauf à a. ce soir. elle m'a dit qu'elle voulait écrire une comédie musicale mais que c'était vraiment dur et je lui racontais à quel point c'était compliqué et technique un synthé et elle me racontait à quel point c'était compliqué et technique de chanter et on se demandait toutes les deux pourquoi la musique avait autant de pouvoir. à un moment le proprio du bar qui était turc et qui parlait très peu français s'est incrusté à notre table pour discuter et au bout d'un moment il a fait remarquer que j'étais dans la lune et il arrêtait pas de dire elle pense à un monsieur! et ça m'agaçait donc je devais faire la grimace et a. rigolait parce qu'elle me prend pour une lesbienne mais la vérité c'est que j'y pense 24/24 et le fait que j'écoute que des chansons qu'il m'a conseillées ou que j'ai glanées dans ses stories n'arrange pas les choses. je suis rentrée à pied en dansant sur deerhoof dans le noir parce que j'étais contente.
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Intervention de Caroline Melon en tant que grand témoin, aux côtés de Gabi Dolff-Bonekämper, historienne de l'art et du patrimoine à l'Université de Berlin, Jo Speigel, homme politique français et ancien maire de Kingersheim, Cécile Renouard, présidente du Campus de la Transition et Raphaël Besson, directeur de Villes Innovations, pour la clôture de la Rencontre nationale des départements pour la culture organisée par Culture•co 1er décembre 23 à L'Envolée - Pôle artistique du Val Briard (77)
Je vais parler de mon endroit, subjectif, parcellaire, sensible et sans doute totalement lacunaire et différent de plein d'autres personnes ici, mais bon, c'est à moi qu'on a donné la parole, tant pis pour vous ;)
Je vais sans doute dire plein d'évidences et de poncifs, je vais pour sûr être caricaturale et schématique.
Comme toujours, mon ressenti ne sera sans doute qu'une grande part de projection de moi-même dans la situation.
Je suis très heureuse d'avour participé à ces trois jours, j'ai fait plein de chouettes rencontres.
Des personnes impliquées, curieuses, avec une envie forte de progresser, un sentiment d'impuissance face à la catastrophe écologique en cours, mais avec une volonté puissante d'apprendre et de trouver des solutions, et une vraie confiance dans l'intelligence collective.
J'ai entendu un président de la communauté de communes hyper engagé sur la nécessité de la présence du théâtre, et ça faisait du bien.
J'ai perçu dans un discours l'expression "public éloigné de la culture", et à l'heure des droits culturels ça me semble bizarre qu'on puisse encore dire cela.
J'ai eu la sensation qu'on était dans un endroit pour prendre le temps de la réflexion, mais qu'on devait toujours aller très très vite dans les interventions, et que parfois cela réduisait la pensée à des phrases pleines de mots-valises empêchant un peu la complexité, même si le foisonnement était par ailleurs extrêmement nourricier.
J'ai entendu le mot transition 2518 fois. Je suis de celles qui croient qu'il faut cesser avec ce vocabulaire de "transition" parce que l'effondrement de la biodiversité avance plus vite que notre capacité à changer notre vocabulaire et à regarder enfin la situation en face.
Ou alors complètement modifier notre lexique, en lien avec Latour ou Damasio pour parvenir à parler d'abondance, de génerosité (et de je ne sais plus quels sont les termes de Damasio mais peut-être quelqu'un s'en souvient), mais en tout cas ne pas rester sur le gué entre deux sémantiques frileuses, à l'heure où la situation est bouillante.
J'étais heureuse d'apprendre que le conseil d'état s'était élevé contre les appels à projets. La personne qui en a parlé a dit que depuis qu'elle avait découvert ce texte, elle le photocopiait et le distribuait à tous ses interlocuteurices. Si il est encore là, j'en veux bien 10 exemplaires, s'il te plaît. Les appels à projet sont une des composantes capitalistes les plus mortifères et symboliques de notre système.
J'ai observé, un peu saisie à vrai dire, la fausse nature reconstituée de l'endroit où on nous étions logés, à Center Park, ces bouleaux plantés parfaitement dans cette parfaite mousse rapportée d'une vraie forêt ou poussée en serre, et cela m'a plongée dans des abimes de réflexion quant à la nécessité de recréer une nature factice enfermée dans des barrières, alors que de vrais bois tout simples se trouvent sur le chemin d'à côté.
J'ai remarqué que l'écriture inclusive avait été très souvent oubliée, sauf étonnamment dans certaines prises de parole des femmes. Je propose que pour équilibrer, la prochaine Rencontre des départements, l'an prochain se fasse en féminin neutre.
J'ai noté qu'une fois de plus nous étions une écrasante majorité de Blanc.he.s dans la salle, mais que la personne qui faisait le ménage à notre départ le soir était Noire, comme toujours, et je me suis demandé quand nous nous donnerons les moyens de mettre un terme à cette violence.
J'étais soulagée, pour de vrai, ça m'a soulagée de voir cet anneau de Moebius dans la tribune d'hier, vous savez ce signe de l'infini, montrer que si l'on prend soin du vivant, on réduit les inégalités sociales et inversement. Et c'était bon de voir "prouvée" la nécessité de la conjugaison de justice sociale et de la protection du vivant.
J'ai été intéressée par une remarque un peu ironique disant que depuis 30 ans les politiques environnementales étaient toujours "expérimentales" et que cela montrait à quel point elles n'étaient toujours pas ancrées dans le domaine public.
J'ai été heureuse d'apprendre lors de la première plénière, grâce à un téléphone resté connecté à l'écran de fond de scène, qu'Alinéa proposait des offres à 40% ce week-end, mais j'ai été un peu déçue de ne pas pouvoir lire le sms d'Eric Fourreau qui était en train d'arriver sur ce même écran.
J'ai appris une nouvelle expression à la mode (chez les ados, tous les parents le savent, en ce moment le monde est soit satisfaisant soit gênant), ici chez nous les moins jeunes, on pense en "silo". C'est aussi le titre d'un roman dystopique de science-fiction assez sombre, et je me suis demandée ce que ça disait de notre contexte.
Pour finir, je me suis retrouvée à me demander comment c'était possible de voir autant de personnes engagées, impliquées, pleines de convictions, de pensées liées au bien commun, au service public dans tout ce qu'il a de plus noble, et en même temps de se dire qu'on n'avait pas encore vraiment de prospective claire sur "ce qu'il fallait faire" à part nos multiples cumuls de bonnes pratiques individuelles.
J'ai présumé que c'était parfois le "système" collectivité, dans sa lourdeur et ses empêchements qui rognait doucement les marges de manoeuvre de chacun.e, ses ardeurs et ses fulgurances pour changer le monde, et je me suis mise à espérer que toutes ces énergies présentes ici se retrouvent fédérées, que chaque personne se donne la place, la responsabilité, l'audace et le droit d'agir de manière forte au sein de la collectivité, et j'ai eu envie de vous dire, parce que ma place d'artiste est précisément l'incarnation d'une parole subjective, intime, située et assumée en tant que telle, avec ses forces et ses fragilités, j'ai eu envie de vous dire, en toute candeur, sans aucune condescendance, sans conviction d'être dans le juste, mais simplement parce que le fait que je sois un point de vue "extérieur" me permet de le voir, comme une amie qui soutient un ou une proche, dont on espère qu'iel le fera pour soi plus tard,
Allez-y, expérimentez, prenez des mesures fortes liées à l'abondance de la terre que l'on n'a pas envie de perdre, tranchez dans le lard, brandissez vos convictions haut et fort, et soyez droit et droite dans vos bottes aux endroits de colère, d'espoir et d'énergie dont les départments, et les autres personnes et structures présentes ici, peuvent être porteurs et leviers, et donnez-vous le droit, élu.e.s et technicien.ne.s, de porter exactement la politique publique que vous avez envie de voir exister.
(Photos : Bertrand Guigou)
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Whisky
(Le musicien fantôme, épisode 5 – parce que l’occasion fait le larron)
Ca, c’est ce qui s’appelle une gueule de bois.
La lumière qui se faufile par le hublot est proprement insupportable et ma tête se joint à mon estomac pour maudire l’imbécile qui a trouvé judicieux de leur infliger trois (quatre ?) verres de whisky après une demi-bouteille de rhum, c’est-à-dire moi.
La couchette tangue un peu et pas seulement à cause de mon état. Manifestement, le vent s’est enfin levé et nous nous sommes remis en route, après trois jours de calme plat. Je devrais m’en réjouir mais, moi qui n’ai pas eu à me plaindre du mal de mer jusqu’à présent, je redoute le moment où je devrai me mettre debout.
Il est donc plutôt opportun que je ne puisse bouger, du moins sans réveiller l’homme à moitié couché sur moi. Je dois dire que le capitaine Álvarez – Esteban – est nettement moins intimidant endormi. J’irais presque jusqu’à le déclarer adorable, avec ses longs cils sombres et ses cheveux libérés de son habituel catogan, si l’effet n’était quelque peu gâché par ses ronflements.
Un long grognement les remplace lorsqu’il ouvre un œil. Il pousse un juron monumental en me voyant et bondit presque hors de sa couchette. Ce n’est pas exactement la réaction que j’espérais.
Mais alors…Oh, mon Dieu ! Je croyais que… Enfin, il m’avait semblé…
Je passe en revue mes souvenirs de la nuit précédente, pour comprendre comment j’ai pu commettre une telle erreur de jugement. La fête pour tromper l’ennui et la nervosité des marins, que l’absence de vent mettait à cran. Le succès – escompté – de mon nouveau répertoire festif auprès de l’équipage, qui m’a tapé dans le dos et abreuvé de rhum. L’étonnement non dissimulé du capitaine. Je ne me rappelle pas ses mots exacts, parce que j’étais déjà un peu ivre, et lui aussi, mais si je résume ses propos : j’étais un homme plein de surprises, toutefois il était plus intéressé par mes compositions personnelles et il m’invitait à lui en jouer quelques-unes dans sa cabine où il me promettait une bouteille d’excellent whisky. Je ne prétends pas être coutumier du fait mais, tout de même, quelques invitations de gentlemen à venir « admirer leur collection d’art » m’ont appris à reconnaitre un sous-entendu !
Du moins je le pensais. A la façon hâtive dont Álvarez se rhabille en évitant soigneusement mon regard, il est évident que je me suis trompé. Et que j’ai vu dans nos longues conversations de ces derniers jours un attrait pour ma personne là où il n’y avait qu’un intérêt sincère pour la musique.
Après le deuxième verre de whisky, mes souvenirs sont flous, bien que plaisants – ce dont j’ai honte à présent que je comprends qu’il était trop saoul pour savoir ce qu’il faisait.
« Je ne savais pas… ça n’aurait pas dû arriver… ». A ma tentative d’explication, ses doigts se crispent encore davantage sur le ceinturon qu’il est en train de boucler. La plus élémentaire décence me semble de ne pas lui imposer ma présence plus longtemps. Je me rhabille le plus vite possible, luttant contre une nausée qui n’est pas due qu’à l’excès d’alcool.
Il ne me reste plus qu’à me terrer dans ma cabine jusqu’à la fin du voyage, si toutefois il accepte de le mener à terme.
La main sur la poignée de la porte, je murmure : « Je suis désolé ».
« Quoi ? »
Je me retourne et il me regarde enfin, l’air abasourdi. « Comment ça, tu es désolé ? C’est moi qui ai abusé de la situation. Tu avais clairement trop bu et… »
Nul doute que, plus tard, je trouverai le quiproquo amusant. Pour l’instant, je ressens surtout un immense soulagement.
« Tu n’étais pas exactement sobre non plus. »
« Jusqu’au whisky, ça allait. Je veux dire : je savais ce que je faisais quand je t’ai invité dans ma cabine. »
« Et je savais ce que je faisais quand j’ai accepté. »
« Oh. Bon. Bon. Je… Tant mieux. J’ai cru que, peut-être… »
Il est encore plus adorable embarrassé qu’endormi. Je ne résiste pas à l’envie de le taquiner :
« Que j’étais aussi naïf que j’en ai l’air ? Tu n’étais pas particulièrement subtil. »
Il hausse les épaules. « Je ne savais pas trop comment m’y prendre. Je ne fais pas dans le gentilhomme, d’habitude. »
Un peu cavalier, mais je ne peux décidément pas en tenir rigueur à un homme qui parvient à rester séduisant malgré les signes d’une gueule de bois qui doit valoir la mienne.
« Et tu comptes réitérer l’expérience ? » Puisque la subtilité est depuis longtemps passée par-dessus bord, autant y aller franchement.
Il a un sourire en coin. « De ce que je me souviens, ça mériterait une deuxième audition, à jeun. »
Et il se croit spirituel, en plus.
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DVDvision - La Collection Épisode 3
L'histoire de DVDvision vol.1 continue ! Et voici l'épisode 3 de la série, quand le magazine commence enfin à prendre forme !
La couverture A de DVDvision 3 initialement prévue.
Numéro 3 - Février 2000 -
100 pages
Editeur : Seven Sept
Directrice de publication : Véronique Poirier
Rédacteur en chef : David Fakrikian
Rédacteurs principaux : Yannick Dahan, Christophe Lemaire, Stéphane Lacombe, Jean Sébastien Decamp, Fathi Beddiar, Benjamin Rozovas, Rafik Djoumi, Patrick Nadjar, Nicolas Rioult, François Jamin.
Sommaire : La trilogie Die Hard, le premier Matrix sous influences, Charlie Chaplin, Fantomas, Clair de Lune.
DVD : Collector Matrix / Die Hard, conception par Christelle Gibout.
Notes : Le numéro qui nous a fait faire un grand pas vers la formule idéale du magazine. On y retrouve, sous une forme ou une autre, les bases et graphismes de toutes les rubriques qui feront l'identité de DVDvision tout au long de son existence, même si rédactionellement, le contenu est loin d'être abouti.
Fort du succès des ventes, l'éditeur Seven Sept décide de poursuivre l'aventure. Eh oui, DVDvision se serait arrêté au n°2 (le 3ème en comptant le hors-série James Bond 007), si les ventes n'avaient pas été au rendez-vous ! Suite au non renouvellement de contrat "terminated" de l'équipe graphiste précédente, nous avons droit à un véritable défilé de candidats à la direction artistique au cours du mois de janvier 2000, mais sans parvenir à trouver la personne adéquate.
Seven Sept m'allège d'une grande partie du travail, en embauchant Christelle Gibout pour s'occuper du DVD offert dans chaque numéro. Christelle est historiquement après moi la deuxième salariée du magazine. Tout à coup, il n'y a plus un seul bureau dans le couloir devant les toilettes de Seven Sept, mais deux. Et je dois dire que ça fait du bien. Tout d'abord parce-que c'est plus agréable d'avoir une belle blonde en face de soi plutôt qu'un mur toute la journée, mais aussi, parce-que c'est la première d'une longue série de collaboratrices intelligentes, efficaces et compétentes dans l'histoire de DVDvision, qui va rapidement devenir un magazine avec un fort pourcentage de femmes à des postes-clefs, chose que certains lecteurs me reprocheront souvent par courrier interposé.
La valse des candidats continue, sans qu'on trouve chaussure à notre pied, et nous finissons par dire oui à un directeur artistique par défaut, alors que le temps pour maquetter le magazine arrive a terme (il reste à peine 10 jours avant de boucler), et qu'il n'y a plus le choix.
Suite à l'entretien final avec ce D.A., un dernier candidat se présente dans nos bureaux sans prévenir, à 17h30. Il a entendu dire qu'on cherchait un D.A., mais là, c'est trop tard. On lui dit, mais il insiste. Tout d'abord, avec Véronique, on a envie de le reconduire, mais je me dis que peut-être... qui sait ? Au pire, on perd 20 minutes. On accepte donc de le recevoir. Son nom est Philippe Lambert, et son pitch nous séduit tellement, que nous déchirons sur le champ le contrat du directeur artistique précédent (qui n'aura donc jamais travaillé sur le magazine !), et commençons de suite le lendemain avec Philippe Lambert la course contre la montre, à peine une semaine avant la date limite !
Bien que son passage ait été court sur DVDvision, le rôle qu'a joué Philippe Lambert dans le lancement du magazine a été déterminant : c'est le premier graphiste qui comprend où je veux en venir, et matérialise ce que j'ai en tête, professionnellement et sans fioritures. Tout en faisant d'excellentes suggestions, fort de son expérience... De plus, il amène une autre collaboratrice, Paola Boileau (fidèle de Christophe Gans depuis l'époque Starfix, et directrice artistique du magazine HK), pour l'assister dans son travail. L'ADN de Starfix et HK, par ricochet, s'injecte dans le magazine, qui prend aussitôt une tout autre tenue, plus proche de ce que j'avais en tête au départ.
Cette combinaison de talents va payer, même si nous allons être pris par le temps. Ce numéro est en effet conçu et maquetté du lundi, au mardi de la semaine suivante, week-end inclus ! Et puisque je suis atteint de James Cameronite aiguë, j'ai en plus décidé d'augmenter la pagination à 100 pages, et de passer au dos carré, pour simplifier les choses ! On décide aussi avec l'éditeur d'insérer le DVD à l'intérieur du magazine, et de ne pas le cellophaner, ce qui permet de le feuilleter avant de l'acheter, une décision qui va faire monter encore plus les ventes (et éviter les problèmes comme avec le numéro précédent, où des gens ont cru acheter le film La fin des temps pour 5,95 €).
La couverture B finale, intervertie avec la A en dernière minute.
In extremis, Véronique suggère de changer la couverture, peinte par Joel Casano (HK), et de remplacer Carrie-Anne Moss, initialement prévue, par une photo de Keanu Reeves qui était à l'origine située en page 73, pour le sommaire du cahier multi-media. On a un gros débat sur le sujet, puisque clairement, Carrie-Anne Moss est le mec dans le film, et Véronique tout comme moi, aurait préféré la garder elle en couverture. Mais Véronique a le feeling que le public va plus répondre présent si Keanu est en couve, (c'est après tout, le héros principal du film). La couverture originale se trouve du coup déplacée page 73, où était la couve finale avant !
La suite va lui donner raison. A sa sortie, ce numéro, (qui comprend dans son DVD un making-of de Die Hard 3 truffé de scènes coupées, et toujours inédit à ce jour, mais dont vous pouvez revoir un condensé sur notre chaîne YouTube), explose tous les records de vente précédents, montant à 32 000 exemplaires vendus sur les 50 000 du tirage ! C'est 64% de ventes, là ou les journaux se vendent au mieux à 35%, et montent au maximum à 60%, uniquement quand par exemple Grace Kelly meurt et fait la couverture de Paris Match. Je ne sais pas si vous imaginez, mais c'est le genre de truc qui est absolument impossible sur un nouveau magazine. Et toute la profession, qui nous prenait jusque là pour des fous, (parce-que à ce moment-là, le DVD est encore regardé par tout le monde comme un marché de niche pour les geeks comme le Laserdisc, et qu'ils pensent tous que "jamais ça ne remplacera la VHS parce-que ça n'enregistre pas"), commence tout à coup à nous prendre TRÈS au sérieux...
La citation de ce numéro : "Ça commence a ressembler à un magazine !" (David Martinez - Février 2000)
copyright © David Fakrikian 2006-2008 / DVDvision.fr
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Forspoken. Le jeu qui a trop dit "Fuck". *
Forspoken a été accueilli dans un marasme d’indifférence, de notes moyennes voire médiocres, le tout un peu saupoudré de mini shitstorm éphémère. Un développeur du jeu a bien voulu répondre à quelques questions de Jeux Incompris Magazine. Il parut évident à notre testeur qu’il y avait anguille sous roche autour de cette sortie et, surtout, la façon dont le jeu a été vendu. Laissons donc la parole au seul membre de l’équipe qui hésite encore entre démissionner ou se pendre.
Jeux incompris magazine : Bonjour M. le développeur de Forspoken. Comment allez-vous ?
M. le développeur de Forspoken : A votre avis ?
J.I.M : Je vois. Avant de mettre fin à vos jours, pouvez-vous nous pitcher votre jeu ? Mais le vrai pitch s’il vous plaît, pas le faux marketing basé sur le mystère et le non spoil à la con (vous savez, cette communication qui cherche à dire sans dévoiler, et qui fait plus de mal qu’autre chose à des jeux comme le vôtre…). Surtout au point où vous en êtes !
MLDDF : Forspoken est l’Origin Story d’une superhéroïne nommée Frey. Elle est une SDF New Yorkaise qui s’est construite toute seule. Donc son horizon personnel et ce qui la définit se résument à peu de choses. Un petit appartement abandonné (un « refuge »), quelques livres contant l’histoire de personnes propulsées dans un monde imaginaire, son chat à qui elle s’adresse sans arrêt. Et une aspiration à s’échapper de sa vie « de merde », comme elle le dira souvent.
Etant donné que dans les histoires de super-héros, ce sont les faiblesses du protagoniste qui vont définir les piliers de l’histoire et de son évolution, Frey est égoïste (ou plutôt disons absolument « non-altruiste »), incrédule, vulgaire ; et obsédée par le fait de juger au jour le jour l’endroit où elle se trouve afin de décider, comme une sans-abri, s’il vaut la peine de rester « ici ». Ce seront les fils conducteurs. Ses « thèmes » de superhéroïne, si vous voulez.
J.I.M : Il est très surprenant de vous entendre parler d’ « Origin Story » et de « Superhéroïne ». Comment cela se fait-il que pas un mot n’ait été dévoilé quant à cet aspect qui, lorsqu’on termine le jeu, est clairement la facette principale de Forspoken ?
MLDDF : Vous savez, ce projet a de nombreuses années. Nous commencions à avoir cette idée à l’époque où la Terre entière nous détestait déjà à cause du fait que les restes de l’annulation de Versus XIII nous soient tombés dessus. A cette époque, la mode était aux superhéros. Marvel cartonnait au cinéma, les jeux Batman montraient que des adaptations de superhéros pouvaient être bonnes. Et Square Enix était encore dans sa logique de conquérir l’Ouest, avec Crystal Dynamics et Eidos. Malheureusement, l’opération de damage control lunaire et foireuse qu’a été Final Fantasy XV est passée en priorité, malgré les envies de suicides au sein de notre équipe. Imaginez : vous vous retrouvez avec le cadavre du Final Fantasy le plus attendu depuis plus de 10 ans sur les bras, et le Monde entier vous déteste pour ça avant même que vous n’esquissiez le moindre geste. FFXV est finalement sorti, une partie de l’équipe a pratiqué l’immolation collective autour d'un portrait de Testuya-sensei, et on nous a mis une cible sur la tête. Hajime a quitté le bateau ; ce qu’il restait de l’équipe a pu se remettre sur le projet Athia.
J.I.M : L’éclaircie poignait à l’horizon, au bout du compte. Je veux dire, enfin vous pouviez repasser sur votre projet qui n’était pas une commande ni une suite de franchise. Qu’est-ce qui s’est passé ensuite ?
MLDDF : La suite vient d’un problème que nous avons chez Square Enix.
Deux écoles s'affrontent au sein de notre hiérarchie. Certains sont ouverts aux projets un peu borderlines et avec une vraie identité. Ce sont eux qui donnent le feu vert à des développements comme projet Athia, Diofield Chronicles ou, il y a des années de cela, des tentatives comme Last Remnant.
Et l’autre tendance dans la boîte, c’est l’équipe « pépouzes, only pépouzes » ; ceux-là souhaitent conquérir l’Ouest, vous savez, comme cette souris, Cortex, qui toutes les nuits fomente un nouveau plan nul pour conquérir le Monde. L’ennui c’est que ces mêmes personnes mesurent les tendances du net au jour le jour, comme un météorologue souhaite étudier le changement climatique mais n’a comme seule méthode que son doigt mouillé pour sentir le vent. Ils ont pris pour habitude de couper au dernier moment le budget et les délais de jeux risqués, et ordonnent au marketing de les faire disparaître des radars quelques semaines avant leurs sorties.
Comment tout cela s’est traduit pour nous ? Quand la mode des jeux services est arrivée, Square Enix a sauté dedans des deux pieds. Et comme en plus, la hype autour des superhéros était arrivée à son paroxysme, alors cela a donné Marvel’s Avengers, par Crystal Dynamics. Et tout cela n’est qu’une affaire qui se joue à deux ans près. Alors que Projet Athia était aux ¾ de son développement, Square Enix devenait la risée de la galaxie avec Marvel’s Avengers, et se voyait obligé de dire adieu à son catalogue de jeux occidentaux en revendant Crystal Dynamics et Eidos.
Dès lors, il n’était plus question de dire que notre jeu racontait l’Origin Story de, peut-être, la première vraie superhéroïne directement née en jeu vidéo. N'oublions pas qu'au même moment, le MCU avait du mal à redémarrer après avoir conclu son premier grand cycle ; et Arkham Knights, la suite des jeux Batman, démontrait que tout avait peut-être été dit à ce sujet… "Superhéros" passait de mot magique à mot interdit. Surtout chez nous, à cause de Marvel’s Avengers.
J.I.M : Et Sony dans tout ça ? Forspoken était un fer de lance pour sa politique d’exclusivité, non ?
MLDDF : Cela a constitué un autre boulet dans notre processus.
Vu que nos dirigeants vendraient leur père et leur mère à Sony à la moindre occasion (conquérir l’Occident ok, mais pactiser pour des exclusivités plus prometteuses que Last Remnant au concurrent américain, ils ne sont pas prêts en fait), le contrat d’exclusivité a été sécurisé alors que le jeu était encore à l’état de prototype. Or, notre approche de l’open world et le commentaire sur le jeu vidéo que constitue son écriture et certains choix risqués de game design ne sont arrivés qu’après. Le problème, c’est que les exclusivités AAA de Sony doivent toujours répondre à certains standards de ton, de qualité finale et de gamedesign formatés afin de maximiser les notes et les ventes.
Concilier tout cela avec les deux auteurs américains qui ont collaboré sur le jeu a entraîné une nouvelle vague de suicide dans l’équipe.
J.I.M : Et il y a Spider Man…
MLDDF : Exactement. Sony possède la licence du super héros le plus bankable de l’Histoire, qui n’a que faire des modes et des cycles de popularité auprès du public. Le jeu d’Insomniac a d’ailleurs réussi à faire démarrer une franchise pérenne, assez déconnectée, en fait, de ce qu’on pourrait appeler la « mode ». Alors quand notre prototype s’est transformé en un autre départ de franchise de super héros exclusif à Playstation… Les choses ont commencé à mal tourner. Il n’y avait pas de place pour notre jeu, tout simplement.
Et si vous voulez qu’on parle du dernier clou dans notre cercueil…
J.I.M : Je n’osais pas en parler. Vous pensez vraiment que…
MLDDF : Bien sûr.
J.I.M : J’avoue que là ce n’était vraiment pas de chance. Comme si l’univers ne voulait pas de vous. MLDDF : Je ne vous le fais pas dire. Le premier jeu Sonic potable en plus de quinze ans, et il vient empiéter sur nos plates bandes... Avec sa map désolée et minérale, et son personnage lâché là-dedans doté de ses super déplacements pour égrener des activités génériques. L’allumette alors que nous étions déjà morts trois fois, noyés dans une piscine d’essence, vous voyez ?
J.I.M : Et surtout avec une opération marketing fomentée de longue date. On parle quand-même de deux films et d'un merchandising digne de Star Wars.
MLDDF : Vous avez compris.
J.I.M : Arrêtons de tirer sur votre pauvre ambulance, et entrons dans le vif du sujet. Vous parliez de choix risqués et d’une approche borderline.
MLDDF : Tout d’abord, il faut partir de notre vision de départ. Dompter cette usine à gaz innommable qu’est le Luminous Engine nous a amenés aux conclusions suivantes. Le moteur est très performant pour quatre choses : rendre visuellement de grands espaces ponctués par des excroissances géologiques, détailler des vêtements au style fantasy mais avec un rendu très réaliste et très détaillé, modéliser des architectures abandonnées de très grande échelle ; et enfin vous mettre une race en pleine gueule pour les effets de pouvoirs basés sur des éléments tels que l’eau, le feu, etc… De là est né un prototype où l’on voyait des bribes d’un Monde désolé et déserté par toute vie, simplement peuplé de factions au style vestimentaire fantaisiste et parcouru par un personnage féminin dont les déplacements tiraient partie de l’échelle des espaces, ainsi que de la physique que ce moteur arrive plutôt bien à gérer.
Quand l’exclusivité a été sécurisé par Sony, Amy Hennig a été contactée pour travailler sur un scénario usant ces éléments à bon escient. Comme je l’ai dit précédemment, à cette époque la hype des superhéros battait son plein, tous médias confondus. L’idée est apparue évidente : nouvelle franchise, donc nouvelle superhéroïne. Premier épisode, donc Origin Story. De notre point de vue, tout cela coulait de source.
J.I.M : C'est bien beau tout ça, mais l’open world et les choix risqués de game design alors ?
MLDDF : Tout découle de ce que je viens d’expliquer. Frey est une superhéroïne qui, d’abord, doit trouver sa motivation et dompter ses pouvoirs. Amy Hennig, rompue à l’écriture de jeux vidéos depuis plus de trente ans, y a vu l’occasion de questionner les codes du AAA moderne organisé en open world.
Frey n’aime pas Athia, elle ne souhaite pas y rester parce qu’elle ne s’y sent pas chez elle. Alors pourquoi ne pas envisager une histoire d’une quinzaine d’heures aspirant le joueur vers la « vérité », et au bout de laquelle notre héroïne est devenue « super » ; puis, dans cette optique de personnage nouvellement doté de superpouvoirs à dompter, laisser les activités annexes disséminées sur la map pour « l’après » Origin Story ?
J.I.M : Vous parlez de cette conclusion qui arrive très tôt, où Frey se tient en haut de cette tour et dis face caméra « ça en fait du terrain à parcourir et à nettoyer...» ( cf « …des restes de dangers causés par la Brume (la menace du jeu) », NDLR)
MLDDF : Exactement. Chaque superhéros a sa ville où maintenir la paix. D’où le titre du chapitre dédié au postgame d’ailleurs : « Maintien de la paix ».
Quand Frey arrive à Athia, c’est en citoyenne moyenne et impuissante (même si elle vient d’un autre Monde, mais nous y reviendrons plus tard) qu’elle découvre une terre en état de, et ce sont les mots de Frey, « vrai bordel ». En ce sens, il était important que tous les points d’intérêts et toutes ces « choses » à faire existent, grouillent de part et d’autre de son cheminement dès le début de l’aventure. C’est tout le travail qui l’attend une fois devenue superhéroïne.
Athia, c’est la New York de Spider Man, la Gotham de Batman. Eux aussi, avant de devenir ce qu’ils sont, arpentent en tant que citoyen ordinaire une terre où pullulent la criminalité et les problèmes à résoudre. Ils en sont d’abord témoins, puis y reviennent avec une nouvelle optique : celle du justicier.
J.I.M : L’optique de Frey, justement, parlons-en.
MLDDF : C’est là tout l’enjeu. Amy a estimé qu’en 2022, l’heure n’était plus aux héros ou héroïnes motivés dès la découverte de leur pouvoir — et même avant —, par un sens inné et gratuit de la justice. Les récents films Batman on suffisamment fait le tour de la question. Pendant que Batman se débat, adaptation après adaptation, avec ses dilemmes de justice indépendante et se voit condamné à prouver en vain qu’il n’est pas fasciste, nous avons décidé de faire de Frey une superhéroïne plus badass, terre-à-terre et ordinaire que ça : elle ne voit pas l’intérêt de défendre Athia tant qu’elle ne s’y sent chez elle. C’est profondément égoïste, et c’est ce qui rend le personnage beau à nos yeux.
L’un des premiers évènements du plot, est le fait qu’elle souhaite venger la mort d’une petite fille d’Athia qu’elle connaît à peine. C’est la raison pour laquelle elle décide d’aller tuer Tanta Sila. Or, une fois ceci accompli, elle n’en tire aucune satisfaction. Et décide de n’avoir plus pour objectif que le fait de repartir.
Nous voulions une superhéroïne montrant qu’il n’est pas nécessaire d’être altruiste pour faire le bien. On peut le faire pour des tas de raisons. En 2023, il n’est plus d’actualité de clamer « Faites le bien, parce que c’est bien », mais plutôt « faites le bien pour la raison qui est la vôtre, en accord avec ce que vous êtes. » Frey, de par son histoire personnelle, a besoin de se trouver des attaches et se sentir chez elle en Athia pour décider d’y rester et de mettre à contribution son pouvoir. Elle en a parfaitement le droit !
J.I.M : Justement, cette notion de "superhéroïne qui n’a que faire des autres". Comment l’avez-vous traduit ? Athia n’est pas très peuplée, mais elle l’est quand-même.
MLDDF : On arrive sur l’un des choix les plus mal perçus. Frey est une New Yorkaise moderne qui arrive dans un Monde arriéré. En littérature, cela se serait traduit par un contraste entre le personnage principal et les autochtones au niveau du langage et des capacités de raisonnements . Dans un film de cinéma, il y aurait eu les costumes, le jeu d’acteur, le rythme des répliques.
Et dans un jeu vidéo, il nous a paru pertinent de marquer la différence moderne/arriéré par ce qui saute le plus aux yeux dans notre média : l’évolution technique et les stratégies de game design. En ce sens, quoi de plus normal que de faire se confronter Frey à des personnages que l’on croirait issus d’anciens JRPG, tant en termes d’animation, de modélisation, jusqu’à même la façon de mettre en scène les interactions et les dialogues avec ces derniers ?
J.I.M : Vous poussez un peu là. Vous voulez dire que le résultat est aussi uncanny et cringe… par un fait exprès ?
MLDDF : Rien n’est tout blanc ni tout noir dans un développement, vous savez. On nous a donne les moyens de rendre le personnage de Frey par Performance Capture ; puis des coupes dans le budget (parce que la hiérarchie ne croyait plus en la pertinence de notre projet) nous ont empêchés de le faire pour tous les autres personnages du jeu... Nous savions alors que sous-traiter les autres PNJ et les animer à la main allait entraîner un contraste difficile à justifier… Sauf par cette raison-là. Frey est une Alice de Jeu vidéo projetée dans un Pays des Merveilles arriéré de jeu vidéo. D’où ces PNJ et ces interactions d’un autre âge.
Ce qui vous met sur la piste est l’enchaînement très haché des situations quand Frey arrive à Cipal. Jusqu’à cette évasion d’une cellule de prison, passage obligé de n’importe quel JRPG grande époque. La séquence d’évasion est archaïque, ridicule et innocemment mise en scène. Comme le ferait une saga comme Tales.
Et n'oubliez pas le commentaire que fait Frey, lors du second passage à New York, sur la pauvreté graphique de Cipal. Ceci achève de vous signifier que vous avez entre les mains un jeu qui a conscience de "lui-même."
J.I.M : Il n’empêche qu’il y a tous ces fondus au noir pour les transitions entre séquences. Ce qui fait vraiment peu dynamique et parfois presque bâclé. Ils rappelleraient des procédés de — par exemple — Persona 5. Ce n’est pas un mal. Mais il y a quand-mêmes des coupes brutales qui, même si elles n’impactent pas la compréhension du récit, donnent l’impression qu’il manque des séquences ou que cela a pu être assemblé, disons-là, à l’arrache…
MLDDF : Il y a là la confluence de deux choses qui n’auraient pas dû coexister. Il y a notre volonté de faire très vieux JRPG au niveau des transitions de plans et d’animations des dialogues une fois Frey arrivée en Athia. Au passage, vous remarquerez que lors des deux séquences où elle se trouve à New York, les transitions sont instantanées, propres, sans fondus et rythmées de manières satisfaisantes. Ce n’est pas du Naugthy Dog, mais le constraste est évident avec l’arrivée à Athia. Le problème, c’est que le récit a été amputé voire remanié à plein d’endroits par la volonté de l’éditeur : il fallait retirer tous les bouts qui suggéraient de manière trop explicite que Frey était une superhéroïne en devenir. Ce qui a multiplié les coupes et les fondus au noir. Voilà qui a foutu en l’air le parti pris initial, où ces transitions à l’ancienne sur une direction artistique de AAA réalistes étaient vraiment dosées et censées signifier quelque chose.
Heureusement, il reste la cape comme pièce majeure d’équipement pour démontrer de manière irréfutable que Frey a quelque chose à voir avec une superhéroïne… (NDLR : et la musique, qui est un thème de superhéroïne s’enrichissant au fil de l’histoire. Classique.)
Pour revenir à ce sentiment assez négligé, débraillé que peut transmettre le récit, ses coupes brouillonnes, le nom terre-à-terre des chapitres… Même à ce degré de développement tourmenté, nous estimions que cela fonctionnait encore. Dans ce type d’histoires, l’univers, l’aventure : il faut que cela ressemble à l’héroïne. Frey est simpliste, vulgaire, désordonnée. Vous voyez l’idée ? Les quatre provinces d’Athia, cette map, c’est Frey aussi : désespérément ordinaires en début d’aventure, puis délivrant leur vrai potentiel en postgame.
J.I.M : Revenons aux PNJ. L’ennui avec cette approche, ces quêtes secondaires inintéressantes et stéréotypées… c’est que ça n’incite pas le joueur à s’attacher aux PNJ, ni ne lui donne envie d’intéragir avec eux. C’en est même désagréable.
MLDDF : Certes. Vous n’avez pas envie d’accéder aux requêtes nulles de ces personnages non joueurs nuls. Vous êtes, à ce moment-là, en total accord avec votre personnage.
Frey n’est pas altruiste, elle ne voit pas de raisons d’aider les autres. Elle veut juste partir. Ces PNJ qu’elle ne veut pas aider, ces terres grouillantes d’un trop grand nombre de choses à « clean », au point où vous n’avez qu’envie de suivre la balise de l’histoire principale sans regarder ni à droite ni à gauche… Vous êtes en phase avec Frey. Puis elle s’accomplit au bout d’un cheminement de 15h. Et là, la perspective change.
J.I.M : Et ce gameplay alors. Critiqué lui aussi pour sa simplicité, l’absence de système de build et de combos convaincants. Et un gamedesign plus basé sur le surnombre de mobs plutôt que des rixes stratégiques.
MLDDF : Cela fait aussi partie des détails que nous avons voulu garder en cohérence avec le reste.
Dans Forspoken, vous n’êtes pas en train de perfectionner un personnage de JRPG. Vous incarnez une superhéroïne qui cherche à maîtriser sa puissance.
Nous avons donc designé le système de façon à transmettre l’idée selon laquelle Frey « éveille » son pouvoir au fur et à mesure. Un système de build n’aurait aucun sens ici. Frey découvre son pouvoir, et va devoir le dompter. Et quoi de mieux que des vagues d’ennemis pour mettre cela en valeur, plutôt que des combats puzzles ou un système d’expérience et de build classique ?
Vous noterez en plus que nous avons implémenté un système d’amélioration des sorts, et cela passe par le fait que Frey s’améliore en lisant des livres dans les refuges. Dans notre scénario, il s’agit d’un vrai éveil personnel.
J.I.M : D’où ce postgame. La superhéroïne qui s’en va soigner ces terres de toutes les hordes d’ennemis qu’il reste à éradiquer, nettoyer ces ruines à explorer afin de faire reculer la « Brume ».
MLDDF : Et c’est aussi à partir de là que nous offrons un fantasme nourrit par beaucoup de gens… Enfin, nous semblait-il en tout cas. Jouer un superhéros surpuissant qui s’en va éradiquer le mal dans un monde ouvert. L’appropriation de l’espace ultime, si vous préférez, sans contrainte ni contrepartie.
Avec ce postgame, vous verrez que plus vous nettoierez des points d’intérêts, plus Frey sera puissante, plus ses déplacements gagneront en spectaculaire et en fluidité ; et donc, plus vous arrivez vite au point suivant pour défaire les hordes d’ennemis avec toujours plus d’efficacité et de satisfaction.
Au bout d’un moment, vous aurez le jeu Superman dont les gens rêvent, mais qui n’a jamais été réalisé pour des raisons évidentes : quel est l’intérêt d’incarner le héros ultime, indestructible et qui dispose déjà de toute sa puissance à sa naissance ? Avec Forpoken nous vous offrons cette possibilité, mais en fin de boucle et après l’Origin Story que constitue le scénario.
A cela, s'ajoute ce lore. Naïf, simpliste au premier abord. Il vous surprendra vraiment par son originalité, sa profondeur ; par les archives et les peintures que vous découvrirez dans cette phase d'exploration à postériori.
A partir du moment où Frey se sent chez elle en Athia, alors elle va s'intéresser à son Histoire. Tout comme vous, elle n'a montré que peu d'intérêt à tout cela au cours de la campagne. Beaucoup de ses commentaires vont dans ce sens. De lignes du type "Ce qui est arrivé à ces gens est triste, mais ça montre encore plus à quel point cet endroit craint. Vivement que je rentre à New York", on passera, à chaque découverte de drame du passé, aux répliques d'empathie classique de l'héroïne préoccupée par le Monde qu'elle souhaite défendre : son nouveau "chez soi".
Pour le reste, vous découvrirez rapidement à quel point notre map est travaillée pour vous offrir des séquences de gameplay et des parcours très étudiés qui se révèleront. C’est un deuxième jeu qui s’offre à vous, en réalité. Et nous avions besoin que vous « méprisiez » tout cela durant les premières heures, puis que le potentiel vous apparaisse dans un deuxième temps, exactement comme et quand nous le voulions.
Quand les gens ont découvert la première vraie vidéo montrant Frey se déplaçant telle Wonder Woman dans ces grands espaces, tous se sont posés la question du prétexte à cela. Qu’est-ce qui pourrait justifier et rendre satisfaisant de faire se déplacer de cette manière un personnage dans ce type de paysages "vides" ?
J.I.M : Une réponse que vous venez d'exposer, mais que la campagne de communication n'a jamais donnée…
MLDDF : Comme mon travail consistait à modéliser les chats dans le jeu, je n’ai jamais assisté aux réunions entre mes supérieurs et le marketing. Donc toutes les questions autour du chemin médiatique du jeu sont des suppositions de ma part. Mais une chose est sûre. A partir du moment où l’idée a été de cacher qu’il s’agissait d’un jeu de superhéroïne, c’était terminé. Ce jeu ne fonctionne pas si vous n'avez pas cette information.
A votre avis pourquoi le titre du jeu a-t-il été dévoilé si tardivement ? Si vous souhaitez faire monter la hype autour d’un jeu, vous devez marteler le net, faire que tous connaissent son nom, son logo, le visage de son héroïne.
Regardez Hogwart Legacy, à propos duquel tous les sites et youtubeurs font une news par jour depuis deux mois.
Maintenant, tentons quelque chose. Imaginez la campagne suivante pour notre jeu :
D’abord la vision de Frey virevoltant en Athia, et l’exécution de quelques pouvoirs.
Puis, dans un second temps de la campagne, vous dévoilez qu’il s’agit de l’Origin Story d’une nouvelle superhéroïne. Mais vraiment, vous prononcez ce mot-clé.
Dans un troisième temps, comme le font Rockstar ou autres machines de guerres, vous faites des showcase qui expliquent de façon intelligible et claire les enjeux de votre histoire : une superhéroïne dont les motivations sont modernes, badass. Qui ne souhaite pas rester en Athia, puis qui finit par s’y sentir chez elle. Vous dites que votre jeu aura une structure qui prend le game à contre-courant : une Origin Story comme scénario court, concis, qui va droit au but. Et ce, avant de vous lâcher le contenu d’open world qui s’offre à vous selon la perspective suivante : l’opportunité de jouer une superhéroïne qui va nettoyer sa Terre du Mal. Ce dans un dispositif de bac à sable surpuissant, sans compromis : dompter vos pouvoirs et vous approprier ces terres par des déplacements jouissifs. Et, soyons fous, dans l’un des showcase, vous expliquez (avec une vidéo disons satyrique ou auto-parodique) en quoi votre jeu allie écriture US et japonaise par ce choc entre ce personnage moderne, motion capturé, et ces PNJ de JRPG à la technique archaïque et datée. Vous saupoudrez cette idée des nombreuses répliques qui font de Frey une héroïne unique et qui reste authentique en toutes circonstances : « Ce n’est pas aider ces gens que je veux, c’est partir d’ici » ; « Chez moi c’était pourri, mais ici ça l’est encore plus » ; « On aurait pas quelque chose d’intéressant à faire pour une fois ? » Vous faites comprendre que l'une des forces du jeu réside dans le commentaire qu'il s'adresse à lui-même ainsi qu'au média jeu vidéo.
Il y aurait eu matière à vendre un vrai projet à contre-courant, intrigant et qui donne envie aux gens de découvrir un départ de franchise questionnant frontalement les codes. Il y a un public pour ce jeu, j'en suis persuadé.
J.I.M : Vous le pensez vraiment ?
MLDDF : Square Enix pense que non, mais ce public existe.
Ils croient qu’il y a d’un côté le public de God of War, The Last of Us et Red Dead Redemption 2, et sur la rive opposée, le public de Persona 5 et de la trilogie Xenoblade. Et ils refusent de penser qu’il existe toute une frange qui aime autant aller tuer en masse sur fond d’écriture « mature » à l’américaine que suivre durant 100 heures un lycéen qui parle avec un chat caché dans son sac d’école (chat qui reluque et fait souvent des commentaires très limites sur le boule de la jolie fille du groupe).
Avec cette logique à la noix, un jeu comme le nôtre fait complètement perdre les pédales à notre service marketing et nos décisionnaires. Une direction artistique photoréaliste, une héroïne new yorkaise ; et à côté de ça, un récit basé sur le destin qui aspire vers un « tunnel » principal, le chat comme symbole du compagnon fidèle, etc… Risquer de parler à la fois à ces deux publics, (et notre jeu était une occasion extraordinairement intéressante de le faire) quitte à essuyer quelques plâtres pour un premier essai et s’améliorer pour la suite — après tout, quelle franchise a démarré par un premier opus irréprochable ? — : impossible pour nos décisionnaires.
J.I.M : Vous pensez vraiment que, pour toutes les raisons que vous énumérez depuis le début, l’idée a été de faire disparaître votre jeu ?
MLDDF : « Forspoken ». Tout est là. Répétez-le à voix haute. Vous voulez que votre jeu passe inaperçu et n’intéresse personne ? Vous lui collez ce titre qui n’évoque rien. Vous saisissez l’idée ?
J.I.M : Bon mettons. Mais une bonne campagne marketing n’aurait pas caché les soucis de finition ou les cache-misères dus aux désaccords quant au positionnement du jeu durant le développement. Vous êtes au moins d’accord avec ça ? Le jeu a des vraies carences, des modélisations vraiment parfois ridicules, une histoire d’une quinzaine d’heures, loin des standards AAA. Au fond, on pourrait se demander si le vendre au prix fort n’a pas été l’estocade ; et ce qui a pu générer en grande partie ce mépris traduit par les tests. MLDDF : Soyons clairs. Vendre un jeu vidéo à plus de 50 euros, c'est beaucoup trop cher de toutes façons Pour le reste, vous savez, tout cela n’est pas mesurable. Vous pouvez prendre le problème dans tous les sens... il n’y a pas de réponse.
Tant de joueurs n’ont jamais hésité à payer au prix fort la mise à jour annuelle d’un FIFA, par exemple. Des franchises comme Assassins Creed, une fois leur public trouvé, ont réussi à vendre une itération annuelle au prix maximal durant une décennie. Quand bien-même il s’agissait de maintenir un même squelette actualisé de quelques features, de nouvelles villes modélisées et d’une narration qui, je pense, n’a jamais laissé une marque impérissable aux joueurs.
Pour les soucis techniques, de caméra ou de finition… Rappelez vous du Hameau du Crépuscule dans Dark Souls ou du framerate de Witcher 3 à sa sortie.
Un jeu très reconnu comme The Last of Us se terminait en une quinzaine d���heures, sa suite une moyenne de vingt heures.
Death Stranding s’est fait très vite une réputation de jeu vide et inintéressant.
Mass Effect Andromeda a inondé le net par des mèmes à propos de ses modélisations faciales…
Où je souhaite en venir avec tous ces exemples disparates ? Il n’y a pas, en réalité, de facteur objectif de qualité (ni en terme technique, ni en termes de durée ou de contenu) sur lesquels s’alignent les joueurs quand ils décident s’ils vont mettre ou non le prix fort dans votre jeu. Regardez la saga Final Fantasy. Combien de joueurs ne vont pas sourciller à précommander l’épisode XVI pour 80 euros, quand les deux derniers épisodes solos du canon ont été plutôt des déceptions qu’autre chose ?
Tout cela est irrationnel. La seule question est : si votre éditeur décide ou non de mettre les moyens pour le martelage marketing. Les soucis techniques ou couacs de votre jeu qui vont être sortis de leur contexte pour faire le buzz : cela n’a que très peu d’importance en réalité. Encore une fois, regardez Death Stranding. Comme son gameplay constituait une expérience quasiment inmontrable en vidéo ou en live Twitch, alors le game du net s’est concentré sur ses défauts et ses moments d’écritures qualifiés de « gênants ».
Pareil pour les modélisations faciales de Mass Effect Andromeda.
Au bout du compte, cela n’a pas duré, et ces jeux ont trouvé leur public. Et parmi les joueurs qui ont aimé ces jeux, aucun ne remet en question le prix qu’il y a mis.
Tout simplement car ceci ne se mesure, je pense, qu’à la satisfaction et l’attachement que le jeu vous aura procuré une fois que vous en aurez terminé avec ce qu’il vous propose.
Si vous donnez les clés au public et à l’espace médiatique de ce que veut transmettre votre jeu, il trouvera preneur. Et un jeu qui résonne en phase avec votre sensibilité… Vous lui passez ses défauts.
Au contraire, vendez un jeu complètement à l’envers, le système, les gens sur Twitch et tous ceux qui fomentent déjà leur jugement alors qu’ils sont encore à la deuxième heure de découverte de votre jeu, ne parleront que de ses défauts.
J.I.M : Vous oubliez le paramètre des ventes. Si un jeu ne trouve pas assez de preneurs, c'est un échec non ?
MLDDF : Pour un investisseur comme Sony, assurément. Ceux-là considèrent que toutes leurs franchises ne peuvent exister que si elles sont des millions sellers qui parlent au plus grand nombre (et une moyenne metacritic au sommet). Même si le jeu se forge une bonne réputation et trouve malgré tout un public, ce n'est pas suffisant et la franchise est annulée. Les fans de Days Gone en savent quelque chose. Mais on parle là de proportions et de dérives du systèmes qui, de toutes façons, sont allées beaucoup trop loin pour qu'il soit possible d'en tirer la moindre conclusion.
J.I.M : Tiens comme vous parlez du Twitch game et du Youtube Game…
MLDDF : C’est ce qui ne nous a pas non plus aidé.
Maintenant quand vous concevez un jeu, vous devez absolument prendre en compte les agendas de toute le monde, joueurs comme testeurs et influenceurs.
Concernant les joueurs, vous devez les convaincre non seulement que votre jeu a sa place (en terme de temps à lui consacrer et aussi de budget) parmi les sorties qu’il a prévu de faire, mais aussi qu’il sera justifié de faire attendre un backlog toujours plus chargé.
A ce niveau-là, le rapport au consommateur n’a pas vraiment changé ; sinon, on va dire, en vertu de la frénésie et la surabondance de l’actualité avec des dizaines de jeux qui sortent tous les jours.
Pour les influenceurs, c’est une autre histoire. Pour eux, la problématique n’est pas de savoir si votre jeu est bon ou non ; mais de quelle façon il faudra en parler pour rentabiliser l’audience.
Un bon exemple fut Death Stranding. Imaginez que vous êtes un Twitcher avec une communauté de centaines de milliers de followers. Vous avez rendez-vous avec votre public pour streamer le dernier jeu de Kojima-San. Sauf que le gamplay du jeu s’avère ne pas être très « Twitch-génique », et vous savez que votre chaîne va connaître un déficit d’audience lors de vos prochains streams. Que faites-vous ? Alors vous jouez les indignés sur les défauts du jeu, vous poussez le moteur dans ses retranchements les plus absurdes et vous en sortez des vidéos best of parodiques ou de moment WTF.
En l’occurrence, notre jeu, en tant qu’exclusivité Playstation d’envergure, nécessitait d’être couvert. Il s’agissait bien d’un rendez-vous. Or, nos partis pris ne délivrant leurs sens et ne donnant satisfaction qu’après plusieurs heures jeu (et encore, ceci si vous êtes attentifs aux détails), il plombait les agendas d’influences.
J.I.M : Pourtant on ne peut pas dire qu’il y ait eu une vraie shitstorm non plus.
MLDDF : Ce qui est plutôt bon signe. Notre jeu n’est pas suffisamment mauvais pour alimenter le buzz et faire de l’audience. A partir de là, il valait mieux l’oublier. Et faire le jeu de l’éditeur et de Sony.
Forspoken n’est pas un jeu honteux, ni le type de badbuzz qui poursuivra ceux qui ont été impliqués (sauf nous, le développeur, assurément, et l’actrice qui a joué Frey).
C’est un jeu embarrassant de par son placement et son contexte. En ce sens, le marketing a fonctionné : le jeu est tombé dans l’oubli. Comme son titre qui n’évoque rien. Il démontre que, pour disparaître du net, il y a pire qu’être un mauvais jeu. Faites juste en sorte que personne ne sache CE QU’EST votre jeu. Et comme personne n’a le temps de pousser une expérience dont il ne sait rien afin de « vérifier » par lui-même, l'affaire est vite pliée.
Les gens ont ouvert la map, ont vu scintiller pléthore de points d'intérêts et un début de récit apparemment cousu de fil blanc, ont grincé des dents face à ce qu'ils ont pris pour des maladresses d'écriture, et puis voilà. C'était déjà au tour du jeu suivant.
Tenez, un détail qui ne trompe pas. Nous parlons d'open world depuis le début. Mais vous avez remarqué, non, que la map ouverte ne débute qu'à partir du pivot majeur que représente la fin du scénario ? En réalité, les quatre zones du jeu s'ouvrent les unes après les autres au fur et à mesure qu'avance le scénario. Vous êtes donc, avant toutes choses, dans une aventure se déroulant dans des grandes zones semi ouvertes à l'image d'anciens Zelda ou autre. Vous voyez ? Si même un point aussi fondamental n'a pas été décelé par la majorité des testeurs, qu'attendre quant aux autres facettes de Forspoken ?
J.I.M : Certains aspects génériques n’ont pas forcément aidé à la bonne perception de votre jeu. Un dernier mot là-dessus ?
MLDDF : Juste : faites-le un jour. Vous verrez que nous avons travaillé afin que beaucoup d’éléments aient l’air génériques afin de mieux questionner, justement, leur usage galvaudé et machinal dans ce type de jeu.
Regardez, pourquoi croyez-vous que nous ayons fait le choix de faire apparaître sur la map, non seulement les points d'intérêts et les coffres, mais aussi le contenu de chacun de ces coffres et la récompense de chaque tâche ? C'est un véritable indice concernant notre démarche. Durant la campagne, le joueur choisira le "détour" (le nom donné à la moindre activité secondaire dans Forspoken, NDLR) qu'il souhaite faire à un instant T de sa progression ; ce seront les moments ponctuels durant lesquels il choisira de passer outre la grosse balise permanente et non désactivable qui indique la prochaine étape de l'aventure.
En voici trois autres, des indices qui prouvent le recul que Forspoken prend sur son média.
D’abord, la première rencontre avec un mob, mise en scène (sans subtilité aucune) comme la première rencontre d’ennemi mortel la plus légendaire du jeu vidéo japonais.
Ensuite, vous tomberez, comme d’habitude, sur ce premier boss insurmontable qui sert de tutoriel pour les commandes. Ce qui a l’air d’être un départ de récit cousu de fil blanc, trouve une vraie explication plus tard dans le scénario. Ce dragon vient trouver Frey à ce moment pour une raison précise.
Enfin, il m’est impossible de ne pas mentionner la relation avec Krav, le bracelet. Il fallait que ces échanges soient verbeux, forcés. Beaucoup de jeux ont recours à cette feature pour prendre le joueur par la main. Dans Forspoken, ce n’est pas que cela. Frey a besoin de parler avec Krav et Krav a besoin de gagner la confiance de Frey. Pour des motifs que l’on découvre plus tard.
Encore une fois, Amy Hennig a travaillé sur des scénarios très efficaces comme celui d’Uncharted 2. Elle sait parfaitement comment fonctionne un jeu vidéo. Forspoken était l’occasion, pour elle, de donner une perspective différentes aux réflexes habituels de game design modernes.
Vous verrez que ce jeu, sa désinvolture, son côté cavalier, sans fioritures pour cacher son jeu, ni artifices pour se faire aimer à tout prix. Avec le temps, il finira par être apprécié.
J.I.M : "Désinvolte". C'est effectivement un mot qui représente bien Forspoken.
MLDDF : Et surtout, avec l'âge, il fera taire la principale critique à son égard : le fait qu'il soit un open world "générique."
Terminez ce jeu, et posez vous la question en toute honnêteté : de Forspoken (et même Sonic Frontières) ou de, au hasard, Spider Man par Insomniac. Dans quel cas vous retrouvez vous avec une approche fondamentalement générique ? Pour que mon propos n'ait l'air péjoratif envers personne, laissez-moi vous poser la question autrement. Et si une approche fraîche, risquée, en 2023 en terme de monde ouvert, était, justement ce que proposent à leur façon Sonic Frontiers et Forspoken (au vu du tronc commun constitué des Marvel Spiderman, Horizon ou Assassins Creed récents) ?
J.I.M : Un futur jeu culte incompris, donc ?
MLDDF : Je ne sais pas si ça ira jusque-là. Il se trouvera bien une ou deux personnes en qui le jeu résonnera.
Vous savez, le type de personnes qui détestent, en réalité, l’approche machinale des open worlds à contenu secondaire parasitant l’histoire plus qu’autre chose… Cette sensibilité sachant déceler tout de suite la plus-value de jeux à contre-courant comme ceux de Taro-sensei malgré leurs défauts « objectifs » (graphismes, technique, allers-retours incessants, et j'en passe) ; qui jubile à mesure de la découverte que tout a un sens en terme de détails et de volontés de gamedesign. Et — par rapport à Frey et aux instants où le récit peut choquer par sa naïveté et sa désinvolture, justement — , cerise sur le gâteau : si en plus ce joueur a besoin que le personnage soit authentique à chaque seconde, bien dans son caractère. Comme ces fans de Final Fantasy X ayant adoré un protagoniste comme Tidus, vous voyez, envers et contre la mauvaise réputation du personnage...
En bref, cet esprit libre pour qui l'expérience que lui procure un jeu à l'âme unique, imparfait mais sincère, a autant de valeur que les heures passées sur un chef d'oeuvre, vous voyez.
Les institutions et la "guilde des guides d'achats" ont beau faire, je suis persuadé que l'on trouve toujours de ces personnes sur qui ces injonctions à adorer ou à détester un jeu — souvent trop unanimes pour ne pas être suspectes — n'ont aucun impact.
Voilà le profil qui passera assurément un bon moment en jouant à Fropo... Korspofr... Forspoken, voilà, Forspoken (sérieusement, ce nom...)
J.I.M : En tout cas sur ces deux huluberlus potentiels, on trouve notre testeur. Et encore, il est expatrié en Espagne.
Quant à vous ? Et votre équipe ? Que va-t-il se passer maintenant ?
MLDDF : Déjà, cet après-midi il est prévu que nous enterrions nos morts dans la même fosse commune que les gens de Crystal Dynamics ayant bossé sur Marvel’s Avengers. Après quoi, nous tirerons au sort pour savoir qui aura le droit de se pendre ou qui avalera une pilule de cyanure.
J.I.M : Sur quoi préféreriez-vous tomber ?
MLDDF : Oh moi, comme mon travail sur les chats dans le jeu s’est avéré plutôt réussi, j’ai eu droit au flingue. C’est celui qui est posé là, sur le guéridon. Tiens, vu que vous êtes assis à côté, passez-le moi.
J.I.M : D’accord. Vous pouvez attendre qu’on parte, s’il vous plaît ?
*Tous les passages mentionnant le développement et les coulisses du jeu ne relèvent que de la fiction pour donner un certain ton au texte. En revanche, tous les éléments relevés concernant le jeu y sont vraiment et ne laissent que peu de doute quant à la façon de les interpréter.
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C'est beau de se dire qu'on a pas besoin du consentement des gens ou de leur approbation pour les aimer. Je veux dire aimer, verbe d'action. Donner, prendre soin, s'intéresser, veiller, connaître, apprendre, aider, penser, collecter, créer, défendre, illuminer etc et cetera. C'est puissant, c'est une sorte de pouvoir inaliénable d'aimer. Après il faut savoir s'arrêter parfois, ce n'est pas ma spécialité non plus. Si je n'attends rien j'ai le pouvoir d'aimer qui je veux, sans limites et sans accord.
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La Bible
[Quelle meilleure méthode, pour se forcer à la lire en entier, que de la réécrire patiemment ? Cette tâche s'interrompra d'elle-même quand elle devra cesser, si et seulement s'il le faut vraiment. Entreprise amusante et instructive. Quentin Cavellier.] - Ses funérailles dans le pays de Canaan (suite) Arrivant au-delà du fleuve du Jourdain, au niveau de l'aire d'Athad, le convoi funéraire fit halte et toutes les personnes qui le composaient donnèrent libre cours à leur chagrin, faisant résonner un chœur de lamentations. En l'honneur de son défunt père, Joseph observa un deuil de sept jours. Les Cananéens qui habitaient alentour furent témoins de cette démonstration de tristesse collective et, vivement impressionnés, ils en rebaptisèrent les lieux, donnant à l'aire d'Athad le nom d'Abel-Mitsraïm, qui signifie "Le Pré du grand Deuil des Égyptiens". Les ordres de Jacob furent exécutés par ses fils conformément à sa volonté. Il fut inhumé dans la caverne du champ de Macpéla précédemment achetée par Abraham à Éphron le Héthien, après quoi, Joseph retourna en Égypte avec l'ensemble du convoi funéraire qui l'avait accompagné. Ses frères craignaient qu'ils ne les prenne en haine pour tout le mal qu'ils lui avaient fait par le passé, aussi eurent-ils la bassesse de lui mentir en lui faisant dire qu'ils avaient entendu leur défunt père Jacob tenir ces propos : - Il faut que Joseph pardonne à ses frères le crime qu'ils ont commis contre lui en le livrant à des marchands d'esclaves, je le veux ! Joseph fut dupé par ce mensonge et s'en trouva bouleversé. À ses frères d'une veulerie sans nom qui accoururent ensuite auprès de lui pour se prosterner à ses pieds, il tint des propos rassurants, leur garantissant qu'il ne leur souhaitait absolument aucun mal, d'une part parce qu'il n'était pas Dieu et qu'il ne lui revenait donc pas de les châtier pour leur infamie et, d'autre part, parce que l'Éternel avait de toute façon apporté des conséquences extraordinairement positives à leur acte d'une ignominie inqualifiable. Et il continua de parler en consolant ses frères qui ne méritaient pas de l'être. - Mort de Joseph Joseph demeura en Égypte. Il vécut 110 ans. Une telle longévité lui permit de voir naître la descendance de son fils Éphraïm, sur trois générations, ainsi que celle de Makir, fils de Manassé. En annonçant à ses frères qu'il se sentait sur le point de mourir, Joseph, leur précisa que Dieu les visiterait pour leur faire quitter l’Égypte et les guider jusqu'au territoire qui avait été promis à leurs ancêtres Abraham, Isaac et Jacob, un pays qui devait donc un jour devenir leur propriété. Ensuite, Joseph demanda à sa fratrie de lui faire le serment d'emmener ses ossements hors du pays d’Égypte. Lorsqu'il expira, il fut embaumé et placé dans un sarcophage.
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Les bons et les mauvais phonographes
Il y a des caractères plus dociles que d'autres, il y a aussi des mémoires qui retiennent mieux ; de même, parmi les phonographes, il y en a qui reproduisent en grinçant et en nasillant, d'autres qui, au contraire, imitent merveilleusement les voix. Un bon phonographe, je veux dire un jeune homme disposé naturellement à l'obéissance, formé dès le jeune âge à ne dire que ce qui se dit, doué avec cela d'une collection suffisante de rouleaux vierges, un tel jeune homme est promis aux plus hautes destinées. Toujours une chante l'air qu'on lui demande, et il le chante comme il faut: c'est un recueil de bonnes réponses. Aussi, à toutes les expositions, notre phonographe obtient les plus hautes récompenses ; et, si seulement personne n'a chanté faux devant son pavillon, le voilà admis à l'École Polytechnique, qui est un magasin de phonographes réglés et estampillés par l'État.
Cependant, il y a par le monde des phonographes rebelles, qui reproduisent mal, et ajoutent toujours à ce qu'ils chantent quelque chose d'eux-mêmes, des grincements, des sifflements, des bruits non classés qui se produisent avec peine, et mettent au supplice les oreilles bien élevées. L'un vous dit que si on double le côté d'un carré, la surface est aussi doublée ; un autre demande pourquoi une horloge à poids ne se remonte pas elle-même, par l'effet de son mouvement ; un autre voudrais que l'on monte une dynamo sur l'essieu d'une locomotive, afin d'avoir de l'électricité sans qu'il en coûte rien. Pensées confuses, mal conçues, surtout mal exprimées ; pénible travail d'accouchement.
Pourtant l'invention et le progrès sont là en germe, et cette fumée est le signe d'un feu. Je hais les jeunes gens qui ne disent pas de sottises.
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Unité (3) Unité et Communion
L'Unité implique le sentiment de faire partie d'un ensemble, d'accepter ses contradictions, contradictions qui seront objet de lutte, mais autant que possible sans menacer l'Unité, sans laquelle la séparation ramène à la solitude et l'impotence face à la domination.
Étrange lien qui se forge entre Unité et Communion. La communion est le moment suspendu où les liens d'amour sont ressentis entre les membres d'une communauté humaine. La conflictualité, les avatars de la domination n'ont pas disparu, mais pendant un instant, pendant une cérémonie, pendant une résistance collective, nous ressentons la force de ne faire qu'un.
La séparation est une des choses les plus réelles du monde capitaliste tardif. On a des raisons de rester loin de tout le monde, et on se retrouve dans des microcosmes où l'on espère être d'accord avec tout le monde sur tout (ou ne se sentir menacé-e par personne). Il y a beaucoup d'imaginaire qui commande en nous, et nous maintient dans la séparation.
Soit la conflictualité est tue (au sein d'un groupe dont on fait partie), soit elle est évitée (en restant dans son groupe affinitaire).
L'universalisme revendiqué d'organisations comme la CGT ou du monothéisme m'attire car j'ai le sentiment d'avoir recherché cette communion et cette unité longtemps, et je pense qu'on la recherche sans cesse, on l'espère dans nos petites organisations autonomes d'extrême gauche, et on s'estime les plus éthiques, les plus progressistes, les plus accueillants, et on a raison de construire ce qu'on construit. Mais je crois que je recherche l'appartenance à des organisations à vocation universalistes et héritières d'une tradition d'unité, même en sachant qu'il y aura peut-être des batailles à mener. J'essaie aussi de me départir du préjugé que les gens dans ces communautés seront réactionnaires, parce qu'on m'a appris qu'elles devaient l'être. J'y arrive en pleine affirmation de mon existence, sans pour l'instant être rejetée par quiconque. Je pense qu'on voit plus l'amour que j'irradie que ma non normativité. Je pense que derrière la réaction qui habite mes contemporains, il y a aussi cette blessure de la séparation, et la communion est réelle quand on fait partie d'une organisation unitaire.
Aimer son prochain à la façon de Dieu est aimer comme des parents envers leur enfant, c'est à dire en voulant assurer sa sécurité et son bien-être. Derrière toutes les fausses notes, il y a ces lois divines, auxquelles on obéit ou qu'on transgresse. J'ai l'intention d'être celle qui rappelle ces lois et les porte au plus juste. Et à ce prix, je veux vivre la Communion et dans l'Unité.
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