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“En écho” Semaine 4
Lundi 20 avril … vendredi 24 avril 2019
Nous entamons, un peu fatiguées, la dernière semaine d’intervention pour trois des quatre unités ou nous nous rendons depuis janvier. La période est dense pour chacune et je ressens pour ma part un peu d’appréhension à ne pas avoir assez de matière pour notre édition à venir.
Tout est passé si vite. En arrivant je réalise tout cela, qu'il va falloir faire une synthèse, dire au revoir. J'ai la sensation d'être un peu perdue. Quelque chose qui commence et fini à la fois. Sentiment paradoxal.
L’enjeu pour cette semaine, alors que nous connaissons maintenant un peu mieux les participant.e.s, est de s’adapter à chacun.e et d’être à l’écoute de leurs envies, besoins et attentes. Suite aux trois séances précédentes, nous envisageons avec Elvire de travailler en binôme avec certains participant.e.s que nous pensons intéressé.e.s par un échange autour de ce que nous avons produit jusque-là comme images avec eux et comme textes toutes les deux. Nous aimerions avoir le point de vue des soigné.e.s sur notre démarche et la manière dont ils et elles voudraient que l’on restitue le travail réalisé. Pour plusieurs d’entre eux et elles, cette édition pourrait permettre de faire mieux connaître à l’entourage comment se déroule le moment de la dialyse, les lieux, les machines et les personnes que cela touche.
Avec les personnes, nous prenons le temps de regarder les images, d'échanger sur l'expérience. Nous parlons de la publication qui émergerait de ce travail et tentons de savoir si les personnes voudraient faire apparaitre quelque chose de spécifique sur leur expérience de la dialyse, quelque chose qu'elles seules puissent dire. Dans l'échange plusieurs personnes nous disent être satisfaites d'être en dialyse, sans cela, elles ne seraient peut-être plus là pour échanger....
Afin de compléter le travail photographique réalisé jusque-là autour des espaces, des relations humaines et des machines, la dernière séance va être l’occasion de porter un regard sur les patients. Dès l’élaboration du projet, je souhaitais petit à petit, inviter les participant.e.s à tourner le miroir vers eux et vers elles. Au regard de ce que nous avons construit ensemble, des réticences de certain.e.s à apparaître sur l��image et de ce que l’utilisation du miroir a provoqué, j’ai orienté ma proposition sur la construction d’un portrait en creux, en référence notamment au travail de Michel Séméniako réalisé avec des personnes incarcérées (https://www.michel-semeniako.com/images-negociees/). C’est un des patients de l’unité de Faches qui a inspiré cette idée de portrait en creux. De semaine en semaine, il ramène de plus en plus d’affaires de chez lui pour améliorer le temps de la dialyse.
Je propose à certaines personnes de jouer à faire voyager dans le temps un objet qu'elle ont emmené avec elle : ce qu'il est, d'où il vient et où il va ? J'écoute les personnes me raconter l'histoire de cet objet, livre, lunettes, plaid etc. Je les perçois parfois être comme en amitié profonde avec celui-ci, et à plusieurs reprises, je surprends l'objet emmener lui-même la personne à voyager dans sa propre histoire avec joie et confiance.
Les objets emportés vont aussi dépendre de la manière dont chacun.e vit le moment de la dialyse, entre ceux qui ont besoin de dormir et ceux qui, au contraire, ne peuvent pas fermer un œil. D'autres nous font part ce que cette expérience artistique leur a apporté : un échange authentique, une activité dépaysante, une opportunité de raconter ce qu'ils vivent ...
Et puis, il y a ceux qui préfèrent la télévision, le livre papier au support numérique ou encore celles et ceux qui vivent la dialyse comme un moment de convivialité et n’emportent avec eux que leur sourire.
Nous mettons les soignants à contribution et leur proposons l'expérience de prendre le miroir. Pour certains, cette manœuvre est difficile : s'exprimer, montrer, n'est pas quelque chose d'habituel, tandis que pour d'autres, l'envie d'échanger, le besoin de dire et de montrer est bien là. Alors qu'une personne dialysée nous expliquait quelque temps auparavant, qu'elle n'acceptait les soins que pour faire plaisir à sa famille, le soignant dans notre échange nous parle de la difficulté pour eux, infirmier.e.s de devoir faire avec la frustration de ne pas pouvoir aider parfois. Dans notre proposition de prendre un miroir, celui-ci se propose d'en utiliser deux et sans rien savoir de notre échange précédent, se dirige vers cette même personne et propose de juxtaposer un miroir reflétant l'extérieur et un autre reflétant la machine.
La réalisation des photographies est l’occasion de jouer sur la composition, sur l’association de couleurs et de matières. Car pour certain.e.s, ce qui est ramené de chez soi ne sert pas tant à occuper le temps, qu’à améliorer le moment passé, souvent à discuter avec son voisin ou sa voisine de fauteuil. Le matériel de base fourni par l’unité est complété par une couverture, un coussin, un drap personnel, contribuant à personnaliser chaque espace investi par les soignés. C'est alors à la croisée de tous ces entre-deux, la photo et les mots, le soigné-le soignant, le dialysé et la machine, le confinement de la pièce et le paysage extérieur à perte de vue, comme à la croisée des chemins, que deux mots résonnent dans ma tête : Pour Qui ? Comme si cette question était devenue le pivot de tout ce qui se jouait à cet instant.
C’est émouvant de se dire qu’on ne se reverra peut-être pas, qu’il s’agissait de la dernière rencontre. Mais la perspective de l’élaboration d’un objet qui sera la trace de cette expérience commune me rassure. J’espère que nous parviendrons à réaliser une édition à la hauteur de nos attentes et surtout, qu’elle se fera l’écho de cette belle expérience commune.
La question restera plusieurs jours dans ma tête et ce n'est finalement que dans l'écho d'un souvenir de cette semaine si particulière, que la réponse m'apparaît : lors d'un temps avec une patiente, je lui fais tirer une carte parmi d'autres. Sur chacune d'elle figure une citation. Sur la sienne : "Deviens ce que tu es". Elle découvre cette carte qui semble résonner pour elle très précisément. Alors que je l'écoute me raconter qui elle est réellement, alors que je l'écoute se raconter, je perçois en moi une émotion très profonde, un mouvement intérieur comme venu d'un autre temps, d'un autre monde. Il était pourtant bien là, réel, en moi, comme dansant au rythme de ma narratrice. Je comprends alors que cet écho mouvant s'appelle : le Vivant. Le Vivant en elle, en moi, et en chacun de nous.
#projet#Photographie#santelys#culturesanté#hautsdefrance#image#sophrologie#hortensesoichet#elvireprevot#enecho
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Fin de résidence à LADAPT de Cambrai. Crash test du dernier ORNI réalisé permettant aux enfants de transporter un adulte. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Tuning the tunnel
cithare équipée d’un haut parleur vibratoire
Le tunnel est un couloir de transit incontournable de l’IME La Pépinière à Loos. En y installant au beau milieu mon bureau, j'ai fait de ce lieu à l'acoustique tamisée un studio d'expérimentation sonore/salon d'écoute durant une semaine. J'y ai accroché divers objets évocateurs que j’ai “mis enceintes" en leur apposant des haut-parleurs vibratoires, parmi eux une cithare, un grand saladier transparent, un rocher en polystyrène de vivarium et une grande plaque de carton plume noire. Chaque objet imprime aux sons qui le traversent sa qualité de résonance propre.
Je diffuse essentiellement des compositions sonores appelant à une expérience d’écoute profonde, avec un accent mis sur la matière, l’espace et la superposition de textures sonores réelles et de synthèse.
Au gré des passages et de la curiosité du public sont nées improvisations, petites séances d'écoute, rencontres et discussions.
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“En écho” / Semaine 3
Lundi 25 mars … vendredi 29 mars 2019
A mon arrivée, il me semble que le voyage débuté les semaines précédentes se poursuit là où il s’était arrêté la dernière fois, dès mon premier pas dans la salle. Le printemps nous montre ses premiers rayons et nous sommes accueillies par les sourires des participant.e.s. Nous profitons tous à notre façon de ces élans chaleureux. Nous ne sommes déjà plus au creux de l'hiver. Le temps passe.
Pour le troisième mois consécutif, nous revoyons les mêmes personnes et les liens commencent à se tisser entre eux et nous. On se souvient des prénoms, on remet les photos réalisées la fois précédente et on demande des nouvelles d’elles, d’eux et de leurs proches. On commence à connaître les habitudes des un.e.s et des autres : Jacques ne dort pas durant la séance, il est toujours content de voir du monde ; Philippe et Madeleine aiment bien participer à deux, c’est un binôme qui fonctionne bien ; Jocelyne ne peut pas tenir longtemps le miroir, on réalise généralement les images avec l’aide de Sandrine, Catherine et/ ou Elvire qui prêtent leurs mains ; Bénédicte nous demande à chaque fois de faire des portraits d’elle et des photos souvenir avec son infirmière préférée, etc.
Ensemble, nous regardons les photos réalisées, celles d'autres patient.e.s, dans les autres unités : « C'est intéressant, ils n'ont pas les mêmes machines que nous » ; « Moi j'ai appris à me servir de la mienne, mais celle-ci, je ne saurais pas comment faire » ; « Pour moi c'est trop compliqué tout ça ».
Etre en dialyse, c'est aussi avoir toujours besoin d'un.e infirmier.e, de soin : « On ne peut partir en vacances, qu’à proximité d'un centre, alors il faut s’organiser ». La discussion s'installe entre deux patient.e.s, parfois avec un infirmier en plus. Et des sourires.
Pour cette troisième semaine d'intervention, le travail photographique s'est concentré sur le rapport à la machine et la manière dont cet outil est en capacité de compenser une défaillance du corps. Dès les premiers échanges, j'ai été surprise de constater à quel point le sujet invite les participant.e.s à parler. Chacun.e, à leur manière, ils et elles développent un savoir et un savoir-faire en lien avec ce rein artificiel leur permettant d'aller mieux. En échangeant sur le fonctionnement de la machine, sur leur compréhension de son système, nous avons, avec chacun.e, mis en évidence par l’image ce qui semble le plus important à leurs yeux dans son fonctionnement et son lien à leur corps.
Les sourires emplissant les visages tombent à point, puisque je propose durant cette semaine, d'aller au contact d'un sourire "intérieur" que les participant.e.s porteraient en eux. Chacun.e évoque alors le sourire qui le porte, l'inspire, le dynamise : un neveu, une maman, un ami cher. Chaque évocation s'enchaîne avec des anecdotes :
Une partie de jardinage avec les petits enfants… d'ailleurs c'est bientôt le printemps… il sera bientôt temps de planter ;
Le séjour d'un ami au domicile… d'ailleurs, il sera là aussi ce soir…
Un parent qui manque… d'ailleurs chaque jour qui passe rapproche des retrouvailles prévues… Chaque anecdote contacte le temps à venir. L'horizon d'un moment de tranquillité, de joie ou de réconfort. Moment d'échanges, de relations, autre que celle à la machine.
Dans l’unité de Faches visitée le lundi, les patient.e.s sont plutôt autonomes et souvent en capacité d’allumer la machine et d’enregistrer les informations demandées comme le nom, le poids et combien ils doivent perdre durant une séance. Pour Lynda, qui a suivi une formation à l’hôpital afin d’être dialysée en unité, elle considère que cette machine lui permet de rester en vie mais en même temps, elle symbolise le mal dont elle souffre, l’empêchant de pouvoir vivre sa jeunesse comme les autres.
Pamela, quant à elle, tient à montrer le lien entre son bras douloureux et la machine : elle centre le miroir sur cette partie de son corps afin qu’elle apparaisse au mieux à l’image.
Les patient.e.s des autres unités sont moins à l’aise avec la machine, mais décrivent tout de même la fonction de ses différentes parties et pourquoi la taille du rein artificiel peut différer suivant les patient.e.s. Les miroirs vont donc être orientés vers ce rein artificiel ou encore vers la partie centrale de la machine permettant le mouvement du sang.
Une relation entre eux et nous commencent à s'inscrire. Une personne me demande, comme on évoque un souvenir du bon vieux temps, de reparler des séances que l'on a fait précédemment, des évocations et images mentales qui lui sont apparues et qu'elle m'a partagées. En échangeant avec chacun.e, je perçois l'émotion qui est là bien réelle, nichée au creux des corps et qui se cherche un chemin. Mais comment la laisser circuler ? Les crampes, démangeaisons, douleurs prennent souvent beaucoup de place. Alors il ne reste plus beaucoup d'espace pour ces émotions-là… Indirectement, elles convoquent aussi un sentiment de vulnérabilité.
Sans que cela soit voulu, s'intéresser à ce sujet m'a renvoyée à des préoccupations que j'ai dans le cadre d'autres projets récents sur les savoir-faire au travail et sur la relation entre le corps et la machine. Ici, le miroir permet de davantage fragmenter, isoler et/ou mettre en évidence un détail. L’image est volontairement moins lisible d’emblée, les couches se superposent car il s’agit de leur regard et du mien qui se concentrent dans la même image.
Enrhumée depuis le début de la semaine, j'ai du mal à me concentrer, a être complètement présente. Le masque que je porte me semble m'interdire de parler. Moi qui ai pour outil principal ma voix, ce sont là mes oreilles et mes yeux qui prennent le relais. A défaut de pouvoir émettre, j'enregistre à ma façon, les sons, les mouvements, les mots, les corps. Et je fais face à mon propre sentiment de vulnérabilité. Je devine que pour les soignants, le contact avec cette sensation est constant, et en même temps je perçois aussi chez eux une forme de "tenacité" : rencontrer l’émotion, la douleur de l’autre et tenter tout de même un geste technique, qui éventuellement soulagerait ; voir le sens de son métier constamment réévalué, dépouillé et pourtant être là coûte que coûte.
Nous avons pris nos repères, nous connaissons les lieux et certain.e.s patient.e.s plus timides qu'on sentait jusque-là moins sensibles à nos propositions, rejoignent également le projet. Mais, a contrario, lorsque les personnes changent d'horaires et que d'autres que nous n’avions jamais vues arrivent, ce fragile équilibre est mis en péril. Pourtant, il s'agit bien du quotidien des unités de dialyse : un.e patient.e quitte le centre pour rejoindre l'hôpital, un.e autre décale sa séance au matin en raison d’un rendez-vous médical et voilà que la moitié de notre groupe difficilement constitué en deux séances est disséminé. L’arrivée de nouvelles personnes nécessiterait de reprendre le travail au début. De mon côté, je sens que l’expérience, malgré sa richesse et son intensité, commence à me peser moralement : je ne suis pas en capacité de travailler sur des temporalités différentes en reprenant le projet à son commencement, nécessitant d’expliquer de nouveau le contexte, qui nous sommes et pourquoi nous faisons cette proposition de collaboration. Avec regret, je n’irai pas voir ces nouvelles personnes, je n’en ai pas la force.
Certains patient.e.s cherchent à comprendre notre proposition, le projet. Nous évoquons avec eux la finalité, l'idée que ces images seront vues par d'autres personnes de l'extérieur. Une personne qui au départ nous avait présenté ses photos d’enfance et de famille, nous avait demandé la semaine précédente de faire son portrait. Cette semaine, elle demande à ce que l'on se joigne à elle sur la photo : peut-être s’agit-il pour elle d'inscrire notre relation naissante dans le réel, mais j’y vois surtout le témoignage d'une confiance, d'une envie de créer une empreinte dans le présent, et aussi d'investir une histoire personnelle et collective. Sa proposition, la façon dont elle se saisit de notre présence pour faire circuler des images du passé et en créer de nouvelles, rappelle à ma mémoire une phrase glanée il y a très longtemps, et dont j'ai oublié l'origine: « Si tu n’es pas toi : qui ? Si tu n’es pas ici : où ? Si tu n’es pas maintenant : quand ? ».
#projet#Photographie#santelys#culturesanté#hautsdefrance#image#sophrologie#hortensesoichet#elvireprevot#enecho
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“En écho” / Semaine 1
Lundi 21 janvier ... vendredi 25 janvier 2019
“En écho” est un projet de sensibilisation à l’art et à la création imaginé par Elvire Prévot, sophrologue et Hortense Soichet, artiste photographe, à destination de personnes dialysées auprès de l’association Santélys.
Ce projet s’intègre dans le programme Culture-Santé, porté conjointement par l’ARS et la DRAC hauts-de-France.
Arrivée au centre, mon coeur bat : combien seront-ils, qui seront-ils ? Notre arrivée dans ces lieux sera-t-elle vécue comme quelque chose d'agréable, d'opportun ?
Ni vraiment l'hôpital, ni la maison, le centre de dialyse est un lieu à part, un "entre-deux".
Au fur et à mesure des visites, nous nous présentons, allons à la rencontre de chacun : " avez-vous envie d'échanger ?". Parfois les réponses sont négatives. La dialyse est un moment éprouvant. Corps contraints par les machines, immobilité forcée. Pendant plusieurs heures, plusieurs jours par semaine.
Comment envisager un projet photographique participatif avec un groupe de patients qui ne sont pas en capacité de tenir un appareil photographique ? Comment faire en partie abstraction du lieu dans lequel nous nous trouvons ?
Nous venons perturber le rituel du soin. Parfois pour le plaisir de certains et parfois aussi, créant de l'inconfort pour d'autres. Par nos postures, la teneur et la vitesse de nos mouvements, nous tentons de créer un espace "entre-deux" : rentrer en contact sans intruser.
En écho est la proposition que nous avons construite avec Elvire. Notre travail en binôme est fondé sur un dialogue entre sophrologie et photographie se présentant comme un voyage d’une discipline à l’autre. A tour de rôle, nous allons à la rencontre de chacune et chacun pour faire connaissance, dialoguer et proposer un temps d’immersion dans l’image.
Quelques mots s'échangent. Et à nouveau, il nous faut trouver la distance juste : trouver le ton de voix, le rythme qui viendra affirmer nos présences mutuelles, la réalité de notre échange, mais aussi préserver la quiétude et l'espace de silence des autres.
Si Elvire invite à un voyage dans l’imaginaire, de mon côté, j’utilise le miroir pour se projeter dans l’image et comme alternative à l’appareil photographique. L’enjeu est d’expérimenter avec chacun le fait de poser un regard sur ce qui se passe autour d’eux.
La discussion s'installe, ma voix s'ajuste à la personne, trouve son tempo. Au travers de l'enthousiasme, je perçois souvent de l'inquiétude. Pour ce que l'on va faire ensemble mais aussi pour l'avenir en général. Arrimés aux machines, les corps sont en position de vulnérabilité et il est nécessaire de permettre aux personnes de découvrir, redécouvrir un ancrage bien à eux, solide et de confiance. Je fais l'invitation à tourner le regard sur ce qui se passe en eux, mais ce n'est pas simple lorsque la douleur et l'inconfort, dues a la dialyse, se sont fait une place au creux du corps. Comment créer l'envie d'aller voir ce qui est là, d'aller voir si autre chose que toutes ces tensions existe ?
Durant cette première semaine d’intervention, j’ai proposé de porter d’abord notre attention sur l’extérieur, sur ce qu’on voit du dehors depuis le dedans. Si dans certains centres, de grandes baies vitrées ont permis de faire pénétrer la végétation dans le lieu par le biais du miroir, dans d’autres, le positionnement des lits et l’agencement des pièces n’a permis de n’enregistrer qu’un fragment de paysage. Les compositions qui en découlent sont parfois très surprenantes, le miroir disparaissant au profit d’une juxtaposition de plans troublant la lecture de l’image.
En partance d'une image, d'un mot, ou de quelques respirations le voyage débute. D'inspiration en expiration, de focalisation en défocalisation, autant d'aller-retour, qui finissent par créer comme une ondulation, un bercement. Au rythme du patient, je propose d'imaginer, d'associer, de ressentir. Des fenêtres s'ouvrent et des chemins se tracent.
D’un point de vue technique, les premiers essais m’ont conduit à choisir un petit téléobjectif (70 mm) et un format carré renforçant l’idée d’une image plus intimiste, un peu enfermée sur elle-même. Quant au cadrage, j’ai cherché rapidement à trouver ma place entre le miroir et le participant : comment m’effacer un peu et leur laisser la main sur certains choix ? Pour chaque participant, j’ai montré mes images une première fois par le biais de l’écran de contrôle de mon appareil pour qu’ils puissent réorienter si nécessaire le miroir en fonction de ce qu’ils voulaient montrer. Puis, je suis retournée les voir une seconde fois avec les photographies sur mon ordinateur pour que nous choisissions ensemble celles qui correspondraient au mieux à leur intention de départ.
A bord de cet "ici et maintenant", ce temps de soin qu'est la dialyse, les horizons du passé et ceux du futur se découvrent et se contemplent. Être là et ailleurs, en même temps.
L’expérience de partage, d’échange avec Elvire et chacun est un mode de collaboration jamais expérimenté jusque-là et il m’oblige à réinterroger la place de chacun, de veiller à leur laisser la possibilité d’intervenir, malgré tout.
#projet#photography#santelys#culturesanté#hautsdefrance#image#sophrologie#hortensesoichet#elvireprevot#enecho
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“En écho” Semaine 2
Lundi 18 février ... vendredi 22 février 2019
Trois semaines se sont écoulées depuis notre dernière venue, le temps de prendre un peu de recul, d'échanger entre nous sur ces premières rencontres et de regarder les photographies produites.
Je retourne dans les centres avec cette fois-ci, une sorte d'excitation. Revoir les personnes rencontrées lors de la première séance est un vrai plaisir. Quelque chose se dit au creux de mon ventre, mais quoi ? J'ai du mal encore à l'identifier. Alors que je retrouve les personnes une à une, je comprends que ce que je ressens est une émotion très intime. Elle est là, présente, comme si elle venait témoigner et dire quelque chose de notre première rencontre : une forme de profondeur, tendresse, envers les patient·e·s et toutes les personnes impliquées dans le projet : Hortense, le personnel soignant, les coordinatrices/partenaires du projet.
Nous retrouvons chaque participant·e avec enthousiasme et commençons à discuter à partir des photographies réalisées durant la première semaine et apportées sous la forme de petits tirages. Ils permettent de montrer une sélection des images produites et de remettre à chacun·e les photographies réalisées ensemble. Ces images sont l’occasion de faire le lien entre les différentes unités de dialyse dans lesquelles nous intervenons et d’entamer plus aisément la conversation. Pour cette seconde semaine d'intervention, je propose qu'on s'intéresse plus particulièrement à la présence de l'autre et à la manière dont il fait lien entre soi et l'extérieur de l'unité de dialyse. Avec chaque participant·e, nous déterminons ensemble la personne ou la situation qui représenterait au mieux ce lien entre l’intérieur et l’extérieur.
Cette semaine, le voyage se fait au travers des 5 sens : Ces sens qui nous mettent en lien avec nous-même et avec le monde. Lors des échanges, je me sens familière des patient·e·s : parfois grâce à leur accueil, mais aussi parfois grâce à leur refus. Pouvoir dire ce que l'on souhaite et ce que l'on ne souhaite pas est le signe d'un certain respect de soi même et de l'autre.
Pour la première participante, cette relation s'incarne dans un geste fort : deux mains qui se tiennent, montrant la confiance entre patiente et soignante.
Pour d'autres patient.es, l'unité de dialyse est un lieu de convivialité au sein duquel elles et ils se retrouvent entre patient.es trois fois par semaine. Nous avons donc construit, à l'aide de miroirs, une image permettant de montrer plusieurs personnes dont les sièges sont installés à proximité.
L'expérience a permis de mettre en place une collaboration entre patient·e·s et d'y faire participer certain·e·s peu motivé·e·s à l'idée d'une participation individuelle. Cette proposition, découlant d'une conversation avec un des participants, a permis d'aller plus loin que la proposition de départ et d'envisager davantage une collaboration plutôt qu'une simple animation photographique.
Tour à tour, au cours de cette exploration qui met en lien avec l'extérieur, ils et elles me parlent à leur façon de leur univers intérieur: pour certain·e·s, c'est "comme un théâtre rempli de personnes qui sont là pour assister à un spectacle et danser ensemble". Ou encore c'est "comme un voyage à la mer, avec le goût du sel, la chaleur du soleil, le vent sur la peau"... Pour d'autre, leur propre souffle devient un "vent de liberté" et le monde "une féérie"... Ils, elles me parlent aussi de leur intérieur à eux, quotidien : une chatte prénommée Julie, des parties de cartes entre amis, des bals à la salle communale... Une personne m'explique être beaucoup plus intéressée par les autres que par elle-même et me révèle ainsi, à sa façon, quelque chose de son "intériorité".
Cette proposition autour de la réalisation d'une image avec une autre personne a donné lieu à des moments très émouvants : une jeune patiente m'a ainsi révélée son attachement à une des infirmières de l'unité. Lors de la prise de vue, la complicité entre les deux jeunes femmes s'est incarnée par un échange de regard d'une telle intensité que j'en ai perdu mes capacités de photographe et je n’ai finalement qu’une seule image à peu près nette.
Lors de ce voyage photographique et sophrologique, les personnes rencontrent souvent la dimension « temporelle » de leur intériorité : "on dirai un souvenir" dit une personne en regardant une photo. Le souvenir aussi de l'atelier de forge de son mari. L’odeur du fer. Souvenir de 50 années de mariage heureux. Souvenir des cures de thalasso revigorantes. Souvenir du sentiment impétueux de la jeunesse. Et surprise d’un sentiment d’éternité : « c’est passé, mais pourtant on n’oublie rien, c’est toujours là dans mon cœur ». Autant de souvenirs comme autant d’ancrages qui permettent aussi d’être en lien avec les êtres chers, le présent et soi-même.
Enfin, lors de notre dernière séance à Mérignies, j'ai été très surprise de constater la demande des patientes et patients d'avoir des photos d'elles et d'eux. Pour l'une d'entre elles, cette relation entre ici et dehors se matérialise aussi par la présence d'Elvire et moi. Nous avons donc co-construit une image où j’apparais en train de photographier la patiente qui tient le miroir dans lequel on me voit la photographier.
Si parfois, au détours d’un contact avec un infirmier, une expression, une intonation, je perçois la profondeur, la richesse ou le tumulte du monde l’autre, il arrive aussi souvent que, comme le retournement d’un miroir, ce soit l’émotion des équipes elles même dans leur accompagnement, leur implication dans leur réflexion et leur engagement pour lutter contre la douleur, qui témoignent de la réalité vécue de chacun et chacune.
Cette deuxième session a été riche mais aussi déroutante : si auprès de certain·e·s patient·e·s, la proposition initiale a été développée comme nous l’avions envisagé, dans d'autres cas, comme évoqué plus haut, les attentes des participant·e·s sont sorties du cadre et ont donné lieu à des expériences très stimulantes. Il n'en reste pas moins qu'il semble important de poursuivre l'expérience en tenant compte davantage des idées, envies ou refus de chacun, en s’inscrivant dans une démarche de co-construction dont le contenu dépendra de ce que l'expérience nous aura inspiré.
A nos côtés, les partenaires du projet nous accompagnent. Chacun cherche à comprendre ce qui est en train de se jouer. De l’extérieur, le dispositif que l'on propose questionne et semble ne marquer que davantage la barrière qui sépare les mondes de chacun·e·s. Certain·e·s observent discrètement, d’autres nous interrogent en demandant « Pourquoi ? » ce dispositif. Je réponds que la réponse ne peut pas se faire par un « parce que » mais que la question elle-même doit être reformulée en « Pour Quoi ? ». Les retours des patients rentrent en écho avec des projets précédents, parfois avec d’autres expériences professionnelles et même personnelles. Au fil des échanges, cette frontière qui semble si imperméable devient une zone de contact, un espace de relation. Un lieu où l’on ne peut que constater la présence d'un lien qui transpire, une volonté, une force, qui tend sans cesse à inclure l’autre et l’extérieur, et qui s’appelle « l’humanité ».
#projet#Photographie#santelys#culturesanté#hautsdefrance#image#sophrologie#hortencesoichet#elvireprevot#encho
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Retour sur la dernière semaine de ma résidence à LADAPT de Cambrai : vues de l’accrochage de la restitution. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Accrochage en cours de la restitution de fin de résidence à LADAPT de Cambrai. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Hier soir, première restitution du travail mené avec les jeunes de LADAPT de Cambrai. Des familles et des professionnels étaient présents en soirée lus des jeunes, un beau moment d’échange et de découverte. Bientôt les images ! #ladaptcambrai #residenceartistique #culturesanté
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ORNI / objet roulant non identifié.Avec une kinésithérapeute, double tricycle pour rester attentif au rythme de l’autre - à suivre... Agence du rire adapté. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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ORNI / objet roulant non identifié.Avec un ergothérapeute, double siège coque roulant avec double chauffeur. Agence du rire adapté. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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OMNI / objet mouvant non identifié.Avec un ergothérapeute, découvertes et petites blagues avec un lève personne. Agence du rire adapt��. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Objet mouvant non identifié - Fantômes volant et horticulture. Agence du rire adapté. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Objet mouvant non identifié - Fantômes volant et horticulture. Agence du rire adapté. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Blagues au sol à la peinture. Agence du rire adapté. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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Blagues au sol à la peinture. Agence du rire adapté. En résidence à LADAPT de Cambrai jusqu’à mi-juillet sur le thème du rire. Programme culture santé (DRAC / ARS) des Hauts-de-France. #ladaptcambrai #culturesanté #residenceartiste
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