Tumgik
#lc486
fallenrazziel · 4 years
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Les Chroniques de Livaï #486 ~ MONDE, JE TE FAIS MES ADIEUX (mai 846) Livaï
L'histoire de Livaï comme vous ne l'avez jamais lue. ​Le personnage le plus populaire de L'Attaque des Titans, le soldat le plus fort de l'humanité… Qui est-il vraiment ? Qu'a-t-il dans le coeur ? Qu'est-ce qui a fait de lui ce qu'il est ? Je me suis mise en devoir de répondre à ces questions en vous livrant ma propre vision de sa vie, de ses pensées, des épreuves qu'il a traversées, ainsi que celles des personnes qui l'ont côtoyé, aimé, admiré, craint, détesté. Si j'essaie le plus possible de respecter le canon, quelques libertés seront prises sur les aspects de sa vie les plus flous. Quelques personnages seront également de mon invention. Livaï, un homme que l'on croit invincible et inatteignable… Est-ce bien sûr ? Jugez-en par vous-mêmes. 
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Je reste les yeux fixés sur ma fenêtre sombre, à attendre quelque chose que j'ignore. Ma chandelle est réduite à un petit tas de cire fumant dans mon bougeoir et je sais que je vais devoir me lever pour en changer. Pas moyen de pioncer cette nuit, ce qui est pas nouveau. Il doit être minuit passée, et je peux penser à rien d'autre qu'à ce qui nous attend dans quelques jours.
C'est crevant de former ces bleus sans aucune base, et je me rends bien compte que je suis une exception ; devenir explorateur sur le tard sans avoir subi l'entraînement standard des cadets est quasiment impossible. Même s'ils y mettent tous de la bonne volonté, je me doute bien qu'ils seront pas d'une grand aide et que la plupart seront bons qu'à servir d'appâts. Mais ils restent confiants malgré tout...
Je sais pas si je le suis. J'aime pas ce que je peux pas contrôler, et je me remets toujours pas de ce coup de salaud, doublé de ce complot contre nous. Je sens que je vais devoir m'apprêter à supporter des tas de morts vaines contre lesquelles je pourrais rien. Mon esprit se prépare déjà à ces moments, et je crispe les poings en songeant que cela a été prévu par tous ceux qui nous ont collés dans cette merde.
J'ai besoin de marcher. Arpenter les couloirs de l'étage me paraît une bonne idée pour essayer d'évacuer le stress. J'me demande si tout le monde dort... Je me lève de mon fauteuil et vais chercher dans mon tiroir une chandelle neuve. Je débarrasse le bougeoir des restes de l'ancienne et plante le bâton dedans. Je fais craquer une allumette et aussitôt, une lumière palpitante se remet à danser sur les murs de la chambre. J'attrape le bougeoir, ouvre la porte et me retrouve dans le corridor.
Il y a personne, évidemment. La nuit venue, ce couloir est souvent tout à moi. J'y patrouille lentement, en faisant le moins de bruit possible, et parfois, je descends me faire un thé. Mais j'en ai pas envie, là... En fait, la solitude du bâtiment endormi me fout le cafard. J'ai besoin de voir quelqu'un, de parler à quelqu'un qui ne soit pas encore un fantôme. J'avance le long du corridor, ma bougie jetant des ombres mouvantes sur les murs, en quête d'un son inhabituel. Il me semble entendre un sanglot étouffé derrière la façade... Je suis pas sûr, je l'imagine peut-être. A tous les coups, ce sont des rats. Tttcchh, ces saletés...
Je fais quelques mètres et m'arrête devant la porte d'Erwin. Le chat attend devant, la tête levée, la queue fouettant l'air doucement. Je sais que ça se fait pas, mais... je pose mon oreille contre le chambranle et écoute attentivement. Il doit dormir, j'entends rien. Allez, autant aller jusqu'au bout. Je jette un oeil dans le trou de la serrure et constate vite qu'il y a un peu de lumière là-dedans. Il dort pas, évidemment. Même si on le voit rarement sur le terrain en ce moment, je sais qu'il a beaucoup à faire de son côté pour tout organiser. Il est allé à Mitras l'autre jour pour demander une audience, mais je crois qu'on l'a même pas reçu... Ces enfoirés... Fallait voir sa gueule pour comprendre que ça tournait vraiment mal pour nous.
Il a peut-être besoin de parler lui aussi... Dis-moi un peu, le chat : je fais quoi, je frappe ? T'as envie de rentrer, toi aussi ? Au point où j'en suis... Oh et puis merde, j'y vais, il aura qu'à me renvoyer s'il veut pas me voir.
Je gratte plus que je ne frappe à la porte, et pousse le battant avec lenteur en laissant mon regard se glisser en premier dans la pièce. Enfin juste après le chat ; il pénètre dans le bureau et se fond tout de suite parmi les ombres. Erwin est assis à sa table, dans un halo de lumière dorée, la tête penchée, sa plume à la main. Il ne m'a même pas entendu, il est trop absorbé. L'unique chandelle qui l'éclaire est à moitié réduite, mais je suppose qu'il en a déjà utilisé un certain nombre. La pièce est saturée de l'odeur de cire chaude, et seul le son de sa plume sur le papier se fait entendre.
Enfin, il lève les yeux vers moi et hoche imperceptiblement la tête pour me saluer. Sa bouche reste une ligne dure et droite et il ne prononce pas un mot. Je dérange ? Si c'est le cas, j'peux m'en aller. Il répond rudement que je peux rester si je veux. Ok, j'apporte un peu de lumière en plus. Je suis pas sûr que tu voies grand chose, là.
J'attrape une chaise et la place à côté de la sienne, à l'autre bout de son grand bureau. Erwin reprend son travail sans plus faire attention à moi pendant un moment. Mais je voudrais qu'il parle, il garde tout pour lui... Ah, au fait, t'es allé à Mitras pour quoi faire au juste ? Il me dit - toujours en écrivant - qu'il espérait négocier un délai supplémentaire pour la préparation de la reconquête, mais qu'il est resté sur le pas de la porte, comme un malpropre. Quand je pense qu'ils t'ont porté aux nues au lendemain de l'évacuation, ces faux-culs... Y a vraiment quelqu'un qui nous en veut, tu devines pas qui ? Moi, j'ai une idée, je suis sûr que t'as la même, pas vrai ? Il ne répond rien, mais je sais qu'il pense comme moi, même pas la peine d'en discuter.
Si ça peut nous arranger le coup, je peux aller éplucher quelques gueules, si tu vois ce que je veux dire... J'peux trouver ce connard et le faire couiner... juste un peu, non ? Erwin rétorque que cela n'arrangera certainement pas notre situation et qu'il ne peut de toute façon pas me demander de faire ça. Dommage, j'aurais adoré.
Erwin semble plus disposé à bavarder et me demande comment je m'en sors avec les recrues. Oh, te fais pas d'idée, y a rien de miraculeux dans le lot. Mike dit que je suis trop exigeant mais si on veut les coller face aux mochetés, faut un minimum ! J'espère surtout qu'ils seront disciplinés, qu'ils paniqueront pas face aux titans et suivront les ordres, sinon ça tournera mal. Qu'est-ce que je dis ?... Evidemment que ça tournera mal. Je suppose que t'en es conscient ? Il confirme que oui, mais que les choses doivent suivre leur cours.
Je remarque la grande feuille qu'il garde sous la coude et je la tire un peu pour voir de quoi il s'agit. Je comprends que c'est un plan de formation. Les lignes tracées au crayon ne sont pas très visibles dans cette lumière chiche  alors Erwin prend le temps de m'expliquer ce qu'il a prévu. Apparemment il est pas encore sûr des détails mais l'essentiel y est. Pas de formation de détection à longue distance cette fois, évidemment, ce serait inutile. Le but est de rester au plus près des réfugiés. Avancer en ligne droite, en rangs serrés ; les civils au centre, les explorateurs sur les flancs. Le flanc droit sera le plus exposé comme d'habitude. Je suppose que ce sera mon poste ? Il approuve, mais me précise que mon travail sera de patrouiller du nord au sud le long des flancs afin de m'assurer que personne n'a besoin d'aide. Aucun titan ne doit traverser les lignes de protection, sinon nos protégés seront sans défense. On sera assez ? Trois-cents explorateurs, en comptant les non-militaires, seront harnachés avec le dispositif et serviront de rempart. Trois lignes de défense qui devront rester en place, et mon escouade qui se déplacera périodiquement pour s'adapter aux difficultés qui se présenteront. Je vois... Mike sera où ? Erwin remonte sa plume et m'indique le fleuve. Trois ferries transporteront les civils les moins valides, ainsi que du matériel de réparation pour le Mur Maria. Les équipes de Mike devront se charger des ferries et s'assurer qu'aucun titan ne veut jouer avec. C'est pour ça que je me tape tout le boulot des entraînements avec les bleus, il est parti s'exercer avec ses hommes sur le fleuve pour être prêt le jour dit. Et la bigleuse ? Encore une fois, la plume se déplace et Erwin me montre le centre de la formation, où Hanji jouera le rôle de vigie et de relais pour transmettre les ordres. Et toi, tu seras en tête, je suppose.
J'arrive pas à réaliser combien de monde ça représente. Plusieurs milliers, j'imagine. Bouger cette masse humaine de façon disciplinée me paraît impossible... Erwin précise qu'il compte partir à la nuit par pleine lune afin de limiter les risques. Chaque civil portera une torche afin que les explorateurs puissent y voir un minimum ; le cas échéant, la lune sera une alliée pour nous. Pas bête. Faudra t'assurer que le temps reste clair. On pourrait prendre de l'avance sur l'ennemi, et atteindre le... Erwin me montre un lieu marqué d'une croix. Le premier avant-poste que tu as choisi. Un bourg assez grand, j'espère. Il répond qu'il est impossible de loger tout le monde dans des bâtiments mais que de toute façon leur repos sera de courte durée, les civils devront accepter de marcher aussi de jour. Nous aussi, on va devoir prendre des forces, sans ça, on s'écroulera de fatigue... Erwin a prévu un roulement des combattants afin d'économiser les énergies. Bien... j'ai l'impression que personne peut pondre mieux que ce que tu proposes, alors... y a plus qu'à tenter le coup... Bordel, j'ai mal au crâne, là...
Je le laisse écrire en silence pendant quelques minutes quand un détail me revient. Je l'informe qu'il nous faut vite du nouveau matériel. Les dispositifs des civils, enfin des nouveaux explorateurs, sont plutôt nazes, on voit bien qu'ils tiendront pas en expédition. C'est un coup à se tuer tout seul, comme un con. T'as des nouvelles de ton pote de la guilde ? Il confirme qu'une commande a été passée en début de mois dès l'annonce royale - eh ben, t'as pas perdu de temps - mais il ignore si Maja tiendra le délai, il est plutôt court pour du matériel de qualité. C'est pour ça que tu voulais du temps supplémentaire... Le problème, c'est qu'on l'a pas.
Il hoche la tête en posant sa plume et se met à lire sans plus faire attention à moi. Je peux pas le juger comme je le ferais pour n'importe qui d'autre ; personne n'est à sa place. J'ai foi en lui, mais je ne peux pas savoir ce qu'il a dans la tête à présent. C'est comme sauter dans le vide. La décision qu'il a prise était la meilleure mais elle va provoquer une catastrophe, c'est inévitable. Au moins il fait quelque chose, il essaie de faire en sorte que les choses changent. Tous ces civils veulent le suivre au combat, pouvait-il décemment tourner le dos et faire comme s'il ne voyait rien ? Moi, je peux le faire. Mike, Hanji, nous pouvons tous ignorer la situation. Mais pas lui. On a beau l'épauler du mieux qu'on peut, il reste seul face à tout ça.
J'aimerais l'aider plus, mais je sais pas comment. Tout ce que je peux faire, c'est rapprocher ma chandelle de lui pour qu'elle lui donne plus de lumière. Je regarde son profil dans la pénombre et distingue bien ses traits tirés, ses yeux plissés par le manque de sommeil, son poing serré sur le parchemin... Il ira pas dormir tant qu'il aura pas terminé, mais moi je commence à être fatigué. Ma tête pèse une tonne... Alors je la pose sur mon bras et fixe la flamme de la chandelle qui fond lentement entre mes doigts. Il n'en reste déjà plus qu'un petit bout... Le temps file à une vitesse... et on en aurait tellement besoin...
Je ferme les yeux quelques secondes et je sens le sommeil tenter de me choper sans crier gare. C'est la main d'Erwin frôlant mes cheveux qui me réveille en sursaut. Je l'entends me dire d'aller me coucher si je suis crevé, mais il est hors de question que j'aille me pieuter tant qu'il veille. Erwin, tu devrais aller dormir. On a besoin d'un leader en bon état. Il répond qu'il a encore deux pages à relire, et qu'ensuite il songera à se reposer. Ok, j'irai aussi quand tu auras fini. Ma bougie est presque consumée, et la tienne va pas tarder à s'éteindre ; tu seras obligé.
Je l'entends produire ce petit rire étouffé, contenu dans sa poitrine, dont il a le secret, et ça me réconforte un peu. Il a encore de l'espoir, alors je peux aussi essayer d'en avoir. Il reste quelques minutes de cire. Je me demande alors comment je vais réussir à marcher dans le couloir jusqu'à ma chambre sans lumière. Merde, j'avais pas pensé à ça ! Et voilà que la chandelle d'Erwin s'éteint ! Il doit me rester encore un peu de temps avec la mienne, assez pour retourner à ma piaule, je crois. Mais je veux quand même être sûr.
Erwin, tu promets que tu vas te coucher ?
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