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Samedi 8 avril
J'ai peur, je panique. Je n'aime pas cette sensation de n'avoir rien accompli, j'en ai horreur. La sensation de déverser son temps dans des affaires inutiles m'effraie. Je ne supporte pas de ne rien apprendre, j'ai besoin de me remplir, sinon j'ai l'impression d'être vide et inutile. Je ne sais pas me laisser aller, même si je m'adonne à des activités secondaires, le fait est que j'accompli toujours quelque chose. Je ne lis pas par plaisir, mais pour être plus intelligente ; je n'écris pas par plaisir, mais pour devenir meilleur ; je ne suis pas l'actualité par plaisir, mais pour mieux comprendre le monde. Il y a un impératif derrière tout cela et lorsqu'il n'est pas atteint, je suis destabilisée. Je veux apprendre, même des choses annexes et trop abscons pour être implantées à la réalité, peu m'importe, je veux apprendre.
Je me suis toujours vue comme une feuille blanche : on peut la plier, la froisser, écrire dessus, dessiner dessus, elle est toujours là et elle a vécu quelque chose, donc apprit quelque chose. Parfois, ce sont nos expériences qui nous enseignent ce dont nous avons besoin, le reste du temps c'est moi qui écrit sur la feuille. Le but est qu'à la fin de la journée, la feuille ne soit plus blanche ou complètement plate. Il faut qu'il se passe quelque chose.
Aujourd'hui, je me sens vide. Je n'arrive pas à me concentrer sur mes livres et les mots ne viennent pas pour les écrire, j'ai l'impression que ces vingt-quatre heures n'ont servit à rien. Alors pour me donner l'illusion que quelque chose a été écrit sur la feuille blanche, j'ai décidé d'écrire ce petit texte. Il est de piètre qualité, j'en ai conscience, mais je préfère voir cet amas de mots comme la preuve que j'ai produis quelque chose plutôt que de faire face au vide réflectif de la feuille blanche.
Oh, quel mauvais texte.
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Vendredi 7 avril
Sokudo. Au lycée, tout ça. Très rapide relecture. 5303 mots.
La journée s'acheva rapidement. Je n'étais pas très concentré durant la leçon d'anglais de l'après-midi et pendant l'examen de littérature japonaise, mon esprit ne cessait d'être distrait par les corbeaux qui se perchaient sur le rebord de la fenêtre ou le brouhaha du couloir. Je quittais donc le lycée agacé et dépité : j'avais l'impression d'avoir sacrifier ma soirée et mon sommeil pour rien et je me préparais déjà à recevoir une note en-dessous de la moyenne. Jyuushimatsu oublia l'examen sitôt terminer et me parla avec effervescence du match de baseball que son club jouera dans quelques jours, et bien que je m'intéressais pas vraiment au sport, cela me permit de me changer les idées.
Le ciel était tâché d'orange et de rose, je voulais rentrer rapidement à la maison et je proposa à Jyuushimatsu d'y aller sans attendre les autres, car ils étaient encore en cours et il accepta. Durant tout le chemin du retour, il me raconta les durs entraînements auxquels il se soumettait et m'expliqua que ce match était le premier d'une longue liste pour les qualifications d'automne ; il parla si longtemps et si fort que je lui acheta une tarte au caramel pour qu'il se taise et cesse d'importuner les autres passagers du train.
Lorsque nous arrivèrent à la maison, il se précipita vers notre père pour lui raconter sa journée, tandis que je filais rapidement dans la chambre à l'étage avant que mes parents ne remarquent les bleus qui commençaient à se former sur mon visage. Je balança mon sac dans un angle de la pièce et me débarrassa de mon uniforme contraignant, mais je pris toutefois le temps de le suspendre sur un cintre – je ne voulais pas avoir à le repasser demain matin. Je n'avais pas beaucoup de devoirs ce soir, alors je régla rapidement l'affaire et lorsque j'eus finit, je décida de me plonger dans la lecture du roman que nous devions lire avant la fin du mois. Jusque là, je n'avais pas réussit à m'y intéresser, mais je devais à tout prix maintenir mon esprit en activité parce que je ne voulais pas que mon cerveau se mette à penser, à réfléchir, à retourner dans tous les sens et à observer sous tous ses angles ce qu'il s'était passé cette après-midi – et mon quotidien depuis plusieurs mois à vrai dire. Réfléchir ne servirait à rien et c'était bien la première fois que je disais une chose pareille : cela ne me conduirait qu'à me rappeler la douleur de mon indécision et à me mettre en colère, et j'éprouvais une telle rancoeur envers Osomatsu qu'il était hors de question que je le laisse s'accaparer mes pensées. Alors je me plongea dans la lecture de ce roman.
Il racontait l'histoire d'une fille de menuisier, Haine, qui étudiait dans l'école de sa ville : les bâtiments étaient sales et vieux, les toilettes n'étaient jamais propres et les tables étaient bancales, et pour cause, la ville était relativement pauvre et ses habitants avec. Pourtant, les filles de toute l'école se livraient une bataille sans merci pour être la plus belle. En effet, elles savaient toutes que dès la fin de leur collège, elles seraient rapatriées chez elle pour aider aux tâches ménagères ou à des postes de seconde zone, là où elles pourraient servir à quelque chose et ramener un peu d'argent à la maison. La plupart des familles mettaient leurs filles à l'école simplement pour l'image, puis les y retiraient le plus vite. Ce sont les garçons qui pourront poursuivre leurs études au lycée puis à l'université : ils étaient plus robustes et ces années à étudier leur serviront à ramener encore plus d'argent à leur maison et pour leurs futures familles. Ainsi chaque fille savait qu'elle ne réussirait pas selon son degré d'étude, mais bien selon sa beauté ; bien que manquant de moyens, certaines étant proches de la misère, elles trouvaient, suppliaient, volaient et pour les plus impliquées, travaillaient alors que la loi l'interdisait pour pouvoir s'offrir de beaux vêtements qui mettaient en valeur leurs formes de pré-adolescente, des chaussures qui leur donnaient l'air de grande dames, du maquillage qui les vieillissaient plus que ne les embellissaient et même des soutiens-gorge pour grossir leurs poitrines à peine visibles.
Cependant, la famille de la fille du menuisier était bien trop pauvre pour lui offrir toutes ces frivolités : la mère gardait un cahier des comptes où elle listait l'ensemble des dépenses faites et avait accroché sur le réfrigérateur un calendrier des promotions qu'elle attendait patiemment, refusant catégoriquement d'acheter quelque chose qui ne soit pas soldé. Haine ne pouvait pas travailler car ses parents la chargeaient de s'occuper de ses frères chaque jour, dès l'école terminée : elle avait bien demandé un salaire pour prendre soin de ses frères, mais ses parents lui avaient rit au nez et punit dans sa chambre. Ainsi la fille du menuisier était considérée comme la plus laide de son école : ses cheveux d'un blond fané, comme un vêtement laissé trop longtemps au soleil, retombaient comme les poils d'un balai abîmé sur sa tête ; ses vieux vêtements, dont la plupart étaient hérités de sa mère, de sa tante et de sa grand-mère, donnaient à sa silhouette fine et svelte une forme effrayante et sans contours ; son visage angulaire et sans imperfections était creusé, et ses yeux bleu glacé s'enfonçaient dans ses orbites à cause de la fatigue.
Personne ne se rendait compte du potentiel de la fille du menuisier jusqu'à ce qu'un garçon d'une classe supérieure l'interpelle : il était un nouvel élève, le fils du maire, s'appelait Kei et était très beau. Les filles de l'école, Haine y compris, remarquèrent tout de suite sa stature grande et bien bâtie : son torse était musclé et ses bras avaient l'air capables de soulever de très lourds poids, ses cheveux étaient élégamment coiffés sur sa tête et ses lèvres pulpeuses s'étiraient en de délicieux sourires si désarmants que les autres garçons ne tardèrent pas à le jalouser et le détester. Le fils du maire et la fille du menuisier se lièrent d'amitié si vite et d'une manière si inexplicable que les autres filles n'eurent pas le temps de la mépriser et de médiser sur elle. Haine la fille du menuisier tomba petit à petit amoureuse de lui, mais n'osa jamais avouer ses sentiments : elle était d'une famille très modeste tandis que lui était promis à une vie d'aisance. Pourtant, elle n'arriva pas à se priver de sa compagnie. Parfois, après les cours, il l'amenait dans des cafés et des des restaurants qu'elle n'aurait jamais eu l'audace de fréquenter autrement : doucement, il la faisait glisser dans un univers opposé au sien mais fascinant et elle apprit énormément de choses, elle assimila naturellement les codes de conduite et emprunta les manières de parler et de faire de la bourgeoisie. Les autres filles de l'école le perçurent et très vite, se sentirent diminuer : pour qui se prend-t-elle ? disaient-elles tout bas. Néanmoins le fils du maire était fasciné par l'aisance avec laquelle Haine avait su se fondre dans son univers et n'en apprécia que davantage sa compagnie.
Il arriva alors un jour, vers la fin de l'année scolaire, où le fils du maire invita Haine chez lui sans lui expliquer pourquoi : elle était très intimidée et se rendit chez Kei sans en parler à personne. Le garçon avait décidé de lui faire cadeau de somptueuses robes – trois pour les soirées et leurs sorties dans les cafés, et quatre pour la vie de tous les jours –, de grands sacs remplis de maquillage – des fards pour les yeux, des rouges à lèvres, du mascara – et d'une pile de boîtes à chaussures – toutes des talons aux motifs et détails époustouflants – ainsi que d'une montre au bracelet en argent, qui avait l'air bien trop cher pour être porter sur le poignet d'une fille de pauvre comme elle, se dit-elle. Le fils du maire soutint qu'il voulait que tout le monde puisse se rendre compte de sa beauté et qu'il fallait qu'elle soit habillée en considération de la grâce naturelle de son âme. Le même jour, il fit venir un coiffeur et la fille du menuisier fut si belle que lorsqu'elle sortit dehors pour rentrer chez elle, tout le monde se tourna sur son passage et sa mère pleura lorsqu'elle la vit si belle et si ravissante.
Le fils du maire avait redonné à Haine l'élan de vie et la puissance solaire que la pauvreté lui avait volé : ses cheveux tombaient dans son dos comme une cascade de rayons de soleil, ses yeux brillaient comme deux belles topazes et ses lèvres rouges ne bougeaient plus, mais dansaient quand elle parlait et souriait, et ses mouvements récupérèrent une grâce jamais vue auparavant : ses bras et ses jambes tournaient autour d'elle comme une ronde et les talons qu'elle portait chaque jour lui donnait l'air d'une danseuse étoile lorsqu'elle marchait. Les magnifiques robes qui lui avaient été offertes étaient dignes de celles que portent les princesses et elle fut d'abord toute intimidée de les mettre. Quelques temps plus tard, lorsque la fille du menuisier termina son collège, le fils du maire la demande en fiançailles et à cette occasion, il lui offrit une très belle bague en argent décoré d'un diamant.
C'était une intrigue classique et je n'y trouvais aucun rebondissement qui en soit réellement un, mais l'histoire trouva cependant un étrange écho dans ma vie. J'eus l'impression de jouer le rôle de la fille du menuisier et Osomatsu, celui du fils du maire : je n'étais pas pauvre et lui n'était pas riche, mais parfois j'avais l'impression qu'il déversait en moi une potion magique, un élixir inconnu qui me donnait un élan de vie soudain, un amour pour les choses autour de moi et une envie, l'envie que l'instant présent dure éternellement. C'était une sensation étrange, comme si à son contact quelque chose d'enfoui se révélait enfin mais disparaissait aussitôt qu'il partait. J'atteignis les deux tiers du roman lorsque la porte d'entrée de la maison s'ouvrit, puis j'entendis Jyuushimatsu accueillir chaleureusement chacun de mes frères qui venaient de rentrer. Je songea que je devrais descendre moi aussi, mais je n'avais aucune envie de voir Osomatsu alors j'essaya de me replonger dans ma lecture. Néanmoins, mon esprit tout entier était concentré sur ce qui se disait au rez-de-chaussée.
« Pourquoi êtes-vous rentrés sans nous ? Demanda Todomatsu.
— C'est Choromatsu ! Répondit Jyuushimatsu. Il voulait rentrer rapidement !
— Je vois. », puis Totty changea de sujet et se mit à se plaindre d'une fille qui le harcelait depuis une semaine.
Je les entendis divaguer sur leurs examens respectifs, le beau temps, les rumeurs qu'ils avaient entendu sur certains professeurs et un de leurs élèves qui serait gay, mais à aucun moment je n'entendis la voix d'Osomatsu au point que je me mis à penser qu'il n'était pas encore rentré. Alors que j'essayais de me remémorer son emploi du temps, sa voix résonna dans le séjour :
« Où est Choromatsu ?
— Là-haut ! », indiqua Jyuushimatsu.
Deux secondes plus tard, je l'entendis grimper les marches de l'escalier. Je me mis à paniquer, me leva, me rassit, puis me leva à nouveau. Sans aucune raison particulière, je cacha mon roman sous mon sac et sursauta lorsqu'il toqua à la porte. Il n'attendit pas que je réponde et ouvrit. Lors des premières secondes, je réfléchis à toute vitesse à la manière dont je devais me comporter avec lui : j'étais en colère contre lui, je lui en voulais de m'avoir mis dans cette situation, d'avoir fait retomber la faute de son irresponsabilité sur moi et de ne pas m'être venu en aide. Je devais me montrer froid et distant pour lui faire comprendre la mesure de son erreur, alors je ne lui adressa aucun sourire quand il me salua chaleureusement. Il ferma la porte et resta debout.
« Tu vas bien ? », demanda-t-il nonchalamment.
Je ne répondis rien et me contenta de le fixer droit dans les yeux. Sa question était si débile que sa présence m'agaça aussitôt. Il s'approcha et s'agenouilla près de moi, sans me regarder : il resta ainsi de longues secondes, le silence comblé par les discussion de nos frères au rez-de-chaussée.
« Je suis désolée, tu sais. », dit-il au bout d'un moment.
Je répondis par un soupir et sortit mon roman de sous mon sac. Sans un regard dans sa direction, je fis mine de chercher ma page et lui lança :
« Si c'est tout ce que tu avais à dire, tu peux t'en aller. »
Mon ton froid m'étonna moi-même, mais je resta impassible. Du coin de l'oeil, je vis qu'il m'observa quelques secondes avant de se lever et de quitter la chambre. Lorsque la porte claqua derrière lui, je réalisa que mon corps était extrêmement tendu et je reposa le roman pour lequel je n'avais plus d'intérêt. J'étais énervé : Osomatsu s'excusait ? Mon œil, pensais-je. J'avais l'habitude de ce comportement, de ces propos hypocrites : il s'excuse aujourd'hui et demain, il recommence.
Lorsqu'il fut l'heure d'aller se coucher, je crus à une blague. Alors que je sortais de la salle de bain, habillé de mon pyjama, Osomatsu arriva à ma droite et me poussa à l'intérieur de la pièce. Je n'eus pas le temps de protester que déjà il appuyait ses lèvres contre les miennes ; pour m'empêcher de le repousser, il bloqua mes bras dans mon dos, alors je m'obstina à garder les lèvres fermées. Il tenta d'y glisser sa langue, mais je tins bon et il finit par mettre fin à cet horrible baiser en soupirant, dépité. Je me retins de lui mettre une gifle et de déverser sur lui une pluie d'obscénités, de peur d'alerter les autres.
« Qu'est-ce qui t'arrive, Choromatsu ? Osa-t-il demander.
— Comment ça, qu'est-ce qu'il m'arrive ? M'emportais-je aussitôt, en veillant toutefois à chuchoter. Tu as cru que j'allais t'embrasser après ce qu'il s'est passé ? Laisse-moi tranquille. »
Joignant le geste à la parole, je tendis la main vers la porte de la salle de bain, mais il l'attrapa et me tira vers lui.
« Je me suis excusé pourtant ! », protesta-t-il.
Violemment, je dégagea ma main de la sienne et le foudroya du regard. Comment pouvait-il croire que de vulgaires excuses suffiraient à effacer le comportement intolérable qu'il avait eu cette après-midi ? Ses mots n'effaçaient pas les bleus qui recouvraient mon corps. J'ouvris la bouche, prêt à le ramener sur terre, mais je n'en fis pourtant rien : à quoi bon lui expliquer quoi que ce soit ? De ma vie je n'ai jamais vu Osomatsu se comporter en grand frère responsable : il était bête, égoïste, ne s'intéressait pas aux autres et cela ne changera jamais. D'un geste de la main, je balaya le sujet.
« Laisse tomber, dis-je en ouvrant la porte de la salle de bain.
— Choromatsu ! »
Mais je ne l'écoutait pas et rejoignait les autres dans la chambre. Osomatsu me suivit quelques secondes après et éteignit la lumière avant de se glisser sous la couverture, à côté de moi ; j'aurais préféré ne pas dormir à côté de lui, mais nous avions toujours procédé ainsi et nos frères auraient pu se poser des questions. Au départ, il ne me toucha pas, mais bientôt je sentis son bras autour de ma taille et ses genoux qui touchaient les miens. Je me tourna vers Jyuushimatsu à ma gauche et la dernière chose que j'entendit avant de m'endormir fut son soupir agacé.
Le lendemain fut une journée éprouvante. A peine réveillé, Ichimatsu fut prit d'une violente nausée et je dus prendre sa température, lui préparer son petit-déjeuner et lui expliquer quels médicaments prendre, le tout en quatrième vitesse si je ne voulais pas arriver une nouvelle fois en retard en cours. Un peu plus tard dans la journée, je reçus un coup de fil de ma mère qui m'avertit qu'Ichimatsu était rentré plus tôt que prévu à la maison et qu'elle allait le conduire chez le médecin, mais qu'elle risquait de rentrer en fin de journée à cause des files d'attentes qu'il y a à chaque fois. Elle me chargea de m'occuper de mes frères et de veiller à ce que les volets et la porte d'entrée soient bien fermées avant d'aller nous coucher. Mon professeur principal me donna une pile de documents à photocopier qui me mirent en retard pour mon cours de biologie, et je renversa mon bento et fus contraint de demander à des camarades de me prêter un peu d'argent pour m'acheter un sandwich à la cafétéria, en leur promettant de les rembourser dès demain.
Je ne croisa ni Osomatsu ni le groupe d'étudiants qui m'avait tabassé la veille de toute la journée, mais je ne m'en plaignais pas : je me sentais plus détendu et plus concentré sur ce que j'avais à faire, et à l'heure de permanence qui précédait le cours d'histoire, je décida de m'enfermer dans la bibliothèque du lycée pour travailler les examens de la semaine prochaine, puis à la fin de la journée, je rejoignis Karamatsu et Todomatsu. Jyuushimatsu était à un entraînement de baseball avec son club et Osomatsu devait passer un rattrapage, m'expliquèrent-ils.
« Ah, mais Osomatsu m'a dit de te demander de l'attendre. », dit Karamatsu.
Je fronça les sourcils. Karamatsu et Osomatsu étaient dans la même classe et il l'avait chargé de lui transmettre ce message, juste avant d'aller passer son examen de rattrapage. Apparement, il avait lourdement insisté.
« Il devrait finir son examen dans une heure environ. », ajouta-t-il.
En soupirant, je finis par accepter de l'attendre et ils me souhaitèrent bon courage, puis s'en allèrent. J'étais très agacé, car j'avais prévu de rentrer le plus vite possible pour préparer le repas de ce soir et me mettre à travailler, mais non, il fallait que le grand Osomatsu en ait décidé autrement ! J'avais parfaitement conscience que c'était moi qui avait accepté de l'attendre, mais je continuais de rejeter la faute sur lui et me rendit à la bibliothèque pour travailler un peu – hors de question de perdre mon temps. La plupart des cours était déjà terminé et le calme qui régnait dans la grande salle et le couloir adjacent me détendit, et j'acheva la plupart de mes devoirs. Lorsque je ferma mon cahier de mathématiques, je jeta un rapide coup d'oeil à l'horloge murale de la bibliothèque et réalisa que cela faisait une heure et demie que j'étais ici. Une heure et demie, cela signifiait qu'Osomatsu avait finit depuis un moment son examen. Je rassembla mes affaires, ferma livres et cahiers et fourra le tout sans précaution dans mon sac. Au même moment, la porte d'entrée s'ouvrit et j'aperçus la silhouette d'Osomatsu dans l'encadrement de la porte : il inspecta du regard la salle et lorsque ses yeux se posèrent sur moi, il laissa échapper un long soupir.
« Bordel, Choromatsu, ça fait vingt minutes que je te cherche ! jura-t-il en levant les bras vers le ciel.
— J'étais bien obligé de m'occuper, je ne pouvais pas t'attendre à l'entrée du lycée sans rien faire. »
Il tira la chaise en face de ma table et se laissa tomber dessus, essoufflé : il avait dû escalader tous les escaliers du bâtiment à ma recherche, pensais-je, et je lui tendis ma bouteille d'eau qu'il vida d'une traite.
« Ton examen s'est bien passé ? Je m'enquis.
— Ouais. Enfin, je crois. »
Je me contenta de hocher la tête et s'ensuivit un long silence rythmé par la respiration saccadée d'Osomatsu qui se calmait peu à peu. Sa veste était grande ouverte pour le rafraîchir, et ses cheveux en bataille collaient sur son front et ses tempes.
« Les autres sont déjà rentrés, je dis.
— Je sais.
— Pourquoi m'as-tu demandé de t'attendre alors ? », demandais-je finalement, agacé.
Il me regarda un moment en clignant plusieurs fois des yeux et sembla s'en souvenir à peine. Sur le point de m'énerver sur lui mais jugeant en même temps que c'était inutile, je me leva et attrapa mon sac.
« Bon, alors j'y vais.
— Non, attends ! »
D'un signe de la main, il me demanda de me rassoir et je m'exécuta. Il ne parla pas tout de suite et laissa ses yeux se perdre dans les rayonnages de livres, escalader l'escabeau pour en sélectionner un, tout en haut. L'ambiance de la bibliothèque était très particulière et je sentais qu'elle nous imprégnait : à l'odeur poussiéreuse des livres se mêlait le parfum excitant de la transpiration d'Osomatsu fusionnée à son eau de Cologne, et le silence de la salle était contredit par les battements de mon cœur qui résonnaient contre mes tympans. La vue de tous ces volumes sur les étagères, certains plus gros que d'autres, me transportait vers des fantasmes sur ce qu'ils pouvaient contenir ; l'envie de les ouvrir, tous, de les découvrir me dévorait et le sentiment d'infériorité, au sens propre comme au sens figuré du terme, était significatif de mes visites ici : je me sentais comme une petite souris devant les immenses bibliothèques en bois qui montaient jusqu'au plafond et je me prenais à imaginer le nombre d'heures, voire de jours, que cela me prendrait pour me hisser à leur sommet avec mes si petites pâtes ; je me sentais aussi ridiculement ignorant devant cette étendue de savoir et de sagesse et c'est à peine si j'osais croiser le regard des portraits d'auteurs accrochés aux murs ou imprimés sur la deuxième page du livre. Toutefois, c'était ce sentiment d'infériorité qui me poussait chaque jour ici, fasciné par l'éventuelle manière dont je pourrais évoluer et atteindre le stade de ceux dont les ouvrages étaient exposés ici. Une nouvelle fois, je me rendis compte de cette sensation grisante mais d'une manière bien plus puissante cette fois-ci, probablement à cause du regard d'Osomatsu qui me perturbait. C'était très troublant parce qu'il semblait à la fois être un étranger qui n'avait pas le droit de pénétrer ce sanctuaire de connaissance, mais aussi un habitué des lieux, comme s'il connaissait chaque auteur personnellement, chaque phrase de chaque page, chaque mot et ce qu'il signifiait précisément. Il était absorbé par sa contemplation de l'organisation des lieux et cela dura de longues secondes ; j'eus envie de l'interrompre et le ramener sur terre mais j'étais moi-même fasciné par l'espèce de métamorphose qui s'opérait en lui et ne le quitta pas une seconde des yeux, de peur de rater le moment où de grandes ailes sortira de son dos ou quand sa peau changera de couleur. Au bout d'un moment, son œil vibra et il ouvrit la bouche, mais les mots ne sortirent pas tout de suite.
« Je voulais te parler de ce qu'il s'était passé hier, finit-il par dire sans me regarder.
— Oui. », je répondis d'un ton neutre bien que je sois surpris qu'il décide d'aborder le sujet.
Il me regarda non pas moi en tant que tel, mais mon corps à la recherche de preuves des coups que j'avais reçu et fronça les sourcils de n'en voir aucune. En effet, j'avais demandé à Todomatsu de m'aider à les cacher grâce à du maquillage : je ne voulais que personne ne voit ces bleus immondes et douloureux ou n'ait l'occasion de confirmer quelque rumeur.
« Il y a quelques mois, j'avais emprunté de l'argent à ces types, expliqua-t-il en reportant son attention sur les étagères de livre.
— Pourquoi leur as-tu emprunté de l'argent ? », le coupais-je.
Il haussa les épaules.
« J'en avais besoin, c'est tout. Le truc, c'est qu'ils m'avaient donné une date limite de remboursement et cela fait plus d'un mois qu'elle est dépassée.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi tu n'avais pas l'argent ? »
Il soupira, lasse.
« Je l'ai perdu.
— Perdu ?
— C'est ça.
— Aux jeux d'argent ? Tu sais bien qu'on est mineurs. »
Il resta muet quelques secondes avant de reprendre :
« Oui, mais j'ai menti sur mon âge. »
Je soupira à mon tour. Osomatsu était irresponsable : emprunter de l'argent à des étudiants mal famés sans se poser la moindre question – ne pouvait-il pas anticiper qu'ils pourraient devenir violets ou se mettre à le harceler pour n'importe quelle raison ? –, mentir sur son âge, prendre le risque de tout perdre aux jeux d'argent... Je ne chercha pas à lui faire la morale : d'ordinaire, je lui aurais remis les points sur les i, mis j'étais assomé par ces nouvelles et préférait ne plus me mêler de ses affaires, de peur d'en faire à nouveau les frais. C'est tout naturellement qu'il fut lui-même très surpris de m'entendre simplement dire d'un ton détaché :
« Bon, alors dépêche-toi de les rembourser. La prochaine fois, c'est toi qui te fera tabasser. »
Je me leva de ma chaise et passa la anse de mon sac sur mon épaule. Lorsqu'il me vit me diriger vers la porte, il bondit sur ses pieds.
« Pff, qu'est-ce que tu crois ! C'est moi qui les tabasserai ! rétorqua-t-il en me rattrapant.
— Bien sûr. », je répondis en souriant, peu convaincu.
Il n'y avait plus personne dans les couloirs et probablement dans le lycée tout entier. Les lumières au-dessus de nos têtes grésillaient et commençaient à s'éteindre, absorbées par l'obscurité de la nuit qui mangeait déjà la moitié du ciel. Je ne sais pas si à ce moment-là, j'avais pardonné Osomatsu, mais toujours est-il que ses excuses initiales avaient été parfaitement inutiles : il me prenait souvent pour un casse-pied à qui il était inutile d'expliquer les choses parce qu'il ne savait que faire la morale aux autres, alors j'étais content que cette fois-ci, il ait décidé de m'expliquer le pourquoi du comment.
« Choromatsu. »
Je sentis sa main s'enrouler autour de mon poignet et il me tira vers lui : sa bouche s'appuya contre la mienne et il se mit à sourire si fort qu'il ne put prolonger le baiser. Il enroula ses bras autour de mon cou et me serra contre lui. Paniqué à l'idée que quelqu'un nous surprenne, j'appuyais de toutes mes forces contre son torse mais il ne bougea pas d'un iota.
« Arrête ça, Osomatsu ! Protestais-je en dernier recours.
— Non.
— Bon sang, mais qu'est-ce qui te prend ?
— Je veux rester comme ça. »
De toute manière, le lycée était quasiment vide, il y avait peu de chances que quelqu'un débarque à l'angles et puis, je l'entendrais arriver, pensais-je. C'est fou la manière dont j'arrivais à lui trouver instantanément des prétextes, comme si une nouvelle fois je n'y pouvais rien, c'était lui, lui qui allait vers moi, m'enchaînait et m'obligeait faire quelque chose que je ne voulais pas. Nous restâmes immobiles de longues secondes et aucun de nous ne dit mot : ses bras se resserrèrent un peu plus autour de mon cou, et sa poitrine était appuyée contre la mienne si bien que je crus entendre le battement de son cœur. Par moment, il soupira au creux de mon oreille et riait un peu de la réaction que cela provoquait chez moi. Nous quittâmes le lycée alors que le ciel était nuit noir et que le vent frais soufflait sans obstacles. Tout le long du trajet jusqu'à la maison, Osomatsu me parla du match de football qu'il avait disputé l'après-midi et veilla à ne pas s'attarder sur le fait qu'ils avaient perdus et préféra mettre l'emphase sur la superbe action qu'il avait mené, il me raconta la professeure exécrable qui l'avait surveillé durant son rattrapage et le dernier manga qu'il avait acheté et qu'il fallait que je lise à tout prix selon lui. Je l'écoutais distraitement, plus amusé par les grands mouvements qu'il faisait avec ses bras en parlant qu'intéressé par ce qu'il disait, mais ne le coupa à aucun moment, bercé par le mouvement du train et luttant pour ne pas m'endormir.
Lorsque nous arrivâmes à la maison, je découvris avec surprise que Karamatsu préparait le dîner. Ichimatsu était toujours chez le médecin et ma mère me prévint qu'ils rentreront dans une heure tout au plus. Je m'empressa de terminer mes devoirs, puis insista pour prendre la relève derrière Karamatsu et m'attela à faire cuir le riz correctement et à couper carottes, pommes de terre et aubergines. Le riz n'était pas aussi bon que lorsque Karamatsu le faisait, mais personne ne se plaigna. Lorsque ma mère rentra avec Ichimatsu, celui-ci mangea à peine et alla se coucher : il avait une forte fièvre et n'irait pas en cours demain matin au moins. Durant le reste de la soirée, nous veillâmes à ne pas faire trop de bruit pour ne pas le déranger, en particulier Jyuushimatsu qui haussait rapidement la voix. Lorsque nous allâmes nous coucher, Osomatsu m'embrassa dans la salle de bain et cette fois-ci je ne le repoussais pas, bien au contraire ; il glissa sa main sous l'élastique de mon pantalon de pyjama, mais lui donna un coup sur le bras pour la lui faire retirer immédiatement. Il s'était contenté de sourire et nous avions repris nos baisers, cachés du reste de notre famille. Je me sentais terriblement heureux de le retrouver et de sentir sa peau contre la mienne, ses mains sur mon visage et mon cou, ses bras autour de ma taille, son odeur enivrante qui m'imprégnait, ses lèvres et sa langue qui me faisaient tourner la tête. Je réalise que ce soir-là, j'avais complètement mis de côté mes doutes et ne me souciait plus de la moralité de cette relation, ni de ses conséquences.
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Mercredi 5 avril
3478 mots. Sokudo obviously. Rapiiiiide relecture. J’aime bien.
Ce n'était pas la première fois que ça nous arrivait et bien que cela me révulsait de l'admettre, je savais que ça ne serait pas la dernière non-plus. Je tentais de rassembler mes pensées mais ses lèvres s'appuyèrent plus férocement contre le miennes et malgré la maladresse du baiser, je sentais une chaleur enivrante se diffuser dans mon corps et liquéfier mes jambes.
La porte de la salle de bain était fermée à double tour et dans le reflet de glace se dévoilait le tableau de deux lycéens, collés l'un à l'autre. Ses bras enroulés autour de ma taille me pressaient contre lui et ses lèvres m'embrassaient, cherchaient quelque chose et je savais de quoi il s'agissait, mais que je me refusais à lui donner.
La première fois que nous nous étions embrassés avait eu lieu dans notre lit même. Nous avions attendu que la chambre soit plongée dans la pénombre ; c'était lui qui avait fait le premier mouvement : il s'était tourné vers moi et je me souviens de son regard qui essayait de sonder l'obscurité et mes pensées. Ses mains avaient remonté le long de mon ventre jusqu'à mes joues et lentement, il avait appuyé ses lèvres contre les miennes dans un baiser très chaste. Pourtant, la sensation d'extase qui s'était emparé de mon corps m'avait pétrifiée. Nous nous étions limités à cela ce soir-là, mais nous avions tôt fait de recommencer : lorsque nous nous croisions aux toilettes du lycée et il m'avait à plusieurs reprises confié qu'il adorait prendre le risque de se faire surprendre, à la maison lorsque la pièce était vide ou comme aujourd'hui, dans la salle de bain, le matin, alors que nous devions être en cours dans un quart d'heure.
J'appuya mes mains contre son torse pour le repousser, mais il était bien plus fort que moi. Ses mains glissaient jusqu'au bas de mon dos, sans jamais dépasser cette limite imaginaire, puis remontaient dans mon dos qu'il caressait frénétiquement.
« Oso- »
Je tenta de dire quelque chose pour l'arrêter, en vain. Il me poussa jusqu'à ce que mon dos touche le mur froid de la salle de bain et je sentis sa jambe droite se faufiler entre les miennes. Ses mains enserrèrent mon visage et sa bouche dévia vers mon cou : ses lèvres humides goûtèrent ma peau plus tendue que la sienne et ses dents s'enfonçaient par intermittence dans les creux. Mon cœur cognait à toute vitesse et je me refusais à ouvrir la bouche, car je savais que le seul bruit que je serais capable d'émettre sera un gémissement trop suspect. Je me maudis d'être aussi réceptif à ses caresses et tenta de le tirer en arrière par ses vêtements, mais à chaque tentative désespérée, il se collait un peu plus contre moi jusqu'à m'écraser contre le mur.
Ce fut la voix de Karamatsu de l'autre côté de la porte qui réussit à l'interrompre :
« Osomatsu, tu as presque fini ? Nous allons être en retard ! »
Osomatsu libéra mon cou de ses tortures. Ses lèvres étaient rouges et gonflées, et je remarqua sa respiration saccadée qui se synchronisait parfaitement avec la mienne. Sans me lâcher du regard, il répondit :
« Oui, oui, je me dépêche. »
Karamatsu mit quelques secondes à répondre :
« D'accord, est-ce que tu saurais où est Choromatsu ?
— Aucune idée, dit Osomatsu sans prendre le temps de réfléchir. Peut-être qu'il est déjà partit. »
Osomatsu attendit que le bruit des pas de Karamatsu disparaisse complètement avant d'étirer ses lèvres en un sourire. Il se pencha vers moi, embrassa rapidement mes lèvres et jeta un coup d'oeil à son reflet dans la glace avant d'ouvrir la porte de la salle de bain.
« A tout à l'heure, babe. », murmura-t-il avant de partir.
Je lui répondis par un regard noir, puis m'empressa d'éteindre les lumières et ferma la porte derrière lui pour que personne ne se doute de ma présence, et attendit patiemment que tout le monde quitte la maison. Enfin, je vérifia que mes cheveux étaient bien en place, attrapa mon sac à dos et sortit à toute vitesse en claquant la porte de la maison. A cause de tout cela, à cause de lui surtout, j'allais être en retard et je le traitais de tous les noms en descendant la rue jusqu'à la gare.
Cette relation que j'avais avec Osomatsu ne me plaisait pas. Ce n'était pas normal, absolument pas. Deux frères qui s'aimaient ? Qui s'embrassaient ? Et puis quoi encore ? Osomatsu n'avait pas l'air de réaliser la situation dans laquelle nous étions : c'était lui qui faisait les premiers pas, lui qui guettait les moindres occasions pour m'embrasser, lui qui nous mettait en retard pour s'adonner à ces pratiques repoussantes. J'avais tenté de le lui expliquer, lui dire que non seulement nous avions une relation homosexuelle, mais que de surcroît elle était incestueuse ; mais il s'était montré complètement sourd à mes propos et avait prétendu que ce n'était pas si grave que cela et que nous nous arrêterions si un jour cela posait réellement problème. Puis il me demandait de ne pas lui faire la tête en m'embrassant sur la joue.
Pour autant, malgré qu'il soit le plus enthousiaste quant à cette relation, je sentais dans ces gestes, dans le mouvement de ses lèvres et les regards qu'il me jette une appréhension croissante. Il lui prenait régulièrement de me regarder longuement sans rien dire, comme s'il essayait de deviner mes pensées et il finissait par se lever et partir en soupirant, soudain épuisé. Tout comme ce matin où ses lèvres m'embrassaient de la même manière maladroite qu'à nos débuts : ses mains m'agrippaient pour ne pas me laisser partir et ses lèvres, sa langue étaient en quête de quelque chose. En quête de mon assentiment. Je n'étais pas stupide et bien qu'il ne m'en ait pas parlé jusque là, je voyais qu'il était de plus en plus en proie au doute. Il connaissait mon point de vue sur cette relation et je savais qu'il craignait que je décide de tout arrêter. Il aimait m'embrasser, il prenait un malin plaisir à s'y adonner à la moindre occasion, mais il avait peur qu'un jour, je ne le repousse et lui dise : ça suffit, je ne veux pas de cette relation, je ne veux pas de toi.
J'aurai aimé en discuter avec lui, mais que pouvais-je lui dire ? Moi même je ne savais pas ce que je voulais, j'étais tiraillé entre ma conscience et une attirance que je ne pouvais nier pour cet imbécile. Je me refusais à y réfléchir trop longtemps, parce que je craignais d'arriver à la conclusion que je le voulais, que je voulais continuer cette relation avec lui, aussi immorale soit-elle, et que bon sang, j'utilisais l'argument de l'inceste uniquement parce que j'étais terrorisé. Mais pour rien au monde je ne le lui avouerai. Cette position d'entre-deux, le fait de ne pas avoir avouer à voix haute ce que je m'évertuais à nier me rassurait : je me disais que rien n'était encore décidé, que je pouvais revenir en arrière à tout moment, que j'avais encore toutes les cartes en main. Je m'étais convaincu que ce n'était pas moi qui embrassait l'autre et pêchait, mais lui, que me laisser faire ne signifiait rien, que lui m'aimait et que moi, non, je ne ressentais rien et que cette histoire était seulement temporaire, mais que je n'arrêtais pas tout cela tout de suite, parce que je craignais de blesser Osomatsu, voilà tout.
J'étais stupide, bien plus que lui finalement, et je m'en rendais parfaitement compte. Je lui reprochai de dépasser les limites, mais j’accueillais chacun de ses gestes incestueux avec impatience et je l'admirais d'accorder si peu de respect aux normes sociales. J'aurais voulu être comme lui, faire ce que je veux sans demander son avis à personne mais j'en étais incapable : il était là et il jouait ce rôle pour nous deux. Moi aussi je voulais enrouler mes bras autour de son corps, lui faire sentir la chaleur de ma poitrine, lui embrasser le cou, les clavicules, le menton, les joues et les lèvres ; je voulais lui faire ressentir exactement tout ce que ces gestes me procuraient ; je voulais qu'il ressente ce feu qui s'empare de mes tripes quand sa peau touche la mienne, la force qui me tire à lui contre ma volonté et qui m'oblige à me soumettre à ses caresses ; je voulais qu'à son tour, il éprouve le tumulte destructeur et jouissif de mes émotions quand ses mains caressent mon visage, mais que ma conscience me hurle de mettre un terme à tout cela ; je voulais qu'il me déteste et qu'il aime tout comme je l'aime et le déteste, parce que c'était selon moi le mélange le plus incongru, obscur et parfait du cœur ; je voulais que son corps vibre aussi intensément que le mien et lire dans son regard ce que j'étais moi-même incapable de dire : je te veux plus que tout au monde, mais le monde n'est pas d'accord, et alors à ce moment-là je lui répondrais, non par ma voix mais toujours par des gestes comme il savait si bien faire, que nous nous en fichions du monde et que je l'aimais, qu'il m'aimait et qu'il y avait là toutes les raisons du monde de s'embrasser, et que rien ni personne ne sous séparera.
Ma tête était appuyée contre la vitre du train, le paysage défilait à toute vitesse sous mes yeux et le soleil se levait tout doucement derrière l'horizon. Je sentais une grosse boule dans ma poitrine et une terrible envie de pleurer, mais surtout une envie de le voir, de l'avoir en face de moi et d'embrasser ses lèvres comme si j'y goûtais pour la première fois.
La journée se déroula comme elle se déroulait toutes les autres fois : le matin, cours de mathématiques et sans surprise ce jour-là, beaucoup d'élèves arrièvrent en retard soit-disant pour un problème de transport ; suivirent ensuite biologie et anglais pendant trois longues heures. A l'heure de la pause déjeuner, la salle se vida à toute vitesse : tout le monde se dépêchait de rejoindre la cafétéria avant qu'il n'y ait trop de monde ou quittait simplement la classe pour échapper à son atmosphère lourde et stressante. Moi, je débarrassa ma table de mes affaires et sortit de mon sac de quoi manger : ce n'était rien d'extravagant, je n'avais pas eu le temps de me faire un repas digne de ce nom la veille et Karamatsu avait eu son entraînement de basket-ball – c'était lui qui nous préparait le déjeuner quand je ne pouvais pas.
Le brouhaha des élèves qui revenaient avec leurs sachets plastifiés dans les mains me donna rapidement la migraine, et je me dépêcha de finir de manger et m'enferma dans les toilettes. Je soupira longuement et aspergea mon visage d'eau fraîche ; je risqua un coup d'oeil dans la glace au dessus de l'évier et secoua la tête en voyant les cernes qui creusaient mon visage. Cette après-midi, nous avions un examen de littérature japonaise, la matière que je maîtrisais le moins, et j'avais passé toute la soirée à étudier, ou au moins à essayer de avec le reste de mes frères qui se disputaient toutes les cinq secondes. Jyuushimatsu, qui était le seul de mes frères à être dans la même classe que moi, ne semblait pas se soucier outre mesure de cet examen et avait été persuadé par Osomatsu et Ichimatsu qu'il pourra le réussir « au talent », comme ils disent. Honnêtement, j'aurais souhaité être si insouciant qu'eux, car au au stress naturel de l'examen s'ajoutait la fatigue, qui me faisait encore plus angoisser.
J'entendis quelqu'un courir dans le couloir, puis la porte des toilettes s'ouvrit violemment, rebondissant dans un fracas contre le mur. Osomatsu entra à toute vitesse dans les toilettes et les verrouilla à double tour, avant de se tourner vers moi, essouflé.
« Putain, il faut que tu m'aides ! », lâcha-t-il.
Je ne répondis rien et le regarda aller et venir dans les cabinets, ses jurons se joignant aux grincements des portes. Au bout d'un moment, il s'immobilisa et passa ses mains dans ses cheveux ; sa respiration était rapide et son front brillait de sueur. Je voulus dire quelque chose, mais les mots restaient coincés dans ma gorge.
« Je vais me faire arracher la tête. », dit-t-il dans un soupir, exténué.
Soudain, on toqua à la porte des toilettes et Osomatsu bondit , regarda autour de lui comme s'il venait de se réveiller et s'enferma dans un des cabinets. De l'autre côté de la porte, on toqua de plus en plus fort ; Osomatsu ne m'avait rien dit : devais-je ouvrir ou pas ? De toute façon, il n'était décemment pas possible de laisser les toilettes éternellement fermer, un professeur risquerait d'être alerter, alors j'alla ouvrir. Un petit groupe d'étudiants se tenait de l'autre côté de la porte et ils avaient l'air très intimidants : ils faisaient deux à trois têtes de plus que moi, les muscles de leurs bras étaient bandés et l'oeil glacial qu'ils me jetèrent me fit baisser la tête. L'un d'eux, un type aux cheveux décolorés et un piercing dans l'arcade sourcilière, se pencha vers moi, les sourcils froncés :
« T'es le frère de cette pédale de Matsuno ? », dit-il.
Sans le regarder, j'acquiesça et il sembla satisfait. Il se rapprocha un peu plus de moi et son haleine infecte me parvint clairement, je retins une grimace.
« Ton trou du cul de frère me doit du fric depuis un bail et il n'a toujours pas remboursé, cracha-t-il. Tu ne saurais pas où il est, par hasard ? »
Mon cœur s'agitait dans ma poitrine et mes mains étaient toute moites. J'étais pris d'un élan de panique totale : Osomatsu devait de l'argent ces types ? Pourquoi diable eux ? Etait-il inconscient à ce point ? Caché dans un des cabinets, il ne se manifesta pas et je ne risqua même pas un regard en direction de la porte derrière laquelle il se cachait, de peur qu'ils ne devinent tout. J'ouvris la bouche, mais tout ce que je pus produire fut des monosyllabes incompréhensibles. Le type ria.
« Très bien, dit-il. Visiblement ton frère s'est fait la malle, alors on va s'occuper de toi à la place. », et il appuya un doigt contre ma poitrine lorsqu'il prononça le mot toi.
Il me bouscula à l'intérieur des toilettes et le reste du groupe ferma la porte derrière nous. Le type aux cheveux décolorés me saisit par le col et me cogna la tête contre le mur sale de la pièce. Un cri de douleur s'échappa de ma gorge et je n'eut comme réponse que le rire guttural des quatre hommes qui m'entouraient ; je réalisais alors que personne ne viendrait m'aider et que mes cris seraient tous retenus entre les parois de la pièce, comme si elle était entourée d'une carapace qui la coupait du monde. L'un des types me souleva en m'agrippant par les cheveux et je hurla de douleur ; agacé, il me lâcha et fourra un violent coup de poing sur mon nez, faisant rebondir ma tête contre le mur. Soudain vide de forces, je m'écroula sur le sol qui se colora peu à peu de tâches de sang. Je ne compris pas ce qui se passa ensuite, car mes yeux ne semblaient plus être connecter à mon cerveau : une douleur froide m'écrasa l'estomac et je me roula sur le sol, puis une pluie de coups s'abattit sur moi tous plus violents les uns que les autres : j'avais l'impression que des marteaux me tombaient sur la tête, le dos, les côtes et je crois que je me mis à pleurer. Au bout d'un moment, ils cessèrent leur torture et marmonnèrent quelque chose entre eux, le peu de ce que j'entendit et que mon cerveau fut à même de comprendre fut :
« Quelle merde, ce type. Au moins, Matsuno comprendra la leçon : s'il ne nous rembourse pas, on lui refera le portrait à lui aussi. »
Puis ils quittèrent les toilettes sans plus de cérémonie. Je mis plusieurs minutes à comprendre que j'étais seul et que c'était enfin terminé ; la douleur résonnait toujours dans mon corps et instinctivement, je restais recroquevillé sur le sol. Derrière moi, j'entendis le cliquetis d'un verrou et l'une des portes des cabinets s'ouvrit lentement : Osomatsu s'avança prudemment vers moi, mais j'étais incapable de lever la tête vers lui, j'avais l'impression que tous mes os étaient brisés. Il s'agenouilla près de moi et glissa ses mains sous mon menton pour me lever la tête, mais d'un geste, je me déroba. Je ne savais pas quoi penser de tout cela. Je venais de me faire tabasser par des types que je ne connaissais pas, simplement parce que mon grand frère ne leur avait pas rendu leur argent. Le sang dégoulinait de mes narines gonflées jusqu'au carrelage, et je devinais sans problème les endroits où d'énormes tâches se formaient déjà. Tout cela, à cause de lui.
« Choromatsu... tout va bien ? », demanda-t-il sans me toucher.
Je ne répondis rien, à la fois parce que je n'avais aucune envie de discuter et parce que ma gorge me faisait horriblement mal. Péniblement et manquant de chavirer à chaque mouvement, je me leva ; il tenta de m'aider en proposant sa main ou son bras, mais à chaque fois je l'ignorais sans un regard. Lorsque je me tins sur mes deux jambes, je sentis que mon équilibre était précaire, alors je m'appuya contre l'évier. Je me rinça le visage et à défaut d'avoir réussit à arrêter le saignement de nez, je glissa un morceau de papier toilette dans ma narine. Je nettoya mes mains et mes ongles au savon et frotta jusqu'à ce que ce que les traces de sang disparaissent. Je jeta un rapide coup d'oeil à mon reflet dans la glace, suffisamment long pour que j'y vois la mine pâle et détruite que j'affichais, suffisamment court pour que je n'ai pas envie de fondre en larmes et me jetter sur Osomatsu en hurlant qu'il aille se pendre. Puis lorsque les battements de mon cœur étaient plus calmes et que j'eus suffisamment rassembler mes pensées, je me dirigea vers la porte des toilettes.
« Choromatsu. », appela-t-il.
Je ne me tourna pas, mais m'arrêta devant la porte des toilettes. Mentalement, je me mis à faire un décompte jusqu'à dix au bout duquel je partirais sans lui laisser le temps de parler, mais il ouvrit la bouche au bout de six.
« Je suis désolé. », dit-il.
Mes doigts se resserrèrent sur la poignée de la porte, car je connaissais bien l'hypocrisie innocente de mon frère. Je sentais dans le ton de sa voix qu'il disait ça parce qu'il n'avait rien d'autre à dire, qu'il voulait simplement s'assurer que je ne le détestais pas. Il se fichait de s'excuser ou de ses propres responsabilités dans cette histoire. Je fis un imperceptible mouvement de la tête et répondit d'une voix basse, presque inaudible :
« Ce n'est rien. »
Puis j'abaissa la poignée de la porte et quitta les toilettes. Je sentis sur moi le regard d'Osomatsu, mais ne lui accorda aucun regard, rien, pas même la moindre marque du mépris que je nourrissais envers lui et qui ne fit que croître au fil des journées qui suivirent.
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Mardi 4 avril
Parkamatsu. J’ai honte de ce texte : aucune relecture, écrit en pls morceaux, donc risque que la structure sonne faux. Lemon franchement pas terrible.
2224 mots.
Je n'en pouvais plus. Appuyé de tout mon poids contre les portes du métro, incapable de tenir sur mes jambes sans flancher, je sentais des vibrations partir de mon bas-ventre, se glisser dans mes cuisses et les liquéfier, puis remonter jusqu'à mon cerveau qui ne répondait plus de rien. J'enregistrais les informations autour de moi : il y avait deux jeunes femmes qui avaient l'air de rentrer du boulot et qui riaient aux éclats, et un vieil homme assis un peu plus loin, un journal sur les genoux. Nous étions sur une ligne peu empruntée à une heure où il n'y avait plus beaucoup de monde. Au bout d'un moment, les deux jeunes femmes me jetèrent un drôle de regard comme si elles venaient enfin de deviner ce qu'il se passait sous leurs yeux depuis une bonne dizaine de minutes, je devais avoir l'air complètement perdu, hagard ou défoncé – au choix – et elles s'empressèrent de descendre à l'arrêt suivant en marmonnant quelque chose.
Les mains fébriles, je frottais mes cuisses pour essayer de me maintenir le plus alerte possible ; j'avais l'impression de pouvoir tomber dans les pommes à tout moment. Une main vint me caresser le visage.
« Tout va bien, Ichimatsu ? », me demanda Osomatsu assis à ma droite, le ton un peu trop innocent.
J'acquiesça distraitement, incapable de me tourner vers lui et de prononcer le moindre mot ; mon corps avait l'air de se dérober de mon contrôle. Un couple de quadragénaires monta dans notre wagon : un homme aux cheveux poivre et sel et une femme qui exhibait fièrement son grand sac rouge vernis. Instinctivement, je resserra mes jambes l'une contre l'autre, la tête baissée, et à cet instant précis, une vibration plus forte se répandit dans mon corps, comme une vague brûlante qui m'ensevelissait et je crus défaillir ; ma tête tourna violemment et mes yeux ne comprenaient plus ce qu'il se passait autour de moi.
«Tout va bien, jeune homme ? », demanda une voix au-dessus de ma tête.
Je leva les yeux et croisa le regard soucieux de la femme au sac rouge, penchée vers moi ; derrière elle, je devinais l'oeil suspicieux de son compagnon. Je tenta d'articuler quelque chose d’intelligible, en vain, mon esprit était trop embrumé par le plaisir qui se diffusait depuis dans mon corps tremblant ; tout ce que je pus produire fut un râle étranglé.
« Ne vous inquiétez pas, intervint alors Osomatsu sans me regarder. Il est simplement malade, je le ramène chez lui. »
Il posa une main sur mon épaule, l'air de dire qu'il avait l'habitude. La femme l'observa quelques secondes, me jaugea une dernière fois et hocha la tête avant de retourner auprès de son ami.
J'appuyais un peu plus mon dos contre la porte du métro, craignant de tomber à cause des secousses ; discrètement, j'essayais de calmer ma respiration saccadée : mon cœur battait à toute allure et je craignais que les choses n'empirent. Je ne devais plus ressembler à grand chose : la chaleur de mon corps me faisait transpirer et mes vêtements étaient trop grands pour moi, mais servaient au moins à dissimuler ma douloureuse érection. Le wagon s'arrêta une nouvelle fois à un arrêt et le vieux monsieur assis un peu plus loin descendit ; je n'avais qu'une hâte : que le métro soit définitivement vide.
Je leva la tête pour croiser le regard d'Osomatsu et le sourire qu'il me lança me fit craindre le pire. Sa main gauche glissa dans la poche de son pull et une seconde plus tard, mes jambes se dérobaient brusquement comme si elles ne pouvaient plus supporter mon poids, et je tombais sur les genoux. Je n'avais aucune idée de si on pouvait le voir, mais je sentais mon sous-vêtement tremper et mon corps était dévorée par l'envie de jouir. Cependant, le sol froid du métro calma temporairement la tension de mon corps. La femme au sac rouge pivota vers moi, mais son ami l'attira en arrière avec une grimace de dégoût – avait-il tout compris ? Osomatsu se pencha vers moi et m'aida à me redresser. Il adressa un sourire d'excuse au couple avant de faire mine de s'assurer que tout allait bien, mais je sentais bien ses doigts douloureusement enfoncés dans la peau de mon bras comme une punition silencieuse et au creux de mon oreille, je l'entendis murmurer le ton menaçant :
« Je te conseille d'être plus discret si tu ne veux pas que je te baise sur le champ, devant tous ces gens. »
Son souffle contre ma peau électrifia mon corps et fébrilement j'acquiesçait. Je décida de tourner le dos au couple et de faire face aux portes du métro : dans le reflet de la vitre, je pus apercevoir l'allure que j'avais – plein de sueur, le souffle court, les cheveux en désordre. Je ne ressemblais rien, mais ce n'est pas comme si j'avais un jour ressemblé à quelque chose de toute façon. Mes doigts s'enroulaient de toutes leurs forces autour de la rampe en métal et je tentais de garder mon équilibre. Mon corps tremblait par intermittence, je sentais la chaleur dévorer mes organes et ma peau était si sensible que lorsqu'Osomatsu me frôla la main, je gémit.
A l'arrêt suivant, je vis dans le reflet de la vitre le couple descendre précipitamment du wagon. Peut-être avaient-ils décidé de s'arrêter quelque part, mais je pensais plutôt qu'ils comptaient changer de wagon, voire de métro. Mais mon esprit cessa vite de répondre à cette question, car nous étions désormais seuls. Je jeta quelques regards à droite et à gauche, avant de croiser celui d'Osomatsu. Je n'eus le temps de dire quoi que ce soit que déjà, ses lèvres étaient appuyées contre les miennes : ce n'était pas un baiser tendre, c'était un automatisme, on se disait qu'il fallait nécessairement passer par cette petite étape avant de commencer – bien que notre jeu ait commencé depuis bien plus longtemps. Ses doigts glissaient sur mon corps avec précipitation et moi, j'étais incapable de mouvements, seulement de m'agripper à lui.
« Putain... », grogna-t-il contre ma peau.
Je réalisa qu'il était aussi excité que moi et que ça n'avait été qu'au prix de lourds efforts qu'il s'était retenu jusque là de me sauter dessus. Ses doigts s'enfoncèrent dans ma chair pour m'immobiliser et il m'ordonna dans un murmure :
« Par terre. Allonge-toi par terre. »
Sans rien dire, je m'exécutait.
Bientôt, j'eu l'impression que le petit gadget enfoncé en moi était trop petit pour combler mon vide et mon désir d'orgasme. Je ne souhaitais qu'une chose désormais : jouir, jouir, putain, oui, jouir. Je n'avais plus conscience de ce qu'il se passait autour de moi, mes yeux voyaient flou, mes bras et mes jambes ne répondaient plus aux messages de mon cerveau. Je savais qu'il n'y avait plus personne dans le wagon, alors je me laissa aller et je répétais comme une litanie :
« Osomatsu-niisan... Osomatsu-niisan... »
Osomatsu, je ne le voyais même plus. Mes yeux regardaient partout sans rien voir du tout.
Ecroulé par terre, mon bassin bougeait en rythme avec les déflagrations de plaisir qu'envoyait partout dans mon corps l'oeuf niché entre mes fesses, ma respiration s'accélérait et je me pris à fantasmer sur ce qu'Osomatsu pensait de moi à ce moment-là. Ce type est dégueulasse ; comment peut-il se comporter ainsi en public et avec son frère en plus, devait-il se dire. Quel animal. Je me fichais de me frotter comme un chien contre le sol crade, le plaisir annihilait tout de mon sens commun.
Au bout d'un moment, je sentis quelque chose appuyer contre mon entre-jambe et ouvrit les yeux : au-dessus de moi – sa silhouette était difficilement visible à cause du contre-jour qui s’opérait avec les néons du métro –, Osomatsu avait posé son pied contre mon érection. D'abord le contact fut léger, presque imperceptible, puis il devint plus fort jusqu'à ce qu'il écrase complètement mon membre déjà endolori par son érection prolongée. Je balança la tête en arrière, retenant un cri de douleur, tandis qu'il mouvait son pied en cercles et maintenant la pression. Il secoua doucement la tête.
« Tu m'écoeures, Ichimatsu. Tu me dégoûtes. Tu n'arrives même plus à te faire jouir seul, tu as maintenant besoin de l'aide de ton frère ? »
Je devinais son ton moqueur dans sa voix et je laissa échapper un gémissement plus fort.
« S'il te plaît... hnnn... S'il te... plaît... », articulais-je entre deux sanglots de douleur et de plaisir.
J'avais horreur de le supplier, mais bon sang, la sensation d'être à sa merci était beaucoup trop sublime pour la refuser. Il me sembla qu'il sortit de sa poche la petite manette du gadget et qu'un grand sourire étira ses lèvres ; mes yeux ne quittaient plus ses doigts qui glissait sur le petit objet et ma tête se cogna violemment contre le mur lorsqu'il tourna la manette à son maximum.
« D-Dieu... ! O-osoma... ahhhmm... tsu-nii... ! »
Mon corps se cambra sur le sol et je tenta d'agripper quelque chose et d'y enfoncer mes ongles pour canaliser douleur et plaisir qui se mélangeaient en moi. Le wagon continuait de rouler sur ses rails, tandis que je saisis entre mes doigts tremblants le tissu de mon sweat violet et m'y agrippait de toutes mes forces, quitte à le déchirer. Mon membre était gorgé de sang tant j'avais attendu, tant j'avais enduré son érection pendant des heures la journée durant ; Osomatsu m'avait traîné dans divers lieux publics jusqu'à ce métro où, étendu sur le sol, me tordant de plaisir, j'allais enfin pouvoir atteindre la libération.
Ma voix devenait de plus en plus aiguë.
« P-pitié... Osoma... P-putain ! »
Mon gémissement fut brutalement interrompu par la voix automatisée des hauts-parleurs, annonçant le prochain arrêt : XXXX. Mon sang ne fit qu'un tour et je palis un instant à l'idée d'être vu dans toute ma misère, implorant que l'on me fasse jouir. Pourtant, la seconde suivante, une impatience grossit en moi : un mélange de peur et d'excitation intense, le désir d'être vu, oui, d'être regardé de haut, d'être méprisé, de jouir dans l'humiliation de n'être rien de moins qu'un animal en chaleur. Et je sus au regard luxurieux que me lança Osomatsu qu'il venait d'avoir la même idée que moi.
Aucun mot ne fut échangé durant les premières secondes. Osomatsu se pencha vers moi, libéra mon membre dur et sur le point d'exploser et enroula ses doigts autour : le mouvement de sa main était rapide, trop rapide, et rapidement mes gémissements se transformèrent en cris. Je le suppliais d'aller plus vite, à demi-mot de me faire mal. Il commençait à transpirer et il jetait des regards par la vitre pour s'assurer que nous avions encore un peu de temps, rien qu'un peu. Son visage virait au rouge et lorsque nos regards se croisions, je me sentais monter de plus en plus vers l'orgasme. Ses doigts continuaient de courir le long de mon membre avant d'ensserrer de toutes leurs forces son sommet.
« Plus vite... O-oui, plus vite...», suppliais-je une dernière fois, la respiration coupée par le plaisir.
Je n'avais bientôt plus la force de crier et je sentais mon corps fondre, disparaître dans la vague de plaisir qui m'envahissait. Mais la voix dans le haut-parleur annonça une nouvelle fois l'arrêt de métro, signe que nous étions sur le point de nous arrêter au quai. Et en une seconde, sans même que je ne le remarque, Osomatsu fourra sa main dans mon pantalon jusqu'à mes fesses et y enfonça ses doigts, sans douceur sans prévenir : ses doigts enfoncèrent le gadget qui vibrait encore en moi directement, directement contre ma prostate. Mon corps se cambra brusquement, se secoua sans que je ne puisse l'arrêter et un violent cri, presque d'agonie, s'échappa de ma gorge. Je jouis comme je n'avais jamais pu le faire auparavant.
Ma tête tournait, je ne plus rien autour de moi et mon corps refusait de bouger. Je sentis des mains me tirer vers le haut, puis me soutenir pour que je puisse rester debout. Je sentais contre moi l'odeur d'Osomatsu et avant que je ne perde connaissance, j'aperçus les regards dégoûtés et horrifiés des hommes et des femmes qui venaient de monter à l'arrêt XXXX.
Qu'il m'écrase, me traite comme l'animal que je suis, qu'il m'humilie. Que tout le monde me regarde, me regarde en train de suer et de supplier mon frère de me faire jouir.
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Lundi 3 avril
Choro, un peu de sokudo. 1441 mots. Aucune relecture. Pas le temps en ce moment, gomen.
Mon corps était étendu entre les brins d'herbe. Je sentais les cailloux et les monticules de terre inconfortables sous mon dos. La brise nocturne caressait le bout de mon nez et ma nuque, et je sentais ma conscience emportée par les particules de l'air qui courrait à toute vitesse dans la ville. Mon corps restait allongé dans ce parc que les réverbères, beaucoup trop loin, ne parvenaient à éclairer ; pourtant, mes yeux se délectaient (ou peut-être imaginaient, je ne sais plus) des magnifiques assiettes disposées sur la table de la salle à manger de la maison de notre voisin ; je voyais aussi le fleuriste qui rentrer les derniers pots de fleurs à l'intérieur de sa boutique et les dernières vieilles dames qui tiraient leurs chariots, jacassant si fort qu'on les entendait dans toute la rue. Les odeurs aussi me semblèrent plus proches, à commencer par celle des fleurs que je pouvais aisément distinguer : le parfum des capucines était plus épicé que celui des pâquerettes par exemple. Les sens me paraissaient plus clairs et j'entendais le brouhaha habituel qui avait quitté les rues pour se réfugier à l'intérieur des maisons, et ces familles qui se réunissaient autour de bons plats fumants à base de pommes de terre et de viande rouge, avec les lumières qui diffusaient une ambiance réconfortante, les parents qui parlaient forts et criaient sur leurs enfants ou se disputaient entre eux, et les enfants attablés qui s'envoyaient discrètement de la nourriture tandis que la télévision diffusait l'émission de danse et de chant du samedi soir, oui tout cela me sembla tout à coup si lointain, inaccessible et mon cœur le désira fortement.
Ma conscience collait son visage contre les vitres des maisons et tentait de déchiffrer ce qu'on y disait, peut-être pour y entendre une formule magique pour qu'à mon tour, je puisse vivre la même chose qu'eux : se réunir chaque samedi soir dans le séjour bien décoré et chaleureux de sa maison, en compagnie de sa famille et sa famille serait polie, tout le monde s'entendrait avec tout le monde, la famille serait normale.
Tout à coup, un chien aboya et ma conscience retourna précipitamment dans mon corps et j'ouvris les yeux en sursautant. Au-dessus de ma tête défilaient de lourds nuages poussés par le vent, camouflant la lumière de la lune. Il était tard, pourtant je n'avais aucune envie de rentrer chez moi. La crainte d'une éventuelle punition suffisait à me faire courir à toute vitesse jusque chez moi d'habitude, mais mon corps semblait résolu à ne pas bouger et mon esprit n'avait plus la force de se faire violence. Il était épuisé de se faire violence, se faire violence de rester droit, poli, discipliné ; se faire violence pour refouler des injures contre mes frères pour ne pas envenimer la situation parce que c'était toujours mon rôle finalement de veiller à l'équilibre, et préserver le calme et l'harmonie ; se faire violence pour travailler durement et ramener les meilleures notes et rassurer mes parents, catastrophés devant l'échec scolaire du reste de mes frères ; se faire violence pour ignorer mes propres sentiments et faire comme si de rien n'était, rien ne s'était passé, je ne ressentais rien et lui non-plus, comme si on ne s'était jamais embrassé. Je n'en avais plus la force : toutes mes énergies avaient été épuisées, par la fougue de mes frères que je devais toujours rappeler à l'ordre, par l'intensité de mon travail scolaire et maintenant, par ça. Par ces sentiments. J'étais comme un grand réservoir et tout le monde venait y prendre sa part sans jamais me demander mon avis.
Le vent repoussa les nuages vers l'horizon et la lune brillait librement au centre du ciel. Une bouffée d'air frais se glissa dans mes poumons et je sentis les larmes me monter aux yeux, et comme j'étais seul dans la nuit noire, je ne chercha pas à les retenir. Ma gorge laissait échapper quelques hoquets à peine contenus et qui se perdaient dans le silence. Je tentais de calmer ma voix en appuyant ma main contre ma bouche, mais mon absence de volonté, ma lassitude, mon épuisement eurent raison de moi et je me roula sur l'herbe en cocon. Ma voix tressautait dans des gémissements étranglés et mon corps tremblait de tout son long à cause des larmes et du froid, mais étrangement cela me fit à la fois un bien fou et prendre conscience du déni dans lequel je vivais. J'avais nié tout cela, nié la manière dont je m'étais fait passé au second plan et laissé lâchement les autres prendre la première place, nié que je n'étais pas heureux.
Au bout d'un moment, la lune disparut à nouveau derrière les nuages et mes sanglots se calmèrent. J'essuya d'un geste maladroit mon visage à l'aide de ma manche pleine de terre et me redressa, trop vite, manquant de trébucher. Je ramassa mon sac qui me parut anormalement lourd, sûrement à cause de mon corps et mes muscles épuisés, et partit sans un regard pour les maisons où les familles dinaient joyeusement.
Je descendis la colline et rencontra deux chats errants qui miaulèrent bruyamment en me voyant, avant de courir se réfugier sous les voitures. Les lumières des magasins s'éteignaient au fur et à mesure que je passais devant, tandis que les carreaux des cuisines brillaient dans la nuit. Les réverbères grésillaient au-dessus de ma tête et étaient même à certains angles de la rue, m'obligeant à presser le pas. Lorsque j'arriva devant le perron de ma maison, les cris de mes frères – Osomatsu et Todomatsu plus particulièrement – arrivèrent jusqu'à mes oreilles et je passa le seuil en soupirant. Une flopée de jurons m’accueillit, mes frères passèrent devant moi sans me voir. Karamatsu tentait vainement de calmer la querelle qui les opposait, c'était lui qui me remplaçait lorsque j'étais lassé de leurs disputes stupides. Il fut le seul à me voir entrer et m'adressa un rapide mouvement de la tête : son regard traduisait son impuissance et je savais qu'il me suppliait silencieusement de lui venir en aide, mais je n'en fis rien. Je ne chercha même pas à comprendre ce qu'il se passait, je me déchaussa et monta à l'étage dans notre chambre sans un mot.
Les cris de mes frères, auxquels s'étaient ajoutés ceux de ma mère, résonnaient sous mes pieds, c'était épuisant mais au moins, ils m'empêchaient de trop penser. J'étais épuisé et je ne souhaitais qu'une chose : m'endormir pour ne plus penser à rien. Je déplia rapidement le futon et enfila un pyjama avant de me glisser sous les draps. Je dus mettre une bonne demi-heure avant de trouver le sommeil et alors que mes yeux se fermaient enfin, la porte s'ouvrit. Todomatsu était en train de parler mais s'arrêta net lorsqu'il réalisa que je dormais. Il fit signe à ses frères d'être silencieux et tous se changèrent ; pendant une dizaine de minutes, je n'entendus que bruits de fermeture Eclair et de vêtements que l'on jette par terre : un silence comme on en voyait rarement à la maison, seulement ponctués de quelques rires vite réprimandés par Karamatsu. Puis ils se glissèrent chacun leur tour sous la couette : Jyuushimatsu s'allongea à ma gauche et s'enroula dans la couverture, me tourner le dos ; Osomatsu, lui, s'installa à ma droite et se tourna vers moi. Je gardais les yeux fermés, faisant mine d'être endormi, mais je sentis qu'il s'approcha de moi et ses bras vinrent s'enrouler autour de ma taille. Supposément endormi, je me laissa faire sans broncher, mais je sentais que mon corps était tendu. Il nicha sa tête dans mon cou et je dus violemment réprimander de contenir un gémissement.
« Tu devrais sérieusement penser à arrêter ça, commenta Todomatsu d'un ton écoeuré.
— Ne recommence pas, Totty. », le prévint Karamatsu, craignant un début de nouvelle dispute.
Pour toute réponse, Osomatsu me serra plus fort contre lui et je l'entendis respirer contre ma peau, m'arrachant un frisson. La lumière fut finalement éteinte et tout le monde s'endormit. J'ai honte de l'avouer, mais la chaleur du corps d'Osomatsu contre le mien m'aida aussi à trouver rapidement le sommeil.
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Dimanche 2 avril
Ichi/Todo. 1042 mots. Peu d’inspiration :-(
Toujours dans cette optique de “souvenirs”. Ils ont environ 14 yo ici.
Aujourd'hui était un jour très particulier. Cela faisait deux semaines que je l'attendais patiemment, y songeant parfois sous la douche, dans le bus en me rendant en cours ou quelques minutes avant de m'endormir, l'excitation dans le ventre. Ce samedi après-midi, chacun de mes frères avait quelque chose de prévu : Osomatsu décida d'accompagner Karamatsu à son cours de guitare, espérant se passionner pour cet instrument et ainsi plus facilement séduire les filles de sa classe ; Choromatsu accompagnait notre mère au centre commercial pour faire je ne sais quelles emplettes ; et Jyuushimatsu était partit rendre visite à sa petite amie, Homura. L'occasion était parfaite.
Lorsque la porte d'entrée avait claquée, je n'avais pas attendu longtemps avant de descendre à l'étage. Ichimatsu regardait distraitement la télévision, le menton appuyé sur la paume de sa main. Lorsque j'apparut dans l'encadrement de la pièce, il détourna les yeux de l'écran et me jaugea longuement. Je me souviens que j'avais eu très peur qu'il décide de tout annuler, qu'il me dise qu'on ne pouvait pas faire ça. Il esquissa un sourire et rapidement, je le rejoignis et m'installa près de lui.
Nous mîmes un moment à nous cordonner. Nous n'avions l'habitude de rien, ni de nous embrasser, ni de nous toucher les corps. Les rares fois où nous nous permettions ses rapprochements étaient si courts que nous ne gardions qu'un faible souvenir de la texture de la peau de l'autre, ou de la forme de la partie du corps que nous avions touchée. Mais aujourd'hui, nous avions tout le temps que nous souhaitions.
Ichimatsu était le plus agressif de nous deux. Ses lèvres s'étaient littéralement ruées sur les miennes et sa langue avait tôt fait de chercher la mienne. Ses dents mordaient ma lèvre inférieure et un gémissait se faufilait systématiquement en dehors de ma gorge. Nos baisers étaient maladroits, mais à défaut d'être très tendres, ils étaient passionnels. Du moins, c'était ainsi que je voyais les choses.
Je savais que je, que nous n'étions pas les premiers à dépasser les limites de la fraternité et à flirter avec l'immoral. Tout le reste des mes frères avait déjà fait quelque chose. Pourtant, quand j'entendais que Karamatsu avait couché avec Osomatsu, j'étais persuadé que ça n'avait rien avoir à ce qu'il se passait entre moi et Ichimatsu. La façon dont nous nous regardions, le désir qui nous empêchait de résister l'un à l'autre prouvaient que nous faisions bien autre chose que de seulement s'amuser. Moi, c'était ma première fois et j'étais heureux de l'avoir réserver pour lui.
Soudain, l'idée que cela ne soit cependant pas la première fois d'Ichimatsu germa dans mon esprit et je sentis une boule de jalousie grossir dans ma poitrine. Je m'arrêta une seconde dans mes mouvements, hésitant : je voulais lui poser la question, savoir si je pouvais l'avoir tout à moi ou si il appartenait déjà à quelqu'un d'autre, mais ses lèvres s'appuyèrent une nouvelle fois contre les miennes et je tenta de mettre un terme au flot de pensées dans ma tête – en vain.
Les mains d'Ichimatsu escaladèrent ma poitrine jusqu'au col de ma chemise, non pas pour le déboutonner, mais pour enrouler ses doigts autour de mon cou. Un souffle s'échappa instinctivement de mes lèvres avant même qu'il n'ait fait quoi que ce soit ; il sourit et ses mains se resserrèrent autour de ma peau. Ce n'était pas la première fois que nous nous adonnions à ce jeu-là et je sentais mon corps réagir et se tendre, anticipant tout ce qu'il allait me faire subir et ressentir. Mais ses mains me rendirent à l'air libre rapidement, trop rapidement, et d'un geste frustré, je le rapprocha de moi.
Il appuya ses lèvres contre mon cou et ses mains faisaient des mouvements ronds dans mon dos. Pourquoi revenait-il à des gestes si tièdes, bon sang ? Lorsqu'il planta ses lèvres dans ma peau, je gémissait : ce n'était pas assez. Je tenta de le lui faire comprendre, mais il repoussa poliment mes mains qui se faufilaient sous sa chemise et ma jambe qui remontait le long de sa jambe. Je finit par douter : peut-être ne voulait-il pas aller aussi loin aujourd'hui ? Et si ce n'était pas spécifiquement aujourd'hui, mais avec moi tout court ? Je me sentais ridicule.
Ses lèvres chaudes et humides contre ma peau, ses mains calleuses qui empoignaient un peu trop douloureusement mes hanches et son regard prédateur et luxurieux – tout me parut prendre brusquement un ton nouveau. Je ne voyais plus en lui l'attitude d'un amant impatient, mais plutôt de celui qui a l'habitude de ce genre de situations. L'idée qu'Ichimatsu ait déjà eu une relation avec un de mes frères me parut alors évidente et tout à coup, toute excitation s'évanouit dans mon corps.
Ichimatsu le remarqua aussitôt puisqu'il recula ses lèvres des miennes et plongea ses yeux dans les miens.
« Qu'est-ce qu'il y a ? », demanda-t-il d'une voix granuleuse.
Je secoua doucement la tête. Pourquoi agissais-je ainsi ? Je voulais qu'il me parle, qu'il me pose des questions, je voulais l'amener à ce qu'il m'explique et au fond de moi, je priais pour qu'il démente mes doutes. Il soupira et se gratta la tête.
« Tu... n'en as plus envie ? », poursuivit-il plus doucement.
Je ne répondis pas. Oui, bien sûr que je n'en avais plus envie. L'idée de devoir le partager avec quelqu'un d'autre me révulsait, et il était hors de question que ces mains, qui avaient caressé un autre corps, s'approchent du mien. Instinctivement, je remonta mes genoux contre ma poitrine.
Au bout de quelques secondes, Ichimatsu glissa une main dans ses cheveux et se leva. Il réajusta ses vêtements et quitta le séjour, me laissant en boule sur le sol de la pièce. Je ne tarda pas à me mettre à pleurer.
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Mardi 14 mars
All matsus. Suite du précédent texte. Souvenir du passé, époque collège. Love the way Choro care about all his bros. <3
2633 mots.
Il y a une semaine, ma mère avait décidé de nous emmener en vacances chez notre tante. Nous étions tous montés dans la voiture, une vieille Golf blanche dont une des portières avait été remplacée par une noire, et qui n'avait pas la radio ; moi et mes frères nous étions entassés les uns contre les autres sur les trois petits sièges arrières, puis nous avions finit par décider de nous asseoir sur nos genoux : Todomatsu grimpa sur les genoux d'Osomatsu, Jyuushimatsu sur ceux de Karamatsu et Ichimatsu, sur les miens. Durant tout le trajet jusqu'au pavillon de notre tante, qui vivait à une cinquante de kilomètres, mon père jetait des regards inquiets en arrière, craignant que le coffre ne cède et explose à cause des deux grosses valises qui contenaient la plupart de nos affaires, mais nous arrivâmes sans problème à destination.
Notre tante habitait un grand pavillon à deux étages et avait même un petit jardin. Elle nous avait ouvrit la porte avec un sourire crispé : elle se gardait bien de le dire, mais elle ne raffolait pas de notre présence. Elle passait son temps à nous crier d'enlever nos chaussures avant de rentrer du jardin, de nettoyer la table après que nous ayons finit de manger et de faire notre toilette sans éclabousser le sol de la salle de bain. Nous non-plus n'étions pas ravis de passer deux semaines de vacances chez elle, mais nous n'avions pas le choix et à dire vrai, pas mieux à faire. Ma mère nous abonda de recommandations – ne vous couchez pas trop tard, ne faites pas trop de bruit lorsque votre tante fait sa sieste, ne gaspillez pas l'électricité – et nous demanda, à moi et Karamatsu, ceux qu'elle jugeait les plus responsables, de s'assurer que tout se passe pour le mieux, puis elle partit.
Nous étions à la fin du mois de juillet. Le soleil commençait à se réchauffer en prévision du mois d'août, le plus rude de l'année. Nous avions entre dix et douze ans à cette époque et notre année de cinquième venait de s'achever. De nous six, j'étais celui qui avait finit l'année avec le meilleur bulletin ; Karamatsu et Todomatsu avaient aussi eu de bons résultats, quant aux trois derniers, les notes étaient si chaotiques que leurs professeurs durent convoquer nos parents à chaque trimestre pour faire le point. L'année prochaine, nous entrions en quatrième, l'année précédent le brevet des collèges, et j'étais tout anxieux et tout excité à la fois.
Lorsque nous entendirent la portière de la voiture claquer, puis le moteur gronder dans la rue, notre tante nous ordonna de monter nos bagages dans notre chambre, une grande pièce avec un carrelage assez vieux et très poussiéreuse qui n'avait pas été nettoyer ou aérer depuis longtemps. Il y avait un lit, plutôt grand, mais qui de toute évidence était bien trop petit pour nous six et je songeais déjà à l'organisation dont il faudra faire preuve pour réussir à passer des nuits décentes. Un petit meuble était installé dans un coin, calé contre les murs au papier peint jauni, et un vieux téléviseur était posé dessus – malheureusement, il n'y avait aucune prise dans la pièce pour pouvoir le faire fonctionner.
« Bon sang, ne pouvait-elle pas au moins passer un coup de balai ? », se plaignit Todomatsu en pénétrant la pièce.
Il jeta un regard dégouté vers les petits cadavres d'insectes qui traînaient sous le chauffage et qui avaient du mourir à cause de la chaleur. Jyuushimatsu bondit sur le lit et je dus le traîner de force pour qu'il en descende ; nous nous attelèrent ensuite à le dépoussiérer, car qui sait quels insectes avaient pu se cacher sous les draps, et passèrent même le balai et aérèrent la pièce en ouvrant grand les fenêtres. Il n'y avait malheureusement aucun meuble ni étagère pour vider nos valises, et nous décidèrent de garder nos affaires emballées.
Le ménage terminé, Osomatsu et Jyuushimatsu réclamèrent rapidement de se rendre dans le jardin. Je soupirais et décida de les suivre, tandis qu'Ichimatsu et Todomatsu restaient à l'intérieur. Bien que notre maison soit grande et avait un petit balconnet, elle ne disposait cependant pas de jardin et c'était cette différence qui faisait de la demeure de notre tante un luxe. Notre tante gardait sa maison bien rangée et très propre et exception faite de la chambre qu'elle nous avait prêtée, le reste de la maison était impeccable et très seyant. Dans le séjour par exemple brillait un grand lustre suspendu au plafond, apparement en cristal comme aimait le répéter notre tante, et la télévision était un bel écran plasma. Lorsque nous lui demandions pourquoi notre chambre était en si misérable état, elle répondait avec un geste agacé de la main qu'elle n'avait pas envie de rénover la pièce si c'était pour que nous venions y passer nos vacances ensuite.
Dans le petit jardin, les pommiers longeaient les murs de la petite cour : de loin ils ressemblaient à de gros bonhommes aux bras cours, et si on se rapprochait, on pouvait voir sur leurs petites et épaisses branches, les bourgeons qui deviendraient soit de belles pommes vertes soit de jolies fleurs blanches. Le gazon tondu recouvrait l'ensemble du carré délimité par les murets, et aucune fleur ne venait distordre la ligne impeccablement horizontale de l'herbe. Tout au fond de la cour cependant, l'herbe ne poussait plus à cause du soleil qui avait asséché la terre, mais notre tante l'avait retourné et installé de petits plants : l'un de menthe, l'autre de citronnelle ; mais dans ce carré, la terre n'était pas complètement plate et présentait des monticules mal étalés, son aspect chaotique contredisait le reste de la cour impeccable.
« Choromatsu-niisan, est-ce que nous pourrons cueillir les pommes ? Me demanda un Jyuushimatsu tout joyeux qui se languissait de voir les bourgeons éclore en de jolis fruits sous ses yeux.
— Non, lorsqu'elles seront mûres nous serons déjà rentrés à la maison. », dis-je et il afficha une mine déçue.
Au centre de la cour se dressait un grand arbre aux branches et au tronc fins : en ce milieu d'été, il était touffu de belles feuilles vertes et ses branches étaient parfaitement coupées, de sorte qu'elles ne dévient pas sur la cour des voisins ; un panier de basket-ball était installé, attaché grâce à des cordes emmêlés dans les branches, mais il n'y avait aucun ballon pour s'amuser avec. Dans un coin était installé un abri en bois dans lequel je pouvais me tenir debout sans toucher le plafond, et même m'allonger sur le sol complètement à plat tellement il était grand ; on y rangeait une pince à jardinage qui pouvait atteindre deux fois ma taille, une grande tondeuse à gazon, des chaises et des transats qu'on ne dépliaient que lors des fêtes organisées dans le jardin et deux tables en métal elles aussi pliantes, mais qui avaient rouillé à cause de la pluie. Je regrettais l'absence de couleurs et de fleurs, même si notre tante m'avait assuré qu'en automne, les pommiers étaient ravissants et que tout le voisinage sonnait à leur porte pour goûter ses fruits.
Les murs de la cour n'étaient pas très haut de sorte que l'on pouvait apercevoir le jardin des voisins. On aurait dit une forêt : d'immenses arbres dépassaient le muret de plusieurs mètres et même le toit de leur maison ; de grands arbres touffus, si gros que l'on pourrait y construire plusieurs cabanes en bois. Les murs de leur maison étaient faits dans une brique blanche un peu sale et le lierre grimpait un peu partout : notre tante trouvait cela moche et négligé, moi je trouvais ça très beau. J'avais très envie de vivre – quand je serais plus grand, probablement – dans une maison abandonnée à la nature sauvage de la nature, je trouvais cela très inspirant : ce n'était que comme cela que l'on pouvait découvrir sa beauté cachée derrière les ronces et le lierre agressif. Parfois, j'entendais les voix des habitants de la maison et ils avaient l'air tous très heureux, bien moins stricts que notre tante ; ils leur arrivaient même d'organiser des barbecues et il m'arrivait de rester dans le jardin pour profiter des odeurs. A l'inverse, notre tante nous réprimandait dès que nous faisions un peu trop de bruit dans la cour, depuis elle avait confisqué le ballon qu'Osomatsu avait acheté pour jouer au basket-ball. Un jour, je proposa l'idée de faire un barbecue nous aussi, mais elle secoua vivement la tête et dit que la viande, c'était trop grand, qu'on allait salir tout le jardin et que de toute manière, ils n'avaient pas d'appareil à barbecue.
Lorsque le ciel fut complètement noir, nous décidions de rentrer. Ichimatsu et Todomatsu nous avaient rejoints dehors ; il me semble que Jyuushimatsu s'amusait à faire un inventaire des insectes qui vivaient dans le jardin et Karamatsu s'était étrangement pris d'intérêt pour cette activité ; quant à moi, j'avais passé tout le reste de l'après-midi, le dos appuyé contre l'unique arbre de la cour, à bouquiner au soleil. Dans la maison, une délicieuse odeur de pomme et de caramel embaumait l'air et Osomatsu fut le premier à se précipiter dans la cuisine : sur le plan de travail s'étalaient des épluchures de pomme et au fond d'une grande casserole, traînait des restes du caramel que notre tante savait si bien faire ; dans le four, ce qui ressemblait à une tarte cuisait tranquillement, son odeur nous enivrant les narines. Tout le monde se mit à réclamer le caramel de la casserole et nous finirent par chacun en prendre une petite cuillère.
Notre tante nous ordonna de poser la table. Dans le salon, il y avait un grand buffet en bois de chêne dans lequel elle gardait précieusement sa belle vaisselle : de sublimes assiettes aux bordures décorées de fil d'or et des verres dont les manches avaient l'air d'être faits en cristal. Cependant, cette vaisselle était réservée aux invités et nous avions pour ordre d'utiliser la vaisselle de la cuisine, bien moins extravagante. Le dîner était très bon – il fallait admettre que notre tante était très bonne cuisinière – et lorsque la tarte était prête et qu'elle refroidit suffisamment, nous l'avalions en poussant des soupirs de plaisir à chaque bouchée. Malgré nos louanges incessantes sur ses talons de cuisine, notre tante avalait sa part sans décrocher un sourire et si tôt le repas terminer, elle nous fit débarrasser, faire la vaisselle, puis monter dans notre chambre.
Karamatsu avait tenté une nouvelle fois de faire fonctionner le téléviseur, en vain, et nous avions du nous résoudre à une évidence : sitôt la journée terminer, s'occuper chez notre tante devenait compliquer. Nous n'avions pas autant d'espace que chez nous et n'avions rien pour nous divertir ; tout du moins, tel était le cas pour le reste de mes frères, car j'avais pris soin d'emporter suffisamment de livres pour ne jamais m'ennuyer.
« Pff, nous sommes en vacances, Choromatsu-niisan ! Tu pourrais poser deux secondes tes bouquins et chercher une idée de jeu avec nous ? Lança Todomatsu depuis le lit.
— Je me prépare pour l'année prochaine, je vous rappelle que nous avons le brevet à passer, répondis-je simplement en le poussant pour me glisser à mon tour sous la couverture. Et de toute façon, je doute que vous ne trouviez quoi que ce soit d'amusant à faire. »
Osomatsu soupira.
« La rentrée est dans plus d'un mois et le brevet, dans deux ans ! Rétorqua-t-il. Et tu comptais sérieusement te préparer en lisant un roman jeunesse ? »
Je ne répondis pas et me contenta de hausser les épaules. Le reste de la soirée fut animée par des conversations plutôt futiles entre Todomatsu, Osomatsu et Karamatsu ; je me coupais de ma lecture et intervenais ponctuellement, soit quand ils faisaient trop de bruit et que j'étais le seul à entendre les coups de balai que donnait notre tante depuis sa chambre, soit quand ils parlaient de moi en mal et me qualifiaient du plus ennuyeux du groupe. Ichimatsu fut le premier à s'endormir et lorsque nous dûment nous coucher, il fallut le pousser jusqu'au bout du lit en veillant à ce qu'il ne tombe pas et surtout, trouver des positions adéquates pour que tout le monde ait une place. Ainsi, le résultat fut que par intervalle, l'un dorme dans un sens et celui d'à côté, dans le sens inverse ; je dois avouer qu'il fut très compliqué de m'endormir avec les pieds d'Osomatsu en face du visage et ceux de Jyuushimatsu derrière moi, qui en plus gigotait un peu trop pour le maigre espace qui lui était donné.
Finalement, nous réussirent à dormir et le matin, ce fut le bruit des coups de balai de notre tante qui nous réveillâmes et qui nous ordonna de descendre l'aider à nettoyer la maison. Nos journées se poursuivirent ainsi, alternant services rendus à notre tante et après-midi passées dans le jardin ou dans les rues en dégustant une glace. A la fin de la première semaine, nous reçûmes un appel de nos parents depuis leur lieu de vacances qu'ils avaient tenu secret – plus tard, nous apprendrons qu'ils étaient partis en voyage en Thaïlande – et je me chargea de leur faire un topo des sept premiers jours passés chez notre tante ; ma mère m'inonda une nouvelle fois de recommandations avant de raccrocher. Durant la deuxième semaine, notre tante nous donna un peu d'argent pour aller au cinéma et nous décidâmes d'aller voir un film d'horreur : Osomatsu, moi et Ichimatsu avions adoré le film, mais Todomatsu, trop effrayé, prétexta aller aux toilettes et ne revint plus jusqu'à la fin du film. Les nuits furent de plus en plus compliquées, car la chaleur croissait et nous ne voulions qu'une chose : de l'espace pour respirer un peu ; nous abandonn��rent rapidement la couverture qui nous faisait bouillir et ouvrirent les fenêtres, mais les moustiques nous firent rapidement changer d'avis. Heureusement, les tartes de notre tante le lendemain matin compensèrent tous les problèmes nocturnes.
Arriva enfin le jour du départ. Notre mère arriva dans sa vieille Golf blanche, le visage hâlé et un grand chapeau de paille sur la taille, à croire qu'elle n'avait pas vraiment quitté la Thaïlande. En nous apercevant descendre les marches du perron, elle nous salua de grands signes de la main et ni une ni deux, nous grimpèrent dans la voiture pour rentrer rapidement chez nous. Ma mère nous posa tout un tas de questions et nous répondirent que les vacances avaient été formidables pour nous aussi, ce qui était évidemment à moitié vrai puisque certes les tartes et le jardin de notre tante étaient géniaux, il fallait tout de même faire face au lit trop petit et à l'ennui qui planait sans cesse au-dessus de nos têtes ; mais nous ne voulions pas que notre mère se sente coupable, alors nous n'hésitions pas à exagérer les choses jusqu'à ce qu'elle nous promette, croyant nous faire plaisir, de nous emmener là-bas lors des prochaines vacances.
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Lundi 13 mars
J'ai horreur d'écrire ce genre de choses. Je m'étais promis de ne jamais y céder, de ne jamais complaire à la tentation d'écrire sur ce qui nous rend mal, nous fait triste. Pourtant, aujourd'hui je me livre à cet exercice méprisable prétendument thérapeutique qui à mon sens ne peut qu'apporter davantage de misère.
Depuis longtemps, je me berce à l'idée réconfortante que nous ne pouvons choisir la vie que nous voulons, ou en tout cas nous ne pouvons décider de ce qu'elle est dans nos premières années. Nous sommes contraints de nous soumettre aux conditions qu'ont établis nos géniteurs et nous ne pourrons nous en délivrer qu'à l'âge adulte. Quel est cet âge adulte ?, je n'en ai aucune idée. Dans ma jeunesse, je pensais qu'il était aux environs des dix-huit ans et je dois admettre avec déception qu'il n'en est rien. Si j'en venais à y penser longuement, je dirais que cela me brise le cœur de me voir, à dix-huit ans, dans la même situation, dans le même marécage de remords et souffrance, enchaîné des mêmes chaînes et dans la même prison qu'il y a quatre ans.
Disons-le franchement : je n'ai rien choisit de tout cela et je reste intimement convaincu que rien ne se serait passé ainsi, si tout avait été différent – évidence. La décision n'a jamais été placée entre mes mains et jusqu'à ce que je me sorte de ce bourbier, bien qu'un peu tard il faut le dire, elle ne le sera jamais. On ne m'a pas consulté sur la question, la décision a été prise sans âme et conscience et elle perdure, sans que je puisse m'y déroger. Je n'ai même pas essayé pour tout vous dire, et je n'ai jamais cherché à, car il était clair que je risquais l'exclusion et même un aveu de ma mère m'a confirmé que « je n'avais aucune chance de m'enfuir ».
J'ai eu cette prise de conscience il y a quelques temps et je me suis sentie étrange. D'abord, j'ai été profondément déçue par moi-même : moi qui me voyais comme une guerrière, qui ne se laissais jamais dicter sa loi, me voilà en réalité soumise et dominée à mon insu depuis mes neuf ans – le plus douloureux étant d'admettre que mon ignorance balayée, je n'ai pas eu plus de pouvoir sur la situation. Puis j'ai songé à mes parents et je me suis rendu compte que l'image que j'avais d'eux s'était limée : dans mon enfance, ils étaient des porte-paroles de vérité et de justice, l'autorité parfaite qu'il n'avait pas lieu de remettre en cause. Aujourd'hui, ils m'apparaissent sous un autre jour, bien moins valorisant et que je charge de rancune. Cependant, je ne veux pas me morfondre dans des querelles et des reproches silencieux et refuse d'y songer trop longuement. De toute manière, je reviens systématiquement à ce sentiment de honte et cette déception sur la moi du passé et celle du présent.
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Dimanche 12 mars
Ok, big texte : 4730 mots. J’ai pas vraiment fait de relecture.
Edit : +1632 mots.
Speedmatsu.
Tout cela avait commencé dès l'enfance. Osomatsu était l'aîné, le chef ; personne n'avait le droit de remettre en question ses décisions. Il n'était pas tyrannique comme beaucoup d'autres grands frères, mais chacun se sentait intimement obliger d'obéir à des règles implicitement admises – la première de toute étant de ne pas y déroger. Karamatsu était le second ; il était tantôt le bras droit d'Osomatsu tantôt le seul qui avait le droit et le courage de lui tenir tête, notamment quand il se montrait injuste avec les plus jeunes de la fratrie. Il était le plus attentif et attentionné de nous tous, et n'hésitait pas à nous défendre physiquement si quelqu'un voulait nous embêter au collège et au lycée. Bien que Karamatsu était le plus musclé de nous six, Osomatsu compris, c'était toujours ce dernier qui gagnait les bagarres.
Ichimatsu était le quatrième du groupe. Il était le plus discret et le plus réservé, bien qu'à de rares occasions, il parvenait à se confier mais ce, uniquement à Jyuushimatsu. Ses frères aînés ne lui inspiraient aucune confiance, bien au contraire, et le plus jeune, Todomatsu, n'était que mal incarné selon lui ; il ne s'était sincèrement lié d'amitié qu'avec Jyuushimatsu. Karamatsu avait bien tenté de se rapprocher de lui, mais Ichimatsu rejetait systématiquement quiconque chercherait à « le connaître davantage ». Jyuushimatsu était le cinquième et le plus turbulent de tous, Osomatsu sur ses talons. Bien qu'il soit le plus bruyant, peu d'entre nous était réellement capable de décrypter ses comportements : seuls Ichimatsu et les deux aînés s'en étaient avérés capables.
Le dernier était Todomatsu. Il était le plus frêle physiquement, alors Karamatsu et Jyuushimatsu veillaient toujours à ce qu'il n'ait aucun problème au collège et au lycée, et lui proposaient régulièrement d'attendre la fin de son cours de violon pour rentrer à la maison. Bien qu'il soit le petit dernier, il n'était pas le plus émotif – ce titre était remporté de loin par Karamatsu. Etonnamment, il avait autant d'assurance que l'aîné et savait s'imposer au sein de la fratrie, à condition qu'Osomatsu ne soit pas d'un avis contraire au sien.
Moi, j'étais le troisième. J'ai porté bien des surnoms ridicules durant mon enfance, mais rien ne pourra contredire le fait que j'étais le plus raisonné et le plus réaliste de nous six. J'avais beaucoup de rêves, tout comme le reste de mes frères, mais j'étais le seul à être prêt à faire des efforts et travailler en ce sens. Malheureusement, j''étais trop souvent détourné de mes ambitions par la turbulence et l'immaturité de mes frères pour que cela aboutisse.
Dès l'école primaire, nos premières différences étaient apparues, ce qui rendait la tâche de nous différencier plus simple pour nos parents. Todomatsu et Osomatsu étaient les plus sociables, Karamatsu a été le premier à vouloir trouver une petite amie, Jyuushimatsu avait une affinité prononcée pour le sport et Ichimatsu adorait la compagnie des animaux de notre tante. Quant à moi, j'étais le plus studieux et celui qui rapportait les meilleures notes à la maison. Au collège, nos premières disputes ont éclatées. Ichimatsu a très tôt repoussé l'affection de son aîné Karamatsu, Todomatsu a rapidement suivi le mouvement en préférant rentrer seul à la maison – nous avons découvert un peu plus tard que c'était parce qu'il avait honte de nous –, et moi et Osomatsu nous chamaillaient pour les moindres petites broutilles - il n’y avait pas moyen pour que nous soyons d’accord, même sur le banal des sujets.
Au lycée, les choses se corsèrent, notamment lorsqu'Osomatsu et Karamatsu tombèrent amoureux de la même fille. Contrairement à d'habitude, Karamatsu a tenu tête à son aîné et a demandé un duel pour les départager : ils ont donc décidé d'un jour précis – il me semblait que c'était un vendredi – et d'une heure précise pour se battre. Plusieurs élèves avaient été mis au courant et le vendredi soir venu, après que les cours se soient achevés, aux environs de dix-huit heures, un petit groupe d'élèves se réunissait à quelques mètres de la sortie sud du lycée. A contre-coeur, j'étais venu, prétendument pour m'assurer qu'aucun des deux ne serait gravement blessé, mais en réalité parce que je voulais assister à une bagarre moi aussi.
La jeune fille pour laquelle ils se battaient était là aussi, car elle avait été mise au courant du duel – c’était une belle fille aux cheveux noirs attachés en natte dans son dos, mais je sentais qu’elle était bien trop belle non seulement pour moi, mais aussi pour mes deux frères. C'était Todomatsu qui lança le début du combat et ils se jetèrent l'un sur l'autre. Ils tombèrent rapidement sur le sol, roulèrent dans la terre et le sable, se donnaient des coups de pieds et de poings. Tout autour, les gens scandaient des encouragements, certains avaient même sortis leurs téléphones portables pour filmer la scène, dont Todomatsu. Au bout de longues minutes de lutte acharnée, Karamatsu donna un violent coup de poing à la mâchoire d'Osomatsu qui tomba à la renverse. Il en profita alors pour écraser son corps contre le sien et l'immobilisa sur le sol, son visage écrasé contre le sable. Un élève sortit de la cohue et leva la main en l'air, puis après un décompte de cinq secondes durant lesquelles Osomatsu n'arriva pas à se relever, Karamatsu fut désigné gagnant.
Tout le monde applaudit, même moi. Je ne soutenais pas particulièrement Karamatsu, mais voir Osomatsu se prendre une raclée m'avait fait du bien. Sur le chemin du retour, Osomatsu ne décrocha mot, visiblement vexé d'avoir perdu, et il attendit lundi matin pour féliciter Karamatsu de sa victoire. Le même jour, dans l'après-midi, Karamatsu alla trouver la jeune fille qu'ils aimaient tous deux tant, mais elle lui avoua timidement qu'elle n'était amoureuse d'aucun des deux frères.
C'était l'une des mésaventures les plus marquantes de nos années de lycée. Je pourrais aussi citer la fois où Todomatsu s'était amusé à enfermer l'un des chats adoptifs d'Ichimatsu dans la poubelle de notre immeuble, mais cette histoire est non seulement triste – car le chat a finit par mourir à cause de la chaleur et Ichimatsu a été incapable de nous adresser la parole toute une semaine durant – et ne m'a pas autant marquée que cela. Non, définitivement, l'évènement de mon adolescence que je n'oublierai jamais est bien cette fois où Osomatsu et Karamatsu s'étaient battus pour cette fille au lycée.
En soi, cette histoire n'avait rien d'extraordinaire : deux frères qui se chamaillent pour un amour commun est très banal, et nous n'avions pas été les seuls à y faire face à l'époque. Ce qui en fit une histoire si marquante pour moi fut l'attitude d'Osomatsu après sa défaite. La foule s'était rapidement dispersée une fois le spectacle terminé, et nous étions ensuite rentrés, les vêtements des deux aînés couverts de terre et de sable. Todomatsu et Jyuushimatsu félicitaient dûment Karamatsu, tandis qu'Osomatsu traînait de la patte derrière nous. Je lui jetais quelques regards pour m'assurer qu'il nous suivait bien, mais avait décidé de le laisser tranquille car je savais qu'il risquait de s'énerver à la moindre occasion. Tout le monde était occupé à féliciter le gagnant et j’étais content que personne ne me parle, car j'étais tracassé par le duel qui avait eu lieu, mais surtout par le regard qu'Osomatsu m'avait lancé dès que tout le monde s'était mit à applaudir Karamatsu. Il s'était redressé, avait fait mine d'épousseter ses vêtements pour se donner un peu de contenance, puis avait levé la tête vers moi. Des mains, j'applaudissais Karamatsu, mais des yeux, je ne lâchais pas Osomatsu. Son regard était triste, profondément triste, comme s'il avait été blessé à l'intérieur de lui ; mais au moment où je voulais m’approcher, il baissa rapidement la tête de honte et s'enfonça dans le groupe qui scandait le nom du gagnant. Pourquoi m'avait-il regardé moi, à ce moment-là ? Peut-être étais-je stupide d'essayer d'interpréter quelque chose d'aussi anodin, mes ses yeux ne m'avaient pas lâchés durant une bonne dizaine de secondes. La fille qu'il aimait tant était présente et il le savait, ce qui l'avait d’ailleurs d'autant plus motiver, pourtant à aucun moment je ne l'ai vu la chercher du regard. C'était à cela que mon esprit était occupé sur tout le chemin du retour.
Aujourd'hui encore, je ne sais pas quoi dire de cet étrange regard. Toujours est-il qu'il n'en a pas voulu longtemps à Karamatsu, et c'est bien le plus important. Suite à cette histoire, les vies amoureuses de mes pairs étaient saccadées de coups de foudre qui n'allaient jamais très loin. Todomatsu était le plus chanceux et avait eu deux petites copines, une au collège mais la relation n'avait duré que trois mois, et une au lycée avec qui il était resté jusqu'à sa première année d'université. Ichimatsu n'avait avoué ses sentiments qu'une seule fois dans sa vie et ce fut à une amie de lycée ; malheureusement, les sentiments n'étaient pas réciproques. La vie amoureuse de Karamatsu ne sembla concrètement débutée qu'à l'université, bien qu'il tenta à maintes reprises de trouver son heureuse élue durant toute son adolescence. Jyuushimatsu, lui, ne fut en couple qu'une seule fois et bien que sa séparation fut douloureuse pour lui, il ne tarda pas à retrouver du poil de la bête ; nul ne sait où il en est aujourd'hui. Quant à moi, je dois admettre et non sans honte que je n'ai eu aucune relation, sérieuse tout du moins, jusqu'à aujourd'hui, principalement parce que je n'ai jamais eu le courage de confesser mes sentiments à une fille. Je ne l'ai fait qu'une seule fois, au collège : j'étais follement amoureux d'une jeune fille très mignonne, avec de longs cheveux blonds et de longs cils autour de ses yeux noisette ; cependant, à peine ma déclaration faite et mes sentiments refoulés, elle s'était empressée de raconter à tout le monde la gêne avec laquelle j'étais allé la voir et la honte avec laquelle j'étais reparti.
Bien que ce souvenir soit essentiellement négatif, ça avait été l’une des rares fois où je m’en étais allé à vers mes frères en quête de soutien et de conseils. La fille qui faisait battre mon coeur était très belle et je n’étais pas le seul à avoir succomber à son charme ; je me souviens de certains élèves qui me menacaçaient de me tuer s’ils me voyaient lui tourner autour. Elle était aussi très intelligente et à ce titre, ne me traitait pas de fayot quand j’avais la meilleure note à un exemen, bien au contraire : elle me félicitait et me demandait parfois même de réviser avec elle. Sa voix était douce et discrète et elle hésitait à regarder son interlocuteur dans les yeux, on aurait dit une petite poupée toute fragile. A cette époque, je ne me rendais pas bien compte que mes chances de sortir avec elle étaient proches du néant, car je pensais naïvement qu’elle ne pouvait que tomber amoureuse de moi, moi le premier de notre classe.
Lorsque j’avais annoncé mon intention de me déclarer à mes frères, ils m’ont tous regardés abasourdis. Nous étions en terminale et c’était la première fois de toute ma vie que je décidais concrètement de conquérir une fille qui me plaisait. J’étais tombé amoureux à plusieurs reprises, comme tout le monde, mais je préférais me terrer au fond de la classe ou dans les premiers rangs et ne surtout pas me faire remarquer par l’élue de mon coeur ; mais cette fois-ci, pour ma dernière année de lycée, je voulais que les choses changent. Todomatsu avait été le premier à réagir : il s’était d’abord un peu moqué, puis voyant mon sérieux, m’avait posé toute une batterie de questions sur la jeune fille, ce qu’elle aimait et n’aimait pas, sur les contacts verbaux et physiques que nous avions eu jusque là. A la fin de son interrogatoire, Todomatsu avait poussé un soupir et avait conclu que notre relation n’était pas encore assez poussée pour que je puisse espérer sortir avec elle tout de suite. « Essaye d'abord de devenir un de ses plus proches amis. », m’avait-il conseillé. Et c’est ce que je m’attela à faire. Durant les semaines qui suivirent, je chercha le plus souvent à lui prêter compagnie : nous allions ensemble de salle en salle pour nos cours communs, nous rentrions ensemble à la fin de la journée et j’arrivais même à me faire inviter à sa table lors du déjeuner à la cafétéria.
Cependant, cela ne fut pas évident pour moi qui était rongé depuis l’enfance par la timidité. Dieu merci, elle se montra très compréhensive et aimable et accepta volontiers ma compagnie ; j’étais aux anges : enfin je rencontrais une femme qui m’acceptait tel que j’étais ! Le réel problème ne fit son apparition que quelques temps plus tard, dès lors que je fus considéré comme un membre de son cercle d’amis. Dans mon enthousiasme et mon effervensce, j’avais oublié que cette fille était convoitée et que les autres garçons qui fantasmaient sur elle ne comptaient pas se laisser devancer par un intello comme moi. Bientôt, des élèves, individuellement, puis des petits groupes de voyous vinrent à ma rencontre à la sortie du lycée pour me remettre les points sur les i : « Ne t'avise plus de l'approcher. » ; « Si je te revois avec elle, je te jure que je t'éclate le crâne. ». Les premiers jours, effrayé, je décidais de me plier à leur autorité, mais choisit de continuer malgré tout mon entreprise et redoubla d’efforts pour me rapprocher de celle que j’aimais. Néanmoins, cela ne plut pas car ces mêmes élèves me tourmentèrent de nouveau, cette fois en plein milieu des couloirs du lycée. Il arriva même un jour où l’un d’eux m’insulta de tous les noms de sa grosse voix, devant l’élue de mon coeur, sans que je puisse répondre quoi que ce soit. Je m’étais senti horriblement humilié et était rentré chez moi, la tête baissée. A la maison, j’avais été incapable d’en parler à mes frères, trop honteux de m’être ainsi laisser faire et je me souviens avoir pleurer toute la nuit.
Il arrivait que Todomatsu me demandait des nouvelles, mais je lui répondais simplement que les choses avançaient petit à petit. Je n’osa mettre personne dans la confidence des multiples autres humiliations que me firent subir ces élèves, et de la gêne avec laquelle j’abordais maintenant la jeune fille. J’étais terrifié à l’idée de ce qu’elle pensait de moi désormais et je me sentais ridiculement pathétique à tenter de la séduire. Je perdis rapidement toute la confiance avec laquelle j’avais entamé cette entreprise et ce fut Karamatsu qui le remarqua en premier. Un jour, il prit de mes nouvelles, me posa quelques questions car je ne parlais plus beaucoup avec mes frères ces derniers temps, rongé par le stress de me faire tourmenter une nouvelle fois par ces vautours. « Et ton petite amie ? Vous êtes ensembles maintenant ? », demanda-t-il finalement. Je me souviens avoir rougit comme un adolescent et bredouiller que je n’étais pas – encore – avec elle. Il me demanda ensuite si je projettais de me déclarer prochainement et je lui avoua que je n’étais plus très sûr de moi. Je lui confia à demi-mot ce qui me tourmentait l’esprit : il m’écouta discourir sur mon sentiment de petitesse que je ressentais désormais lorsque j’étais avec elle, mais je lui cacha tout ce qui en était à l’origine. Lorsque je finit de parler, il m’adressa un sourire encourageant et posa la main sur mon épaule. « Je te conseille d'y aller et de te déclarer. C'est quand un homme se sent défaillir qu'il doit tout tenter. » Pour la première fois, l’une de ses phrases toutes faites trouvait résonnance en moi et je me contenta d’hocher la tête. A cet instant, j’avais ressenti une telle grattitude envers mon grand frère, et c’est ce qui déclencha un rapprochement entre nous deux au cours des années qui suivirent.
J’avais passé toute la nuit suivante à préparer une stratégie. Demain, je lui avouerait mes sentiments, c’était décidé. Le lendemain matin, je réalisai que j’étais très angoissé et n’avait réussi qu’à avaler la moitié de mon petit-déjeuner. Je n’avais pas dit à Karamatsu que je comptais passer à l’action dès aujourd’hui, cependant il me grattifia d’un grand sourire lorsque je me rendis vers la salle de mon premier cours. Osomatsu, quant à lui, m’avait lancé un drôle de regard, comme s’il essayait de m’analyser et de deviner mes pensées. Je proposa à la jeune fille de me retrouver à la fin de la journée, sans lui expliquer pourquoi, et à dix-huit heures tapantes, je l’attendais dans la petite cour est du lycée. Pour cette occasion très spéciale, j’avais tenté de me coiffer différement, mais mes essais n’avaient rien donné de très fructueux et j’étais vite revenu à ma coiffure habituelle. La jeune fille était arrivée cinq minutes après moi et à l’expression de son visage tendu, je devina qu’elle se doutait de mes intentions. Je devais être encore plus tendu qu’elle, car par erreur je la salua d’une courbette bien trop solennelle. Je m’étais raclé la gorge pendant trente bonnes secondes avant de me lancer. Je ne sais plus quels mots avais-je utilisé, mais je me souviens les avoir presque crier et d’une voix tremblante. Au début, elle n’avait rien répondu et gardait les yeux rivés sur le gazon, puis avait finit par bredouiller d’une petite voix qu’elle ne m’aimait pas. Elle n’attendit pas que je réponde et s’enfuya en courant.
Le lendemain matin, en arrivant en cours, toutes les têtes étaient tournées vers moi et certains me rièrent carrément sous le nez. Je jeta un regard à la jeune fille et à son regard fuyant, je compris qu’elle s’était chargée de répandre la nouvelle : Choromatsu l’intello désespérement célibataire s’est pris un râteau par l’une des plus belles filles du lycée. Cette période, qui dura jusqu’à la fin de ma terminale, fut très dure : je subis de nombreux surnoms, certains bien plus durs que ceux que mes frères me donnaient, et nombre du peu d’amis que j’avais s’éloignèrent de moi, trouvant cela trop humiliant de rester en ma compagnie. J’ai bien du pleurer à de nombreuses reprises, mais toujours en cachette parce que je ne voulais surtout pas que mes frères saisissent l’occasion de se moquer de moi. Karamatsu fut le seul à se douter de quelque chose, mais ne tenta pas d’en savoir plus. Arriva cependant un jour où Osomatsu vint me voir alors que j’étais occupé à faire la vaisselle et me demanda sans préambule : « Cette fille que tu aimes – la blonde – vous êtes ensembles ? » Mon coup de foudre n’était évidemment pas en secret, même Todomatsu était au courant, mais cela faisai longtemps que je n’en avais pas reparlé et je pensais que tout le monde avait oublié. Finalement, je répondis que non sans rentrer dans les détails ; il me jaugea longuement du regard, hocha la tête puis s’éloigna sans rien ajouter.
Depuis cet évènement de ma vie de lycéen, j’ai été incapable de déclarer mes sentiments à aucune autre fille. A dire vrai, j’ai cessé d’essayer de séduire quiconque et me suis abandonné à cette vie de célibataire endurci. Dieu merci, la situation était plus facile à endurer parce que je n’étais pas le seul à être seul.
Le cas d'Osomatsu est bien plus intéressant. Je l'ai précédemment dit, mais il était, avec Todomatsu, le plus sociable et sa confiance en lui naturelle lui attirait facilement des amis. Objectivement, il n'était pas le plus beau de nous six, mais pas non-plus le plus moche et il avait presque autant de chances que Todomatsu de trouver quelqu'un. Néanmoins, depuis notre entrée au collège qui marquait la fin des amourettes de cours de récréation, jamais Osomatsu ne nous a-t-il annoncé être en couple avec qui que ce soit. Nous avions bien pensé qu'il nous cachait ses relations, mais c'était peu probable car il était du genre à se vanter de tout et n'importe quoi. Cela me faisait un peu de peine au départ, car je pensais sincèrement qu'il avait un fort complexe physique ou qu'il manquait simplement de confiance en lui, mais sa satanée manie à se moquer de moi et de ma timidité avec les filles suffirent à effacer toute empathie à son égard. Les années passèrent ainsi, durant lesquelles Osomatsu restait le plus muet de nous six à ce sujet.
Je m'étais habitué à cette situation où Osomatsu était désespérément célibataire, tandis que Todomatsu frimait des photos qu'il avait faites avec sa dernière conquête et Karamatsu qui rencontrait l'amour de sa vie chaque premier du mois. Ce qui était le plus étonnant, finalement, était peut-être le fait qu'Osomatsu ne se plaignait jamais de sa situation.
Arriva ce jour, à l’orée de nos vingt ans, où profitant de l'absence du reste de nos frères, Osomatsu s'était avancé vers moi alors que j'étais concentré dans la lecture d'un magazine et que, d'une voix timide – chose parfaitement anormale chez lui –, me demanda : « Choromatsu, tu es avec quelqu'un en ce moment ? » Ce n'était pas une question étrange à poser à son frère, nous étions tous curieux les uns des autres sur nos vies sentimentales et j'avais bien du poser la question moi aussi ; mais la manière – la voix, le ton, l'expression du visage – avec laquelle il me l'avait posée me sembla étrange. J'avais longuement hésité à lui répondre : me posait-il seulement la question, alors qu'il connaissait parfaitement la réponse, pour que j'admette être célibataire et mieux se moquer de moi ? Je le jaugea du regard de longues secondes durant et remarqua que son regard était définitivement étrange. Il est très compliqué de décrire ce que j'y avais lu, mais une chose était sûre : à ce moment là, il avait peur. Osomatsu avait peur. Au bout d'un moment, je lui ai évidemment répondu que non, puis les traits de son visage qui étaient tendus s'étaient relaxés, mais il gardait cette expression inquiète.
« Bon, alors tu es amoureux de quelqu'un ? » Je ne pus m'empêcher de rougir et de me sentir mal à l'aise à cette seconde question. A dire vrai, nous n'abordions ce sujet entre frères que lorsque nous étions bien saoulés : c'était alors plus facile de passer outre la honte de raconter ses déboires amoureux. Je mis du temps à lui répondre, bredouilla un peu et finit par secouer négativement la tête. Là, un grand sourire vint remplacer son expression inquiète et je crus un moment qu'il allait me rassurer et me réconforter, mais il se moqua de moi et me traita de Chorofappski. Je ne répondis rien, me contentant de soupirer, lasse. Plus tard, je n'avais pas repensé à cette brève discussion ou à son étrange regard. Cependant, en y repensant aujourd'hui, la situation était étrange, parce que son sourire lumineux n'était pas en accord avec les insultes qu'il me lançait. C'était comme s'il se forçait à se moquer de moi, parce que c'était ce qu'il faisait à chaque fois, que ça avait été toujours comme ça et qu'il devait se contenter de faire comme d'habitude.
Durant toute notre adolescence, Osomatsu et moi n'avions jamais été les meilleurs amis du monde – comme pouvaient l'être Ichimatsu et Jyuushimatsu par exemple. Nous avions nos moments de complicité et je dois admettre qu'ils étaient finalement nombreux, mais le reste du temps, nous étions comme chien et chat. Moi qui rebondissais sans cesse sur son irresponsabilité, lui qui prenait un malin plaisir à jouer sur mes nerfs. Je le traitais de tous les noms et lui ne se gênait pas pour me ridiculiser avec ses surnoms ridicules ; je le qualifiais de pire grand frère au monde, lui me traitait de pire coup au monde. A cette époque, jamais je n'aurai dit qu'il était celui dont j'étais le plus proche, néanmoins c'est ce qui s'impose à mon esprit aujourd'hui. Il était celui avec qui je passais la plupart de mon temps, en bien ou en mal ; et étrangement, Osomatsu arrivait toujours à deviner mes pensées avant même que je ne les formule verbalement et moi-même, j'étais celui qui comprenait le mieux ses comportements. Nous avions cette compréhension mutuelle, approfondie, que je ne peux pas nier et que je ne retrouvais pas avec le reste de mes frères.
C'est étrange de le dire ainsi aujourd'hui, mais Osomatsu était bien celui dont j'étais le plus proche. Aujourd'hui, la situation n'a pas bien changé : en adultes, nous passons plus de temps séparément à profiter de nos loisirs respectifs, mais à la maison, je me retrouve systématiquement, d'une manière ou d'une autre, non loin de lui et lui, non loin de moi. Je ne porte plus un regard aussi sévère sur mon frère aîné et même si mon opinion a son sujet n'a pas beaucoup évolué, je suis plus enclin à lui admettre des qualités. Peut-être parce qu'il est l'aîné, j'ai toujours trouvé sa présence rassurante, même lorsque nous étions plus jeunes, et sa voix et son odeur étaient ceux que j'attribuais directement à la « maison ». La maison n'avait pas l'odeur de Karamatsu ou Todomatsu, mais celle d'Osomatsu. Lorsque nous dormions, je me retrouvais toujours allonger à sa gauche et je sais que son odeur me détendait et m'aidait à m'endormir plus rapidement.
Pourtant, jamais Osomatsu n'a joué un rôle décisif dans ma vie. Lorsque nous étions plus jeunes, il m'ait arrivé de me faire menacer par des élèves, surtout lorsque je remportais les meilleures notes, mais celui que j'appelais à la rescousse était Karamatsu. Les rares fois où je me suis tourné vers mes frères parce que je tombais amoureux d'une fille, c'était une nouvelle fois Karamatsu, voire Todomatsu lorsque celui-ci n'en profitait pas pour me rabaisser. Quand je me sentais déprimé, c'était vers Jyuushimatsu que j'accourais. Je ne me confiais pas à Osomatsu, je ne lui demandais pas conseil comme on le ferait typiquement avec son grand frère : je le tenais à l'écart de mes préoccupations d'enfant, d'adolescent et même d'adulte. Aujourd'hui, je le sais : si j'ai un conseil à demander sur quoi que ce soit – mon apparence vestimentaire, comment aborder l'entretien que j'aurais demain, etc. – jamais il ne me viendrait à l'idée de consulter Osomatsu. Ca a toujours été comme ça.
Lui-même ne se confie pas beaucoup à moi. Osomatsu est bruyant, parle beaucoup et communique facilement avec nous ; il nous parle de ce qu'il pense, pour autant je ne le vois que très rarement nous parler de ce qu'il ressent. Probablement a-t-il honte de se confier à un de ses petits frères. Essaye-t-il de conserver à tout prix l'apparence d'un grand frère inatteignable ? C'est ce qui semble le plus logique, pourtant Osomatsu ne tient à son titre de grand frère que parce que cela lui confère autorité sur le groupe, et se fiche pas mal des responsabilités qu'il lui incombe. Je suis d'ailleurs le premier à lui rappeler qu'il est l'aîné et qu'il doit apprendre à faire passer les plus jeunes d'entre nous – principalement les trois derniers – avant lui, mais sans cesse, je me heurte à des remarques du type « Que tu peux être ennuyeux » ou « Retourne à tes magazines d'idoles et laisse-moi tranquille ». Je me souviens même d'une fois où il m'avait dit « Je n'ai jamais demandé à être l'aîné », je crois même l'avoir entendu ajouter « Ni à être votre frère tout court », mais mes souvenirs sont flous car ils doivent remonter à l'époque de notre lycée. Je me souviens par contre très précisément de son regard triste. Il me semble que je n'avais rien répondu, confus, et l'avait laissé partir sans le retenir.
Je crois qu'Osomatsu s'est souvent senti triste sans venir nous en parler, ni à Karamatsu ni à moi – mais je comprends qu'il ne se sentait pas de se confier à moi, vu la relation conflictuelle que nous avions. Il nous ait toujours apparu joyeux, presque autant que Jyuushimatsu, pourtant j'ai souvent eu l'impression qu'il surjouait ses émotions positives sans comprendre pourquoi à l'époque, aujourd'hui je pense que c'était pour dissimuler les plus négatives. Si j'avais été plus jeune et qu'il aurait été en face de moi, là tout de suite, je lui aurai reproché d'être stupide, mais aujourd'hui, je me dis qu'il a agit de la sorte à la fois pour lui et pour nous, pour ne pas nous inquiéter. Parfois, je me demande si c'est moi qui l'ait obligé à se cantonner à ce rôle d'aîné et l'ait ainsi empêcher de s'exprimer quand il en avait besoin. L'exemple le plus parfait est la fois où nous avons tour à tour quitté la maison, contre l'avis d'Osomatsu : certes il n'avait jamais avoué clairement ne pas approuver mon départ, qui fut le premier, mais tout le monde sentait la tension que la nouvelle de mon embauche avait instaurée. Jamais, jamais il n'a expliqué se sentir mal face à cette situation et a laissé partir chacun de ses frères.
Cette histoire – que vous lisez – prend place suite à mon retour à la maison. Nous étions tous réunis dans la maison de nos parents, à nouveau et avec Osomatsu. Je me souviendrais toujours du jour où j'ai passé le seuil de la maison, ma valise traînée derrière moi. Il était fou de joie et m'avait pris dans ses bras – c'était inattendu de sa part – et il nous avait tous proposés d'aller passer la soirée chez Chibita. Il avait promis de payer la note, mais faute d'argent, nous avions tous du mettre la main au porte-monnaie, Ichimatsu en avait profité pour le traiter de « petite merde ». Durant toute la semaine qui suivit mon retour, l'enthousiasme d'Osomatsu n'avait pas désemplifié et il passait davantage de temps avec chacun de nous : il acceptait de suivre Karamatsu et Todomatsu à leurs sessions shoppings – en réalité, seul Karamatsu souhaitait sa présence, Todomatsu ne préférant pas l'avoir dans les pattes – ; il fit l'effort de s'intéresser aux chats d'Ichimatsu et l'accompagna en fin de journée pour nourrir ceux qui vivaient dans l'espace poubelle du quartier ; et il rentrait régulièrement tard le soir avec Jyuushimatsu, tous deux couverts de boue après une longue partie de base-ball. Même avec moi et ce fut finalement le plus étonnant, parce que lui et moi ne partagions que très peu de choses en commun. Et puis, tout à coup, il avait cessé de m'appeler Chorofappski, surnom qui me faisait sortir de mes gonds. C'était un beau matin, trois jours après que je sois rentré à la maison ; nous étions autour de la table basse du séjour, en plein petit-déjeuner. Je me souviens qu'Ichimatsu dormait encore, car il avait veillé tard hier. Il y avait un silence dans la pièce, mais c'était agréable et je crois que chacun s'était dit que ces moments simples de la vie à six leur avaient manqué. Tout à coup, Osomatsu avait levé la tête vers moi et au moment où nos regards se croisèrent, il ouvrit la bouche.
« Tu pourrais me passer la sauce soja, Cherrymatsu ? », avait-il lancé, nonchalamment.
Lorsque j'entendis le dernier mot franchir ses lèvres, je dus cligner plusieurs fois des yeux, mais en vain : les mots étaient entrés par une oreille et sortis par une autre. Todomatsu et Karamatsu avaient eux aussi levé les yeux de leurs bols, tandis que Jyuushimatsu ne semblait rien avoir entendu. Osomatsu ne sembla pas remarquer mon expression d'incompréhension et réitéra simplement sa demande.
« La sauce soja, s'il te plaît ! »
Lorsque les mots arrivèrent à mes oreilles, je sursauta presque et m'empressa d'attraper le petit bol en céramique qui contenant la sauce et le luit tendit. Il chantonna un « merci » et y trempa son maki. Nous continuâmes le petit-déjeuner sans mot dire, Osomatsu et Jyuushimatsu qui dévoraient avidement ce qu'avait préparé notre mère. Moi, je restais focaliser sur l'étrange surnom qu'avait inventé Osomatsu ce matin-là. J'y songea jusqu'au début d'après-midi où Ichimatsu se réveilla enfin et nous informa qu'il avait quelque chose à faire à l'extérieur. Il fut rapidement suivit de Karamatsu, Jyuushimatsu et Todomatsu qui tous quittèrent la maison.
Sans même m'en rendre compte, tant j'étais stupidement préoccupé par quelque chose d'aussi futile qu'un surnom, je n'avais pas remarqué que je m'étais retrouvé seul dans le séjour. Littéralement seul. Une première pensée arriva à mon esprit : où était passé Osomatsu ? Il n'avait pas prévenu qu'il sortait. Je fouilla le rez-de-chaussée de la maison, en vain, et décida de monter à l'étage. Je le trouva assis par terre, des habits, des affaires de toilette et autres étalés autour de lui. Je fronça les sourcils et réalisa qu'il s'agissait des affaires que j'avais emporté dans ma valise et que je n'avais pas encore eu le temps de défaire complètement.
« Osomatsu-niisan ? »
Il tourna la tête vers moi et m'adressa un grand sourire. Visiblement, il comptait jouer l'innocent.
« Je peux savoir ce que tu es en train de faire ? Je demanda en croisant les bras.
— Je cherche si tu avais prit avec toi tous tes magazines pornos. »
Le rouge me monta rapidement aux joues et je me jeta sur lui. Il cria quelque chose et roula sur le côté. Rapidement, j'attira la valise vers moi et y fourra pêle-mêle toutes les affaires qu'il avait étalées sur le sol.
« Ah, trouvé ! »
Je pivota la tête vers lui et le foudroya du regard quand il brandis sous mon nez, fièrement, l'unique magazine porno que je m'étais autorisé à emporter avec moi. J'avais décidé de ne pas en prendre plus et jeter le reste à la poubelle, parce que je voulais me débarrasser de cette mauvaise habitude.
« Donne-moi ça. », je fulmina.
Il secoua la tête et s'installa confortablement sur le sofa pour le feuilleter. Je ne tenta même pas de le lui arracher des mains, car je savais qu'il était plus fort que moi aux mains et parce que je craignais de déchirer le magazine, le seul qui me restait. Au bout d'un moment, je l'entendis pousser un soupir de surprise.
« Tu as même plié le bout de tes pages préférées ! », s'exclama-t-il.
Là, c'en était trop. Je vis ses doigts faire défiler les pages et un grand sourire étira ses lèvres. Il me jeta un regard par-dessus le magazine.
« Je ne savais pas que tu aimais à ce point... (Il baissa les yeux sur la page pour y lire correctement le terme en anglais.) Le cross-dressing ! »
Mes joues étaient cramoisies et je n'osais même plus le regarder en face. Un sourire tonitruait s'échappa de sa gorge et il descendit du sofa. Il me donna un coup sur la tête avec le magazine, avant de le laisser retomber sur mes genoux.
« Tu n'as vraiment pas changé, Cherrymatsu ! », me taquina-t-il.
Puis il s'échappa de la pièce sans que je ne puisse dire mot. De nouveau, son attitude agaçante et je ne parle même pas de ce surnom ridicule. En soupirant, je rangea le magazine sous quelques vêtements dans la valise, pour être sûr que personne d'autre ne tombe dessus. Je rangea ensuite la valise dans un coin de la pièce et imagina déjà le moment où Osomatsu reparlerait de cette mésaventure devant tout le monde.
C'était ainsi qu'Osomatsu avait décidé de m'accueillir après mon retour. Je ne pensais pas qu'il se montrerait spécialement plus gentil, mais je ne m'imaginais pas qu'il chercherait à m'humilier dès le troisième jour. C'était le train-train quotidien qui reprenait, ses mauvaises habitudes et moi qui était impuissant. Que pouvais-je bien faire pour me défendre ? Je ne savais pas être aussi bien méchant que lui et je savais parfaitement qu'Osomatsu n'avait aucun mal à parler de ces magazines pornos. Ce type n'avait aucun secret embarrassant comme nous autres.
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Lundi 6 mars
Suite ou début à ça (Mercredi 3 janvier / Lundi 2 janvier).
1237 mots. Détective!Choro/Oso + Totoko. A reprendre le fichier odt parce que j’ai noté des idées cools.
Je m'appelle Choromatsu Matsuno, j'ai 27 ans. Je suis commissaire de police à Tokyo et j'occupe ce poste depuis bientôt trois ans. Comme la plupart de mes collègues, j'ai entamé des études après mes examens de fin de lycée et ai eu la chance d'entrer dans la plus grande université de ma ville. Aujourd'hui, je vis à Tokyo, à une dizaine de kilomètres de mon lieu de travail et à plus de soixante kilomètres de mes parents.
Karamatsu et Todomatsu ont tous les deux entamé une colocation dès leurs vingt-cinq ans, et aujourd'hui, jonglent entre plusieurs petits boulots. Karamatsu essaye de se lancer dans une carrière de comédien et Todomatsu serait en couple, même s'il a toujours nié les faits. Ichimatsu et Jyuushimatsu vivent encore chez nos parents, mais chacun mène une vie bien remplie – je suis fier d'eux : Jyuushimatsu a depuis peu intégré l'équipe de base-ball nationale et bien qu'il ne soit encore que remplaçant, il passe le plus clair de son temps à ses entraînements, et Ichimatsu travaille toujours à la SPA et songe à reprendre ses études, dans le cadre d'un poste dans le vétérinaire.
Ne reste plus qu'Osomatsu. Tout comme moi, il a quitté la maison assez tôt, après s'être mis en couple avec Totoko. Ils sont tous les deux fiancés et habitent à Tokyo, à une quinzaine de minutes de chez moi. Osomatsu ne travaille pas, il a bien eu un ou deux petits boulots, mais n'a jamais cherché à avoir un emploi sur le long terme. Si j'ai bien compris, il vit aux crochets de sa fiancée qui, elle, a repris l'entreprise familiale. Ils habitent un grand appartement que mes parents ont aidé à financer, mais je crains que l'irresponsabilité de mon frère les conduisent bientôt à une situation financière critique. Pourtant, ils envisagent de se marier l'été prochain.
Aujourd'hui est une nouvelle journée qui commence. J'ai enfilé ma chemise blanche et l'ai boutonnée jusqu'au cou. Sur le comptoir de ma cuisine ouverte patiente ma tasse de café matinale, et la télévision diffuse en fond les informations du jour. Je glisse quelques papiers dans mon sac, quitte mon appartement et grimpe dans ma voiture garée en bas de mon immeuble. A peine ai-je claqué ma portière que mon téléphone se met à sonner.
« Dès le matin... », je marmonne.
Je soupire en voyant le numéro.
« Allô ?
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Toujours un plaisir de te parler, Choromatsu, grince-t-il à l'autre bout du fil.
— Je te rappelle que nous sommes un lundi matin et que je travaille, Osomatsu. », je rétorque, agacé.
Il rigole comme un imbécile.
« Si tu n'as rien d'important à me dire, je raccroche.
— Oui ! Enfin, si, si, j'ai quelque chose d'important à te dire ! », s'exclame-t-il.
Il rigole une nouvelle fois. Je jette un coup d'oeil à ma montre : Dieu merci, je pars toujours à l'avance, alors j'ai bien quelques minutes à perdre.
« En fait, j'aurai besoin de ton aide, dit-il. Je viens juste de percuter la voiture de quelqu'un et... ça a fait un sacré accident pour être honnête.
— Un accident ? Je répète. Tu viens d'avoir un accident ? »
Je me masse le front.
« Tu es blessé ? Je demande.
— Non.
— Bien, ta voiture peut redémarrer ?
— Non, elle est en sale état. »
Je me retiens de lui demander comment l'accident a eu lieu pour que sa voiture ne puisse plus démarrer, ça ne ferait que me taper sur les nerfs et de toute façon, ce ne sont pas mes histoires.
« Très bien, je reprends. Alors appelle une dépanneuse et rentre en bus.
— Je ne peux pas...
— Pourquoi ? »
Derrière lui, j'entends des bruits, trop lointains pour les reconnaître cependant. Il met quelques secondes à répondre.
« Le type que j'ai percuté a appelé la police.
— Tu leur as bien expliqué la situation ? Je demande.
— Oui, oui, mais...
— Mais quoi ? », je le presse.
Il hésite.
« J'ai 0,4 grammes dans le sang, avoue-t-il.
— Tu as conduit ivre ? »
Il tente de se justifier.
« Pas ivre, je n'étais qu'à-
— 0,4 grammes, c'est ivre, Osomatsu ! Je le coupe. Bon sang, qu'est-ce qu'il t'est passé par la tête pour aller te bourrer dès le matin ? »
Il soupire.
« A vrai dire, j'ai passé la nuit dehors. », admet-il tout bas.
Je retiens un soupir.
« Très bien, je reprends. Ecoute, tes histoires me fatiguent, alors vois ça avec le policier. Tu auras une amende et j'espère au moins que ça t'aidera à retenir la leçon. Maintenant, il faut que j'y aille.
— Attends... hum... Le souci, c'est que je n'ai pas d'argent...
— Si, tu en as. Comment fais-tu pour payer ton loyer autrement ?
— Non, je n'ai vraiment plus rien. J'ai dépensé ce qu'il me restait d'argent de poche cette nuit.
— Argent de poche ? Je répète en fronçant les sourcils.
— Oui, l'argent que me donne Totoko chaque mois.
— Elle te donne de l'argent de poche comme à un gamin ? Osomatsu, à quel point vis-tu à ses crochets, bon sang ?
— Bon, peu importe ! Dit-il rapidement, embarrassé. Est-ce que tu pourrais m'aider sur ce coup-ci ? S'il te plaît ? »
Il s'efforce de prendre une voix suppliante.
« Il est hors de question que je paye pour toi. Vois ça avec Totoko, ce n'est pas mon problème, je rétorque.
— S'il te plaît ! Est-ce que tu pourrais au moins t'arranger pour que l'amende soit retirée ? »
Je soupire.
« C'est un non catégorique. Je travaille dans la police, je dois faire respecter la loi, alors je n'interférai pas dans le travail de ce policier. Ne compte pas sur moi pour t'aider : tu as merdé, tu gères ta merde tout seul.
— Je t'en supplie, Choromatsu ! Si Totoko apprend que j'ai eu une amende, elle va me faire une crise de nerf !
— Ca ne serait pas une mauvaise idée honnêtement, tu es éreintant. J'ai l'impression de parler à un enfant.
— Je t'en conjure ! S'il te plaît, s'il te plaît ! », répète-t-il en ignorant ma remarque.
En ma qualité de commissaire, je sais que je suis parfaitement en mesure de retirer l'amende. Je jette un nouveau coup d'oeil à ma montre : si je ne démarre pas ma voiture dans la minute qui suit, je risque d'être en retard. Je secoue la êtte.
« D'accord, je cède en soupirant. Je me charge de lever l'amende. »
Il pousse un cri de joie qui me perce les oreilles.
« Putain, merci, je te revaudrai ça ! »
Je m'efforce de lui rappeler que ce n'est pas la première fois que je lui sauve la mise et que jamais, il ne « m'a revalu ça ». Je soupire en raccrochant et actionne le contact de mon véhicule. Je plains sincèrement Totoko de vivre avec un type pareil.
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Dimanche 5 mars
Yo, coming back. Suite du OsoChoro hanahiki (Vendredi 13 janvier).
789 mots.
Vers la fin du texte, on voit que je switch vers un pov Choro. Pourtant, j’étais partie avec l’idée de virer vers un OsoTodo (genre hanahaki causée par one-sided love Oso -> Todo).
Ichimatsu et Jyuushimatsu étaient restés à la maison. Dans la voiture, Karamatsu et Choromatsu s'échangeaient des regards inquiets, puis zieutaient Osomatsu, assis côté fenêtre, le front appuyé contre la vitre et la respiration haletante. A l'avant du véhicule, Todomatsu qui était anormalement silencieux, lui aussi anxieux, et leur mère qui avait insisté pour les accompagner à l'hôpital. Il y avait un silence angoissé dans l'habitacle de la voiture — on avait bien tenté d'allumer la radio, mais la musique avait tôt fait d'agacer Osomatsu — bien que cela ne soit pas la première fois, et Choromatsu s'en doutait bien : ça ne serait pas non-plus la dernière.
Ca avait commencé il y a deux mois, en pleine nuit. Osomatsu s'était réveillé et avait couru jusqu'à la salle de bain. Choromatsu avait été le premier à le rejoindre, mais son frère lui avait hurlé de s'en aller. Il se souvenait encore de son corps qui tremblait au-dessus de la baignoire et de l'odeur de fleur qui envahissait la pièce. Le lendemain, ils l'avaient emmené consulter un médecin — Dekapan ; seulement, aucune solution n'avait été trouvée et c'était à peine si ce qui lui arrivait était nommable. Dekapan avait mentionné le terme d'hanahaki, mais il avait rapidement ajouté que c'était un phénomène peu connu et à peine recensé et qu'il ne fallait pas sauter sur cette conclusion tout de suite. Le temps nous le dira, avait-il dit. Mais Choromatsu avait depuis longtemps cessé de compter le nombre de fois où ils s'étaient rendus à l'hôpital de la ville ; le nombre de fois où il avait vu son frère s'écrouler, le corps tremblant, la poitrine comprimée ; le nombre de fois où il avait sentit cette odeur nauséabonde de fleurs trop fleuries dans la salle de bain. Il n'en pouvait plus.
Dieu merci, Karamatsu était là. Il était aux petits soins pour leur aîné et passait courageusement outre la peur de tomber à son tour malade — la raison pour laquelle Ichimatsu se tenait à bonne distance d'Osomatsu, par exemple — et veillait sur lui les nuits où il souffrait trop. Choromatsu les avait plus d'une fois surpris dans le séjour à discuter ou à fumer une cigarette, le temps que les douleurs d'estomac du plus grand s'apaise et qu'il puisse se coucher sans craindre de vomir au bout milieu de la nuit. A force, il devait bien l'admettre, Choromatsu songea qu'il n'était que de très peu d'utilité pour son frère. Leurs échanges s'étaient drastiquement réduits : Osomatsu passait le plus clair de son temps à se reposer ou à être en compagnie de Karamatsu, véritable ange gardien. Choromatsu se pinça la lèvre et tourna la tête vers le paysage qui défilait derrière la fenêtre : il reprochait sans cesse le comportement inadapté de son grand frère, mais il n'était pas mieux dans son genre.
Au bout d'une quinzaine de minutes, la voiture se gara sur le parking de l'hôpital. Le ciel était nuit noir, mais les lampadaires leur permit de ne pas se perdre et d'attendre rapidement la réception du bâtiment. Karamatsu soutenait Osomatsu par l'épaule et c'est Choromatsu qui se chargea d'expliquer la situation à la jeune femme derrière le comptoir. Elle passa un rapide coup de fil avant de leur indiquer une grande porte à droite.
« Allez-y, c'est le service des urgences, dit-elle. Ils vont prendront tout de suite en charge.
— Merci. », répondit sincèrement Matsuyo.
Le petit groupe se hissa jusqu'au ledit service des urgences et un infirmer arriva rapidement à leur rencontre. Il souleva le menton d'Osomatsu et grimaça lorsque l'odeur – de fleurs – arriva jusqu'à ses narines.
« Hanahaki ? », dit-il sans réellement attendre de réponse.
Il fit signe à un de ses collègues, un peu plus loin, et un brancard fut rapidement apporter. Karamatsu les aida à le soulever et l'y installer, puis les deux infirmiers l'emportèrent à l'angle du couloir et disparurent. Un membre du personnel nous informa qu'ils reviendront vers nous dans moins d'une heure.
La cafétéria de l'hôpital était déserte à cette heure-ci. Les membres du personnel étaient beaucoup moins nombreux, et seuls la jeune femme de la réception et une vieille dame, qui sirotait un café, nous tenaient compagnie. Todomatsu tapait du pied sous la table et je dus lui demander à deux reprises d'arrêter. Karamatsu soupirait toutes les sept minutes, les mains serrées l'une contre l'autre et notre mère s'était éloignée
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Lundi 13 février
Suiiiiite. 306 mots, enjoy.
Le lendemain, la lumière du soleil le réveilla un peu plus tard que d'habitude. Ichimatsu n'était pas dans la maison et Choromatsu pensa qu'il était allé se promener dans la forêt. Les insectes le dérangèrent tandis qu'il décida de nettoyer la chambre et le salon, et il emporta les bols en terre et des vêtements sales jusqu'à une petite rivière à un kilomètre de la maison. Elle n'était pas très profonde, mais l'eau claire s'écoulait en amont et il put nettoyer sa vaisselle en y frottant des feuilles d'orties, et ses vêtements en les enroulant autour de grosses pierres pour étendre le tissu. Il décida de suspendre les vêtements devant la porte de la maison, face au soleil du midi.
En traversant la forêt jusqu'à la rivière, Choromatsu s'était demandé à quel point la forêt était grande. Ses grands arbres empêchaient de voir le ciel et ses larges troncs étaient comme un épais brouillard. Il n'avait jamais tenté de traverser la forêt toute entière, car il craignait de s'y perdre ou de s'évanouir de soif durant le trajet. Peut-être que durant l'automne qui approchait à grands pas ou pendant le printemps, s'il était suffisamment doux, tenterait-il une grande traversée : qui sait ce qu'il pourrait y découvrir.
Choromatsu songea alors qu'il n'avait jamais désiré quitter la forêt : après tout, il avait une maison ici, et de la nourriture et de l'eau. Quel homme chercherait à fuir tout ce qu'il a construit ? Cependant, il se rappela de la question qu'il avait posé la veille à Ichimatsu et une étrange question émergea dans son esprit. D'où est-ce que je venais ? se demanda-t-il alors en regardant les vêtements humides battre contre le vent.
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Mercredi 8 février
Suite. Publiée quelques jours après, déso, vacances oblige. 312 mots.
« D'où viens-tu ? »
La question avait franchit ses lèvres, tandis qu'il mélangeait des brins d'herbe et des pétales de fleur dans un bol en terre. Ichimatsu secouait doucement sa longue queue au-dessus de sa tête. Il redressa le cou et étendit ses bras sur la table pour réveiller ses muscles endoloris. Le soleil par la fenêtre l'endormait.
« Je n'en ai aucune idée, répondit-il. Et même si je le saurai, je ne voudrais pas y retourner. Ma place est ici. »
Choromatsu lui sourit, satisfait. Il avait du lui poser la question à plusieurs reprises et aussi loin qu'il s'en souvienne, Ichimatsu répondait toujours la même chose. Sa place était ici, oui. Ca l'avait toujours été. Les deux amis vaquèrent à leurs activités durant le reste de la journée et le solstice étant passé, les journées se faisaient de plus en plus courtes, ce qui ne déplaisait pas à Choromatsu qui avait hâte que l'automne arrive.
A la tombée de la nuit, il alla couvrir le bassin d'eau d'une bâche, mais quelque chose attira son œil entre les arbres, un peu plus loin. La nuit, la forêt était plongée dans l'obscurité totale, car les cimes des arbres empêchaient la lumière de la lune d'y passer. Néanmoins, Choromatsu plissa les yeux et avança prudemment vers le point lumineux. C'était étrange, car il semblait proche et éloigné à la fois.
Il s'immisça entre les troncs, veillant à ne pas perdre de vue la lumière sans s'emmêler les pieds dans une branche. Bientôt, il se retrouva au milieu des arbres et de l'obscurité et lorsqu'il le réalisa, il chercha du regard la lumière du feu de camp qui brûlait devant sa maison. Il l'aperçut à quelques mètres de lui. La lumière, elle, avait disparut.
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Mardi 7 février
Suite de mon texte du 06/02. 309 mots.
Lorsque le petit-déjeuner fut terminer, Ichimatsu disparut pour les prochaines heures et Choromatsu se balada dans ses sentiers favoris à la recherche de végétaux. Les champignons étaient de plus en plus rares, car le soleil les asséchait et Ichimatsu était lassé des feuilles vertes des arbres ; alors il arpenta la forêt jusqu'à ce qu'il soit trop épuisé pour continuer et rebroussa chemin jusqu'à la maisonnée. Le résultat des courses n'était pas fameux, mais il avait ramassé des noisettes et quelques fleurs qu'il ferait sécher au soleil.
Depuis quelques jours, il s'était mit en tête de cultiver quelques plantes. Dans un vase posé sur la table du salon, il conservait soigneusement quelques jacinthes et voulait utiliser leur pollen pour en faire pousser à son tour. Derrière la maison, il avait commencé à retourner la terre : n'ayant pas d'outil, il devait le faire à l'aide de ses mains et le soleil brûlant de l'après-midi rendait la tâche plus rude encore. Pourtant, il s'y attela sans se plaindre et ne demanda pas à Ichimatsu de l'aider lorsqu'il réapparut au nadir.
Le soir, Choromatsu alluma un feu et grilla une dizaine de châtaignes qu'ils se partagèrent au clair de lune, profitant du vent des chaudes nuits d’été. Ils burent de l'eau, bien plus que d'habitude, comme si ce soir était un soir de fête. Choromatsu était simplement heureux de cette vie tranquille qu'il menait avec son compagnon et en silence, il pria les dieux qui avaient planté la lune dans le ciel de ne rien y changer. Ichimatsu éteignit le feu en l'étouffant à l'aide de grandes feuilles et d'un peu d'herbe, et les deux amis allèrent se coucher.
Exceptionnellement, Ichimatsu pu dormir au pied du lit de son ami.
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Lundi 6 février
ChoroIchi. 544 mots. Une mini-fic, un chapitre = un drabble. Enjoy.
Nous étions un douze juillet. Le soleil, encore tiède, se soulevait dans le ciel et diffusait ses rayons sur le toit que formait les cimes des arbres de la forêt. Choromatsu ne traîna pas au lit et ouvrit les fenêtres pour laisser passer l'air frais du matin. Le soleil réchauffait le sol et cela lui fit du bien de ne plus sentir le froid hivernal sous ses pieds dès le réveil. A l'extérieur de la maisonnée, à l'arrière, était installé un petit bassin d'eau en pierre : avec l'été, Choromatsu le couvrait chaque soir d'une bâche pour le protéger des insectes qui proliféraient à outrance ou des oiseaux et écureuils assoiffés qui seraient tenter de s'y abreuver. Il plongea sa main dans l'eau tiédie et la porta à sa bouche pour réhydrater sa gorge douloureuse.
La maison était de taille modeste : une chambre où étaient installés un vieux lit et un bureau en bois qu'il avait construit lui-même ; une salle d'eau ; un séjour, dont la moitié était occupée par une large table où patientaient quelques ustensiles et ingrédients. Choromatsu cuisinait ce que la forêt lui offrait : il avait apprit à reconnaître les champignons non toxiques, à sélectionner les feuilles des arbres et même l'herbe qui poussait sous ses pieds. Lorsqu'il était lassé, il cueillait quelques fleurs en prenant soin de les rincer à l'eau claire et ramassait les noisettes et châtaignes qui tombaient des arbres.
Sur le sol, il entendit un grattement significatif et bientôt, quelque chose se frotta contre son dos et une longue queue s'enroula autour de sa jambe. Ichimatsu vivait avec lui, ici, depuis toujours. Comment s'étaient-ils rencontrés ? Il n'en savait rien, mais aussi longtemps qu'il s'en souvienne, le jeune homme avait toujours habité la petite maison à ses côtés. Sa peau était très pâle et malgré les rayons du soleil d'été, il ne prenait aucune couleur et veillait à rester à l'ombre des arbres. Ses cheveux et ses yeux étaient noir de jais, son nez et ses lèvres, fins ; mais ce que Choromatsu remarqua en premier chez cet étrange garçon furent les oreilles qui pointaient sur le sommet de sa tête. Il ne remarqua sa longue queue poilue qu'au bout de deux jours.
« Je t'attend depuis plus d'une heure... »
La voix rocailleuse d'Ichimatsu le fit sourire et il se dépêcha de préparer le petit-déjeuner, bien que le soleil était trop haut pour qu'il soit encore l'heure d'en prendre un. Bien qu'Ichimatsu dispose d'attributs félins, il semblerait qu'il puisse se contenter de végétaux la plupart du temps, mais lorsque l'envie lui prenait, il partait chasser des oiseaux ou des écureuils, même si cela se soldait la plupart du temps par un échec. Un chat y parviendrait sûrement, mais un chat était souple, léger, petit ; Ichimatsu était lent et grand – un peu plus que Choromatsu.
D'où venait-il ? Choromatsu avait du lui poser la question lorsqu'ils s'étaient rencontrés, mais il n'y songeait plus désormais. Quelle importance après tout : Ichimatsu semblait résolut à vivre à ses côtés et il avait gagné un ami.
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Lundi 2 février
IchiChoro. 2500 mots. Contente du résultat. Lemon poétique ?
C'était une belle après-midi de mai. Le ciel était bleu azur et les nuages flirtaient avec le soleil ; nous étions à deux semaines du début du printemps. Un vent frais passait par la fenêtre et faisait tinter le carillon suspendu au-dessus de ma tête.
J'espérais que la douleur diminuerait, pourtant, vingt-quatre heures après, les longues stries rouges sur ma peau étaient toujours aussi vives et sensibles. Sur le coup, j'avais eu mal, très mal même, mais le plaisir et ses mains sur mon corps avaient contrebalancé la sensation de brûlure dans ma nuque. C'était toujours étrange, la façon dont la brûlure cessait de piquer et se mettait à vous consumer – votre corps se met à trembler, vous avez mal ou plutôt vous savez que vous êtes censés avoir mal, mais vous lui demandez de recommencer. Néanmoins, quand l'effervescence était retombée et que je me suis retrouvé face à la glace de la salle de bain, même mes doigts qui essayaient d'appliquer de la pommade m'arrachaient des gémissements de douleur.
C'était difficile à cacher. La griffure remontait presque jusqu'à mon menton et si je relevais le col de ma chemise pour la dissimuler, le tissu risquait de m'irriter la peau. Alors j'essayais de m'isoler, de patienter que ma peau se régénère et j'évitais le reste de mes frères.
Le carillon continuait de chanter.
Il n'y avait pas que cette douloureuse trace dans mon cou. Il y avait aussi des suçons : bleus, violets, parfois quasi noirs, ils dessinaient une drôle de mosaïque sur ma poitrine, autour de mes tétons et jusqu'à mon bassin. Hier, je n'avais évidemment pas pu me rendre aux bains publics avec les autres. J'avais passé toute la soirée à trouver un moyen de faire disparaître ces traces, en vain : j'étais une nouvelle fois réduit à la patience.
En réalité, ces suçons ne me dérangeaient pas. Je craignais simplement qu'Osomatsu ne les découvre et me taquine là-dessus ou pire, que Karamatsu ne devine tout. Mais quand je les regardais, je me sentais envahi d'une étrange chaleur, réconfortante : la sensation d'être aimer. Ces suçons avaient été faits par une bouche violente et jalouse, pourtant c'était l'une des rares preuves qu'il tenait à moi, qu'il m'aimait, qu'il ne voulait pas me partager. J'aurai presque envie de les montrer à tous et de leur dire « Regardez, c'est lui, lui qui m'a fait ça. Il m'aime et je suis à lui. ».
Mes doigts se faufilent sous ma chemise et remontent jusqu'à mon nombril. J'arrive à reconnaître un ou deux suçons sous la pulpe de mes doigts, et j'essaye de me remémorer la sensation de ses lèvres chaudes contre ma peau, ses dents qui me mordent et le regard qu'il avait ce soir-là... Sans que je ne la retienne, ma main redescend vers la ceinture de mon pantalon et la défait rapidement. Je ne songe même pas à vérifier si la maison est vide et mes doigts caressent déjà mon membre.
Il ne m'en faut pas longtemps pour être excité. A force d'avoir jouer avec, je connais mon corps par cœur. Je m'allonge sur le sol, la jambe droite relevée et la tête tournée sur le côté, ma main qui entame un long mouvement de va-et-vient. Je repense à sa peau humide de sueur, son torse et ses épaules, son dos musclé, ses jambes qui bloquent les miennes, ses hanches qui cognent contre mes fesses... Des images d'hier soir tournent dans ma tête et bientôt, je dois me mordre la lèvre pour ne pas gémir trop fort. J'entends sa voix, rauque, grave, qui murmure au creux de mon oreille, son odeur épicée qui envahit mes narines – sa voix qui répète mon nom, encore et encore, comme une litanie.
« Ichi... matsu... »
Ma voix s'échappe de ma gorge telle une supplication et ma main s'accélère. Je m'imagine que c'est la sienne, sa paume qui remonte le long de mon sexe et ses doigts qui s'enroulent à son sommet. Mon corps se met à trembler et je sens les vagues de plaisir s'intensifier. Mes dents s'enfoncent un peu plus dans mes lèvres et je ressens comme un manque, le manque de ses dents à lui dans ma peau, de ses ongles qui me griffent. C'est en repensant à la douleur qu'il sait si bien m'infliger que j'atteins le point de non-retour, me noyant dans mes propres gémissements à peine étouffés.
Je suis sourd pendant quelques secondes, les sens coupés du monde, l'esprit embrumé. Je ne prends même pas la peine de me nettoyer, remonte ma braguette et essuie machinalement ma main sur le tissu de ma chemise. Je roule sur le côté et ferme les yeux, bercé par les battements de mon cœur. Au bout d'une minute, la tension dans mon corps redescends complètement et je ressens une terrible envie de m'endormir, là, à même le sol. Je m'oblige cependant à me redresser, non sans manifester quelques protestations et peine un peu à me mettre debout, à cause de mes jambes toutes engourdies.
Timidement, je pousse la porte de la pièce et guette le moindre bruit, mais seul le tintement du carillon arrive jusqu'à mes oreilles. Je pousse un soupir de soulagement, rassuré de savoir que personne ne m'ait entendu – il ne manquerait plus que l'on me surprenne une nouvelle fois. Je me dépêche de traverser le couloir pour atteindre la salle de bain et nettoie mes vêtements et mes mains. Dans la glace, je remarque que mes joues sont encore roses et me rince le visage pour effacer toute trace de ce moment solitaire. Je m'essuie ensuite le visage à l'aide d'une serviette et lorsque je reporte mon regard sur la glace, je n'y vois pas seulement mon reflet.
Je pivote sur place et mes yeux écarquillés croisent les siens. Mon cœur se met à battre à toute vitesse : depuis quand est-il à la maison ? A-t-il tout entendu ? Sait-il tout ? Le sang de mon visage s'enfuit vers mon cœur pour irriguer ses mouvements affolés. Appuyé nonchalamment contre le mur du couloir, les mains glissées dans ses poches, il me détaille du regard. Ses pupilles examinent les mèches de cheveux qui collent contre mes tempes, mes pommettes qui ont perdu toutes leurs couleurs, puis mon cou où l'on peut apercevoir le début de son œuvre, de ce que sa jalousie m'a infligée. Ses yeux s'attardent longuement sur la naissance de la blessure et instinctivement, je la couvre de ma main droite. J'essaye d'ignorer le fourmillement qui remonte de mes pieds jusqu'à mon entre-jambe.
Sa langue humecte ses lèvres sèches et il s'avance vers moi. Lorsqu'il n'est plus qu'à quelques centimètres, son souffle chaud – et rapide – caresse mes joues et le bout de mon nez. Il ne me touche pas et pourtant, je sens ses mains qui recouvrent chaque recoin de ma peau. Je me sens envahi par ses doigts, sa langue, son corps qui dévore le mien, par le souvenir du plaisir et de la douleur que chacun de ses gestes me procure. Le fourmillement dans mon corps s'intensifie et ma respiration s'accélère. Sa présence m'électrifie et me mène d'ores et déjà au septième ciel.
Je redresse la tête et me risque à le regarder dans les yeux. Ses yeux sont plissés, l'air d'être endormis, mais je sais ce que ce regard traduit et inaugure. Ma lèvre inférieure tremble et ma main se resserre un peu plus autour de mon cou. Son regard me pétrifie et donnerait envie à n'importe qui de s'enfuir, mais je ne peux détacher mes pupilles des siennes. Elles me pénètrent, me transpercent ; elles savent tout de moi, peuvent lire en moi. Normalement, je serai effrayé à l'idée que quelqu'un puisse tout savoir de moi et pourtant, je m'offre à lui, volontairement, le suppliant de tout connaître, même mes plus honteux secrets. Il lit en moi, ses yeux parlent le même langage que mon corps. Il sait. Il sait à quel point tout en lui me fait vibrer, la manière avec laquelle ses regards et les mouvements de ses lèvres réveillent mon corps. Il sait que je cherche sans cesse sa présence, qu'elle me fait l'effet d'une puissante drogue et que je suis à sa merci.
Il lève sa main vers moi et sans quitter mes yeux, ôte la main qui protégeait ma nuque. Je me sens nu et grimace lorsque son regard dévie sur la blessure. Une étrange honte me pousse à baisser la tête : j'ai l'impression de lui avouer le plus pathétique des aveux, l'aveux que je le désire, que je ne fais que le désirer, chaque jour. A son regard se joint le bout de son index qui trace le début de la griffure et je laisse échapper un gémissement. Sa main continue son chemin et se glisse sous le col de ma chemise, mais sa peau frotte douloureusement contre la mienne. J'ouvre la bouche pour lui demander d'arrêter, mais je me tais. Son autre main déboutonne maladroitement ma chemise et ses yeux dévorent mon torse recouvert de ses suçons et je crois l'entendre grogner de satisfaction. Ses doigts continuent de suivre la longue blessure jusqu'au début de mon épaule, avant de remonter jusqu'à mon cou et de s'enrouler autour.
Je lève rapidement les yeux vers lui, non pas pour lui indiquer de ne pas être trop violent, mais au contraire, pour l'y inciter. Je lis dans son regard la même luxure qui s'épanouit en moi et ses doigts s'enserrent comme un étau autour de ma gorge. Le mouvement n'est ni lent ni doux ni tendre, il est rapide, violent, agressif. Je tousse, je m'étouffe, le sang afflue plus lentement jusqu'à mon visage, mais il se précipite jusqu'à mon entre-jambe – et il doit le sentir, parce qu'un sourire, imperceptible et presque méprisant, étire ses lèvres. Sa deuxième main s'ajoute à la première et je penche la tête en arrière, la bouche grande ouverte et la sensation de partir qui monte en moi. S'il continue, je vais jouir dans mes sous-vêtements. Au bout d'un moment, il arrête tout : ses mains me libèrent et je me sens vide. Sa respiration est haletante et je réalise qu'il est autant excité que moi. Ses yeux sont plus sombres et son visage prend l'expression d'un prédateur. Il m'attrape par le bras et m'attire jusqu'à la chambre que je venais de quitter il y a quelques minutes.
C'est tout comme hier soir. La précipitation, l'impatience, la sensation d'être sur le point de jouir mais tout faire pour se retenir... Ses vêtements se détachent de son corps en moins d'une minute et il se dépêche de me dévêtir. Il ne prend même plus la peine d'examiner et de goûter mon corps comme il le faisait autrefois ; il le connaît sur le bout des doigts. Il sait comment l'endormir, l'exciter, le torturer ; il sait si bien le contrôler qu'il a l'air d'être fait pour lui. Sa langue réveille mes tétons avant de glisser entre mes lèvres. Ses bras me portent et m'installent, ses jambes glissent entre les miennes et une impatience monte dans mon ventre – l'impatience de le sentir en moi.
C'est tout comme hier soir. A vrai dire, c'est aussi comme avant-hier et avant-avant-hier. Chaque soir quasiment, nous répétons le même spectacle. Ses mains qui empoignent sans délicatesse mes hanches, ses ongles qui griffent mes cuisses, ses doigts à peine humides qui s'insèrent en moi... Tout est si rapide, presque expéditif, violent, sans romantisme. Tout est si parfait. En cet instant, quand je le sens me pénétrer, oui, tout est parfait. Je m'agrippe à son pull, seul tissu à ma portée, et étouffe mes cris en l'appuyant contre ma bouche, mais sa main me le retire et il m'oblige à lui faire face.
« Je veux t'entendre... », halète-t-il.
Je laisse mes gémissements s'échapper de ma bouche sans retenue. Ils envahissent l'espace, couvrent ses propres soupirs. Je lui dis que c'est bon, si bon, je lui demande d'aller plus vite, mais sa main me gifle et il m'ordonne de le supplier. Alors je le supplie, je répète son nom comme on implore un dieu et lui demander d'aller plus vite, plus vite, oh mon Dieu, Ichimatsu, plus vite, plus fort. Il grogne et accélère le mouvement de ses hanches. Il se penche en avant, appuie son front contre le mien et j'entends sa voix, grave, presque muette face à mes cris de plaisir, qui répète mon nom. Choromatsu, Choromatsu, Choromatsu... C'en est trop. Je me cambre violemment, pousse un ultime cri tandis que ses dents s'enfoncent profondément dans ma clavicule. Je le sens venir en même temps que moi, son corps qui se contracte contre le mien, puis qui s'écroule, m'écrasant de tout son poids.
Nos respirations sont bruyantes et peinent à se calmer. Il se décale sur le côté et enroule ses bras autour de moi, appuyant son front dans mon cou. Nous restons blottis ainsi durant quelques minutes, nos corps qui vibrent l'un contre l'autre, nos souffles qui se mélangent. J'ai envie de le serrer dans mes bras et de lui dire ô combien je l'aime, parce que je l'aime, mais je ne veux pas gâcher ce moment. Je le sais, Ichimatsu n'aime pas parler de sentiments. Mais je sais, je le sens, à la manière dont il me regarde, dont il s'assoit entre moi et Osomatsu, dont il me marque, hurle sa propriété sur mon corps, qu'il m'aime. Il m'aime et je l'aime.
Lorsque nos respirations sont parfaitement calmes, je devine qu'il s'est endormi. Je passe mes bras autour de son cou et appuie sa tête contre ma poitrine, contre mon cœur qui bat à un rythme calme et détendu. J'enfoui mon nez dans ses cheveux et me laisse envahir par son odeur épicée.
Au-dessus de nos têtes, le carillon nous chante une berceuse.
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Text
Lundi 16 janvier
Le début d’une fic IchiTodo que j’ai en tête. Les “jour 1″/”jour 2″ risquent de disparaître, mais j’y réfléchis encore. Je n’ai fait qu’une seule relecture, donc pas version finale.
5000 mots. (warning : lemon de piètre qualité)
Jour 1.
Je jette mon jean et mon pull rose sur la cuvette des toilettes, et me baisse pour tirer la balance cachée sous le meuble de la salle de bain. Je suis probablement le seul à faire attention à ma ligne dans cette maison, alors je ne suis pas étonné de voir un film de poussière qui la recouvre et je passe un rapide coup de PQ pour la nettoyer.
« Dépêche-toi, Todomatsu. », me lance la voix de Choromatsu de l'autre côté de la porte.
Je roule des yeux sans prendre la peine de lui répondre et grimpe sur la balance. Je garde le dos bien droit pendant les quelques secondes que prend l'appareil a estimé mon poids, puis baisse les yeux. Au-dessus de mes ongles de pied parfaitement limés s'affiche le nombre soixante-trois. Soixante-trois kilos. Pour ma taille, c'est un poids idéal.
Avec un sourire de satisfaction, je pousse la balance sous le meuble d'un mouvement du pied, puis attrape mon savon pour peaux sensibles posé sur l'étagère et applique une noisette sur mon visage. Je me brosse ensuite les dents pendant cinq minutes pile poil – la durée minimale si je veux conserver mes belles dents blanches – et enfile rapidement des vêtements propres.
Je fouille dans les placards de la salle de bain et en sors une pochette en tissu kaki. Une petite étiquette sur laquelle est écrit mon nom est suspendue à la fermeture Eclaire. Méthodiquement, j'en sors mon fond de teint favori, mon anti-cernes, un mascara que je n'ai pas utilisé depuis quelques temps et un gloss. Je me dépêche de me maquiller, sans prêter attention à Choromatsu qui me demande de « grouiller, parce que ça fait une demi-heure que tu es dans la salle de bain » et prend même le temps de passer un coup de blush sur mes pommettes. Parfait.
Je m'attaque ensuite à mes cheveux et me contente d'appliquer un peu d'huile d'avocat pour accentuer le mouvement de mes boucles.
« Todomatsu !
— C'est bon, c'est bon, je sors ! », je rouspète en rangeant mon nécessaire de make up.
Lorsque j'ouvre enfin la porte, Choromatsu me jette un regard noir et me bouscule presque en entrant dans la salle de bain. Il ouvre la bouche pour me faire une énième remarque, mais je m'éloigne rapidement et je l'entends grogner dans mon dos.
Je jette un coup d'oeil à mon téléphone et un sourire étire mes lèvres lorsque je vois la petite notification apparaître sur l'écran. Un nouveau message, de sa part. « Je suis devant chez toi. »
« Tu vas quelque part, Totty ? », me demande Osomatsu lorsque j'entre dans le séjour.
Il est allongé devant la télévision et lève les yeux vers moi. Je hoche la tête et je ne peux m'empêcher d'avoir l'air un peu pompeux, lorsque je lui réponds :
« Oui, je vais voir mon petit ami.
— Pourquoi tu as l'air si fier de toi ? Me rétorque-t-il en se curant le nez. Ce n'est pas comme si j'étais gay. »
Mes sourcils se froncent.
« Je ne suis pas gay. Je suis bi, Osomatsu-niisan.
— C'est la même chose. Tu aimes les hommes. », répond-il en haussant les épaules.
J'ai envie de protester, mais balaye d'un revers de main son idiotie et me dirige dans l'entrée pour enfiler mes chaussures. Lorsque je suis fin prêt, j'applique un peu de parfum dans mon cou et sur mes poignets et glisse la anse de mon tote bag sur mon épaule.
« J'y vais !
— A tout à l'heure, Totty ! », me répond la voix de Jyuushimatsu depuis le séjour.
Je claque la porte derrière moi et remarque rapidement une voiture noire stationnée sur le trottoir d'en face. La portière côté conducteur s'ouvre et je le reconnaît immédiatement lorsqu'il sort de la voiture. Il porte une chemise anthracite qui met parfaitement en valeur sa morphologie en V, et la façon dont il retire ses lunettes de soleil pour me regarder est beaucoup trop sexy.
Il est sublime.
Je traverse rapidement la distance qui me sépare de lui et lorsque je suis suffisamment proche, je me mets sur la pointe des pieds pour l'embrasser. Je me dis que je suis juste en face de chez moi et qu'il suffirait qu'un de mes frères ou mes parents ouvrent la porte pour qu'ils nous surprennent. Mais je m'en fiche. Que je sois en couple avec Atsushi n'est un secret pour personne, et de toute manière, j'adore que l'on me remarque.
Lorsque je me détache de ses lèvres, je ne peux m'empêcher de sourire comme un idiot et il m'attire contre lui, m'embrassant à son tour. Ses lèvres sont plus fines que les miennes, mais sa langue est très habile et je laisse échapper un gémissement quand je la sens se glisser entre mes lèvres. A bout de souffle, il met fin au baiser et sans un mot, nous montons en voiture.
L'intérieur du véhicule est plutôt spacieux, en tout cas bien plus que la voiture d'occasion d'Osomatsu, et une délicieuse odeur de fraise embaume l'air. Ce n'est pas la première fois que je monte dans sa voiture, mais à chaque fois, je m'étonne du confort des sièges en cuir. Il met le contact, mais n'allume pas la radio.
« Je suis content de te voir. »
Je dois avaler ma salive car ma bouche est tout à coup devenue sèche. Je ne sais pas si c'est parce que cela fait deux mois que nous ne sommes pas vus, mais sa voix grave électrifie mon corps. J'adore sa voix. Et j'adore le sourire qu'il me fait quand il le dit.
« Moi aussi. », je réponds dans un souffle.
Sa main gauche se pose sur mon genou et remonte sur ma cuisse. Malgré le tissu de mon jean, je sens la chaleur de sa paume sur ma jambe et je frissonne quand ses doigts s'enfoncent dans ma peau. Mon cœur s'accélère et je dois prendre une inspiration pour me calmer un peu. Cet homme me rend fou. S'il n'était pas à peine quatre heures de l'après-midi, je lui aurai sauté dessus, là, tout de suite.
Finalement, il retire sa main et l'enroule autour du volant.
Durant les minutes qui suivirent, aucun de nous deux ne prit la parole, mais ça ne me dérangeait pas. Entre nous, il n'y avait pas de silence gênant. Au bout d'un quart d'heure, la voiture se gare dans le parking souterrain du centre commercial de la ville et je détache ma ceinture. J'enroule mon bras autour du sien, appuyant ma tête contre son épaule.
La fête de Noël est dans un mois tout pile et je ne suis pas étonné du monde qui grouille dans les magasins. Je n'ai moi-même pas encore commencé mes courses de fêtes de fin d'année, alors je note mentalement les magasins qui attirent mon œil et que je me promet de revenir visiter. Atsushi m'entraîne vers un petit café, au deuxième étage du centre – déjà un peu moins bruyant. Le café est petit et caché derrière un pressing, mais la décoration est étonnement belle : les murs vert menthe sont décorés de cadres-photos de paysages superbes, et les tables sont entourées de fauteuils en velours crème.
Nous nous installons dans un coin du café pour éviter d'être trop dérangés par les autres clients, et je continue de détailler la décoration, sous le regard amusé d'Atsushi. Au bout de quelques minutes, une serveuse – une jolie brune – s'approche de nous.
« Bonjour, messieurs. Puis-je prendre votre commande ? »
Je réalise que je n'ai même pas ouvert le menu posé sur notre table, et m'empresse le feuilleter.
« Oui, nous prenons la même chose. », répond Atsushi.
Je lève des yeux interrogateurs sur lui et il me répond par un clin d'oeil. Il commande deux coupes de glace dont je n'arrive pas à mémoriser le nom. Lorsque la serveuse s'éloigne, je lui demande :
« Des glaces ? En plein mois de décembre ? »
Il pose ses doigts sur le dos de ma main.
« Fais-moi confiance, dit-il. Ces glaces sont un délice. »
Je souris.
« Il y a intérêt, je le taquine. »
Il sourit à son tour.
« Qu'est-ce que tu veux faire ensuite ? », demande-t-il.
C'est vrai que nous n'avions rien prévu de spécial. D'habitude, nous décidons de ce que nous allons faire à l'avance, mais cela fait un mois que nous ne sommes pas vus, alors je suppose que nous avons perdu l'habitude. J'appuie mon menton contre la paume de ma main.
« Tu as une idée ? »
Il s'humecte les lèvres et je devine qu'il a effectivement une idée en tête. Je retiens un sourire.
« J'ai réservé une table pour deux à vingt heures, dit-il.
— Oh ? Où ça ? Je l'interroge en penchant la tête sur le côté.
— Dans un restaurant de la ville. Le Gourmet. »
Mes yeux s'écarquillent et son sourire amusé ne m'échappe pas. Le Gourmet ! Putain, un restaurant quatre étoiles ! Je libère ma main de ses doigts et couvre mon sourire béat. Je n'en reviens pas.
« Ca te fait plaisir ? Demande-t-il.
— Bon sang, bien sûr que ça me fait plaisir ! », je répond un peu trop vivement.
Je suis obligé de passer aux toilettes pour me rafraichir et me calmer. L'eau sur mes mains – pas sur mon visage tout de même, ça ruinerait mon make up – m'aide à calmer mon excitation. J'en profite pour m'assurer que mes cheveux sont toujours bien coiffés et retourne rapidement à notre table. Ma glace m'y attend.
Lorsque je me rassois sur le fauteuil en velours, Atsushi me fait un topo détaillé de ce que je m'apprête à manger, essentiellement du chocolat blanc, du citron et de la vanille. Je suis surpris que quelque chose d'aussi sucré lui plaise, mais ne le relève pas et prend une première bouchée de glace.
« Qu'est-ce que tu en penses ? », me demande-t-il, attendant impatiemment mon retour.
Je lui aurai bien fait croire que la coupe ne me plaisait pas, mais mon sourire – je sourit beaucoup trop aujourd'hui – me trahit et il se félicita d'avoir si bien choisit.
Nous terminons de déguster notre glace et quittons le petit café, bras dessus, bras dessous. Inutile de préciser qu'Atsushi, en bon gentlemen, s'est chargé de régler l'addition. Ca ne m'a jamais embarrassé plus que cela, puisque nous savons tous deux qu'il bénéfice d'une situation financière plus facile que la mienne. Nous profitons des heures suivantes pour faire le tour des magasins et je saisis cette occasion pour mener une petite enquête sur le cadeau de Noël que je pourrais lui offrir. Mais deux problèmes se posent à moi : petit un, il a suffisamment d'argent et je sais qu'il possède la plupart des cadeaux qui me viennent à l'esprit ; petit deux, je n'ai pas beaucoup d'argent en cette fin d'année. Alors je guette les vitrines, à la recherche d'un cadeau qui ne soit pas trop onéreux, mais qui vale encore le détour.
Lorsque nous approchons des vingt heures, nous nous dirigeons vers sa voiture et prenons la route pour le restaurant. Sur le siège passager, je trépigne d'impatience en pensant aux magnifiques photos que je pourrai poster sur mes différents réseaux sociaux – et à quel point je pourrai rendre jaloux mes frères. Le Gourmet est à une quarantaine de minutes de route, alors nous papotons de son voyage en France qui lui a valu deux mois d'absence, puis écoutons un peu de musique. Lorsque la voiture se gare à quelques mètres de la devanture du restaurant, il fait nuit. Atsushi glisse son manteau The Kooples sur mes épaules et je le gratifie d'un sourire.
Nous sommes accueillis par un jeune homme très élégant, presque aussi grand qu'Atsushi, qui nous conduit à une table cachée derrière un paravent. La table est recouverte d'une nappe blanche et est très joliment décorée par un grand bouquet de roses rouges, et des bougies qui flottent à la surface de l'eau du vase. La lampe au-dessus de nos têtes diffuse une lumière tamisée très agréable. Une ambiance très quatre étoiles. Le serveur nous tend deux menus et je m'empresse de découvrir les intitulés des plats. Je décide de goûter la soupe à l'oignon en entrée, Atsushi me recommande la joue de porc et je la commande à point, accompagnée d'un trio de crémeux de carottes. Le serveur nous apporte ensuite une bouteille de vin et Atsushi me sert un verre.
« A ton retour au Japon ! », je dis en levant ma coupe.
Il rigole.
« Tu n'étais pas agacé de partir dans un pays comme la France, simplement pour le boulot ? Je lui demande en avalant une gorgée.
— Tu n'as pas fini de me parler de la France ? Me taquine-t-il. Je suis de retour au Japon, Todomatsu, et je ne compte pas m'en aller de sitôt.
— Tu es tout de même parti deux mois, je rétorque en faisant la moue.
— Je sais, mais maintenant, je suis là. »
Il me caresse la joue du bout des doigts et je rougis un peu.
« J'espère au moins t'avoir manquer...
— Terriblement. », répond-il, la voix un peu plus grave.
Ses yeux me fixent d'une manière un peu trop intense et je rougis davantage. Je fais mine de réarranger mes couverts.
C'est exactement cela que j'adore avec lui. Lorsque nous nous sommes rencontrés sur les bancs de la fac, il m'avait tapé dans l'oeil et j'ai tout de suite prit les choses en main. Rapidement, j'ai vu que je lui faisais quelque chose et j'avais l'impression qu'il se laissait totalement faire par mon charme, comme tous les autres. Mais j'avais eu tort. Il ne se laissait pas faire. Il faisait semblant d'être mort pour mieux me dévorer. Aujourd'hui, c'est moi qui suis à sa merci et j'en suis bien conscient ; au moindre de ses sourires, de ses sous-entendus, je fond littéralement.
Le serveur réapparaît au bout de quelques minutes et dépose nos assiettes devant nous. La soupe à l'oignon était finalement un très bon choix et je laisse Atsushi en goûter, en échange d'un petit carré de foi gras au chutney d'oignon. Délicieux aussi. Durant le reste du dîner, je lui parle de ce qu'il s'est passé durant son absence, je me plains pour la énième fois de mes frères et insiste sur le fait qu'ils passent leur temps à me taquiner sur ma relation avec lui. Cela ne me dérange pas plus que cela, mais c'est parfois épuisant. Cela fait un an que nous sommes ensembles, ne peuvent-ils pas passer à autre chose ?
Tout au long du repas, la bouteille de vin se vide petit à petit et Atsushi en commande même une nouvelle. Je crois bien que c'est moi qui boit plus que lui. Putain, je deviens comme Osomatsu. Mais je ne me soucie pas de ce à quoi je dois ressembler, parce que je sais très bien comment la nuit va se terminer. Il me l'a dit : en plus d'avoir réserver une table dans un excellent restaurant, il a réservé une chambre dans un hôtel à une dizaine de minutes. Je vide mon verre pour la énième fois de la soirée. Ce mec est parfait.
Lorsque nous avons terminé nos desserts – une tartelette à la clémentine pour moi et un cheesecake au fruits rouges pour lui – il demande l'addition. Après avoir régler, nous quittons le restaurant et je suis obligé de m'appuyer contre lui pour ne pas buter sur une chaise ou le pied d'une table. Dehors, le froid réveille un peu mon corps et je suis capable d'atteindre la voiture sans problèmes. Je supporte bien l'alcool, mais je sais que j'ai un peu dépasser les limites ce soir.
Atsushi grimpe sur le siège conducteur et je sens son regard rivé sur moi. Je tourne la tête vers lui, mais la pénombre m'empêche de discerner ses traits. Probablement la faute au vin que j'ai bu, mais je sens déjà une chaleur se répandre dans mon corps. Il met le contact et fait démarrer la voiture. En une dizaine de minutes, comme je m'y attendais, nous arrivons sur le petit parking de l'hôtel. Le lustre du hall d'entrée diffuse une lumière un peu trop intense et je suis obligé de baisser les yeux, pendant qu'Atsushi récupère les clefs de notre chambre. Nous prenons ensuite l'ascenseur jusqu'au cinquième étage et atteignons enfin notre chambre – la numéro 561.
Lorsque nous passons le seuil, les lumières s'allument d'elles-mêmes et je sais d'ores et déjà qu'Atsushi a du dépenser une petite somme pour pouvoir séjourner ici. J'imagine que la décoration est superbe, mais je n'y prête pas spécialement attention. A peine a-t-il fermé la porte que je l'agrippe par le col et plaque mes lèvres contre les siennes ; il lâche un gémissement étouffé et je le pousse contre la porte pour l'empêcher de s'enfuir, glissant ma langue entre ses lèvres. Je sens ses mains appuyer contre ma nuque et rapidement, il prend le dessus. Ce salaud. Je tente de lui mordre la lèvre inférieure pour lui faire comprendre que je ne me laisserai pas faire, mais il se détache de ma bouche avant que je ne le puisse.
Un rictus étire ses lèvres et il m'entraîne par la main vers le lit. Je n'avais même pas prêté attention à la taille – immense – du lit et sourit en me disant que pour une fois, je dormirai dans un grand lit sans avoir à le partager avec mes cinq frères. Atsushi m'attire contre lui et m'embrasse une nouvelle fois. Sans détacher ses lèvres des miennes, ses mains glissent sous mon pull en laine et m'arrachent un frisson quand elles frôlent mes hanches. Je devine son sourire contre ma bouche. Ses doigts tournent sournoisement autour de mes tétons sans jamais les toucher directement, et je lâche un gémissement pour lui faire comprendre de se dépêcher.
Il me débarrasse de mon pull, puis détache ma ceinture et me fait asseoir sur le lit pour enlever mon jean qu'il balance dans un coin de la chambre. Il remonte ensuite vers mon visage, dépose un rapide baiser sur mes lèvres et je sent sa langue caresser mon téton droit. Je soupire en balançant la tête en arrière. Il alterne les coups de langue avec les mordillements et c'est magique, mais au bout d'un moment, je suis obligé de lui demander d'arrêter, à cause de la douleur.
Je l'attire vers moi et dépose une myriade de baisers dans son cou, tandis que mes mains, à mon tour, défont sa ceinture. Il se redresse et se déshabille rapidement avant de me rejoindre sur le lit. Tout en continuant à embrasser son cou – et j'en profite pour respirer son odeur terriblement excitante – ma main glisse vers l'élastique de son boxer et frôle la bosse qui s'y forme. Je sens son corps frissonner et je faufile ma main sous le sous-vêtement.
« Todo-- hn ! »
Sa voix est coupée par un gémissement. Il appuie ses mains sur mes épaules et ma main s'enroule plus fermement autour de son membre. J'entame un mouvement de va-et-vient très lent et je regarde ses yeux s'agrandirent à mesure que je le sens durcir entre mes doigts.
« Putain. », jure-t-il entre ses dents.
Il m'oblige à retirer ma main et m'allonge sur le lit. Je tente de me redresser, mais ses mains coincent mes bras et je grogne de protestation. J'ai envie de rire, parce que je suis fou de joie de le retrouver, mais son regard intense m'en dissuade. Il m'enlève mon boxer si vite que je crains qu'il ne l'ait déchiré et écarte mes jambes. Je ferme les yeux et sent ses lèvres se déposer dans l'intérieur de mes cuisses. Mon corps tremble sous la chaleur de sa langue qui trace de longues lignes de l'intérieur de mon genou jusqu'à mon bas-ventre. Il dépose ensuite quelques baisers tout autour de mon sexe.
« Hmm... »
Il me touche à peine et c'est déjà si agréable. Je sens ses lèvres se détacher de ma peau et je le vois s'éloigner vers son manteau, suspendu sur la porte de la chambre. Quelques secondes après, il revient avec un préservatif dans la main droite et une petite bouteille dans l'autre ;
« Je les avais oublié, se justifie-t-il avec un sourire.
— Pas de soucis. », je lui réponds en lui déposant un rapide baiser sur les lèvres.
Tandis qu'il retire le plastique protecteur du flacon, je me rallonge sur le lit. Deux secondes plus tard, je sens ses doigts, humides et froids, caresser ma peau. Je frissonne. Ses mains reprennent les caresses sur mes cuisses, puis sur mes fesses et après quelques secondes, je sens un premier doigt s'enfoncer en moi. Un long soupir s'échappe de mes lèvres. Il attend un moment que je me détende, puis entame un très lent mouvement d'aller et venue. Un second doigt s'ajoute ensuite et je m'agrippe un moment aux draps sur lesquels je suis allongé. Je dois admettre qu'après deux mois sans aucune activité sexuelle, mon corps s'est déshabitué.
Au fur et à mesure, ses doigts glissent de plus en plus facilement et de plus en plus vite, et mes gémissements commencent à envahir la chambre. Au bout d'un moment, Atsushi se redresse et se débarrasse de son boxer ; je sens sur moi ses yeux qui me dévorent et je souris. Ses doigts s'enfoncent dans mes cuisses quand il les écarte un peu plus et je retiens mon souffle quand je sens son membre glisser doucement en moi.
« Ah ! »
Ses hanches progressent lentement pour ne pas me brusquer. J'ai envie de le prendre dans mes bras pour lui dire à quel point je l'aime, mais j'enroule mes doigts autour des draps pour contenir le picotement qui se répand dans la partie basse de mon corps. Des gémissements de douleur s'échappent de mes lèvres, mais bientôt, je me laisse submerger par le plaisir. Je sens les mains d'Atsushi sur ma poitrine et je baisse les yeux vers lui : ses cheveux collent sur ses tempes, son visage brille à cause de la sueur et il n'a plus l'air aussi élégant que tout à l'heure. Non, il est terriblement sexy maintenant.
Ses hanches accélèrent. Sa respiration s'accélère. Et je sens qu'il touche ma prostate, m'arrachant un violent tremblement.
« Atsushi ! »
Il se penche vers moi et j'enroule mes mains autour de son cou. Il est tellement plus grand que moi qu'il arrive à enrouler ses bras autour de mon corps. Sa tête appuyée contre mon épaule, sa respiration électrise la peau mon cou et mon oreille droite, tandis que j'enfonce mes ongles dans son dos. Il grogne à cause de mes griffures et à cause du plaisir ; il va vite, de plus en plus vite et je commence à voir trouble.
« Oh mon Dieu, Atsu-- »
Ma voix est soudainement coupée par un coup de hanche plus fort, et j'enfonce mes dents dans son épaule pour m'empêcher de hurler. Je l'entends grogner contre mon oreille.
« Plus vite... plus vite, plus vite... », je répète inlassablement, agrippant ses cheveux pour ne pas m'écrouler.
Et Dieu qu'il va plus vite. J'ai l'impression que mon corps va se briser sous son assaut, mais je parviens à rester entier. Il me mord le cou, l'embrasse, le mord à nouveau et mes gémissements emplissent l'air de la chambre. Le bruit de ses hanches qui claquent contre mes fesses résonnent dans mes oreilles. Mon cœur s'accélère et mes mains frottent furieusement son corps. J'ai envie de me toucher pour accélérer les choses, mais je n'en ai pas la force et ses bras entravent mes mouvements de toute manière.
Alors dans un dernier élan de force, je tente de le supplier :
« Atsu... Hmmmnn ! J-je... S'il te... plaît... ! »
Il touche, encore, encore, ma prostate et je ne peux plus. Je gémis et mes dents pourraient le dévorer tout cru tellement elles s'enfoncent dans sa peau. Ma tête tourne très vite et je me met trembler à mesure que l'orgasme envahit mon corps. J'entends Atsushi grogner une nouvelle fois, et son corps tremble à son tour. Il s'écroule de tout son poids sur mon corps bien plus frêle que le sien et je manque d'étouffer, mais je suis dans un tel d'extase que je ne peux pas m'en préoccuper. Je le prend dans mes bras et respire une nouvelle fois son odeur. Dieu qu'elle m'avait manquée.
Au bout d'une minute, Atsushi se redresse et m'embrasse. Il retire le préservatif, fait un nœud avec et le balance sur la moquette de la chambre, avant d'enrouler ses bras autour de mon cou. Nos fronts se touchent et je souris. Tout est parfait.
« Ne t'en va plus jamais ainsi. », je dis, brisant le silence rythmé par nos respirations.
Il met quelques secondes à comprendre que je parlais de son voyage en France. Deux mois. Deux mois pendant lesquels il m'a laissé seul. Evidemment, nous avions des contacts réguliers par messages ou par Skype quand cela était possible, mais tout de même. Je m'étais senti terriblement triste pendant son absence, même si je faisais tout pour le lui cacher et ne pas gâcher son voyage.
Il embrasse ma tempe.
« Je te le promets. », murmure-t-il et je fonds entre ses bras.
Aucun de nous deux ne bouge ensuite et nous laissons le sommeil nous emporter.
Jour 2.
Le pépiement des oiseaux acheva de me réveiller. Les rayons du soleil pénétraient la chambre sans entrave, car nous avions oublié de tirer les rideaux la veille. La lumière du jour mettait évidemment en évidence le bazar que nous avions créé hier soir : mes vêtements étaient entassés dans un coin, nos chaussures un peu plus loin. J'enroule la chaude couverture autour de mon corps, un sourire sur les lèvres. Quelle superbe nuit.
J'entends le bruit de la douche dans la salle de bain et je devine qu'il s'agit d'Atsushi. Cet homme a un sûrement un défaut : celui d'être beaucoup trop matinal. J'aurai voulu lui faire quelques baisers avant qu'il ne quitte le lit et peut-être même m'amuser encore un peu avec lui.
Je cherche mon téléphone portable du regard, mais ne le trouve nul part sur le sol, avant de réaliser qu'il était posé sur la table de nuit à ma droite. Les yeux encore endormis, je dois rapprocher l'écran de mon visage pour y voir clair. J'ai reçu plusieurs messages, notamment de Choromatsu que je m'empresse de lire. « Est-ce que tu rentres ce soir ? », « A quelle heure comptes-tu rentrer ? », « Si tu as un problème, n'hésite pas à appeler. » Je soupire. Qu'est-ce qu'il peut être pénible. Je n'ai aucune envie de lui répondre, mais pour qu'au moins il n'appelle pas la police, je lui réponds rapidement que je serai à la maison en milieu d'après-midi.
Une notification apparaît alors en haut de mon écran. J'ai reçu un tweet. Visiblement, une réponse à un message que j'ai posté la veille – une photo de moi et Atsushi au Gourmet, une photo sur laquelle nous sommes adorables. « Vas-y, je te laisse penser qu'il est à toi, tu me fais pitié. » Je fronce les sourcils en relisant plusieurs fois le message et appuie rapidement sur la photo de profil de l'utilisateur. La photo est celle d'une jeune femme blonde aux yeux noisette, plutôt mignonne je dois l'admettre, mais je ne la connais pas du tout. Je fais défiler ses récents tweets : des messages échangés avec des amis principalement, quelques retweets de people, certains dans une langue étrangère. Qui était cette fille ? Pourquoi m'avait-elle répondue et surtout, que voulait-elle dire ? Je continue d'étudier les tweets de l'inconnu jusqu'à tomber sur une photo.
Je l'ouvre et mon cœur rate un battement. Elle, ses cheveux blonds relevés en queue-de-cheval et une très jolie jupe tailleur rouge, et lui, posant fièrement devant l'objectif, ses lunettes relevées sur son front. Lui, Atsushi.
Et la photo date d'il y a deux semaines.
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