#révoltes fédéralistes

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Soulèvement de Lyon contre la Convention Nationale

Le soulèvement de Lyon contre le pouvoir de la Convention nationale fut une rébellion contre-révolutionnaire qui joua un rôle à la fois dans les révoltes fédéralistes et le règne de la Terreur pendant la période de la Révolution française (1789-1799). Commencée en mai 1793, la révolte se termina dans un bain de sang cinq mois plus tard, lorsque les représentants du gouvernement soumirent Lyon à un massacre punitif brutal.

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La séance publique [du département de la Manche] s’ouvre ensuite ; le procédé du Calvados [c'est-à-dire l'enlèvement et l'emprisonnement au château de Caen de Romme et Prieur de la Côte-d'Or] excite l’indignation : Lalande, Guérin & Rapilly, braves sans-culottes, s’offrent en otages au Calvados pour la liberté de nos collègues. Hubert, Dupré, membres des sociétés populaires de Valogne & de Cherbourg, parlent avec énergie ; tous les citoyens présens partagent les mêmes sentimens, & il est arrêté qu’il sera répondu aux administrateurs du Calvados que l’assemblée désapprouve leurs procédés, qu’ils seront invités à réfléchir sur leurs suites désastreuses, & à se rallier autour de la Convention nationale. Un arrêté consacre ces heureuses dispositions ; il est signé par beaucoup de citoyens ; mais, ce qui est digne de remarquer, c’est que sur neuf administrateurs qui étoient présens et qui tous paraissoient avoir partagé les principes de cet arrêté, trois seulement le signent, & le procureur-général-syndic qui l’a rédigé ne le signe pas.

Le 9 juin 1793 à Coutances d’après le rapport de Lecointre et Prieur de la Marne sur leur mission à l’armée des côtes de Cherbourg, lu par Lecointre à la Convention le 17 août suivant, p. 3-4.

Quand la Convention a reçu la nouvelle de cette séance le 14 juin 1793, Robespierre a fait décréter que l’administration du département de la Manche avait “bien mérité de la patrie” (AP, t. LXVI, p. 528). Malheureusement pour les représentants sur place, et comme le suggère la dernière ligne de cette citation, elle avait déjà changé d’avis à leur sujet...

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Gilets jaunes et Chouans

Tant que les lapins n’auront pas d’historiens, leur histoire sera racontée par les chasseurs…

Tous les évènements qui se succèdent depuis des mois m’ont fait repenser à un épisode de notre histoire : les chouans.

La chouannerie  c’est donc, si l’on en croit ce que l’on a appris à l’école,  une tentative contre la Révolution et donc contre la République. Menée au départ par les gens du peuple, ils ont trahi  le pays en se donnant des chefs nobles, en faisant appel à l’étranger (à l’anglais, horreur !) et en continuant à vouloir être catholiques.

 En gros, toutes proportions gardées, question « propagande », ça ressemble à ce que les chaines d’intox nous serinent jour après jour sur les Gilets jaunes. Après une première approche où l’on a entendu quelques paroles «compatissantes »,  je suis fasciné par l’écart, abyssal, qui existe entre ce qu’on lit sur les réseaux sociaux (et heureusement qu’ils existent, malgré leurs défauts), entre ce que j’ai vu personnellement dans les manifs, puisque j’y ai participé à plusieurs reprises, entre les témoignages d’amis dignes de foi qui étaient sur les ronds points,  et ce qu’on entend tous les matins, en boucle, sur les chaines télé.  Cnews, BFM TV, LCI et même les chaines publiques. Comme les filles du même nom.

Du coup, je me demande ce qui resterait de ce mouvement dans les livres si, pour écrire l’histoire de ce mouvement, les historiens de 2119 ne disposaient que des passages télévisées d’Apathie, de Dacier, de Ferry ( !), des députés Larem, des articles de presse appartenant pour l’immense majorité à nos milliardaires, et des communiqués de Castaner .

Ca donnerait à peu près « les Gilets Jaunes ? Une tentative de renverser la République, qui s’en est prise à ses symboles, Arc de Triomphe, préfectures et permanences des députés, tentative menée par des foules haineuses, homophobes et antisémites, qui ont profité d’un mécontentement diffus existant dans le peuple à cause des politiques menées avant l’élection du grand président que fut Emmanuel  Macron. Les insurgés voulaient envahir l’Elysée, l’Assemblée Nationale, étaient armés, et ils bénéficiaient du soutien de l’étranger, en particulier de la lèpre populiste italienne et des fonds de la Russie. Malgré ces soutiens, leur mobilisation faiblissait de semaine en semaine. De plus, heureusement, les forces républicaines et leur police, avec un calme et un sang froid impressionnant, qui leur ont valu l’admiration de la population française, ont réussi à éviter une catastrophe pour notre pays, le pays des droits de l’homme. Et enfin il faut citer  l’action remarquable du Président, qui en personne a parcouru le pays pour débattre avec les citoyens et les convaincre.»

Fermez le ban, et revenons aux Chouans

Je fais partie, évidemment, de ceux qui se félicitent de l’avènement de la République, du renversement de la monarchie. On ne me tirera pas une larme sur la fin de Louis XVI et de Marie Antoinette : il y a eu plus d’exécutions en 1788 que pendant toute la Terreur. Mais en 1788, on n’exécutait que des faux sauniers, des voleurs à la tire, des morts de faim, bref, des gens de rien, des gueux !!  

 Mais…… pour pratiquement tout le monde, les Chouans c’est le terme où l’on mélange, déjà, et les Chouans de Bretagne et du Nord de la Loire avec les Vendéens, qui eux sont du Sud. (Enfin, pour une Varois, prétendre que la Vendée, c’est le Sud…….Mais bon, passons)   « Les Vendéens ont pris des villes (Angers, Saumur, Fontenay). Les chouans n'ont pu que paralyser les communications.   Ils  sont restés un ensemble inorganisé de bandes largement indépendantes. (Tiens, ça rappelle un peu “l’hétérogénéité” des GJ, ça)  Localement, chaque bande est demeurée sous le contrôle du chef qu'elle s'était donnée. » (Tiens, un peu comme sur les ronds points!)

« La Chouannerie est  étroitement liée à la guerre de Vendée qui se déroula sur la rive gauche de la Loire, l'ensemble de ces deux conflits étant parfois connu sous le nom de « guerres de l'Ouest ».

L'Ouest fut  agité par de multiples jacqueries, au cours desquelles la paysannerie exprime de manière brutale sa colère à l'encontre des exigences de l'administration. En particulier parce que la bourgeoise qui venait de prendre le pouvoir, en renversant la noblesse, l’avait remplacé en ce qui concerne les impôts et taxes. Ensuite parce que  la levée d'hommes, décrétée par la Convention nationale le 24 février 1793 provoque un refus brutal (levée de 300.000 hommes, et les « chouans » ne voient pas bien pourquoi ils iraient se battre pour un pays encore inexistant, où finalement pour eux, pas grand-chose ne change)

En plus, l’apparition des assignats ne leur profite en rien (alors que certains spéculateurs vont bâtir des fortunes là-dessus) Et enfin,  la constitution civile du clergé va cristalliser les mécontentements. La bourgeoisie, majoritairement républicaine, est peu présente parmi les Chouans. Cf Michel Ragon : « La révolte des Chouans était en réalité une jacquerie, une révolte plébéienne menée par des plébéiens. » (Contrairement à d’autres endroits où les révoltés se donnèrent des chefs nobles).

Les paysans s’interrogent aussi sur les changements sociaux et politiques. « Ils ressentent un sentiment d’injustice et dénoncent la Révolution conduite par des bourgeois à leurs avantages. »

 Mais la répression, dès le début, fut féroce, et alimenta donc …la révolte.

Jugez en : Il y a environ 500 000 morts, dont 50 000 civils attribués aux seules colonnes infernales des armées républicaines. Plusieurs milliers de civils, modérés, fédéralistes, chouans, vendéens sont fusillés ou guillotinés en Anjou.  Également noyés en couple à Nantes : les fameux « mariages républicains » La Loire est alors nommée « la baignoire nationale ».

D’ailleurs, Carrier, un des responsables des noyades, (4.000 victimes) était sur le point d’être rappelé à Paris par Robespierre (1) , qui avait été alerté sur son comportement. Pendant ce temps, en effet, en raison des atrocités commises par les armées de la République, près de 15 % de la population disparaissait entre 1792 et 1802 dans l'ensemble des communes soulevées : le Maine-et-Loire a perdu 44 107 habitants (20,11 % !), la Vendée, 30 711 (10,64 %), la Loire-Inférieure, 26 897 (12,91 %), les Deux-Sèvres, 15 542 (17,71 %) (cf R. SEYCHER).

Selon la loi du 23 mars 1793, les insurgés capturés sont fusillés ou guillotinés dans les 24 heures.

Pour finir Rossignol crée des compagnies de Faux chouans, des brigands déguisés en Chouans ayant pour mission de commettre le plus de ravages possibles afin de discréditer la Chouannerie. (Etonnant, non ? Comme s’il existait, pas exemple, des policiers déguisés en manifestants et qui casseraient pour discréditer les manifs !)

Alors, évidemment, malgré tout,  vive la République. Mais il faut se souvenir que l’histoire est écrite par les vainqueurs. Enfin, l’histoire officielle. Et qu’à l’époque, les Chouans n’avaient pas Facebook. Et surtout, à la décharge des uns et des autres, que…l’époque était rude !!

(1)    Robespierre voulait rappeler   Jean-Baptiste Carrier à Nantes, Jean-Lambert Tallien à Bordeaux,  Paul Barras, et Fouché, tous coupables de crimes et/ou de corruption. Ce sont eux qui le feront arrêter et guillotiner. Avant d’appeler quelques temps plus tard Bonaparte et de continuer une carrière tranquille… sauf Carrier, qui en a trop fait et sera guillotiné en 1794..Voir sa fiche ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Baptiste_Carrier). Et il faut savoir que le surnom « L’incorruptible » donné à Robespierre lui a été donné par ses adversaires politiques, et qu’il est le seul  homme politique français à l’avoir porté !

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Insurrections Fédéralistes

Les insurrections fédéralistes furent une série de rébellions qui éclatèrent dans plusieurs régions de France au cours de l'été 1793, en réponse à la concentration du pouvoir à Paris pendant la Révolution française (1789-99). La plupart des révoltes furent réprimées en quelques mois, ce qui conduisit les Jacobins victorieux à instaurer le règne de la Terreur pour punir les rebelles et imposer leur idéologie.

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Les représentans du peuple, envoyés par la Convention nationale près l’armée des côtes de Cherbourg. En vertu des pouvoirs à nous donnés ; Considérant, 1°. que la violence exercée sur les personnes des représentans du peuple, Prieur (de la Côte-d’Or), & Romme, envoyés par la Convention nationale près l’armée des côtes de Cherbourg, pour veiller à leur défense & les couvrir, au besoin, de leurs corps, contre l’attaque des ennemis de la République, est un attentat à la souveraineté du peuple & au respect dû à la Convention nationale qui peut seule sauver la patrie ; 2°. Que l’arrestation de ces deux représentans, celle des deniers de la caisse publique & de tous les objets de subsistances qui se dirigent vers le centre de la France, ne peut avoir d’autre objet que de livrer la République française aux armées ennemies qui les menacent de toutes parts, puisqu’elle tend évidemment à mettre la Convention nationale dans l’impossibilité absolue de pourvoir à la solde, habillement & subsistance de nos frères qui sont sur les frontières pour combattre les tyrans & leur satellites ; 3°. Que la conduite de Félix Wimphen [Wimpffen], ci-devant noble & baron allemand, qui a eu la lâcheté de laisser enlever de Bayeux, en sa présence, par quarante particuliers se disant carabots de Caen, les représentans du peuple, Romme & Prieur ; qui, depuis cette époque, a constamment refusé ou négligé de se rendre près des représentans qui sont à Coutances, pour prendre des mesures de sûreté générale ; qui a rétabli un comité d’administration militaire qui avoit été, en vertu de la loi du 30 avril dernier, cassé & annullé par un arrêté pris par les représentans du peuple à Bayeux ; que la conduite de ce perfide général prouve qu’il existe Caen, où il se rend sans cesse, une conjuration de partisans de la tyrannie qui veulent replonger le peuple dans les fers, & l’empêcher de jouir des droits sacrés de l’homme ; Considérant enfin que, d’après le compte rendu à l’administration du département de la Manche par les commissaires qu’elle avoit envoyés à celle du Calvados, pour lui faire partager les principes de la vraie liberté & les sentimens de fraternité consignés dans l’arrêté pris le 9 juin présent mois, dans une assemblée générale des corps constitués & des sociétés populaires ; que d’après les dispositions perfides & tendantes [sic] à la dissolution de la République une & indivisible, faites par les commissaires envoyés par l’administration du Calvados, il ne reste plus d’autre moyen de rendre la liberté aux représentans détenus à Caen & de briser les fers des citoyens de cette ville, qui gémissent sous le joug d’une faction liberticide, ou de ramener ceux que des discours perfides ont égarés, que de faire connoître les véritables projets de cette faction d’aristocrates, à la tête de laquelle se trouve un ci-devant noble, baron allemand ; Avons arrêté ce qui suit : ARTICLE PREMIER. Nous déclarons en état de rébellion tous administrateurs, officiers municipaux, juges, fonctionnaires publics & autres citoyens qui ont signé l’arrêté du conseil-général du département du Calvados, du 9 juin dernier ; en conséquence, les avons suspendus de leurs fonctions, dans lesquelles ils seront provisoirement remplacés par les fonctionnaires de la même espèce, ou par leurs suppléans qui n’auront pris aucune part à cet arrêté. II. Tous lesdits fonctionnaires publics & les autres signataires seront mis en état d’arrestation, & traduits sur-le-champ à la barre de la Convention nationale. III. Les receveurs de districts sont tenus de faire passer à la trésorerie nationale les fonds qui se trouvent dans leurs caisses, sous peine d’être regardés comme rebelles à la loi. IV. Les communications du commerce seront rétablies entre la ville de Caen & les autres parties de la République française, & il ne pourra y être apporté aucun obstacle. V. Chargeons, au nom de la République française, les corps administratifs, municipalités, & autres autorités constituées, civiles & militaires, gardes nationaux & tous les bons citoyens, de veiller à l’exécution du présent arrêté, qui sera publié, imprimé & affiché dans les cinq départements de la Manche, du Calvados, de l’Eure, de l’Orne & de la Seine-Inférieure.

Arrêté de Prieur de la Marne et Lecointre. Coutances, 14 juin 1793 (tiré de leur Rapport de mission imprimé, p. 58-60).

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Notre position est ici des plus allarmantes. notre Collègue Prieur [de la Marne] est parti vendredi soir [5 juillet 1793], pour aller vous exposer avec franchise la situation vraiment critique, où se trouve le Département de la Seine inférieure, par le défaut total de subsistances, et pour vous engager à prendre les mesures les promptes afin de faire cesser cette terrible pénurie ; sans quoi il etait impossible de se dissimuler que, sous peu de jours, les mouvements les plus effrayants seraient inévitables, tant à Rouen, que dans la plupart des Districts de la Seine inférieure. Lors du départ de notre Collègue Prieur, il nous promît d’être de retour Samedi ou dimanche, ou de nous donner des nouvelles sur l’objet de sa mission ; mais malgré sa promesse, et dans l’état de perplexité où nous nous trouvons ici, nous n’avons reçu aucunes nouvelles. Cependant, les environs de Rouen et les Districts du Département s’agitent. La faim présente, et de plus l’aspect d’une famine qui semble inévitable, joints à votre silence et à celui de notre collègue Prieur, que l’on nous annonce dans cet instant etre resté malade à Paris, nous font redouter pour la République un avenir tel que nous ne pouvons repondre de ce qui se passera ; et nous ne pouvons même vous dissimuler que si nous restons — jusqu’à demain soir ou mercredi matin sans reponses, et surtout sans secours et subsistances, ou + [[au-dessus :] sans+] ordres d’en fournir en nature, pris soit au havre, soit dans les magasins militaires, tant qu’il y en éxistera, il nous semble impossible de contenir un Peuple dévoué à la liberté et à l’unité de la république ; mais qui, ayant faim, se porterait à des excès qu’il ne Serait au pouvoir ni des Représentants, ni des autorités constituées d’arrêter. Quant à nous, nous resterons à notre poste, en attendant votre prompte reponse, bien disposés à faire tous les sacrifices qu’exige l’honneur de la république. N’allez pas croire, Citoyens Collègues, que notre exposé soit exagéré. Depuis que nous sommes ici, nous avons observé et suivi tout ce qui se passe, et nous avons usé de tous les moyens possibles pour arrêter les mouvements, et forcer, pour ainsi dire, le peuple à la patience ; mais enfin elle est aujourd’hui à bout. La faim parle, et on ne peut lui répondre qu’avec du pain. Voilà notre position. Jugez-la ; et agissez, sans quoi nous ne voyons que la certitude des plus grands malheurs. Nous vous laissons à examiner si la proximité de ces mouvements avec la rébellion de l’Eure et du Calvados, n’est pas de nature à tout perdre. Le Peuple est disposé à la tranquillité ; mais il lui faut des subsistances. La Constitution a été proclamée hier avec beaucoup de solemnité, et il [[au-dessus :] le Peuple] a paru l’adopter davance avec franchise et loyauté ; mais, encore une fois, cette Constitution ne lui met pas, sur le champ, le pain à la main. D’après ce tableau, il faut agir, et sur-le champ. Dans tous les cas, répondez-nous ; le salut du Peuple l’exige.

Lettre des représentants en mission Lecointre et Esnuë-Lavallée au CSP. Rouen, 8 juillet 1793 (AN AF II 148, pl. 1196, p. 2).

Je ne sais plus si j’ai mentionné ici que j’ai découvert trop tard qu’on mettait aux enchères une partie de la correspondance privée de Prieur de la Marne, qui reste désormais, de façon très frustrante, hors de portée pour les chercheurs. On peut toujours lire une partie très incomplète de cette correspondance en ligne, puisqu’on l’a prise en photo (mais pour donner une impression générale, pas pour être lisible, à l’instar de cette image des papiers de Robespierre acquis en 2011, si vous la connaissez), et donc, j’ai réussi à déchiffrer une partie d’une lettre, dont on ne voit pas la date sur la photo, mais qui date forcément de la même époque que la lettre de ses collègues restés à Rouen, ou plutôt, vraisemblablement s’il est réellement tombé malade, du 6 ou 7 juillet 1793 :

Il y a Bien longtems, mon ami, que Je ne vous ay donné et que Je n’ai reçu de vos nouvelles, J’arrive d’une mission que J’etais chargé de remplir dans le fonds de la Basse normandie et les papiers publics vous ont sans doute appris les dangers que J’y ay Courus, Je suis actuellement a Paris mais Je dois repartir Incessamment pour rouen, pour veiller a la marche des Calvadosiens et opposer des forces a leur Insurrection. revolte. [...] [J ?]’ai a la maison quelques [...]

Pour le site des enchères, le correspondant de Prieur est son neveu et filleul, Louis Joseph Fouet, mais si cela est peut-être le cas pour une partie des lettres plus tardives, je n’en sais rien, je pense en l’occurrence qu’il ne peut y avoir de doute qu’il écrivait plutôt à son beau-frère François Joseph Fouet, père de Louis Joseph... qui n’avait pas encore 7 ans à l’époque (il est né en décembre 1786).

On peut déduire de ce qu’on peut lire de cette lettre que Prieur avait bien l’intention de rejoindre ses collègues avant (on peut le présumer) de tomber malade. Il n’est finalement jamais revenu à Rouen. En revanche, il semblerait bien que Prieur n’a pas abandonné cette ville, car le CSP a arrêté le 9 juillet de faire son “rapport des demandes de la Ville de Rouen” (AN AF II* 46, p. 188) le lendemain et même si Prieur n’est pas cité, il me semble qu’il n’a pas dû être étranger à cette délibération.

De toute façon, Prieur finira par être élu au CSP dès le 10 juillet et lui et Lecointre seront remplacés dans la mission de réprimer la révolte fédéraliste normande par décret du 12 juillet.

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Les représentans du peuple, envoyés par la Convention nationale près l’armée des côtes de Cherbourg. Sur le rapport qui nous est fait à l’instant que l’administration du département de la Manche, oubliant le respect & la soumission qu’elle doit aux décrets de la Convention nationale, vient de prendre un arrêté par lequel elle annulle les pouvoirs à nous donnés par la Convention, Avons, en persistant dans nos premiers arrêtés, & notamment dans celui qui suspend les membres du département qui ont pris part à l’arrêté qui empêche le versement des deniers publics à la trésorerie nationale, arrêté que ledit arrêté du département de la Manche est cassé & annullé ; & faisons défenses à toutes autorités constituées, civiles & militaires, d’y obtempérer, sous les peines portées contre les rebelles à la souveraineté du peuple français.

Arrêté de Prieur de la Marne et Lecointre. Coutances, 15 juin 1793 (tiré de leur Rapport de mission, p. 63-64).

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L’administration, par l’organe du Procureur général Sindic, leur a annoncé la Satisfaction qu’elle partageoit avec les differents corps et les citoyens de posséder au sein d’eux les Representans du peuple et de les voir prendre part a leurs inquietudes ; que de leur côté ils apprendroient avec plaisir et qu’ont fait les administrations et les administrés du Calvados, et ce qu’ils peuvent encore pour la chose publique, et leur ardent amour pour la liberté. Le citoyen Prieur de la Marne, l’un des Representans, aprés avoir annoncé que l’attachement des citoyens du Calvados à la cause de la liberté étoit depuis longtems connu de la convention Nationale et qu’elle n’avoit jamais douté de leurs principes Republicains, a donné lecture d’une Proclamation que lui et ses collegues adressent aux  Corps administratifs, aux municipalités et aux Societés populaires des départemens de la Manche du Calvados de l’Eure et de l’orne ; ainsi que d’un arrêté qu’ils ont pris pour l’organisation d’une force armée de 16000 hommes pris dans lesdits Départemens pour se réunir à l’armée des côtes de Cherbourg.

Les représentants en mission Prieur de la Marne, Romme et Lecointre devant l’administration du département du Calvados. Caen, 26 mai 1793 (AD Calvados 1 L 68, p. 179, verso-180, recto).

Qui croirait qu’à peine quatre jours plus tard cette même administration allait se révolter contre la Convention ?

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t’elle [sic] a Été surtout la Perfide politique des meneurs qu’à l’Epôque [sic] des evenemens du 31 mai Et 2 juin Dernier ils ont Enveloppé dans leurs mesures fédéralistes la plus grande partie des habitans [...] quatre Vingt individus ont Signé les arrêtés federalistes Et Vingt cinq ou trente parmi lesquels on compte Plusieurs fonctionnaires publics ont marché dans La force Départementale. [...] D’un autre coté l’insouciance des autorités constituées Sur L’Execution De la loi du maximum avait Été t’elle [sic] que dans aucun tems, ni Pour aucun objet, Elle n’avait Été observée En sorte qu’une partie de ceux qui n’avaient pas Signé s’etaient rendus Coupables de la Violation de la loi. C’est dans cet Etat de choses qu’il à [sic] fallu reorganiser La municipalité, le Directoire du district Le Comité de Surveillance, la garde nationale Et le tribunal. Le choix du maire Des officiers municipaux, de l’agent national Et des notables S’est fait En Présence du Peuple et par Le peuple, tous ont passé à La censure des citoyens reunis dans des assemblées Publiques Et le Droit Sacré de la censure a Été Exercé avec Plus d’Energie que je n’esperais D’En rencontrer. le comité de Surveillance a Été composé de même, les officiers commandans Et officiers de la garde nationale ont Été nommés Et Partout les Sans-culottes Les Plus prononcés ont Été Placés.

Prieur de la Marne au CSP. Pontivy, 21 pluviôse an II (AN AF II 175B, pl. 1438, p. 17).

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Législateurs, dans la crise où se trouve la République, il faut reconnaître une vérité ; c’est qu’elle est le résultat d’une conspiration depuis longtemps combinée entre les administrations rebelles. Je sors des départements où brûle le foyer de cette révolte ; j’y ai vu que le peuple, un moment égaré, revenait à la vérité ; que sa justice serait aussi terrible qu’avait été profonde son erreur, et que les conjurateurs seraient bientôt punis. Cependant il ne faut pas croire que tous ses administrateurs soient coupables. Trois classes d’hommes composent toutes les administrations ; les uns sont les traîtres qui conjurent ; les autres sont des faibles qu’on entraîne ; les derniers sont des homms [sic] peu instruits que l’on trompe. Le but du comité est de découvrir et de faire punir les premiers, les seuls coupables. Il faut les chercher dans les administrations des départements et des districts, dans les tribunaux et même dans les conseils généraux des communes.

Prieur de la Marne, rapport au nom du CSP, sur les administrateurs fédéralistes du district de Pont-l’Évêque (Calvados), 13 juillet 1793 (AP, t. LXVIII, p. 678).

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Nous venons de passer deux jours et deux nuits bien pénibles et bien laborieuses, d’après la conduite des habitants de Caen. Aussi sommes-nous écrasés de fatigue au point que notre lettre s’en sentira nécessairement. Notre premier objet, aussitôt que nous eûmes appris que le crime était consommé , fut d’éclairer l’opinion publique ; heureusement elle nous était favorable. Nos regards se jetèrent ensuite sur la position de nos collègues et sur la nôtre. Notre première idée fut de leur faire rendre leur liberté, mais toute espèce de moyens nous manquait. Nous n’avons pas 500 hommes et encore la moitié sont-ils du dernier contingent et sans armes. Nous avons un général qui a été témoin de l’arrestation de nos collègues et qui n’a pas pris la moindre mesure pour l’empêcher. Les rapports lui sont très défavorables ; son compte officiel, que nous venons de recevoir, n’est pas plus clair, et nous l’appelons à Coutances pour examiner de plus près sa conduite et nous mettre en mesure contre tout événement. Comptez sur nous.

Prieur de la Marne et Lecointre au CSP. Coutances, 11 juin 1793 (Recueil des actes du CSP, t. IV, p. 516-517).

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Le f. Baudre chargé de rédiger L’adresse à la Convention à Donné Lecture de Son travail. Le f. Le Tual [« à » corrigé en « en »] applaudissant au travail du f. Baudre à dit que Son vœu etoit quon eu Supprimât plusieurs phrases ^ [[au-dessus :] ^ dénominations et] qui tendroient [[raturé :][Le ?] directement] [[au-dessus :] Particulierement] à Blamer la Montagne, quil regardoit comme Composéé de Bons patriotes, qui par des voies différentes de Ceux de la plaine tendoient toujours au même But, L’affermissement de la liberté et de La République ; que dun autre Cotés Les representans du peuple à Bayeux Se Glorifiant detre de vrais Montagnards, ce seroit leurs faire une injure personelle et dautant plus gratuite, que leur Caractere [[raturé :]personel] [[au-dessus :] Vraiment républicain] ne prouve point quils ayent Les principes Sanguinaires quon Suppose aux Membres qui composent la Montagne plusieurs freres ayant discuté Sur Lobjet il à été arrêté que Ladresse du f. Baudre contenant des principes vrayement républicains, elle Seroit adoptéé, en Supprimant toutes dénominations particulieres [« Se » corrigé en « La »] Societé Se Contentant de dire quelle ne Connoit aucuns partis ni aucusnnes factions, quelle les méprise tous et quelle les à en horreur

Séance de la Société des amis de la liberté et de l’égalité de Bayeux du 25 mai 1793 (AD Calvados 1L 2285, p. 61, verso).

Je trouve cette discussion particulièrement parlante sur l’impact de la propagande du “bureau d’esprit public” de Roland et sur l’écart entre l’idée que des révolutionnaires de province ont pu se faire à travers elle des Montagnards et l’impression que les Montagnards en personne pouvaient leur faire. D’où il résulte qu’on devrait sans doute prendre un peu plus au sérieux l’idée qu’une certaine proportion des “fédéralistes” ont réellement été “égarés” (comme ils le diront souvent eux-mêmes et comme l’allégueront leurs adversaires).

Pour certains, c’est clair que déclarer qu’on s’était trompé en participant à la révolte — ou au moins en s’abstenant de la condamner — n’était qu’un moyen d’éviter de trop perdre à la suite de sa défaite. Cependant il y en a d’autres qui, s’ils n’étaient peut-être pas moins intéressés, n’en étaient sans doute pas moins sincères. Il est fort possible que bon nombre d’entre eux n’aient jamais été idéologiquement opposés à la politique défendue par les Montagnards, ils avaient simplement cru aux hommes de paille (des sanguinaires qui veulent ramener le despotisme par l’anarchie) du Patriote français et de la Sentinelle (entre autres).

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Le citoyen Prieur, l’un des commissaires a ensuite adressé au discours aux Citoyens rassemblés dans lequel après avoir presenté les ressources de la Republique, il a fait Sentir avec energie la necessité de se reunir contre les despotes coalisés et de se rallier avec confiance autour des representans du peuple pour le salut de la liberté. Les commissaires de la Convention ont invité le Conseil à S’occuper de la formations [sic] de l’etat de leurs ressources en tout genre pour sur le Vu desdits Etats estre [sic] par eux ordonné les dispositions que nécessitent les circonstances et profiter de la situation du département pour coopérer a la défense de la République. D’après l’annonce qu’ils ont reçue que l’administration S’empresseroit a toujours de Satisfaire au desir des representans du Peuple.

Séance du 13 mai 1793 de l’administration du département du Calvados — la même qui va se révolter en moins de trois semaines et qui finira par enlever et emprisonner Romme et Prieur de la Côté-d’Or (pas encore arrivé à ce moment-là, alors le Prieur en question dans la citation est sans aucun doute Prieur de la Marne) et encourager le département voisin de la Manche à faire de même (AD Calvados 1 L 68).

[montagnarde1793]

Les journaux anticiviques ont éloigné de nous un grand nombre de Citoyens ; mais nous esperons que notre conduite nous en fera des amis.

Prieur de la Marne, Lecointre et Romme au CSP... une dizaine de jours avant la révolte départementale dite “fédéraliste”. Bayeux, 18 mai 1793 (AN AF II 265B, pl. 2240, p. 2).

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Un mot sur Christophe Bigot, Le Bouffon de la Montagne, 2016

À propos des fictions sur la Révolution, on a sorti un roman sur Lecointre, que bien entendu j’ai été obligée d’aller retrouver dès que j’en ai entendu parler pour voir comment il représente sa mission avec Prieur de la Marne. Je ne l’ai pas lu en entier, juste la partie qui concerne Prieur et quelques autres épisodes pris un peu au hasard. Je ne sais pas s’il mérite que je prenne le temps de lire le reste, vu la longueur de ma liste de lecture. Mais je pense en avoir assez vu pour donner quelques impressions.

Dire que j’ai été déçue ferait croire que je m’attendais à ce qu’il soit bon. Ce qui n’est pas vraiment le cas, après avoir feuilleté L’archange et le procureur du même auteur. Il faut reconnaître que le sujet de ce livre avait au moins le mérite de l’originalité (ce qui n’était pas du tout le cas de l’autre, qui était jusque dans son concept le plus plat des clichés). Je suis donc au minimum contente que quelqu’un ait décidé d’écrire un roman sur un personnage moins connu de la Révolution.

Mais là, autant je n’aime guère Lecointre — surtout en ce qui  concerne son rôle peu reluisant en thermidor et aux débuts de la Réaction — autant je trouve que même lui ne méritait pas d’être affublé du titre de “bouffon de la Montagne” (c’est même le titre du roman !). C’est un personnage contradictoire, on en convient, mais ce n’était pas non plus la caricature que présente le roman. Il serait difficile de lire comme moi son* Rapport sur sa mission près l’Armée des Côtes de Cherbourg et ne pas en convenir.

Je souligne ce point exprès, parce que c’est clair que l’auteur du roman ne l’a pas lu, et franchement c’est dommage. Parce que les péripéties réelles de cette mission était beaucoup plus romanesques que ce qu’imagine Bigot. Je ne vous ennuierai pas avec le détail des inexactitudes, je dirai simplement que Bigot aurait pu mettre en scène le moment où Lecointre et Prieur ont été chassés de Coutances à la lumière des torches ou leur traversée incognito de Caen quelques jours (ou plutôt quelques nuits) plus tard, mais au lieu de cela ils en sont quittes pour une accolade du maire de Coutances et de son secrétaire qui jurent de les défendre des fédéralistes (quelque chose de pareil est arrivée, mais ce n’était que le début de l’histoire...). Bigot ne prend même pas acte de leur incapacité à réprimer la révolte, alors qu’on aurait eu tendance à penser que cela rentrerait dans son thème, surtout quand on pense que la mission n’a pris fin pour Lecointre que lorsque celui-ci a demandé son rappel en prétextant sa santé (ce qu’on pourrait trouver un peu pathétique, à défaut de bouffon)... Mais bon, il est vrai que cela enlèverait peut-être quelque chose au cliché du proconsul terroriste tout-puissant (qui d’ailleurs comme tout bon cliché de la sorte menace des gens de la guillotine — au moins mentalement quand ce n’est pas de vive voix – toutes les deux pages).

Prieur lui-même ne joue pas un grand rôle : la mission est expédiée en moins de dix pages et Prieur n’a pas une seule ligne de dialogue. Bigot se contente (ou presque) de dire ceci : “Prieur était austère, et Lecointre lui trouvait le genre prêtre.” (p. 181). Je ne sais pas trop d’où viendrait cette dernière analyse, sauf à penser qu’austérité égale en soi sacerdoce. Franchement, je pense qu’il est plus probable qu’il s’agit de l’assimilation habituelle de Prieur à Robespierre et de Robespierre au cliché du “grand pontife de l’Être suprême”...

Bref, le concept aurait pu être intéressant, mais je pense que lire le bouquin en entier ne ferait que confirmer mon intuition que, comme pour le traitement de la mission de Lecointre et Prieur, il s’agit d’une occasion manquée où le médiocre et le cliché prend la place que ce qui aurait pu être une perspective originale...

*Ce Rapport est également signé de Prieur mais il y a de bonnes raisons à croire que celui-ci a laissé l’essentiel de la rédaction à son collègue