#aromaphilie
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helshades · 5 years ago
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Pause parfumée !
@34december​:
Bonjour ! Je suis progressivement en train de m'immerger dans la passion des parfums et, en grande néophyte, je n'y connait absolument rien... Ceci dit, grâce à tes posts, j'ai pu découvrir le fabuleux Grimoire (et même rencontrer son auteur, mais ça, c'était totalement involontaire...) et force est d'admettre que cet ouvrage parfume très agréablement ma vie... Aurais-tu des suggestions à me préconiser, sachant que je suis a priori surtout intéressée par des parfums différents, variés, et ayant une belle histoire à raconter? Pour le moment, j'alterne entre Grimoire et La vierge de fer (Lutens), mais je souhaiterai me construire un éventail plus étendu. Je te souhaite une belle journée, et merci encore pour tes posts éclairants et érudits ! :))
Je ne vais pas faire semblant d’avoir tout juste reçu ce bien gentil message mais je tiens tout de même à faire remarquer que j’ai moins d’un mois de retard et que l’on peut ainsi présumer que son autrice n’est sans doute pas encore morte de vieillesse – et au passage, je précise que les rumeurs à mon sujet sont absolument infondées.
À ma décharge (?), j’avais entamé la rédaction d’une réponse en des temps plus orthodoxes, mais fidèle à mon habitude, celle-ci s’était changée en roman-fleuve menaçant d’engloutir l’infortunée lectrice sous mon discours inaugural au Collège de France dans une vie parallèle. Bref, c’était peut-être un peu raide pour un premier rendez-vous.
@shaemiramis:
Bien le bonjour ! Ultra intéressée par tes histoires de parfum, je suis tombée récemment sur un revendeur de parfums Oriza L. Legrand, une maison de parfum française fondée dans les années 1720. De ce que j'ai pu voir, cette maison a cessé de produire en 1939 pour être finalement reprise en 2012. Je leur ai acheté un parfum (Rêve d'Ossian) pour la très modique somme de 120 euros les 100ml (pour une maison dite "de niche" ) Et du coup je me demandais ce que tu en pensais ?
Mais ? Ce message a un an et demi ??! Et il n’est pas tout à fait impossible que j’ai comme un vague problème de procrastination DÉNI. Notons au passage que Shae n’est pas morte, elle publie encore, voici donc une nouvelle victoire à mon actif ! Vive moi.
Donc, j’ai repensé très fort à ce billet hier lors d’une dispute amicale ayant eu lieu sur un site bien connu des aromaphiles autour de deux encens de chez Oriza L. Legrand, justement : Rêve d’Ossian, et Relique d’Amour. Le premier, qui est souvent comparé à Messe de Minuit d’Etro, est un encens oriental au fond vanillé, baumé, très chaud, quand le second est un lys hiératique éclos parmi les pierres moussues.
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Rêve d’Ossian, « encens orthodoxe » (1900 – réédition 2012)
Tête : encens, pin maritime.
Cœur : cannelle, benjoin, élémi, tonka, gaïac, opoponax.
Fond : baumes, santal, cuir, labdanum, ambre, muscs.
Relique d’Amour, « encens et lys » (1900 – réédition 2012)
Tête : feuillage, pin maritime.
Cœur : lys blanc poudré, poivre, huile de lin, térébenthine, encens, myrrhe, élémi.
Fond : muscs, mousse, bois ciré, bois blonds, poivre.
Ces deux parfums sont en un sens complémentaires, à la fois similaires et très différents. Je suis une grande obsédée des encens, et ce sont deux grands encens d’église, mais chacun en dresse un tableau contrasté : la messe d’Ossian est un fantasme, quand la cathédrale de Relique d’Amour est en ruines, quoique pleine de poésie. Les snobs préféreront peut-être l’étrange beauté minérale du lys, de mon côté je me refuse à choisir !
Malgré tout, je dois à l’honnêteté de préciser que depuis l’automne 2018, les prix ont subi une certaine élévation, pas très spirituelle mais somme toute assez compatible avec la vénalité ecclésiastique : désormais, il faut compter 130€ pour 100ml, 90€ pour 50ml ; et les flacons de recharge, moins beaux mais moins chers, sont à 110€ et 70€. Soit dit en passant, la marque a le bon goût de décompter les 30€ du coffret d’échantillons du prix d’un flacon de 100ml, c’est déjà ça...
Je vais me risquer à une audacieuse hypothèse mais je dirais que ceux qui voudraient une synthèse entre les deux pourraient essayer la magnifique Liturgie des Heures de Jovoy, gothique à souhait mais merveilleusement équilibrée, à la ferveur brûlante. Le célèbre Cardinal de James Heeley, lui, apparaît digne et beau dans sa froideur calme toute monacale. On le compare volontiers à Avignon, l’un des cinq encens de Comme Des Garçons (les autres étant Zagorsk l’orthodoxe, Ouarzazate l’islamique, Jaisalmer l’hindou et le shintoïste Kyoto), sauf que les parfums CdG ont une durée de vie sur peau inversement proportionnelle à leur charme, ce qui est à signaler.
En revanche... oh, bons dieux, en revanche, pour ceux qui n’ont pas froid aux yeux, il est un parfumeur qui a consacré l’essentiel de son œuvre à l’encens sous toutes ses formes, et qui crée des monstres sublimes :
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À gauche, Io_Non_Ho_Mani_Che_Mi_Accarezzino_il_Volto, dont le nom (qui se traduit par « il n’y a pas de mains qui caressent mon visage ») est le premier vers d’un poème célèbre, celui d’un des plus grands écrivains italiens du siècle dernier, le père David Maria Turoldo, dont le premier recueil, Io Non Ho Mani, (publié en français sous le titre Gardien de solitude) parut en 1948. Le parfum composé en hommage par Filippo Sorcinelli est un encens extraordinaire, violent, intime, animal, sensuel, et pourtant hiératique, mystique, baumé, fumé, aromatique – complètement affolant, mais comme par une sorte d’enchantement l’œuvre est d’une confondante maîtrise. Il faut dire que son créateur est une espèce de mage contemporain à la Raspoutine, un homme de la Renaissance comme on n’en fait plus, à la fois peintre, photographe, organiste... et couturier pour le Vatican. Son premier parfum, sobrement intitulé LAVS, du nom de L’Atelier di Vesti Sacre, est un encens construit comme une mosaïque olfactive, par des senteurs évocatrices ensemble de l’encens : des fleurs, des poivres, des épices, des baumes, mélange mystique dont, dit-on, le maître imprégnait les vêtements qu’il faisait envoyer aux papes.
À droite, Quando_rapita_in_estasi, faussement plus profane, est dédié à un opéra de Gaetano Donizetti (et de 1835), Lucia di Lammermoor, tiré d’un roman de Walter Scott, rendu fameux par l’interprétation magistrale de Maria Callas en 1952 à la Scala de Milan. La plus célèbre scène est celle où Lucia, mariée contre son gré alors qu’elle aime un autre homme, bascule définitivement dans la folie après avoir tué son nouvel époux le jour même de leurs noces. L’aria qu’elle chante alors dans sa robe de mariée ensanglantée est un chant d’amour pour l’homme qu’elle rêvait d’épouser, alors que les ténèbres se referment sur elle. Le parfumeur a voulu décrire le dernier sursaut d’indépendance d’une femme avant la chute, telle que « la Divine » l’a magnifiquement incarnée. Le flacon lui-même s’inspire du costume de scène de la Callas. Quant au parfum... Ma foi, il devrait sortir très bientôt ! À guetter ici et ici.
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helshades · 5 years ago
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Bonjour Hel ! Serait-il possible d'avoir ton avis sur Alien de Thierry Mugler ? J'aimais beaucoup le porter quand j'étais au lycée... (Je ne me parfume plus maintenant, je ne sais plus à qui me vouer...)
J’aime Alien mais ne l’ai jamais porté. J’en ai un beau flacon rechargeable dans la collecque, dont je me suis vaguement promis que je le revendrais un jour, sauf qu’il est booo et que je suis un brin dépitée des flacons moches et tartes à force d’acheter des parfums de riche. (Ceci n’est pas une plaisanterie, les parfums dits de niche sont souvent embouteillés dans un machin tout simple au motif que tout le bel argent serait entièrement passé dans les matières premières et la rémunération du nez. C’est sans doute vrai pour certaines marques mais rien ne m’empêchera de me plaindre du rectangle riquiqui de chez Lutens)
J’ai beaucoup porté Angel dans mon adolescence et je ne le supporte plus, d’abord parce qu’il participe d’une époque de ma vie révolue et que sa familiarité est devenue dissonante : au lieu de faire ressurgir des souvenirs nostalgiques comme certaines odeurs en ont le pouvoir (c’est souvent le cas pour les parfums des autres, ceux d’êtres chers en particulier), il me montre une vieille photographie qui me représente mal à présent. Et ça ne m’aide pas du tout qu’il soit devenu presque banal au milieu d’une offre pléthorique en matière de sucrailleries, alors que sa célèbre note principale de praline, due à l’éthyl-maltol, un arôme alimentaire de synthèse qui n’avait jamais encore été utilisé en parfumerie, constitua à sa sortie une espèce de scandale, la très reconnaissable barbe-à-baba faisant fuir les dames comme-il-faut à toutes jambes...
Alien est sorti quand je portais Ultraviolet de Paco Rabanne, mon alien à moi, et comme il me restait toujours un fond d’Angel – je l’achetais en 30ml, avant reformulation le flacon durait tant et plus – je n’ai jamais eu Alien à l’époque. Je l’ai un peu regretté (je ne portais que trois ou quatre parfums en ces temps innocents, de nos jours on s’approche de la centaine ! J’ai l’autisme sélectif mais explosif) mais pas bien longtemps parce que je le sentais à tous les coins de rue, comme Angel d’ailleurs, devenu très tendance, ce qui faisait qu’Alien était toujours le parfum de quelqu’un d’autre avant d’être le mien.
Pourtant, je l’aime beaucoup. C’est un parfum très féminin, très élégant, très sophistiqué, assez complexe mais remarquablement construit, de sorte que ses notes se fondent les unes dans les autres avec une fluidité hallucinante. Sa fleur d’oranger est légère et puissante à la fois, alliée au jasmin, et comme ces deux fleurs m’incitent toujours à l’apaisement, je suis particulièrement troublée par les épices orientales qui suivent, et l’encens qui approfondit la base ambrée. C’est un parfum très sombre, finalement, mais séduisant, un peu dangereux, douceâtre, extrêmement persistant – il aurait fait un bon candidat pour un Poison alternatif, en définitive.
Il est à noter que les flankers de chez Thierry Mügler sont généralement réussis, ce qui est un exploit en soi ! On propose de vraies variations sur un thème, au lieu de bêtement capitaliser sur le succès commercial d’un titre. En l’occurrence, Alien a une version plus lumineuse et très sensuelle : Alien Essence Absolue, balsamique et ambrée en diable, beaucoup plus solaire.
Cela dit, pour celles (et ceux) qui ne savent plus à quoi se parfumer, je ne saurais trop conseiller de ne plus mettre les pieds chez Sephora, Nocibé ni Marionnaud, mais de se trouver une parfumerie indépendante où sentir des choses diverses et inconnues sous la houlette d’un vrai passionné des jus, et au jus. L’idéal étant de ne pas être trop loin de Paris où les boutiques de ce type ne sont pas rares. Un bon vendeur, au demeurant, ne fronce pas les sourcils devant un visiteur qui n’achète pas mais lui demande juste de l’aider à faire un voyage olfactif.
Dans tous les cas, je te dirais volontiers d’aller sniffer des parfums État Libre d’Orange si tu as porté du Mügler et donc est susceptible d’affectionner les beautés un peu étranges. Mention spéciale à Rien. Et sans doute aussi Une amourette Roland Mouret. Oui, c’est bien son titre. Fleur d’oranger dans les sous-bois !
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helshades · 5 years ago
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Bonjour ! Un avis, une remarque sur la récente interview de Serge Lutens par Augustin Trapenard ?
Grâce à toi, j’en ai un, puisque grâce à toi, je viens de l’écouter !
Ce n’est pas la première fois – ce ne sera sûrement pas la dernière... – que je m’esbaudis devant le contraste immense qu’il peut y avoir entre le cerveau de Serge Lutens et ses créations olfactives si organiques, si solide, si terrestres, pleines de bruit et de fureur, animales et sensuelles. L’individu Lutens paraît s’être donné beaucoup de mal pour incarner la figure du génie mystique au phrasé mystérieux qu’on imaginerait dormant dans un cercueil, une espèce de guru blanc byronien qui invite son cercle d’intime à le voir jouer nu du violon debout dans un pressoir à raisin (les convives dégusteront plus tard le jus tiède ainsi dynamisé) pendant que quelque androgyne éphèbe lui fait une turlute. À la fin, tout le monde applaudit à tout rompre car il est bien entendu que seul un vrai génie..
J’aime d’amour une grande partie des parfums Lutens mais je n’oublie pas que l’’oncle Serge a beau cabotiner tout son saoul, toutes ses créations sont l’œuvre de Christopher Sheldrake, parfumeur chez Chanel aussi. Toutes, sauf Serge Noire, la très mauvaise Eau (plouf !) et la transparente Eau d’Armoise, qui n’est jamais qu’une version exceptionnellement édulcorée du Participe passé... Ensuite, Maurice Roucel a donné à Lutens l’un des plus beaux iris sur terre, Iris Silver Mist, et Gilles Romey (le nez derrière Rocabar d’Hermès) a créé pour la collection « Palais-Royal » un très beau Rose de Nuit, mais qui en réalité est une adaptation de Sa Majesté la Rose, cher disparu de la collection standard en flacons rectangulaires qui coûtait moins cher et que l’on trouvait ailleurs qu’à Paris, contrairement au flacons « cloches » exclusifs !
Je m’imagine sans doute des choses mais j’ai tiqué en entendu le garçon coiffeur déplorer la démocratisation (relative) de la parfumerie. L’on comprend pourquoi la nouvelle « Section d’Or » affiche des prix stratosphériques à 450€ les 50ml... Et moi qui renâcle à m’offrir (enfin) Muscs Koublaï Khän déniché à 203€ (les cent millilitres.) en ligne, dis donc.
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helshades · 5 years ago
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@maybefrench​ :
Ma grand-mère avait une bouteille de Poison et ses 4 filles lui en piquait en douce, comme si l’interdit était bien au-delà du prix de la bouteille ou de piquer le parfum de sa mère … Et pourtant, aucune ne l’a acheté pour elle-même. Du coup je ne comprenais pas où était vraiment l’interdit. S’il était si bien, pourquoi Grand-Mère seulement l’avait ? Je ne comprenais pas ce qu’elles pouvaient bien y trouver. Je détestais cette odeur à l’époque ( très petite puisqu’on y allait pratiquement pas ) et je la déteste toujours autant.
C’est tellement entêtant qu’à mon avis ça devrait être vendu avec une réduction pour une boîte d’Advil.
@a-room-of-my-own​:
je suis d'accord j'ai horreur de ce parfum !  
Poison a largement mérité sa réputation de monstre, et c’est un parfum d’une vénéneuse beauté. En d’autres termes, faut s’le farcir.
Cela dit, vu ce que je porte comme parfum en règle générale, vous pouvez garder l’aspirine à portée de main. Poison est trop sucré pour moi mais vue mon obsession pour les encens et la civette, bon... Et puis la tubéreuse ! La tubéreuse vaudoue de Poison, une tuerie ! Je me doute qu’elle doit encore en terrifier plus d’une, parce que les tubéreuses contemporaines sont souvent travaillées dans leur aspect « banane et coco », en tout cas en parfumerie courante. Quand on n’a pas l’habitude, la tubéreuse crado, ça peut faire un choc. En réalité, Poison, c’est le successeur un poil plus vulgaire de Fracas de Robert Piguet, zeu tubéreuse foldingue de Germaine Cellier, monument de la parfumerie d’après-guerre lancé, tiens, la même année que L’Air du Temps, soit en 1948. Là où le parfum aux deux colombes invitait à l’amour juvénile et à la paix retrouvée, Fracas au même moment déboule à moto et en salopette, le cigarillo au bec, mais les boucles d’oreilles Chopard sont en bel or. (Habanita arrive en Hispano-Suiza d’avant-guerre mais à fond de train.)
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helshades · 5 years ago
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Que penses-tu des parfumeries de Grasse, Fragonard, Molinard et Galimard ?
Je connais très mal la maison Galimard mais je me suis donné l’impression qu’elle était bien tournée vers une clientèle étrangère ou touristique, venue visiter la fabrique et le beau musée – ce que j’ai fait avec mes parents étant petite mais je ne m’en souviens que trop peu.
Je connais mieux Fragonard, dont je n’aime pas plus que ça les parfums, quoique je recommande bien volontiers leur Fleur d’oranger (et sa version intense) qui est très réaliste, très naturelle, et très bon marché : en fait, les prix pratiqués sont plutôt doux dans l’ensemble, et la marque décline des motifs décoratifs dans des collections jolies à haute teneur en offrabilité, si l’on voit ce que je veux dire. J’aime assez leurs éditions spéciales annuelles, un soliflore consacré chaque fois à une fleur différente, mimosa, pivoine, lavande (pour l’année dernière), magnolia cette année, que je n’ai pas encore senti mais dont on m’a dit du bien déjà, je me l’offrirai sans doute pour l’été. L’avantage avec les parfums au prix démocratique c’est aussi que l’on peut s’en servir comme base pour des créations personnelles, comme sent-bon sur le linge ou comme parfum d’ambiance. À dire vrai, j’en connais qui se servent de parfums d’ambiance de grandes marques, toujours moins chères que le parfum normal, pour se parfumer au moins les vêtements... J’ai rencontré quelqu’un qui faisait ça avec LAVS de Filippo Sorcinelli, par exemple.
Mais je m’égare. J’allais donc dire, je préfère Molinard, à cause d’Habanita d’abord, puis de Molinard de Molinard, une merveille chic que j’ai longtemps portée, quoique je l’aie abandonnée pour sa trop grande discrétion. Malgré tout, ces jours-ci je sillonne l’Internet en quête d’anciennes versions, pour la collecque, parce que le flacon est devenu très moche et que je me méfie des reformulations. Ceci dit, Molinard, contrairement à d’autres, ne massacre pas ses parfums historiques, et l’honnêteté me pousse à signaler que si j’aurais préféré que l’on n’y touchât point, celle d’Habanita n'ont pas été mal faites. Enfin, ils ont fini par interrompre la production de l’eau de toilette historique, craignant de l’abîmer justement par une reformulation de trop, et par sortir une eau de parfum un rien plus sage que l’espèce de sauvagerie sophistiquée d’autrefois. C’est malheureux mais personne n’échappe à la reformulation, hors de la parfumerie ultra-confidentielle qui ne vise ni un vaste public ni une clientèle internationale (qu’elle a quand même, par la force des choses et la puissance de l’Internet, mais ces clients-là savent ce qu’ils achètent et ne feront pas de procès en cas d’allergie.)
Je me méfie quand même un peu du positionnement récent de Molinard qui donne dans les collections grand luxe avec prix assorti. C’est un gimmick destiné à attirer un public à prétentions et c’est dommage parce que comme Fragonard (et Galimard apparemment) on trouve de jolies choses à prix décents. Certes, j’avais offert le très bel Ambré Lumière à ma mère, qui est pratiquement le clone du mythique Ambre Sultan de Lutens – le parfum Molinard, pas ma mère – si l’on remplaçait le laurier par de la sauge sclarée (laquelle contient en grande proportion du sclaréol, molécule à la base de l’ambre gris synthétique). Le sultan a perdu de sa superbe depuis quelques années et j’en connais plus d’un qui l’a délaissé au profit du Molinard... Personnellement, craignant un peu les ambres lourds (ou alors il me faut un gros tas de fleurs au milieu, ou de l’encens – ah, Akkad – ou une large lampée alcoolisée – ah, Ambre Russe), je me plaindrai moins sur ce coup-là, mais je n’en pense pas moins.
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