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Interview de Rubin Steiner*
* Entretien réalisé dans le cadre du Festival Easter in the Sun, Édition 2017 (Nice)
Le moment tant espéré est arrivé : notre Président des Artistes EITS 2017 va te parler, va nous parler... Lisons cela, et... en marche (arrière) !
Quel est ton premier (ou plus ancien) souvenir musical ?
Vu que je réponds toujours la même chose à cette question, je ne vais pas te parler de ce 45 tours vert transparent que ma grand-mère m'avait rapporté de son travail, ce 45t de Barry Manilow que j'ai beaucoup écouté dans mon mange-disque en 1978 (Copacabana, si si, tu connais). Je vais plutôt te parler d'un 33 tours d'Anne Sylvestre, qui reste encore aujourd'hui quelqu'un que j'aime beaucoup. L'avantage avec Anne Sylvestre, c'est que tu peux écouter ses chansons pour enfant quand tu es enfant, et ses chansons pour adultes quand tu es adulte. Et cette sensation mêlée de joie et de profonde tristesse s'opère à tous les âges. Je crois que cette femme est formidable, ça me fait plaisir de parler d'elle ici.
Un artiste ou un disque t'a-t-il donné l'envie de te lancer en solo ?
Là c'est un peu plus compliqué que ça, parce que ce n'est pas à proprement parler un artiste ou un disque qui m'a donné envie de faire de la musique tout seul, mais plutôt l'arrivée chez moi d'un ordinateur (au milieu des années 90). En y repensant, c'était quand même un sacré truc les ordinateurs. Pour moi c'était y a pas si longtemps que ça, j'étais à la fac, j'étais barman, j'organisais des concerts, je jouais dans un groupe, je faisais de la radio et un fanzine, et tout ça sans jamais avoir besoin d'un ordinateur. J'habitais en coloc' et c'est dans ces appartements que se faisaient les choses, avec des ciseaux, une machine à écrire, un 4 pistes cassette et tous les instruments qu'on pouvait se faire prêter. Mes seuls potes qui avaient des ordinateurs alors ont fait ingénieur-informaticien par la suite. C'était quelquechose d'assez... spécial. C'est dingue quand on y repense. Et je ne te parle même pas d'internet, dont j'ignorais l'existence avant 1999/2000. Quand j'ai eu cet ordinateur, en 1997 ou 1998 je crois, je ne savais vraiment pas quoi en faire, sinon pouvoir m'enregistrer avec un petit logiciel (Soundforge dans mon souvenir). J'ai fait mon premier album avec cet ordinateur la première semaine où je l'ai eu. Et je ne voyais pas à quoi pouvait servir d'autre un PC. Ensuite tout a été très vite, en même pas deux ans cette machine est devenue une chose indispensable à ma vie. Rien que d'y repenser ça me fout le vertige. Comme beaucoup de musiciens, l'arrivée des PC et des logiciels de son ont été une sorte de miracle. Tout était « gratuit » (les pirates existaient déjà) et pour un étudiant fauché comme moi, c'était une porte qui s'ouvrait sur un horizon de possibles. Après, j'étais avant tout un furieux mélomane, et ce n'est pas un disque qui m'a donné envie de faire de la musique, mais plutôt une centaine. Si tu fouilles bien sur le net, tu tomberas peut-être sur un blog que je faisais il y a 10 ans, sur lequel je m'étais amusé à mettre les playlists de mes émissions de radio et mon fanzine de l'époque. Tu verras ce que j'aimais, peut-être que ça va te faire flipper.
Quel matériel utilises-tu sur scène ? Es-tu un amateur de vintage, un « geek » ?
Alors non, je ne suis pas du tout un geek ni un amateur de vintage : tout simplement parce que je n'ai pas les moyens financiers. Et puis sur scène, ça change tout le temps. Au début des années 2000 j'avais des MPC, après j'ai utilisé un laptop, des synthés, j'ai repris ma guitare (j'ai toujours eu des amis sur scène avec moi, à la basse, à la batterie etc.), et aujourd'hui, pour ce nouvel album, j'ai juste un laptop, des contrôleurs et un clavier midi, et je fais en même temps la musique et de la vidéo. Sinon je joue de la basse dans Drame, et tu vas être content il y a des synthés vintage ! Un Juno 60, un MS10, un Polyvoks, une 808 : tes lecteurs geeks vont être aux anges. Sinon la batterie est une batterie tout à fait normale. Une simple batterie quoi. Et ma basse coûte 150 euros mais elle est belle. Malgré tout, parce que je sens que tu as envie que je te parle de matos, je prépare une autre forme de live solo qui se prête à l'improvisation avec une TR808, un JEN, un Poly800 et quelques autres trucs D-I-Y.
Qu'as-tu pensé de l'accueil du public ? Modules-tu ton live en fonction de lui ?
Cette soirée était super, le lieu magique et l'organisation parfaite. Contrairement à Drame qui est un groupe de musique très libre et à moitié improvisé, quand je fais du Rubin Steiner, et surtout sur ce live-là, je ne « module » pas en fonction du public. C'est très écrit, déjà du fait des vidéos, et mes impros ne sortent pas des moments prévus pour ça. En revanche, d'un live sur l'autre, je prépare des choses différentes en amont. Notamment sur les vidéos, et le texte projeté comme tu as pu le voir. C'est un spectacle, en fait. Même si ça danse comme en club.
Que nous conseillerais-tu d'écouter en ce moment, en électro ou dans d'autres styles ?
J'arrive jamais à répondre à cette question... je suis en train d'écouter Stereolab en ce moment-même, comme toujours depuis quasiment 25 ans. Sinon j'écoute beaucoup de musique que je joue quand je fais le DJ. Pareil, si tu fouilles sur le net tu trouveras des playlists et des mixtapes je pense (genre sur mixcloud). Sinon j'écoute du jazz et là je te conseillerai rien, sinon d'en écouter. Je me surprends à ne plus aimer le hip-hop, je ne me l'explique pas. Ni le rock en général. Trop de musique partout tout le temps. Si j'ai le courage je te ferai une playlist de ce que j'ai écouté et aimé ces derniers temps. Là tout de suite j'ai pas le courage.
Es-tu amateur de livres ? Que lis-tu en ce moment ?
Alors là oui ! En réalité, je préfère les livres aux disques, et je lis plus que je n'écoute de la musique. J'ai particulièrement accroché sur "Les Premiers" de XabiMolia, et tous les romans de Tristan Garcia (pour parler d'auteurs jeunes et français). Comme tout le monde j'ai adoré les Vernon Subutex et City On Fire, et pour faire rapide, je suis un grand fan de Tom Robbins, de Philip K.Dick et je suis assez fasciné par David Foster Wallace, Thomas Pynchon et Antoine Volodine, entre autres. Et puis, dans le désordre, je suis assez friand des livres de Claro, Douglas Coupland, Joy Sorman, Hubert Selby, Donna Tartt, Alain Damasio, Emmanuel Carrère... J'ai même relu du Kerouac et du Burroughs récemment. Bref, je pourrais t'en parler des heures. J'aime bien les gros livres en général.
Quelles sont tes prochaines dates de concert ?
Aïe je les ai pas en tête, le mieux c'est de me pister sur Facebook !
As-tu un souvenir marquant de concert à nous raconter ?
Le concert le plus dingue pour moi, c'était il y a pas loin de dix ans. IlhanErsahin, un saxophoniste fabuleux, m'a invité pour jouer à Istanbul, avec lui et un de ses groupes I Led 3 Lives. J'arrive donc à Istanbul les mains dans les poches et je me retrouve dans une loge avec lui, Juini Booth (le bassiste du Sun Ra Orchestra) et Kenny Wollesen (batteur qui joue avec John Zorn, Tom Waits, Bill Frisell entre autres). On doit jouer deux sets d'une heure complètement improvisés, et Juini n'a pas envie de répéter : je me suis donc retrouvé pendant deux heures, une guitare de location entre les mains, avec ces trois monstres sur la scène du Babylon devant une salle comble. Je n'ai aucun souvenir de ce qui s'est passé, une sorte d'hallucination totale, mais je crois que c'était assez génial. Ah oui : je ne suis pas à proprement parler un « bon » guitariste. C'est rien de le dire. Avec eux j'ai aussi fait un workshop et un concert dirigé par Butch Morris, avec une dizaine des meilleurs musiciens de jazz du monde. Je ne sais toujours pas comment je me suis retrouvé là-dedans avec ma guitare, moi qui déteste cet instrument. C'était complètement dingue. Je vous conseille de taper Butch Morris et IlhanErsahin dans Google.
Merci, Président !
Propos recueillis par Arnauld H.
Photo : Julien Griffaud
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