Ou pas ! Tout est normal est un blog d’écriture collective en ligne qui fait le point régulièrement sur où est-ce qu’on en est au niveau de la normalité, ce qui est normal ou ne l’est pas/plus. Car ces temps-ci tout est très sérieux mais tout est très absurde aussi et peut-être que c’est bien de se souvenir que la vie, c’est les deux? ____________________ Plunge into telework, leave to the countryside, keep social distances: how can we keep existing together when we are not allowed to touch and see each other? This blog is a warm cosy place where to collectively share our newly segregated lives and where to write about experiences, inequalities of the experiences, thoughts, precarities, evolutions but also revolutions. Eventually later on it will remind us that we wanted to make things differently. Here-and-now five questions to kick off the writing: *at what time did you wake up today? *in which kind of spaces have you been today? *how much money did you earn and spent today? *who did you speak with today ? *how will the world smell like when you will open the door, tomorrow? If you want to join, be welcome. Send any text written in your favorite language, anonymous or signed under your name to [email protected] and [email protected] Many hugs from the salon parallèle.
Don't wanna be here? Send us removal request.
Audio
Dans les sous-sols et les souterrains de Bruxelles se tiennent d’autres types de conférences de presse, moins officielles, plus expérimentales, notamment la semaine dernière avait lieu la première « de-press conférence » de Tout est normal, notre blog d’écriture collective en ligne qui fait le point régulièrement sur où est-ce qu’on en est au niveau de la normalité, ce qui est normal ou ne l’est pas. Car ces temps-ci tout est très sérieux mais tout est très absurde aussi et peut-être que c’est bien de se souvenir que la vie, c’est les deux? L’équipe de Tout est normal s’est réunie la semaine passée à l’annonce du nouveau confinement.
En direct sur radio campus à Bruxelles le 6 novembre 2020 au midi express
0 notes
Text
ta réalité, ma réalité, notre réalité
"Peu d'idées sont autant galvaudées aujourd'hui que celle de " réalité ". Hommes politiques, chefs d'entreprise, mais aussi économistes, romanciers s'en réclament : seul le réalisme semble recevable, et il suffit à tout justifier. La réalité constitue désormais, dans notre mentalité collective, la valeur étalon. Elle est le nouveau dieu que nous vénérons ; le dernier qui reste en magasin, peut-être"
Mona Chollet- la tyrannie de la réalité
0 notes
Link
0 notes
Text
Appel à mettre en crise la crise #OutsideDoors
Adresse aux artistes, technicien·ne·s, comédien·ne·s, danseur·se·s, chorégraphes, metteur·se·s en scène, directeur·trice·s et employé·e·s de structures culturelle, paru dans lundimatin#259 , le 19 octobre 2020
Terrorisé à l’idée de perdre son public et prêt à tout pour maintenir le spectacle, dès l’annonce du couvre-feu le milieu culturel s’est empressé une nouvelle fois de s’adapter aux règles de l’état d’exception sanitaire.
Nous avons reçu cet appel qui, à contre-courant de ce sauve-qui-peut, propose au contraire de suspendre les spectacles, rappelant que la question de l’art ne se joue pas que dans la représentation. Il s’agirait de s’émanciper de la temporalité des mesures restrictives du gouvernement afin de reprendre un coup d’avance.
Considérant que le SARS-CoV-2 sera là pour longtemps, Que le gouvernement continuera sa gestion à la petite semaine, Que nous serons ainsi suspendu·e·s aux nouvelles mesures dont seul le pouvoir a le secret, Que nous serons ainsi balloté·e·s de semaine en semaine et que nous aurons perdu à force d’adaptation tout horizon sur nos vies, Que ce faisant stress, dépression et anxiété n’auront de cesse de nous tourmenter.
Considérant le couvre-feu et le refus par le premier ministre que les places de spectacles fassent office d’attestations dérogatoires.
Considérant que les billetteries n’emplissent pas plus les caisses que des enfants jouant « à la marchande », Que les circulations de personnes dans des espaces clos etc etc, Que les lieux servant à recevoir du public - ERP - ont également vocation à accueillir des artistes en résidence, Que ces résidences sont des espaces de recherches et de création.
Considérant que la rencontre avec le public n’est pas l’alpha et l’oméga de l’art, n’en est que la partie émergée, Que l’intermittence est un battement entre le visible et l’invisible, Qu’il n’est écrit nulle part que ce battement doive durer 10 mois.
Considérant le chantage au public toujours plus oppressant dès qu’un·e artiste ou un groupe d’artistes s’isole dans une salle pour travailler.
Considérant les incessantes sollicitations pour faire de l’artiste un ravaudeur du social.
Considérant l’exigence de productivité toujours plus délirante des départements, des régions, des services déconcentrés de l’Etat, Que cette manière de juger de la vitalité de l’art est aussi bête que de compter le nombre de bouteilles de lait dans un supermarché pour juger de la vitalité du lait.
Considérant qu’il y a un temps pour la recherche, l’étude, la création et un temps pour l’exploitation, Que la recherche, l’étude, la création sont aussi un travail, Que le travail est toujours permis, y compris la nuit.
Considérant la rareté habituelle des espaces-temps d’élaboration.
Considérant que re-programmer, re-déplacer, re-contacter, de semaine en semaine est une distraction qui court-circuite la nécessité de penser le présent et les gestes neufs qu’il pourrait exiger Que re-programmer, re-déplacer, re-contacter, de semaine en semaine relève du luxe et qu’un tel luxe révèle et aggrave les inégalités structurelles du milieu culturel.
Considérant que cette gestion à la petite semaine est davantage faite pour écrémer, Qu’elle charrie un chacun pour soi, une logique du faible et du fort et qu’en cela elle finit par achever les restes de solidarités.
Considérant que les lieux culturels ont toujours manqué de temps pour réfléchir leur fonctionnement, leurs pratiques et leurs usages, Que ce manque de réflexion est une source permanente de conflits, Que les labels et les cahiers des charges qui les accompagnent ont montré leurs limites.
Considérant le statut de téléphone rose qui a été donné aux artistes pendant le confinement, fait pour racoler les abonné·e·s.
Considérant qu’il n’y eut aucune difficulté à passé du spectacle vivant au spectacle virtuel, privilégiant par là le spectacle sur le vivant.
Considérant la panique qui s’est emparée des salles à l’idée de perdre leur public, qui s’est emparée des artistes à l’idée de perdre leurs œuvres en cours, les engageant dans une mentalité d’épicier.
Considérant que maintenir « coûte que coûte » les spectacles, le faire dans ces conditions et y parvenir n’est que le succès des gestionnaires, Que la vie ainsi réduite à sa gestion est l’attendu exact du pouvoir.
Considérant que les restrictions sanitaires ne sont pas les mêmes pour les représentations que pour les résidences, Qu’il est donc plus facile de résider, même à plusieurs, etc., etc., Que de jouer.
Nous invitons les artistes, technicien·ne·s, comédien·ne·s, danseur·se·s, chorégraphes, metteur·se·s en scène, directeur·trice·s et employé·e·s de structures culturelles
à se délester de leurs spectacles, de leur programmation, de leur planning et rétro-planning, de leur capacité d’adaptation et à exiger la reconduction de l’année blanche jusqu’à l’été 2022.
à se saisir de ce moment libéré de la représentation comme d’une opportunité pour envisager un autre rapport au public, se lancer dans l’étude, la recherche, l’invention de nouveaux lieux à partir des lieux existants et d’y consacrer le temps nécessaire avec les moyens de l’année blanche prolongée.
à considérer l’évènement comme ce qui peut venir interrompre ou rendre caduque le travail en cours et que si pour cela certaines œuvres doivent être des avortons, l’art n’en restera pas moins vivace.
à avoir un coup d’avance
à truander le réel [1]
[1] Cet appel n’est pas une blague, mais s’il est pris comme tel tant mieux. Il est aussi sérieux que la nécessité de fomenter des adresses joyeuses dans cette période accablante.
https://lundi.am/Appel-a-mettre-en-crise-la-crise
0 notes
Text
“Rien ne me sépare de la merde qui m’entoure”_ Virginie Despentes #OutsideDoors
Texte de Despentes – Lu le 16 octobre 2020 au Centre Pompidou.
Je suis devenue un camp pénitentiaire à moi toute seule avec des frontières de partout, entre ce qui est bien et ce qui est mal, entre ce qui me plait et ce qui me déplait, entre ce qui me sert et ce qui me dessert, entre ce qui est bénéfique et ce qui est morbide, ce qui est permis et ce qui est interdit.
Toutes les propagandes me traversent et parlent à travers moi, je ne suis imperméable à rien et j’en ai marre de surveiller ce que je dis sans même avoir le temps de m’en rendre compte. Je n’ai pas besoin que la police me nasse, je me nasse toute seule, je n’ai pas besoin d’un couvre-feu pour m’enfermer en moi, je n’ai pas besoin de l’armée sous mes fenêtres pour surveiller ce que je pense parce que j’ai intériorisé tellement de merdes qui ne servent à rien. Je rampe sous des barbelés parfaitement inutiles mais que j’ai avalé et j’en ai marre de prétendre que j’ai la force de les repérer et de les pulvériser alors qu’ils me lacèrent à chaque pas, rien ne me sépare de la merde qui m’entoure.
Je dépense tellement d’énergie à m’asphyxier, à dire que c’est un choix moral. Je passe mon temps à faufiler sur des radars de contrôle et à attendre des raclées chaque fois que j’ouvre ma bouche quand les vraies raclées je suis celle qui me les administre parce que les flics les plus efficaces sont désormais ceux qui sont passés dans ma tête et j’en viens à surveiller mes moindres propos.
Comme si quelque attitude qui soit pouvait faire que je mérite d’être innocentée, je mérite le premier prix de pureté, je mérite d’être désignée comme le meilleur, comme s’il existait une frontière qui nous sépare les uns des autres. L’illusion que c’est chacun son stand, chacun sa biographie, chacun sa récompense en fonction de son comportement, chacun son bout de trottoir pour y faire le tapin ou la manche ou son petit numéro de gloriole quand c’est le même trottoir pour tous. Mais chacun a ses limites et chacun a son prestige, chacun a son lectorat, chacun a son auditoire, on aurait tous un univers, bullshit, il n’y en n’a qu’un d’univers, le même pour tous, et tirer son épingle de ce jeu n’est jamais une question de force encore moins de mérite juste d’agencement et de chance et rien ne me sépare de la merde qui m’entoure.
La frontière de mon corps ce n’est pas le bout de mes doigts, ni la pointe de mes cheveux. La frontière de ma conscience n’est pas ma force de conviction, c’est l’air vicié que je respire et l’air vicieux que je rejette, la boucle dans laquelle je m’inscris est bien plus large que celle que ma peau définit, l’épiderme n’est pas ma frontière. Tu n’es pas protégé de moi, je ne suis pas protégée de toi. Ta réalité me traverse même si on ne se regarde pas, même si on ne baise pas, même si je ne vis pas sous ton toit. Nous sommes en contact permanent, le procédé que la pandémie rend visible sous forme de contagion, il est temps d’en prendre conscience sous forme de guérison. Chaque fois que tu as le courage de faire ce qu’il te convient de faire, ta liberté me contamine. Chaque fois que j’ai le courage de dire ce que j’ai à dire, ma liberté te contamine. Nous avons avalé ces histoires de frontières, cette fable du chacun pour soi, chacun chez soi, cette fable qui veut que les choses telles qu’on les connaît soit la seule réalité possible et qu’elle soit immuable. La fable selon laquelle la race humaine n’aurait qu’un seul destin collectif possible: l’exploitation impitoyable des uns par une élite, le pouvoir par la force, et le malheur pour tous.
Toutes les propagandes me traversent et m’habitent et me gèrent. Je ne suis pas un territoire de pureté ni de radicalisme, et je ne suis pas du bon coté de la barrière, rien ne me sépare de la merde qui m’entoure, rien sauf le désir de croire que ce monde est une matière molle. Ce qui est vrai aujourd’hui peut avoir disparu demain, mais j’en ai marre de croire en des frontières qui ne me servent à rien, d’y adhérer comme si elles avaient été tracées par une main divine qui ne se trompe jamais, alors qu’elles sont justes gribouillées au hasard par des cons et j’en ai marre de croire en des choses qui ne me servent à rien. C’est la rage d’avoir raison qui nous lamine, la rage de tracer des frontières entre le domaine du bien et le domaine du n’importe quoi. La rage d’etre du bon coté comme s’il existait quoi que ce soit dans ce capharnaüm qui soit une position juste, une position pure, une position idéale, une position définitive dont on ne bougerait plus et alors, ce sont les armes de l’ennemi qui nous utilisons, les armes de ceux qui ne nous veulent aucun bien car nous constituons une menace à leurs yeux, les outils de l’exclusion et de la disqualification et de l’humiliation et de la silencialisation, et de l’invisibilisation, et au bout du compte c’est comme vouloir faire la révolution mais juste pour remplir les prisons d’autres populations, pour donner d’autres ordres aux mêmes policiers, donner d’autres consignes aux mêmes juges, c’est comme changer les joueurs mais ni de terrain ni de genre de jeu, alors cette révolution se transforme en un roulement des équipes dirigeantes, la même connerie mais avec d’autres qui en profitent, et je ne dis pas que ça ne sert à rien, ce mouvement a quelque chose de sain sauf que il n’y a pas de rêve là dedans. Aucun. Une révolution dans laquelle on ne met ni rêve ni joie, alors il ne reste que la destruction, la discipline et la justice et si on dit révolution, il faudra dire douceur, c’est à dire commencer par accepter d’etre du coté d’une stratégie non productive, non efficace, non spectaculaire et que seule la ferveur permet d’embraser. Seule la conviction que nous n’avons besoin ni d’avoir raison, ni de donner tort pour donner corps collectif à autre chose que ce qui existe déjà et la chose qui compterait le plus ne serait plus d’accumuler le maximum de likes pour le jour du jugement dernier mais de commencer à ressentir que nous sommes en position de force. Même si nous occupons moins de surface spectaculaire, nous sommes en position de force. Car nous faisons déjà l’expérience de vie différente dans des corps différents qui ne nous font plus honte. Nous modifions nos vies, nos modifions les discours, nous modifions l’espace de notre seule présence et c’est la joie que nous en tirons qui fait de nous des corps collectifs révolutionnaires, voilà pourquoi beaucoup d’entre nous ici déjà on fait l’expérience du tire de barrière assassin, de ceux qui ne nous supporte pas tout simplement pour ce que nous sommes, ils sont toujours convaincus que la douceur justement doit etre réservée au foyer, à la bonne femme et à son chien et jamais l’espace public et jamais dans le monde dans lequel on vit. Ceux là, nous devons comprendre que s’ils sont ivres de rage, c’est parce que nous avons commencé de gagner. Ils voudraient pouvoir pédaler en arrière de toutes leurs forces pour revenir au temps ou ils pouvaient dire «toi tu te caches et tu te tais, ta parole n’est pas politique, toi tu te caches et tu te tais» mais ils savent, une fois sorties, nos libertés contaminent et nous avons déjà commencer de changer le monde. Ceux qui pensent qu’on devrait nous faire taire pensent ‘prison, soumission par la force à une réalité unique’, ils pensent ‘droit divin, police, bain de sang, enlèvement, interrogatoire, torture, censure, surveillance, prison’ ils rêvent d’un papa absolu, d’un adulte qui saurait tout sur tout et les protégerait d’eux même, ils rêvent ‘obéissance, soumission, discipline’, ils ont cette avantage de rêver d’un monde qui existe déjà, qui a raison partout et nous avons cette avantage de ne pas croire qu’il soit immuable. Ce qui est irrémédiable c’est la mort de tout ce que nous connaissons comme réalité, ce qui est irrémédiable c’est le changement, ce qui est irrémédiable c’est la rapidité avec laquelle la réalité se réinvente contre la lourdeur de nos consciences, liée à la plasticité du réelle. Leur narration n’est pas solide, voilà ce que le covid nous apprend, ils se défendent comme des diables et prennent toutes les décisions débiles, ils se frottent les mains en pensant ‘on va en profiter pour tourner tout ça à notre avantage’, leur narration n’est pas solide. Ils se racontent des histoires, ce dernier tour de force est un dernier tour de piste. Leur réalité tombe en poussière. Ils sont des baltringues enchantés d’eux-meme, des imbéciles convaincus de leur importance, ils s’époumonent mais ce n’est pas parce qu’ils gueulent en coeur que ce qu’ils disent est vrai. Leur stratégie du bruit donne l’impression qu’elle est plus efficace que jamais mais s’ils crient aussi fort et qu’ils semblent si sincèrement souffrir c’est qu’ils sentent qu’ils sont à bout de souffle et pour le dire simplement, c’est autorité des puissants, ils peuvent se la carrer au cul. Ils ont plus ou moins mon age, ils savent qu’ils vont bientôt mourir et d’une certaine façon, ça leur fait plaisir d’imaginer qu’après eux rien ne subsistera. En attendant, les plus puissantes lèguent à leurs enfants les rennes du pouvoir et leur seul pouvoir c’est la force de destruction, la rafale de balle est réelle, l’impact de la bombe est réelle, l’efficacité des armes est réelle, quel que soit l’imbécile qui s’en sert, c’est lui qui écrira l’histoire, mais quand bien même ils ont les armes et le commandement des armées, et les flics pour se protéger, ils auront toujours besoin de corps gratuits pour faire leur guerre, et enclencher leur répression, et RIEN ne dit que demain ces soldats et ces flics ne changeront pas d’avis, RIEN ne dit que demain ces soldats et ces flics ne décideront pas de changer de programme et de ne plus tirer sur les hommes et les femmes et les enfants et rien ne dit que les hommes ne diront pas ‘le viol ne me fait pas bander, violer les femmes et les gamins devant les parents égorgés ne me fait pas bander, je n’ai plus envie d’appartenir à cette histoire de merde sous prétexte que trois débiles au sommet ne connaissent pas la satiété’, RIEN n’a jamais empêché l’histoire de bifurquer, qu’on nous répète le contraire à longueur de journée n’en fait pas une loin, rien n’a jamais empêché l’histoire de disjoncter et rien ne s’oppose à ce que l’espèce humaine change de narration collective, au contraire, pour la première fois dans l’histoire de l’homme, elle n’a pas d’autre choix que le faire. Il faudra bien changer de narration, les marchés ça n’existe pas, on ne parle pas de montagne, d��ouragan, d’incendie, d’océan, de grand gel, on ne parle pas de choses réelles quand on parle des marchés, ce ne sont pas des géantes à la colère desquels on n’échappe pas. Ce que nous enseigne le covid, entre autres choses, c’est que le jour ou on arrête d’y aller, tout s’arrête et c’est tout. Nous ne sommes pas gouvernés par des dieux tout puissants qui peuvent se passer de notre accord pour assoir leur bordel. Nous sommes gouvernés par de vieux imbéciles qui ont peur que leurs cheveux frisent sous la pluie, qui posent à moitié nus sur des chevaux pour exhiber leur grosse virilité, nous sommes gouvernés par de vieux impossibles à qui il est tout à fait possible de dire demain ‘mais va donc la faire toi même, ta guerre’. S’il est si important de tout confier, toujours, aux plus violents, organisez donc de grands matches entres dirigeants, et qu’ils se démerdent entre eux sur le ring avec le goût qu’ils ont pour le sang. Il est temps de se soustraire aux évidences. Le monde tel qu’on le connaissait s’écroule, ce n’est pas une mauvaise nouvelle, c’est le moment de se souvenir ‘on n’est pas obligés pour les armes, on n’est pas obligés pour la guerre, on n’est pas obligés pour la destruction des ressources, on n’est pas obligés de tenir compte des marchés, le patriarcat est une narration et elle a fait son temps’. Terminé de passer nos vies à quatre pattes sous les tables de vos festins, à grignoter vos restes et sucer vos bites à l’aveugle, gratuitement, aimablement, en remerciant abondamment à chaque éjaculation, ça nous fait tellement plaisir de vous voir heureux vous qui etes à table. Terminé. Maintenant quand on ouvre la bouche c’est pour mordre, ou pour parler, parler est plus important que mordre, parler est ce qu’on a fait de plus important ces dernières années, nous qui n’avions jamais parlé. Et ce qui compte aujourd’hui, c’est prendre soin de nos paroles. Si nous voulons dire ‘révolution’ nous devons permettre à la parole de se prendre là ou elle ne se prenait jamais, il nous faut ouvrir des espaces non pas safe, parce que safe ça n’existe pas quand il faut déballer sa merde, mais d’écoute sincère. Ça n’est pas une affaire de bienveillance mais de sincérité, écouter sincèrement est peutetre ce que l’on doit apprendre, pas écouter pour nous conforter dans ce qui nous arrange, pas écouter en se demandant si ça peut améliorer la boutique de nos boutiques respectives, écouter, sincèrement, en prenant le temps d’entendre. On ne peut pas écouter sincèrement la parole si elle est confisquée par les tribunaux, il nous faut apprendre à écouter sans que notre but soit systématiquement de déclarer coupable ou non coupable, tout le cycle du jugement relève du vieux monde, on s’en fout de savoir qui est coupable. Comment entendre, recevoir, soigner, pour ensuite transmettre autre chose que de l’abus de pouvoir, nous devons apprendre à nous démettre des autorités. Je sais et je sens qu’il n’existe pas de séparation nette non plus entre moi et le ministre pointeur raciste, entre moi et l’idiote ménopausée qui vient parler de la douceur des hommes, entre moi et la féministe d’une nouvelle prison, entre moi et la meute des tarés agressifs qui s’insurgent de ce que l’on oublie un peu vite l’importance de la testicule dans l’art, entre moi et les harceleurs de merde exigeant le silence de celle qui évoque notre histoire coloniale commune et entre moi et les idiots utiles des sous-doués du troisième reich, entre moi et eux, il n’y a pas non plus de frontière fixe. Je suis aussi les imbéciles, je suis aussi leur colère, leur dépit, je suis aussi leur agonie fétide puisque rien ne me sépare de la merde qui m’entoure. Ce qui n’équivaut toujours pas à dire que tout se vaut, mais qu’il y a contagion, propagation, impact et que toute idée de pureté, d’isolement, de protection est à peu près aussi crédible que de porter un masque en papier dans la cohue du RER de 19h30. Probablement utile mais tout à fait dérisoire. Nous sommes exposés les uns aux autres. Ce qui signifie que tout ce qui est émit nous impacte et réciproquement. Car si je commence par dire ‘il n’y a pas de frontière si claire entre moi et les autres’ je ne le dis pas de façon poétique, je dis l’arménienne sa souffrance, la libanaise son désarroi, la femme sans toit son errance, la femme en prison son chagrin, la chanteuse à Hong-Kong sa determination, l’étudiante précaire en foyer sa rage, quand je dis ‘nous sommes le monde tous en même temps’, je ne viens pas chercher la culpabilité dans mon corps, de ne pas sentir le drame. Je n’ai pas froid, je ne dors pas en cellule, je n’ai pas été battue aujourd’hui, mais poumons ne sont pas dégradés, je ne sers pas les dents quand arrive une facture, j’ai des papiers, ma peau est blanche, j’ai bien mangé etc, etc, mais la culpabilité est un isolement qui ne sert à rien d’autre qu’à rendre impuissant. Oui les vêtements que je porte aujourd’hui, c’est la vie détruite des enfants qui les ont fabriqués, c’est la pollution des pays, c’est la honte d’appartenir à la classe de ceux qui ont eu le culot de décider de délocaliser, oui la nourriture que j’absorbe c’est l’empoisonnement de la Terre et la destruction des espèces animales, c’est la détresse de l’exploitant agricole, c’est la fatigue du routier espagnol que je dépasse en pestant sur l’autoroute, oui l’institution musée que j’occupe ce soir est une histoire d’exclusion d’une rare violence, oui les livres que j’écris et que je vends c’est la honte de mon exhibition médiatique, oui chaque mot que je prononce aujourd’hui est dégueulassé par la honte, non seulement par la somme de mes privilèges mais encore de ma passivité et aussi de mes facultés de jouir des injustices tout en les dénonçant, oui je me sens coupable, non je ne suis pas pure mais la culpabilité est toxique et ne me sert à rien. De cette honte là, je ne peux rien faire d’utile. Oui j’ai conscience aussi d’un autre privilège qui est le mien et qui est la notoriété, la notoriété étant devenue une méta valeur. Séparatisme entre ceux qui, comme moi, on un nom qui provoque une onde de choc sur internet et ceux qui galèrent à se faire entendre, à se singulariser, à se faire remarquer, qui veulent percer et moi qui trône comme une furoncle invincible, un furoncle qu’on ne finirait jamais de percer et j’ai conscience de mes toutes positions de privilège et je ne veux pas dire que toutes les positions se valent, toutes les conditions de vie de tous les corps ne sont pas équivalentes sous prétexte qu’elles sont reliées mais ce que je dis : il faut prendre conscience des liens invisibles. Parce que c’est de ce tissu que sera fait la révolution pas de nos culpabilité juxtaposées. Mon corps blanc non soumis au travail forcé, qu’on n’a pas violé dans l’impunité, mon corps chrétien qui fête le 11 novembre sans penser à la ville de Sedan, mon corps goy qui s’accommode de la propagande antisémite, mon corps bien nourri, trop soigné, pour qui le capitalisme travaille et fait le sale boulot sans que j’ai besoin de m’en préoccuper mais je peux même m’en émouvoir et en jouir en même temps, ce corps blanc pour lequel on a défini tant de frontières. J’en ai ma claque de répondre à des matons et à des patrons, ce que je veux nourrir aujourd’hui c’est ma faculté d’écouter quand ceux qui n’ont jamais parlé ouvrent la bouche. Ceux que je veux nourrir c’est ma facultés de désirer autre chose. Ce que je veux ressentir c’est que j’appartiens à la race humaine et aucune autre et je veux entendre ce que disent les enfants, de ce qui ont l’age d’etre les enfants de mes enfants et les croire quand ils disent ‘nous allons faire la révolution’. Et sachant ce que je sais, je désire les y aider. Je ne veux plus dire intersection parce qu’à la longue le terme donne l’impression que je vends des tomates et que je m’interroge sur la pertinence de vendre un peu de patate du voisin sur mon étalage, alors que de facto tes patates poussent sur le même terrain que mes tomates, mais de toute façon savoir si j’ai interet à ce que mes luttes coïncident avec les tiennes est une préoccupation boutiquière qui n’a aucun sens. Il ne s’agit pas d’une carte routière ni d’un problème de math. Quand nous dirons ‘révolution’ je veux me souvenir que je ne suis pas isole de toi et tu n’es pas protégée de moi. On peut lever des murs, jeter des filets dans la mer, multiplier les frontières et les procédures pour les traverser, à la fin c’est inepte. Ta réalité traverse la mienne, ma réalité pèse sur toi, les frontières fixes sont toxiques et ne servent à rien. Ce qui est immuable c’est que tout se traverse. Ce qui ne veut toujours pas dire que tout se vaut. J’écoute les gens de mon age parler des gens qui ont 20 ans aujourd’hui et je les entends en dire ‘comme toutes les générations avant-eux, ils désirent changer le monde’, sur le ton blasé et serein de ceux qui en ont vu d’autres, de ceux qui savent comment ça se passe. Mais je peux témoigner, ma génération ne voulait pas changer le monde, certains d’entre nous le désirait, mais ma génération n’a jamais voulu change le monde, elle y croyait trop à ce monde, et elle croyait à tout ce qu’on lui disait. Toutes les générations n’ont pas voulu changer le monde, à toutes les générations n’a pas échu le devoir de changer le monde. A ma génération on n’a jamais dit, avant même qu’on sache lire, si vous ne changez pas le monde, vous allez tous crever. Ils sont gender fluid et ils sont pansexuels, ils sont racisés ou solidaires des racisés, ils ne veulent plus etre enfermés et définis par la misère et l’injustice, ils sont chamans, ils sont sorcières et ce qui m’intéresse aujourd’hui n’est plus ma honte, ni ma culpabilité, ni ma rage ni mes keufs intérieurs mais bien de me rendre capable de leur dire ‘tout est possible’ à commencer par le meilleur et c’est une affaire de désirer autre chose. Je choisis de les croire quand ils disent qu’ils veulent le sauver ce monde. Je choisis de croire que nous ne savons rien de ce dont seront fabriqués les jours à venir. Je choisis de croire que, quand les plus puissants nous répètent à longueur de journée ‘nous savons tout de l’avenir car nous connaissons le passé, il n’y a pas d’alternative, les choses sont comme elles sont parce que c’est dans la nature humaine d’en arriver là, c’est ainsi que Dieu l’a voulu dans son immense sagesse et s’il y a cruauté gratuite et injustice et grand saccage c’est que la cruauté, l’injustice et le saccage font partie du réel’ et ils disent ‘regardez les animaux’ et chaque fois qu’ils les regardent c’est pour observer comme ils tuent, alors moi aussi je regarde les animaux qui tuent et j’observe. Je ne vois pas leur camp de migrants, je ne vois pas leurs frontières, je ne vois pas d’éléphant barbeler son terrain pour ne jamais y voir de zèbre parce qu’il a décidé que les zèbres ça ne devrait pas exister, je ne vois pas les animaux enfouir leurs déchets nucléaires alors je me demande ‘que dois-je comprendre des animaux ?’. Dans nos histoires humaines, la douceur est utile, la douceur et la bienveillance sont les notions les plus antinomiques avec le système qui nous opprime. La douceur et la bienveillance, c’est le contraire de l’exploitation capitaliste, te demander la permission, me demander si je consens. La douceur et la bienveillance, c’est ce qu’on ne trouve pas sur les marchés, c’est ce qu’on ne trouve pas dans l’armée, c’est ce qu’on n’enseigne pas dans les polices. Toutes les propagandes me traversent, toutes les propagandes parlent à travers moi. Rien ne me sépare de la merde qui m’entoure, rien sauf le désir de croire que ce monde est une matière molle, que ce qui est vrai aujourd’hui peut avoir disparu demain et qu’il n’est pas encore écrit que cela soit une mauvaise chose.
Virginies Despentes, lu le 16 octobre 2020 au Centre Pompidou, dans le cadre du séminaire Paul B. Preciado
https://soundcloud.com/dali_z/lecture-despentes-seminaire-paul-b-preciado?ref=clipboard&p=i&c=0
1 note
·
View note
Text
Accélération des domaines culturels
Il y a quelques mois ce n’était un secret pour personne que ce que nous venions de vivre n’était que le début d’une crise qui allait durer et durer encore. Dans tous les secteurs et particulièrement le secteur artistique, en sortant d’une hibernation forcée, le maître mot était: RA-LEN-TIR. La période était propice à expérimenter la décroissance et imaginer d’autres façons d’inscrire l’institution artistique dans la cité.
Quelques semaines plus tard, en plus de se plonger dans un déni atterrant en annonçant en grandes pompes des saisons surchargées de reports, la plupart des institutions artistiques ont sur-sollicité les artistes avec des versions Covid compatibles bradées à bas prix.
Après avoir passé des mois catastrophiques à assister au naufrage de ce que les artistes ont mis des années à développer, passé un été à essayer de sauver les meubles, et une rentrée appréhendée avec inquiétude voire angoisse parce que des institutions n’ont pas voulu voir que cette saison serait définitivement compromise, nous voilà embarqués sur un Titanic désoeuvré, exhortés à maintenir l’animation. « À tout prix » est sur toutes les lèvres.
Peu importe de mettre des équipes artistiques en situation de fragilité et de stress majeur, soumis aux risques des contaminations et des annulations, il faut accélérer, mais accélérer beaucoup, pour rattraper le grand stop. Lancer des appels à projet à la va vite dans des délais intenables, programmer dans des périodes annoncées comme rouges foncées, faire plus et plus vite surtout, jusqu’à nous faire signer des déclarations sur l’honneur que dans la vie privée nous ne serrerons dans nos bras personne d’autre que notre bulle professionnelle, nous n’embrasserons avec ou sans la langue personne d’autre, nous ne ferons l’amour à personne d’autre. On s’est mis à marcher carrément sur la tête, des burn out pointants le bout de leurs nez.
Aujourd’hui, l’étau des contraintes sanitaires se resserre drastiquement et n’a pas fini de se resserrer. Ces mêmes institutions promptes à montrer la route du progrès politique et social se révèlent les premiers complices d’un système paternaliste et archaïque. Tout est normal.
Pierpol
0 notes
Text
nos contacts inutiles
"Nous allons réduire nos contacts inutiles, un peu festifs, mais continuer à avoir une vie sociale, c'est à dire en travaillant"
Une déclaration automnale, un jour de renoncement, une phrase en l’air
1 note
·
View note
Text
0 notes
Text
Dire le « non-travail » en temps de confinement
http://www.direletravail.coop/dossiers/dossiers/dire-le-travail-en-temps-de-confinement/
0 notes
Text
Gare du midi, retourner les sièges pour éviter les propagations des assises
0 notes
Photo
0 notes
Text
tu crois que la vie c’est les vacances ou quoi
https://www.mixcloud.com/radiocampusbruxelles/midi-express-26062020-tu-crois-que-la-vie-cest-les-vacances-ou-quoi/?fbclid=IwAR3F4-0_-rCDATc7SJiL5d-G46Fp9u1qb6rbXjW-W8W67io8OcmGjKmrsNg
Pour le dernier Midi Express de la saison, on tartine le beurre, l’agence de labeur et le QI des crémières Valentine Bonomo pour Agir pour la cuture, Lucie Combes, et Mathilde Maillard/Anna czapski pour Petite Banlieue, une expérience du club travail pendant un workshop de futurologie. Et mois-son entre travance & vacail: GAML au Carnaval Sauvage, Manchester Plage pour Recyclart Holiday's, Bruxelles Wild Life et la great to do list de Jacinda Aldern
0 notes
Text
Merci actiris #2
Déconfinez votre recherche d'emploi
Adaptez votre CV au déconfinement Avec le confinement qui touche doucement à sa fin, il est temps de mettre à jour son CV en mettant en avant les trois mois qui viennent de s’écouler. Qualités humaines et nouvelles compétences sont vos atouts.
1. Vos nouvelles compétences
Grâce à l’e-learning , vous avec peut-être pu apprendre de nouvelles compétences et à la fin du confinement, vous avez réellement progressé dans une langue ou vous vous êtes formé au codage. Etre proactif et se lancer dans l’apprentissage d’une langue ou une nouvelle compétence en période de confinement, ce n’est pas donné à tout le monde et ça témoigne de votre motivation et de votre capacité à apprendre rapidement. N’hésitez donc pas à faire remonter cette rubrique au sommet de votre CV pour que ce soit visible directement pas le recruteur.
2. Vos qualités humaines
Cette période a été terriblement compliquée pour les entreprises sur le plan économique mais également sur le plan humain. Le recrutement post-confinement va mettre encore plus l’accent sur les qualités humaines des candidats. L’empathie, l’adaptabilité, la résistance au stress, la créativité sont des soft skills très importantes pour permettre aux entreprises de faire face au monde d’après. Ces deux mois de confinement, vous ont sans doute permis de réfléchir sur vous-même et de faire le bilan de vos qualités humaines voire de vos mad skills qui peuvent aussi faire la différence en cette période. N’oubliez donc pas de bien mettre en évidence cette rubrique de votre CV. Soit en la positionnant en haut du CV, juste à côté de votre identité, soit en en faisant une rubrique qui saute aux yeux en adaptant la police et la taille de caractère par exemple.
Le déconfinement est le bon moment pour mettre à jour son CV
3. Et si je n’ai rien à ajouter ?
Beaucoup de formations et d’accompagnement ont pu continuer en ligne en cette période mais elle n’était pas forcement la plus propice pour continuer à se former et/ou à chercher un job. Vous n’avez peut-être donc pas de nouvelles compétences �� ajouter dans votre CV. Cependant, il est toujours utile de reprendre régulièrement son CV pour le mettre à jour, en améliorer la mise en page, le rendre le plus synthétique et plus efficace. C’est aussi le bon moment pour le rendre encore plus percutant car votre CV reste votre première carte de visite aux yeux des employeurs.
C'est le moment de relancer les employeurs ! Vous avez postulé pour un job avant le confinement mais n'avez toujours pas de nouvelle ? Il est temps de relancer les employeurs !
0 notes
Photo
0 notes