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alexandre--rousseau · 3 years ago

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Dune: Le désert comme terrain de jeu

Critique de Dune

Impossible de sous-estimer l’ampleur du défi qu’est de réaliser une version cinématographique de Dune. Longtemps considéré comme étant inadaptable, le roman de Frank Herbert avait déjà eu raison de deux grands maîtres de la pellicule: Alejandro Jodorowsky (avorté avant même sa mise au monde et l’objet d’un documentaire paru en 2013) et David Lynch (le seul film qu’il a désavoué). L’ombre des échecs de ses prédécesseurs n’a pas empêché Denis Villeneuve de se plonger tête première dans son rêve de jeunesse, après s’être fait la main avec deux films de science-fiction, Arrival et Blade Runner 2049. Les circonstances auront fait en sorte que l’un des films les plus attendus de l’année 2020 se sera laissé désirer une année supplémentaire.

La touche Villeneuve

Même si Dune possède bel et bien l’ADN d’un blockbuster, l'œuvre ne manque pas de style et d’ingéniosité pour autant. L’une des plus grandes qualités de réalisateur de Villeneuve est de s'assujettir aux besoins du film, d’être un serviteur généreux pour son art. Les touches visuelles plus expérimentales ne sont pas déployées pour montrer l’étendu de son talent, plutôt elles sont articulées afin de permettre à l’histoire de réaliser son plein potentiel. Bien loin d’abuser des vues panoramiques, une séduisante proposition compte tenu de la beauté immuable du désert, le cinéaste québécois ne se gêne pas pour voiler la vision du spectateur par le sable écorcheur, des huis clos ou par la nuit. Véritable fondation du film, on peut déjà consacrer la trame sonore rétrofuturiste de Hans Zimmer comme l’une des meilleures de sa longue et illustre carrière.

Un univers aussi riche amène son lot de complications scénaristiques. Le film en a plein les bras à bâtir son monde complexe et prend un certain temps à démarrer. Le momentum va tout de même vers l’avant, comme un immense bateau de croisière qui prend lentement de la vitesse. Les enjeux sont ultimement ébauchés avec clarté, un tour de force en soi.

Jongler avec plusieurs balles

La distribution toute étoile rend de fiers services, mais la construction des personnages demeure trop mince, même pour un film à grand déploiement qui priorise d’autres véhicules pour arriver à ses fins. Villeneuve n’arrive pas à bien les caractériser, l’intrigue politique, l’ambiance et l’exposition usurpant la juste place aux quêtes internes des protagonistes et des antagonistes. Les quelques tentatives d’insuffler un peu de chaleur et d’humour (et par la bande, un peu d’humanité) tombent à plat. En revanche, le ton solennel vient ajouter énormément de gravité à l’intrigue, accentuant le sentiment de danger.

Le cinéaste québécois a mentionné en entrevue que sa version de Dune est un peu comme un Star Wars pour adulte, une amusante analogie lorsqu’on sait que Frank Herbert a pensé poursuivre George Lucas dans les années 70 en raison des similitudes entre les deux œuvres. Annoncée officiellement cette semaine, la deuxième partie rattrapera fort probablement quelques manquements dans le worldbuilding et dans la compréhension de la psychée des personnages. En ce sens, Dune donne l’impression d’être encore incomplet. Ceci étant dit, il serait injuste de laisser ces carences surplomber les monumentales qualités techniques, esthétiques et artistiques de l'œuvre.

8/10 (Très Bon).

Dune est présentement à l’affiche dans la plupart des salles de cinéma du Québec.

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