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À rebours, Joris-Karl Huysmans
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Roman Polanski phtotographed by Gérard Deshayes
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POST-SCRIPTUM 800
AGITATION FRITE 2 : UNE PART DE MYSTÈRE
Agitation Frite 1, Témoignages de l’underground français est donc sorti chez Lenka lente. Un second volume est en préparation. La forme en est la même : un peu moins d’une quarantaine d’entretiens dont la plupart, cette fois, sont inédits. On en trouvera ici des extraits, régulièrement. Par exemple, David Fenech.
EXTRAIT…
Si, à ton sujet, et à l'instar de Dominique Grimaud et Éric Deshayes dans L'Underground musical en France, l'on évoque certaine douceur et un côté quelque peu foutoir, un mélange des deux, cela te convient-il ?
En ce qui concerne le côté quelque peu foutoir, ma musique suit un phénomène bien connu des physiciens (le monde est un immense désordre, c'est ce que l'on appelle entropie). Parfois, il faut aller dans le sens de sa nature, et plus simplement, je ne m'interdis aucune rencontre entre les sons. Tout est permis, tant que ça fonctionne ! C'est souvent quand deux sons n'ont rien à faire ensemble que le résultat est le plus intéressant.
Dans mon studio, je travaille avec des sources instrumentales (guitare électrique, percussions, instruments trouvés ou bricolés), des apports électroniques (sampler, sequencer, effets, montage) et aussi des sons concrets (des enregistrements effectués en extérieur, la plupart du temps). En fonction du projet, un morceau peut partir de l'une ou l'autre de ces composantes.
Pour donner un exemple concret : j'ai enregistré un morceau qui s'appelle « Odette » à partir d'un message téléphonique laissé sur mon répondeur. En soi, le message était déjà extrêmement troublant car c'était un message de condoléances. Le décalage immédiat vient du fait que la personne qui avait appelé s'était trompé de numéro et le hasard a fait que ça a pu tomber sur mon répondeur. Et comme mon père venait de mourir, j'ai rebondi sur cette coïncidence et ai construit le morceau à partir de cette bribe de message téléphonique. J'en ai fait une danse, un peu bancale avec ses mesures impaires (je doute que l'on puisse vraiment danser sur un morceau à sept temps). Pour moi, c'était très libérateur. Je transformais un message qui était plombé par la mort en quelque chose de vivant. Certains auditeurs m'ont posé des questions sur ce morceau – c'est qu'il reste une part de mystère. On ne doit pas tout révéler. Donc oui, c'est très foutoir, mais il y a une vraie direction. C'est assumé.
L'essentiel avec le désordre organisé, c'est de préserver la vie, le naturel qui se dégage – surtout de ne pas être complaisant.
Et c'est aussi valable pour l'ordre désorganisé...
Tu te souviens des tous premiers disques que tu achètes ? En quoi auraient-ils pu être déterminants ?
Je me souviens avoir toujours acheté des disques, dès que j'ai pu avoir de l'argent de poche. J'avais 16 ans en 1985 et je me rappelle de m’être procuré de très beaux disques de David Bowie, Talk Talk, Depeche Mode, The Cure, Kate Bush, Tom Waits, Talking Heads, The Stranglers, King Crimson, Laurie Anderson, Philip Glass – des albums qui sortaient dans ces années-là. Je les écoute toujours avec beaucoup de plaisir ! Par contre, j'ai plus de mal à réécouter Ultravox ou le premier Simple Minds, deux disques que j'écoutais pourtant très souvent à l'époque. Donc, en gros j'achetais les (bons) disques du moment. Il faut dire que mon père avait une collection de disques phénoménale, et qu'en piochant dedans je pouvais découvrir aussi bien Lou Reed que Fela, Pink Floyd, Miles Davis, Nina Simone, Olivier Messiaen, Kraftwerk... Aussi, quand j'ai été en âge d'acheter mes propres disques, c'était surtout les nouvelles sorties que je me procurais, pas les disques du passé. Et en plus de ça, j'empruntais une dizaine de vinyles par mois à la médiathèque (je choisissais les albums un peu au hasard, par leur pochette). De proche en proche, je me suis mis à m'intéresser à tout !
Le disque acheté dans les années 1980 et absolument déterminant a été Rock Bottom de Robert Wyatt, ce chef-d'oeuvre absolu. A la première écoute, je me souviens avoir eu une réaction physique : des frissons dans le dos qui se sont très vite propagés dans tout mon corps (je ne suis pas intéressé par les drogues, mais j'imagine que ça doit faire cet effet-là). Je me suis mis à le réécouter de façon compulsive sans qu'il ne dévoile son secret. C'est un disque très complexe, au-delà des genres et de ce que je connaissais par ailleurs. Cette part de mystère, cette polysémie, cet aspect libre, cette précision, cette intimité... C'est une énorme influence ! Rock Bottom m'a donné envie de vivre ma musique comme je l'entendais. Et plus techniquement, ça m'a vraiment ouvert l'esprit sur une façon d'utiliser le studio d'enregistrement de manière créative.
Quand commences-tu l’apprentissage de la musique, et par quoi ?
J'ai envie de te répondre que j'ai commencé à apprendre la musique dès l'âge de 3 ans, en écoutant des disques, et que j'ai commencé à improviser en apprenant à parler !
Pour moi, écouter de la musique, c'est déjà en faire. Écouter « Pierre et le Loup » de Serge Prokofiev dans sa version avec Gérard Philippe, c'est sans doute ma première expérience acousmatique : une écoute concentrée, attentive, une attention à tous les sons ���et découvrir que l'on peut exprimer des sentiments juste..., ..., ...
( Talking Heads, par là )
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CHRONIQUE D’AGITATION FRITE, TÉMOIGNAGES DE L’UNDERGROUND FRANÇAIS PAR ÉRIC DESHAYES, NÉOSPHÈRES
“Ce volumineux ouvrage AGITATION FRITE édité par les éditions Lenka Lente regroupe une quarantaine d'entretiens, réalisés par Philippe Robert de 1996 à 2016. Un quart de ces entretiens sont inédits et ont été réalisés en 2016. Les entretiens déjà publiés l'ont été principalement dans les revues Vibrations, Revue et Corrigée et Octopus. Pour qui s'interrogerait sur l'amusant jeu de mots du titre, précisons qu'il fait référence au groupe allemand Agitation Free, qui fut l'une des formations centrales du psychédélisme expérimental berlinois et a été l'objet d'une certaine admiration en France. Ainsi, dans l'entretien inclus dans ce livre, Jean-Marc Foussat place Agitation Free parmi ses héros au même titre que Heldon, Tangerine Dream et Venus de Luxe (Francis Linon, l'ingénieur du son de Gong puis de Magma).
En introduction à ces entretiens, l'article "Les années rouges en France" de Philippe Robert et Marie-Pierre Bonniol, publié dans Vibrations en 1998, dresse un rapide panorama de l'underground musical français de 1968 à nos jours. Il précise (par des notes rédigées lors de la conception de l'ouvrage), que nombre de disques qui étaient devenus introuvables sont à nouveau disponibles grâce à des rééditions vinyles.
Il est pratiquement d'utilité publique d'éditer ce type de recueil d'entretiens pour maintenir au-dessus de la ligne de flottaison des manières musicales qui, par définition, n'ont jamais bénéficié de beaucoup de soutien médiatique. Par définition aussi, l'underground musical est incommensurable. Ici, le champ couvert est celui déjà très hétéroclite du rock expérimental, des musiques improvisées et créatives... Logiquement, il pourrait aussi pu inclure le hip-hop français (Assassin, Dee Nasty, Lionel D...), le rock alternatif français des années 80/90 et quelques activistes de free parties des années 90. Quoi qu'il en soit, la réflexion de Richard Pinhas faite dans l'entretien de 1999 est encore plus d'actualité : "Là où il y avait trois cent groupes en 1970, il y en a trente mille aujourd'hui". Et, à bien y réfléchir, c'est justement à l'échelle humaine, celle de l'entretien, que l'underground peut être le mieux appréhendé, au plus près des conceptions et intentions de chacun. Car, quitte à enfoncer des portes ouvertes, la créativité n'est jamais aussi vivace lorsqu'elle est inclassable et ses activistes souhaitent toujours échapper aux classifications. Ainsi, pour citer un extrait de l'entretien avec Lê Quan Ninh, qui eut John Cage comme premier répertoire au sein du Quatuor Hélios : "Je ne reconnais pas les termes "noise" ou "bruitiste" comme je ne reconnais aucun terme voulant définir en la réduisant une pratique musicale ou artistique. Je cherche des espaces ouverts où tout peut survenir. Je ne m'intéresse plus à la musique mais au sonore, autant dans ses apparitions fugaces dans le silence que dans la vibration atmosphérique la plus pleine".
Les entretiens publiés dans ce volume sont ceux de : Gérard Terronès, François Billard, Pierre Barouh, Michel Bulteau, Jac Berrocal, Jacques Debout, Dominique Grimaud, Albert Marcoeur, Christian Vander, Richard Pinhas, Gilbert Artman, Pascal Comelade, Christian Rollet, Guigou Chenevier, Jean-Jacques Birgé, Pierre Bastien, Bruno Meillier, Daunik Lazro, Dominique Lentin, Jean-Marc Montera, Didier Petit, Yves Botz, Dominique Répécaud, Camel Zekri, Noël Akchoté, Christophe & Françoise Petchanatz, Lê Quan Ninh, Jean-Marc Foussat, Jérôme Noetinger, Jean-Louis Costes, Jacques Oger, Jean-Noël Cognard, Sylvain Guérineau, Julien Palomo, Yann Gourdon, Romain Perrot.
Un second volume est prévu.”
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