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#Les Observateurs
exhaled-spirals · 11 months
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« Imaginez les remarques que pourrait faire un observateur. . . de notre espèce, . . . comment elle se transforme, comment elle se consume depuis un siècle environ. Il aurait grand sujet de se divertir à nos dépens en constatant le curieux retournement de nos efforts inventifs contre nous-mêmes. Tandis que nous croyons nous soumettre les forces et les choses, il n'est pas un seul de ces attentats savants contre la nature qui, par voie directe ou indirecte, ne nous soumette, au contraire, un peu plus à elle et ne fasse de nous des esclaves de notre puissance, des êtres d'autant plus incomplets qu'ils sont mieux équipés.
. . . Et ne parlons pas des odeurs, des bruits que vous endurez, des trépidations, des courants de toute fréquence, des nourritures synthétiques, que sais-je ! Et quant à l'intellect, mes amis, quant à la sensibilité. . . on vous soumet l'esprit à une merveilleuse quantité de nouvelles incohérentes par vingt-quatre heures ; vos sens doivent absorber, sans un jour de repos, autant de musique, de peinture, de drogues, de boissons bizarres, de spectacles, de déplacements, de brusques changements d'altitude, de température, d'anxiété politique et économique. . . que toute l'humanité ensemble, au cours de trois siècles, en pouvait absorber jadis !. . . Cependant que la politique aligne nos multitudes, leur fait donner la main ou dresser le poing, les fait marcher au pas, voter, haïr ou aimer ou mourir en cadence, indistinctement, statistiquement.
La machine économique est, au fond, une exagération, une amplification colossale de l'organisme. . . et nous pouvons suspecter. . . qu'il se produira, dans l'âge qui vient, une dépression des valeurs intellectuelles, un abaissement, une décadence comparables à ceux qui se sont produits à la fin de l'antiquité ; la culture à peu près abandonnée, les œuvres devenues incompréhensibles ou détruites. . . toutes choses malheureusement très possibles [si] les moyens de possession et de jouissance, l'incohérence imposée par la fréquence et la facilité des impressions, la vulgarisation immédiate et l'application aux productions, aux évaluations et à la consommation, des fruits de l'esprit, de méthodes industrielles, finissent par altérer les vertus intellectuelles les plus élevées et les plus importantes : l'attention, la puissance méditative et critique, et ce qu'on peut nommer la pensée de grand style. . .
Nous vivons sous le régime perpétuel de la perturbation de nos intelligences. L'intensité, la nouveauté, dans notre époque, sont devenues des qualités, ce qui est un symptôme assez remarquable. Je ne puis croire que ce système soit excellent pour la culture. Sa première conséquence sera de rendre ou inintelligibles ou insupportables toutes les oeuvres du passé qui ont été composées dans les conditions toutes contraires et qui exigent des esprits tout différemment formés. »
— Paul Valéry, "Notre destin et les lettres", conférence donnée le 17 février 1937
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ekman · 10 months
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La naïveté des gardiens des institutions, autrement dit les médias mainstream de la bienpensance assumée, fait peine à voir. Alors que les assassinats de Français se multiplient et s’accélèrent, alors que les barbares affichent impunément leur haine raciale et revendiquent leur violence sur fond d’islam et d’ethnicité, les proprets sur plateaux nous parlent “de faire société”, “de promouvoir la laïcité”, “de comprendre la nécessaire mutation”. Tout cela les pieds dans le sang d’un gamin de 16 ans, Français, blanc, de souche.
On dira bien ce que l’on voudra. On fera les discours que l’on pourra. Ça ne change rien aux détails du cliché pris à l’instant de la chute de Thomas, le torse percé par une lame. Cette photo nous montre une France qui commence à se chier dessus, mais qui refuse encore le constat et combat toujours la réaction, conspuant les courageux, engeôlant les volontaires. Une France qui continuerait d’aller acheter son rôti du dimanche chez son petit boucher, de manger ses fromages qui puent en se moquant du cousin du Loiret, de railler le voisin qui s’est acheté une voiture pour la frime. Une France qui penserait que le travail est un moyen de se hisser, que l’honnêteté paie toujours, que l’on doit respecter Monsieur le maire et obéir à la police. Une France d’Épinal qui est morte depuis longtemps déjà, entamée par Mac Donald et Drucker, remplacée par KFC et Hanounah, effacée par Doner Kebab et Yassine Belattar.
Pauvres Français ! Que je vous plains d’être devenus ces poireaux mous qui rasez les murs taggés des cités arabophones. Pendant toutes ces décennies de bruit et d’odeurs, on vous a répété que votre colère s’appelait du racisme. Ceux-là même qui avaient acté cette catastrophe grandissante vous ont fracassé, accablé, conspué. Seuls quelques rares résistants ont gardé le doigt collé sur la sonnette, mais la plupart de ceux-là, aussi, ont fini par apprendre par cœur les mots du frontispice de la démocratie : “Übereinstimmung macht Wählbarkeit”... la conformité rend éligible.
S’avance l’ombre du conflit que tout le monde subodorre, mais que personne ne veut voir. “Avant que” et “pourvu que” ouvrent maintenant toutes les phrases des politiqueux cravatés et des observateurs autorisés. Ils avancent à reculons vers l’échafaud de l’Histoire qui a déjà aiguisé sa plume et ouvert son grand cahier couvert de sang.
Thomas se meurt, Thomas est mort. la France non plus.
J.-M. M.
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Il s’agit avant tout d’arrêter de répéter la langue de l’adversaire, cesser de reprendre les termes, les expressions, les mots du persécuteur…
L’analyse appliquée à la politique, comme celle du philologue, ne peut que rejoindre l'observation de l’évolution de la langue par Victor Klemperer (LTI, La langue du IIIe Reich) qui lui permet de détecter avec une acuité particulière ce qui distingue par exemple le Nazisme d'une tyrannie ordinaire ou d'une dicta­ture brutale. Il perçoit dans le détail la «différence totali­taire» du régime nazi lorsqu'il s'avère que celui-ci dispose de la faculté non seulement de maltraiter et d'abattre ses ennemis (réels ou imaginaires), mais aussi d'embourber la parole et la pensée de ses victimes dans la fange de son jargon et de sa propagande. Observateur tout à la fois horrifié et impitoyable, Klemperer évoque fréquemment ces Juifs traqués qui ne cessent de se cou­ler dans la langue du persécuteur, ces braves gens dont les manifestations de compassion véhiculent le venin de l'idéologie et font saigner le cœur de ceux auxquels elles s'adressent non moins que les violences et les insultes des bourreaux.
Reprendre la langue de l’adversaire, ne serait-ce que partiellement, c’est nourrir son discours de sens et lui donner continuité de subsIstance…
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rpirquet · 2 months
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Le "Museum watching" vu par Elliott Erwitt
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Elliott Erwitt a consacré tout un livre à cette activité ("Musées observés" dans son titre français). En effet, il est fasciné par les musées, et davantage encore par les visiteurs que par les objets exposés. Il est, dit-il, « un observateur dévoué de gens, qui aime observer l'art et les observateurs d'art qui observent l'art. » Tout visiteur de musées peut en témoigner : un jeu complexe d'interactions s'y déroule, avec les œuvres exposées, certes, mais aussi avec les autres visiteurs et avec l'espace où il se meut.
Erwitt décortique tout ce qui fait la spécificité des musées — matérielle (le cartel, le cadre) — et, surtout, humaine: les visiteurs, « gibier de choix » dont on verra ici un échantillon représentatif; et les gardiens qui font, dit-il, compatissant, « le métier le plus ennuyeux du monde ». Et pour saisir tout ce monde dans des lieux où la photographie est le plus souvent interdite, il met au point des techniques passablement facétieuses mais efficaces pour déjouer l'attention des gardiens.
Sans s'embarrasser de théories, il comprend que, dans ce temple contemporain qu'est le musée, la visite s'apparente à un « rituel » (Carol Duncan, The Art Museum as Ritual, 1995), un rituel qu'Erwitt explore avec gourmandise. Par le simple fait de l'exposition dans un lieu quasi-sacré, l'œuvre d'art est élevée au rang d'objet de culte (songeons à l'urinoir de Marcel Duchamp) et les visiteurs retrouvent l'allure compassée et respectueuse d'une procession religieuse dont les stations sont préétablies et les comportements prescrits.
Erwitt documente ces comportements avec un respect mêlé d'étonnement et tempéré d'une bonne dose d'humour.
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kamas-corner · 3 months
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"No es tener sexo lo que cuenta, sino tener deseo. Hay demasiada gente que tiene sexo sin deseo. Todas esas mujeres escritoras hablan tan mal del tema, cuando es un mundo que a una le cae encima. Yo he sabido desde niña que el universo de la sexualidad era fabuloso, enorme. Y mi vida no ha hecho sino confirmarlo. Me interesa lo que se encuentra en el origen del erotismo, el deseo. Lo que no se puede, y quizás no se debe, apaciguar con el sexo. El deseo es una actividad latente y en eso se parece a la escritura: se desea como se escribe, siempre".
—Marguerite Duras | Entrevista en Le Nouvel Observateur, 14 de noviembre de 1986.
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J'aime l'automne parce que tout devient bonus. Les jours raccourcissent, mais il y a une urgence à profiter du moindre rayon, de la première éclaircie. et puis, j'adore les couleurs, le feuillage arc-en-ciel des arbres. On dirait un tableau de maître. L'été, ils sont tous verts, c'est sans surprise, mais, dès septembre, c'est une explosion de couleurs, des nuances plus merveilleuses les unes que les autres: entre deux feuillages verts, un jaune; un arbre rouge qui irradie, incendie, embrase à lui seul une forêt entière, les milles teintes d'orange qui redonnent à chaque regard un nouvel intérêt. En automne, la nature récompense les patients, les observateurs, les optimistes, ceux qui décèlent le beau là où d'autres ne prennent pas le temps de le voir. Aurélie Valognes- (Le tourbillon de la vie)
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JOE BIDEN ANNONCE SON RETRAIT DE LA COURSE À LA PRÉSIDENCE DES ÉTATS-UNIS 21 juillet 2024
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La lettre
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Je crois qu'il est dans l'intérêt de mon parti politique et du pays que je me retire et que je me concentre uniquement sur l'exercice de mes fonctions de président jusqu'à la fin de mon mandat
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Joe Biden pourrait annoncer son retrait de la campagne présidentielle ce week-end. 18 juillet 2024. Son prétendu coronavirus serait la raison officielle. Selon les observateurs, l'état de Biden s'aggrave chaque jour et cela n'est pas lié au coronavirus.
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Kamala Harris où Michelle Obama pourraient être les candidates du parti démocrate.
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Après son retrait, Joe Biden n'a pas indiqué qui lui succéderait pour la présidentielle américaine. Il a affirmé qu'il s'adresserait aux Américains dans la semaine.
4 mois avant l'élection présidentielle viré
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Nouveaux épisodes de la grande mesquinerie
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francepittoresque · 6 months
Photo
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23 mars 1842 : mort de l’écrivain Henri Beyle dit "Stendhal" ➽ http://bit.ly/Henri-Beyle-Stendhal Observateur expérimentant et raisonnant, Stendhal écrivait tous les jours quelques lignes sur ce qu’il avait vu ou senti ; mais il était trop enclin à la réflexion et à l’analyse pour se contenter de noter exactement et sans commentaires les sensations de sa vie. Il y revient, et c’est là son art
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yespat49 · 6 months
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Pourquoi l’immigration est-elle encouragée par nos gouvernements ?
Il est une question lancinante qui rend perplexe plus d’un observateur avisé du chaos généralisé dans lequel la France et le monde occidental sont plongés : pourquoi ? Pourquoi ceux qui nous gouvernent ont-ils à ce point promu et facilité l’immigration extra-européenne de masse ? Pourquoi cette politique folle, alors même que les effets néfastes de cette décision étaient prévisibles ? Dans le…
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carbone14 · 7 months
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Des observateurs scrutent le ciel depuis un fort maritime Maunsell dans l'estuaire de la Tamise - 19 novembre 1943
Photographe : Lieutenant Tanner
©Imperial War Museums – H 34542
La photo est prise depuis la tour d'éclairage pour le tir antiaérien. A l'arrière-plan on remarque les tours équipées de batteries antiaériennes.
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Le fort Maunsell de Red Sands dans l'estuaire de la Tamise au nord des côtes du Kent - 20 août 2011
©Russss
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selidren · 8 months
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Eté 1916 - Champs-les-Sims
11/15
A cet égard, l'hôpital de Compiègne ne semble pas si mal. Au milieu de l'horreur, des gardes épuisantes et de la misère des patients qui ne se remettent pas de leurs blessures, Rose en parle comme d'une sorte de havre en dehors du monde, où soignants et patients forment leurs petites sociétés. Des camaraderies naissent de ces endroits, des amitiés (même entre hommes et femmes), et je ne serai pas surprise que des idylles y prennent place. Cotoyer à ce point la laideur doit immuniser aux préjugés sur l'apparence et amener chacun à ne pas juger en s'arrêtant au visage ou au corps.
Transcription :
John « J’avoue que je ne suis pas devenu soldat par choix, c’est peut-être même pour cela que j’ai aussi écopé d’un bras en moins. Au moins, je ne ferai plus jamais rien tomber avec. »
Juliette « Donc vous êtes aussi maladroit avec vos mains qu’avec vos mots. »
John « Vous n’avez pas vu l’immense flaque d’eau dans la chambre ? J’ai renversé le broc sur la table de nuit de Gilles Dumont. J’ai non seulement inondé et fait gondoler le plancher, mais j’ai aussi trempé ses draps et même son matelas. Mademoiselle Lambert a du tout changer il y a à peine une heure. »
Juliette « J’étais dans la chambre 18 ce matin. Ce n’était pas de l’eau qui était répandue sur le sol… J’étais bien trop occupée à oublier l’odeur atroce pour penser à vous. »
John « J’ose penser qu’aucune souillure ne pourrai éroder votre… »
Juliette « Par pitié, si vous comptez parler de mon odeur corporelle, je demande à ma sœur de vous assommer avec de l’éther! »
John « Le Docteur de Chastel est votre sœur ? »
Juliette « Et en plus du reste, vous n’êtes pas observateur pour un sou ? Vous ne trouvez pas que nous nous ressemblons ? »
John « Si, maintenant que vous le dites. »
Juliette « Seigneur... »
John « Gilles va encore se moquer de moi... »
Juliette « Vous êtes vraiment maladroit, c’est bien vrai ! »
John « Il n’arrête pas de rire à la moindre de mes remarques, comme si j’étais involontairement drôle ! C’est à croire que… oh... »
Juliette « Oh… quoi donc ? »
John « Non, je… vous pensez vraiment que je suis mauvais poète ? »
Juliette « C’est la pire déclaration d’amour qu’on m’ait jamais faite, je dois être franche. »
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edlim-sims · 4 days
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Flavie: Je viens juste de choisir ma carrière. J'ai hâte de gagner mes premiers simflouz!
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Élodie: Oh, c'est génial! Pour ma part, je n'ai toujours pas d'emploi.
Flavie: Ça va, ça fait seulement quelques jours qu'on est adulte. Je t'invite à faire le métier de tes rêves mon amie!
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Élodie: Parlant de rêves… j'ai un plan fou à te proposer. Que dirais-tu que l'on emménage ensemble, toi et moi? Et on pourrait aussi demander à Axelle!
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Flavie: Nom d'un Observateur! C'est tellement une bonne idée! Je pourrais enfin quitter cet endroit!
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«Je ne rendrai pas le vaccin obligatoire.»
(Emmanuel Macron, 24/11/2020)
La Verneinung se traduit le plus souvent en français par dénégation... L’exemple vient de Freud: lorsqu’un de ses analysants lui raconte un rêve et dit: "qui que soit cette femme dans mon rêve, ce n’est pas ma mère..." Freud en conclut que bien entendu il parle de sa mère. Dire en niant ne dit pas moins que dire en affirmant...
Comme remarque Lacan: «La Verneinung n’est que la pointe la plus affirmée de ce que je pourrais appeler "l’entre-dit", comme on dit l’entrevue.»
Notons également que le président parle au "je" : «Je ne rendrai pas le vaccin obligatoire.»
Le roi qui se prend pour le roi n’est il pas plus fou que le fou qui se prend pour le roi? Pour le psychanalyste, la normalité, c'est la psychose. Mais psychose et folie ne se recouvrent pas. Normal ça veut dire qu'il y a une norme, or il n'y a pas de norme sexuelle, et c'est bien pour ça qu'on passe son temps à inventer des normes sociales. La norme mâle... Névrose («je ne veux pas savoir»), psychose («je ne peux pas savoir») et perversion («je sais bien mais quand même») sont les trois structures de langage incorporé, nul sujet n’échappe à la structure.
NB: Le noyau psychotique est la norme, car c'est l’universel pour chaque sujet de ne pas pouvoir savoir...
Toujours dans la même allocution, Emmanuel Macron dit aussi: «Nos concitoyens ont besoin en effet d'avoir une vie, si je puis dire(...)»
Monseigneur est trop bon. Vraiment….
Tomber malade ou amoureux…
Toutes les gesticulations gouvernementales vides autour du covid (confinements, masques, couvre-feu, etc.) ont autant d’impact sur la propagation du virus que les danses tribales pour faire tomber la pluie... (En fin de compte, ce qui se sera passé en Suède en donnera la confirmation...)
Le véritable point saillant est toujours le rapport du sujet à la peur, la jouissance de la peur, l’instrumentalisation de la peur et son corrélât fantasmatique: l’illusion de la maîtrise.
Tomber malade n’est pas sans rapport avec tomber amoureux, cela n'arrive jamais pour des raisons "objectives", dans un premier temps, le sujet sent la maîtrise lui échapper, d’où l’impression de "tomber", et ensuite il (se) raconte une histoire pour tenter de "rationnaliser" ce qui aura échappé à la chaîne des causes et des effets...
Si je me questionne sur les "raisons" qui me font tomber amuoureux, j'ai beau énumérer ses qualités, je sais que ce n'est jamais "ça"... Ce qui m’aura attiré en l'autre, c'est un "je ne sais quoi" qui n'appartient pas à la série des raisons objectives, c'est peut être même l'index d'un défaut... Formellement, tomber amoureux a la structure d'une décision. Contrairement aux idées reçues, ce qui s'appelle à proprement parler "décision" est un acte qui pose rétroactivement ses raisons, le fameux "nachtrag" freudien que l’on retrouve dans la "performativité rétroactive du signifiant" chez Lacan...
C'est parce que suis déjà tombé amoureux (ou que j'ai toujours déjà décidé) qu'ensuite je me raconte des histoires pour essayer de rationnaliser (rendre "raisonnable") ce qui a effectivement échappé à la chaîne des causes et des effets, et qui se trouve dès lors marqué du sceau du Réel...
Dans "ce qui se passe", cela se passe sans que nous ayons l’impression d’y avoir été pour grand chose, ce n’est qu’après-coup que nous "reconstruisons l’histoire" pour essayer de donner du sens, un semblant de cohérence à notre existence, en produisant un récit plus ou moins convaincant qui nous donne l’illusion de maîtriser le cours de notre vie, alors que nous ne sommes le plus souvent que les observateurs passifs de ce qu’on appelle "le cours des choses" (ou "le destin"), raison pour laquelle nous passons notre temps à refouler l’inquiétude que notre radicale passivité génère en nous engageant dans toutes sortes de distractions, d’actions, de divertissements...
L’absence de maîtrise (et même de la moindre prise) dans ce qui se sera présenté à nous comme les événements les plus déterminants de notre vie nous apparaît si difficile à admettre qu’elle explique le succès de la posture de "victime" car elle offre une échappatoire au sentiment de culpabilité (si nous sommes coupables, cela veut dire que ce qui nous arrive aura dépendu de nous, donc nous aurions pu faire autrement et entreprendre de nous sauver nous-mêmes...)
L’impasse "culpabilité/victimisation" a été explorée par Kafka: d’un côté, dans la logique du Château, il n’existe aucun pardon pour les innocents (raison pour laquelle pour être entendu, tu dois d'abord trouver de quoi tu es coupable...), de l’autre: «...je ne prétends pas être un martyr. Ni même une victime de la société. Non, je ne suis pas une victime, je suis un membre de la société...» K. rejette le rôle de victime, il finit par déclarer que si l'on peut parler de conspiration (le "complotisme" d’aujourd’hui), c'est seulement dans la mesure où la fonction essentielle des gens du "pouvoir" est de persuader les sujets qu'ils sont les victimes de forces irrationnelles absurdes, que le monde est fou, dépourvu de sens et dangereux... Comment dès lors ne pas piger l’importance dans l’idéologie de la profusion et l’entretien des "informations" destinées à inquiéter les populations, en distillant la peur, en soufflant l’effroi, afin que le plus grand nombre possible de nos concitoyens soit maintenu en suggestion de victimisation (qui à tout prendre, puisqu’elle est "socialement reconnue" sera préférée aux affres de la culpabilité...)
Une psychanalyse menée jusqu’à son terme logique aura conclu à l’inconsistance de l’Autre, le grand Autre, avec un grand A, et il n’y a donc, pour le sujet qui en émerge, rien d’autre au monde qu’un objet petit a, conformément à l’écriture de son fantasme ($ <>a) par lequel il "voit le monde" — la psychanalyse, à l’instar du marxisme, n’étant pas une Weltanshauung. Le sujet s’y retrouve à assumer sa responsabilité, ce en quoi il échappe à l’impasse mortifère de l’alternative victimisation/culpabilité: être responsable cela veut simplement dire qu’il accepte de répondre de sa position de sujet, en tant qu’il est rejet de la chaîne signifiante: qu’on le veuille ou non, de notre position de sujet, nous sommes toujours responsable, ceci constitue le fondement indépassable de l’éthique psychanalytique, qui débouche et renouvelle la perspective formulée par Kant de la sortie de notre propre "minorité"...
En inventant la psychanalyse il y a plus d’un siècle, Freud nous interdit désormais de faire comme si nous ne savions pas que les mots savent de nous des choses que nous ignorons d’eux.
L’actualité du malaise dans la civilisation, c’est une époque malade comme jamais de la déliquescence du langage, et cette déréliction produit la vraie pollution, la pollution la plus toxique, la mère de toutes les pollutions.
Ce qui s’appelle Discours Capitaliste, dans l’acception lacanienne, ce n’est pas le discours tenu par des capitalistes, mais un effet de structure qui fait que le sujet croit qu’il est le maître des signifiants, et la langue en usage un simple instrument à sa disposition...
Nos sociétés occidentées soi-disant «progressistes et tolérantes» s’élèvent ainsi à des sommets de crétinerie autoflagellatoire jamais atteints historiquement...
Du temps des Grecs anciens, la «société» se mettait en scène pour les dieux, aujourd’hui elle se donne en spectacle à elle-même, dans une représentation permanente, répétant inlassablement dans les médias ou sur les réseaux dits sociaux le lexique et la syntaxe du discours dominant, s’imaginant qu’elle pourrait ainsi atteindre au «sourdre de la source» à partir de l'eau stagnante des égouts.
Le sujet du Discours Capitaliste qui croit s’opposer au capitalisme a autant conscience d’être pris dans un discours que le poisson a conscience de l’eau dans laquelle il baigne.
Se poser en s’opposant renforce ce à quoi on s’oppose.
La première révolution accessible au sujet est celle d’avoir osé faire un tour sur soi-même, à savoir le tour complet des quatre discours, aller et retour, afin de prendre en lui-même l’immarcescible sujet de l’énonciation dans ses propres énoncés.
Cela s’annonce avec le Discours de l’Analyste.
Comment la considération politique aujourd'hui pourrait-elle faire l’impasse sur ce qui, dans son acception stricte lacanienne, se définit d’être le Discours de l'Analyste?
Le Discours de l'Analyste ce n’est pas le discours tenu par les psychanalystes (rares parmi ceux qui se disent «psychanalyste» sont à la hauteur de ses exigences) c'est au contraire le Discours qui, en tant que structure interdéfinie avec les trois autres Discours (plus un), soutient le destin des quelques uns qui ont choisi de se mettre délibérément à son service ; le Discours de l’Analyste c’est avant tout le lien social déterminé par la pratique d’une analyse.
Pour que ce lien social ait été mis à jour, encore aura-t-il fallu que l'objectif de la cure ait été atteint, autrement dit la dissociation de a et A ait été correctement menée, car si cette «séparation» n'a pas eu lieu (étape logique succédant à l'aliénation) l'Autre continue de fonctionner comme un grand Autre non castré, non barré, entier, représentant absolu du domaine de la nécessité, qui contient sa propre raison, alors que l'opération qui sépare l'Autre de sa cause, place cette cause à la fois hors de la sphère du sujet, et hors de la sphère de l'Autre, c'est à dire au point de leur impossible intersection.
Le Discours de l'Analyste est ainsi le seul Discours qui permette au sujet, qui s’y prend délibérément, d’assumer sa division constitutive, tout en déterminant sa confrontation au Réel, à laquelle il est forcément convoqué puisqu’il en est partie prenante.
Le Discours de l’Analyste non seulement permet de rendre compte que de notre position de sujet, nous sommes toujours responsables, mais la position du psychanalyste ne laisse pas d'échappatoire puisqu'elle exclut la tendresse de la Belle Âme, comme elle exclut toute prétention à l’objectivité pure.
Le Discours de l'Analyste ne commande pas, et en ceci il est déjà l'envers du Discours du Maître, il ne commande ni ne recommande, ce qui permet de se dégager des sempiternelles pulsions de soumission et de domination, de séduction et de manipulation, une prise de distance avec l'Autre qui - grâce à un «jeu des places», où la place vide se différencie de ce qui l'occupe, sujet ou objet - offre la promesse d'un lien social authentique renouvelé, basé sur la parole qui engage, l'autre (qui est là) ayant pris le pas sur l'Autre (qui n’existe pas).
Lacan parle de sortie du Discours Capitaliste, ce qui ne signifie pas encore la sortie du capitalisme.
Raison pour laquelle il ne manque d’ajouter: «Plus on est de saints, plus on rit, c'est mon principe, voire la sortie du discours capitaliste, — ce qui ne constituera pas un progrès, si c'est seulement pour certains...» (Télévision)
Se mettre au service du Discours de l’Analyste implique pour nous que d'une part nous ayons compris que nous n'avons pas d'autre rayon d'action véritable et réel que d’intervenir sur les Discours, la psychanalyse étant une clinique du discours et un Discours, et d'autre part que nous refusons de végéter sur le «mode survie» – la survie utilitaro-hédoniste, pauvre en événements, principale préoccupation de beaucoup de nos contemporains: "un peu de poison par-ci par-là: cela donne des rêves agréables. Et beaucoup de poisons pour finir: cela donne une mort agréable. On a son petit plaisir pour le jour et son petit plaisir pour la nuit, mais l'on révère la santé. Nous avons inventé le bonheur, disent les derniers hommes, et ils clignent de l'œil." (Also sprach Z.)
Nous rejetons donc radicalement l'idéologie libérale de la victimisation, laquelle réduit la politique à un programme d'évitement du pire, au renoncement à tout projet positif et à la poursuite de l'option la moins mauvaise – car nous ne sommes pas sans savoir que, comme Arthur Feldmann, un écrivain juif viennois, l'a amèrement noté, "notre survie se paie généralement au prix de notre vie."
La survie vaut-elle le coup d’être survécue?
Aimer, c’est changer de discours.
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A Controversial Interview
The Late Show with Rory Grant | That Evening
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Rory Grant: A Former Prince, A seeker of freedom, and a grandfather. His new book, Freedom, is a number one Bestseller on Le Nouvel Observateur’s Les Meilleures Ventes and is selling out across Scotland. Please welcome to the Late Show, Mr. Louis Simparte!
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Grant: Louis, Welcome to the Late Show! Louis: Thank you Rory. Glad to be here.
Grant: Your book, Liberté or Freedom, is doing quite well both here and in Francesim. It is a bestseller in Francesim and climbing the lists here in Scotland, how are you feeling about the response to your book? Louis: I am deeply touched by the reception "Liberté" has received. My book has been met with great success by the public, and seeing that my ideas resonate after so many years of exile... it comforts me. The lives of royal families are a mystery that many try to unravel. In this sense, my book offers an explanation to the most curious readers who wish to share my vision of the French Imperial family.
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Rory: The title is quite bold. Freedom. How did you land on such a powerful title? Louis: The title "Freedom" came to me naturally. It embodies not only my personal quest but also a philosophy I want to pass on. We must break free from the constraints imposed by our family while retaining the best it can offer if there is anything worth keeping. I have learned to love my Simparte heritage, in my own way. I want to show that I have always fought for my freedom, and that it is a daily struggle. Rory: You say that your fight for freedom is a daily struggle. And you've had quite the long life [Louis laughs] what was the hardest part to write about? Louis: Without a doubt, the most difficult part to write was the one where I talk about my break with family tradition. Reflecting on my choices and their consequences, particularly on my relationship with my father and my son Charles, was not easy. It's a wound that time strives to heal.
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Rory: Given the strained relationship with your family, do you regret anything you put in the book? Louis: No. Every word reflects my life; I cannot regret it. That said, writing about my own family, knowing that it could hurt some of its members—or bring their wrath upon me—was a burden for a long time. But I believe that truth and freedom of expression are values that must surpass family values. Rory: You've never met your grandchildren, including Princess Hortense who is now the wife of our own Prince Oliver, what do you hope they can learn from you if they pick up the book? Louis: I hope they understand that the important thing is not to blindly follow the path laid out by their parents or ancestors but to find their own way. Being a Simparte also means freeing oneself from the weight of tradition to embrace one's convictions.
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Rory: Would you like to meet them? After all, Princess Hortense now lives here. I'm wondering if they've invited you over to Highland House for tea or however you meet your estranged grandfather. Louis [chuckling]: I haven't received any invitation from them. I do understand that to them I am practically a stranger. But I do hope one day to meet them all. I love sports and sailing just like Napoleon V. Despite the family differences that separate us, they are my grandchildren, and I love them. I do not wish to enter "their way of life," but rather "into their lives." Like a relative with whom one shares nothing but love and respect for one another. I hope that family tensions can ease as soon as possible. Many think that my book is adding fuel to the fire, as they say. But it is precisely because I didn’t have the opportunity to speak within the Imperial family that I was compelled to express myself in a book. Rory: Given that this book is essentially a message in a bottle to your family, do you think you've told your side?
Louis Simparte: Yes, absolutely, that’s my stance. I embrace my subjectivity. It’s a story that doesn’t always align with the official version given by my family, but it’s mine—authentic and uncompromising. From childhood, I was raised as an heir to Napoleon, as a good Christian, being told that 'I was different from others.' The first break came when I decided to stop believing in God. The second came when I failed to obtain my baccalaureate. This was a great shame for my father, who wanted the Napoleons to be at the top of their class. I wasn’t interested in that. Given this, you can understand that our visions can only be opposed on many points. Rory: I can definitely relate. My father thought the best I'd do as a comic would be as a clown in the circus. Well look at me now Da! [cheers from the audience and some laughter as stereotypical clown music plays]
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Rory: What’s next for you? Louis: I want to advocate for a different vision than that of "the emperor" Napoleon, and I will do this work within the French political and cultural spheres. Napoleon was not "programmed" by the aristocracy. Nothing could have predicted that he would rise. I like to present him differently, for example, Napoleon at Saint Helena. The Napoleon who plays with his witty remarks, a fickle Napoleon, or who cheats at cards. The mistake of my ancestor was that, in the end, he found no legitimacy in his power—other than dictatorship. This is far from the revolutionary or republican ideal. He could not find a synthesis between monarchist forces and republican forces because such a synthesis does not exist. He faced a contradiction that no one could resolve. Napoleon's true strength was his energy. He knew how to take risks, discard his prejudices, be realistic, and have a fresh perspective. That is Napoleon’s message! The foundation I wish to establish should contribute to this reflection. Rory: A message I think all leaders should take to heart these days. Louis's memoir, Freedom is available in French and English anywhere books are sold. When we come back, this man just won the boxing gold in the Warrior Games after giving his Pierreland opponent a hell of a knock out blow. Our interview with Staff Sargent Tyler Adams will be after these messages.
@empiredesimparte
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davidheulin · 21 days
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Mon livre de la nature
Aujourd'hui, j'ai décidé d'ouvrir une nouvelle page de mon livre de la nature et de vous en offrir quelques lignes. Enfant, je passais des heures en forêt, à jouer à cache-cache, à construire des cabanes avec mes amis, entouré par la magie des arbres et du chant du vent. Aujourd'hui, ce lien profond avec la nature me rappelle à elle. Je me suis promis de rouvrir cet ouvrage ancien et d'en partager les secrets avec vous.
Le jour s’annonce radieux, baigné par une douce lumière dorée. Mon affût est installé à quelques centaines de mètres d'un point d’eau où les animaux sauvages viennent souvent se désaltérer. Depuis plusieurs semaines, je parcours cette forêt avec une curiosité presque enfantine, tentant de décrypter les traces laissées par ses habitants : empreintes furtives, souilles humides, écorces grattées... Je ne suis qu'un humble observateur, un apprenti face aux mystères de ce royaume, mais peu à peu, je me fonds dans leur monde, apprenant à respecter leurs lois silencieuses.
Le vent souffle dans la bonne direction, me protégeant de leur flair redoutable. Une biche ou un cerf pourraient me percevoir à plus de 300 mètres si je ne fais pas attention. Pas de parfum, pas de faux pas, juste la discrétion absolue. Les minutes passent, puis soudain, le silence se brise : le brame majestueux du cerf résonne dans l'air. Ils sont deux, quelque part entre les arbres. Je perçois le craquement des branches sous leurs sabots, mais aucun d'eux ne se montre.
La pluie, douce et imprévisible, fait son apparition, devançant l’ami qui devait me rejoindre. Deux heures que je guette, immobile. Mon compagnon finit par arriver, et ensemble, nous partageons ce moment sous les larmes du ciel. Le brame s'estompe, laissant place à une inquiétude silencieuse. Malgré nos vêtements trempés, notre patience nous habite encore, car la forêt enseigne à attendre.
Nous décidons de changer d’endroit avant que la nuit ne vienne tout effacer. Et puis, dans un souffle, l’espoir renaît : un chevreuil et un brocard surgissent, espiègles et gracieux, jouant dans l'ombre des arbres. Mais toujours pas de roi en vue. Derrière nous, des biches profitent des jeunes pousses, reprenant des forces pour les jours à venir.
Je ne veux pas refermer cette page du 8 septembre sans avoir vu le roi de la forêt. Notre détermination finit par être récompensée. Une biche apparaît enfin, et dans son sillage, il est là... majestueux, fier, guidé par l'instinct qui le pousse à suivre sa future reine. Nos cœurs battent à l’unisson, comme ceux d'enfants fascinés par ce spectacle offert par la nature.
Nous les observons s’enfoncer dans le bois, préservant leur mystère, leur liberté. Ce royaume n'est pas le nôtre, et nous respectons le rythme de la forêt, son souffle, ses sonorités, ses joutes et ses jeux. Nous quittons les lieux en silence, reconnaissants pour cette parenthèse d’émerveillement qui, dans quelques mois, portera de nouveaux fruits.
Merci, à toi, nature et Tony Tranel
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J'aime sentir l'automne . j'adore les couleurs, le feuillage arc-en-ciel des arbres. On dirait un tableau de maître. L'été, ils sont tous verts, c'est sans surprise, mais, dès septembre, c'est une explosion de couleurs, des nuances plus merveilleuses les unes que les autres: entre deux feuillages verts, un jaune; un arbre rouge qui irradie, incendie, embrase à lui seul une forêt entière, les milles teintes d'orange qui redonnent à chaque regard un nouvel intérêt. En automne, la nature récompense, les observateurs, les optimistes, ceux qui décèlent le beau là où d'autres ne prennent pas le temps de le voir.
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