#Samouraï aux yeux bleus
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Pairing : Dedue (Fe3H) x reader
This is a first fic in french, but I can translate it in english for those who want =) Also, don't hesitate to send me request if you wish for me to write specific characters or prompts ! <3
“Dedue ?”
La voix de la jeune femme se perdit dans l'immense serre, résonnant contre la chlorophylle ambiante. Chaque plante semblait le témoin de son énième tentative, infructueuse, de parler à cet homme remuant vivement ses émotions. Il avait suffit d'un baiser. Une caresse sur ses lèvres froides pour que sa marque indélébile y demeure. Secondes magiques, divines, avant le silence, la honte, l'appréhension. Combien de fois avait-elle osé espérer pareil instant ? Trop pour en parler à vive voix. Mais le fait d'être ainsi évitée par la suite demeurait insoutenable. Si Dedue poursuivait dans cette direction, à l'éviter comme la peste - tout en prétextant devoir répondre auprès de son altesse Dimitri - elle devait provoquer une discussion. Une dispute, même. Qu'ils soient au beau milieu d'une guerre avec l'Empire, elle n'en n'avait cure : aujourd'hui, au sein même de cette serre, ils se parleraient. Et, afin d'éviter toute issue malencontreuse, elle comptait vie faire barrière de son corps, posté devant les deux larges portes du bâtiment, sciemment refermées après son entrée. “Dedue...” répéta-t-elle en désespoir de cause, s'approchant précautionneusement de l'homme occupant nuits et jours ses moindres pensées. “Puis-je vous être utile, Madame ?”
Cette voix... rauque, inaccessible, dépourvue de toute émotion. Aux antipodes de celle avec laquelle il murmurait son nom, quelques jours plus tôt. Le cœur de la jeune femme réprima un battement, ne se souvenant que trop bien de l'émoi s'emparant de son être à l'évocation de ce simple timbre. Mais aujourd'hui, aucune intonation personnelle : ni chaleur, ni familiarité d'aucune sorte. Ainsi, le duscurien mettait d'emblée une muraille infranchissable entre leurs deux âmes, avec autant de ferveur qu'il en usait autrefois, aux prémisces de ses différentes amitiés envers les Lions de Saphir. Cette pensée fit saigner le cœur de l'ancienne étudiante, pensant - non sans folie - être parvenue à devenir au moins son amie. N'en n'était-il rien en vérité ? S'agissait-il d'une fumisterie de plus, à laquelle s'accrocher pour ne pas sombrer totalement en ces temps de guerre ? Sans même s'en apercevoir, la dureté de ses ongles s'enfonça à même la chair de ses paumes, tentant par la douleur de la ramener à la réalité. Une réalité à laquelle elle n'aurait jamais cru avant que cette simple phrase ne la brise, elle, dont les émotions restaient pourtant si aisément absentes. Du moins, d'ordinaire... “Madame... as-tu oublié jusqu'à mon prénom que tu uses d'une telle politesse, Dedue ?” Il ne lui fallait pas céder à cette panique intérieure ne demandant qu'à gronder. À la place, une froideur contenue s'empara de sa voix et de son regard. Le bleu de ses iris devint bientôt aussi glacial qu'un matin d'hiver en Faerghus, seule réponse possible à pareille distance...
Le vassal de Dimitri se retourna alors, relevant de sa beusogne auprès des fleurs de la serre pour la gratifier d'une première œillade. Son propre cœur se fendit d'un soupir inaudible, sachant pertinemment que son attitude ne lui vaudrait rien. Si toute son âme n'éprouvait pourtant qu'un seul désir : la serrer contre son corps, laisser ses doigts puissants parcourir sa chevelure bouclée, écouter sa respiration s'apaiser au fil de leur étreinte. Mais ses espérances se mirent à s'effriter face à cette présence qu'il désirait de toutes ses forces. Se retrouver ainsi à leurs débuts ne lui donnait qu'une envie, puissante, irrémédiable : quitter une fois de plus sa présence, l'éviter en usant d'une nouvelle excuse fumeuse. Pour se faire, Dedue esquissa un pas, puis un autre, espérant quitter ce lieu sans encombre, avant qu'une main décidée contre son torse ne le stoppe dans son élan. “Ne fais pas ça...” Un murmure outrepassa la barrière du duscurien, alors qu'il osa prendre sa délicate paume dans la sienne. La fureur de ses iris le poussèrent à lâcher cette étreinte plus vivement qu'il ne le souhaitait. “Ne pas faire quoi au juste ? Vouloir te parler ? Arrêter de jouer à qui va éviter le plus l'autre jusqu'à la nuit des temps ? Mes félicitations Dedue, tu remportes haut la main cette bataille !”
Finalement, ce fut elle qui s'écarta des portes, la rage au ventre, présentant ces dernières afin de lui offrir une opportunité de s'échapper. “Tu veux partir ? Pars. Loin. Mais ne compte pas sur moi pour te rattraper une fois encore.” Sa voix fut aussi aiguisée que la lame d'un sabre de samouraï, tandis que son bras s'échouait le long de son corps frêle et tremblant. Oui, elle tremblait. “Es-tu... fiévreuse ?” Entendre le duscurien s'enquérir de son état lui donna presque un espoir, mais elle refoula cette idée d'un revers de main. Secouer vivement sa tête pour nier ce qui sautait aux yeux lui parut être la meilleure des idées. “Non. Je suis fatiguée, Dedue. Juste... fatiguée. Comme tous les Lions et nos alliés, probablement.”
Un grognement la fit subitement sursauter, la forçant à relever les yeux sur un visage marqué par une colère inhabituelle. “Je ne... je suis l'épée et le bouclier de son altesse. Il n'est pas question d'être autre chose. Je ne peux pas être autre chose...” Cette résolution, armée par une colère qu'elle n'avait vue que sur le champ de bataille, alors que sa hache pourfendait nombre d'ennemis, lui arracha une vive expression surprise. Si elle ne s'était concentrée que sur ce revirement, sûrement la colère ne serait pas infiltrée si aisément dans son être. “Tu ne peux être rien d'autre ?! Tu te moques de moi Dedue ! Pitié, dis-moi que ce n'est qu'une moquerie !” Sa paume échappa à son contrôle pour venir s'échouer contre ses lèvres, refusant de hurler alors que l'envie devenait pressante. “Tu es venu à moi... tu es venu à moi ! Pourquoi avoir tout fait pour que je ne puisse pas t'oublier ? Pourquoi m'avoir embrassée de façon si symbolique en haut de la tour de la déesse !” Finalement, sa voix se transforma en cri. Un cri de douleur, un cri du cœur, l'obligeant à serrer les poings et à baisser le menton. La jeune femme éprouvait un florilège de sentiments contradictoires, y compris la honte. Celle de courber l'échine et de ne trouver les mots pour toucher l'âme de Dedue comme il s'était littéralement emparée de la sienne, et ce d'un simple baiser.
Son corps trembla de plus belle face au silence et au froid l'entourant. L'homme avait-il passé les portes sans se retourner, comme elle le suspectait ? Devenue sourde à l'atmosphère de la serre, ouvrir les yeux reviendrait à embrasser cette réalité dont elle ne voulait pas. La dureté des événements la poussait à demeurer droite, rassemblant le peu de fierté lui restant encore pour que ses jambes ne se dérobe point. Puis, dans une seconde éclair, deux bras d'une puissance sans pareille enlacèrent son être, lui offrant une chaleur divine qu'elle n'espérait plus. “Si nous n'étions pas en guerre...” Cette voix rauque et suave fut tout ce qu'il lui fallut pour revenir à la réalité, et oser poser ses mains contre ce corps marqué de nombreuses cicatrices.
“Nous ne serons pas toujours en guerre, Dedue. Il y a de l'espoir pour un futur où Dimitri unifiera Fodlàn...”
“Alors attends-moi. Lorsque cette guerre prendra fin, je ne serai probablement plus le bouclier de son altesse. Et ce jour-là... nous penserons à nous.”
“...nous ?”
Cette promesse ne fut pas scellée uniquement par un regard empreint d'un amour indestructible. Ce jour-là, la valse de leurs lèvres en un baiser unique marqua la promesse d'un futur. Un futur en paix, où Dedue accepterait de lier son destin au sien.
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Le château des ombres — V3
Je me tiens à l’avant de ce petit shack à cinq pièces où j’ai vécu pendant un clin d'oeil, en compagnie de l’homme-hibou aux cheveux grisâtres. Mon obsession pour l’artisanat japonais découle de ses veines qui contiennent 1,5943/4 de sang japonais, 1,675675/4 africain, 1,64547/4 des Pays-Bas et finalement 1,34543/4 Néo-Zélandais.
Son nid est le seul du hameau qui ne laisse pas entrer le soleil, comme si dix crucifix clôturaient son entièreté, tels des gardiens de l’ombre. Le manque de vitamine D la laisse froide et obscur à l’écart. Flottant près de ses murs extérieurs revêtus d’échardes, le printemps Néo-Zélandais se confond à mon berceau natal hivernal canadien. Il ne fait jamais chaud. Il faut faire 47 pas à partir du seuil de la porte avant d’atteindre un premier rayon de soleil.
À première vue, l’avant de la maison est prometteur de respirations saines, de vies continues, de choses qui poussent et grandissent facilement. Le coin ardeur. Une étendue brève d’espoir.
La devanture regorge d’une collection de bonsaïs, qui signifie en Japonais « planter dans un pot ». Chaque individu tombant nez-à-nez avec le 666 Robert Mapplethorpe Street se mérite donc un voyage au pays formel des kimonos. Le roi du domicile n’a pas d’enfant, mais il a ses bonsaïs. Mon miniature préféré est celui au grand cou. Ce tronc qui rappelle cette femme de Kayan. Telle une girafe assoiffée de beauté. Le plus d’anneaux, le plus près d’une beauté qu’on ne peut simplement pas oublier. Son feuillage débute du haut de sa tête, virevolte, tels des cheveux sauvages sur un côté seulement de sa boîte crânienne. La bataille des longs cheveux qui ne vivent et grandissent que vers le bas. Ce besoin vital de se rapprocher de la Terre en s’accrochant à l’immobilité du sol est évident, à travers la forme de cet arbre. D’autres Ki木 sont malamanchés, enchaînés par des cordes métalliques pesantes de roches aux extrémités. Pendouillantes et contrôlantes, elles cherchent à modeler le cours de leurs chevelures feuilletées. Ces dames-arbres semblent perturbées par ces chemins de fer imposants. Une promesse d’un devenir majestueux. Un moule forcé.
La respiration à l’avant de la maison est nécessaire avant le premier pas à l’intérieur. Comme prendre une bouffé d’air du détenteur d’une bouteille de plongée avant de disparaître dans l'abysse.
Une fois passé les Camélias qui chuchotent leurs 900 noms japonais, le craquement des planches de bois sous les pieds, annonce le début du dortoir de la mort. Des carcasses d’animaux sont entassées sur le rebord comme on empile du linge sale les yeux fermés. Des crânes d’opossums, de chevaux, de lapins, de rats et de phoques flânent là. Je nomme ce chemin « le baptême ». Pareillement à des miettes de pain menant vers l’entrée principale. Des bambous sont enlignées au haut de ma tête. De grandes cordes robustes de marins les soutiennent. Je ferme les yeux et je vois l’œuvre d’Auguste Rodin « La porte de l’Enfer » se dresser devant moi en duplicata, puis en rafale. Un grand tunnel. Un avertissement imaginaire fugace. Un signe de bronze noir laissant sous-entendre que de passer sous l’arc, c’est de signer un contrat avec la profondeur des atrocités du passé qui vivent sous ce toit. Des fantômes aisés qui ne cognent pas avant d’entrer.
Sur la porte vitrée, près de la poignée, des cœurs bleus crayonnés indélébiles crient que l’amour est présent aussi. Que tout n’est pas que noir charbon. La main tremblante sur la poignée, le royaume m’aspire à l’intérieur. Analogiquement dans la bouche d’un détraqueur. Il est trop tard pour se retourner ou courir de dos. Il n’est plus possible de faire marche arrière. Je pénètre à contrecœur, mouillant la poignée de mes tremblements intérieurs incontrôlables.
J’entre.
Une odeur d’abandon creuse mes narines. Elle me rappelle le sous-sol de mes grands-parents, moisi, altéré et mouillé par le temps. L’odeur des magasins d’antiquités. L’odeur de l’indigence. L’odeur que laisse le temps. La laisse sur laquelle le temps se rattache, donnant l’illusion d’un surplace. Un rappel qu’il est toujours en mouvement, qu’il passe.
Les murs défrichés sont garnis de samouraïs combattants, deux compagnons en carton habillés d’une carte du monde, un homme bleu qui pleure, un bonhomme bleu qui fait de la planche de mer. La couleur bleue, celle de la distance, selon Rebecca Solnit. Les signes sont tous là. Il y aura la mort, la distance, la hargne, la mélancolie, la bataille, la noirceur. Des choses coupantes recouvrent le sol intouchable. Des couteaux. Surtout des couteaux inoxydables. Des épées rouillées. Des arcs à flèches. Dans ma poche, aucun diachylon. Merde. Comment vais-je survivre à ces armes?
Toujours sur le plancher, derrière une pile de grandes peintures imprimées sur du bois, une femme inerte aux cheveux longs, foncés, se couvre les yeux de ses longs doigts de sorcière. Elle est en sous-vêtements, vulnérable, voyant ces enfers à travers les lucarnes créés par les espaces de ses doigts. Suivant son sillage, je la retrouve de nouveau sur le réfrigérateur, la tête en bas. Peut-être vaut-il mieux qu’elle n’ait pas à voir la réalité de cette baraque à l’endroit.
Finalement, de toute beauté, elle repose couchée sur une photographie en profondeur des mers, sous la forme d’une fausse sirène. Un vrai vautour aquatique reprenant haleine près de sa tête à lui, chaque soir. Comme on pose un chasse-rêve, afin de maudire les cauchemars. Elle me parait plutôt comme une invitation, un espoir de la retrouver, en chair et en os, dans les rêves. Au moins, dans les rêves. Si pas possible en vrai.
Au son d’un battement d’ailes, je détourne mon attention au-dessus de mon épaule. Des yeux de hibou noctambules jaunes trouvent les miens. Un choc vigoureux m’habite. Je suis ineffable, languissant là, menue d’une bouche cousue aphone. Je reste sans son, sans mouvement. Une candeur d’enfant prend domicile en moi tout d’un coup. Gaillarde, je suis prête à sauter sur son dos! Allons franchir cette Terre vers les cieux et combler les promesses d’arbres en hauteur ainsi que toucher les étoiles qui peuvent être atteintes en plein vol. Je veux le rencontrer de nouveau, je veux le vivre. Lui. Je veux me prêter. Mon cœur dans les mains, je le lui tends viscéralement. Les cloisons de mes mœurs tombent. Je suis prête à brûle-pourpoint.
Ella-V1
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Chapitre 21 : Résistance
Face à cette nuit étrange et cette arrivée de démons un peu partout, la panique régnait dans le monde, la majorité ne sachant comment réagir face à ces créatures surnaturelles aussi affreuses qu’hostiles. Personne ne semblait capable d’enrayer cette vague maléfique qui déferlait…
Cependant, certains ne comptaient pas se laisser faire, à commencer par les habitants de Forgotten Hollow, bastion des vampires depuis des décennies et qu’eux, ainsi que leurs alliés surnaturels, n’avaient aucune intention de laisser derrière sans se battre pour le conserver, même si cela devait se finir en combat à mort.
Lilith Vatore était très motivée à défendre ce lieu car elle y était née et tout ce à quoi elle tenait s’y trouvait : sa maison, ses lieux préférés, ses souvenirs d’enfance aux côtés de son père et, surtout, son frère Caleb. Donc ce ne sera pas un sale démon hargneux qui allait la chasser d’ici !
—Bravo sœurette ! l’applaudit Caleb après qu’elle ait vaincu son dernier adversaire. Tu m’as battu ! Ça fait huit à cinq du coup.
—Ça risque encore de changer au rythme auquel ces saletés se pointent ! s’exclama-t-elle après que son ennemie se soit évanouie au sol. Ils sortent d’où au juste ?!
Si ça continuait, ils allaient les avoir à l’usure et Lilith se doutait bien qu’avec une telle cadence, elle et Caleb n’allaient pas tenir très longtemps. Il fallait réussir à les repousser une bonne fois pour toutes mais comment ?
Soudain, elle réalisa qu’une présence hostile s’était approchée d’elle à son insu, profitant de sa fatigue… puis un vampire qu’elle exécrait par-dessus tout la poussa sur le côté, attrapant son assaillant par la nuque avec une poigne solide.
—Je peux savoir ce que vous fichez à bailler aux corneilles ?! s’exclama Straud en resserrant sa prise sur sa victime. Restez sur vos gardes ! Ces vermines sont de sales petits opportunistes qui s’abaissent à tous les coups bas qu’ils peuvent !
—Heu… Oui Straud !
Il allait y avoir une tempête sur Forgotten Hollow : Vladislaus Straud, leur ennemi juré, venait de leur sauver la peau. Un jour à marquer d’une pierre blanche…
D’ailleurs, Lilith Vatore n’avait pas tort en suspectant une météo défavorable dans les prochaines minutes car dans une autre partie de la ville, d’autres démons avaient cerné ce qu’ils pensaient être une simple mortelle, attirant sur eux l’attention de quelqu’un d’autre qui était bien déterminé à leur botter les fesses.
—Hey ! s’exclama Colombine en prenant son bâton en main. Deux contre une, ce n’est pas équitable ! Essayez donc de me vaincre si vous êtes si forts !
—Ah ! Mais je n’avais pas besoin d’aide tu sais…
Colombine fut d’abord intriguée par la remarque de la jeune femme… avant que celle-ci ne change d’apparence, faisant chuter la température au même moment et lui faisant comprendre que cette fille n’était probablement pas sans défense.
—Hein ?! fit un des démons, surpris. J’croyais que c’était une humaine moi ?!
—Moi ? Humaine ? répliqua Kate Frost sur un ton acide avant de partir dans un rire qui leur glaça le sang. C’est d’un ennui ces démons de seconde zone…
Dans un coin de sa tête, Colombine se disait qu’elle ferait peut-être mieux de déguerpir d’ici car cette fille semblait plus coriace qu’elle… mais elle se ravisa car, là, ce n’était pas dans son intérêt de fuir et de courir le risque d’être coincée par un plus grand groupe de démons mineurs.
—Tu prends qui la nouvelle ? demanda Kate Frost avant de lâcher un soupir blasé. J’ai pas de préférence vu qu’ils ne vont amener aucun challenge….
—Moi non plus tu sais… répondit Colombine qui ne savait guère comment se comporter aux côtés de celle qui n’était manifestement pas un démon vu son aura glaçante.
—L’usage ici est de taper puis de discuter après mais, personnellement, je préfère congeler puis disséquer quand ça me tape sur les nerfs. Oh et bienvenue à Forgotten Hollow.
—Merci…
Autant dire que Colombine comptait bien ne pas se mettre son comité d’accueil à dos… surtout en voyant de la glace se former sous les pieds de Kate Frost.
Parmi la résistance contre ces démons, le quartier asiatique de Newcrest pouvait se targuer d’avoir les combattants les mieux formés à lutter contre eux. Lorsque ceux-ci apparurent sur le terrain du Matsuri, Momoko et Yamato réagirent instantanément en attrapant leurs katanas et en allant protéger la seule civile présente.
—Mais d’où sortent-ils ?! s’étonna Momoko qui reconnut ces démons comme étant du même acabit que ceux qu’ils avaient affrontés avec Ezekiel.
—Nous nous en soucierons après que nous leur ayons montré qui commande ici, déclara Yamato, prêt à leur régler leur compte. Quant à vous mademoiselle, il serait préférable que vous alliez vous mettre à l’abri.
—D’a-accord… fit Erika en grimaçant.
Sincèrement, Erika Muerte était très partagée. D’une part, elle regrettait amèrement d’être venue chercher son téléphone qu’elle avait oublié et d’autre part, ce samouraï était plutôt mignon et elle avait très envie de savoir s’il était célibataire… ainsi que découvrir à quoi il ressemblait sans le kimono.
A Oasis Springs, Iowa et cette fille mystérieuse avaient réussi à se cacher dans les toilettes avant d’être vus et, en tendant l’oreille, il s’aperçut que les démons n’avaient peut-être pas bougé, ce qui intriguait un peu le professeur.
—Etrange qu’ils ne viennent pas par ici, dit-il à voix basse en gardant un œil sur la porte. On dirait qu’ils sont restés dans l’entrée.
—Le sarcophage d’Isis en est surement la cause, répondit l’inconnue, pensive. Il sent la présence des démons et doit probablement les maintenir à distance pour ne pas qu’ils ne pillent cet endroit mais je ne sais pas combien de temps il tiendra seul.
En entendant cela, Iowa réalisa soudainement pourquoi cette fille lui rappelait quelqu’un… ou plutôt, pourquoi elle lui évoquait deux personnes qui n’étaient plus de ce monde.
—Vous êtes une Sahara, c’est ça ? supposa-t-il, estimant que c’était la seule réponse possible au fait qu’elle sache ce qu’était ce sarcophage.
—Je m’appelle Soraya, se présenta-t-elle. Pour les explications, je vous propose, si on sort d’ici vivants, de vous les offrir autour d’un verre.
—Entendu. Par contre, même si ce n’est pas ma première rencontre avec le surnaturel, mes connaissances dans le domaine sont très limitées…
—Tant que vous pouvez suivre mes pas de danse ça m’ira… et aussi que vous vous retourniez le temps que je me change.
Iowa comprit mieux pourquoi elle avait un grand sac avec elle en la voyant sortir une perruque et ce qui ressemblait fort à une tenue de cérémonie qu’il avait pu voir dans un document trouvé dans les archives d’Heaven. Il fit donc face à la porte le temps nécessaire bien qu’étant homosexuel, il savait très bien que Soraya allait le laisser de marbre – et puis bon, il avait son petit copain qui, s’il n’était pas en train de s’abîmer les yeux sur son écran d’ordinateur, devait être en train de dormir dans leur chambre d’hôtel si tout se passait bien.
Du côté de Brindleton Bay, combattre des démons était plus compliqué pour Salazar et Billy, tous deux étant dotés de pouvoirs qui étaient plus inoffensifs qu’autre chose. Leur seule option était donc la fuite pure et simple pour pouvoir distancer leurs poursuivants… ce qui n’était pas gagné.
Cependant, le plus âgé des deux eut une idée et, au lieu de partir en direction de la rivière et de la forêt, il bifurqua pour prendre le sentier menant à l’étang, le tout en espérant au plus profond de lui qu’une certaine personne n’était pas partie en douce pour faire on ne sait quoi et qu’elle était soit en train de jardiner, soit en train de dormir – tant qu’elle était chez elle, son idée pouvait fonctionner. Il continua de courir, dépassant l’arbre aux fleurs roses qui avait cette fâcheuse manie de briller la nuit.
—Sal’ ! hurla Billy derrière lui. Mais qu’est-ce que tu fiches ?! Tu les attires chez nous !
—Pas exactement ! répliqua Salazar en s’arrêtant brutalement. Nous sommes arrivés !
—HEIN ?!
Son collègue et ami le fixa avec de grands yeux ronds, pensant clairement qu’il était devenu fou, avant de pousser un soupir résigné quand leurs poursuivants se montrèrent à leur tour, marchant sur les fleurs se trouvant sur leur passage.
—Bon ben ça y est mon pote, on est morts ! s’exclama Billy en haussant les épaules. Ravi de t’av-
—Je t’assure que nous avons encore de beaux jours devant nous, le coupa Salazar avec un sourire quelque peu malicieux. Tu te souviens de la fois où tu as voulu offrir des fleurs à Jaimie ?
—La plus belle femme de l’univers ? Comment oublier ces yeux bleus comme un ciel sans nuages, ce rire qui résonne encore plus que du cristal, s-
Puis soudain, son ami venait de comprendre ce qu’il se tramait, son teint venant de blêmir en se remémorant ce fameux jour où il s’était attiré le courroux de la maîtresse des lieux…
—Oh non… lâcha Billy dont les yeux marrons virent que leurs poursuivants avaient écrasé une bonne dizaine d’iris. Si moi elle avait tenté de m’étrangler avec des rosiers pour une fleur coupée, alors eux…
—Tu as compris à ce que je vois, s’en amusa Salazar qui se souvenait bien du jour où son ami avait vu sa vie défiler devant ses yeux.
—T’es le pire d’entre nous en fait ! Je comprends mieux maintenant pourquoi elle te traite de filou !
Heureusement qu’il en était un car autrement, le nombre de muses aurait déjà été réduit de moitié…
Les deux démons, n’ayant aucune connaissance des dangers de ce lieu, avaient piétinés nombre de fleurs sur leur passage et l’un d’eux, pensant que leurs futures victimes avaient compris qu’elles étaient fichues, avait même été jusqu’à arracher d’un coup sec un arbuste qui avait été fraichement planté juste pour le plaisir de tout saccager. Seulement, ils n’allaient pas tarder à en payer le prix car en faisant cela, ils avaient attiré sur eux le courroux de la propriétaire du jardin…
—Que ?! fit un des démons en jetant un œil an arrière. Il était là ce mur végétal ?
—Qu’est-ce que j’en sais ? répliqua l’autre, trop confiant. Moi j’ai hâte de leur tordre l-
Brusquement, d’autres murs de rosiers se dressèrent tout autour d’eux, cela jusqu’à les isoler totalement. D’abord surpris de ce phénomène, ils tentèrent de passer au travers mais les épines s’y trouvant étaient particulièrement solides et pointues, comme si infusées de magie.
Alors qu’ils se demandaient comment sortir de là, un petit rire très agaçant attira leur attention : quelqu’un était avec eux.
—Tu es qui toi au juste ?! fit l’un d’eux. D’où tu sors ?!
—Hi hi hi… répondit leur adversaire avec un sourire mauvais. Voyez-vous, de base, j’aime pas du tout les démons mais certains de vos pairs avaient… redoré votre image ? Pour faire simple, j’en étais venue à vous tolérer tant que vous respectiez un minimum les règles de bon voisinage…
Vu leurs têtes, ils ne savaient clairement pas où ils étaient tombés… et vu que ces saletés avaient sciemment détruit une partie de son ouvrage sans en exprimer le moindre remord, la diplomatie pouvait être jetée aux oubliettes au profit de la loi du Talion. Après tout, c’était la règle que sa sœur et elle appliquait en cas d’accrochage avec un démon à Brindleton Bay : pas de quartier !
—J’suis p’ete pas avantagée la nuit mais ici, bande de nazes, c’est chez moi ! lança Fairy avec un grand sourire. Bye bye !
D’un claquement de doigts, elle fit surgir des branches épineuses qui entourèrent les deux démons avant de prendre de l’ampleur… devenant progressivement un énorme rosier qui piégea ses victimes dans ses branches et ses feuilles, étouffant leurs cris en ne leur laissant aucune échappatoire possible et les condamnant à finir comme engrais pour ses plantes.
Une fois que le rosier eut entièrement absorbé les démons, Fairy renvoya ses barrières végétales dans le sol puis, jetant un regard noir à ses deux camarades, vint les rejoindre pour comprendre ce qu’ils avaient bien pu faire pour attirer ces deux saletés chez elle.
—Je peux savoir lequel de vous deux a eu la brillante idée de me réveiller en fanfare avec ces trucs ?! fit-elle en désignant le rosier avec lequel elle s’en était débarrassée.
—Salazar, dénonça Billy.
—J’aurais dû me douter que c’était ton plan Moustache…
—Excuse-moi d’avoir voulu sauver nos peaux, répliqua Salazar, peu impressionné par Fairy. Au cas où tu l’aurais oublié, aucun de nous ne peut faire ce que tu fais, surtout qu’aucun de nous n’avait vu de démon ici depuis notre installation.
—Donc j’vais devoir ratisser la ville pour voir si y a d’autres saletés de ce genre et les virer avant qu’ils ne saccagent tout ! J’oublierai que tu les as attirés chez moi si tu me fais mon plat préféré !
—Vendu ! Billy te racontera des blagues pendant que tu manges.
C’était honnête comme échange… surtout qu’elle allait avoir du taf en perspective pour se débarrasser de tous les démons qui pouvaient représenter un danger à Brindleton Bay. Le bon côté, c’était que la végétation allait très bien se porter cette année une fois qu’elle aura fini son ménage…
A Windenburg, Belthelda, à sa grande surprise, avait réussi à survivre à Ezekiel, probablement grâce à sa constitution d’ogresse qui restait plus solide que celle de beaucoup de démons, faisant qu’elle avait juste dû rester un bon moment dans les vapes vu qu’il faisait nuit. Cependant, vu comme elle avait du mal à respirer, elle avait sacrément morflé et devait se nourrir au plus vite si elle voulait récupérer.
Seulement, elle avait un petit souci en la personne de deux démons de bas étages qui semblaient très tentés à l’idée de se débarrasser d’un de leurs principaux prédateurs.
—Combien tu penses qu’elle a mangé des nôtres celle-là ?
—C’est une ogresse donc des centaines ! Tout ça pour une question de chaine alimentaire…
Si les ogres ne faisaient pas de temps en temps un petit buffet de ce type de démons, le nombre de raids à travers le monde serait bien plus élevé qu’il ne l’était actuellement et les guerres contre les créatures surnaturelles auraient repris de plus belle. De toute façon, ces petits démons de bas étage n’avaient généralement rien dans la tête et pensaient plus à foutre le souk pour leur propre plaisir qu’autre chose, ce qui les mettaient au même niveau que les gobelins, c’est-à-dire dans les créatures surnaturelles dites nuisibles et qu’il ne fallait surtout pas laisser proliférer.
—On fait quoi en premier ? On lui arrache la tête ?
—Et si o- Gnéé….
Qu’est-ce que… Un truc bizarre était en train de se produire apparemment car le premier démon trouvait étrange que son compère devienne soudainement amorphe. Seulement, au moment où Belthelda vit l’autre démon encore frais changer d’attitude, elle se demanda sérieusement ce qu’il se passait.
—Un Mississipi, deux Mississipi…
—… et la poule picorait du pain dur pendant qu’il se roulait par terre depuis quatorze minutes après qu’un moucheron l’ait effleuré à la joue…
—D’accord… fit l’ogresse, stupéfaite. Je sais pas ce que vous avez mais c’est en train de me couper l’appétit…
—Ce n’est pas contagieux ce qu’ils ont.
Cette voix… Belthelda ouvrit grand les narines, réalisant qu’elle avait manqué cette odeur de mort si caractéristique des vampires, l’ennemi naturel des ogres. Seulement, elle était ponctuée par un léger parfum de bois de santal mêlé à une fragrance quelque peu anisée qui était typique du seul suceur de sang avec lequel elle s’entendait bien – il devait d’ailleurs être accompagné car il n’y avait aucune chance pour que ce soit lui qui sente ainsi les agrumes. Elle eut confirmation que son odorat ne l’avait pas trompée quand elle vit une vieille connaissance de Forgotten Hollow.
—T’as l’air en forme depuis la dernière fois, fit-elle remarquer en constatant que son camarade avait adopté un style vestimentaire plus actuel bien que gardant une certaine classe. Ca fait quoi… deux ans ?
—A peu près oui, confirma-t-il avec un léger sourire amusé. J’avoue que je n’aurais jamais pensé devoir un jour te tirer d’affaire vu le nombre de bagarres que tu gagnais à la sortie de l’Outre-Tombe.
—Quelqu’un m’a affaiblie et ces deux là voulaient en profiter. Pour la peine, ils vont me servir de dîner car là, j’ai vraiment besoin de récupérer.
—Dès qu’elle aura terminé, ils seront tout à toi.
En tournant la tête vers leurs deux démons, Belthelda vit que la deuxième vampire avait attrapé un des deux démons sous hypnose et était en train… de quoi au juste ? Ca ne sentait pas le sang…
—Elle fait quoi au juste ? demanda l’ogresse, intriguée.
—Elle leur pique quelques ténèbres, répondit son vieil ami l’air de rien. Je suis surpris que Kate n’ait dit à personne que tu avais déménagé ici. Vous n’étiez pas proches j’imagine…
—Kate ? C’est qui ça ?
—… Celle qui prétend que tu lui avais cédé ta maison en partant.
Aux dernières nouvelles, Belthelda avait laissé la cabane de bucheron où elle vivait sans un regard en arrière… Possible que cette fille la lui ait piquée par la suite mais c’était un peu curieux qu’elle ait déclaré autre chose.
—Je l’ai abandonnée ma bicoque donc j’peux te confirmer qu’elle a dit des salades, dit-elle sans trop chercher à creuser. Par contre, tu tombes vraiment bien car j’crains que des potes à moi soit en danger.
—Dis m’en plus, fit le vampire, visiblement très intéressé.
—En fait, j’bosse pour une sorcière pas très commode qui voulait que j’éloigne un peu les curieux mais aujourd’hui, son frère et moi étions en ville avec la fille qu’ils protégeaient quand on est tombés sur un semi-démon qui voulait tuer quelqu’un. Sirius, le frère de la sorcière et aussi mon ami, l’a emmenée pendant que je leur faisais gagner du temps mais ce sale demi-incube m’a blousée avec ses pouvoirs et m’a mise KO.
—A moitié incube tu dis ? Il ne serait pas roux et un peu agaçant à tout hasard ?
—Roux, oui, et agaçant… si tu parles de la manière dont il m’a battue, ça colle assez. Tu le connais ?
—Oh oui… Rien que l’idée de lui coller mon poing dans la figure afin de te venger me met en joie. Quelle direction ?
—L’île de Windenburg à coup sûr pour Sirius. Tu peux pas le rater : il sent le sapin grillé et la pomme de pin fumée !
—Je prends note.
Il siffla un bon coup, attirant l’attention de l’autre vampire qui venait de terminer de s’occuper des deux démons puis, après un signe de la tête, ils partirent tous deux en direction du port… laissant à l’ogresse le soin de faire disparaitre ces deux nuisibles pour de bon et aller faire un peu de ménage en ville.
Au Manoir Von Haunt, le bâtiment avait été fermé dans l’urgence, faisant que personne, excepté des fantômes, n’était en train d’y rôder. Un vrai coup de chance pour eux car du coup, personne ne les vit arriver et ils purent ainsi fouiller les lieux, cela jusqu’à ce que Jaimie repère ce qu’ils cherchaient : l’origine du sort qui avait été lancé.
—Vous aviez raison Margaux, dit-elle en fixant le cercle au sol.
—Certaines choses ne changent pas, même après un millénaire, déclara la magicienne, la mine sombre. Seulement, il semblerait que nous soyons arrivés un peu tard…
—Rien n’est certain, leur fit remarquer Gabriel dont les yeux bleus analysaient les environs. Cordelia est en train de déplacer la Tour Mirage dans un lieu plus riche en ténèbres donc dès qu’elle aura terminé, nous pourrons passer à l’action et briser cette magie.
Sa compagne avait été enragée de ne pas pouvoir venir avec eux mais elle était la seule à pouvoir mettre en place la nouvelle version de leur tour – quoique le terme « Bastion » serait plus approprié à présent – à Forgotten Hollow, l’endroit où l’on pouvait trouver la plus grande quantité de ténèbres et d’où elle allait devoir leur envoyer celles-ci droit sur eux afin de contrer la corruption lumineuse qui, pour le moment, faisait sortir tous les démons mineurs des environs.
Qui plus est, même s’ils avaient beaucoup de choses dont ils devaient parler avec Margaux, cela allait devoir attendre, surtout qu’elle avait insisté sur le fait qu’Ezekiel n’était pas prioritaire pour le moment.
—Si seule la corruption est à éliminer, nous avons juste le temps pour y parvenir, déclara Jaimie qui semblait soucieuse. Seulement, cela n’affectera que celle qui a été dispersée par ce sort donc si Ezekiel est corrompu, cela risque de n’avoir aucun effet sur lui. Surtout que je crains que ce sort ne soit pas si simple…
—Le cercle ressemble fort à ceux utilisés pour créer des portails, constata Margaux, pensive. Cela aurait donc ouvert un portail pour… de la corruption ? D’où viendrait-elle dans ce cas et pourquoi forcer la nuit sur le monde entier ? Ca n’a pas de sens…
—Ca, ce sera à déterminer plus tard. Il faut que nous nous mettions en place et vite avant que cela ne dégénère. La dernière fois que c’est arrivé, cela avait été provoqué par la corruption Ténébreuse au sein de Midgard et avait conduit à ce qu’ils avaient appelé le Ragnarök.
Au loin, Gabriel voyait une chaine de montagnes enneigées, lui faisant se demander si ce sort était allé jusque là-bas… et lui rappelant que cela faisait maintenant plusieurs années qu’il n’était pas retourné là où il était né, ne serait-ce que pour aller fleurir la tombe de sa mère. Une fois tout cela terminé, il faudra vraiment qu’il explique correctement ses origines à son fils et qu’il l’emmène à Granite Falls pour qu’ils aient la possibilité d’en parler seuls à seuls.
—Gabriel ? fit la muse, le sortant de ses pensées. Tout va bien ?
—Oui, dit-il en se plaçant d’un côté du cercle. Tenez-vous prêtes car l’échec n’est pas permis pour ce sort…
Cordelia avait intérêt à se dépêcher car, comme Margaux l’avait relevé, le cercle était fait pour créer des portails et il doutait fort que ceux-ci ne soient censés faire passer que de la corruption…
Aux Falaises, Eurydice, Sirius, Liam et Alphonse étaient arrivés sans encombre. Seulement, la marche rapide qu’ils avaient faite pour atteindre les lieux au plus vite n’avait pas été de tout repos sur ce terrain quelque peu accidenté.
—J’avais oublié que ça grimpait autant… souffla la jeune femme, essoufflée. Comment tu fais pour pas être crevé toi ?
—L’habitude et ce terrain m’est très favorable, répondit le musicien, l’air amusé. Encore quelques mètres et j’aurais des conditions optimales pour nous éloigner d’ici.
C’est vrai que l’élément de Sirius était l’air… Les vents soufflant sur les Falaises devaient le renforcer à tous les coups et il devait plus qu’apprécier les lieux en hauteur.
—Et comment comptez-vous faire ça ? lui lança un Alphonse Duspeti qui avait visiblement mal digéré d’avoir abîmé son costume sur mesure. Vous oubliez que nous sommes poursuivis !
—Même si ça me hérisse le poil de sauver vos miches, va falloir me faire confiance, comme quand j’ai récupéré l’autre abruti quand il m’a pas écouté sur le chemin à prendre.
Eurydice dut retenir un rire en se rappelant que Liam, dans la montée, avait voulu couper à travers des fourrés. Mauvaise idée car il avait mis son pied sur un terrier de renard et l’avait coincé dedans… pour ensuite perdre l’équilibre et tomber sur un buisson de ronces. Autant dire qu’il s’était bien ridiculisé…
—Y a plus que quelques mètres à faire. Autant ne pas trop trainer.
Sur ce point, tous étaient du même avis que Sirius et, prenant sur eux-mêmes, ils le suivirent sur le reste du sentier… avant de s’arrêter net quand ils virent quelqu’un sortir des fourrés.
—Et zut ! jura le musicien entre ses dents. Il a vu venir le truc…
Honnêtement, Eurydice mentirait si elle disait qu’elle était surprise de ça car, de ce qu’elle avait vu à Avalon, Viktor était quelqu’un de rusé et ces falaises devaient déjà exister à son époque donc il n’avait pas dû avoir besoin de beaucoup de temps pour comprendre qu’il lui suffirait de les attendre ici pour qu’ils viennent à lui.
Par contre, vu ce qui était ressorti de la discussion avec Alphonse Duspeti, elle avait quelques questions en tête dont elle tenterait bien d’avoir les réponses, même si c’était risqué. Lorsqu’elle fit un pas en avant, son ami lui tint le bras pour l’arrêter mais elle lui fit signe de la laisser faire et il la lâcha, prêt à intervenir si besoin.
—Alors tu nous attendais, c’est ça ? lança-t-elle avant de reprendre lorsqu’elle n’obtint aucune réponse. Je sais que c’est toi Viktor donc dis moi enfin ce que tu me veux qu’on en finisse !
—… Hé… finit-elle par entendre en face. On a du courage à ce que je vois… Fascinant…
L’intuition de la jeune femme lui disait qu’un truc clochait et elle trouva vite quoi : la façon dont il s’exprimait. Pourtant, ça ne pouvait être que Viktor en face d’elle car Ezekiel n’avait pas ce genre de tic de langage… D’ailleurs, à Avalon, n’avait-elle pas déjà montré sa vaillance à cet homme ? Pourquoi donc formulerait-il sa phrase comme si c’était la première fois qu’il la voyait lui tenir tête ?
Elle fit un pas de plus, guettant les réactions en face, notant ainsi que la main gauche de celui qui s’était approprié le corps d’Ezekiel tremblait… mais alors qu’elle comptait continuer d’avancer, elle sentit quelque chose de pointu dans son dos et quelqu’un lui attrapa le bras avec force.
—Pas si vite, fit la voix d’Alphonse Duspeti derrière elle. Si c’est pour me donner comme monnaie d’échange à ce tordu, alors je préfère encore finir ce que j’ai commencé ici !
Eurydice était à la fois tétanisée et prise de court car, dans leur hâte, ils n’avaient pas pensé un seul instant à fouiller leurs deux lascars, si bien que l’homme d’affaires, faisant mine de coopérer, avait réussi à leur cacher qu’il avait un couteau sur lui. A cause de cela, la situation risquait fort de dégénérer…
Sans surprise, en voyant le danger, Sirius réagit tout de suite, usant de sa magie pour faire sauter le couteau de la main d’Alphonse Duspeti.
—Hey ! fit le musicien, ayant revêtu son apparence d’incarnation du Tome de l’Air. Eloigne-toi d’elle tout de suite !
Alors que l’homme d’affaires allait répondre, la jeune femme entendit un son étranglé derrière elle puis soudain, la prise sur son bras disparaitre… tandis que leur ennemi se téléporta à côté d’elle pour avancer de quelques pas, un air mauvais sur le visage.
—Tut tut tut, fit Ezekiel en agitant la main. De mémoire, je t’avais dit que ce que tu cherchais était ici mais à aucun moment je ne t’ai autorisé à tuer cette fille que je sache. Vous les Duspeti avez parfaitement joué votre rôle d’appât et maintenant que j’ai tout ce que je veux, vous ne m’êtes plus d’aucune utilité.
Eurydice, jusque là tétanisée, se retourna pour essayer de stopper leur ennemi mais elle fut figée d’horreur en réalisant que d’un geste, le magicien était en train de faire voler Alphonse Duspeti vers le bord des falaises…
… pour ensuite le lâcher au dessus du vide, le laissant hurler le temps de sa chute jusqu’à ce qu’un son atroce parvint à leur oreilles, ne laissant guère d’espoirs sur la survie de l’homme d’affaires.
Ne voulant certainement pas subir le même sort, Liam prit ses jambes à son cou avant même que son cousin n’ait atteint les rochers en bas des falaises, ne prenant même pas la peine de se retourner.
La jeune femme s’éloigna de leur ennemi, horrifiée par l’acte qu’il venait de commettre de sang froid. Ce dernier se tourna vers elle, surement pour s’occuper d’elle, mais Sirius se plaça entre eux deux.
—Tu ne la toucheras pas, dit fermement son ami.
—Oh ? fit Ezekiel, peu impressionné. Et tu te crois de taille ? On va voir cela…
Sur ces mots, les deux magiciens se préparèrent au combat tandis qu’Eurydice alla vite se mettre à l’abri.
A Forgotten Hollow, Cordelia avait enfin terminé de mettre en place leur nouvelle demeure et, aussi, ce qu’il lui fallait pour mettre un terme à cette nuit dangereuse…
—Il ne serait pas plus logique de faire cela d’Oasis Springs ? demanda Flamberge, sceptique.
—Si la corruption n’était pas d’origine lumineuse, oui mais là, il faut que l’on démarre d’un point riche en ténèbres pour avoir une chance que ça marche, répondit la succube qui venait de revêtir sa forme sombre. Si le soleil que l’on créé ici perce la nuit sur Forgotten Hollow, c’est que nous aurons réussi.
—Autrement, ça peut finir en Ragnarök, fit Sedna, pensive. Bizarre quand même que les dieux de Midgard n’ait pas usé de cette option…
—Peut-être parce qu’ils n’avaient pas eu cette idée et les moyens de la mettre en place sans risque majeur ?
A cet instant, les deux incarnations la fixèrent avec de grands yeux… et visiblement, elles avaient vite compris le cœur du problème…
—Vous êtes en train de nous dire que vous n’avez aucune idée de si ça va marcher ou non ?! s’exclama la chanteuse, abasourdie. Et il se passe quoi si on se rate ?!
—Je vous déconseille d’y penser… déclara Cordelia en serrant les dents, n’ayant aucune intention de leur dire qu’un échec signifierait, vu la puissance de feu de Flamberge, que Forgotten Hollow et ses habitants seraient rayés de la carte à tout jamais.
—Alors allons-y, fit la danseuse en prenant position.
Chacune se mit en place et, ainsi, commença la chaine magique : Sedna usait de ses pouvoirs sur Cordelia pour la renforcer, Cordelia faisait de même avec Flamberge et cette dernière concentrait au maximum sa magie…
… cela jusqu’à former une puissante boule de lumière aveuglante entre ses mains…
… avant de la lâcher en plein ciel, en direction du manoir Von Haunt à Windenburg où, quelques minutes plus tard, Gabriel sentit ses cheveux se dresser sur sa nuque. C’était le moment.
—Il arrive !
Le signal était à présent donné et ils n’avaient que quelques secondes pour préparer leurs sorts et, surtout, être dans le bon timing…
—C’est bon pour moi !
Jaimie était forcée d’user de ses deux mains, n’ayant pas de possibilité autre pour lancer un sort puissant vu que, de base, sa magie n’était pas faite pour l’attaque mais pour la défense. Avec lui, elle était la seule à avoir une chance de pouvoir compenser une erreur… à condition qu’elle ne soit pas trop grave.
—Prête.
Le crépitement qu’il entendit lui confirma que Margaux était effectivement parée à l’attaque et que c’était clairement son domaine de prédilection, ce qui était une bonne chose car c’était probablement elle qui allait le mieux tenir son sort le temps nécessaire. Surtout que son rôle allait être de disperser la magie qui venait droit sur eux car elle était la seule qui pouvait le faire.
—MAINTENANT !
Au même moment, ils lancèrent leur sort sur la boule de magie qui tombait droit sur eux, la gardant en place le temps qu’il fallait pour la charger de leurs magies respectives afin que, lorsqu’ils allaient la renvoyer dans le ciel, elle se disperse convenablement, détruisant toute la corruption qui s’y trouvait et mette fin à cette nuit infernale…
Aux Falaises, le combat faisait rage entre les deux magiciens, si bien qu’Eurydice ne savait pas comment aider Sirius car celui-ci commençait à être en difficulté. Elle les observait depuis un moment, réfléchissant à tout ce qui était à sa portée… mais elle ne trouvait rien et la fuite n’était pas une option envisageable à ses yeux car il était hors de question pour elle de l’abandonner à nouveau.
Puis ce qu’elle redoutait tant se produisit : le musicien reçu une attaque magique de plein fouet et fut projeté plusieurs mètres plus loin dans un son qui ne présageait rien de bon…
—SIRIUS !
Elle se précipita à ses côtés, constatant avec soulagement qu’il était vivant. Seulement, en s’approchant de lui, elle comprit vite qu’il n’allait pas pouvoir tenir plus longtemps : il avait le souffle court et ses jambes tremblaient. A tous les coups, il ne devait sa survie qu’au fait qu’il était une incarnation magique car s’il avait été un simple mortel…
—Oh la vache… fit son ami en grimaçant. Y a pas de doutes : c’est un descendant de Joshua. Il cogne aussi fort que lui… Ma magie ne lui fait quasi rien à part m’épuiser.
—Le feu est ta faiblesse et est aussi la force d’Ezekiel, leur déclara leur ennemi avec un sourire mauvais. Je ne peux peut-être pas user de sa magie contre toi sale petite vermine mais ça ne changera rien au résultat.
En entendant ces mots, Eurydice comme Sirius tiquèrent. Quelque chose ne collait pas du tout car Viktor n’avait pas rabaissé le musicien de cette façon lors de leur dernier affrontement. Qui plus est, l’autre point illogique était leurs tailles respectives à tous les trois : Eurydice faisait un mètre soixante-cinq et Ezekiel devait peiner à atteindre le mètre soixante-dix vu qu’avec des talons bas, elle était à la même hauteur que lui. Pour ce qui était de Sirius, il faisait facilement dix centimètres de plus qu’elle… et de ce qu’elle se souvenait d’Avalon, Viktor était quelqu’un de grand lui aussi vu qu’il dépassait le musicien mais jamais elle ne l’avait entendu faire allusion à la taille des personnes.
—C’est vraiment Viktor ça ? souffla Sirius qui avait dû suivre le même raisonnement qu’elle alors qu’elle l’aidait à se relever. J’ai un sérieux doute quand je l’entends parler ainsi…
—Moi aussi, admit la jeune femme avant de noter que leur ennemi semblait reprendre sa respiration, signe que le musicien lui avait tout de même donné du fil à retordre. Sauf que là, je crois que c’est trop tard pour tirer ça au clair…
—Effectivement, fit leur ennemi, visiblement satisfait. Quel dommage de mourir dans l’incertitude, n’est-il pas ?
—C’est un peu tôt pour dire ça…
Qui avait parlé ? La voix était grave, celle d’un homme très certainement… et soudain, Eurydice vit deux chauves-souris se placer entre eux et leur ennemi avant de prendre forme humaine… ou plutôt démoniaque.
—Qu’est-ce que… fit leur adversaire, ne s’étant clairement pas attendu à être interrompu par deux vampires. Comment êtes-vous arrivés ici ?! Vous n’êtes pas censés être là !
Ils se connaissaient ? Vu la réaction de celui qui n’était peut-être pas Viktor finalement, ils n’étaient pas ses amis et les attitudes des deux inconnus tendaient à confirmer cela.
—Est-ce Ezekiel ? demanda la femme avec une voix qui était très familière aux oreilles d’Eurydice. Je ne me souvenais pas qu’il était aussi… comment dire…
—Tête à claques ? compléta l’autre vampire, quelque peu agacé. Son parfum d’incube me déplaisait mais ça, je ne sais pas ce qu’est cette puanteur mais ce n’est pas l’odeur d’Ezekiel.
—Etrange car son parfum est assez agréable pour moi…
—J’en conclus que le fait que je n’ai aucun attrait pour les hommes fait que son parfum m’insupporte autant que les pitreries d’un Arlequin. Et je te recommanderai de ne pas succomber à ses tours d’incube.
—Dois-je en déduire que tu veux t’en occuper Dimitri ?
—J’ai une dette envers lui. Le ramener à la raison devrait nous permettre d’être quittes…
A l’instant où le dénommé Dimitri fit craquer ses doigts, leur ennemi tenta de les contourner avec sa magie, comme s’il voulait éviter les deux démons, mais le vampire réagit au quart de tour : au moment où Ezekiel préparait une attaque, Dimitri sauta par-dessus le muret pour se ruer sur lui, prêt à le frapper.
Pris par surprise, le magicien était visiblement mécontent de devoir lutter au corps à corps et en prime, son adversaire ne se laissait clairement pas faire, contrant ses coups avec aisance et n’hésitant pas à user de certains coups bas pour l’empêcher d’attaquer.
Sentant une présence près d’elle, Eurydice se tourna, faisant face à l’autre démon… qui, maintenant qu’elle voyait son visage, lui était terriblement familière, un sentiment qui était clairement réciproque.
—Alors ça ! fit celle dont les canines bien pointues ne laissaient guère de doute sur l’espèce à laquelle elle appartenait. Moi qui me disais qu’il fallait que je t’appelle, il semblerait que ce ne soit plus utile.
Cette voix… et puis ce sourire… Avec son mètre quatre-vingt et ses courbes qui lui feraient certainement remporter le concours de Miss Monde haut la main, Eurydice réalisa qu’elle faisait face à une vieille amie de lycée dont elle avait souvent regretté l’absence ces derniers jours.
—Lucy ! s’exclama avec joie la jeune femme en reconnaissant Lucinda Gregorio, son amie fan de surnaturel qui avait un an de plus qu’elle. T’as pas mal changé depuis la dernière fois ! Une nouvelle crème de jour peut-être ?
—C’est une assez longue histoire, lui dit la vampire dont le regard se tourna brièvement vers Dimitri qui était très occupé à se battre. Pour faire court, sans lui, nous ne nous serions jamais revues toi et moi.
Bien qu’elle avait pas mal de questions, Eurydice se doutait que ce n’était pas le moment pour ça, surtout que leur priorité était de sauver Ezekiel de ce qui le possédait et pour cela, il allait falloir le maitriser, ce que ce vampire semblait arriver à faire avec aisance.
—C’est un coup de cette sale sorcière d- commença leur ennemi avant de se prendre un coup en pleine mâchoire.
—Surveille ton langage, lui dit Dimitri en ricanant. Cela pourrait te jouer des tours…
Leur ennemi n’était visiblement pas enchanté de la tournure des évènements, surtout qu’il semblait avoir du mal à prendre le dessus, comme s’il n’était pas habitué au combat physique – en même temps, Ezekiel était un magicien donc son point fort devait plutôt être la magie alors il était logique que face à quelqu’un le contraignant au corps-à-corps, il se retrouve en difficulté.
Puis soudain, il y eu une sorte de bruit qui résonna au loin, faisant qu’Eurydice tourna la tête vers la côte, manquant de se faire aveugler par une énorme boule de lumière.
—La vache ! s’exclama Sirius en se couvrant les yeux. Je sais pas ce que c’est exactement mais c’est de la magie à l’état pur !
—Cette lumière est aussi aveuglante que le soleil, fit remarquer Lucinda qui plissait les yeux. Avec une telle puissance cela pourrait peut-être mettre fin à cette nuit bizarre.
Et elle avait raison : quelques secondes, la boule de lumière vola dans le ciel et éclata avec force, produisant un bruit semblable à un avion franchissant le mur du son, et s’éparpilla à toute vitesse au dessus d’eux.
Au bout d’une dizaine de secondes, Eurydice vit son ombre au sol, signe que cette nuit étrange prenait fin, puis l’instant d’après, elle fut tirée en arrière par Sirius, évitant de justesse Ezekiel qui, manifestement, venait de se faire projeter dans les airs par Dimitri et qui atterrit brutalement de l’autre côté du bassin. Le magicien essaya de se relever mais il avait le souffle court, signe qu’il était épuisé.
En revanche, pour ce qui était du vampire, celui-ci montra un instant de surprise en voyant où se trouvait à présent son adversaire. Il s’avança, semblant chercher à comprendre ce qu’il venait de faire.
—Je ne me souvenais pas que tu étais doté d’une telle force Dimitri ! s’étonna Lucinda en s’approchant du bassin.
—Parce que c’est tout récent… déclara le vampire en lâchant un soupir. J’imagine que c’était prévu que je développe ce genre de capacité….
—Et quelle était la cible originelle ? questionna Eurydice, un peu curieuse.
—Le bassin. Sauf que j’ai peut-être bien fait de le manquer vu qu’il semble avoir plus de mal à récupérer que je ne l’avais escompté.
Oui, Ezekiel était épuisé, ayant probablement été vidé de son énergie après ces deux combats. S’il avait atterri dans le bassin, il se serait probablement noyé et ce n’était pas ce qu’ils voulaient… D’ailleurs, que devaient-ils faire à présent ? La prophétie parlait du Jugement mais il leur manquait deux des personnes requises pour l’ouvrir et puis celui qui devait y aller, c’était Viktor… qui était peut-être dans le corps du magicien.
Comment faire pour les séparer ? Etait-ce seulement possible ?
—Le seul moyen de le sauver est le Jugement, fit la voix de Margaux, la faisant sursauter. Et il va falloir se hâter car je crains que nous n’ayons un plus gros problème qui nous attende ailleurs vu ce que nous avons trouvé…
La magicienne s’avança au bord du bassin et observa Ezekiel… avant de plisser les yeux, l’air suspicieuse. Quelque chose semblait ne pas lui plaire…
—Il était seul quand vous l’avez affronté ? demanda-t-elle à Dimitri.
—Si on ne tient pas compte des quelques démons mineurs que nous avons laissés à Belthelda en venant ici, oui, répondit le vampire, apportant un certain soulagement à Eurydice et à Sirius sur le sort de leur amie. Je ne cache pas que pour un semi-démon, je m’attendais à plus de résistance de sa part.
—A moins que vos capacités de Ténébreux ne l’ait surpassé monsieur Markoff mais…
—Y a peut-être autre chose, précisa Sirius en massant son bras. Mais je doute fort qu’il nous le dise donc…
… Elle avait bien dit que Dimitri était un « Ténébreux » ? Tout à coup, la jeune femme comprit pourquoi les deux vampires étaient ici : ils étaient là pour l’aider à invoquer le Jugement.
—Nous n’avons que quelques minutes avant qu’il ne réalise pourquoi je lui ai faussé compagnie et où nous sommes, leur dit la sorcière avant de lâcher un soupir. Je vais rapidement vous expliquer ce qu’il faut faire, cela en espérant que cela fonctionne.
Fallait-il vraiment envoyer Ezekiel dans le Jugement ? Certes, la prophétie disait que cela mettrait fin à la menace sur Avalon mais… en quoi au juste ? Le royaume n’existait plus et expédier le magicien dans ce piège alors qu’il était un descendant du Téméraire… Pour elle, cela n’avait pas vraiment de sens, un sentiment partagé par les vampires qui, vu les regards qu’ils échangeaient, avaient des doutes sur tout cela.
Seulement, ils n’avaient pas vraiment d’autres options, surtout après que Lucinda ait souligné que si Ezekiel était possédé, le tuer était plus risqué que de l’enfermer car personne ne savait où l’âme qui lui prenait son corps irait se cacher ensuite.
—Je ne suis pas persuadé que ce soit la meilleure option, déclara Dimitri après que le rituel leur fut expliqué.
—Je partage ton avis, ajouta Lucy qui masquait mieux son scepticisme. Mais avons-nous une meilleure solution ?
—Non, répondit Eurydice en serrant les poings. S’il reste libre, qui sait ce qu’il fera ? Je l’ai vu tuer des personnes de sang froid…
… Et elle était quasi certaine qu’elle était la suivante sur la liste.
—Toi qui est impartial, nous t’appelons, récitèrent-ils tous les trois. Ouvre tes portes pour cette âme que nous t’offrons. Nous t’invoquons Jugement !
Soudain, une sensation bizarre la saisie, comme la fois où elle avait abusé de ce truc de lunettes de réalité virtuelle et en avait eu la nausée. Elle ferma un instant les yeux… et quand elle les rouvrit, elle fut surprise de voir trois statues de l’autre côté du bassin, chacune tenait un récipient entre ses mains – à vue de nez, le contenu de chacun correspondait à leurs alignements respectifs, à savoir Ténébreux, Lumineux et Cœur Vaillant.
En baissant ses yeux vers Ezekiel, elle vit s’ouvrir une sorte de passage magique si l’on peut dire – difficile pour elle de trouver autre chose pour décrire ce truc excepté que ça reflétait bizarrement la réalité et qu’elle ne voyait pas ce qu’il y avait de l’autre côté de cette chose. Puis soudain, quelque chose en sortit… en se muant en des mains griffues qui se dirigeaient droit sur le magicien.
Ce dernier s’aperçut de leur présence une demi-seconde trop tard, l’une d’elles lui ayant attrapé la cheville. Il tenta de s’agripper à quelque chose tendit qu’il se faisait tirer dans le Jugement mais ses mains glissaient et ses ongles crissaient sur la pierre. Elle croisa une dernière fois son regard avant qu’il ne disparaisse brutalement, les statues faisant de même.
Tout était donc fini… donc elle devrait être contente, non ? Alors pourquoi avait-elle si mal au cœur en repensant à ces yeux brillant de haine qui l’avaient fixée avant de disparaître dans le néant ? Pourquoi avait-il dû être sacrifié pour cette fichue prophétie ?
Pourquoi était-elle certaine qu’elle n’arrivera jamais à se le pardonner de ne pas avoir pu le sauver ?
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Le conteur
On était environ au début de l'été quand le 1er corps fut découvert. Il faisait beau et chaud et les personnes qui n’allaient pas à la plage allaient à la piscine. Pourtant ce matin là, la piscine fut bloquée par les forces de police. On apprit ensuite qu’un cadavre avait été retrouvé au centre du bassin. Celui ci était spécial car la personne était vêtu d’une armure de samouraï en planche de mousse bleues et était placé sur une plateforme de la même matière. Sous celle ci, une feuille plastifié fut retrouvé avec un conte étrange écrit. “ Le samouraï bleu combattait le mal partout. Dans les campagnes ou dans les villages. Mais celui ci ne parvenait jamais à le vaincre. Un jour, le mal s'abattit une fois de plus sur le monde et le guerrier le combattit une fois de plus. Cependant, il était plus fort cette fois et il fondit sur le samouraï avec une tel violence que celui ci fut brisé et mourut dans la soirée. Beaucoup pleurèrent sa mort mais le personnage fut vite oublié. Ainsi s'achève cette histoire. Tout le monde était choqué par un meurtre dans cette commune tranquille. La personne qui avait découvert le corps fut interrogée en vain. Il ne fallait pas non plus espérer une quelconque image de vidéo surveillance car les caméras s’étaient envolées et les ordinateurs étaient en morceaux.
L’enquête n'avançait pas d’un pouce jusqu'à ce qu’une femme disparaisse pendant une nuit. Personne ne l'a revit avant trois jours où elle fut retrouvé par des promeneurs dans les bois. Elle avait été découpée en morceaux noircis par le feu et rassemblée avec du fil de fer. Mais aucune partie du corps n'était à la bonne place comme si un enfant avait voulu la remonter. Une feuille plastifiée fut encore retrouvée avec une nouvelle histoire : La folle du village se retrouva un jour seule. Son époux ne pouvant plus supporter son comportement fantasque s’en alla dans une ville voisine. Mais la folle, éparpillée, voulu recoller les morceaux coûte que coûte. Pour s’en débarrasser définitivement, le mari cria sur les places qu’elle était une sorcière. Celle ci fut donc brûlée le lendemain même. Son histoire fut vite perdue des mémoires. Ainsi s'achève cette histoire.
Malgré ce nouveau conte, l'enquête n'avançait toujours pas. Cette fois encore, plus rien ne se passa pendant des jours jusqu'à ce qu’une nuit, j’entende grincer le pas de ma porte. Mon cœur se mit à battre de plus en plus vite. Les minutes défilèrent sans qu’aucun bruit ne vienne rompre le silence de plomb. Quand soudain, la poignée de ma porte se mit à se baisser doucement. Sans bruit. J’entendis alors le clic signifiant que la porte était ouverte. D’un seul coup, elle s’ouvrit en grand, laissant apparaître une silhouette noire immobile. Je voulais crier mais aucun son ne pouvait sortir de ma bouche. Mon corps se relâcha et je perdis connaissance.
Je me réveillai dans une cage. J’étais dans un bâtiment que je ne sus reconnaître. Il y avait un bureau dans un coin. Il y écrivait certainement ses histoires car je n’avais aucun doute sur le fait que mon geôlier était le tueur que la presse avait nommé le conteur. Durant ma captivité, il aurait écrit un dernier conte appelé l'épouvantail. Toutefois, je n’ai pas la curiosité de le lire. Un jour, il est arrivé devant ma cage et m’a regardé pendant de très longues minutes. Son masque était solide et recouvert d’un tissu blanc. Malgré son expression neutre, il avait le don de me glacer le sang. Je pense qu’il se demandait ce qu’il allait faire de moi.
Les jours défilaient encore et encore. Je me demandais si j’allais sortir ou rester pour toujours dans cette horrible cage. Mais un soir, le conteur vint et déverrouilla ma cellule. Je fus si étonné que je l’ai regardé pendant au moins 30 secondes en l’interrogeant du regard, sans bruit. Il s’écarta de la porte et me fit signe de sortir. Je me suis prudemment approché de la sortie en ne le quittant jamais des yeux. La porte du bâtiment était aussi ouverte ce qui me permis de m’enfuir en courant. Nous étions perdus en plein milieu d’une forêt. Je zigzaguais entre les arbres en évitant branches et racines qui parsemaient mon chemin. Mais je trébuchais tout le temps car la faible luminosité du sépulcre obstruais ma vue. Toutefois, j’entendais le tueur courir discrètement derrière moi. Je ne savais pas comment il faisait pour être aussi à l’aise dans cette si faible lumière. Mais j’étais surtout concentré sur le fait de ne pas trébucher ou ralentir. J’entendais les branches craquer de plus en plus près de moi ce qui me faisait horriblement peur. Mais pourquoi diable m’avait il libéré si c’est c’était pour me pourchasser ensuite ? Je pense qu’il voulait jouer avec moi comme un chat avec une souris. Finalement, ma course a fini par me faire rejoindre un sentier. J’ai continué à courir jusqu’à que je me rendre compte qu’il ne me pourchassait plus. Peu m’importait, j’ai continué à courir pour finalement arriver dans la commune. J’ai tout de suite contacté la gendarmerie qui a rappliqué dans la minute. On m’a amenée à l'hôpital de garde pour me soigner, me laver et pour que je puisse me reposer en sécurité.
Quand je suis sortie, on m’a placée sous protection policière pendant quelques jours et on m’a demandé de retrouver le bâtiment où j’étais enfermée. Malheureusement, il faisait trop noir pour que je retrouve l’endroit où j’ai rejoint le sentier. Cependant, après plusieurs heures de recherche, nous avons enfin trouvé mes empreintes de pas. En les remontant, on est aussi tombé sur celles du tueur que nous avons préféré suivre car après tout les miennes n’allaient pas disparaître. Elles nous ont menés jusque sur un autre sentier qui menait à une autre entrée de la commune. Les empreintes pleines de terre s'effaçaient de plus en plus. Tant et si bien que nous avons vite perdu sa trace. J’ai cru que les flics qui étaient avec moi allaient taper du pied.
Plus tard, nous sommes retournés sur mes empreintes et les avons suivies jusqu’au bâtiment. Ça a été beaucoup plus simple que dans les films. Le bâtiment était vieux mais fait de béton armé c’est pourquoi il était tout de même en bon état. Les policiers étaient honteux de ne pas avoir pensé à cet endroit. On est entrés sans faire de bruits avec pistolets aux poings. La salle n’avait pas bougée, tout était là à sa place. Bien sur, le conteur était trop intelligent pour retourner dans son repaire. La police scientifique est arrivé ensuite mais ils n’ont sans grande surprise pas trouvé grand chose. Malheureusement, je me suis fait virer du lieu car je n’était pas de la police. Je ne pouvais pas leur en vouloir car il est normal qu’une civile ne peut travailler avec la police. Ce serait vraiment stupide qu’on laisse par exemple un écrivain enquêter avec les forces de l’ordre. Heureusement que ça n'existe pas. Toujours est-il que je suis retournée chez moi pour commencer des recherches. Peut être qu’en cherchant un peu, je pourrais trouver des renseignements. Mais je n’ai pas de moyens de trouver des pistes concrètes sans les logiciels de la police. J’ai donc demandé au poste et ils m’ont autorisé à les utiliser. Je dois admettre que je ne m’y attendais pas. J’ai donc commencé à chercher des disparitions avant le début du carnage mais sans grand succès. Par curiosité j’ai regardé les différents tueurs en série qui ont été en activité ces dix dernières années et ai vu qu’il y en avait eu un à quelque kilomètres d‘ici. Je me suis rendu là bas pour interroger des habitants. Mais celui la n'a fait que trois victimes ce qui ne correspond pas au profil psychologique du nôtre. J’avais lu dans la presse que les psychiatres que la police a interrogée avait déterminés que d’après ses agissements, le conteur avait la folie des grandeurs ce qui n’est pas le cas du tueur de cette ville ci.
En allant plus loin dans mes recherches j’ai remarqué qu’il y a deux ans pile, une série de meurtre ayant commencé le même jour que la notre a été perpétrée dans l’Est de la France. La coïncidence était trop étrange pour que je ne m’y rende pas. Le tueur n’a pas été interpelé ni retrouvé. Il a laissé derrière lui une survivante traumatisée aujourd’hui internée en hôpital psychiatrique. J’ai eu l’autorisation de la rencontrer. Elle avait peut être un an de plus que moi. Elle ne m’a rien révélé sur son histoire mais j’ai vu des dessins qu’elle avait faits représentant exactement le masque du conteur. J’ai alors immédiatement contacté la police et leur ai donné cette piste. Cependant, le mode opératoire était différent de celui du conteur. Celui-ci consistait à bruler vivantes les victimes sur des buchers.
Après cela, j’ai continuée à mener mes recherches qui m’ont à nouveau montrée une série de meurtre dans les mêmes dates il y a quatre ans. Le tueur avait été surnommé le marionnettiste en raison des jeux de piste sadiques qu’il avait fait subir à ses victimes. Il avait également laissée une survivante comme moi et celle du bruleur de sorcière. (C’était en effet comme cela qu’il avait été nommé) Il n’avait pas non plus été attrapé. J’allais donc interroger cette femme quand j’ai appris qu’elle s’était suicidée quelques mois après les meurtres. On aurait retrouvé dans son journal intime un dessin semblable également à celui du tueur que l’on connait. Je suis donc repartie certes avec une nouvelle piste, mais sans informations particulière supplémentaire. Je n’ai ensuite pas trouvée d’autres affaires il y a six ans ce qui nous à fait arriver à la conclusion qu’il était rentré en activité il y a quatre ans. Au final, sans compter le suicide de la première survivante qui est une victime collatérale, le bilan humain est de trois victimes par ville ce qui nous fait un total de 9 victimes jusqu’ici. L’enquête, malgré nos indices fors utiles ne donna au final rien et la période durant laquelle le tueur opérait pris fin.
C’est donc deux ans plus tard, alors que nous croyions à son retour, qu’il à détruit notre dernier espoir de le démasquer en ne réapparaissant pas pour un quatrième cycle. J’écris donc ces lignes pour remplir le trou qu’a laissé cette déception. Après tout, Qui sait ? Peut être reviendra t il un jour ?
Fin
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Sadoshima.
y a pas si longtemps que ça, à peine un battement de paupière en réalité, je me trouvais sur l’île de Sado (sans rire, c’est le vrai nom); un bout de terre au large de Niigata en volant vers la Corée; et je nageais littéralement à travers l’air moite et les moustiques. Les grillons nippons, higurashi, me cassaient les oreilles, m’évoquant de sinistres histoires de meurtres.
Un endroit magnifique, une réserve privilégiée où les gens sont manifestement un peu différents, où la finesse des yeux trahit les noblesses oubliées. L’endroit, intime comme le creux d’une main repliée, offre la vision de forêts intenses, idéales pour des princesses Monoke et des combats épiques, des plages claires sous des falaises noires idéales pour se lancer, à pic; avec leurs parois raides et sombres sous lesquels on nage tendrement avec les bébés poissons fugu, si mignons mais si cruels. Souvenirs mortels.
Une terre exilée d’exilés. Un bout du monde japonais. En faisant la route d’un endroit à l’autre, la tête reposée contre la vitre du véhicule familial “lapin”, le regard levé vers les sommet des montagnes où les clochettes tintent, je me suis demandée combien de samouraïs déchus, rejetés ou enfuis d’Edo la capitale, s’étaient perdus dans ces bois autrefois. Mes pensées laissées à l’abandon m’ont même conduite à me demander si je ne risquais pas de rencontrer enfin de véritables monstres légendaires si je venais moi aussi à m’y égarer sans mes talismans, et sans mes guides.
Dans cette même journée j’ai quitté le four du grand jour pour aller explorer la fraicheur des mines où des gens étaient descendus sans retour, de force ou de gré, pour la gloire et le profit d’autres, du pays, et de l’île aussi. Les descendants des descendus, qui eux, nous permettaient ensuite de remonter, avaient jugés bon d’honorer leur mémoire en installant de sinistres automates souriants reproduisant à l’infini leur gestes dans des mises en scènes documentées. Des poupées mécaniques sur lesquels on tombe non sans effroi au détour d’un couloir et dont on s’éloigne dans les perdre de vue du coin de l’œil. Petite attraction de fin de la visite, j’ai même essayé de porter un lingot d’or avec une seule main pour réussir à peser le prix de leur vie, mais sans succès. Comme partout, le métal tombe sur le sol avec plus de fracas que les corps.
Nous avons nécessairement fini par aller respirer dans un temple bouddhiste ancien, parce qu’il n’y a pas meilleur façon d’alléger son âme dans ce pays, surtout après ce genre de visions, que de se promener entre les statuettes enfantines au bavoir écarlate qui veillent, et les cages à lapins, l’animal gardien du lieu. J’ai regardé quelques temps les écoliers nourrir les animaux avec des fleurs arrachées et puis discrètement, je me suis écartée. J’avais besoin d’un peu de solitude, j’ai gravi le flanc de montagne presque en courant, manquant de déraper sur l’escalier en pierre envahi et défait par les herbes sauvages. Je fais souvent ça: ça me donne l’impression que je vais finir par passer un portail invisible et atterrir dans un niveau caché.
Sur le petit plateau où je suis arrivée, une étrange ambiance, profonde et solennelle. J’ai d’abord cru que c’était juste la chaleur et la course qui me tapaient sur la tête, mais non, il s’agissait d’autre chose. Bien qu’il n’y ai eu pas d’autre âme qui vivent que moi même, une sensation de présence que j’ai pu sentir à même la fleur de ma peau, une vibration. De grosses libellules bleus, des hélicoptères, planent à hauteur de genoux. Sous les arbres penchés, un petit temple à l’intérieur duquel se repose une divinité secrète; et dans l’ombre de ce temple, quelques tombes, à peine. Bien sur il y a toujours des cimetières accolés ou intégrés à ce genre de lieu, parfois de façon très chaotique, les morts ne sont pas consignés à un emplacement, ils se promènent un peu partout. Mais là j’ai senti nettement que c’était différent. Comme si une pression invisible appuyait sur mes épaules à l’approche de ces pierres funéraires.
ça m’a fait tomber à genoux dans la mousse. De longues inscriptions dont je n’étais pas capables de déchiffrer le moindre kanji, même en en suivant le tracé du bout de l’index, trop compliqués, trop anciens aussi peut-être. Je suis restée un moment à m’imprégner de l’endroit, encore aujourd’hui j’en sens encore l’empreinte dans mon cœur et certains détails étincellent dans ma mémoire. Et d’un coup, des pas légers dans les escaliers derrière moi, et voilà que je n’étais plus seule. “Ce sont des tombes de moines bouddhistes. Mais ceux là sont vraiment allés très loin dans la pratique. Ils ont tant et tant médité, se sont si bien détachés du monde physique pour le monde spirituel qu’ils ont fini par demander à être enterrés vivants pour achever leur abandon d’eux même.”
J’ai frissonné, envahie et impressionnée par de terribles visions claustrophobes. J’ai regardé encore, incrédule, les pierres indéchiffrables, je les ai même effleurés du bout des doigts comme on caresse inconsciemment un enfant malade ou un animal blessé. “Pauvre toi, pauvre chose”. J’ai imaginé ces hommes sur lesquels des planches et de la terre se sont refermés, et puis le noir et le silence absolu, jusqu’à que la lumière de leur propre vie finisse par s’éteindre. J’ai eu mal au ventre. Pourquoi?
La nuit est tombée sur les vivants aussi, et dans l’obscurité, des milliers de gens se sont agités pour allumer des lanternes. Des constructions géantes en papiers mâchés illuminés ont traversés les plaines, des samouraïs furieux, des figures naïves de personnages de mangas. Le son des taikos a fait vibrer le sol et les cages thoraciques. J’ai vu quelques démons, des onis, se faufiler parmi les humains. Et tout d’un coup les étoiles se sont éclipsées quand de grand feux d’artifices se sont étalés sur la voutes, retombant sur les visages ravis des japonais réunis près des stands ou assis dans l’herbe.
J’avais un drôle de sentiment, de joie et de peine mêlées, j’étais un peu perdue: Devant moi dansait la vie, la culture japonaise encore agitée d’énergies et de fulgurances, des jeunes garçons agiles comme des renards, mais dans mon dos s’étaient assis des morts, apaisés dans la violence.
J’ai fini de manger ma glace et je me suis levée, dérangée, j’ai déambulé au hasard entre les chars lumineux délaissés, les jeunes filles en kimonos fleuris et les créatures de la nuit qui se repaissent des odeurs de fritures. J’étais reconnaissante que dans la confusion et les flashs de lumière, on ne me voit pas bien, je retrouvais un peu d’anonymat: les nippons, concentrés sur les festivités, ne prêtaient aucune attention à la “gaijin”. Du coup c’était moi qui pouvaient les regarder un peu. Ces grands-mère actives réunis en club, ces étudiants sages et blasés, ces fiers mâles quarantenaires heureux de l’occasion pour s’exhiber, le bandeau collant de sueur au front et les fesses à l’air, le regard fier qui résiste à tout, tandis qu’ils sirotent leur bière.
Dix heures du soir, l’heure où tout s’éteint au pays du soleil levant. Voilà qu’un vent de panique bien organisé pousse la foule. Les tables sont repliées, les lumières s’éteignent une à une, les rires meurent dans les gorges et le silence se fait petit à petit. Les gens se lèvent et s’en vont, sans chercher d’avantage à profiter du début de la nuit. Très frustrant pour une française, il me semble que ça commençait à peine. Je suis à contre courant, tout le monde pars en sens inverse, mais je continue à marcher de façon aléatoire.
C’est surement un peu l’alcool que j’ai bu tout à l’heure, et puis la fatigue, et puis la chaleur, et la beauté du lieu et de l’occasion, mais les larmes me montent aux yeux, et un sourire fend mon visage. Je ne sais pas pourquoi mais il faut croire que je m’accoutume. Il arrive souvent aux nippons de sourire sans raison et de ne pas sourire quand ils auraient raison de le faire. Les japonais qui m’aperçoivent détournent stratégiquement les yeux, angoissés qu’un contact visuel les force à communiquer avec cet être dont il ne peuvent deviner ni l’origine ni la langue, mais ils le font avec une certaine délicatesse. Une marée humaine de regards fuyants qui s’écoulent autour de moi. Et puis un court instant, un visage ne me fuit pas, un sourire attrape mon sourire.
C’est un moine dont je reconnais la tonsure et le kimono. Son expression est douce et franche. Il disparait immédiatement dans la foule et l’obscurité. Je suis reste pantois, immobilisée pour quelques instants.
Le retour à la maison se fait dans une sorte de demi-rêve, mon esprit commence à avoir un peu de mal à intégrer que tout ce qui se passe est réel. Ce n’est pas très crédible, il préfère penser que j’hallucine. Je flotte dans l’espace entre le ciel et la route à quatre-vint kilomètres heures tandis que les montagnes s’écartent gentiment pour me laisser passer. J’ai l’impression que le phénomène va s’arrêter et que je vais aller me fracasser contre leur flanc, comme ces mannequins de crash-test que j’ai vu en vidéos. Je visualise très bien au ralenti la dislocation dans le vide de mes membres. Mes yeux clignent à peine et ne quittent pas de vue les étoiles.
Plus tard, quand je les ferme enfin, sur mon futon trop dur qui me donne un peu l’impression d’avoir été punie, apaisée avec l’odeur des tatamis qui m’emplis les narines et le saké qui me tourne la tête; après l’obscurité de la maison assoupie vient la lumière résiduelle derrière mes paupières. Des formes se distinguent lentement. Il me faut du temps pour comprendre que ce sont les moines enterrés qui me regardent.
Ils me sourient.
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