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lalogenoiremedia · 4 years ago
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La médecine moderne contre les plantes
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 Au nom du progrĂšs, de l’innovation, de la science, et du profit, les machines et autres nouvelles technologies s’infiltrent dans nos vies Ă  une vitesse folle.  Elles modifient nos environnements et nos habitudes, faisant dĂ©couler de nouveaux modes de pensĂ©es et perception du monde.
Ces nouvelles technologies nous sont devenues vitales, Ă  l’image de l’oxygĂšne que l’arbre nous offre pour respirer, elles sont devenues un prolongement de nos ĂȘtres. Les consĂ©quences sont dramatiques, car il est devenu quasiment impossible pour nous, occidentaux, d’imaginer une vie sans elles. Dans cette nouvelle organisation du monde, il n’est pas tolĂ©rĂ© de penser Ă  d’autres modes de vie, s’émancipant des machines et de leur monde. Directement rĂ©duit Ă  la case primitiviste, l’idĂ©e d’aller de l’avant (et non en arriĂšre) en rĂ©flĂ©chissant Ă  d’autres maniĂšres de faire, en autonomie, loin de la vie administrĂ©e des villes et des machines, parait inconcevable.
Sensés nous offrir une plus grande liberté, une meilleure santé, la vie plus simple en somme, ces modes de pensée et façon de faire, découlant de la révolution industrielle, nous Îtent, lentement mais surement, notre indépendance et notre capacité à savoir faire, et à faire ensemble.
Nous avons oubliĂ© comment nous nourrir, comment trouver de la nourriture, la cultiver. Les industries, les machines et d’autres personnes le font pour nous. Comment vivre en dehors des villes polluĂ©es et dĂ©goulinantes de malbouffes et produits industriels. Comment trouver un endroit oĂč vivre, comment l’habiter. Comment nous reproduire, comment accoucher, comment gĂ©rer nos menstruations, comment connaĂźtre notre fertilitĂ©. Et de ce fait, du fait d’avoir oubliĂ© comment vivre, nous avons oubliĂ©, entre autres, comment nous soigner.
La croyance infaillible en la science et le progrĂšs a cette capacitĂ© folle Ă  nous rendre amnĂ©sique. AmnĂ©sique de notre autonomie, de notre indĂ©pendance, de nos savoirs faire. Elle a cette capacitĂ© Ă  nous mettre des ƓillĂšres, faisant de nous des ĂȘtres ethnocentrĂ©.es, incapables de concevoir les savoirs faire autrement que par la technologie, incapables de voir et reconnaĂźtre d’anciennes et nouvelles maniĂšres de faire, de voir et comprendre l’ailleurs. Le monde occidental et ses crĂ©ations technologiques sont tournĂ©s vers eux-mĂȘmes, tout ce qui n’y correspond pas n’est que prĂ©histoire, pays sous-dĂ©veloppĂ© et hĂ©rĂ©sie.
Aujourd’hui, en France, et dans la plupart des pays occidentaux, se soigner rime avec mĂ©dicaments, avec mĂ©decine moderne, avec hĂŽpital, avec pharmacie. Notre rapport mĂȘme au temps et Ă  la maladie a totalement changĂ© avec l’arrivĂ©e du capitalisme industriel. Devenu.es nous-mĂȘmes Ă  la fois la main d’Ɠuvre et le produit, dans un monde fondĂ© sur la rentabilitĂ©, prendre le temps de bien se soigner et de respecter son corps n’est plus d’actualitĂ©. ObligĂ©.es d’ĂȘtre rapidement remis.es sur pieds, tout est misĂ© sur la rapiditĂ© et l’efficacitĂ©. On ne cherche pas Ă  savoir ou comprendre les causes des maladies, on s’attarde seulement sur ses consĂ©quences, qui perturbent le fonctionnement global de la machine. Peu importe la qualitĂ© du traitement et les consĂ©quences sur le corps, ainsi que la guĂ©rison en profondeur de la maladie, ce qui prime, c’est un rapide retour au travail, ĂȘtre de nouveau rentable. Se soigner rime donc aussi avec dĂ©lĂ©guer, avec experts, transactions, commerce, argent, assurance. Se soigner n’est pas rĂ©servĂ© Ă  tout le monde, cela dĂ©pend des privilĂšges, des revenus, de la classe sociale. C’est un savoir qui appartient seulement aux experts. Se soigner seul ou au sein d’une communauté ? Impensable, il faut un mĂ©decin, une pharmacie, des mĂ©dicaments de synthĂšse, des industries, des laboratoires

C’est vital, on nous dit. D’ailleurs la fameuse carte nous permettant d’avoir accĂšs Ă  ces produits magiques et ces services porte bien ce nom. Les mĂ©dicaments sont vitaux, se soigner de cette maniĂšre est VITALE.
Les premiers mĂ©dicaments de synthĂšse ont vu le jour courant XXe pour se gĂ©nĂ©raliser au XXIe siĂšcle, ce qui est trĂšs rĂ©cent. Comment se fait-il que l’homo sapiens ait survĂ©cu sans mĂ©dicament de synthĂšse et sans les industries pour les produire ? Cela voudrait dire que nous n’avons fait que survivre pendant si longtemps, et que les mĂ©dicaments de synthĂšse nous offrent enfin le salut que nous attendions tous et toutes ?
C’est lĂ -dessus (entre autres) que nous sommes devenu.es complĂštement amnĂ©siques. Aujourd’hui en occident, se soigner autrement qu’avec la mĂ©decine moderne est trĂšs mal perçu, et trĂšs peu de personnes conservent et apprennent encore d’autres savoirs. C’est marginal, sans aucune preuve, ça ne marche pas, c’est une affaire d’ermite, d’illuminĂ©.e hippie de ZAD dans sa roulotte. Parce qu’aujourd’hui, l’idĂ©ologie du progrĂšs nous dit que tout ce qui n’est pas moderne est obsolĂšte, et de ce fait, inefficace.
Pourtant, comme dit plus haut, l’humanitĂ© a quand mĂȘme vĂ©cu trĂšs longtemps sans l’aide de la mĂ©decine moderne et de ses mĂ©dicaments des synthĂšses, Ă  peu prĂšs 300 000 ans. Ça fait quand mĂȘme pas mal de temps, pour des pratiques inefficaces. Les premiers Ă©crits tĂ©moignant d’une utilisation raisonnĂ©e des plantes mĂ©dicinales datent de l’époque SumĂ©rienne (entre le IIIĂš et le 1er millĂ©naire avant J.C.). Le papyrus Ă©gyptien d’Ebers datĂ© de 1580 avant J.C. fait Ă©tat d’une pharmacopĂ©e et d’un nombre important de remĂšdes Ă  base de plantes.
Depuis donc trĂšs trĂšs longtemps, et jusqu’à il y a seulement une centaine d’annĂ©e, la majoritĂ© de l’humanitĂ© s’est soignĂ©e avec les plantes. Ce qu’on appelle aujourd’hui les « remĂšdes de grands-mĂšres » Ă©taient la maniĂšre courante de se soigner. Sous diffĂ©rentes formes, poudre, teinture, tisane, dĂ©coction, cataplasme, et tant d’autres, les plantes ont soignĂ© les humain.es durant toute leur histoire. GrĂące Ă  leurs nombreux principes actifs (substance qui confĂšre des propriĂ©tĂ©s thĂ©rapeutiques ou prĂ©ventives), les plantes environnantes reprĂ©sentaient Ă  elles seules la mĂ©decine, et les anciens mĂ©decins Ă©taient les herbalistes d’aujourd’hui. Une façon naturelle, souvent gratuite, faite maison, ou peu onĂ©reuse de se soigner, Ă  la portĂ©e de toutes et tous.
Et pourtant, au XIXe, le progrĂšs de la chimie met en avant les principes actifs des vĂ©gĂ©taux. Vers 1850, la composition des nombreux vĂ©gĂ©taux sont connus, ce qui ouvre l’ùre de la « chimie du vĂ©gĂ©tale ».
De nombreux principes actifs sont alors isolĂ©s des vĂ©gĂ©taux, comme la morphine et la codĂ©ine, isolĂ©es de l’opium (pavot) et la quinine isolĂ©e de l’écorce de quinquina pour crĂ©er de la chloroquine contre le paludisme. L’aspirine, mĂ©dicament le plus consommĂ© du monde, est Ă©galement crĂ©Ă© Ă  partir de saule blanc et de la reine des prĂšs. C’est le chimiste allemand, F. Hoffmann, employĂ© chez Bayer, qui a trouvĂ© en 1893 le moyen de produire de l’aspirine presque pur. Le Brevet fut dĂ©posĂ© en 1900 aux USA et Bayer fit fortune. Quand on connait aujourd’hui la complicitĂ© de Bayer avec les nazis durant la Seconde guerre mondiale (achats de nombreux.ses dĂ©portĂ©.es des camps pour divers tests), les nombreux scandales concernant les contraceptifs, les pesticides, les non respects des normes etc. on peut se poser des questions sur la confiance accordĂ©e aux industries pharmaceutiques.
A cĂŽtĂ© de ça, le mĂ©tier d'herboriste a Ă©tĂ© reconnu pour la premiĂšre fois en France en janvier 1312. La corporation d'herboristes a Ă©tĂ© reconnue au XVe siĂšcle. Le diplĂŽme d'herboriste a Ă©tĂ© dĂ©livrĂ© par la facultĂ© de mĂ©decine Ă  partir de 1778 et en 1927 a Ă©tĂ© fondĂ©e l'École nationale d'herboristerie de Paris. Cependant, toujours en France, la formation et le diplĂŽme sont supprimĂ©s en 1941, pendant le rĂ©gime de Vichy, et n’ont jamais Ă©tĂ© rĂ©tablis.
Au début du XXe siÚcle n'étaient considérés comme médicaments qu'une douzaine de produits de synthÚse et une centaine de produits naturels. Au début du XXIe siÚcle, des centaines de substances synthétiques sont utilisées et il ne reste que trÚs peu de remÚdes courants d'origine exclusivement naturelle. Or, on considÚre actuellement que prÚs de 60% des médicaments chimiques présents sur le marché sont issus ou dérivés de substances naturelles, généralement d'origine végétale.
A savoir que, en dehors des sociétés Occidentales, la phytothérapie (soigner par les plantes) est encore présente et reconnue dans de nombreuses cultures et pays à travers des médecines traditionnelles :
❖    La mĂ©decine ayurvĂ©dique (« science de la vie » en sanscrit) est employĂ©e en Inde depuis environ 2 500 ans avant notre Ăšre. Il s’agit de la plus ancienne tradition mĂ©dicale connue et elle est encore au centre de la mĂ©decine indienne aujourd’hui, ainsi que dans une grosse partie de l’Asie du Sud-Est, comme au Sri Lanka et au NĂ©pal.
❖    En Afrique, prĂšs que 80% de la population a recours Ă  la mĂ©decine traditionnelle pour les soins de santĂ© primaires.
❖    En Chine, la mĂ©decine traditionnelle est la plus rĂ©pandue, elle est mĂȘme pratiquĂ©e dans les hĂŽpitaux.
❖    Au Japon, le Kampo fut introduit VIe ou VIIe siĂšcle de notre Ăšre. À la fin du XIXe siĂšcle, le gouvernement japonais dĂ©cida d’abandonner l’enseignement du kampo et d’adopter la mĂ©decine occidentale. Toutefois, depuis les annĂ©es 1970, on assiste Ă  un renversement de tendance. Un institut de recherche en mĂ©decine traditionnelle a Ă©tĂ© crĂ©Ă© Ă  Tokyo et le kampo est Ă  nouveau enseignĂ© Ă  la facultĂ© de mĂ©decine. Aujourd’hui, la mĂ©decine traditionnelle japonaise serait pratiquĂ©e par plus de trois quarts des gĂ©nĂ©ralistes. Elle est en outre remboursĂ©e en partie par le systĂšme gouvernemental d’assurance.
❖    De nombreux pays d’AmĂ©rique latine pratiquent encore eux aussi la mĂ©decine traditionnelle par les plantes.
En fin de compte, nous n’avons jamais cessĂ© de nous soigner grĂące aux plantes, c’est la maniĂšre de le faire qui elle a changĂ©. Petit Ă  petit, la mĂ©decine moderne a englouti les savoirs faire ancestraux, se les est accaparĂ©s, pour les digĂ©rer et en rĂ©gurgiter une version synthĂ©tique, pauvre, dangereuse, polluante et non-dĂ©mocratique. Dans le mĂȘme temps, elle s’est imposĂ©e de façon totalitaire, empĂȘchant l’émergence de savoirs et de pratiques alternatives.
L’industrie pharmaceutique participe Ă  la destruction du monde organique et donc de la possibilitĂ© de se soigner autrement qu’avec les produits de synthĂšse qu’elle commercialise. Les industriels de la santĂ© ont dĂ©valorisĂ© les savoirs traditionnels et se sont octroyĂ©s le monopole du savoir et de l’administration des produits et services de soins.
Ainsi, nous avons oublié que notre environnement est peuplé de médicaments naturels gratuits et à portée de main. Dans le but de nourrir les industries grandissantes, de les faire grossir et déborder, polluer, les médicaments industriels se sont imposés comme le seule et unique remÚde à tous les maux.  
L’idĂ©e ici n’est pas de prĂŽner la suprĂ©matie des plantes sur d’autres formes de mĂ©decine. Malheureusement, nous sommes bien conscient.es que le mode de vie imposĂ© par la civilisation industrielle a engendrĂ© de nombreuses nouvelles maladies, qu’elle seule produit et soigne Ă  la fois. Les nombreux cancers causĂ©s par la nourriture industrielle, les pesticides, les perturbateurs endocriniens, la pollution atmosphĂ©rique etc. sont incalculables, et nous ne pouvons nier que la mĂ©decine moderne parvient parfois Ă  soigner/limiter la casse sur ce qu’elle fait naĂźtre. A la vue de la situation actuelle, l’idĂ©e n’est pas de promouvoir un arrĂȘt soudain des technologies en tout genre et de faire primer la mĂ©decine par les plantes. Cependant, le but de ce texte est d’amener Ă  voir les choses autrement et Ă  sortir de son cadre de pensĂ©e.
Nous devons penser, rĂ©flĂ©chir Ă  de nouvelles alternatives. De nouvelles maniĂšres de se soigner, d’apprendre, de s’organiser, de se rĂ©approprier les savoirs perdus et d’en inventer de nouveau. De s’affranchir de la dĂ©pendance accrue aux technologies et de devenir autonomes.
Les plantes sont belles et bien le fondement mĂȘme du mĂ©dicament moderne basĂ© sur des principes actifs d’origine vĂ©gĂ©tale, et sont donc Ă  elles seules un remĂšde puissant, sain, et Ă  portĂ©e de main. Ce sont ces mĂȘmes plantes qui nous soignent aujourd’hui, mais autrement, dĂ©structurĂ©es, isolĂ©es, synthĂ©tisĂ©es, et commercialisĂ©es. Comment encore croire que les plantes sont inefficaces ? Le mensonge et notre amnĂ©sie sont Ă©normes.
Il faut sortir de ce coma intellectuel dans lequel les industries nous plongent et nous rendent inaptes Ă  connaĂźtre, penser, et agir.  Reprenons en main les savoirs, les cultures, les pratiques traditionnelles qui nous ont soignĂ©.es jusqu’à prĂ©sent. Inventons-en de nouvelles, indĂ©pendantes des industries capitalistes.
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