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Il y a 200 ans, le général Foy...
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Publication au jour le jour des notes où le général Maximilien Foy raconte ses faits et gestes : vie de famille, sorties mondaines, déboires d'un parlementaire d'opposition...
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notesjournalieres · 10 months ago
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26 janvier 1824
Hier j’ai fait des visites. Le Maréchal Soult m’a fait d’étranges confidences. Il ne peut vivre. L’ambition le dévore. Dernièrement, il a demandé au roi la pairie. Le roi l’a bien reçu et a dit : « Je m’en occuperai royalement ». Il a vu à ce sujet les princes, les ministres. Rien de plus simple. La démarche était convenable de la part d’un maréchal de France et d’un père de famille. Il a profité de l’ occasion pour dépouiller le vieil homme, pour protester de son dévouement, pour abjurer son rôle d’opposition de l’an dernier. C’est encore tout simple pour qui connaît le personnage. Il abandonne des voies qui ne mènent plus au succès. Mais il a été plus loin : l’occasion lui a paru opportune pour tenter de nouvelles aventures. Il a entretenu avec chaleur et dévouement le roi, Monsieur, Villèle, de la nécessité de consacrer l’indépendance de la France et de l’émanciper du joug de la Russie. On l’a écouté. Le roi a dit : « Je puis faire à présent ce que je n’aurais pas tenté il y a quelques années. » Monsieur a écouté et a témoigné de l’intérêt. Villèle, enchanté d’un système qui nuit à Chateaubriand, a accueilli le Maréchal et lui a dit qu’il était puissant, imposant…
Voilà maintenant que le Maréchal Soult se croit en chemin du pouvoir. Peu lui importent la septennalité, la Charte, toutes ces vilenies de détail. Son terrain à exploiter à lui, c’est l’indépendance nationale. Il faut changer la loi de recrutement, augmenter l’armée ; et il ajoute : « Que je sois là, que j’aie quelques centaines de mille hommes et on verra !» Voilà un beau rêve; et Soult y donne en plein collier. Il a été jusqu’à me dire : « Dans trois mois, l’indépendance nationale sera proclamée. Il ne restera plus du ministère actuel qu’un seul homme, ce sera Villèle »… J’en conclus que Villèle joue le Maréchal. Au reste, avec ses yeux vifs et ce visage énergique, il a une candeur d’ambition toute remarquable qui lui fascine étrangement la vue. Il a ajouté : « C’est le seul moyen à tenter pour arriver au pouvoir. Secondez-moi. Vous ��tes l’homme de France qui a l’esprit le plus juste. Vous êtes considérable à la guerre, à la tribune. Nous nous arrangerons. » C’est le propre du maréchal Soult de former tour à tour de monstrueux desseins que la force des choses le contraint d’abandonner à peine qu’ils ont été conçus.
J’ai vu Semelé fort occupé de se faire nommer à Sarreguemines. Les divisions entre les constitutionnels nous feront manquer les élections de la Moselle. — Le duc de Valmy est attaqué d’une singulière maladie qui dure depuis 20 ans, et qui n’altère pas sa santé générale. Ce sont des coups de dard répétés de minute en minute, et durant une ou deux secondes. — Turenne, qui était chez le duc de Valmy, dit que c’est Mme du Cayla et le roi qui se sont lassés de Victor.
J’ai dîné chez l’amiral Truguet. Molitor, que je voyais pour la première fois, ne s’est-il pas avisé de me faire sotte et fraîche mine. Je lui ai répondu peu: une complète indifférence. Il ne sait pas qu’à Paris, le maréchal, c’est celui qui a le plus d’esprit. On voit bien qu’il ne vit que dans une société secondaire. Il parlait des ministres, de la réception de Madame, de sa campagne d’Espagne, de ses batailles. C’est un fat à qui la tête a tourné, qui croit avoir une position et qui n’a rien de ce qu’il faut pour la soutenir. Le Général Desprez et sa femme, Mme Hamelin et sa fille, le contre-amiral Villaumez, le Général Ménard et Sapey étaient nos autres convives. Desprez a du sens et du mérite. Il juge bien la Catalogne où il était chef d’état-major général du maréchal Moncey. Villaumez proclame le ministre de la marine un homme incapable, ignorant et paresseux. — Il y avait encore à dîner Belliard qu’on rencontre dans tous les salons, dans tous les dîners, dans toutes les fêtes et qui n’a pas un ennemi.
Après le dîner, j’ai passé la soirée chez la Duchesse de Vicence. J’ai entendu là ce merveilleux enfant de onze ans qui fait l’admiration de tout Paris sur le piano. Cette tête si productive et ces doigts si puissants sont un miracle de la nature. On dit que Mozart enfant était comme cela. Celui-ci est né en Hongrie.
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notesjournalieres · 10 months ago
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25 janvier 1824
Royer-Collard parlant des jeunes gens qui travaillaient aux Tablettes universelles, et blâmant la préférence qu’ils donnaient à cet emploi de leur travail sur des études sérieuses et une vie plus calme, appelle cela masturbation de l’esprit. Le mot est Dantonien.
Mme Bertrand me fatigue, avec son : « Mme Foy » à chaque phrase. M. de Lally était chez elle. Je l’ai trouvé changé. C’est un miracle qu'avec cette chute de voiture et avec sa constitution physique, il ait échappé à la mort. Le bavardage de Mme Dulauloy, comparé à ses 47 ans, m’ennuie. Nous avons encore eu Don Juan aux Bouffes. Je l’ai mieux apprécié que samedi. Ma Blanche était ivre de joie et absorbée d’attention. Elle sera remarquable d’esprit.
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notesjournalieres · 10 months ago
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24 janvier 1824
Il y a beaucoup de mouvement pour les élections de Paris. A la réunion de jeudi, chez Cas. Périer, Ch. de Rémusat m’a dit : « Vous êtes le député le plus aimé en France ». Le mot est flatteur, mais il est vrai. — Hier vendredi j’ai fait queue pendant une heure à la municipalité du 2e arrondissement pour avoir un certificat de possession. Les chicanes qu’on fait aux électeurs sont d’une fourberie mesquine et scandaleuse. On veut les dégoûter et on y parvient pour un grand nombre. Après une heure d’attente on m’a remis à aujourd’hui, et aujourd’hui j’ai encore attendu une heure avant d’être admis à déposer mes pièces, et il faudra que je revienne mardi, les chercher, et ce sera ensuite à recommencer avec le 5e arrondissement ; et puis il faudra faire légaliser par le préfet de l’Aisne.
Je suis tenté parfois de jeter le manche après la cognée. Combien d’autres le feront, qui n’ont pas les mêmes motifs que moi pour être persévérants. — J’ai été hier avec Bignon voir Koechlin à Ste-Pélagie. Sortant de là, j’ai visité Royer-Collard. En vérité je l’aime et je l’estime; mais il m’a dit des choses de l’autre monde, s’acharnant aux fautes et aux prétentions du côté gauche qui est vaincu ou plutôt qui n’existe plus, effrayé de la tendance révolutionnaire des jeunes gens, fâché de voir les écoles de Guizot et de Cousin lui échapper. Il voudrait être le plus vif de son parti. C’est difficile. Mettez à côté de cela qu’il a horreur du centre droit où il a raison de ne voir que des serviles. « Mais, enfin, lui ai-je dit, on ne peut pas en politique marcher tout seul. » C’est un exemple de la mauvaise position des hommes extraviés. Il a pris à cœur les promesses de Lalot. Il l’aidera dans la Manche. Lalot et lui ont même point de départ. Il se proclame ennemi constant et persévérant de tous les Jacobins, depuis Danton et compagnie jusqu’aux jeunes écrivains des Tablettes qui, dit-il, pleurent Robespierre.
Grand concert chez Mme de Rumfort. Mme Merlin fait vibrer l’âme et agite le sang de qui l’écoute. — Pasquier est toujours en caresse et plus du tout en espoir d’arriver aux affaires. M. de Humbolt est inquiet sur les bruits qui courent d’une expédition française dans l’Amérique espagnole. Mlle Sébastiani devient forte et épaisse. Mes enfants sont heureux : Arthur est revenu le 22 Janvier. Le colin-maillard et les jeux ont repris. Fernand qui se porte mieux ne couche plus dans notre chambre. Le rhume de ma Lise diminue. Moi, je ne tousse pas, cet hiver.
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notesjournalieres · 10 months ago
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21 janvier 1824
On ne parle que terribles maladies des enfants, de fièvres cérébrales, de croup. Toutes les fois qu’on raconte un malheur de ce genre, j’ai le cœur serré. Je pense à mes cinq adorables enfants. Je ne travaille plus à mon histoire. Ma Lise ne m’y pousse plus, parce qu’elle croit que j’en ai éprouvé du mal à Pithon. J’y reviendrai cependant. Je veux voir comment écrivent les autres historiens, au moins les contemporains. Voilà deux livres que je parcours de l’histoire de Venise par Daru. La narration est sèche, coupée en phrases courtes. Mais c’est le commencement de la République. Il y a peu de détails parvenus jusqu’à nous. Il était difficile de féconder et animer ces récits. M. Daru sème son histoire de réflexions qui, la plupart, sont communes et même quelquefois triviales. C’est court de pensée. Ce n’est pas là Guizot dans ses travaux historiques.
Je relis les Mémoires d’Angleterre, ou plutôt je les continue. La préface des mémoires de Clarendon est remarquable. — Mme de Bérenger veut me faire dîner mardi avec M. de Montchenu. Elle parle bien, très bien ; mais elle parle toujours. Ces femmes brillantes donnent à leurs maris des réputations imméritées. Raymond de Bérenger passe pour un ennuyeux et pour un sot. Je ne l’ai jamais rien entendu dire qui ne fut juste et même fin, et toujours parfaitement exprimé. — On ne parlait chez Mme de Ste-Aulaire que des Tablettes en déroute. Villèle a acheté à Coste 180.000 fr. son journal. Coste a-t-il toujours été un agent du ministère déguisé, ou bien a-t-il marché franchement dans des voies d’opposition?
Il faudra faire en sorte de rendre un centre de réunion à ces jeunes doctrinaires dispersés qui, en fait, possèdent esprit et cœur, talent et dévouement. Le duc de Broglie dit que les anciens libéraux se sont trompés sur les dispositions du peuple, qu’ils sont finis, qu’il faut créer un nouveau parti. Moi je dis : Attendons. Les masses sont pour nous. Il en sortira quelque chose. Le duc de Vicence veut absolument qu’on me porte à St-Quentin.
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notesjournalieres · 10 months ago
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20 janvier 1824
C’est pour moi une consolation, au milieu des tribulations dont on accable le parti politique auquel j’appartiens, parce que c’est le parti national, c’est pour moi une consolation de me voir l’objet de la bienveillance presque universelle de ceux qui partagent mes opinions et d’arracher plus d’une expression d’estime à ceux qui les combattent. Ceci me revient au sujet des élections. On me porte dans l’arrondissement de Vervins. C’est ma candidature naturelle. On me porterait aussi à St-Quentin et à Soissons, pour peu que j’en eusse envie. J’aurai des suffrages dans le Bas-Rhin, et Strasbourg m’aurait élu, n’eût été l’intérêt qu’a Humann à garder cet arrondissement pour lui.
Le colonel Dubignon et d’autres patriotes de la Haute-Marne me poussent à Wassy et à Chaumont. Villemain veut me faire élire à Pontivy, dans le Morbihan. Le collège départemental de la Charente-Inférieure s’emparera de moi si j’échoue à Vervins. Autant en fera le collège de la Meuse, et, ce qui est plus important et plus sûr, le collège du Haut-Rhin. Là on est sûr de la majorité. Mes collègues disent tous qu’il faut à tout prix me nommer : « Je donnerais plutôt ma démission pour lui faire place », disait hier Bignon. Les électeurs de Senlis se sont offerts au Général Gérard. Volontiers, a-t-il répondu, pourvu qu’en cas de que le Général Foy ne serait pas nommé, je puisse donner ma démission et vous l’élire à ma place.
Ici à Paris, ils veulent (ceux qui conduisent les élections) me faire passer dans un des arrondissements populeux et certains, quoique je me borne au collège de département et seulement en cas d’insuffisance de Vervins… Je vais être député. Est-ce bien fait que de courir encore cette carrière, chaque jour plus ingrate, et chaque jour plus difficile ? Qu’y faire pour notre pays ?
Ma Lise a mis hier quatre sangsues à notre Femand. Cette saignée lui a fait un bien infini. Cependant il continue à avoir la tête lourde et l’humeur triste.
Ma Lise est souffrante. Moi, j’éprouve toujours cette sensation très vive au cœur qui devient une douleur quand je me couche sur le côté gauche. — Je vais un peu dans le monde, parce que je n’ai plus de cheval. Ce n’est pas un mal. J’en vivrai davantage avec ma femme et mes enfants.
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notesjournalieres · 10 months ago
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19 janvier 1824
Je fais toujours de longues courses, le dimanche. Traversant les Tuileries pour aller au Faubourg St-Germain, je rencontre le cérémonieux Beugnot, qui commence par me faire la prière pour se placer à ma gauche plutôt qu’à ma droite. Beugnot se repent d’avoir mal fait la Charte, de n’avoir pas intéressé assez de Français à la nomination des députés, de ne pas y avoir mis une loi d’élections. Il ne court pas les chances de la députation pour ne pas douter de sa dignité de pair. Il le dit ainsi, mais c’est parce qu’on ne le nommerait pas dans la Haute-Marne et encore moins ailleurs.
D’Hervey, qui arrive de Madrid, dit que tous les gens instruits sans exception sont constitutionnels, que les femmes le sont, que les femmes recherchaient beaucoup les Français, que Ferdinand a bonne mine, qu’il n’est pas impopulaire. Croyez aux haines des nations après ce qui s’est passé dans cette campagne. Pour la première fois, disait Verdières, les poules ont regardé en face les hussards.
Mme d’Hervey est une bonne femme ; sa vieille amitié avec ma Lise est bien affaiblie. Il y a tant de différences dans nos positions et nos manières de voir. M. de Gomiécourt avait bonne envie de courir les chances électorales à Roye. Ce qu’on lui a écrit et ce que je lui ai dit d’Al. d’Estourmel l’a fait se retirer. J’ai rencontré chez lui le chevalier de Bazentin, le frère aîné du chevalier de Lamarsi, ancien major de place à Péronne.
Le chev. de Baz. a 84 ans. Il a commencé à servir en 1754, était à la prise de Port-Mahon; faisait partie de l’expédition du Capitaine Thurot dans le nord de l’Ecosse, en 1759, a servi dans les troupes américaines sous Washington. Il est vert, vigoureux et fait encore plusieurs lieues par jour. Il a passé la Révolution au Jardin des Plantes.
Cousin a dans son langage la même chaleur et la même élévation que dans ses écrits. Voilà le prince de la jeunesse, l’homme aux sentiments généreux et éclectiques, enthousiaste de la Révolution et justifiant doctrinalement la Montagne. L’entreprise est difficile. Mais par le temps qui court, elle a son beau côté d’indépendance et de générosité. Cousin se plaint de ce qu’on ne professe pas assez les seules doctrines qui puissent être opposées aux doctrines complètes des Bonald, des Lamennais, etc…, etc…, les doctrines républicaines déguisées par prudence sous le voile constitutionnel de l’Assemblée Constituante. Il parle de défections dans la jeunesse; hélas ! ce n’est pas l’excellence de la doctrine ennemie qui les cause, ce sont les profits matériels qui en dérivent.
J’ai dîné dimanche somptueusement chez Cas. Périer. L’abbé de Pradt bavarde toujours, et toujours s’offre aux électeurs de Paris qui n’en veulent pas. Il forçait ridiculement Charles de Rémusat à l’écouter — Petit bal chez Mme Davilliers. Norvins a épousé une jolie petite femme, bien tournée et surtout bien moulée. Il raffole des douceurs de son nouvel état. J’ai terminé la soirée chez la Duchesse de Vicence qui avait aimable et impériale compagnie. La princesse Ch. de Beauvau y est venue. Elle se mêle encore au vulgaire malgré l’élévation Pompadourienne de sa famille.
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notesjournalieres · 11 months ago
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18 janvier 1824
J’ai mené hier mon Fernand promener : l’enfant était triste et marchait mal. L’excellente précaution qu’a eue ma Lise de le mettre à la diète l’empêchera de faire une maladie. L’expérience ramène chaque jour davantage à l’excellente méthode préventive du docteur Broussais. Voilà un homme dont je m’honore d’avoir dès longtemps discerné le mérite. — Nous avons entendu hier Don Juan à l’Opéra-bouffe. Musique délicieuse. Je l’ai mal entendu parce que le lustre ne me suffit plus pour lire le libretto. Merlin de Thionville est venu un moment dans notre loge. Ste-Aulaire regardait avec observation et effroi cette tête montagnarde où les yeux ont conservé leur éclat au milieu des neiges de l’hiver. Tanneguy Duchatel disait : « Voilà un homme énergique, un homme du bon temps. »
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notesjournalieres · 11 months ago
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17 janvier 1824
Déjeûner chez le duc de Choiseul. Planat est bien cassé depuis quatre mois. Quand on devient vieux, un hiver vous achève. — J’ai raconté les vilenies que m’a faites le gouvernement pour mes contributions. Chastellux, comme tous les hommes raisonnables, attend peu des élections. Turenne est dans l’enthousiasme du mariage de Mlle de Beauvau. Il sortait de la cérémonie, enivré des charmes surannés et de la position politique de la maîtresse du roi ! Quelle saleté ! O France ! O mon pays, le pays des gens d’esprit et des braves !
Le digne Boissy d’Anglas me raconte qu’ayant marié, il y a quelques années, son fils avec sa petite nièce, il eût à demander des dispenses au gouvernement. Portalis, alors chargé de l’intérim de la justice, l’adressa au procureur du roi. Un substitut, Bourguignon, dit à M. Boissy d’Anglas : il faut deux opérations préliminaires : 1° la dispense du Pape ; 2° l’allégation de circonstances pressantes, comme par exemple la cohabitation de l’oncle avec la nièce. On peut juger avec quelle vigueur fut repoussé le substitut par le protestant rigide et le vertueux père de famille.
Grand dîner libéral chez M. Ternaux. Réunion de la partie éclatante du parti libéral. Tirlet était là qui m’a dit infiniment du bien du duc d’Angoulême. Tirlet est revenu d’Espagne plein de mépris et d’horreur pour la nation espagnole. – Après le dîner, j’ai rejoint ma femme chez la Duchesse de Plaisance. J’ai vu là, pour la première fois, un M. de Juel, ministre de Danemark à Paris. Hier vendredi, j’ai mené mon Fernand au Palais-Royal, au Palais de Justice, à la cathédrale, chez Alphonse. L’enfant n’est pas bien portant, ma Lise juge que la promenade lui fait du bien.
Nous avons été au bal chez Lemarrois et Lariboisière. Chez Lemarois, il n’y avait que militaires, à l’exception de la famille Béarn avec qui on se marie. Voilà encore une fille des nôtres qui passe à l’ennemi. Le bal Lariboisière était magnifique. Palais. Il n’y avait qu’une femme du Faubourg St-Germain, Mme de Castellane. Roy n’était occupé que d’elle. – Nous recueillons, nous autres libéraux, nous recueillons en froideur des salons les tristes résultats de la mésaventure d’Espagne. On nous regarde comme battus et à toujours.
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notesjournalieres · 11 months ago
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14 janvier 1824 [suite]
J’ai vu dimanche [11 janvier] Lagarde chez lui. Fort désespéré, se jetant dans la Bourse, et disant qu’ici-bas, hors l’argent, tout est vanité. Il n’y a pas d’homme de meilleur conseil et plus chaud pour ses amis. On le juge mal à cause de ses antécédents de police. — A l’assemblée, chez Gévaudan, j’ai, sans le vouloir, nui à B. Constant. Je disais qu’il fallait soutenir énergiquement nos plus énergiques et ne pas repousser nos plus modérés. Je disais cela en faveur d’Alexandre de La Rochefoucauld. Or, on voudrait que Gérard prit sa place dans l’Oise, et laissât à Constant une place dans la députation de Paris. Ste-Aulaire me sert activement pour la nomination départementale de la Meuse. On n’est pas meilleur et plus chaud pour ses amis. J’ai passé la soirée de dimanche chez Cas. Périer. Lundi, Stanislas m’a mené au Palais-Royal. Parlage éternel du maître, sans qu’on puisse y loger une parole. Ce parlage déconsidère. D’ailleurs il n’est pas dépourvu de pureté et de justesse de raisonnements. Le prince a fort bien traité la question des apanages. Il m’a même appris là-dessus ce que je ne savais pas. Monsieur lui a dit que les extrêmes de droite et de gauche reviendraient, et que ce n’est pas un mal ; les ministres seront plus intéressés et plus obligés à maintenir les institutions. Le duc d’Angoulême est comme honteux de sa guerre d’Espagne à cause de ce qui s’en est suivi. Il n’a vu Ferdinand qu’une demi-heure. Il est revenu mécontent, ulcéré et peu disposé à le restaurer une seconde fois, si l’occasion s’en présentait.
Du Palais-Royal à Ste-Pélagie, il y a loin. J’ai vu cet excellent Koechlin qu’on ne se lasse pas de persécuter, et qui ne se lasse pas de braver ses persécuteurs par un calme mépris. Voilà qu’on le poursuit, lui et ses trois collègues patriotes du Haut-Rhin, pour la lettre à leurs commettants.
J’ai dîné lundi chez Mme de Rumford ; M. et Mme Arago, M. de Humbolt, Cuvier, Ch. Dupin, Gallois, Jaucourt. M. de Humbolt a raconté comme quoi Goëthe a écrit dernièrement à un M. Chamisso qu’une des douleurs de sa vieillesse est de se voir défiguré dans les traductions qu’on fait de ses tragédies à Paris. Koreff a été dépecé par le baron de Humbolt et par Arago et présenté par tous deux comme un ignorant.
J’ai été lundi et mardi chez la Duchesse de Vicence, fort libérale, fort montée contre la tête ardente et juvénile de St-Aignan, et tout cela au sujet d’un article inconvenant inséré dans le Pilote, par suite de la conversation de S‘-Aignan et de Corbière. — Mercredi, M. Husson est venu déjeûner chez nous. Toujours la tête vaste comme de coutume. Nous apprenons de lui que ma belle-mère mange son bien et même celui dont elle n’est qu’usufruitière. Ainsi mes enfants n’en tireront pas un centime.
Nous avons, le soir, fait des visites. Mme de Bourck nous a raconté ses démêlés avec Sébastiani dont elle accuse l’ingratitude. Nous avons achevé la soirée chez Mme Decrès. J’ai vu là ce piètre Becquez. On parle beaucoup d’une découverte métallurgique dont l’efFet est de convertir immédiatement le minerai en fer forgé. — Soult et tout le monde sont montés contre Salvandy. Suchet est embarrassé avec moi. Il crève de dépit de n’avoir pas servi en Espagne.
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notesjournalieres · 11 months ago
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14 janvier 1824
Quand on est plusieurs jours sans écrire, les souvenirs s’altèrent. J’ai passé la journée de samedi à courir pour mes contributions. J’ai eu une véritable scène à la direction. M. Le Marois paraît un homme de mérite et un honnête homme, incapable d’une fraude. Cependant fraude a été commise relativement à ma contribution personnelle. J’ai écrit à Villèle une lettre d’affaires, propre à être insérée dans les journaux s’il hésite à me faire droit… et cette visite de la police, pendant mon absence, pour mes portes et fenêtres. Il paraît certain que Cornet d’Incourt a envoyé un homme qui s’est dit mon domestique et qui a fait venir mon contrôleur, lequel contrôleur, M. Lecomte, est un homme ancien dans la partie, un honnête homme qui a été complètement dupe… de cette coquine de portière qui est agent de police, qui a rougi et pâli quand elle a été prise sur le fait ! Il est à croire que cette misérable femme a fait aussi explorer mes papiers en mon absence. Je le lui pardonne, parce qu’elle a fait périr les souris de mon cabinet…
Je suis aux expédients pour les portes et fenêtres de mes deux maisons en propriété. Mais, c’est du luxe, car je dépasse de beaucoup le cens d’éligibilité. Il était nécessaire de faire expliquer Villèle qui a été fort capon et qui n’a pu s’empêcher, en décidant la question en homme d’affaires, de faire mentir ce chétif Cornet d’Incourt. Cependant il faut que je renforce mes contributions, si je ne veux pas rendre mon éligibilité difficile à l’avenir ; car ces gens-là me dégrèveront, me tricheront, me chicaneront jusqu’à ce que mort politique s’en suive.
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notesjournalieres · 11 months ago
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9 janvier 1824
Je viens de terminer, au moins en partie, mes affaires d’argent. Ma fortune est diminuée. Je ne sais même pas faire ce qui est convenable en ce genre, et ce que le devoir commande à un père de famille. Je ferais encore moins sans les bons conseils de ma Lise. Ces pertes d’argent sont un chagrin cuisant, mais un chagrin moindre, infiniment moindre que de voir nos enfants malades. Je fais cette remarque parce qu’hier j’ai été voir Adèle. Elle relève de couche : son fils Edouard a fait une maladie horrible ; il est en pleine convalescence… Chez Mélanie, le petit Prosper Yver est aussi malade : on a craint le croup : il paraît que c’était la rougeole.
Je vais courant partout pour mettre en règle mes contributions. C’est dévouement au pays. C’est plutôt mouvement machinal, car si je calculais mes intérêts et ma position, je me retirerais momentanément des affaires.
J’ai rencontré avant-hier Mlle Mars chez Laffitte. Séduisante à entendre dans la société à cause de la netteté argentine de son organe. Elle paraît sèche et on la dit méchante. Elle est fille de Monvel et signe le nom de son père Boutet.
J’ai rencontré chez Beugnot avant-hier Chiappe qui dit que le ministère veut absolument m’éloigner par les contributions, et Montgaillard le bossu, auteur de la revue. Il n’a pas l’air bonhomme. Ce nom de Montgaillard sonne mal. Lagarde va gagnant de l’argent à la Bourse. Il dit que le métier est excellent en le faisant avec intelligence et en personne, sans l’intermédiaire des agents de change qui, dit-il, sont des fripons. Pour moi, je ne puis me louer assez de Vatry qui est de tout cœur pour moi. Merlin de Thionville a vendu Commenchon. Le Général Merlin de Brunhamel dit que Floirac recommande à ses affidés, en cas de dissidence dans le parti libéral, de nommer Sébastiani plutôt que Foy. Portal dit que le roi tombe, et entre autres choses que ses yeux si vifs et si bons ne reconnaissent plus lui, Portal. Il vit dans l’espoir des folies des ultras pour amener leur renversement. Il soupire après le règne du duc d’Angoulême. Ce prince reconnaît pour pairs de droit Beugnot et les autres pairs non reçus de M. Decazes.
Le roi vient encore de payer 800.000 frs. de dettes de ce dernier ! ce qui prouve qu’il a de l’argent pour les favoris et pour les favorites. Témoin St-Ouen. — J’ai passé la soirée hier chez M. Ternaux ; fort bonne compagnie en hommes. — J’ai fini chez la duchesse de Plaisance où Suchet m’a fait fraîche mine. Les femmes très aimables. J’ai rencontré hier, chez B. Delessert, M. Ferrer, un des derniers présidents des Cortez, qui m’a assez mal expliqué leurs affaires d’Espagne. Ils ont cru à l’Angleterre et les soldats leur ont manqué.
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6 janvier 1824
Mon cahier pour 1824 n’est pas fait : il faut que je me serve encore de 1823.
Je me suis dispensé cette année d’aller à la cour, le jour de l’an. Pourquoi aurais-je été présenter mon visage au milieu de cette ridicule ovation du Trocadéro. Je me suis dispensé d’envoyer des cartes quelle que part que ce soit. J’en ai aussi moins reçu que les autres années.
J’ai dîné vendredi, 2 Janvier, chez Etienne avec le colonel Jacqueminot et Saunier. On veut me porter au collège départemental de la Meuse, si j’échoue à Vervins. La chance est loin de présenter une certitude. Il y a là une intrigue ministérielle qui porte des Bassins, le beau-frère de Villèle, et au secours de laquelle viennent des libéraux assez prononcés.
Réunion le Dimanche 4, chez Cas. Périer. Chauvelin y pérorait. Transporté du calme de Pithon dans le mouvement de Paris, j’éprouve malgré moi le contact des autres, et je crois davantage à un succès d’élection très improbable. Je vais presque tous les jours chez Laffitte. Jeudi, jour de l’an, j’y ai conduit ma femme et mes trois aînés entendre une petite pièce jouée par les acteurs des Variétés. Ils se sont fort amusés. Ma Lise toussait et chaque fois que j’entendais sa toux, mon cœur était déchiré.
Le bon Hartmann a comblé mes enfants d’étrennes. C’est le seul bonheur de ce genre qu’ils aient reçu des étrangers. M. Hartmann n’y sera pas l’an prochain. Je veux en dédommager alors mes enfants. Lundi 5 janvier, je lis le fouillis emphatique de Salvandy. Mme de Duras l’appelle le solitaire en voyage. — Je ne fais rien, occupé que je suis à courir pour mes impositions. On m’a donné l’alarme en disant et répétant de toute part à Paris que je ne paie pas le cens d’éligibilité. J’ai peur que les ultras ne m’aient joué quelque mauvais tour. M. Clavier a été tracassé pour m’avoir délivré un certificat de contributions dans le mois de septembre.
J’ai dîné chez le duc de Vicence. Lui est bien maigre, bien attristé, ne rêvant que le tombeau. St-Aignan est d’une vive exaltation contre les ultras. Il y avait à dîner le Cte de Mercy-Argenteau, sa femme et sa fille. Le comte dit que le royaume des Pays-Bas est absurde. Il s’y trouve une seule administration et deux cours. Il faudrait une cour et deux administrations. Lady Parke, la femme de Bruce. Lord John Russel qui a fait la fameuse motion au dernier parlement relativement aux Bourbons. M. et Mme de Souza. Forbin qui met bien bas le roman de Salvandy. On ne parlait que du mariage de Mlle Gabrielle de Beauvau avec M. Talon, frère de Mme du Cayla. C’est Turenne qui a fait le mariage. On a cru être transporté au siècle de Louis XIV lorsque, ces jours derniers, le roi a dit : « M. de Turenne, je suis content de vous.»
J’ai été au soir chez Mme de Rumford. L’abbé de Pradt a bavardé le sacre de Napoléon. Il y avait aussi M. de Tracy, M. Gallois et M. Jamard. Il paraît que Léon XII est un grand chasseur et un homme de plaisirs. Aujourd’hui, Milleret m’a mené à Brie avec Nègre. Colot y est venu aussi. Beau temps et amicale réception. Le colonel Alexandre de Rigny va épouser Mlle Zéa. Si je n’étais pas un maladroit, moi aussi je marierais mes neveux.
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notesjournalieres · 11 months ago
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31 Décembre 1823
J’ai vu Pompièrres qui m’a dit : « Vous êtes plus utile que moi à la Chambre. S’il y a partage à St-Quentin entre nous deux, je voterai pour vous ». Cette candeur du vieillard patriote m’a fait rougir de ce qu’on veut m’opposer à lui. J’ai été bien aise d’avoir en ce moment le dos tourné à la fenêtre pour qu’il ne vit pas l’impression qui se peignait sur mon visage. — Mme de Souza m’a parlé de son procès. Celle-là fait pour ainsi dire parade de son égoïsme. II est vrai que cet égoïsme n’a rien d’offensif. Le pauvre M. de Souza, que je n’ai pas vu, a un lumbago, et trouve que les affaires de Portugal vont à merveille. Mme de Bérenger me parle de mes enfants et jamais de ma femme. J’irai moins, afin de cesser tout à fait d’y aller.
Mme de Broglie est toujours pleine de mouvement et de noblesse. Elle dit que notre cause est plus éclatante que jamais parce que nous sommes malheureux, et que le malheur donne ce je ne sais quoi d’achevé. Trommelin est venu avec une plaque de la Légion d’honneur rapportée d’Espagne. On l’en a plaisanté. Il a dit pour son excuse qu’il allait passer la soirée chez le ministre de la guerre. Lord Howickt était là, le fils aîné de Lord Grey. C’est un très jeune homme blond, ressemblant un peu à ce jeune allemand qui logeait rue de Verneuil dans la même maison que nous, celui que Deprey appelait « la fausse couche de Benj. Constant », son nom me revient : Schäffer.
Le général Lafayette m’a ramené dans sa voiture. Il me racontait son voyage à Paris avant le 10 août. Il l’a fait de son propre mouvement, sans s’être concerté avec personne. En sortant de l’Assemblée, il alla chez le roi. On devait le lendemain faire une grande revue de la garde nationale. Lafayette proposa au roi de l’accompagner. Le roi décommanda la revue. Je disais au général : « Aviez-vous combiné quelque chose? Que vouliez-vous faire? » — « Je n’en sais rien. Mais il me paraissait impossible que je me présentasse à quatre mille hommes rassemblés de la garde nationale, sans qu’il en résultât un événement quelconque. Il faut convenir que cela était un peu vague pour courir tant de chances. Le roi refusa parce qu’il consultait ses amis de l’ancien régime, et que ceux-ci ne voulaient pas que le roi fut sauvé par un patriote ».
L’année 1823 est finie. J’ai éprouvé un malheur dans ma fortune à cause de la perte définitive que me causera l’emprunt d’Espagne. Mais qu’est ce malheur comparé aux désastres de la cause de la liberté et de l’honneur national à laquelle j’ai voué ma vie. Vivrai-je assez pour voir la France libre, heureuse et ayant retrouvé sa position en Europe?
Ma santé, quoiqu’aussi bonne que l’année dernière, est bien loin de ressembler à ce qu’elle était avant mon accident. Je ne regagnerai plus l’embonpoint et la force de tête que j’ai perdus. L’âge vient, qui se met en travers d’une restauration complète. Ma Lise a été bien portante toute l’année. Depuis deux mois, elle est moins bien. C’est son malaise de tous les ans. Le printemps reviendra et avec lui la jeunesse et le mouvement de ma Lise. Nos enfants sont florissants. Ils n’ont fait aucune de ces maladies qui portent l’effroi dans l’âme des parents. Je prie Dieu de les conserver et surtout leur mère, et de faire qu’ils soient bons et vertueux.
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30 Décembre 1823
J’ai eu la tête tournée tout le jour de chicanes qu’on veut me faire pour mes contributions. Voilà plus d’un mois qu’on m’en a écrit. Tout le monde m’en a parlé à mon arrivée à Paris. Je n’y ai pas fait attention d’abord. Aujourd’hui on m’a fourni des détails qui me prouvent que l’attaque est calculée et même avancée. Il me semble difficile qu’on me réduise à moins de mille francs. Cependant pour ces gens-là, tout est licite, tout est possible.
J’ai peine à me résigner à cette pensée d’être chassé ainsi de la carrière. En y réfléchissant cependant, j’aurais tout à y gagner. Ma réputation est au comble. Je ne peux pas l’augmenter dans la Chambre nouvelle. Je ne saurai quel langage y avoir, et je ne pourrai me dispenser de parler. Le pouvoir ! nous en sommes loin. D’ailleurs si le parti pouvait le ressaisir, je me trouverais là tout de suite. En cas de persécutions, vivre ignoré serait un moyen d’y échapper. Ainsi dit la raison. Mais cette Chambre va durer sept ans. Moi, j’en ai quarante-neuf. Si je quitte la carrière, je n’y rentrerai plus. Oh que ce sacrifice serait bientôt fait, si l’existence de mes enfants était assurée, si je ne devais pas m’occuper de leur bien-être !
J’ai vu ce matin Frédéric Hartmann. Il voudrait qu’on me portât dans le Haut-Rhin en place de Georges Lafayette. Ce serait le plus sûr. — J’allais voir M. Mollien, rue du Sentier n�� 18. Je dépose une carte. Le portier court après moi dans la rue. C’est un des gendarmes du détachement de Briviesca qui m’ont sauvé la vie en accourant de Pancorvo sur le point où j’étais serré de près par les brigands. Ainsi nous appelions alors les Espagnols armés contre les Français envahisseurs. — Ch. de Chambrun est venu voir ma femme. C’est la première fois depuis quatre ans. Y a-t-il dans la visite quelque chose de politique ? Trommelin était là ; tout plein de hauts faits de la Catalogne, mécontent du Maréchal Moncey qu’il juge bien, mécontent de la Roche-Aymon qui est un hâbleur, mécontent surtout de ne pas avoir été nommé lieutenant-général. Ste-Aulaire, toujours dévoué, veut aller dans la Meuse pour aider ma nomination au grand collège.
Nous avons eu une réunion chez Cas. Périer. On parle beaucoup. Il en résultera une bonne direction donnée à nos journaux. Et puis en se rapprochant on s’exalte ; on est près de croire au succès, et c’est bien quelque chose. On le redit dans les départements qui voient qu’on ne désespère pas à Paris. Cela est encore davantage. Au reste, il ne s’agit plus d’une loi ; il s’agit de l’état social tout entier.
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29 Décembre 1823
Adèle vient d’accoucher d’un fils. Il n’y a qu’un mois que je sais sa grossesse. Julienne aussi va accoucher bientôt.
J’ai mis quatre jours à ranger mes livres et papiers. C’est toujours comme cela quand je rentre à Paris. C’est une manière de se délasser et aussi de se lasser. Les souris font toujours des ravages dans mes livres. Stanislas m’a mené hier à la réunion chez Gévaudan. On parle beaucoup sans beaucoup faire. Costa, des Tablettes historiques, qui m’a l’air d’un petit intrigaillant, tient la plume. De qui a-t-il mission ? Je l’ignore. Il donne des dîners, fait des réunions. Près de lui était un jeune homme du département de l’Aude, Mahul, qui paraît avoir l’esprit net et pratique. Méchin est à faire rire pour sa confiance dans les élections. Au fond, il ne s’agit là que de Paris, quoiqu’on n’en parle pas. Manuel et B. Constant ont le plus vif désir d’être élus à Paris. Il y a dans ce comité avec les députés, quelques électeurs remuants, Laberge, Patinot, Tissot.
Le Docteur Broussais est venu nous voir. Son dire sur le duc de Vicence est fort inquiétant. Il dit que le mal de poitrine de ma Lise n’est qu’une extrême irritabilité. Comme je suis écrivant ces mots dans mon cabinet, la porte ouverte, j’entends ma Lise qui tousse dans sa chambre et sa toux fait toujours mal à ma poitrine. Ma bonne et adorable amie ! — Lagarde est venu obligeamment me dire ses inquiétudes sur mes contributions. Le bruit vient de Cornet d’Incourt, qui l’a dit à Charles Hysse. J’ai été le soir chez Laffitte. Le vieux St-Léon excellent à entendre.
J’ai fait aujourd’hui un cours de visites. — On écrit des Etats-Unis à Lafayette pour qu’il vienne. On lui enverra une frégate. On regarde sa vieillesse comme menacée en Europe par la Ste-Alliance. Il ne veut pas y aller quant à présent, craignant que son départ ne décourage les amis de la liberté. — Dalberg m’a communiqué une correspondance qu’il a eue avec le ministère badois relativement à la brochure de Savary. Ce dernier était fou. Lagarde raconte singulièrement l’histoire de la montre du duc d’Enghien.
M. de Talleyrand et la duchesse remplis d’amitiés ; mais le prince entrant moins avant dans les affaires du parti. On voit que le grand chambellan veut vivre paisible. Il dit avec raison qu’il faut attaquer Villèle et non pas les autres. Villèle, c’est le ministère. Avec les autres, dit M. de Talleyrand, il y a des joints à saisir. Molé est de cet avis.
Royer-Colllard veut être renommé. Il dit que l’élection de Lalot dépendra de lui. Il craint ses rapports futurs avec la gauche. Il désire une scission dans le parti libéral. Il désespère parce qu’il se croit trop vieux pour attendre.
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27 Décembre 1823
Le 23, nous avons été coucher tous à Ham chez mon frère. Nous avons dormi dans sa nouvelle maison. Il m’a paru que Desoize vieillit, il est pâle, cassé, 70 ans. Il a de la forme physique, du mouvement ; mais il est inquiet, morose, brusque. C’est la vieillesse. Moi aussi j’y entre, je le sens. On a de l’ennui, de l’inquiétude. Au reste c’était déjà comme cela dans ma jeunesse. Mais alors il y avant devant moi le vague et comme l’infini. Aujourd’hui tout est froidement positif. J’ai peu d’illusions. Je veux avant tout du bien-être et du repos. Le 24, nous sommes partis pour Paris à 6 h. 40 minutes ; arrivés dans la maison, rue de la Chaussée-d’Antin, à 6 h. très précises. Je ne suis pas sorti le 25. La journée se passe à arranger, à meubler. Ste-Aulaire et Girardin viennent nous voir. Il y a lieu à parler politique, car la dissolution a été prononcée par ordonnance aujourd’hui. Sainte-Aulaire voit tout en noir ; mais pour lui, avec ses habitudes et sa fortune, ce noir devient facilement rose. Il dit que nous avons le règne des ultras pour trois ou quatre générations. Girardin est dans un autre genre à peu près le même. Il ne doute pas de sa nomination à Rouen.
Le 26 au matin, arrivent mes deux garçons avec M. Dirchlet et Nathalie. Ils sont gais, bien portants. On ne dirait pas qu’ils ont passé la nuit dans la diligence. Je fais mes courses, beaucoup plus occupé de mon emprunt d’Espagne que des élections. B. Delessert me témoigne un vif intérêt. Il ne croit pas que cette affaire s’arrange ; il m’engage à vendre à 30. Al. de Lameth est excellent aussi, mais diffus, n’offrant rien de net. Il me fait entendre la lecture d’un écrit fort raisonnable qu’il vient d’adresser aux électeurs, vieux patriote semper idem.
On se remue beaucoup pour les élections à Paris. Il redoute beaucoup l’influence de Manuel. Tous nos amis que je rencontre ont pus d’espoir et de mouvement que je ne m’y attendais. J’ai vu chez Etienne un maître des forges de 2 lieues au-dessus de Soudrupt. Je leur dis de me faire passer à leur collège départemental si j’échoue à Vervins. Ils applaudissent à cette idée. Cela m’irait assez. Verdun où s’assemble le collège de la Meuse n’est pas loin de Laon. J’irai entre les deux élections.
Fréd. Hartmann vient le soir. Il pense aussi à me mettre à leur collège de département en place de Georges Lafayette. C’est encore une combinaison à saisir. Je pense que Sébastiani a fait ses arrangements avec le ministère pour la Corse. Il n’est pas homme à y passer six mois sans motifs et sans but ; et puis Mortelégier président ! tout cela est arrangé. — J’ai vu aujourd’hui Manuel qui me paraît fort occupé de se faire élire à Paris. Il juge bien la position et dit qu’il ne faut pas pour cela se laisser abattre. Corcelles, que je rencontre dans la rue, a jeté le manche après la cognée pour ce qui le concerne. Bondy veut que je m’interpose entre Robin Scévole et lui pour leurs prétentions respectives sur les collèges d’arrondissement. Népomucène Lemercier pense pour lui au collège de Bayeux. Moi, je suis plus occupé de mon emprunt d’Espagne que d’élections.
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22 Décembre 1823
Depuis trois jours, tout est bouleversé dans la maison. Nous allons coucher demain à Ham, après-demain à Paris. Ma bonne Lise a bien fait de me mettre les sangsues. J’ai eu hier un peu de faiblesse. J’ai été mieux aujourd’hui. Ma Lise aussi, et cependant, elle est fort occupée, la bonne mère, la bonne ménagère, la tendre amie, la douce compagne, le bon conseil, tout enfin.
Nous avons passé notre temps à Pithon fort doucement. Mes enfants en reviennent en bonne santé. Blanche et Fernand ont fait des progrès remarquables dans l’allemand. Tiburce moins, mais en général son esprit s’est fort développé. Isabelle n’a presque rien appris à Pithon. Pourquoi la presserions-nous ? Son visage devient de jour en jour plus joli. Fernand a un zèle remarquable pour l’étude. C’est le seul qui spontanément et gaiement parle toujours allemand.
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