Tumgik
#littérture
Text
ANTIPODES
Peu importe où je suis, sous quelle latitude, quel pays, aucune importance. Je réside à l’heure où j’écris ces quelques mots sous l’équateur. Au diable Paris et la France ! Je m’allume une cigarette Dunhill Internationale à l’aide d’un vieux briquet Dupont trouvé ici sur l’étalage d’une vielle échoppe tenue par un vieux chinois exilé. Sur la table de nuit acajou aux ornements orientaux, je me remplis une tasse de thé Darjeeling, je fixe le plafond observant les volutes qui s’échappent à travers la pièce. Je songe à toutes ces destinations lointaines dans lesquelles je me suis perdu, égaré, abandonné comme un apatride, un nomade. Je suis en mal d’exotisme, sorte d’addiction à l’équatorial, peu importe la destination ce qui compte c’est le voyage. Je change d’attitude aux rythmes des latitudes, dans la solitude et les songes à la manière d’un moine tibétain à la recherche du Nirvana absolu. Mieux vaut finir sa vie comme un vieux sâdhu plutôt que de la commencer en jeune sadique. Un oublié du triangle des Bermudes, une Jonque qui tangue en mer de Chine affrétée de jarres précieuses en partance pour l’Arabie, un DC8 ou Super Constellation aux hélices rouillées par les moussons, un Clipper naufragé des vents contraires au large d’une ile lointaine en quête de la Terra Incognita. Si loin du Yang Tsé Qiang, du Mékong, des comptoirs, des boutres, de l’Éthiopie et du Yémen. Le monde est très grand et plein de contrées magnifiques que l’existence de milles hommes ne suffirait pas à visiter écrivait Arthur Rimbaud. Mon existence ressemble jour après jour à l’embouchure d’un estuaire, pourtant ma vie coule de source atteint par le syndrome du saumon à savoir ; toujours à contre-courant, un destin de fleuve entre Gange et Amazone. Un désir d’exil, se perdre volontairement, se fondre dans la masse à la recherche d’une nouvelle identité autre que la sienne. Partir afin de mieux revenir, comme un appel irrésistible aux escales. Quitter la France pour constater la différence entre ici et l’ailleurs, l’Afrique, l’Asie, le Proche et Moyen Orient, le long des quais des zones portuaires, des gares transits, aveugler par les lueurs des tarmacs d’aéroports. Je ne suis qu’un vieux baroudeur qui se pavane entre les tropiques et l’équateur. J’ai l’âme des grands voyageurs, je traine mes Pataugas du genre globe-trotteur. Rendez-vous avec une jolie nippone sur la méridienne du capricorne, une adorable geisha se promenant au milieu d’un jardin zen d’Hiroshima. Franchissant les mers du Sud, je redeviens solitaire au fil des longitudes. Une vahiné des Tuamotu danse le tamouré et me rend fou, à la rencontre de la femme berbère accompagnée de quatre dromadaires aux confins d’un désert, n’en déplaise à Guillaume Apollinaire. Dans le viseur de mon Leica, je zoom, je flash puis je m’arrache. Irak, Syrie, Iran, Pakistan, Afghanistan, Somalie, pays du Levant je photographie toutes les tragédies du moment. Clichés pour des agences de presse, les magazines et les journaux de l’information express. Clic-clac, j’immortalise sur pellicule Kodak en mode portrait ou grand angle. De retour au labo, dans l’obscurité je développe, je retouche, parfois un peu flou, à contre-jour, putain de négatifs 24/36 derniers cadrages pour première page. La vie est une mise en tropique, une malouinière au fil de l’errance, un vertige des sens, des soleils vagabonds, des paradis sans sommeils, des abimes de la pensée, des immensités ou l’Homme redevient animal et prédateur proche du précipice d’un amour intense. Combien de lune pour comprendre mes Yin et Yang. Je me sens comme une vielle anglaise qui aurait brutalement traversé les Indes, un orientaliste désorienté, un mandarin cantonné à ses chinoiseries, un soliste de l’insolite, un acolyte anonyme. À l’encre de Chine, l’écrivain à sa plume comme le marin a l’ancre.
Patrick Compas Publié quelque part et ailleurs
Tumblr media
0 notes
lmv-h · 6 years
Photo
Tumblr media Tumblr media Tumblr media Tumblr media
L’Animale - Rachilde
2 notes · View notes
leehamwriting · 2 years
Text
Karnak Café - Naguib MAHFOUZ - 2010
Karnak Café – Naguib MAHFOUZ – 2010
Quatrième de couverture Le Caire, vers le milieu des années 1960. Au café Al-Karnak que gère une ancienne danseuse, le narrateur fait connaissance avec trois étudiants, Hilmi, Ismaïl et Zaynab. Le premier est l’amant de la gérante, et les deux autres, amis d’enfance, s’aiment tendrement. Tous les trois se considèrent comme des enfants de la révolution de 1952 et défendent ardemment ses principes…
Tumblr media
View On WordPress
0 notes
mamaasawriter · 9 years
Quote
(...) et, la tête dans mes mains, je fais le noir en mon cerveau et j'assiste, résigné, comme aux ébats de gamins qui ne savent pas se tenir, à la danse publique des hyperboles. Je me désole de ne pas pouvoir rester un instant au niveau de la mer.
Jules Renard, L’Ecornifleur
3 notes · View notes
lmv-h · 8 years
Text
Déforme-moi à ton image afin qu’aucun autre, après toi, ne comprenne plus du tout le pourquoi de tant de désir.
Deform me to your likeness so that no one, after you, can understand the reason for so much desire.
Hiroshima mon amour - Marguerite Duras
12 notes · View notes
lmv-h · 8 years
Text
“... On ne demandait pas mieux que de lire une somme de ses expériences de déesse...” Reproche de celui qui ayant espéré une déesse, n’a trouvé que la déité.
Vivre dans le feu, Confessions (11. Ecrire en français) - Marina Tsvetaeva
1 note · View note
lmv-h · 9 years
Text
Ansaldin Voulez-vous donc n’être que l’esclave Des grandes paroles collectives Mavise Mais ces grandes paroles désignent Des êtres véritables Patrie Nationalités ou bien races Dont nous sommes une particule Que dire d’un globule du sang D’une simple cellule du corps Qui se refuserait à remplir Sa fonction
Couleur du temps (Acte II) - Apollinaire
1 note · View note