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La Ferme des Sept Lunes
La Ferme des Sept Lunes De Deux Choses Lune St. Joseph, France 2019 Roussane, Marsanne
La Ferme des Sept Lunes is 10 hectares of organic and biodynamic vineyards along the Rhone. They have a southeastern exposure and this paired with their altitude brings a freshness to the wines.
Most notably though, there is a high alcohol content to this punchy, dry white.
The grapes are manually harvested and picked when fully ripe - there is zero yeasting or addition of enzymes. Roussane - bright, floral, baked bread, spices, surprisingly high acidity. a rich wine defined by its nutty-spicy notes
Marsanne - almond and beeswax, weighty, can produce fairly decadent wine, similar to Chardonnay in having a big personality
Tasting notes: lemon filled pastries, vanilla, nectarine, toasty, waxy, great minerality
Pairing: pork, mature and hard cheese, poultry
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Tenez ferme ce que vous avez jusquâĂ mon retour.
Ă celui qui remporte la victoire, qui persĂ©vĂšre jusquâĂ la fin dans lâaccomplissement de ma volontĂ©, je donnerai lâempire des nations : il sera leur berger et les mĂšnera avec une houlette de fer ; il les brisera comme des poteries dâargile.
Jâai reçu moi-mĂȘme ce pouvoir de mon PĂšre.
Je lui donnerai aussi lâĂ©clat du jour naissant.
Que celui qui est capable dâĂ©couter prĂȘte attention Ă ce que lâEsprit dit aux Ăglises. Apocalypse 2: 25-29 POV
Il y avait un ciel nouveau et une nouvelle terre, car le premier ciel et la premiĂšre terre avaient disparu, et la mer nâexistait plus.
Je vis la ville sainte, la nouvelle JĂ©rusalem, descendre du ciel, dâauprĂšs de Dieu, belle comme une mariĂ©e qui sâest parĂ©e pour son Ă©poux.
En mĂȘme temps, jâentendis une forte voix, issue du trĂŽne, qui disait : voyez : Ă prĂ©sent Dieu a dressĂ© sa tente parmi les hommes et il la partage avec eux.
Il habitera dĂ©sormais au milieu dâeux ; ils seront son peuple et lui, Dieu, sera personnellement avec eux.
Il essuiera toute larme de leurs yeux. Il nây aura plus ni mort, ni tristesse, ni souffrance.
On nâentendra plus de plainte ni de cri de douleur. Plus de peine ni de dur labeur ! Car lâancien monde a disparu et tout ce qui fut autrefois a passĂ© pour toujours.
Alors, celui qui siégeait sur le trÎne déclara : voici que je crée un univers nouveau.
Cette fois, je renouvelle toutes choses.Il ajouta : Ă©cris que ces paroles sont vraies et entiĂšrement dignes de confiance.
Puis il me dit : dĂ©sormais, tout est accompli ! Je suis le premier et le dernier, lâorigine et le but.
Et voici mon cadeau pour celui qui a soif : je lui donnerai Ă boire de lâeau des sources de la vie gratuitement.
Le vainqueur héritera toutes ces choses. Je serai son Dieu et il sera mon fils.
Quant aux lĂąches, aux infidĂšles et inconstants, aux dĂ©pravĂ©s, assassins, noceurs et adultĂšres, aux idolĂątres et adeptes des pratiques occultes, bref Ă tous ceux qui sâĂ©cartent de la vĂ©ritĂ©, leur part sera lâĂ©tang ardent de feu et de soufre, la seconde mort.
Alors, lâun des sept anges qui tenaient les sept coupes pleines des sept ultimes flĂ©aux vint me parler : viens, me dit-il, je te montrerai la mariĂ©e, lâĂ©pouse de lâAgneau.
Il mâemmena en esprit sur une grande et haute montagne, dâoĂč il me fit voir la ville sainte, JĂ©rusalem qui descendait du ciel, dâauprĂšs de Dieu.
Elle rayonnait de la gloire divine. Son éclat rappelait celui des pierres les plus précieuses, elle resplendissait comme un jaspe qui aurait la transparence du cristal.
La muraille reposait sur douze assises portant les noms des douze apĂŽtres de lâAgneau.
La ville nâa besoin ni du soleil ni de la lune pour lâĂ©clairer, la gloire de Dieu lâillumine et lâAgneau lui tient lieu de lampe.
Rien dâimpur nây pourra pĂ©nĂ©trer. Nul homme commettant le mal ou servant le mensonge nây entrera. Seuls y auront accĂšs ceux qui sont inscrits dans le livre de vie de lâAgneau. Apocalypse 21: 1-11,14,23,27 POV
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Le tracteur à pédales
Le tracteur à pédales
Chez Bastien et Ămilie Boustareaud / La Ferme viticole / Saint-RĂ©my-de-Provence / 4 hectares
Quels liens secrets, quels Ă©chos, unissent mes passages dâun domaine Ă lâautre ? Font-ils sens sâils mâapparaissent ou relĂšvent-ils de la coĂŻncidence anecdotique ?
Leur identification nâest peut-ĂȘtre quâune des consĂ©quences du nomadisme. On se met en route, lâattention aux dĂ©tails, Ă leur mĂ©morisation et Ă leurs interprĂ©tations sâaccroit. Jây vois une forme de palĂ©orĂ©flexe (de survie) rĂ©veillĂ© par les alĂ©as dâun dĂ©placement au grand air. Voyager est un affut de signes.
Cette Tarasque, par exemple, qui me talonne depuis ma traversĂ©e du RhĂŽne, cette Tarasque va-t-elle me rattraper ? Me foudroyer ou me noyer ? Toute lâaprĂšs-midi jâai tentĂ© de dĂ©crypter la trajectoire de ses coups de boutoirs, lâĂ©cartement de ses morsures Ă©lectriques. Difficile, tiens, durant cette fuite Ă travers le TrĂ©bon, de ne pas penser Ă LĂ©o Seguin, vigneron et chasseur dâĂ©clairs, qui aurait usĂ© des mĂȘmes indices pour foncer vers lâorage.
Tiens, câest justement depuis Le Mas des Roquets, il y a deux jours, que jâavais appelĂ© Bastien Boustareaud, pour lui proposer dâaccueillir Rhapsode. Bastien mâayant rĂ©pondu Ă la vitesse de â ! â câest, chez lui,  à La Ferme viticole, Chemin Monplaisir, 13210 Saint-RĂ©my de Provence, que jâai dĂ©barquĂ© il y a quelques heures. En nage mais sec de pluie.
Dans le coin, on mĂ©tonymise encore Bastien du nom de sa premiĂšre cuvĂ©e, Clandestino (2012), produite avec deux rangs laissĂ©s par un ami et dâautres grains grapillonnĂ©s ici et lĂ â sans guĂšre d'autorisations.
Il faut dire que ce grand gaillard volubile porte plutĂŽt bien son titre. Tu es Ă peine arrivĂ© chez lui que tu es dĂ©jĂ dans une  voiture Ă sillonner les voies parallĂšles de la contrĂ©e, Ă Ă©couter le rĂ©cit dâun retour en garrigue (oĂč comment un sommelier du cru passĂ© par une cave chic Ă Paris et les croisiĂšres de luxe en Alaska en vient au vin naturel et aux arbres fruitiers) ; Ă peine rentrĂ© que le voilĂ Ă©clipsĂ© dans l'une de ses micro parcelles insĂ©rĂ©e dans les Alpilles  pour un conciliabule avec un ami magnĂ©tiseur ;  à peine revenu quâil tâembarque dans son garage pour te prĂ©senter son vĂ©lo-tracteur Ă©lectrique, conçu et fabriquĂ© maison, pour les traitements biodynamiques : en remplacement du pulvĂ©risateur dorsal et en complĂ©ment du cheval occasionnel.
Maintenant je suis dans le jardin, en performance. Nous sommes sept. Trois voisins qui mĂ©riteraient chacun un portrait et lâĂ©quipe Boustareaud : Ămilie, Bastien, et leurs deux enfants, Baptiste et Lucien. InvitĂ© par lâendroit â potager permacultivĂ©, comptoir surmontĂ© dâune treille, hĂ©micycle des grands arbres, proscenium gazonnĂ© , prĂ© non fauchĂ© en fond de scĂšne, oiseaux et insectes â jâai proposĂ©, tiens, comme chez les Gavarches de SommiĂšre, une version mobile de Rhapsode.
OĂč en sommes-nous ?  à la septiĂšme lune peut-ĂȘtre, quelques goutes d'Esprit Libre (Nielluccio, Sciaccarello, Cinsault, Aramon et quelques hybrides en macĂ©ration carbonique) dans le sang, bien accordĂ©s, ayant inclus dans notre cercle cette drĂŽle de stĂšle portant relief dâune divinitĂ© manifestement soiffarde â qui mâattirait depuis un moment. Plus tard Bastien dira son adolescence passĂ©e Ă Tahiti et je comprendrai lâorigine de ce Dionysos-de-pierre-lĂ . Et me souviendrai aussi, tiens, du livre de Bronislaw Malinowski, prĂ©curseur de lâethnologie contemporaine, qui attendait sur ma table de chevet au Mas des Roquets : les Argonautes du Pacifique occidental.
Et donc ? Donc rien. Juste des marques, des concordances, des entrĂ©es et des sorties, juste des rapprochements glanĂ©s plus ou moins clandestinement, par pur plaisir, avec mon cheval Ă pĂ©dales. RĂ©jouissons-nous : câest gratuit.
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«(...) la vĂ©ritable formule de lâathĂ©isme nâest pas que Dieu est mort â mĂȘme en fondant lâorigine de la fonction du pĂšre sur son meurtre, Freud protĂšge le pĂšre â la vĂ©ritable formule de lâathĂ©isme, câest que Dieu est inconscient.» (Jacques Lacan)
En sâimaginant Ă©vacuer Dieu et tout "le saint frusquin", nos sociĂ©tĂ©s "libĂ©rales-libertaires" ont in fine Ă©liminĂ© la possibilitĂ© dâun recours Ă leurs propres fondements en tant que consistance logique.
Si comme lâaffirme Bertrand Russel un systĂšme ne peut ĂȘtre que:
âąsoit incomplet et consistant
âąsoit complet et inconsistant
le paradigme de lâincomplĂ©tude (la place vide du dieu, du chef, du pĂšre...) qui organisait la vie en sociĂ©tĂ© dans la civilisation occidentale depuis vingt-sept siĂšcles (cf. LâOrestie dâEschyle...), a laissĂ© la place au "tout numĂ©rique", un changement de paradigme qui a dĂ©butĂ© officiellement et de façon subreptice en 1970 en France avec lâinscription au Code Civil du syntagme "autoritĂ© parentale" en lieu et place de celui dâ"autoritĂ© paternelle" (puis le concept de "parentalitĂ©" est apparu en 1985, suivi de celui dâ"homoparentalitĂ©" en 1997 sans quâaucune autoritĂ© linguistique compĂ©tente puisse faire remarquer au lĂ©gislateur que les deux termes sont quasi-synonymes, gĂ©nĂ©rĂ©s tous deux par le dĂ©ni de la diffĂ©rence sexuelle...)
Le pĂšre nâest pas Ă confondre avec le gĂ©niteur, le pĂšre en tant que fonction paternelle est de lâordre dâune mĂ©taphore, et donc de logique, alors que la mĂšre qui rĂ©pond de la mĂ©tonymie appartient au registre de lâimmĂ©diatetĂ© sensible, de la contingence et de la contigĂŒitĂ©, "Mater certa, pater semper incertus" affirme le droit romain.
Seul lâappareil logique peut dĂ©montrer la faille du pur dire.
Dans son cas cĂ©lĂšbre de LâHomme aux rats, Freud fait Ă©cho dans une note, au propos du physicien Lichtenberg dont il Ă©tait le contemporain: «Lâastronome sait Ă peu prĂšs avec la mĂȘme certitude si la lune est habitĂ©e et qui est son pĂšre, mais il sait avec une toute autre certitude qui est sa mĂšre.» Et Freud dâajouter: «Ce fut un grand progrĂšs de la civilisation lorsque lâhumanitĂ© se dĂ©cida Ă adopter, Ă cĂŽtĂ© du tĂ©moignage des sens, celui de la conclusion logique, et Ă passer du matriarcat au patriarcat.»)
Tant dâinepties, dâinjustices et dâabominations ayant Ă©tĂ© commises au cours de lâhistoire attribuĂ©es "au nom dâun pĂšre", que Lacan prend la peine de prĂ©ciser: «Un pĂšre nâa droit au respect, sinon Ă lâamour, que si le dit respect, le dit amour, est, vous nâallez pas en croire vos oreilles, pĂšre-versement orientĂ©, câest Ă dire fait dâune femme, objet a qui cause son dĂ©sir.» (Les non-dupes-errent, sĂ©ance du 21 janvier 1975).
Rappelons que Lacan Ă©voque trois conditions permettant Ă un homme dâĂȘtre digne du mĂ©rite d'ĂȘtre "pĂšre": avoir fait dâune femme la cause de son dĂ©sir, une femme qui lui fasse des enfants, et de ceux-ci qu'il prenne soin paternel.
Dans la derniĂšre leçon du sĂ©minaire Lâangoisse, il Ă©nonce son programme consistant Ă passer du Nom-du-PĂšre aux noms du pĂšre au pluriel.
Il questionne alors le dĂ©sir du pĂšre: "Dans la manifestation de son dĂ©sir, le pĂšre, lui, sait Ă quel "a" ce dĂ©sir se rĂ©fĂšre. Contrairement Ă ce quâĂ©nonce le mythe religieux, le pĂšre nâest pas causa sui, mais sujet qui a Ă©tĂ© assez loin dans la rĂ©alisation de son dĂ©sir pour le rĂ©intĂ©grer Ă sa cause» (Jacques Lacan, Le sĂ©minaire, Livre X, Lâangoisse).
Le pÚre qui parvient à réintégrer le désir à sa cause se trouve en position de transmettre le Nom-du-PÚre ; ayant réuni les conditions de possibilité de la transmission.
Cela met en Ă©vidence que lâeffectuation de la mĂ©taphore paternelle nâest pas une opĂ©ration qui dĂ©pend uniquement du dĂ©sir maternel, comme le sous-entend depuis un certain temps le discours dominant.
Que le pĂšre soit digne de respect sinon de lâamour nâest pourtant pas une condition unique, et parfois certaines conditions Ă©nigmatiques de discours permettent lâaccĂšs Ă ce signifiant.
Cela relĂšve de lâinsondable dans la structure du sujet, et lui appartient en propre.
Kafka est connu pour avoir essayĂ© de dĂ©brouiller ses rapports Ă lâautoritĂ© paternelle, et partant Ă la loi, pas seulement dans ses fameuses «Lettres au pĂšre»...
Plus K se rapproche du ChĂąteau, plus le ChĂąteau semble sâĂ©loigner, K est convoquĂ©, il ne peut pas rester en dehors, et il ne peut pas non plus accĂ©der au ChĂąteau.
Nâest-ce pas lĂ une illustration de la topologie paradoxale de lâobjet-cause du dĂ©sir telle quâelle Ă©merge de la psychanalyse? Lâimpact de lâobjet petit a se renforce et sâaccroĂźt au fur et Ă mesure de sa diminution, plus il sâamenuise, plus important est le reste.
Nâest-ce pas ainsi quâapparaissait le Juif (figure libidinale par excellence) dans le discours nazi? Plus on les Ă©liminait, on les anĂ©antissait, plus dangereux en Ă©tait le reste.
Plus on essaie de repousser lâobjet horrifique cause du dĂ©sir, plus il ressurgit, terrifiant, devant le sujet.
Ce qui nous saisit chez Kafka, câest la surprĂ©sence Ă©touffante du pĂšre, il est trop vivant, trop intrusif, trop obscĂšne ; cette «tropeité» du pĂšre nâindique-t-elle pas que câest lâexcĂšs de la vie elle-mĂȘme qui mine son autoritĂ© symbolique?
Ă y regarder de prĂšs, le problĂšme nâest pas tant que le trop-plein de vitalitĂ© du pĂšre mine lâautoritĂ© symbolique, mais bien plutĂŽt que cet excĂšs de survitalitĂ© obscĂšne du pĂšre signale et prĂ©suppose une faille toujours dĂ©jĂ prĂ©sente dans lâautoritĂ© symbolique elle-mĂȘme.
La notion lacanienne de Nom-du-pĂšre permet au sujet de «tuer symboliquement» le pĂšre, autrement dit ĂȘtre capable de dâabandonner le pĂšre pour conquĂ©rir la libertĂ© de son propre chemin de vie ; la difficultĂ© chez Kafka dâassumer le Nom-du-pĂšre marque lâĂ©chec de cette libĂ©ration.
Les noms du pĂšre, on ne peut sâen passer quâĂ condition de savoir sâen servir. Exactement comme les Grecs anciens qui nâavaient pas besoin de croire en leurs dieux: ils savaient comment sâen servir...
Jamais la psychanalyse (la vraie) nâa Ă©tĂ© plus vitale quâaujourdâhui pour trouver dans la parole encore assez de jouissance pour que lâhistoire continue.
«Quand un discours, tel que le discours analytique, Ă©merge, ce quâil vous propose, câest dâavoir les reins assez fermes pour soutenir le complot de la vĂ©ritĂ©.»
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Blaise Cendrars et Sonia Delaunay, La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France (1913)
Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France
Dédiée aux Musiciens
En ce temps-lĂ jâĂ©tais en mon adolescence
Jâavais Ă peine seize ans et je ne me souvenais dĂ©jĂ plus de mon enfance
JâĂ©tais Ă 16.000 lieues du lieu de ma naissance
JâĂ©tais Ă Moscou, dans la ville des mille et trois clochers et des sept gares
Et je nâavais pas assez des sept gares et des mille et trois tours
Car mon adolescence Ă©tait si ardente et si folle
Que mon cĆur, tour Ă tour, brĂ»lait comme le temple
DâĂphĂšse ou comme la Place Rouge de Moscou
Quand le soleil se couche.
Et mes yeux Ă©clairaient des voies anciennes.
Et jâĂ©tais dĂ©jĂ si mauvais poĂšte
Que je ne savais pas aller jusquâau bout.
Le Kremlin Ă©tait comme un immense gĂąteau tartare
CroustillĂ© dâor,
Avec les grandes amandes des cathédrales toutes blanches
Et lâor mielleux des clochesâŠ
Un vieux moine me lisait la légende de Novgorod
Jâavais soif
Et je déchiffrais des caractÚres cunéiformes
Puis, tout Ă coup, les pigeons du Saint-Esprit sâenvolaient sur la place
Et mes mains sâenvolaient aussi, avec des bruissements dâalbatros
Et ceci, câĂ©tait les derniĂšres rĂ©miniscences du dernier jour
Du tout dernier voyage
Et de la mer.
Pourtant, jâĂ©tais fort mauvais poĂšte.
Je ne savais pas aller jusquâau bout.
Jâavais faim
Et tous les jours et toutes les femmes dans les cafés et tous les verres
Jâaurais voulu les boire et les casser
Et toutes les vitrines et toutes les rues
Et toutes les maisons et toutes les vies
Et toutes les roues des fiacres qui tournaient en tourbillon sur les mauvais pavés
Jâaurais voulu les plonger dans une fournaise de glaives
Et jâaurais voulu broyer tous les os
Et arracher toutes les langues
Et liquĂ©fier tous ces grands corps Ă©tranges et nus sous les vĂȘtements qui mâaffolentâŠ
Je pressentais la venue du grand Christ rouge de la rĂ©volution russeâŠ
Et le soleil Ă©tait une mauvaise plaie
Qui sâouvrait comme un brasier.
En ce temps-lĂ jâĂ©tais en mon adolescence
Jâavais Ă peine seize ans et je ne me souvenais dĂ©jĂ plus de ma naissance
JâĂ©tais Ă Moscou, oĂč je voulais me nourrir de flammes
Et je nâavais pas assez des tours et des gares que constellaient mes yeux
En SibĂ©rie tonnait le canon, câĂ©tait la guerre
La faim le froid la peste le choléra
Et les eaux limoneuses de lâAmour charriaient des millions de charognes.
Dans toutes les gares je voyais partir tous les derniers trains
Personne ne pouvait plus partir car on ne délivrait plus de billets
Et les soldats qui sâen allaient auraient bien voulu resterâŠ
Un vieux moine me chantait la légende de Novgorod.
Moi, le mauvais poĂšte qui ne voulait aller nulle part, je pouvais aller partout
Et aussi les marchands avaient encore assez dâargent
Pour aller tenter faire fortune.
Leur train partait tous les vendredis matin.
On disait quâil y avait beaucoup de morts.
Lâun emportait cent caisses de rĂ©veils et de coucous de la ForĂȘt-Noire
Un autre, des boĂźtes Ă chapeaux, des cylindres et un assortiment de tire-bouchons de Sheffield
Un autre, des cercueils de MalmoĂ« remplis de boĂźtes de conserve et de sardines Ă lâhuile
Puis il y avait beaucoup de femmes
Des femmes, des entre-jambes Ă louer qui pouvaient aussi servir
De cercueils
Elles étaient toutes patentées
On disait quâil y avait beaucoup de morts lĂ -bas
Elles voyageaient à prix réduits
Et avaient toutes un compte-courant Ă la banque.
Or, un vendredi matin, ce fut enfin mon tour
On était en décembre
Et je partis moi aussi pour accompagner le voyageur en bijouterie qui se rendait Ă Kharbine
Nous avions deux coupĂ©s dans lâexpress et 34 coffres de joaillerie de Pforzheim
De la camelote allemande âMade in Germanyâ
Il mâavait habillĂ© de neuf, et en montant dans le train jâavais perdu un bouton
- Je mâen souviens, je mâen souviens, jây ai souvent pensĂ© depuis -
Je couchais sur les coffres et jâĂ©tais tout heureux de pouvoir jouer avec le browning nickelĂ© quâil mâavait aussi donnĂ©
JâĂ©tais trĂšs heureux insouciant
Je croyais jouer aux brigands
Nous avions volé le trésor de Golconde
Et nous allions, grĂące au transsibĂ©rien, le cacher de lâautre cĂŽtĂ© du monde
Je devais le dĂ©fendre contre les voleurs de lâOural qui avaient attaquĂ© les saltimbanques de Jules Verne
Contre les khoungouzes, les boxers de la Chine
Et les enragés petits mongols du Grand Lama
Alibaba et les quarante voleurs
Et les fidĂšles du terrible Vieux de la montagne
Et surtout, contre les plus modernes
Les rats dâhĂŽtel
Et les spécialistes des express internationaux.
Et pourtant, et pourtant
JâĂ©tais triste comme un enfant.
Les rythmes du train
La âmoelle chemin-de-ferâ des psychiatres amĂ©ricains
Le bruit des portes des voix des essieux grinçant sur les rails congelés
Le ferlin dâor de mon avenir
Mon browning le piano et les jurons des joueurs de cartes dans le compartiment dâĂ cĂŽtĂ©
LâĂ©patante prĂ©sence de Jeanne
Lâhomme aux lunettes bleues qui se promenait nerveusement dans le couloir et qui me regardait en passant
Froissis de femmes
Et le sifflement de la vapeur
Et le bruit Ă©ternel des roues en folie dans les orniĂšres du ciel
Les vitres sont givrées
Pas de nature!
Et derriÚre les plaines sibériennes, le ciel bas et les grandes ombres des Taciturnes qui montent et qui descendent
Je suis couché dans un plaid
Bariolé
Comme ma vie
Et ma vie ne me tient pas plus chaud que ce chĂąle Ăcossais
Et lâEurope tout entiĂšre aperçue au coupe-vent dâun express Ă toute vapeur
Nâest pas plus riche que ma vie
Ma pauvre vie
Ce chĂąle
EffilochĂ© sur des coffres remplis dâor
Avec lesquels je roule
Que je rĂȘve
Que je fume
Et la seule flamme de lâunivers
Est une pauvre pensĂ©eâŠ
Du fond de mon cĆur des larmes me viennent
Si je pense, Amour, Ă ma maĂźtresse;
Elle nâest quâune enfant, que je trouvai ainsi
PĂąle, immaculĂ©e, au fond dâun bordel.
Ce nâest quâune enfant, blonde, rieuse et triste,
Elle ne sourit pas et ne pleure jamais;
Mais au fond de ses yeux, quand elle vous y laisse boire,
Tremble un doux lys dâargent, la fleur du poĂšte.
Elle est douce et muette, sans aucun reproche,
Avec un long tressaillement Ă votre approche;
Mais quand moi je lui viens, de-ci, de-lĂ , de fĂȘte,
Elle fait un pas, puis ferme les yeux â et fait un pas.
Car elle est mon amour, et les autres femmes
Nâont que des robes dâor sur de grands corps de flammes,
Ma pauvre amie est si esseulée,
Elle est toute nue, nâa pas de corps â elle est trop pauvre.
Elle nâest quâune fleur candide, fluette,
La fleur du poĂšte, un pauvre lys dâargent,
Tout froid, tout seul, et déjà si fané
Que les larmes me viennent si je pense Ă son cĆur.
Et cette nuit est pareille Ă cent mille autres quand un train file dans la nuit
- Les comĂštes tombent -
Et que lâhomme et la femme, mĂȘmes jeunes, sâamusent Ă faire lâamour.
Le ciel est comme la tente dĂ©chirĂ©e dâun cirque pauvre dans un petit village de pĂȘcheurs
En Flandres
Le soleil est un fumeux quinquet
Et tout au haut dâun trapĂšze une femme fait la lune.
La clarinette le piston une flûte aigre et un mauvais tambour
Et voici mon berceau
Mon berceau
Il Ă©tait toujours prĂšs du piano quand ma mĂšre comme Madame Bovary jouait les sonates de Beethoven
Jâai passĂ© mon enfance dans les jardins suspendus de Babylone
Et lâĂ©cole buissonniĂšre, dans les gares devant les trains en partance
Maintenant, jâai fait courir tous les trains derriĂšre moi
BĂąle-Tombouctou
Jâai aussi jouĂ© aux courses Ă Auteuil et Ă Longchamp
Paris-New York
Maintenant, jâai fait courir tous les trains tout le long de ma vie
Madrid-Stockholm
Et jâai perdu tous mes paris
Il nây a plus que la Patagonie, la Patagonie, qui convienne Ă mon immense tristesse, la Patagonie, et un voyage dans les mers du Sud
Je suis en route
Jâai toujours Ă©tĂ© en route
Je suis en route avec la petite Jehanne de France.
Le train fait un saut périlleux et retombe sur toutes ses roues
Le train retombe sur ses roues
Le train retombe toujours sur toutes ses roues.
âBlaise, dis, sommes-nous bien loin de Montmartre?â
Nous sommes loin, Jeanne, tu roules depuis sept jours
Tu es loin de Montmartre, de la Butte qui tâa nourrie, du SacrĂ©-CĆur contre lequel tu tâes blottie
Paris a disparu et son énorme flambée
Il nây a plus que les cendres continues
La pluie qui tombe
La tourbe qui se gonfle
La Sibérie qui tourne
Les lourdes nappes de neige qui remontent
Et le grelot de la folie qui grelotte comme un dernier dĂ©sir dans lâair bleui
Le train palpite au cĆur des horizons plombĂ©s
Et ton chagrin ricaneâŠ
âDis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre?â
Les inquiétudes
Oublie les inquiétudes
Toutes les gares lézardées obliques sur la route
Les fils télégraphiques auxquels elles pendent
Les poteaux grimaçants qui gesticulent et les étranglent
Le monde sâĂ©tire sâallonge et se retire comme un accordĂ©on quâune main sadique tourmente
Dans les déchirures du ciel, les locomotives en furie
Sâenfuient
Et dans les trous,
Les roues vertigineuses les bouches les voix
Et les chiens du malheur qui aboient Ă nos trousses
Les démons sont déchaßnés
Ferrailles
Tout est un faux accord
Le broun-roun-roun des roues
Chocs
Rebondissements
Nous sommes un orage sous le crĂąne dâun sourdâŠ
âDis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre?â
Mais oui, tu mâĂ©nerves, tu le sais bien, nous sommes bien loin
La folie surchauffée beugle dans la locomotive
La peste le choléra se lÚvent comme des braises ardentes sur notre route
Nous disparaissons dans la guerre en plein dans un tunnel
La faim, la putain, se cramponne aux nuages en débandade
Et fiente des batailles en tas puants de morts
Fais comme elle, fais ton mĂ©tierâŠ
âDis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre?â
Oui, nous le sommes, nous le sommes
Tous les boucs émissaires ont crevé dans ce désert
Entends les sonnailles de ce troupeau galeux
Tomsk Tchéliabinsk Kainsk Obi Taïchet Verkné Oudinsk Kourgane Samara Pensa-Touloune
La mort en Mandchourie
Est notre débarcadÚre est notre dernier repaire
Ce voyage est terrible
Hier matin
Ivan Oulitch avait les cheveux blancs
Et Kolia NicolaĂŻ Ivanovitch se ronge les doigts depuis quinze joursâŠ
Fais comme elles la Mort la Famine fais ton métier
Ăa coĂ»te cent sous, en transsibĂ©rien, ça coĂ»te cent roubles
EnfiĂšvre les banquettes et rougeoie sous la table
Le diable est au piano
Ses doigts noueux excitent toutes les femmes
La Nature
Les Gouges
Fais ton métier
JusquâĂ KharbineâŠ
âDis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre?â
Non mais⊠fiche-moi la paix⊠laisse-moi tranquille
Tu as les hanches angulaires
Ton ventre est aigre et tu as la chaude-pisse
Câest tout ce que Paris a mis dans ton giron
Câest aussi un peu dâĂąme⊠car tu es malheureuse
Jâai pitiĂ© jâai pitiĂ© viens vers moi sur mon cĆur
Les roues sont les moulins Ă vent du pays de Cocagne
Et les moulins Ă vent sont les bĂ©quilles quâun mendiant fait tournoyer
Nous sommes les culs-de-jatte de lâespace
Nous roulons sur nos quatre plaies
On nous a rogné les ailes
Les ailes de nos sept péchés
Et tous les trains sont les bilboquets du diable
Basse-cour
Le monde moderne
La vitesse nây peut mais
Le monde moderne
Les lointains sont par trop loin
Et au bout du voyage câest terrible dâĂȘtre un homme avec une femmeâŠ
âBlaise, dis, sommes-nous bien loin de Montmartre?â
Jâai pitiĂ© jâai pitiĂ© viens vers moi je vais te conter une histoire
Viens dans mon lit
Viens sur mon cĆur
Je vais te conter une histoireâŠ
Oh viens! Viens!
Aux Fidji rĂšgne lâĂ©ternel printemps
La paresse
Lâamour pĂąme les couples dans lâherbe haute et la chaude syphilis rĂŽde sous les bananiers
Viens dans les Ăźles perdues du Pacifique!
Elles ont nom du Phénix, des Marquises
Bornéo et Java
Et CĂ©lĂšbes a la forme dâun chat.
Nous ne pouvons pas aller au Japon
Viens au Mexique!
Sur ses hauts plateaux les tulipiers fleurissent
Les lianes tentaculaires sont la chevelure du soleil
On dirait la palette et les pinceaux dâun peintre
Des couleurs Ă©tourdissantes comme des gongs,
Rousseau y a été
Il y a Ă©bloui sa vie
Câest le pays des oiseaux
Lâoiseau du paradis, lâoiseau-lyre
Le toucan, lâoiseau moqueur
Et le colibri niche au cĆur des lys noirs
Viens!
Nous nous aimerons dans les ruines majestueuses dâun temple aztĂšque
Tu seras mon idole
Une idole bariolée enfantine un peu laide et bizarrement étrange
Oh viens!
Si tu veux nous irons en aéroplane et nous survolerons le pays des mille lacs,
Les nuits y sont démesurément longues
LâancĂȘtre prĂ©historique aura peur de mon moteur
Jâatterrirai
Et je construirai un hangar pour mon avion avec les os fossiles de mammouth
Le feu primitif réchauffera notre pauvre amour
Samowar
Et nous nous aimerons bien bourgeoisement prĂšs du pĂŽle
Oh viens!
Jeanne Jeannette Ninette nini ninon nichon
Mimi mamour ma poupoule mon PĂ©rou
Dodo dondon
Carotte ma crotte
Chouchou pâtit-cĆur
Cocotte
ChĂ©rie pâtite chĂšvre
Mon pâtit-pĂ©chĂ© mignon
Concon
Coucou
Elle dort.
Elle dort
Et de toutes les heures du monde elle nâen a pas gobĂ© une seule
Tous les visages entrevus dans les gares
Toutes les horloges
Lâheure de Paris lâheure de Berlin lâheure de Saint-PĂ©tersbourg et lâheure de toutes les gares
Et à Oufa, le visage ensanglanté du canonnier
Et le cadran bĂȘtement lumineux de Grodno
Et lâavance perpĂ©tuelle du train
Tous les matins on met les montres Ă lâheure
Le train avance et le soleil retarde
Rien nây fait, jâentends les cloches sonores
Le gros bourdon de Notre-Dame
La cloche aigrelette du Louvre qui sonna la Barthélemy
Les carillons rouillés de Bruges-la-Morte
Les sonneries Ă©lectriques de la bibliothĂšque de New-York
Les campanes de Venise
Et les cloches de Moscou, lâhorloge de la Porte-Rouge qui me comptait les heures quand jâĂ©tais dans un bureau
Et mes souvenirs
Le train tonne sur les plaques tournantes
Le train roule
Un gramophone grasseye une marche tzigane
Et le monde, comme lâhorloge du quartier juif de Prague, tourne Ă©perdument Ă rebours.
Effeuille la rose des vents
Voici que bruissent les orages déchaßnés
Les trains roulent en tourbillon sur les rĂ©seaux enchevĂȘtrĂ©s
Bilboquets diaboliques
Il y a des trains qui ne se rencontrent jamais
Dâautres se perdent en route
Les chefs de gare jouent aux Ă©checs
Tric-trac
Billard
Caramboles
Paraboles
La voie ferrée est une nouvelle géométrie
Syracuse
ArchimĂšde
Et les soldats qui lâĂ©gorgĂšrent
Et les galĂšres
Et les vaisseaux
Et les engins prodigieux quâil inventa
Et toutes les tueries
Lâhistoire antique
Lâhistoire moderne
Les tourbillons
Les naufrages
MĂȘme celui du Titanic que jâai lu dans le journal
Autant dâimages-associations que je ne peux pas dĂ©velopper dans mes vers
Car je suis encore fort mauvais poĂšte
Car lâunivers me dĂ©borde
Car jâai nĂ©gligĂ© de mâassurer contre les accidents de chemin de fer
Car je ne sais pas aller jusquâau bout
Et jâai peur.
Jâai peur
Je ne sais pas aller jusquâau bout
Comme mon ami Chagall je pourrais faire une série de tableaux déments
Mais je nâai pas pris de notes en voyage
âPardonnez-moi mon ignorance
âPardonnez-moi de ne plus connaĂźtre lâancien jeu des versâ
Comme dit Guillaume Apollinaire
Tout ce qui concerne la guerre on peut le lire dans les MĂ©moires de Kouropatkine
Ou dans les journaux japonais qui sont aussi cruellement illustrés
Ă quoi bon me documenter
Je mâabandonne
Aux sursauts de ma mĂ©moireâŠ
Ă partir dâIrkoutsk le voyage devint beaucoup trop lent
Beaucoup trop long
Nous Ă©tions dans le premier train qui contournait le lac BaĂŻkal
On avait orné la locomotive de drapeaux et de lampions
Et nous avions quittĂ© la gare aux accents tristes de lâhymne au Tzar.
Si jâĂ©tais peintre je dĂ©verserais beaucoup de rouge, beaucoup de jaune sur la fin de ce voyage
Car je crois bien que nous Ă©tions tous un peu fous
Et quâun dĂ©lire immense ensanglantait les faces Ă©nervĂ©es de mes compagnons de voyage.
Comme nous approchions de la Mongolie
Qui ronflait comme un incendie
Le train avait ralenti son allure
Et je percevais dans le grincement perpétuel des roues
Les accents fous et les sanglots
Dâune Ă©ternelle liturgie
Jâai vu
Jâai vu les trains silencieux les trains noirs qui revenaient de lâExtrĂȘme-Orient et qui passaient en fantĂŽmes
Et mon Ćil, comme le fanal dâarriĂšre, court encore derriĂšre ces trains
A Talga 100.000 blessés agonisaient faute de soins
Jâai visitĂ© les hĂŽpitaux de KrasnoĂŻarsk
Et à Khilok nous avons croisé un long convoi de soldats fous
Jâai vu, dans les lazarets, des plaies bĂ©antes, des blessures qui saignaient Ă pleines orgues
Et les membres amputĂ©s dansaient autour ou sâenvolaient dans lâair rauque
Lâincendie Ă©tait sur toutes les faces, dans tous les cĆurs
Des doigts idiots tambourinaient sur toutes les vitres
Et sous la pression de la peur, les regards crevaient comme des abcĂšs
Dans toutes les gares on brûlait tous les wagons
Et jâai vu
Jâai vu des trains de 60 locomotives qui sâenfuyaient Ă toute vapeur pourchassĂ©es par les horizons en rut et des bandes de corbeaux qui sâenvolaient dĂ©sespĂ©rĂ©ment aprĂšs
DisparaĂźtre
Dans la direction de Port-Arthur.
à Tchita nous eûmes quelques jours de répit
ArrĂȘt de cinq jours vu lâencombrement de la voie
Nous le passùmes chez Monsieur Iankéléwitch qui voulait me donner sa fille unique en mariage
Puis le train repartit.
Maintenant câĂ©tait moi qui avais pris place au piano et jâavais mal aux dents
Je revois quand je veux cet intérieur si calme, le magasin du pÚre et les yeux de la fille qui venait le soir dans mon lit
Moussorgsky
Et les lieder de Hugo Wolf
Et les sables du Gobi
Et Ă KhaĂŻlar une caravane de chameaux blancs
Je crois bien que jâĂ©tais ivre durant plus de 500 kilomĂštres
Mais jâĂ©tais au piano et câest tout ce que je vis
Quand on voyage on devrait fermer les yeux
Dormir
Jâaurais tant voulu dormir
Je reconnais tous les pays les yeux fermés à leur odeur
Et je reconnais tous les trains au bruit quâils font
Les trains dâEurope sont Ă quatre temps tandis que ceux dâAsie sont Ă cinq ou sept temps
Dâautres vont en sourdine, sont des berceuses
Et il y en a qui dans le bruit monotone des roues me rappelle la prose lourde de Maeterlinck
Jâai dĂ©chiffrĂ© tous les textes confus des roues et jâai rassemblĂ© les Ă©lĂ©ments Ă©pars dâune violente beautĂ©
Que je possĂšde
Et qui me force.
Tsitsika et Kharbine
Je ne vais pas plus loin
Câest la derniĂšre station
Je débarquai à Kharbine comme on venait de mettre le feu aux bureaux de la Croix-Rouge.
Ă Paris
Grand foyer chaleureux avec les tisons entrecroisés de tes rues
Et tes vieilles maisons qui se penchent au-dessus et se réchauffent
Comme des aĂŻeules
Et voici des affiches, du rouge du vert multicolore comme mon passé bref du jaune
Jaune la fiĂšre couleur des romans de la France Ă lâĂ©tranger.
Jâaime me frotter dans les grandes villes aux autobus en marche
Ceux de la ligne Saint-Germain-Montmartre mâemportent Ă lâassaut de la Butte
Les moteurs beuglent comme les taureaux dâor
Les vaches du crĂ©puscule broutent le SacrĂ©-CĆur
Ă Paris
Gare centrale débarcadÚre des volontés carrefour des inquiétudes
Seuls les marchands de couleur ont encore un peu de lumiĂšre sur leur porte
La Compagnie Internationale des Wagons-Lits et des Grands Express EuropĂ©ens mâa envoyĂ© son prospectus
Câest la plus belle Ă©glise du monde
Jâai des amis qui mâentourent comme des garde-fous
Ils ont peur quand je pars que je ne revienne plus
Toutes les femmes que jâai rencontrĂ©es se dressent aux horizons
Avec les gestes piteux et les regards tristes des sémaphores sous la pluie
Bella, AgnĂšs, Catherine et la mĂšre de mon fils en Italie
Et celle, la mÚre de mon amour en Amérique
Il y a des cris de sirĂšne qui me dĂ©chirent lâĂąme
LĂ -bas en Mandchourie un ventre tressaille encore comme dans un accouchement
Je voudrais
Je voudrais nâavoir jamais fait mes voyages
Ce soir un grand amour me tourmente
Et malgré moi je pense à la petite Jehanne de France.
Câest par un soir de tristesse que jâai Ă©crit ce poĂšme en son honneur
Jeanne
La petite prostituée
Je suis triste je suis triste
Jâirai au Lapin Agile me ressouvenir de ma jeunesse perdue
Et boire des petits verres
Puis je rentrerai seul
Paris
Ville de la Tour unique du grand Gibet et de la Roue.
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sujet imposĂ©  âVoyage autour des Ă©toiles â
Je crois toujours dĂ©ranger. Je crois toujours Ă lâerreur. Ă lâĂ©ventualitĂ© quâon mâinvite par pitiĂ©. Jâai la solitude triste et elle se voit. On finit toujours par ĂȘtre dĂ©masquĂ©.Â
Il a paru sincĂšre alors je suis venue. HĂ©sitante, mais je suis lĂ . Je sens son corps prĂšs du mien. Jâai attendu que la nuit descende. Jâai attendu tout le jour. Mais lâĂ©tĂ© est tenace, aussi ai-je dĂ» supplier le soleil pour quâil sâabandonne Ă la lune rafraichissante.Â
Jâai lâamour nocturne. Et lui aussi je crois. On voit beaucoup trop le jour pour aimer vraiment.Â
Il mâa proposĂ© de le rejoindre, ce soir, sur la deuxiĂšme colline Ă droite, la plus haute. Seulement lorsque la nuit sera noire. Jâai respectĂ© ses conditions, des papillons dans le ventre. Il mâa promis une promenade, une promenade cĂ©leste. Il voulait mâapprendre les Ă©toiles.Â
Prise dâun malaise habituel quand le silence se fait trop Ă©pais, je peine Ă rester immobile. Comment fait-il pour demeurer si paisible, les yeux rivĂ©s au ciel ?Â
Je nâai quâune envie : percer le mystĂšre de cet homme, le rencontrer vraiment - et si ce nâest sur la terre ferme je suis prĂȘte Ă me propulser vers des hauteurs infinies. Son parfum dĂ©jĂ me donne le vertige, jâai quittĂ© ce monde quand mon regard a coulĂ© dans le sien.Â
Il a tendu son bras vers le ciel, son index dessine des lignes dans lâespace. Il relie de son doigt les Ă©toiles. Je suis envoĂ»tĂ©e par sa main. Il Ă©voque la Grande Ourse, câest un peu clichĂ© mais commençons par le dĂ©but, puis explique quâil faut dâabord repĂ©rer lâĂ©toile polaire, la plus brillante de toutes. Je lĂšve les yeux et me glisse en ses mots. Je suis sa main qui lĂ©gĂšrement se dĂ©place vers la gauche et vois pour la premiere fois apparaĂźtre la constellation. Sept Ă©toiles unies par un souffle invisible. Une oeuvre dâart dont personne nâest lâauteur. A moins que ce ne soit lui. Je mâĂ©tonne et mâĂ©merveille. Jâai lâimpression de dĂ©coder un langage, la plus vieille langue du Monde. Et lui, mon traducteur, semble ravi. Je scrute lâĂ©cran cosmique avec une attention redoublĂ©e. Son corps me tient chaud. Il poursuit son discours, avec ce mĂȘme silence -maintenant dĂ©licieux- entre les mots. Il mentionne les noms de Licorne puis de Petit Chien. Jâentends CassiopĂ©e - mon corps frissonne - ⊠a la forme dâun âWâ et je suis rassurĂ©e. La pensĂ©e dâune femme Ă ses cĂŽtĂ©s mâest insupportable.Â
Sa voix est encore plus enjouĂ©e lorsquâil cite Orion. Ce nom mâest familier, je me souviens de lâOdyssĂ©e, de lâEnĂ©ide. Nos passions fusionnent, lâengouement est palpable ; lui aussi est avide de mystĂšre, lui aussi est en quĂȘte de sens. Il prĂ©cise quâOrion, chez les grecs, est un chasseur lĂ©gendaire, un gĂ©ant orgueilleux et que, tu vois ces petites Ă©toiles alignĂ©es sous la ceinture, câest son poignard. Je ne lâĂ©coute plus. Jâose discrĂštement dĂ©poser un peu de mon regard sur son visage Ă peine Ă©clairĂ©. Je lui vole son profil. Je le dĂ©vore. Je mâaperçois de ses taches de rousseur, sur le moelleux de ses joues. En pointillĂ©, elles Ă©gayent sa peau.Â
Jâaimerais les relier les unes aux autres du bout de ma langue.Â
En faire la plus belle des constellations.
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Es-tu parvenu jusquâaux sources de la mer, as-tu circulĂ© au fin fond de lâabĂźme ? Livre de Job, 38, 16
La vie dans les ocĂ©ans doit ressembler Ă un vĂ©ritable enfer. Un vaste enfer impitoyable de danger permanent et immĂ©diat. Câest un tel enfer que, au cours de lâĂ©volution, certaines espĂšces - y compris lâhomme - ont rampĂ© et fui vers de petits continents de terre ferme, oĂč les leçons de tĂ©nĂšbres se poursuivent. Werner Herzog
Il sâest Ă©coulĂ© trois milliards dâannĂ©es trois milliards dâannĂ©es entre les premiers dĂ©veloppements de la vie primitive dans la mer et le moment oĂč Hugo Aasjord mâa appelĂ©, un samedi soir de juillet, alors que jâĂ©tais pris par un dĂźner animĂ© dans le centre dâOslo.
Quelquâun a Ă©crit que notre planĂšte de devrait pas sâappeler la Terre. De toute Ă©vidence, elle devrait sâappeler la Mer.
Câest la mer qui a engendrĂ© la poĂ©sie dâArthur Rimbaud. La mer a Ă©tĂ© la clef dâune langue Ă©largie qui, avec âLe bateau ivreâ (1871), les a conduits dans la modernitĂ©, lui et la poĂ©sie. Le bateau est pris dans une tempĂȘte et coule pour ne plus faire quâun avec lâocĂ©an :
Et dĂšs lors, je me suis baignĂ© dans le PoĂšme De la Mer, infusĂ© dâastres, et latescent, DĂ©vorant les azurs verts; oĂč, flottaison blĂȘme Et ravie, un noyĂ© pensif parfois descend
Sous la surface il y avait un monde Ă part qui recelait dâinnombrables crĂ©atures dont jâignorais tout. Dans les livres, jâavais vu les photos des espĂšces marines connues, et câĂ©tait plus que suffisant : la vie sous lâeau paraissait bien plus riche et passionnante que la vie sur terre. Des bĂȘtes Ă©tranges nageaient alentour, presque sous notre nez, mais nous ne pouvions pas les voir, nous ne pouvions pas les toucher, nous pouvions tout juste deviner ce qui se passait sous lâeau.
La mer a conservĂ© son pouvoir dâattraction sur moi. Une grande partie de ce que nous trouvons mystĂ©rieux et passionnant perd son aura dĂšs les premiĂšres annĂ©es de notre jeunesse. Mais la mer nâa cessĂ© de me paraĂźtre plus grande, plus profonde et plus fantastique.Peut-ĂȘtre y avait-il lĂ un atavisme, un don qui avait sautĂ© plusieurs gĂ©nĂ©rations, que jâavais hĂ©ritĂ© de mon trisaĂŻeul, lui qui avait fini au fond de lâocĂ©an.
Les projets de Hugo possĂ©daient un autre attrait que je nâai pas vu sur le moment, et que je ne vois toujours pas clairement, si ce nâest Ă la pĂ©riphĂ©rie de mon champ de vision, un peu comme lâĂ©clat dâun phare perce la nuit dâun bref rai de lumiĂšre.
En fait, il y avait plein de choses que jâaurais dĂ» faire quand jâai rĂ©pondu sans hĂ©siter : oui, allons-y, partons en mer Ă la pĂȘche au requin du Groenland.
Les plus grandes dĂ©couvertes attendent au fond des mers et des ocĂ©ans. Il ne cesse de surgir des formes de vie dont, jusquâalors, nous ne soupçonnions pas lâexistence. Nous connaissons souvent fort mal des animaux de grande taille qui vivent prĂšs des cĂŽtes. Il existe peut-ĂȘtre autant de requins que dâhumains sur terre. Et qui a conscience que, dans les profondeurs et les courants du Vestfjord, on trouve des requins du Groenland, qui peuvent mesurer jusquâĂ sept ou huit mĂštres de long et peser jusquâĂ mille deux cents kilos ? A part Hugo bien entendu.
Nous avions pris notre dĂ©cision ce soir-lĂ , il y a deux ans. CoĂ»te que coĂ»te, nous allions capturer un de ces monstres voraces ayant des centaines de millions dâannĂ©es dâĂ©volution sur le dos, des toxines potentiellement mortelles dans le sang, des parasites dans les yeux et des dents similaires Ă celles dâun Ă©norme piĂšge Ă renards, mais bien plus nombreuses.
Il y a plus de gens qui ont Ă©voluĂ© dans lâespace que dans les abysses. Nous connaissions bien mieux la surface de la Lune, voire les mers assĂ©chĂ©es de Mars. Sous la mer, la vie est comme un rĂȘve dont il faut beaucoup de temps pour se rĂ©veiller.
Chaque fois quâun requin attaque un homme, cela fait les titres de lâactualitĂ© de la terre entiĂšre. Les gens imaginent un tueur impassible aux yeux inexpressifs qui frappe soudain et sans bruit. Une gueule pleine de dents acĂ©rĂ©es et pointues monte dans le colonne dâeau et mord le bras, la jambe ou la taille dâun pauvre nageur innocent. Le sang frais colore la mer en rouge et, aprĂšs un bref combat inĂ©gal, le requin regagne les profondeurs en se goinfrant dâun membre ou deux. Nous avons peur du fait quâil nâa pas peur de nous.
Quand des gens sont attaquĂ©s par des requins, cela rĂ©sonne comme lâĂ©cho dâun passĂ© antĂ©diluvien oĂč nous ne dominions pas encore le monde avec nos technologies avancĂ©es. Notre contrĂŽle sur le monde est balayĂ© en quelques secondes ; soudain, nous ne sommes plus celui qui tue, mais celui qui est tuĂ©. La possibilitĂ© que cela se produise est quasiment inexistante.Mais nous craignons de nous retrouver dans les profondeurs froides, entourĂ©s de crĂ©atures qui vont nous dĂ©vorer jusquâĂ ce quâil ne reste rien. JusquâĂ ce que nous ayons complĂštement disparu.
De toute façon, nous allons disparaĂźtre. Mais dans les abysses obscurs , au fond, lĂ oĂč attendent tous ces poissons et ces petites bĂȘtes, nous disparaissons dâune maniĂšre tellement absolue que cette idĂ©e nous est inacceptable.
Le livre de la mer ou lâart de pĂȘcher un requin gĂ©ant Ă bord dâun canot pneumatique sur une vaste mer au fil de quatre saisons Morten A. Stroksnes
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PensĂ©es dans lâeau. Mon os de lâĂ©paule droite est nouveau, pointe, Ă chaque geste je le ressens me percer. Mon encre est plus foncĂ©e que la mer. Jâai repensĂ© Ă une fille rousse Ă chevelure, croisĂ©e sur une chaĂźne mĂ©tallique. RĂ©sonance. Si vous pouviez la vivre. Croiser des ĂȘtres vivants est une aide. Jâai regardĂ© des poisons. Pauvre de mĂšre. Contre le vertige, diriger son regard sous lâeau. Le corps de mes parents, sous lâeau, sans tĂȘte, mon pĂšre qui se dĂ©bat lentement avec lâeau et son corps grossit. Ils flottent. Rappelez-vous de vos corps flottants. Mes parents, corps de mon corps.  Un poisson prĂȘt Ă pondre, le mal. Je nâai pas dans ma vie le mal. Je ne connais pas ĂȘtre la crĂ©ature dâun autre. Je ne connais pas. Voir un poisson malade est une Ă©preuve. Un ver rouge dans le crĂąne lui pousse. LâEnfer. CâĂ©tait un tuyau, lâemprisonnement, un tuyau, un fil, un ver fin, un cordon rouge transparent, fraise vide, sortait du cadavre crĂąne. Enceinte Ă©tait lâeau du Mal. Corruption totale, comme il ne peut quây en avoir dans les dĂ©lires et ce poisson enceinte, ensorcelĂ©, occupĂ© pour accoucher mystifiĂ©, dĂ©truit. Rien de pire quâun enseveli par un autre. Un insecte, un poisson, un homme et un homme. Lâabjection sous lâeau, le mal va Ă©clore entre lâhomme et les animaux. Ăcrire fait tomber. Cela tombe et je ne sais pas. Mes idĂ©es tombent dans le nĂ©ant en vie. Un homme, ami loin que les seuls. La pensĂ©e Ă©crite tombe, il nâen reste que la trace, il ne devrait pas. La trace se contourne. Plaisirs, ajouts, ces assemblages se rencontrent par la main plume. PoĂ©sie incantation immature.
Parfois, je fais des crises de mutisme, dâautiste contrĂŽle, silence. Mon corps est doublĂ©, peau interne. Coffre du bruit. Antidote qui Ă©pouse. Elle se dĂ©gonfle avec gravitĂ© et fatigue, comme si elle avait commencĂ©. Je ne parle pas, ne pense pas, Ă©coute, regarde tout mouvement Ă mes cĂŽtĂ©s sans mâen dĂ©partir. Cela bouge, je reste. Une parole offerte Ă mon intĂ©rieur peut mâĂ©veiller, me couper. Cela fait sept minutes quâil nâest plus lĂ . Je suis figĂ©. Je peux me lever ou mâasseoir. Ils vivent en face de moi et je ne lâimagine pas. Ils vivent sans moi. Ce nâest presque pas une vie. Je mâallonge sur un muret, regarde les Ă©toiles lĂ oĂč les rĂ©verbĂšres du village sâarrĂȘtent, et je mâen veux. La nuit tombe dâun coup, la route est droite jusquâau phare et la falaise, certains jeux de voitures au loin passent et le temps quâils se rapprochent, la lune prend le temps dây ressembler. Je regarde le ciel sans mot Ă dire penser. Les enfants coupent la route et sâamusent sans danger.
Ferme les yeux et coule, souffle tout lâair que tu peux souffler et atteint le sable. Homme aĂ©rien je ne pourrais plus ĂȘtre debout sur le sol. Homme maritime, lâeau est un mĂ©diateur qui fait dĂ©vier le regard perçant. Il nây a rien Ă percer sur la mer, vous flottez. Lâhomme se recommence dans lâeau. Peut-ĂȘtre la question de lâhumanitĂ©, incapable de se transcender sans fracture, que je peux ressentir de lĂ oĂč elle est nĂ©e et de lĂ oĂč elle persiste sur la terre, se fait plus sĂšche sous lâeau, parce quâil nây a pas plus grande nature adverse repoussant air et pensĂ©e.
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Je porte les patates
achetées au marché
à pince au crépuscule
dans le froid de l'hiver
la vapeur de mon souffle
s'exhale en refuge soudain
ma perception s'envole
mes oreilles sont froides
leurs tympans rebondissent
sous le rythme cardiaque
je rentre en ascenseur
par le quinziĂšme Ă©tage
je pénÚtre mon antre
je m'installe en cuisine
j'Ă©coute le quatre ohms
radio plastoc silicium
je pĂšle les patates
les plonge dans l'eau salée
j'allume la résistance
je pénÚtre au salon
alcĂŽve oĂč la
lune jette au mur
sa blancheur nocturne
les patates sont chouettes
molles et fermes
rondes et pointues
le tintement de l'inox
sur le kaolin chaud
encense encor une fois
mon ouĂŻe et mes yeux
des reliefs (or) translucide
des racines déterrées
mes guibolles s'allĂšgent
planant sur le matelas
je dors
la voiture bleue m'emmĂšne
au travers des saphirs
vers les azurs d'Ă©meraude
mon Ă©cran LCD
me dicte l'agenda
mon cerveau se connecte
Ă la bibliothĂšque
je clique au rythme algorithmique
de mes neurones reprogrammés
je porte les patates
à pince au crépuscule
la vapeur de mon souffle
s'envole
pénÚtre mon antre
la lune jette sa blancheur
sur le mur nocturne
au travers des saphirs
les azurs d'Ă©meraude
les Ors et les ZĂ©niths
neurones
pause
       *  *            *        *
la pastÚque m'envoûte
rouge délice
humide délicate
fraßcheur projetée
de l'or blanc de l'été
        *  *              *         *
Alice TrÀumend
Sept octobre deux mille dix neuf
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- Banane. - Jâen sais rien, papa. Tu sais, depuis le divorce, je ne les vois plus beaucoup. Je ne les voyais dĂ©jĂ pas avant. - Et tu vas tuer le chien ? - Tuer le chien ? Assis sur son lit dâhĂŽpital, il hausse les Ă©paules. - Oui. Tuer le chien. - Je ne sais pas ce que ça veut dire, papa. Je suis dĂ©solĂ©. Putain, tuer le chien, mais oĂč est-ce que tu vas chercher ça, sĂ©rieux. Le vieux paternel sourit et tape son index sur le haut de son crĂąne. - Dans la poubelle, MĂ©dor ! Le fils Ă©clate de rire. Au bout de quelques secondes, il reprend son souffle, les larmes aux yeux. - Je tâaime papa. - Jâen veux aussi. Une larme glisse le long de la joue de JoĂ«l. Mais il sourit toujours. - Ăa va ? Tu nâes pas trop fatiguĂ© ? Bon et comment va la bombe dans la chambre Ă cĂŽtĂ© ? Le vieillard sourit. - Elle sent le renard mais je trouve quâelle a un parapluie du tonnerre. JoĂ«l remue la tĂȘte. Il ne comprend pas. Enfin, il croit comprendre. - Tu lui as parlĂ© cette fois apparemment ? LâinfirmiĂšre mâa dit quâelle tâavait trouvĂ© dans sa chambre.âšLe pĂšre de JoĂ«l sâĂ©nerve. Il postillonne en parlant trop vite. - Le poulet dans le corridor. Je te baille, elle me coupe les pieds en sept. Et Ă chaque lune, jây ai droit ! - Tu ne lâaimes pas celle-lĂ . Tout ça parce quâelle te fait tes piqĂ»res. Mais il faut bien que quelquâun les fasse. Le vieil homme descend de son lit, qui grince. Il tire sur sa blouse verte et montre son postĂ©rieur Ă son fils. - Mais elle me coupe le poil ! JoĂ«l ne peut sâempĂȘcher un nouveau fou rire. Il regarde son pĂšre qui grimpe sur le lit et se couche. - Tu es fatiguĂ© ? - Une feuille. - Je vais te laisser alors. Tu vas dormir. Ăa va te faire du bien. Les yeux mi-clos, il se cale dans son oreiller et tend sa main gauche vers son fils. - Chasse lâoiseau. JoĂ«l tire sa chaise pour se rapprocher du lit. Il prend dĂ©licatement la main de son pĂšre qui lui serre avant de la relĂącher. - Jâattends que tu tâendormes dâaccord ? - Oui, murmure le vieil homme. Oui. Il ferme les yeux. JoĂ«l soupire. Et tente de retenir Ă nouveau un fou rire pour ne pas rĂ©veiller son pĂšre endormi.
Sur les nuages de la route, Pierre Faure, 2013
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Souvent dans les champs Navigue ce bohÚme, Esseulé par le temps, Il mendie, drÎle de stratagÚme.
Pardonnez-moi monsieur de n'avoir su restituer votre ùme, qui malgré vos proportions quelque peu incertaines, était belle, plus que je ne le saurai dire. Vous l'a-t'on déjà dit ?
Jâabsorbe comme un soldat solitaire OĂč es-tu, oubliĂ© par la mort ? Brume Ă s'en brĂ»ler les lĂšvres, Le meilleur des mondes se passera de toi.
Lâabeille qui butina sa ruche avala le dĂ©sert. Puis soudainement, il voulu caresser la glace, comme on caresse une feuille qui fond en ĂŽtant des couleurs au monde, Des doigts et la souplesse boucle anti-errant anti Ăąge, faiblesse de la peau dĂ©couverte mutilĂ©e.
Il faudrait peut-ĂȘtre savoir se retourner dans les lits occupĂ©s.
La chambre des voitures, je le savais, il me fallait du temps, puis la buée. Maman passe.
Aujourd'hui des arbres, demain des hommes Plus blanc que le blanc il y a l'Ă©meraude.
Deux comme trois, comme dix et comme sept. Deux comme jamais, comme encore, La tristesse démange alors il grimpe.
Sans affres sans ressources, sans sale sans vĂȘtements de chaudrons. Je ne suis personne, Chante terre ferme Le corbeau au soleil son temps se forme de semaines.
Un clair-obscur aux jambes désagrafées début, début, début, début, début Fermer les yeux.
SchlĂ€ft Schwan, schlĂ€ft Wacht nicht auf ! Bender ist hier. Warten und klingen Schwarze bĂ€ume ĂŒberall Eine Biene pflegt die Rinde Wer Schleier die Flamme ?
Je me vois. La pince et sa proie dĂ©vie Il est allongĂ© le comble. Je ne veux pas rentrer chez moi ĂtirĂ© : Le parcours sans Ăąme dâune chaise affable Ărudite la marche Ă©pousĂ©e Le givre bien fait Le silence aussitĂŽt calme.
Giant library, crows crows, too many dead depresses the temperature Knives are our centuryâs fairyland Planes are sea horses to learn by heart Dogs are blind jewels that lick gases My teacher is waiting for me in his office, I think he wants to send me to jail but I will sleep on the libraryâs table because Sperm whales migrations should be supported somehow.
Cet insecte est mort devant mes yeux il y a quelques mois, en hiver, et son agonie ne fut pas une agonie mais cela qui le dit qui le dit Ăa câest des pĂ©tales-foutres Ăa câest autre chose que des pĂ©tales-foutres et autre chose encore que jâavais dis Ăa câest un corbeau qui mĂ©rite dâĂȘtre seul car il allait perdre une plume, ce corbeau en dit plus long sur lâabsence que vous sur moi.
Il y a ce chien de vingt quarts dâheures; la journĂ©e porte du fruit et du sang : le jeu du jardin montre les dents son ami lâa rĂ©veillĂ© : suis-je une femme ou un dĂ©mon ?
Ma vie est pleine de rĂȘves, câest chalumeau
RĂ©union de famille dans la belle ville qui nuit aux rapprochements.
Arbres dont la beautĂ© est un secret comme par habitude Trois lettres Ă bout de pieds, moi durant lâathlĂšte blanc Avant les voisin jâirai Ăcourter paysages et vallĂ©es mares et sang et pas de loup.
Jâimite une activitĂ© Prendre des photos les ramasser me fait comprendre que je suis avec vous.
Bonjour Mr montagne qui glaçonne pour une raison imbibĂ©e dâincongruitĂ© et ma main elle pose Moi et les paons qui en savent long sur le long cheveux que jâai perdu Moi et les traces des ballons de foot sous pluie sur un mur sous pluie et les lunes sous pluies Moi quand je dĂ©couvre un cadavre et que je mange une clĂ©mentine ou bien une mandarine je mourrais sans savoir la diffĂ©rence et que je dĂ©pose autour de son corps des pelures sans broncher et quâune moto sourit Ă mes cĂŽtĂ©s
Contredisant rimbaud Que dit-8 La plupart des gens. R Ne sont pas prĂȘts Ă ce Quâil soit parlĂ©.
With you in town let me sleep He will ask, she will point at the opened subway, opened in half Is crying crying I light a candle, my hair were not washed, MoĂŻse once sat down and the subway bloomed on a redhead eating the smoke girl.
RĂȘve dâoeil je dois parler dâenfer nous, ce que nous savons faire, Ă©crire que lâon ronge Brasero : venue du problĂšme.
Nous crĂ©ons  sans savoir les voir, câest impressionnant, oĂč vivez-vousÂ
Et puis nous oublions nos vestes de bille.
Nos ampoules, nos armures.
Mendie sur le champ.
OĂč je vis : entre deux trois plantes ou deux trois feuilles quand jâai moins chance. Disons que je mâabrite.
Câest ici que les enfants sont jouĂ©s JâĂ©cris ce qui mĂ©rite de ne pas ĂȘtre Ă©crit, je ne fais que passer la nuit, boule de cygne, comptez les soleils je mâoccupe des plumes, ciels Ă©toilĂ©s quâils disaient.
CĆur beau-53 temps, lâĂ©mule, joue Ă lâamulette rassis, J et A sont chromosomes, un couple, ils pĂšlent ma mandarine Aucune idĂ©e de rien le gĂ©ant dâIndonĂ©sie est en retard je me revois encore confirmĂ© par Edgar et sa trompette en vĂ©lo, vivre et survivre !
Ătre en sursis avec les doudz comme dit le cercle blond ou ma sĆur pas sans image et pas sans image
Nous connaissons tous ce canard aux yeux ouverts.
Il y a parfois lâanĂ©mone et nous luire se fait par touchant  dos. Ăcrit Bien Ă©videmment que nous composons. Dans reposer il y a tout ce quâil faut savoir plastifier. Si, moi aussi, je place un saut entre la derniĂšre lettre et mon point, câest que les pieds cornĂ©s de Christ nâĂ©taient dĂ©jĂ plus collants au sol. Sa boĂźte. Tu aurais dĂ» ĂȘtre danseuse et moi plasticien des trĂȘves lactescentes ? Bouscule puis fais ton image, entre en toi, ici, viens, apprends Ă parler Ă celui. Fall : suppliez-vous dâoublier lâanglais et lisez ce mot en français et entendez ce que je crois dire directement dans votre lascive bouche jetĂ©e loin de moi qui est loin Câest Ă©vident, deux fois dĂ©jĂ , je comprends la face voilĂ©e reprĂ©sentĂ©e dâune photographie et je me pense flambant-nouveau, par exemple, exutoire parallĂšle dâun identique souhait pour la fontaine oĂč brille la piĂšce toujours Ă©talĂ©e-gronde. Urne funĂšbre et active sincĂ©ritĂ© du texte que je nâai pas vu Ă©crire, mais son dos, je lâai vue, je lâai poussĂ©e, on ne pouvait on ne devait que pousser son dos incessant et je lâai fais et je lâai bravĂ© et ils lâacclamĂšrent au lieu de mâacclamer et jâacclamais au lieu des brames du daim aveugle et corrosif, fĂȘte des mĂšres.
Nous Ă©tions lĂ , pouce de montagne, cochon dâivoire, bec dâoiseau au fascicule petit. Si notre ton est pĂ©remptoire oĂč est-il, dites-le que celui qui sâĂ©loigne devienne oui des jambes des jambes nous ĂŽtions comme avant Ătant nos jambes comme le cerf effeuille blanche. Ses mues ? Murs de bois, Ă©tincelante affront, libidinale sexe, vaseuse Ă©toffe prescrite en remĂšde.
Aurora. artiser.
Les foulques macroules nous possĂšde et câest bien comme cela quâil faut faire
Ai{-je}adireadieu
Adieu lâĂ dieu vous voyez bien ce qui est possĂ©dĂ© : sans dieu pas dâau revoir, pas de revoir, que de voirs nâen sauront rien ! ImbĂ©lice, chutatante, vasistas montagneux, chargĂ© de ronces de pinces de corps blancs (dans les yeux sachez que jâai vu Ă quoi vous ressembliez vraiment, vous ĂȘtes ma cĂ©dille, mon apostrophe affiliĂ©e au B brĂ»lĂ©, B qui brĂ»le, B mauve maudit, maudite ?
Usine Ă cĂŽtĂ© de ça corps, usine Ă cĂŽtĂ© de car corps. Car de corps et usine. Car de corps et MĂ©lusine retrousse sa manche qui pend dans mon Ćil lovĂ©e sur un endroit-enfant nain, nain riviĂšre, rincer lâusine avec son corps, frotter lâusine en se mettant fort dans son pied -oreille : cĆur de lâĂȘtre, frotter lâusine.
Je crains de devoir décrire cette image.
Combien de forĂȘts sont privĂ©s de cils alors Ă lâheure de nous nous parlons
Boutonner la forĂȘt, que la ville est grande. Murmures oisifs, se perdre, marcher, devoir marcher, ne plus manger, se relever et ĂȘtre en libertĂ© accouplĂ© avec soi. Une perle de sang sâaccroche Ă lâanneau.
Perle de lune postiĂšre ne regardez pas trop longtemps vous aimez aimez pas Se travestir est amour quand on embrasse la femme disparue.
Beau est beaucoup beaucoup est bien bien est mien
Depuis quand Chronos perce la lumiĂšre et joue carte, non pardon, perce la crĂȘte de lumiĂšre, non pardon, perce la carte de son.
ll pourrait plusieurs y en avoir, bien sĂ»r, mais ce nâest pas parti. Le coup.
Gretel et Hansel marchent à reculons et leurs pieds sont nus, route des dames, soudain un arbre les bat.
Gretel devient immonde jardin, Hansel se transforme en orme.
Aucun intĂ©rĂȘt mais lâidĂ©e : fruit des fleurs des arbres, votre abribus sa vitre me soutient et floue. Sale, gratter. Tout ça
Sûr-sourire je vous laisse
Le grimoire chÎme, lùcher la manche mùchée. Il est surtout question de la juste récompense.
Amour tendre incertain ne me souvient plus Ou seulement si peu que compter est une affaire infectieuse
Amour tendre incertain je vais conduire, sens mon ventre sur moi tenir.
Bouquet de ventres, gĂ©nuflexion aux rides, croupes maniaques BĂąche lâor, combien de jour avant de mendier ?
Informer les crĂ©atures et pourquoi les S Ă©taient tous des F Ă la forĂȘt de Windsor. Jâavais failli tout taper mais jâai trop dormi enroulĂ© en mouton
Câest si drĂŽle de tracer des carrĂ©s dans ces rubis pour vous les bĂ©bĂ©s i et les bĂ©bĂ©s u
Quâest-ce quâon se marre ! Ah oui, et surtout quand on dort
Puis la nuit ! Non, vous trouvez pas ? Encore fallut-il faut-il eĂ»t-il fallu chercher : cher cher, drĂŽle de dĂ©coupage Je sais pourquoi les noirs sont noirs câest parce-que les ciseaux Ă©taient froids Alors pour se rĂ©chauffer et bien ils ont rigolĂ© Ă plat Ah non câest quâils avaient froids et des ciseaux et ils Ă©taient grands jusquâau ciel noir Et le plat câest momomo
Je vais Ă©crire un porme avec le mĂȘme nombre de lettre exactement hi Allaerm tâes pas tout nu dans ta tombe Câest gentil de ta part Mais tu nâas pas volĂ© assez de bains dâenfants Merci pour beaucoup Raconter câest fatiguant : fĂȘtes des fourmis des Ă©lĂ©phants et des poissons Calme et sans lapins je suis jâhante la gente des reins Lâalcool mugit Ă table la nuit Forgive farfadet Feu Ă lâo, menthe Ă peau hongroise en verbe dâextase vomir la forĂȘt choca pulse dal fal chin m h animal plaza partir pour le signes
Câest eux que je reçois sur mon Ćil sur ma main au milieu des hachĂ©es, des arbrisseaux Nous attendons, sommes-nous pressĂ©s, les insectes nous volent la pression, dĂ©fĂšquent avec passion et le conte est contĂ©. Jâavance par derriĂšre, au milieu repoussant des aĂ©roports ! On mâĂ©claire par vĂ©los interposĂ©s, jâai les jambes Ă mon cou, jâavance Peut-ĂȘtre quâil doit ĂȘtre beaucoup question de ces choses, ombres de jambes parmi la lumiĂšre, faire sienne : Attaque de miroir en nuit.
Jâavais des tessons dans les pieds et des fourmis sur les jambes jâaimerais savoir quel objet vous dĂ©truiriez. Comme tous les gens malades jâai Ă©tĂ© Ă©duquĂ© au plomb pour cela que je suis dans le train
Le pare-brise de F, espiĂšgle divinitĂ© qui nâa que le corps du chat pour chercher Ă ĂȘtre la cible de lâamour I : Je Tu, je tâaime dans le vent dâune vapeur : boyauter.
What kind do you like, she asked. The fly-mouth in the shut down island Its a shadow of my wound.
A pleure quand B lui fait remarquer
Aeher.a
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DIMANCHE DES RAMEAUX (Suite)
                  Le soir - plans extérieurs
EnchaĂźnement sur JĂ©sus et les siens assis sur le sol du Jardin des Oliviers. Il ne fait pas encore nuit et câest un soir de pleine lune. Il fait tiĂšde avec une lĂ©gĂšre brise. Nous entendons le bruissement du CĂ©dron qui coule Ă proximitĂ© et un rossignol positionnĂ© non loin de lĂ au sommet dâune branche dâun olivier. Le soleil nâest plus prĂ©sent mais la lumiĂšre crĂ©pusculaire naturelle Ă©claire faiblement les visages. JĂ©sus parle aux apĂŽtres qui Le regardent attentivement :Â
â AprĂšs le triomphe de ce matin, bien diffĂ©rent est votre esprit. Que dois-je dire ? Quâil est soulagĂ© ? Oh oui ! Selon lâhumanitĂ© il est soulagĂ©. Vous ĂȘtes entrĂ©s dans la ville, tout tremblant Ă cause de mes paroles. Il semblait que chacun craignait, pour lui-mĂȘme, les sicaires au-delĂ des murs, prĂȘts Ă lâassaillir et Ă le faire prisonnier. En tout homme, il y a un autre homme qui se rĂ©vĂšle aux heures les plus graves. Il y a le hĂ©ros qui, aux heures du plus grand danger, bondit de lâhomme doux que le monde a lâhabitude de voir et juge insignifiant, le hĂ©ros qui dit Ă la lutte : « Me voici », qui dit Ă lâennemi, Ă lâarrogant : « Mesure-toi avec moi ». Et il y a le sacrĂ© qui, alors que tous sâenfuient terrorisĂ©s devant les tyrans qui veulent des victimes, dit : « Prenez-moi en otage et en sacrifice. Je paie pour tous. » Et il y a le cynique qui profite personnellement des malheurs de tous et rit sur les corps des victimes. Il y a le traĂźtre qui a son courage particulier : celui du mal. Le traĂźtre qui est lâamalgame du cynique et du lĂąche, qui est aussi une catĂ©gorie qui se manifeste dans les heures graves. Car cyniquement il tire profit dâun malheur et lĂąchement il passe au parti le plus fort, osant, pour en tirer profit, affronter le mĂ©pris des ennemis et les malĂ©dictions de ceux quâil abandonne. Il y a enfin le type le plus rĂ©pandu, le lĂąche qui, aux heures graves, nâest capable que de regretter dâavoir fait connaĂźtre son appartenance Ă un parti et Ă un homme, maintenant frappĂ© par lâanathĂšme, et de sâenfuir⊠Ce lĂąche nâest pas aussi criminel que le cynique ni aussi dĂ©goĂ»tant que le traĂźtre. Mais il montre toujours lâimperfection de sa structure spirituelle⊠Vous⊠vous ĂȘtes tels. Ne le niez pas. Je lis dans les consciences. Ce matin, vous pensiez entre-vous : « Quâest-ce qui va nous arriver ? Allons-nous Ă la mort, nous aussi ? » Et la partie la plus basse gĂ©missait : « Que jamais ! »⊠Oui⊠mais vous ai-je jamais trompĂ© ? DĂšs mes premiĂšres paroles, je vous ai parlĂ© de persĂ©cution et de mort. Et quand lâun dâentre-vous, par excĂšs dâadmiration, a voulu voir en Moi un Roi et a voulu me prĂ©senter comme un roi, un des pauvres rois de la Terre, toujours pauvre, mĂȘme sâil est Roi et quâil restaure le royaume dâIsraĂ«l, jâai tout de suite corrigĂ© son erreur, et jâai dit : « Je suis Roi de lâesprit. Jâoffre, en ce monde : privations, sacrifices, douleurs. Je nâai pas autre chose. Ici, sur la Terre, je nâai pas autre chose. Mais aprĂšs ma mort, et votre mort dans ma Foi, je vous donnerai un Royaume Ă©ternel : celui des Cieux ». Vous ai-je dit, peut-ĂȘtre, quelque chose de diffĂ©rent ?... Non. Vous dites non⊠Et vous, alors, vous disiez aussi : « Nous ne voulons que cela. Nous voulons ĂȘtre traitĂ©s, et souffrir avec Toi, comme Toi et Ă cause de Toi. » Oui, vous parliez ainsi. Et vous Ă©tiez sincĂšres aussi. Mais câĂ©tait parce que vous raisonniez comme des enfants, comme des enfants Ă©tourdis. Vous pensiez quâil Ă©tait facile de me suivre, et vous Ă©tiez tellement imprĂ©gnĂ©s de la triple sensualitĂ© que vous ne pouviez admettre ce Ă quoi je faisais allusion. Vous pensiez : « Lui est le BĂšn ElohĂźm. Il le dit pour Ă©prouver notre amour. Mais Lui ne pourra ĂȘtre frappĂ© par lâhomme. Lui qui opĂšre des miracles saura bien faire un grand miracle en sa faveur ! » Si forte Ă©tait la foi humaine que vous aviez en ma puissance que vous arriviez Ă nâavoir pas foi dans mes paroles, la Foi vraie, spirituelle, sacrĂ©e et sanctifiante. « Lui qui fait des miracles pourra en faire un en sa faveur ! » disiez-vous. Or ce nâest pas un, mais un grand nombre encore que je ferai, et grĂące soit rendue Ă ElohĂźm !⊠Deux seront tels quâaucune intelligence ne peut y penser. Ils seront tels que seulement ceux qui croient en AdonaĂŻ pourront les admettre. Tous les autres, dans les siĂšcles des siĂšcles, diront : « Impossible ! » Et mĂȘme au-delĂ de la mort je serai un objet de contradiction pour beaucoup. En une douce matinĂ©e de printemps, jâai annoncĂ© dâune montagne les diverses bĂ©atitudes. Il y en a encore une : « Bienheureux ceux qui savent croire sans voir ».Jâai dĂ©jĂ dit en allant Ă travers la terre de PelishtĂźm1 : « Bienheureux ceux qui font la volontĂ© dâElohĂźm » et dâautres, jâen ai dit dâautres, car dans la maison de mon PĂšre nombreuses sont les joies qui attendent les sacrĂ©s. Mais il y a aussi celle-ci. Oh oui ! Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu avec leurs yeux corporels ! Ils seront tellement sacrĂ©s que, Ă©tant sur la Terre, ils verront dĂ©jĂ ElohĂźm, lâElohaĂŻ Yahweh, cachĂ© dans le MystĂšre dâAmour⊠Mais vous, depuis trois ans que vous ĂȘtes avec Moi, vous nâĂȘtes pas encore arrivĂ©s Ă cette Foi. Et vous croyez seulement ce que vous voyez. Câest pour cela que depuis ce matin, aprĂšs le triomphe, vous dites : « Câest ce que nous disions. Il triomphe et nous avec Lui ». Et comme des oiseaux qui remettent en place leurs plumes froissĂ©es par quelquâun de cruel, vous vous lever pour voler, ivres de joie, pleins dâassurance, libres de cette constriction que mes paroles vous avaient mises dans le cĆur⊠Etes-vous plus soulagĂ©s alors, mĂȘme dans votre esprit ?... Non. En lui, vous ĂȘtes encore moins soulagĂ©s, dâautant plus que vous nâĂȘtes pas du tout prĂ©parĂ©s Ă lâheure qui arrive. Vous avez bu les hosannas comme du vin fort et agrĂ©able. Et vous en ĂȘtes ivres. Un homme ivre est-il rempli de force ?⊠En effet, il suffit dâune main dâenfant pour le faire chanceler et tomber. Câest ainsi que vous ĂȘtes. Et il suffira quâapparaissent des sicaires pour vous faire fuir comme de timides gazelles qui, Ă lâapproche du chacal, se dispersent rapidement dâun cĂŽtĂ© et de lâautre dans les solitudes du dĂ©sert⊠Oh ! Prenez garde de ne pas mourir de soif dans ce sable brĂ»lĂ© quâest le monde sans ElohĂźm !⊠Ne dites pas, ne dites pas, ĂŽ mes amis, ce que dit Ieshaâyahou 1 en faisant allusion Ă votre Ă©tat dâesprit faux et dangereux. Ne dites pas : « Celui-lĂ ne parle que de conjuration. Mais il nây a pas Ă craindre, il nây a pas lieu de sâĂ©pouvanter. Nous ne devons pas craindre ce que Lui nous prophĂ©tise. IsraĂ«l lâaime, et nous lâavons vu »⊠Que de fois le tendre pied nu dâun petit enfant foule les herbes fleuries du prĂ©, pour cueillir des fleurs quâil portera Ă sa mĂšre, et croit ne trouver que des fleurs, et au contraire pose son talon sur la tĂȘte dâun serpent, en est mordu et en meurt ! Les fleurs cachaient le serpent⊠Ce matin aussi⊠ce matin aussi câĂ©tait ainsi ! Je suis le CondamnĂ© couronnĂ© de roses. Les roses !⊠Combien de temps durent les roses ? Que reste-t-il dâelles lorsque leurs corolles se sont effeuillĂ©es en une neige de pĂ©tales parfumĂ©s ? Des Ă©pines. Moi â Ieshaâyahou lâa dit â je serai pour vous, et je dis quâavec vous je serai pour le monde, sanctification, mais aussi pierre dâachoppement, pierre de scandale et ruine pour IsraĂ«l et pour la Terre. Je sanctifierai ceux qui auront bonne volontĂ© et je ferai tomber et briser en mille morceaux ceux qui auront mauvaise volontĂ©. Les Anges ne disent pas des paroles mensongĂšres, ni des paroles de peu de durĂ©e. Ils viennent dâEloah, qui est VĂ©ritĂ© et qui est Eternel, et ce quâils disent est vĂ©ritĂ© et parole immuable. Ils ont dit : « Paix au hommes de bonne volontĂ© ». Il naissait alors, ĂŽ Terre, ton Sauveur. Maintenant il va Ă la mort ton RĂ©dempteur. Mais pour avoir dâElohĂźm la Paix, câest Ă dire sanctification et gloire, il faut avoir « bonne volontĂ© ». Inutile ma naissance, inutile ma mort pour ceux qui nâont pas cette bonne volontĂ©. Mon vagissement et mon rĂąle, le premier pas et le dernier, la blessure de la circoncision et celle de la consommation, auront existĂ© en vain si en vous, si dans les hommes, il nây a pas la bonne volontĂ© de se racheter et de se sanctifier⊠Et je vous le dis : un trĂšs grand nombre dâindividus se butteront contre Moi qui ai Ă©tĂ© placĂ© comme colonne de soutĂšnement et comme un piĂšge pour lâhomme, et ils tomberont parce quâivres dâorgueil, de luxure, dâavarice, et ils seront enfermĂ©s dans le filet de leurs pĂ©chĂ©s et pris et donnĂ©s Ă SatĂąn. Mettez ces paroles dans vos cĆurs et scellez-les pour les futurs disciples⊠Allons, il fait nuit. La Pierre se lĂšve⊠(JĂ©sus se met debout et les apĂŽtres Lâimitent.) Un autre pas en avant sur la montagne qui doit resplendir au sommet, car Il est le Soleil. Il est la LumiĂšre, Il est lâOrient. Et le soleil brille sur les cimes. Il doit ĂȘtre sur la montagne car le vrai Temple doit ĂȘtre vu du monde entier. Et de moi-mĂȘme je lâĂ©difie avec la Pierre vivante de ma Chair immolĂ©e. Jâen assemblerai les parties avec le mortier fait de ma sueur et de mon sang. Et je serai sur mon trĂŽne recouvert dâune pourpre vivante, couronnĂ© dâune couronne nouvelle, et ceux qui sont au loin viendront Ă Moi, ils travailleront dans mon Temple, autour de lui. Et Moi-mĂȘme, je travaillerai mes pierres et mes artisans. Comme jâai Ă©tĂ© travaillĂ© au ciseau par le PĂšre, par lâAmour et par lâhomme et par la Haine, de mĂȘme je les travaillerai. Et aprĂšs quâaura Ă©tĂ© enlevĂ© lâiniquitĂ© de la Terre, en un seul jour, sur la pierre de celui qui est PrĂȘtre pour lâĂ©ternitĂ©, viendront les sept yeux pour voir ElohĂźm et dĂ©boucheront les sept sources pour vaincre le feu de SatĂąn⊠SatĂąnâŠ
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1 La Palestine. Traduction exacte : « Philistins ». Avant de devenir la « Palestine » cette terre Ă©tait en effet occupĂ©e par les Philistins Ă lâĂ©poque de lâExode.
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AprĂšs que JĂ©sus eut prononcĂ© une premiĂšre fois : « SatĂąn », il ferme les yeux. A la lueur de la lune nous devinons lâexpression amĂšre de son visage et il baisse la tĂȘte. Il garde un silence, puis reprend en secouant la tĂȘte une deuxiĂšme fois : « SatĂąn ». Enfin il relĂšve la tĂȘte, pose ses yeux sur Judas et lui dit sur un ton impĂ©ratif : â Iehouda, allons ! Et rappelle-toi que le temps presse et que pour le soir du jeudi lâAgneau doit ĂȘtre livrĂ©.
1 Nom hĂ©breu dâIsaĂŻe. Prononciation : Ieshayahou.
EXTRAIT DE lâOUVRAGE : âSCĂNARIO - LâULTIME ALLIANCEâ : http://www.prophete-du-sacre-coeur.com/scenario-l_ultime-alliance.pdf
http://www.prophete-du-sacre-coeur.com/ https://www.youtube.com/watch?v=1qI8FeNbFsM&t=621s https://www.change.org/p/emmanuel-macron-dieu-ne-veut-pas-de-fl%C3%A8che-sur-notre-dame-098097a0-f72c-4021-9b66-cc9c78ecb8a8?lang=fr-FR
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GRAND REPORTAGE - Notre envoyĂ© spĂ©cial a vĂ©cu dans cette ville les quelques jours qui ont vu sâenvoler le rĂȘve kurde dâune rĂ©gion autonome.
Envoyé spécial à Qamishli
Il est arrivĂ© dans lâaprĂšs-midi, ne sait plus trĂšs bien quand, tout est confus aprĂšs cette frappe qui lâa blessĂ©, Ă 6 heures, ce dimanche matin. Le filet de voix qui sort de sa gorge, ses traits tendus, ses yeux vagues, sa peau sĂšche â sur son brancard, le corps entier de Delil Hassakeh raconte les durs combats dont il vient de rĂ©chapper. Il sort de Ras al-AĂŻn. La petite ville, tout contre la frontiĂšre, est lâun des points dâentrĂ©e de lâoffensive turque en Syrie.
«On se battait dans lâusine, depuis 3 heures du matin. JâĂ©tais aux cĂŽtĂ©s dâun ami. Soudain, un missile nous frappe. Mon ami meurt. Je suis blessĂ©. Jâai fini par ĂȘtre Ă©vacuĂ©. En cinq jours de combats, je nâai pas vu le visage dâun ennemi», dit Delil Hassakeh - son nom de guerre. Ses traits se tendent. Chaque mouvement le fait souffrir. Il a reçu des Ă©clats dans la jambe droite et dans le dos. Il faut lâexaminer, mais ce nâest pas possible, dans cette clinique de Tall Tamer, Ă quarante kilomĂštres de Ras al-AĂŻn. Il attend son transfert.
à cÎté, sur un lit, couché en travers, sommeille un jeune homme aux allures de dormeur du val. Il a le bras droit en écharpe. Une infirmiÚre tente de le réveiller. «Camarade. Camarade. Réveille-toi. Camarade. Camarade. Quel est ton nom?» Le dormeur ne réagit pas. Il est roux, a le visage poupin.
Tout le contraire de Delil, tannĂ©, brun, barbu. Câest un Arabe de Hassakeh - la plus grande ville du Nord-Est syrien, dont il tire son nom de guerre. Il a rejoint les FDS, Forces dĂ©mocratiques syriennes, menĂ©es par les Kurdes, dans leur combat contre lâĂtat islamique, lors de la bataille de Raqqa, en 2017. Ă prĂ©sent, il se bat contre les Turcs, qui eux soutiennent nombre de groupes arabes. Au lieu de basculer dans les perpĂ©tuels changements dâalliances de la guerre civile syrienne, Delil a choisi son camp: «Jâai dĂ©cidĂ© de rejoindre mes frĂšres kurdes parce quâils ont raison. Ils se sont toujours battus contre les djihadistes. Et si la Turquie gagne, Daech reviendra.» Ă cĂŽtĂ©, lâinfirmiĂšre continue, dâune voix ferme: «Camarade, camarade. RĂ©veille-toi. Ton nom? Ton nom?» Le dormeur ne bouge pas.
On ne peut rien faire contre lâaviation turque. On demande simplement aux Ătats-Unis dâinterdire aux F-16 turcs de nous attaquer. Le reste, on sâen occupe
Delil Hassakeh, combattant au sein des FDS, menées par les Kurdes
«Les Turcs ont des chars, des canons, des avions. On a rĂ©ussi Ă leur dĂ©truire un tank, Ă coups de mitrailleuse lourde et de lance-roquettes. Mais on ne peut rien faire contre lâaviation turque. On demande simplement aux Ătats-Unis dâinterdire aux F-16 turcs de nous attaquer. Le reste, on sâen occupe», continue Delil. Depuis que le prĂ©sident amĂ©ricain Donald Trump a dĂ©cidĂ© de retirer son soutien aux Kurdes, ceux-ci ont perdu leur principal avantage stratĂ©gique dans la guerre civile syrienne: lâappui aĂ©rien et logistique des Ătats-Unis. Ils se retrouvent seuls face Ă la Turquie, une nĂ©buleuse de milices, dont un Ătat islamique plus que jamais menaçant, et un rĂ©gime en embuscade, prĂȘt Ă reprendre le contrĂŽle dâune rĂ©gion Ă la moindre dĂ©faillance.
Ă lire aussi : Syrie: une nouvelle cartographie du conflit favorable Ă Bachar el-Assad
La voix de Delil devient de plus en plus faible. Elle sâĂ©vanouit dans la chambre ouverte sur lâautomne syrien, ocre et chaud comme des herbes sĂšches: «On ne peut pas perdre Ras al-AĂŻn. MĂȘme si les Turcs nous attaquent de toutes leurs forces, on tiendra. Parce que câest notre terre. Les AmĂ©ricains vont revenir. Je ne perds pas espoir.» Ras al-AĂŻn est un symbole. CâĂ©tait le baptĂȘme du feu des YPG, les forces kurdes syriennes, au dĂ©but de leur autonomie. Au bout de longs mois de combats contre Jabhat al-Nosra, affiliĂ© Ă al-Qaida, et dâautres milices dont lâArmĂ©e syrienne libre, ils sont parvenus Ă sâemparer de la ville en juillet 2013 - quâils rebaptisent de son nom kurde, Serekanye.
Une femme blessée soignée dans un hÎpital de Qamishli, dimanche. DELIL SOULEIMAN/AFP
«Camarade, camarade», dit lâinfirmiĂšre en secouant le dormeur. Celui-ci se rĂ©veille enfin, se lĂšve Ă demi, puis marche, somnolent, soutenu par la soignante. Il va ĂȘtre transfĂ©rĂ© Ă lâhĂŽpital de Hassakeh, oĂč sont traitĂ©s les cas graves. Delil est aussi emmenĂ©. La mĂąchoire serrĂ©e, il semble sâaccrocher dâun mĂȘme mouvement Ă la vie, comme Ă un espoir perdu. Les adversaires ne se battent tout simplement pas Ă armes Ă©gales. Dâun cĂŽtĂ©, une force sommairement Ă©quipĂ©e, privĂ©e de son lointain protecteur. De lâautre, la deuxiĂšme armĂ©e de lâOtan, appuyĂ©e par des groupes qui rĂȘvent de prendre leur revanche contre les Kurdes.
Lâambulance part en silence. Autour, des visages fermĂ©s et inquiets, le deuil dâune expĂ©rimentation politique de sept ans. Le Rojava, nom kurde du Nord-Est syrien, est de facto autonome depuis 2012, quand lâarmĂ©e et les services de renseignements du rĂ©gime de Bachar el-Assad quittent le territoire pour projeter leurs forces ailleurs, dans une rĂ©volution qui tourne en guerre civile.
La branche syrienne du PKK, le PYD (Parti de lâUnion dĂ©mocratique), prend alors le contrĂŽle de la rĂ©gion. Il met en Ćuvre, tout en menant la guerre Ă multiples groupes armĂ©s et en neutralisant ses opposants politiques, le projet dâAbdullah Ăcalan, leader indĂ©pendantiste kurde. Les rĂ©gions abandonnent lâidĂ©ologie du parti Baas pour celle du confĂ©dĂ©ralisme dĂ©mocratique, qui vise au dĂ©passement du cadre de lâĂtat-nation. QuadrillĂ©e par de redoutables services de sĂ©curitĂ©, la rĂ©gion autonome apprend aussi Ă sâadapter aux zones moins favorables aux Kurdes, privilĂ©giant la stabilitĂ© Ă lâidĂ©ologie, la nĂ©gociation Ă la confrontation.
Cet Ă©difice sâĂ©croule Ă toute vitesse. Tall Tamer en est le tĂ©moin privilĂ©giĂ©. Ville la plus proche des combats de Ras al-AĂŻn, elle a vu passer quelques-uns des 100.000 dĂ©placĂ©s, selon les Nations unies.
Lâhiver arrive. Je ne peux pas vivre ici, il fait trop froid. Je garde espoir. Les AmĂ©ricains vont revenir
Imane Hajj Mamo, mĂšre de famille
Câest le troisiĂšme exode que connaĂźt Imane Hajj Mamo. Cette mĂšre de 40 ans, toute ronde dans sa robe Ă fleurs, est nĂ©e Ă KobanĂ©. Elle a dĂ©mĂ©nagĂ© dans son enfance dans le quartier kurde de Cheikh Maqsoud, Ă Alep. Elle fuit une premiĂšre fois quand la bataille commence, en 2012, pour sâabriter Ă KobanĂ©. En 2014, lâĂtat islamique attaque ce fief kurde. Son pĂšre, son frĂšre, ses cousins partent dans la bataille. Elle se rĂ©fugie Ă Ras al-AĂŻn. Commence une parenthĂšse de paix de cinq ans. «On se sentait chez soi. Qui nâaime pas vivre sur sa terre!», sâexclame-t-elle. Mais la semaine derniĂšre, les Turcs attaquent. Pendant que son mari se bat, elle vit Ă mĂȘme le sol de ciment dâune Ă©cole dĂ©saffectĂ©e, sans mĂ©dicaments pour sa fille Ă©pileptique, que les crises laissent Ă©puisĂ©e. «Lâhiver arrive. Je ne peux pas vivre ici, il fait trop froid. Je garde espoir. Les AmĂ©ricains vont revenir.»
Au moins Imane est-elle en vie. Des dizaines de familles hĂ©bergĂ©es Ă lâĂ©cole de Tall Tamer se sont jointes dimanche Ă un convoi organisĂ© par les autoritĂ©s kurdes et ont formĂ© un convoi pour se rendre Ă Ras al-AĂŻn. Elles espĂšrent un miracle, mais risquent un massacre. Las - lâavant du convoi est visĂ© par une frappe aĂ©rienne de lâaviation turque Ă lâentrĂ©e de la ville. Une dizaine de personnes ont Ă©tĂ© tuĂ©es dans une opĂ©ration qui nâa mĂȘme pas ralenti lâoffensive dâAnkara.
Des habitants de Tall Tamer accueillent lâarmĂ©e du rĂ©gime syrien, lundi. DELIL SOULEIMAN/AFP
Chaque jour qui passe confirme bel et bien le dĂ©part des AmĂ©ricains. LâarmĂ©e turque progresse mĂ©thodiquement sur les deux zones dâincursion, Tall Abyad et Ras al-AĂŻn. Elle harcĂšle les YPG tout le long des cinq cents kilomĂštres de frontiĂšre. ĂbranlĂ©s par les coups de boutoir, les redoutables services de sĂ©curitĂ© kurdes font aussi face Ă coups de main menĂ©s au cĆur du Rojava. Vendredi, un attentat Ă la voiture piĂ©gĂ©e secoue la «capitale» de la rĂ©gion autonome, Qamishli. Samedi, une autre voiture explose devant une prison abritant des djihadistes, sans faire de dĂ©gĂąts. Le mĂȘme jour, des miliciens arabes soutenus par la Turquie tendent une embuscade sur lâautoroute qui relie le Kurdistan de lâest Ă lâouest. Ils mettent en scĂšne une exĂ©cution qui rappelle les pires moments de la guerre civile syrienne. Se rĂ©pandent des rumeurs de mutinerie dans les camps oĂč sont hĂ©bergĂ©s des partisans de lâĂtat islamique.
Sous la pĂąle lumiĂšre dâune nuit de pleine lune, le Rojava semble disparaĂźtre, peu Ă peu, et revient la RĂ©publique arabe syrienne
La soirĂ©e du dimanche sâenfonce dans lâincertitude. Comment tenir? Quelques signes inquiĂ©tants - le rĂ©seau cellulaire montre des signes de faiblesse. Une panne passagĂšre ou un terminal attaquĂ© par la Turquie? Non - le rĂ©seau syrien a Ă©tĂ© coupĂ©. Internet ne passe plus. Un coup du rĂ©gime? Une offensive sur les deux fronts, Ankara au nord, Damas au sud? Les rares informations sont remplacĂ©es par de folles rumeurs. La nuit tombe. Le Rojava se vide. Des fantĂŽmes semblent rĂŽder derriĂšre les rideaux fermĂ©s et les rues vides de Qamishli, autrefois pĂ©tillante de vie.
Dans la soirĂ©e, lâinformation tombe comme un couperet. Un accord a Ă©tĂ© passĂ© avec le rĂ©gime. DĂ©passĂ©es par lâoffensive turque, harcelĂ©es par des attaques Ă lâintĂ©rieur de son territoire, les autoritĂ©s kurdes nâavaient plus vraiment le choix: nĂ©gocier avec lâautoritĂ© de tutelle, le rĂ©gime syrien, quâelles ont parfois combattu, souvent Ă©vitĂ©, mais avec lequel elles nâont jamais rompu.
Lâaccord prĂ©voit que les Syriens se dĂ©ploieront le long de la frontiĂšre turque pour en assurer la protection. Lâadministration et la sĂ©curitĂ© interne resteront Ă lâadministration autonome. Les camps de prisonniers, y compris ceux qui abritent les djihadistes, seront toujours surveillĂ©s par les forces kurdes.
Mais dans la nuit, la rĂ©alitĂ© semble tourner Ă lâavantage du rĂ©gime. Un check-point isolĂ© sur la route entre Qamishli et Hassakeh est abandonnĂ© discrĂštement par les YPG. «LâarmĂ©e syrienne doit arriver», souffle un combattant kurde, avant de sâĂ©vanouir dans lâobscuritĂ©. Ă Qamishli, des partisans du rĂ©gime viennent tester les dĂ©fenses de lâadministration autonome. Ă Hassakeh, partagĂ©e entre les deux autoritĂ©s, les check-points passent du cĂŽtĂ© de lâarmĂ©e. Sous la pĂąle lumiĂšre dâune nuit de pleine lune, le Rojava semble disparaĂźtre, peu Ă peu, et revient la RĂ©publique arabe syrienne.
Le lendemain ne fait que confirmer la tendance. Damas progresse, grignote les flancs est et sud du Kurdistan. Manbij, Raqqa, et mĂȘme la petite ville de Tall Tamer, voient arriver les forces de Damas. La BBC affirme que deux divisions de lâarmĂ©e syrienne vont ĂȘtre dĂ©ployĂ©es dans les provinces de Hassakeh et Deir ez-Zor. Ainsi sâachĂšve, en moins dâune semaine, une aventure politique inĂ©dite de sept ans.
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Et nous nous aimions pour de vrai
Mais personne ne le savait
Mais quâen pense mon therapist
Quâen pensent les enfants des cieux
Quâen pense le grand monsieur laÌ-bas
Quâen pense le chat qui me regarde (câest Mistoune !)
Et la lune
Quâen pense la lune
Les espoirs du monde et de soi
Du monde et de soi
Et de soi et du monde
Le silence me paraiÌt une eÌterniteÌ
Ce que je deÌsire :
DeÌsirer au plus
Lâapprentissage de la chair
Le silence dedans
Et qui danse
Qui la deÌtient au juste cette veÌriteÌ
Profonde la mienne
Je ne poserai rien
Aucun acte
Aucune intention de rien
 Et si je dois mâenfuir
Ce sera avec toi
Lâancien
Celui qui revient de loin
Du bout du monde
Dâaccord ?
Je partirai avec toi
Pour voir la mer
Encore une fois
Comme le premier jour
Comme le premier eÌchange
Le premier baiser
La premieÌre fois
Que ta main sur ma peau
PoseÌe laÌ
Dâaccord ?
Je partirai avec toi
Et nous regarderons la mer
Encore une fois
Nous nous y perdrons
Elle nous lavera
De tout notre passeÌ individuel commun ancestral virtuel alimentaire drogues dures et douces
Tout le passeÌ de mes cellules et de tes cellules
Et tout ce quâelles se mettent aÌ raconter
Ensemble
Dâaccord ?
Tu vois
Un deux trois quatre cinq six sept lundi mardi mercredi jeudi janvier février mars avril mai
Je ferme mes yeux je compte dans ma teÌte
Jâimagine je savoure
JâespeÌre je demande tout et encore plus si je le peux
Sans aucune concession
Avec tout mon corps
Ma peau mes os les eÌtoiles lâunivers aÌ lâinteÌrieur de moi
Je demande tout toi et tout moi
Au meÌme instant merveilleux
De nos corps et de nos aÌmes
Au meÌme endroit merveilleux de nos pieds de nos mains
Nos yeux et nos bouches
Au meÌme
Silence
De nos
AnceÌtres
Aux meÌmes regards
Aux meÌmes penseÌes
Aux meÌmes instincts
Incroyables
De ces voix qui nous guident
Lâun vers lâautre
VoilaÌ
Tu vois
Je demande tout ça
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