vilromain
Libraire Lunaire
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A vaguely brash trip.
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vilromain · 5 years ago
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Les Enfants des autres
Pierric Bailly veut jouer avec nous, c’est certain. Son nouveau roman explore, sans l’air d’y toucher, les vices de la trentaine : les vies que l’on mène, les vies dont on rêve encore, et surtout l’illusion d’y croire. Dans ce récit à la première personne, nous sommes prisonniers et pourtant, nous sommes bien, entourés d’eau-de-vie de mirabelle et autres opiacés... La notion du réel n’est plus vraiment stable depuis que, blessé au travail, Robert se gave d’antalgiques. Planté dans un Jura rural bien incarné, le héros nage dans son labyrinthe mental. Le style est parlé, familier, l’intrigue est surréaliste, avec un jeu de miroirs digne des meilleurs suspenses. Toute se passe « comme si je m’étais trompé de film ». On pense à François Ozon, Dominik Moll (Lemming), voire Lynch, avec ce plaisir pervers à biaiser nos perceptions, la folie, l’envie dévorante de vivre la vie d’autrui. Cette France d’en-bas vole très haut !
Les Enfants des autres Pierric Bailly Éditions P.O.L. (03/01/2020)
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vilromain · 5 years ago
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Lake Success
Lake Success, attention au départ ! Aller simple pour une déchéance totale ! Pour ce cinquième roman, Gary Shteyngart est loin d’avoir adouci sa plume. Son héros, Barry Cohen, trader new-yorkais décadent et défroqué, court littéralement à sa perte, fuyant son passé comme son avenir. Le lecteur traverse avec lui les Etats- Unis, va de surprise en surprise au gré des rencontres. Au travers de personnages atypiques et d’un humour cinglant mais subtil, l’auteur dépeint une Amérique en pleine gueule de bois à l’aube de l’élection de Donald Trump. En bref, faites vos valises pour un trip jubilatoire et trépidant de bout en bout.
Lake Success Gary Shteyngart 
Éditions de l'Olivier (02/01/2020)
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vilromain · 5 years ago
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Kukum
Pourquoi revenir sans cesse sur le passé, vers cet héritage ? Peut-être parce qu’il nous rappelle la puissance, et en même temps, la fugacité des rencontres. Parce qu’il dessine la fin d’un monde, la fin du peuple innu, sa pratique du territoire, son mode d’être au monde... Sur un mode mineur, ce livre donne à voir, à entendre et sentir ce rapport intime à la faune, à la flore. Comme un animal qui se cache pour mourir, il se retire peu à peu du contact des hommes. Pourtant, point de nostalgie, ni de rancœur dans ces pages. Seul frappe le clair murmure et la franchise des sentiments, tel le frottement des rames dans un lac froid et placide. L’auteur nous fait toucher du doigt les craquelures d’un canot défraîchi, autant que la chaleur du poêle sous une tente innue. Le moindre geste vers un monde plus équilibré.
Kukum Michel Jean Éditions Dépaysage (30/01/2020)
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vilromain · 7 years ago
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Le Ton Mité : l’émotion versatile
Depuis presque deux ans, l’association rennaise Des Pies Chicaillent propose des “concerts de qualité ultime”, accessibles à toutes les bourses et sans compromission. Le 24 septembre 2017, c’était au tour du collectif Le Ton Mité de fouler l’autel de l’Hôtel-Dieu, pour la messe dominicale.
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nom : McCloud Zicmuse 
groupe : vertébré
 taille : 6m de grandeur d’âme
 nourriture : merveilles et bizarreries culinaires
 reproduction : généralement en groupe, hier avec les Hoquets, aujourd’hui Le Ton Mité
 milieu de vie : Bruxelles Originaire d’Amérique du Nord, cet animal amène depuis plusieurs années son art de la chanson à un niveau inédit d’hybridité. Grand connaisseur de musique alternative japonaise ou expérimentale anglo-saxonne, McCloud Zicmuse anime aujourd’hui la « coopération musicale », Le Ton Mité. Passé Composé Futur Conditionnel trace et retrace le voyage initiatique dans son pays natal. Un récit ébouriffant de 70 minutes dont les 50 morceaux, haïkus pop finement ciselés, empruntent à une demi-douzaine de styles musicaux. Le Ton Mité fait vriller les standards anglo-saxons, met sur orbite la country et le rhythm’n’blues, à l’aide de cuivres et de vents joués avec maestria. Cette facilité n’a d’égale que l’ambition folle de Passé… Tenter d’exprimer avec entrain le parcours d’un expatrié. Loin du papier-collage outrancier Il y a du Syd Barrett dans ces élucubrations bancales. Il y a aussi du Frank Zappa dans son désir d’inventer, d’assembler, de faire ensemble, de jouer collectif. Il y a enfin du Henri Dès dans ces comptines sur un arbre perchées.
Entouré de ses amis, Zicmuse n’aime rien moins que se libérer du format chanson et injecter du free-jazz et de l’acid-rock à tous les étages. Dans les tiroirs de chaque morceau la grammaire se tord de plaisir, le son est un serpent à lunettes, à terre, de mer ou à sonnettes.
Car de l’aveu même du boss de Crammed Discs, Marc Hollander, « son côté showman lunaire et extravagant ne doit pas masquer le fait qu'il est un compositeur et mélodiste délicat […]. »
Dans ce contexte, le concert donné un dimanche de grisaille a réchauffé les coeurs. Lorgnant, pour notre plus grand plaisir, du côté du Pink Floyd originel, McCloud Zicmuse a un talent rare pour chorégraphier ses chansons. L'aisance et la connivence palpable de ses compagnons de scène galvanisent les spectateurs et enrichissent son art du geste et du comique de situation. Ses histoires y trouvent une réalité augmentée, un rapport à l'existence que peu d'artistes grand public parviennent à effleurer.
Cet esprit de communauté, cette ambiance de rituels Vikings anti-folk, ses riffs d'âme gaiement désaccordée ont fait plus que résonner sur les vitraux de la chapelle de l'Hôtel-Dieu. Petits et grands ont oublié le temps, les codes et les nuages de morosité.
Last album: Passé Composé Futur Conditionnel (2016) Label : Crammed Discs. Série Made to Measure http://zicmuse.com https://letonmite.bandcamp.com https://www.facebook.com/letonmite
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vilromain · 7 years ago
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England Is Mine (Mark Gill, 2017)
Dinard, station balnéaire des Côtes-d'Armor, fête le cinéma jusqu'au 1er octobre avec le Festival du Film Britannique 2017. Son programme est composé d'une trentaine de long-métrages, dont 80% d’avant-premières, une vingtaine de courts-métrages et 6 films en compétition. Parmi eux, England Is Mine tire le portrait de Steven Patrick Morrissey avant qu’il ne fonde The Smiths.
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Une pellicule presque sépia. Un héros presque charismatique. Un montage presque contemplatif… England Is Mine avait presque tout du film indé bien ficelé. Il en a toutes les intentions, tous les outils, toutes les manières. Presque trop justement.
Quand un film s’inscrit dans un genre codifié, il n’y a rien de pire aujourd’hui que la mouture tiède et molle, ne pas aller jusqu’au bout, ne pas tirer le fil du code pour mieux le décomposer.
Dans un Manchester de carte postale, pluvieux et sinistré, England Is Mine joue le chaud et le froid. Il ne sort jamais vraiment du cadre, ne se libère pas des effets de posture, ni d’époque. Il échappe de justesse aux écueils du revival années 80, pour mieux plonger dans la frustration d’un spectacle sans ressorts.
Les cartes sont battues d’avance. England Is Mine retrace les années d’errance artistique du jeune Steven Morrissey, futur leader du groupe The Smiths. Public mélomane ou non-averti sait vite à quel type de héros il a affaire.
Posters d’Oscar Wilde dans sa chambre, timidité avérée, bonne copine invasive, émois évanescents... Steven ne sait pas quoi faire de son corps, encore moins de sa tête. Le moral n’est pas au beau fixe. Il se morfond, se complaît dans le spleen et le guide du parfait jeune « homme de lettres » incompris.
On ne parle pas de génération perdue, mais de personnage perdu. A plusieurs reprises, la scène musicale, au propre comme au figuré, apparait en toile de fond, dans le flou, en bas des escaliers, toujours à distance de son héros en devenir, on le sait bien, mais pourquoi tant de retenue ? Pourquoi teindre son film aux tonalités du sentiment ?
Jack Lowden, aperçu en pilote de chasse dans Dunkirk, incarne ici le rôle principal avec une maîtrise des tremblements, une parcimonie des sourires, un flegme tout britannique.
Dans le premier chapitre, celui de l’errance, ses cheveux bouclés tremblotent devant la caméra. Indéterminé, le héros évolue avec grand peine dans le brouillard des émotions. Imbu de lui-même, noyé dans les livres et les références classiques, Morrissey n’emploie sa machine que pour écrire des critiques musicales acerbes, « teigneuses » dira sa camarade Anji, percluses d’amertume rentrée.
La seconde partie, celle de la confrontation, est rythmée par les faux-départs et les abandons. Collègues, amitiés et compagnons de route gravitent et s’éloignent aussitôt, laissant un Steven toujours seul. Le premier concert de sa vie, traité et interprété comme un exutoire et une révélation par son auteur, fait pschitt dans le déroulé du film.
Comble du scénario, en bout de course, le héros s’entretient avec sa mère et confie “ne plus savoir quoi faire”. Avec lui, nous ne sentons même pas le parfum des répétitions, des effluves de la cave, la saleté et la perdition. La bière est servie sans bulles. Le héros, entouré par la foule, garde son casque.
Un film en camisole de force.
Le réalisateur s’est laissé vampiriser par son sujet. Comme Steven ne parvient pas à choisir son camp (« work or music », sermonne son boss de pacotille), Mark Gill reste au milieu du gué. Il ne choisit pas entre le biopic classique et le cinéma arty.
Plusieurs séquences sont majestueuses et inventives, simples et évocatrices. Des vagues plus ou moins vives et turbulentes ponctuent le film au moment opportun. Au cas où le spectateur encore attentif, c’est le mot, n’aurait pas saisi le déséquilibre et l’état psychologique du personnage.
On aurait tant aimé suivre une histoire du même acabit que ces remous créés par les canaux de Manchester. C’est un spectacle toujours captivant que le remplissage et le vidage d’un canal, que le ballet des péniches d’un niveau du cours à un autre. Si tant est que le bateau atteigne un jour l’embouchure. L’ouverture, le champ libre.
Las, le film reste à quai. Ses tourbillons bien cadrés, bien propres, sont ceux d’une coque de plaisance. Un cliché sans débords.
Mark Gill touche l’erreur de débutant. Au générique nous reste en tête un méli-mélo de plans démonstratifs, de bande-son rachitique et le sentiment (vague) d’un cinéaste embué, empêtré dans sa matière et ses bobines.
Le film n’est pas soporifique. Il n’est pas plus une réalisation, pas même un récit initiatique. Il sonne comme un poème inachevé, déclamé dans un musée déserté. Une dernière demi-heure alternative aurait tout bonnement permis d’entrevoir le chantier musical en cours, l’œuvre quittant son créateur. Mais ici, point de salut, ni de perspective. Le spectateur ne connait pas l’excitation de la parenthèse. L’artiste a dans la fiction manqué son entrée. Il sort du champ et ne demande pas son reste. England Is Mine (Steven before Morrissey), MARK GILL | 1h34, avec Jack Lowden, Jessica Brown Findlay, Jodie Comer.
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vilromain · 9 years ago
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Andy Stott, nouvel Aguirre
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Chorus, volutes, ponts branlants et consonances pop... Andy Stott est devenu en l'espace de cinq ans le maître zen des diagrammes déchaînés, des métriques hachées, des circonvolutions musicales impénétrables. On s'imagine un lieu. On approche en montgolfière futuriste. Une forêt vierge se décline par-delà les ondées pluvieuses. Sous la chaleur des brûleurs en sourdine, on entame la descente. Atmosphère humide et traumatique. Un océan de verdure ondoyante et sauvage s'étend sur des frontières illimitées, à deux enjambées de nous à présent. Capable de nous faire basculer dans ces contrées floutées, dans ces temps immémoriaux, dans ces territoires irradiés, Andy Stott l'artificier a cette fois décidé de ménager sa clientèle.
Too Many Voices est l'album de la pré-retraite, de la pesanteur assumée et dévoyée. Il reste que, sur ce terrain d'expédition, le premier pas sent toujours le roussi. Les fleurs se rétractent à notre passage. Les fougères moites ploient et s'allongent au sol. La flore se désintègre au moindre toucher contemporain, contaminée. Nos alentours sont fourbies de coulées suffocantes, de sols argileux, de sables mouvants, et bien sûr d'arbres géants à la sève totalement suintante. Les racines sont à mille lieux sous nos pieds. Nous sombrons.
Le style est sombre, froid, moins brutal que sensuel et abstrait. L'ambiance est crasse, vibrionnante, aussi douleureuse qu'un R'n'B d'outre-tombe. La lenteur, le “grit”, la lourdeur sont prédominants là où s'entremêlent encore dub, ambient et techno minimale.
Dans ce vide rempli d'étrangers, Andy Stott crie une langue morte qu’il ne faut pas apprendre, qu'il faut seulement ressentir, caresser, frôler du doigt pour en souffler la couche de poussière. Des fibres éparses gagneront alors les cieux, portant haut, avec toute la résonance d'aujourd’hui, les réverbérations d'un peuple décadent. Son imagination apeurée. Son silence assourdissant.
Andy Stott, Too Many Voices, out now on Modern Love
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vilromain · 9 years ago
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Ne touchez pas le pré-mâché.
C'était le climat d'une journée. Couleurs primaires, franches, massives qui, à mesure que le jour tombe, fuient vers les nuances. Nuances de gris et de bruits dont les contours se découpent à la serpe.
C'était la théorie du siècle, avec son manifeste et son héraut. On couve après ce Luigi Russolo des courants plus sains, qui s'amusent, qui portent réfléxion, qui façonnent et désordonnent.
C'était la promesse de braver les capacités de la musique à s'enflammer dans la vase, l'abrasif et l'épuisement.
Le noise n'est pas que du bruit alors, mais une espèce de continuum sonore.
C'était un bruit qui résiste à la continuité. Qui remonte au blues, à sa manie d'arrache-coeur, à sa ritournelle qui doit de toute façon se libérer et faire mélodie hors-sol, tout le temps, comme on peut.
C'était enfin le Diable descendu parmi nous, agité d'une rage et sachant bien que le temps lui était compté par la note de trop.
De son côté aléatoire, aussi précaire qu'une vie dans l'esclavage, le blues exprime le chaos. Le blues nait de l'émancipation et, parti du collectif et des champs de coton, va garder la polyphonie. Poni Blues, de Charley Patton, superpose différentes mesures : à quatre temps pour le chant, à trois et cinq pour la guitare, et binaire pour la basse.
Plus tard. Même continent. Les membres du Velvet ne sont pas connus pour être des bluesmen et pourtant... John Cale explique vouloir sonner le tocsin de la théorie de La Monte Young sur le blues : "comment jouer en même temps tous les trois accords de base ?" Elle devient la marque de fabrique du Velvet. Elle vend du rêve en boîte de Pandore, de l'or en barre de chocolat. On pense à l'alto dans Venus in Furs ou Heroin.
C'était la première basse continue. Ce sera le drone.
Monde policé, musique FM, tu t'incrustes alors, mais la saturation prend ton mal partout, par tous les pores de la création musicale. Elle marque l'époque, comme l'auto-tune à ses belles heures. La musique électronique et ses crabes en pincent pour tous les genres. Lover boys, bad guys et senoritas du R'n'B, Kanye, ASAP Rocky, Young Thug, FKA Twigs et consorts.
La bande magnétique, la cassette se consument et s'étirent par les deux bouts. Hors les poncifs sur la "golden moustache" et autres branchitudes, l'effort et l'étirement des corps créatifs tendent vers cet indécrottable et sans cesse décrié mix généralisé. Dix années de critiques ne sont pas parvenues à imposer cette ineptie pour littérateurs engoncés dans leurs frontières ajustées, cet horizon illusoire survendu comme le symptôme ultime de la fin de la civilisation.
Personne ne les comprend. Le vocabulaire musical, pris d'une surcharge pondérale il y a encore cinq ans, se met lui-même au régime sec. Son nutritionniste s'appelle "les publics". Ils sont blancs ou noirs, mais tous numériques. Ils sont jeunes ou vieux, mais tous prompts à se rassembler le temps d'une soirée "la-scene-rémunère-plus-que-la-vente". Ils ne sont pas nouveaux. Ils sont plus nombreux, plus cultivés, plus exigeants.
Le Serpent alors de cracher contre la Dame un torrent d'eau pour la noyer.
Les web radios musicales entretiennent leurs audiences grâce à ce brassage. Pour la gloire au son baisé, biaisé, lo-fi, crasseux. Le hic de bandes outrepassées, le bliss d'une main trop glacée, l'audace d'un doigt bien lourdé sur le potard. L'ambiance est chaude. Des papys comme Bernard Fèvre (Black Devil Disco Club), Moroder hier ou Christian Zanési demain, ne reviennent plus seulement mais collaborent pleinement.
Le noise est la fureur, de par cet ensemble d'informations sonores accablantes, disturbantes, délirantes, de par cet étirement qui nous submerge et réactive nos sens assommés.
Condensé de ce que l'Angleterre fait de mieux, de James Blake à Radiohead, de The XX à Flying Lotus, le duo globetrotter LV présente son 4e album. Ancient Mechanisms se nourrit de toutes ces erreurs narrées, de ces objets et instruments dénichés ici et là. Fourmillant d’idées, il puise dans l’histoire de la musique (et du piano) pour en livrer une version futuriste, analogique et, en définitive, encore foutrement improvisée.
LV, Ancient Mechanisms, released 9th October 2015 on Brownswood Recordings
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vilromain · 9 years ago
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Le Bauhaus n'est pas mort en 33.
Essayer, appliquer, jouer des partitions, des angles et des couleurs est devenu le lot commun à tous les artistes indépendants. Le Bauhaus l'a seulement poussé plus loin et avant tout le monde.
Lorsque Wassily Kandinsky, Paul Klee, Ludwig Hirschfeld-Mack pratiquent, plusieurs fois et dans tous les sens, la transubstantiation de la musique vers la plastique, de la peinture vers la nervure, de la gravure vers la nature, ils sont loin d'imaginer la portée de leur acte de foi.
Le haut de la vague atteint l'épure. Le mainstream et l'artisanat classique se fondent et alimentent le deluxe. Le Ketchup Heinz en bouteille coule sur le Burger vegan, voisine et éclabousse le vélo single-speed pour créer ce "choc de simplification" réussi parce qu'accessible et subtil.
Pas ou peu d'orchestration, ni de posture en vérité : c'est l'ostentatoire déploiement de photos léchées ou de food porn sur les Internet qui fait croire à cette préciosité. Tout au contraire, cette mode réunit le commun des mortels, urbains certes, autant que l'intelligentsia artistique. Elle plait parce qu'elle développe un langage formel adapté à tous les domaines de la création.
Tout ce qu'on peut atteindre par la réduction.
Oskar Schlemmer voulait représenter l'homme par sa forme, une abstraction de l'homme, une figure artistique inspirée de l'idéal égyptien, une représentation qui n'ait rien de personnel, de distinctif. Le contraire même de l'expressionnisme. Il réinvente la création de costumes de ballet sur un corps humain animé. L'espace, la forme, la couleur et l'humain donnent lieu à une unité nouvelle.
Hedi Slimane pour la maison Yves Saint Laurent, ou Robert Pattinson en égérie noir et blanc pour Dior, se meuvent dans cette modernité à la plastique irréprochable mais toujours un poil décalée.
Le Bauhaus était un cliché sec et froid. Il évoquait au mieux un certain mobilier tubulaire, au pire la dernière résurgence d'une architecture cubique. Il représente aujourd'hui le dépouillement, un vocabulaire fraîchement économique, une mondanité exigeante.
À l'opposé du style capricieux et asymétrique de l'Art Déco, ses esprits soit-disant carrés cherchent des solutions apolitiques et collectives. À croire que ces gens-là ne vivent pas, ne sentent pas et n'aiment personne.
Tribuns de ce fracas, Walter Gropius et Adolf Meyer réalisent en 1911 l'usine de chaussures Fagus. Ils renoncent au mur extérieur compact et lui substituent une surface vitrée qui enveloppe le bâtiment. Ils créent un mouvement ahistorique, où l'étroite maçonnerie de briques fait des règles de proportions l'antithèse de la grandiloquence.
En 1919, Walter Gropius ouvre son école. Son ambition : faire que la création ait à présent pour tâche la reconstruction d’une unité à partir d’un univers fragmenté et éclaté. Il reprend en fait l’idée de Wagner : l’unité des arts.
Aussi simple que le corps
Kasimir Malevitch veut "partir des positions du corps, de sa simple présence, de sa position debout, de la marche et enfin du saut et de la danse. Car, faire un pas est une aventure, lever une main, remuer un doigt ne le sont pas moins".
Il définit sa pensée "au-delà du zéro de la forme". Les formes se chevauchent. Les contours se dissolvent et conduisent aux tableaux blancs sur blancs. La forme s'évanouit dans l'illimité de la vision, dans un "effort désespéré pour libérer l'art du poids inutile de l'objet".
Et le produit de consommation est effectivement aujourd'hui le sujet d'un détachement. Initiée par Vassily Kandinsky, "point, ligne, plan" sont la sainte trinité de cette nouvelle intelligence. Le concept du "less is more" est réinterprété. Monoprix ou Google le mettent en pratique : le champ chromatique est réduit à une typographie hyper-travaillée, qui développe en même temps la notion de multiple.
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vilromain · 10 years ago
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L'une de mes questions cinéphiles à jamais sans réponse : Et si John Carpenter avait réalisé Apocalypse Now, qu'aurions-nous entendu ? Le silence dans les feuilles. La rivière paisible, le coeur en moi, l'enfer autour. Le monde sans l'homme. Et que vois-je à présent ? Qu'ai-je vu ? De quoi ai-je déliré en ne voyant pas la chose dans The Thing ? En ne touchant pas le couteau dans Halloween...? Il n'est pas de souffle unique. Il n'est pas de dieu mais un dieu de l'aspiration et de la turbine réglées au fil de l'eau poisseuse. "New York, 1997". Déjà John Carpenter n'anticipait rien du tout. Il projetait son désir. Son négatif de la vie. Son talent incomparable a été de ne pas donner dans l'artifice, le feu de bengale ou l'effigie grossière et tendue. Sa postérité tient dans la sève et surgit avec elle, à point nommé. Le monde, 2015. John Carpenter est au faîte de sa gloire. Sa mélopée alternative échappe au ringard par cet ultime amour de la mesure. Le roi de la SF n'a aimé et n'aime rien tant que faire la cour à l'étrange, au mystérieux, au surnaturel, en définitive à la fausse innocence, à la perversité. Il a bâti une entité et déployé une narration. Cette dernière est multiple et participe d'un arrière plan plus profond, de ses élans inhumains, de l'essence de son art, de son style, de son genre cinématographique. De ses motifs qui ne renvoient ni à une Histoire, ni à des temps mais à des monuments enneigés, à des banlieues dantesques, à des villes atemporelles. Toujours s'agit-il d'une histoire de prédation. Ses films et ses thèmes "perdus" sont la déposition d'une intrigue qui entremêle esthétiquement bien le désir, ou la vengeance, et la chasse. Le masque du tueur figure, matérialise le rêve, le fantasme de l'Homme qui hallucine la bête immonde, la mort, l'objet, la voiture, la femme, la ville et les métamorphose tour à tour, à chaque film, dans l'espace circonscrit du cerveau humain (entre les barreaux de la cage des chiens-loups, dans la gorge déployée de la jeune victime expiatoire). Les riffs de synthés, couplés aux guitares saturées, sont le pendant sonore de ces pas assurés du rêve prolongé, sans destin ni hasard, à l'image par une course suspendue sur le gazon ou le bitume encaissé. Les Lost Themes sont des variations rudes et programmées, qui trompent le bon goût, abusent des figures de style analogiques, protègent l'auditeur du futur autant qu'une chair de poule préserve du sommeil. Sans hystérie ni furie de la nouveauté, John Carpenter exprime les humeurs de sa fièvre, dont Obsidian joue le parfait medley. Il n'est pas dur au travail. Il ne pousse pas ses frontières. Il n'est pas pour le tri sélectif, ni pour la danse des matières venimeuses, ni pour le mariage des cris de même sexe. Il est pour reprendre à l'aube l'ouvrage du rêve qui se raconte, dirige, domine et tue pour se produire. Son entièreté n'offre qu'un nombre limité de variations. C'est ainsi qu'on entrevoit le mode d'implication du musicien. Tout l'art repose dans ce jus, ce flux, ce rythme qui, du centre (Vortex) vers la nuit (Night) presse, tend l'inspiration, gonfle la tenture d'où jaillit l'intrigue. Le synthé n'exulte pas sauvagement comme abreuvé par une mécanique d'outre tombe. Des capsules de sable et de crachin tectoniques sont au contraire emmagasinées et dégainées avec toute la force de la répétition. Le temps coule dans les tuyaux. Au coeur de la nuit, sur les Grandes Plaines, au lointain se répondent les sanglots humides des trains de fret, les bris de glace, les cloches du Purgatoire. John Carpenter procure ce chaos freudien, labyrinthique, cette tanière connue de lui seul qu'on appelle la peur et qui est l'art devenu nécessité à la répétition des jours, à la succession des 24 images par seconde, et mille et mille autres encore dans nos têtes. RV To Miss Prada
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vilromain · 10 years ago
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vilromain · 10 years ago
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Oneohtrix Point Never, Hudson Mohawke & patten have all performed Boiler Room sets this year, watch each performance and more at bit.ly/warpxboilerroom
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vilromain · 10 years ago
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Avec Sorcery, au printemps dernier, Joey Anderson accouchait du morceau de house le plus bizarre et inspiré du semestre. Une antienne flippée et filée avec des bruits de cloche et tout ce qu’il est possible de faire sous l’emprise d’un gros bourdon. Sombre et abyssale, sa nouvelle prestation boute à coups de pied tous les codes pré-établis de la deep joviale. Elle tire la couronne royale à soi. Mettons Tears Can’t Bring You Near. C'est un paradis blanc. C’est la passerelle basique pour un EP oscillant entre la chique hallucinée et le final abscons. Passée la minute, la dernière touche nous rappelle deux, trois choses sur la mécanique des coeurs transis un lendemain de fête. Deux, trois raisons aussi de se décoller l’oreille, de sortir sous les ondées et d’aimer les ultimes feuilles mortes. RV Joey Anderson – Down Arms Buddha Position EP TANSTAAFL PLANETS – Sortie le 10 novembre soundcloud.com/johnosborn
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vilromain · 10 years ago
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Dans une époque pas si lointaine où Paris, Londres ou quelque recoin des Midlands était truffé de coupe-gorges. À un âge où la noblesse de province se terrait dans un trois-pièces noirci par la suie, pétris de religion inquiète, certains jouaient à se faire peur. Des rêves, des visions, des cauchemars, des séances de spiritisme, personne n’y échappait. C’était la mode au mitan du 19e siècle.
De cette enfance éprouvant les crises, Mondkopf a tiré son avatar, Extreme Precautions. Il nous récite des petits poèmes à la suite, sans transition pour mieux assurer l’évasion. Sans doute aussi par tentation de saisir, à nouveau, la nuit dans les draps blancs. De ses haltères soniques, après quatre albums et 28 années sur Terre, le Toulousain passe à la mystique du repli et de la saturation, cousant au grand jour son habit de lumière noire. Une semaine lui aurait suffi pour fomenter ce disque brutal, Precaution One, violente occasion de racler quelque mercure macéré sur le bord des vieux pots du heavy métal. 
À l’écoute d’Untiltled 10 et 11, deux sphères prêtes à s’unir dans l’énergie du punk et l’empressement du hardcore, vapeurs enflammées, rythmiques grondantes et sonorités chroniques chargent la barque et nous font remonter le Styx jusqu’à la caverne d’un groupe-phare, Napalm Death. Apeuré, convulsé, secoué, on se prend alors, nous aussi, à regarder la boule et son cristal. 
RV 
Extreme Precautions – Precaution One In Paradisum – Sortie le 10 novembre
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vilromain · 10 years ago
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Son âme est sauve. Michel Amato reprend l’ouvrage où il l’avait laissé au printemps dernier. Ses yeux tirés vers le ciel, vers la fenêtre et le jour, le parrain des sombres capucins tient entre ses mains le globe terrestre. Monumentale, cette seconde partie du Love/Kraft nous révèle son esprit maudit et presque néo-romantique.
Ce 3e album solo est peut-être son plus abouti, son plus contemporain au sens où il y compulse la rage frustrée des « sans-dents », des nostalgiques de l’italo-disco. Depuis l’entrée solennelle du Past & Future jusqu’à ce pur groove entêtant de Jupiter Skyline, The Hacker porte haut son complet cintré, taillé pour les bals classiques. Point de maturité ici, mais bel et bien l’affirmation d’une richesse créative. Le chanteur du groupe Crash Course In Science, Michael Zodorozny, sort du coin pour Tenebra, vocalise new-wave, quand Perspects, de la formation Le Car, assénait A Thousand Times pour la Part One. Ces deux faces sont finalement le chapitre indispensable à un roman légendaire. 
Le moment où la naïveté du jeune paladin, couvert d’un tatou bicéphale, s’avère trompeuse et la menace du défi bien réelle. 
RV 
The HACKER – LOVE/KRAFT PART TWO 
Zone Music / Idol – Sortie le 10 novembre 
Photo © Marie Rouge
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vilromain · 10 years ago
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Un an après le succès d’Amygdala, DJ KOZE revient avec un nouveau peplum, rempli d'escarpes et de sentinelles jonchant la campagne alentour. Tel un poids plume quand l’atmosphère est lourde, DJ KOZE sort de sa loge de sacrifié. La gentillesse chevillée au corps, sa rudesse feintée agace autant que celle du rétiaire. Aidé d'un trident et d'un poignard, son filet emprisonne et pressure nos idées noires. Pécheur parmi les pécheurs, son âme d’illuminé et ses mains de motard enchristé transforment en or tout ce qui colle au grain. Il cultive ce goût de la contradiction, faisant par exemple des deux morceaux de Herbert, producteur anglais connu pour ses mix de jazz timbré, un échange à bâtons rompus, tels deux tableaux abstraits au milieu d'une cour d'hôtel. Un chapitre se tourne, fait de rencontres, de raffinement et de couleurs. Ce recueil est un marché flottant. Il cultive la tempête et tempère les climax. DJ KOZE - REINCARNATIONS Pt. 2 - The Remix Chapter 2009-2014 Pampa Records – Sortie le 24 octobre
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vilromain · 10 years ago
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Un crew de claques et de vidange...
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  ... Mais aussi et surtout un label que Fulgeance a créé en 2005 avec Rekick et Onelight.
Le beatmaker caennais, rarement à court de projets, a son idée-maîtresse, ô ma maîtresse : toucher les fans de booty autant que de dance music, faire rimer coulant et courant, poser la bande et filer la lande.
Musique Large rejoue l'espoir d'une rengaine low club, trempée dans la funk et les bites d'amarrage sur tous les ports de la jungle.
Musique Large est le cocktail scratché d'un Herbie Hancock des bois, de la pluie, d'un mélange de trap et d'emphase à la française.
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vilromain · 10 years ago
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Jan Fabre, The Hanged
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