lalignedujour
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lalignedujour · 7 days ago
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Parfois, je me dis que je réhabiterais bien à Paris. Surtout pour les évènements et les différentes dynamiques de communautés dont j'ai besoin.
Aussi pour la stimulation de la marche à Paris. Un trajet à pied, c'est plein d'idées qui finissent par produire un texte, plus intéressant et imagé que celui-ci. Les enseignes, les looks, les graf, les stickers, les bus pleins ou vides, les odeurs, les bouts de phrases à la volée. Les longues avenues qui font penser à une routine d'il y a quinze ans, les angles de rues qui font penser à un rendez-vous d'il y a dix ans, les noms des rues qui font penser à une chanson de Vincent Delerm ou à un air de Fauve.
Mais je me dis que si j'habitais à Paris, je me sentirais obligée d'aller voir des expos avec des fils qui pendent partout, dont les affiches sur les abri-bus et la photo sur le ticket seraient plus impressionnantes que l'expo en elle-même.
Alors, je suis bien heureuse de ne pas avoir cette injonction, de monter à Paris seulement pour l'essentiel, et peut-être même un peu moins.
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lalignedujour · 9 days ago
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A la question "à quelle époque aurais-tu aimé vivre ?", je peux répondre "une époque sans fascisme". Mais même ça, c'est exigeant.
Il faut bien viser entre les années 30 et les années 30.
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lalignedujour · 10 days ago
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Il ne sert peut-être plus de bruschetta. Il n'existe peut-être même plus. La rue est peut-être renommée. Je ne pense même pas si souvent à cette période de 6 mois vécus dans le 19ème arrondissement.
Mais la brasserie qui sert des bruschettas rue Laumière, elle vient comme ça en souvenir involontaire. Elle est pas invitée, et elle s'impose à moi 15 ans après, pendant que je bosse un jeudi matin.
Il vient super souvent, alors que moi j'y ai été peut-être trois fois max.
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lalignedujour · 21 days ago
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Elle a été renversée par une voiture. Elle a rien. Elle a juste passé une nuit aux urgence et s'en sort avec quelques hématomes.
Mais elle ne va pas échapper à la sanction minimale : se taper tous les récits des personnes de son entourage qui ont eu un jour ou ont connu quelqu'un qui a eu un accident de la route.
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lalignedujour · 23 days ago
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Tout a commencé chez la pierceuse. Elle a retourné le panneau "FERMÉ", et depuis l'intérieur on voyait "OUVERT" :
-allez, par ici, je t'en prie.
Cette façon ferme et douce de me tutoyer d'emblée. Derrière un paravent, elle m'a installée sur une table de massage noire. Elle a manipulé des flacons et des outils avec des gestes précis, puis elle s'est intéressée à mes oreilles. Elle s'est tournée encore vers le comptoir, puis est revenue vers moi. Son regard a fondu tout de suite là où elle devait percer. Précise. Assurée. Rapace.
-allez, je perce.
Et la douleur qui se distille et s'estompe comme une ivresse. Et toujours ses gestes fermes. Cette facilité à venir dans mon intimité dès que je l'y autorise. Je lâche prise.
-allez, je mets le bijou.
Vas-y, fais ce que tu veux de moi. Deuxième vague de douleur-plaisir, plus douce. Mes yeux blancs, un instant.
Elle manipule encore les flacons et les outils, déchire des emballages, me tamponne l'oreille, ouvre la poubelle, se lave les mains, referme les couvercles. C'est une sorte de spectacle de percussions. Je la regarde vague, je flotte encore un peu.
-allez, c'est tout bon, tu peux me suivre, je vais t'expliquer les soins.
Où tu veux. C'est toi qui donnes le rythme. Elle retourne à nouveau le panneau "OUVERT". Et elle a l'air très différente d'il y a cinq minutes, avant la douleur. Était-ce seulement cinq minutes ? Et je n'ai rien écouté aux soins. Heureusement, elle me remet une fiche explicative que je pourrai consulter une fois désenvoutée.
Et j'ai compris le mécanisme. Elle assertive. Moi passive. Elle aux gestes assurés, me touchant sans gêne, m'infligeant une douleur contrôlée et consentie. Moi concentrée sur mes sensations. Le cadre strict et les rôles définis dès le départ. Mon corps au centre de l'attention. C'est une relation BDSM. 30€ pour se faire dominer, ce n'est pas si cher payé.
Je suis rentrée chez moi, j'ai lu la fiche de soin, et je me suis rapidement administrée un orgasme intense. J'ai ensuite consulté plus sérieusement la fiche froissée.
Ça a continué avec l'esthéticienne. J'ai opté pour une épilation à la cire. Je pouvais renouveler régulièrement l'expérience. Toujours avec le même mode opératoire : capter des sensations, retour maison, masturbation. C'était une belle période.
Mais j'ai surpris une conversation au téléphone en attendant mon tour. L'esthéticienne décrivait la sensation de l'épilation laser. Ça disait une douleur plus intense et moins diffuse.
-comme si on vous claquait un élastique sur le visage
Et elle disait ça avec sa voix sucrée. J'ai voulu essayé. Au bout de 6 séances, les poils ne repoussaient plus. J'étais déçue et l'esthéticienne ne comprenait pas pourquoi. Je ne l'aimais pas trop elle, trop souriante, pas assez austère. Elle n'arrivait pas à me tutoyer. Ça mettait une distance, je sentais un manque d'investissement de sa part.
J'allais alors chez le dentiste, l'ostéo, le chiropracteur, mais ça ne faisait pas assez mal et je n'avais plus assez de caries ni de douleurs de dos pour justifier mes visites. C'est chez la tatoueuse que j'ai retrouvé le frisson.
La tatoueuse. Et la pierceuse. Et je ne sais pas comment je ferai quand j'aurai tout rempli. Quand j'aurai saturé mon corps de sensations.
Peut-être infligerai-je à mon tour à autrui mon flegme, mon autorité, mes gestes fermes et précis. Peut-être que je changerai de rôle, et y prendrai du plaisir. Sans le montrer.
Peut-être les personnes que je rémunère savent très bien pourquoi je fais ça.
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lalignedujour · 25 days ago
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Parfois, le dehors sent comme le dedans.
Dans ma maison, je pose des peaux de clémentine sur le poêle tout l'hiver, et ça sent l'agrume braisé sur moi. Ça devient mon odeur. Si bien que quand je sors, les routes à vélo sentent aussi l'agrume braisé. Surtout à la tombée de la nuit, quand l'humidité charie les odeurs.
Et aujourd'hui, dans la descente, ça sent la douceur, ça sent l'amour, ça sent la joie. Mais je connais le truc, je sais pourquoi : c'est sans doute parce que ça sent ça dedans moi.
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lalignedujour · 1 month ago
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Il était très sympa, c'est pas la question.
Il voyait la poésie dans le quotidien. Et il en mettait aussi : dans les interphones vidéo, il mettait systématiquement sa tête tout près de la caméra pour que ça soit marrant. Il faisait ça moins pour faire rire la personne qui devait lui ouvrir, que pour faire sourire les passant·es qui le voyaient comme ça. Un homme adulte seul qui fait une blague.
Mais il confondait les mots bouquetin et bouquin. Je pensais qu'il le faisait exprès. Mais ensuite, j'ai capté qu'il confondait premier degré, non seulement les mots, mais aussi les notions. Ça posait de vrais soucis, en particulier quand il a voulu ranger des bouquetins.
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lalignedujour · 1 month ago
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Je mange un biscuit en visio, je ramasse une miette sur la table et je la mange. Merde, c'est un bout de plastique. Je fais quoi, je crache ? Allez, je coupe ma vidéo et je recrache toute ma bouchée.
-Qu'est-ce que t'en penses Chloé ?
Merde. Allez, j'avale vite. Tant pis, ça me fera un peu de ma carte bancaire du mois au moins. J'active le micro.
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lalignedujour · 1 month ago
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Suite et fin du précédent texte
Andrea serre avec joie dans ses bras toute sa famille, parfois plusieurs à la fois.
Il reste avec son frère (Luca, 13 ans) et sa sœur (Serena, 13 ans) dans un coin du salon. Il ne leur a pas amené de cadeau. Bien mieux à cet âge, il leur a amené des histoires. Il ne veut pas de cette distance qui s'installe quand des enfants de la même famille se toisent de part et d'autre de l'adolescence. Il a toujours voulu un lien fort avec Luca et Serena, malgré leur gemellité, peut-être à cause de leur géméllité. Il a toujours voulu ce lien, mais c'est peut-être seulement maintenant qu'il parvient vraiment à le faire vivre.
C'est une surprise, son arrière grand-mère est là aussi. Il ne connait pas son prénom, il l'a toujours appelé Nonna car sa mère l'appelait Nonna. Même son père et tout le monde l'appelle Nonna. 98 ans, et elle tient. Elle ne dit pas grand chose. Mais quand elle dit, elle a une énergie singulière dans la voix. On dirait qu'elle est forme. Mais en fait non, elle est fatiguée. Elle tient de printemps en printemps, parce qu'elle adore l'odeur des lilas. C'est son secret de longévité, l'odeur des lilas. Alors, oui, elle passera l'hiver.
C'est déjà l'heure de l'aperitivo. Le feu est allumé depuis le midi, le salon est bien rempli, il commence à faire chaud. Andrea va retirer son pull. C'est l'occasion. En retirant son pull, il dénudera son tatouage, et ça lui donnera l'occasion d'expliquer. Ça ne manque pas. Sa mère est la première à le voir. Andrea explique calmement que oui, il s'est fait tatouer. On l'écoute. Il s'attendait à du jugement, point du tout.
Il accepte un verre d'Asti, et il continue. Il dit ce que ça signifie pour lui. Il dit qu'il aime les femmes, mais aussi les hommes, et en fait il peut potentiellement être attiré par tout le monde, y compris les personnes qui ne sont ni femme ni homme. C'est-à-dire ? demande sa grand-mère. Il explique la non-binarité. Il refuse l'assiette de jambon cru car il est devenu végétarien. Il explique ensuite que lui se sent non-binaire, son père fronce légèrement les sourcils. Andrea explique. Sa mère explique à Nonna. Luca et Serena sont debout autour de la table. Luca grignote un roulé à l'aubergine en faisant la grimace. Il en goûte un par an pour se souvenir qu'il n'aime pas ça. Serena demande à l'oreille de son père si elle peut prendre un peu d'Asti. Il n'entend pas, il écoute Andrea qui raconte son histoire amoureuse avec un garçon. La situation est beaucoup plus banale que ne l'avait anticipé Andrea. On lui pose des questions sur cet amoureux. Il raconte qu'il se sent tout petit sous ses mains, qu'il trouve ça beau de trouver un garçon vulnérable, de le faire frissonner, que tout le monde devrait essayer. On l'écoute comme s'il racontait qu'il prend des cours de qi gong. Ce n'est pas que sa famille s'en fout. On écoute. On respecte. On comprend. On trouve ça bien pour lui. On n'en fait pas un fromage.
Ça gêne Andrea d'avoir monopolisé la conversation. Alors on parle du repas, qui arrive, de la fille de la voisine, des travaux sur la place, des trains de moins en moins nombreux et de la difficulté de Nonna à sortir acheter son tabac. Mais Andrea n'a pas tout dit.
Il lui faut reprendre la parole, de façon plus formelle cette fois. Une fois le dessert terminé, Andrea lèche bien sa cuillère pour en retirer toute la panna cotta, et la fait tinter contre son verre à pied. "Voilà, je voulais ajouter que j'allais entamer un traitement hormonal de substitution. Ça veut dire que je ressemblerai moins à un homme, et plus à une femme. Je ne me sens toujours ni homme ni femme, mais je souhaiterais qu'on me genre au féminin. Je vais aussi changer mon prénom officiellement, et j'ai choisi Sara. Évidemment, je comprendrais si c'était difficile pour vous, mais je veux vous dire que je vous aime toujours autant, et que je veux continuer à vivre ces moments avec vous. En tant que Sara." Elle ajoute qu'elle ne serait pas blessée si dans un premier temps c'était difficile de la genrerau féminin, ou d'adopter ce nouveau prénom. Elle ajoute qu'elle aime aussi son prénom de naissance, et voudrait garder Andrea en second prénom. Mais Sara est celui qu'elle a choisi, et elle demande à ce que ce soit respecté.
Elle ne s'attendait pas à ça. Après un bref silence, les réactions sont modérées. Sa tante et sa mère commencent à débarrasser. Elle se demande si tout le monde a bien compris. Elle débarrasse elle aussi. "Entendu, ma fille, je suis fier de toi", lance son père, avant de demander si tout le monde a chaud ou si c'est que lui, et d'aller baisser le chauffage. En cuisine, sa mère la félicite. "Ça me fait plaisir que tu nous le dises, que tu nous fasses confiance comme ça, tiens va demander combien il y a de café, tu seras gentille."
Sara se demande si elle rêve. Elle retourne au salon. Ça parle prix du gaz. Elle demande combien il y a de café. On la genre correctement. Serena lui dit qu'elle est contente d'avoir une sœur et que Sara c'est très classe comme prénom. Luca lui demande depuis combien de temps elle est décidée. Il y a de la curiosité sans intrusion. Ça commence à parler de Meloni. Il y a 5 cafés.
Elle retourne en cuisine et prépare la cafetière moyenne, positionnée là où elle l'a toujours vue : placard du bas, entre la petite et la grande. Le café sort avec ce bruit et cette odeur de son enfance et son adolescence. Elle installe la cafetière au centre du plateau, et le sucre pour sa grand-mère. Sa mère compte les tasses autour, il y en a 5. Elle se dit que Sara s'est trompée et en ajoute une 6ème. Sara lui fait remarquer qu'elle sait très bien compter et que si elle ne lui fait pas confiance, elle n'avait qu'à pas la charger d'aller compter le nombre de cafés. Le ton monte légèrement, la tante veut calmer le jeu et les emmène toutes les deux au salon pour recompter.
Elle doit hausser le ton pour passer par-dessus les conversations sur la mort de la gauche : "Reno, Nonna, Maman, toi Alessa, Sara et moi. 6 !"
"Non, pas moi", réponds Sara. Silence général. "Je ne bois plus de café". Sa mère lâche le plateau, brisant les 6 tasses et répendant le précieux liquide sur les carreaux de terrazzo.
On se regarde. On ne sait quoi dire. On regarde Sara comme si c'était une étrangère, comme si elle n'était plus chez elle ici. Et c'est un peu vrai : Sara regarde la maison où elle a grandi, les visages qui l'ont toujours accompagnée, qu'elle a aimé, admiré. Et elle voit ce truc insidieux qui s'installe doucement et apparaît d'un coup : la distance. La gorge chargée de sanglots, la mère de Sara lance "Bon, je vais ramasser tout ça", elle part dans la cuisine chercher la pelle et la balayette pour pleurer.
"Mais prenez un café, c'est bien si ça vous fait plaisir, moi j'en ai pas envie." Son père la coupe et la prend par le bras pour lui parler dans le couloir : "écoute, je ne sais pas ce qu'on t'a mis dans la tête à Bologne…" Il a dit Bologne avec les yeux en l'air comme pour mimer un air hautain. "…mais ici, on boit du café. Point. Maintenant, tu te débrouilles comme tu veux, tu peux le laisser refroidir puis le jeter dans l'évier en cachette si c'est ça que tu veux, mais je te demande une chose : ne fais pas de scandale, pas devant Luca et Chiara, pas devant Nonna." Sara reste bouche bée. Le regard de son père s'est attendri, il y a une pointe de pitié là-dedans. "S'il te plaît, ma fille. Elle a 98 ans. Pas de scandale, d'accord ?" Les yeux de Sara ne clignent plus. Elle n'en revient pas de cette situation. Mais d'accord. Sara baisse la tête sans rien dire, elle est d'accord.
Reno revient dans le salon en traînant Sara par la main. "Ah ! Elle voulait dire qu'elle prenait un déca le soir ! N'est-ce pas ? Ahah ! Tu nous as eu·es !" Un temps suspendu. Sara confirme d'un sourire : "Oui, voilà, un déca !" L'ambiance se détend doucement. Comme un long soupir. Luca, Serena et leurs jeunes cousines ne montrent pas de soulagement.
Les adultes peuvent faire semblant de croire à quelque-chose, les enfants et les ados non.
Sara s'installera à table, la mine sombre, la mâchoire serrée. Elle laissera la tasse de déca refroidir sous son nez, et ira la vider plus tard dans l'évier en débarrassant toutes les tasses. Personne ne l'y aidera. Les années suivantes, elle essaiera de revenir, de retrouver quelque-chose. Mais ce soir là, seule dans la cuisine, au-dessus de la faïence brune, Sara a déjà compris qu'elle ne trouverait plus de lien sous ce toit.
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lalignedujour · 1 month ago
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16h20, le train en provenance de Bologne arrive en gare de Battipaglia. Andrea descend, la vingtaine fringante. Un mince sac à dos sur une épaule. Il aperçoit sa mère au loin sur le quai, elle ne l'a pas encore vu. La joie est réelle, il n'a pas vu ses parents depuis 2 mois. Mais il n'a plus 5 ans, il ne va quand même pas courir pour lui sauter dans les bras. Il a joie adulte. Sourire discret, regard tranquille et pétillant.
L'étreinte est ferme, entière. Elle dure jusqu'au départ du train. Il contient bien sa mère dans ses bras maintenant. C'est pourtant elle qui lui demande d'emblée s'il a bien mangé, s'il n'a pas froid comme ça, juste avec une veste en jean molletonée. "Non, Maman, ça va, ne t'inquiète pas. Je te ferai une bonne tisane en rentrant à la maison. D'accord, merci Maman. Ton père attend à la voiture, tu es sûr que tu n'as pas froid ?"
Andrea est soucieux, il a pourtant bien mangé, bien dormi. Mais il a quelque-chose à annoncer ce soir. Il se l'est promis. Ce soir, c'est le bon soir. Il y aura tout le monde à table. Et mieux vaut le faire au début des vacances qu'à la fin. Il a répété les mots, plusieurs fois, il va le faire. Ça fait des années qu'il a ça en lui. Et maintenant, c'est le bon moment. Il a regardé les horaires des trains de demain, au cas où ça se passait mal.
Son père attendait effectivement dans la voiture. Il n'a pas pu la stationner, et à peine sa mère et lui sont-iels monté·es qu'il démarre. Andrea lui fait malgré tout un câlin en entourant l'appui-tête depuis la banquette arrière. Son père jure, mais blague quand même. Il est heureux de voir son fils et lui dit, il lui montre. Dans cette famille, on se dit les choses.
Le soleil se couche déjà, avec ces couleurs qui l'ont accompagné toute son enfance. Il garde un peu le silence pendant que ses parents discutent. "Mais puisqu'il te dit qu'il n'a pas faim, laisse-le un peu ce petit. Quand même, je m'inquiète. Eh oui, c'est la vie. Qu'est-ce qu'il avait besoin d'aller à Bologne, j'aurais été plus tranquille s'il avait été à Salerno, ou même à Rome, moi je te le dis. Ah, ça ! Hein mon chéri, j'ai parlé à la voisine, sa fille est allée faire du droit aussi, mais à Salerno, il y a un très bon programme de droit aussi à Salerno, et puis sa fille, la petite Chiara tu te souviens ? elle rentre voir ses parents tous les week-ends, elle pourrait même rentrer tous les soirs, mais elle veut aussi avoir sa via là-bas, tu pourrais même faire le trajet avec elle le vendredi soir tu vois, c'est dommage, tu m'entends, Andrea ? Alessa, laisse-le un peu ce petit, non ?"
Comme quand il n'est pas là, ses parents ne parlent que de lui.
Andrea sourit. Il tourne la tête vers la gauche. Il sait qu'au virage suivant, il pourra apercevoir la baie. Il profite de la solitude, et de la présence de ses parents. C'est un sas avant d'entrer dans une ambiance de Noël, retrouver son petit frère, sa petite sœur, sa grand-mère, sa tante avec Giorgia, Guilia et Noemi.
Quand il sortira de la Suzuki 3 portes, en se contorsionant, il leur donnera ce qu'il a apporté. Une bouteille de Campari et un Panettone. Comme un grand. C'est la première fois qu'il fait un cadeau en arrivant chez ses parents, ça met une distance. C'est tout juste s'il n'a pas apporté des fleurs. Sa mère s'offusquera, et ce ne sera pas feint. Elle dira qu'il ne fallait pas. Et il insistera. Comme un grand.
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lalignedujour · 1 month ago
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On est quand même très cool dans leurs yeux. Nous les adultes. On sait réserver des billets de train. On sait les redescendre de leur siège enfant sur le vélo. On sait cuisiner une tarte. On sait acheter et brancher une guirlande lumineuse.
Pour l'enfant, je dois avoir des super pouvoirs. Il doit ressentir un mélange d'admiration et de jalousie.
Dans l'autre sens, je me sens comme lui. Ce n'est pas symétrique. J'aime aussi me concentrer sur une matière, faire des allers et des retours avec la pulpe de mon index, puis avec l'ongle, et me raconter des histoires dans ma tête, et la tâche sur le canapé devient un paysage. J'aime le faire, mais je ne le fais pas.
Lui aussi a ses super pouvoirs. Je ressens un mélange d'admiration et de jalousie.
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lalignedujour · 1 month ago
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Entendu à la table d'à côté : "non je vais faire de l'escalade, mais de façon thérapeutique". Et à mesure que j'écris ça, j'imagine un malware anti-écrivaillon de café qui lirait avec une synthèse vocale volume à fond tout ce que j'écris. Ce ne serait que justice.
Ne m'en voulez pas, table d'à côté, car si j'écris, c'est de façon thérapeutique.
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lalignedujour · 2 months ago
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A défaut de partir en vacances à l'étranger, j'aimerais pouvoir éteindre ma compréhension du français. Ainsi, les "allez allez là, on monte, messieurs-dames" ou les "mais dépêche-toi putain" du chauffeur de car me paraîtraient exotiques.
Autrement, tout y serait. L'heure pas à l'heure. Le pare-brise géant. Les villes moyennes du Poitou sur les panneaux qui ne me disent rien (on pourrait aussi bien être en Andalousie, ou en Basse-Saxe). Les successions de rond-point entre des enseignes éclairées où je ne vais jamais, pour atteindre un arrêt où personne ne monte.
Il ne manquerait plus que le Portugais, le Suédois, pour que je me sente vraiment en vacances.
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lalignedujour · 2 months ago
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Rudy a eu :
-le nez cassé
-si peu de cheveux qu'il les a rasés
-huit mois de réclusion
-un deuil à gérer depuis ses quatre ans
-un truc qui s'est éteint dans ses yeux, il ne saurait pas dire quand, c'est venu petit à petit
Et aujourd'hui, il s'installe au piano de la gare. Il courbe son cou, ouvre légèrement la bouche. Il ne voit plus rien autour. Les deux iris noirs fixes sur ses deux index raides. Il tâtonne. Il cherche une mélodie perdue. Le pied enfoncé sur la pédale de droite. Trois cabas Auchan crient des paysages colorés contre le piano noir. La campagne, la mer, et encore la campagne.
Rudy porte un costume noir aux fines rayures blanches offert par son premier employeur (un magasin de vêtements à Barbès), des chaussures en cuir noir cirées pour la dernière fois à sa sortie de prison. Des chaussettes airness visibles quand il est assis car il n'avait pas tout à fait fini sa croissance quand on lui a offert le pantalon.
On reconnaît les mélodies de Francis Cabrel, Laurent Voulzy, Elton John. Alors, on devine un peu de l'enfance de Rudy. Les goûters chez une voisine après l'école. Il n'a pas beaucoup de technique. On devine alors qu'il n'y avait pas de piano chez cette voisine. En effet, c'est en prison, qu'il a découvert le piano. Avec une prof qui venait toutes les trois semaines avec son clavier, mais surtout seul, pendant des heures avec un des octaves imaginaires, dessinées sur un rouleau de tissu.
Pour les dizaines de passagèr·es qui l'entendent de loin, c'est mauvais. Rudy, il faut le voir pour qu'il nous touche.
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lalignedujour · 2 months ago
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Intercités, carré famille. Dans une de ces rames aux sièges rayés boursouflés mises en service entre 1975 et 1989.
L'enfant et moi côte à côte. En face : deux sœurs septuagénaires. J'ai une fascination pour les personnes qui fréquentent encore leurs adelphes à un âge mûr.
L'une est plus âgée que l'autre. Elle répond à ses questions sur les vacances de quand elles étaient enfants. "Non, ça c'était seulement avec Maman", "Oui, c'était en Corse la maison avec les citronniers".
Elles ouvrent côte à côte chacune un Paris Match différent. L'image est belle. Ça fait un W : 4ème, 1ère, 4ème, 1ère de couverture. Et au-dessus, des regards concentrés. De temps en temps, en asynchrone, elles tournent une page.
Elles font des commentaires sur l'apparence des gens connus (leurs rides ou leurs vêtements), sur les membres de leur famille qui sont morts. Elles parlent des gens qui sont morts quand ils étaient vivants.
Mais nous, avec l'enfant, on fait quoi ? A les regarder, j'en ai oublié de proposer une activité, et il s'ennuit. Il me sollicite. Je n'ai pas le temps de réfléchir, je propose spontanément de parler de quand les gens vivants seront morts, à commencer par les deux dames en face de nous, comment elles vont mourir, selon toi ? Qui découvrira chez elles des montagnes de Paris Match ? Je m'interromps.
Aux trois regards sur moi, je devine que c'est une mauvaise idée.
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lalignedujour · 2 months ago
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Oui, les personnes âgées dont on dit qu'elles regardent la télé et votent extrême-droite vont mourir. C'est heureux, d'un côté. Mais de l'autre, ce sont aussi elles qui font vivre les centres de nos petites villes : qui va encore chez le fleuriste, ou dans ces salons de coiffure aux miroirs fumés ? Qui a encore un compte en banque dans une agence bancaire et achète ses chaussures dans un magasin de chaussures ?
L'extrême-droite est peut-être le prix à payer pour maintenir nos villes et villages en vie.
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lalignedujour · 2 months ago
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Elle disait "et mon frère est arrivé à Berlin en 2005, il a joué de la guitare dans le U-Bahn, à la fin de la journée, il se payait une pizza et une bière, ça lui a plu, alors il s'est installé".
J'ai eu dans le corps une chaleur qui dit que la vie est simple. Je sais qu'elle est pas si simple, mais c'était mon émotion du moment. Et de temps en temps, alors que je suis en train de détourer une image à l'agence, l'émotion revient. Je repense à elle, et je me dis que la vie était simple avec elle.
Je fais le raccourci automatique, alors que c'est même pas elle qui s'est installée à Berlin en jouant de la guitare, c'est son frère. Elle a dû y aller quelques fois pour lui rendre visite, ou peut-être même pas.
Mais son histoire lui a bénéficié. Elle m'a attachée à elle. Et c'est bien légitime, si elle raconte bien les histoires...
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