Exercice de style pour la Cotton's Family / Julia Ducretet
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Reclam Verlag est la tradition de la collection allemande
RECLAM VERLAG coll. « Universal-Bibliothek », Allemagne, 2012— Offset, 147 x 96 mm
La collection de livres de poche « Universal-Bibliothek » a été lancée par l’éditeur Reclam en 1867. Elle est aujourd’hui une des plus populaires auprès des lycéens et des étudiants de fait de son petit format et de son prix modique (environ 5€). La ligne graphique actuelle a été établie en 2012 par Cornelia Feyll et Friedrich Forssman.
1/ Quelle stratégie de marque l’éditeur semble-t-il adopter ici ? Expliquez.
La stratégie mise en place par Reclam dans le cadre d’« Universal-Bibliothek » est une stratégie de la collection. L’idée est de de tendre vers une homogénéité visuelle afin que chaque ouvrage soit reconnaissable comme appartenant à un même groupe et non pour ses qualité seul. Ce parti-pris promeut une stabilité des formes graphiques répétées sur chaque couverture et fait passer la notoriété de la collection et de l’éditeur avant celle d’un titre ou d’un auteur en particulier. « Universal-Bibliothek » s’identifie par un fond coloré (différent en fonction du genre de l’ouvrage) dont le tiers supérieur est occupé par un encart contenant les informations relative à l’œuvre (titre et auteur). Elle utilise exclusivement le DTL Documenta créé en 1993 par Franck E. Blokland. En promettant des codes graphiques simples et reproductibles, les coûts de fabrication sont réduits, la collection a donc une ambition populaire. Reclam par sa stratégie implique ainsi le lecteur dans une sorte d’adhésion ou d’attachement à la maison d’édition d’avantage que dans une relation plus élitiste à un objet-l’ivre en particulier. L’objectif est ici de fonder une marque éditoriale : de l’instaurer dans la culture du public et c’est un pari réussi pour « Universal-Bibliothek » qui s’installe comme un ouvrage de référence auprès des lycéens allemands : certains de ses classiques dépassent ainsi allègrement la barre des 5 millions d’exemplaires vendus.
2/ Quel rôle le caractère typographique choisi par les deux graphistes joue-t-il dans un tel positionnement ?
Le design pensé par Cornelia Feyll et Friedrich Forssman en 2012 remplace celui établi en 1988 par Brigitte et Hans Peter Willberg qui faisait alors usage du Stempel Garamond. Cette version du Garamond rappelle des caractères largement utilisés dans le livre de puis sa création et traduit une forte connotation littéraire. Reclam qui en fait un usage sur ses couvertures jusqu’en 2012, affirme, par ce biais, cette ambition littéraire et le sérieux de ses « Universal-Bibliothek ». En 2012, Feyll/Forssman remplace le Stempel Garamond par le DTL Documenta, un caractère à empattements de Franck E. Blokland. Purement formellement ce caractère traduit sans doute la aussi une connotation littéraire forte. Le caractère n’est pas usé dans des corps très grand et rappelle le labeur des ouvrages littéraires. Finalement proche du Stemple Garamond, le DTL Documenta s’approprie son « sérieux » tout en apportant une dimension plus contemporaine a Reclam par notamment un contraste entre ascendante et montante moins important des empattements non creusés etc… Dans le positionnement stratégique et cette volonté de « faire collection », populaire et démocratique affirmée par Reclam, on peut cependant se questionner sur l’emploi d’un caractère à empattement : plus élitiste et directement associée à « la grande littérature ». Cette tension est, selon moi, légèrement contrebalancée par l’usage qui est fait des corps. L’usage sur les couvertures du caractère en deux corps seulement provient du système mis en place par par 1988 pensées par Brigitte et Hans Peter Willberg dès 1988. La plus petite taille de corps apporte une précision d’information « textes en langues étrangères »… Le corps principal est destiné à l’auteur, au titre et à l’éditeur. Cet emploi est loin d’être neutre car il place l’éditeur à la même importance en usant du même corps que l’auteur et son œuvre. Il reconfirme ici l’unicité des ouvrages et la volonté de « faire collection ». Finalement, c’est son usage autant que le peu de codes graphiques autour qui donne son importance au caractère : il porte quasiment à lui seul l’ensemble de la ligne graphique de l’édition. L’usage du caractère a une ambition que l’on peut éventuellement rapprocher de celle de la collection DTV, de Celestino PIATTI entre 1961-1991 dans le sens ou il « fait » quasiment la ligne éditoriale.
3/ De quelle manière cette collection s’inscrit-elle dans une tradition assez typique de l’édition allemande en littérature et en sciences humaines au XXe siècle ?
Il apparaît assez clairement que « Universal-Bibliothek » s’inscrit dans une tradition typique de l’édition allemande au XXe siècle. La stratégie de la plupart de ces maisons d’éditions était de pousser le principe de collection et les valeurs qu’elle portent à l’extrême (démocratiques, accessibles…). Pour ce faire ils se doivent de proposer des petits formats peu chers (« Universal-Bibliothek » coûte environ 5€). L’éditeur authentifie ses publications pour y engager sa responsabilité. Reclam fait rentrer les informations relative a l’ouvrage spécifique (titre et auteur) dans un cartouche rectangulaire apposé sur un fond coloré et surplombant d’un filet le nom de l’éditeur. Cet usage peut rappeler le cartouche utilisé par la collection « Insel-Bucherei », lancée par A. Kippenberg en 1912. Celui-ci était, à la différence, apposé sur un papier à motif aléatoire. La collection de poche « Suhrkamp », quand à elle, lancée par SV en 1963 pousse le principe de collection presque à son paroxysme : en suivant une logique aléatoire, une couleur est attribuée à un titre surmonté des informations en un seul corps de Garamond et entrecoupées de filets. Ce principe de signalétique coloré fut très réussi : le titre individuel se noie ainsi dans la masse de la collection. Ici, Reclam s’il utilise un principe de couleur, ne l’utilise pas dans une ambition aléatoire mais propose une signalétique par genre (comme c’était le cas pour les premiers penguins book) le jaune est donc attribué aux classique allemand, le magenta pour les essai etc… Ces deux collections s’inscrivent dans une tradition allemande mettant en avant des principes de collections ultra-rigide. Si la nouvelle ligne éditoriale de 2012, signe pour Reclam, une nouvelle remise en avant de l’œuvre en l’enfermant dans un cartouche ; en noir sur fond blanc les informations sont plus immédiates que pour les « Universal-Bibliothek » de 1988. La collection prime néanmoins encore largement sur l’unicité du livre en cela elle s’inscrit dans une tradition du livre allemand.
Julia Ducretet, le 16/04/23
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Is it great editorial design compatible with luxury brand ?
Dear Reader, I’m sure you know Diptyque. I personally rediscovered recently the brand and I just stoped on their designs : how a brand can have a so luxurious positioning and a so bad design editorial ? In that moment, I remembered the thematic of research proposed by Laurine about luxury industry and his lack of graphic design. I proposed to you a bit of history of the brand before an analysis of the Diptyque labels.
If the brand sells bath and bodys products but also home scents, it’s specialized in hight-quality fragrances and candles. The Diptyque house was created in 1961 by three artists, the painter Desmond Knox-Leet, the designer Yves Coueslant and the architect Christiane Gautro. At the beginning their shop exposed treasures of theirs travels before they were pionniers of the unisex perfume. More than that, the company broke new ground with proposed a hight quality candle as a beauty object to decorate the houses.
To dress up their new product, they decided to make an oval label reminding a medallion of the 18th century. From this simple shape Desmond Knox-Leet reproduced the design in all sort of labels, bottles and packagings. That design became since is creation the signature of Dyptique, still in use today and symbolizing the unisex and hight-quality positioning of the brand.
To dress up their new product, they decided to make an oval label reminding a medallion of the 18th century. From this simple shape Desmond Knox-Leet reproduced the design in all sort of labels, bottles and packagings. That design became since is creation the signature of Dyptique, still in use today and symbolizing the unisex and hight-quality positioning of the brand.
On a detailed point of view, the type is horribly managed : the letterspaccing is very unequal yielding the informative text surrounding the medallion not easy to read. Also, the composition of fragrance name at the center is not always good thought : the consumers can read « UMGTHEU » for « MUGHET » just in cause of letters layout.
Observed in detail the oval shape on the label is surrounded by informative text. We found the first place of the shop « 34 boulevard saint germain, Paris 5e » and the name of the brand writing an old serif typeface : a sort of Garamond. At the center of the medallion, there is the name of the fragrance « ROSES » in capital letters and composing letter by letter. If the central typeface diverge from one label to an other, he seems manually reproduced. That may be to imitate the first labels created before the invention of computer (letters drew manually) or to give a « naturally » aspect to the brand.
On a detailed point of view, the type is horribly managed : the letterspaccing is very unequal yielding the informative text surrounding the medallion not easy to read. Also, the composition of fragrance name at the center is not always good thought : the consumers can read « UMGTHEU » for « MUGHET » just in cause of letters layout.
If Diptyque adopted a positioning luxurious, and above all, giving her a « French style » in spite of her acquisition by an American company, the brand stay untouchable developing a lifestyle image. If from the outset, it’ a « zero pub » brand, Diptyque is often quoted on beauty French media and spotlighted by influencers. To make the news, the brand opened pop-up stores who mix her history, creative activities and fragrances sale. Today, she’s well knew for his collection « city » where one candle was created for one city, « NEW YORK » : had perfume of a big apple. The brand a geographic strategy for the consumer who buy his product to say « I was where », always with grace…
Finally, I thought that the imaginary developed by Diptyque through semantic shapes and well thought positioning made the brand like a great empire of the elegant fragrance. In luxury industry it’s appears that the global image and storytelling of the house are more important than typographic details. Recently, the French agency the Graphicants have worked on an exhibition for the brand. Their typographic knowledge have excelled…
Julia Ducretet, 26/03/23
Sources :
DECLAIREUX Bruno, « Diptyque, la petite marque de luxe qui cartonne », Capital, le 07 février 2020. https://www.capital.fr/entreprises-marches/diptyque-la-petite-marque-de-luxe-qui-cartonne-1361756
« Analyse marketing : Diptyque, 60 années enflammées ! », Ciliabule, le 14 janvier 2021. https://ciliabule.fr/analyse-marketing-diptyque-bougies/
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Réenchanter le quotidien
Cher·es lecteur·trices, elle dégoute certains, en fait rire d’autres, suscitant approbation où violent rejet. Ce qui est certain c’est qu’elle ne laisse pas indifférent : je parle bien sûr de la communication Monoprix ! Si la refonte de l’identité de Monoprix date de 2009, pensée par l’agence Havas et sa filiale Rosa, il faut saluer la longévité inhabituelle d’un concept aussi simple. Quels sont les stratégies et codes graphiques employés par Monoprix qui expliquent un tel succès ?
Au début des années 2000, face à la concurrence des autres supermarchés, l’enseigne se voit dans l’obligation de mettre en place un nouveau positionnement. Depuis toujours catégorisé comme une marque chère, elle ne peut définitivement pas communiquer sur l’accessibilité de sa marque « repère ». Alors elle met en place une tout autre stratégie qu’elle dévoilera dans sa première campagne de communication : « non au quotidien quotidien ». Le fil conducteur de l’enseigne est très clairement énoncé : faire de la communication un divertissement pour l’acheteur·euse quotidienne. Et c’est plutôt réussi…
Monoprix est sans doute le premier distributeur en France à valoriser autant son design. L’une des principales innovation pour l’époque, reste la transformation de son packaging en médium de communication. Les emballages des produits de grande consommation utilisent généralement « l’appeal consommateur » : une stratégie qui repose sur un packaging blanc, informatif et avec une photo du produit embellie pour « donner envie ». Le produit est ainsi immédiatement reconnaissable. Havas propose un contre-pied total et novateur : l’image du produit disparaît pour laisser la place à une linéale (le Bebas Neue) sur fonds colorés. Les consommateurs doivent alors lire le packaging pour reconnaitre le produit.
L’emballage est alors concrètement utilisé comme un vecteur de relation, de dialogue avec le client. Les packagings proposent du texte sur des fonds colorés, références à l’univers Pop et à la Campbell’s Soup de Wharol. La raison en est simple : Monoprix cible le consommateur citadin consciencieux. Mais ce n’est pas tout, pout attirer ce persona urbain, elle mise tout sur le rédactionnel. On peut y lire « remportez la palme de l’élégance, cœurs de palmier » ou encore « avec cette robe on vous trouve très choux, choux de bruxelles ». Si cette stratégie du jeux de mot hyper simple et très efficace provoque aisément le sourire de son public, elle parle également à une cible typiquement Française : ce qui est doublement pertinent. Néanmoins on imagine bien le calvaire pour les rédacteurs qui doivent sans cesse se renouveler…
Les packagings sont rapidement devenus l’emblême de la marque : déclinés sur tous les supports. Ils sont désormais utilisés pour porter les slogans des campagnes : Monoprix n’a finalement plus besoin que d’eux pour parler à sa cible.
La pérennité de cette communication, en dit long sur la réussite et l’efficacité de sa simplicité. Et pourtant Rosa n’est jamais à bout… En février 2023, Monoprix fait un coup de com en sortant une campagne pour la Saint Valentin. Poussant le concept éditorial encore plus loin : elle propose de pousser le rédactionnel jusqu’à la quasi personnalisation de son emballage. Le ton se veut telle une invitation : les produits Monoprix sont suffisamment romantiques pour un repas en amoureux·se.
Il n’y a pas à dire ; Monoprix à fait très fort (merci Havas) à tel point que la communication à surpassé l’identité même de la marque ! Qui se souvient du slogan de l’enseigne ? Si les graphistes sont divisés face à cette communication, qualifier son graphisme de « pauvre » n’est plus d’actualité. Il nous aura prouvé qu’avec peu d’éléments on peut produire une communication qui « fait bloc ».
Julia Ducretet, le 12/03/23
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A beautiful book on beauty
Dear reader, I rarely think about beauty. Firstly because I think that beauty comes after function in graphic design. Like a lot of my contemporaries, I have learnt to consider the pursuit of beauty as an old-fashioned, meaningless and not respectable goal for today’s creatives. Besides, I have never questioned myself about this subject before reading Beauty. The book was published by Phaidon in 2018, thought by two relevant creatives from New York : Stephan Sagmeister and Jessica Walsh.
My eyes were directly attracted by this publication which has a design out of common. A black and white book case protects the book. On the cover, a large decorative, ornemental letter is debossed, while the back cover mixes iconography and text. On the spine, we find the headline followed by the names of the designers. When we take the book out the box, the object reveals a sliver printed margin where a decorative design appears. We can read « beauty = function » and « beauty = human ».
The book is chaptered in several parts, mixing information, research, data, questions developed through a thought process about beauty. Thus, words and editorial design both contribute to creating beauty. Sagmeister and Walsh use at least five different typefaces, one of which was created for the occasion (the AB Beauty) and ornemental and illusional patterns to dress up each chapter page.
« Beauty is the dose of humanity that makes our lives better », « beautiful works are not only more joyful ; they work better ». The two designer suggest to go against the consensus of the contemporary vision of beauty in the creative world.
The theme is slowly introduced by research and scientific experiments about this theme with the idea to defining it better. We discover, for exemple, that humans are capable of recognizing beauty unconsciously : according to an experiment on brains, muscles for smiling are contracted when beautiful images were shown.
The book refers to History too. Experiments have demonstrated that we generally prefer vertical axes and asymmetrical shapes. Contrary to what we used to think beauty isn’t only built with complex ornamental shapes, but can be really sober and minimalist also : Piet Mondrian is the perfect example.
Architect Louis Sullivan said « Form follows function ». In History, many artistic movements (especially in architecture) wanted a certain lifestyle like the International style who imposes economical and functional shapes addressed to a plurality of persons. The idea was to push everyone to adopt a common lifestyle based on sharing houses thought out for the need of life in community. But can we live well without beauty ? Could we live healthily in a brutal building ?
The question of beauty automatically leads to social and ideological questions. Historically, geometrical, economical and easy shapes are more accessible to the masses. At the same time, ornemental and complex forms are expensive objects, inherent to a privileged class.
Today, reaching beauty is still complicated for a designer because we are « problem solvers » more than beauty makers. In an other sense, the reflexion leads us to what our ambition as designers is ? Would we make precious objects or design for all ?
I Think that it would be easier to think that the graphic design world is only black or white. Accessible and yet beautiful and valuable design does exist.
With Beauty, The two designers propose a very inspiring reading experience, an open research with a lot of references, where the reader must open his eyes, question himself and, at the same time, think about beauty.
The publication of Beauty gave way to an exhibition on year latter. The place reuse the content of the book to investigate why people feel attracted to beauty, how deal they with it in daily life ? what positive effects can beauty have ?
Julia Ducretet, 05/01/2023.
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Robert Slimbach, typographe de génie ?
Cher lecteur, cher lectrice, il y a quelque temps déjà, j’ai remarqué que le Arno pro et le Adobe Jenson, « matchaient » plutôt bien ensemble. Et ce n’est pas simplement parce qu’elles sont deux typographies à empattements, mais bien parce qu’elles ont toutes deux le même créateur. Mais en les analysant de plus près, quelles sont les spécificités de ces typographies de labeur ? Pourquoi existent-elles ? Par qui ont-elles étaient créées? Voici les quelques interrogations qui me viennent à l’esprit.
Robert Slimbach, graphiste et créateur de caractères américain, rejoint la firme californienne Adobe en 1987. À la demande de celle-ci, il part étudier les originaux de Garamond, au Musée Plantin-Moretus, dans le but de proposer un revival numérique du caractère. En sept ans, il créera ainsi trois fontes numériques : le Adobe Garamond Pro, le Adobe Jenson et le Adobe Minion. Trois caractères pensés pour l’impression et la composition des livres, ils sont également tous des caractères à empattements commercialisés par Adobe. Mais regardons cet Adobe Jenson de plus près…
Le Adobe Jenson est le revival d’un caractère pensé par le célèbre typographe et graveur de poinçons italien du XVe siècle : Nicolas Jenson. Père du caractère typographique romain, il ébauche les premiers caractères du Jenson dans le Lactence en 1465, avant de le perfectionner et de le mettre complètement au point dans Epistola Ad Brutum de Cicéron. Ce romain à empattements épais s’inspire de la calligraphie et en garde d’ailleurs le st et ct ligaturés. Par la suite, en voulant harmoniser les bas de casses avec les capitales, il unifie sa minuscule humanistique avec le modèle des capitales romaines en utilisant les empattements des bas de casses pour les ajouter aux capitales et en homogénéisant leurs pleins et déliés.
Lorsque Robert Slimbach s’empare de ce caractère, plus que d’en proposer une version numérique, il la décline et propose toute une famille de caractères qu’il étalonne en fonction des tailles de corps.
Il crée pour le besoin une légende graduée avec des corps dessinés pour différents usages : caption (pour les notes), regular (pour le texte courant), subhead (pour les sous-titres) et display (pour les titrages). Avec ce coup de génie il réussit à faire revivre un caractère très complet, parfait pour l’impression avec un large spectre possible d’utilisation.
Il réalise un second coup de maitre avec son Minion Pro quelques années plus tard : ce sera effectivement le premier caractère Adobe à utiliser la technologie du multiple master, l’ancêtre des fonts variables offrant une possibilité de décliner les graisses et la chasse d’un caractère. Inspiré d’un caractère de la renaissance, le Minion Pro est maintenant devenu la typographie par défaut du logiciel Indesign. Mais Robert Slimbach n’est-il doué que pour les revivals de la Renaissance ?
Le Arno Pro, inspiré lui aussi des premiers caractères humanistes des XVe et XVIe siècles, est tout de même résolument contemporain, autant dans son apparence que dans sa fonction. Slimbach suit la tradition des premières polices de caractères vénitiennes et aldines et réunit plusieurs des idéaux explorés dans ses précédents caractères tels que le Minion et le Brioso.
En tant que famille OpenType polyvalente, avec le complément de glyphes latins le plus complet jamais proposé par Adobe, Arno offre une prise en charge étendue des langues pan-européennes, y compris le cyrillique et le grec polytonique. La famille offre également des subtilités typographiques telles que cinq gammes de tailles optiques, de vastes ensembles italiques ornés et de petites majuscules pour toutes les langues couvertes.
Qu’en est-il de son dessin ? Le Arno Pro prend certaines de ses inspirations dans le Jenson. Si, à première vue, leurs proportions semblent équitables avec des ascendantes et descendantes assez similaires et une hauteur d’x plutôt équivalente également, regardés en détails, ce sont deux caractères à empattements très différents. Le dessin du second est bien plus contemporain : son axe oblique est davantage vertical, les panses du e et du a sont plus importantes (s’apparentant davantage au Minion), ce qui en fait des bas de casse moins rigides que le Jenson qui a un tracé plus carré. La Arno délaisse les fûts en biseau et les empattements propres au tracé à la plume carrée au profit d’un dessin plus souple et des capitales légèrement inférieures à celles du Jenson. Concernant leur italique, les deux caractères se rejoignent, ils ne sont pas aussi penchés que des caractères plus contemporains et on peut clairement voir la différence des tracés utilisés ; assez abrupt du Jenson.
En réalité, avec cette fonte, Robert Slimbach à l’ambition de créer un caractère encore plus lisible pour les livres. Le designer et calligraphe Paul Shaw suggère que sa création représente une approche plus "vivante" du Minion. Finalement, c’est une vraie réussite pour Robert Slimbach qui réalise en l’Arno Pro un caractère de génie : une famille multi-graisses, multi-styles, multi-optiques et multilingues contemporaine, bien qu’inspirée de la tradition vénitienne classique.
Julia Ducretet, le 22/01/23.
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Everyone should be feminist
Dear reader, this five past years, I approached the feminism question by different angles. Friends, first, awaked my curiosity to this theme, lent me some books. I discovered the radically texts of Monique Wittig, listen podcasts on Virginie Despentes, read a graphic novel of Strömquist and the notable book of Pauline Harmange « Moi, les hommes je les déteste ». But, it’s however recently that I bought a last writing of Divergences Publishing (my last English blogpost was about the employed graphic design of thispublishing house), named « Tout le monde peut être féministe » by Bell Hooks. This book, who was my Christmas break reading, became such a discovery !
Contrary to the last books I’ve been read, Bell Hooks bring a smart and more inclusive definition of feminism who is no longer a reductive struggle to woman against man but « a movement whose aim to ending sexism. » This significant proposal means that women too can spread sexism too. The author defend the need of a real feminist education, for all the women but also the need to product books to talk to man.
What a change ! When, the majority of feminism essays of the XXIth century are so negatives, claiming misandry and settling for spread anger against patriarchy. In front of that horizon Bell Hooks do advised observations on major questions of the movement to brings open alternatives in order to improve the movement in the wise way.
She is supportive to an active and militant feminism, a real education and the newsworthy propagation of feminist thoughts. Besides she argues that the feminism is originally link to the class and racist struggle. We cannot involved situations to the equality between men and women without taking in consideration women of color. If the 20th century encouraged emancipation of white women, is not the case for the majority of colored people, still reduced by profiteers of patriarchy (by withe women today too). Bell Hooks develops an essay with severals inputs giving keys to improve relations in an egalitarian and respectful way.
Dear reader, in that moment, you should think that this book theory seems indigestible in fact of the complexity and relativity of the author approach. But you’re wrong. The books of Bell Hooks is chaptering in nineteen parts who treats one to one big questions of the feminist struggle : mariage, reproduction, sexual liberty, feminism education etc… Each chapter, very briefly begin by summarize the history (the social and political context of the notion approached) before to do emerge the paradoxe situation of the theme and bring us to think about viable solutions. Writing and thoughts of the author are very clear ; she says the essential of each notion in tree to five pages.
In the introduction, Bell Hooks reveal the ambition of this writing. She want a book accessible to everyone (men and women), assembling bases of the feminist theory. Besides, her last chapter, « a visionary feminism » gave a possible answer to the question of the prolongation of the feminist movement in the future. So what better way to publish a critical and fundamental essay on feminism that the Divergences editions ?
I’ve not only appreciate read this book, it make me feel great too : because it’s a constructive and an inclusive writing where the diversity of situations is represented. And I think that anyone could be identify himself on this positive essay, it’s why I recommend it to you.
Julia Ducretet, 08/01/23.
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Donner à lire Michel Bierut
Michel Bierut, Direct, accessible et futé. Voilà l’ouvrage sur lequel m’a été confiée la dure tâche de faire un compte rendu. Édité par Bureau Brut Publishing et Stéphane Darricau en 2021, sa petite taille, son accessibilité et son design graphique en font un ouvrage plus que vendeur. Quoi de mieux pour faire connaître l’une des figures les plus influentes du graphisme contemporain aux États-Unis qui reste pourtant peu connu en France ?
Cet ouvrage a donc pour ambition de porter à la connaissance des praticiens et des étudiants en design graphique une sélection de douze écrits de Michel Bierut sur la discipline. Ces textes originellement publiés en anglais sur son blog Design Observer sont ici traduit ici en français. Ces douze cours essais sont précédés d’une préface de Stéphane Darricau dans laquelle est explicité l’intérêt de cette publication. Il offre une vision géniale du personnage : Michel Beirut est un designer amoureux de son métier, possédant une curiosité à 360° avec beaucoup d’auto-dérision. Ce dernier a une carrière brillante mais limpide quand ses productions sont sans bavures mais ordinaires. Ses écrits sont simples, drôles et francs et constitue une lecture « primordiale ». Mais Michel Bierut, Direct, accessible et futé, doit-il être considéré comme une lecture de référence du design graphique ?
Si la profession de designer graphique est relativement récente ainsi qu’en constante évolution, les textes et écrits théoriques qui y font explicitement référence — je ne parle pas ici d’ouvrages sur l’art — sont encore peu nombreux. C’est parmi ses ouvrages que la récente publication de Bureau Brut Publishing s’inscrit. Les douze articles présentés dans ce livre ont fait l’objet d’un sélection particulière, établie selon trois critères : ils devaient explicitement traiter du design graphique, donner un point de vue sur la discipline qui puisse être transposé en France dans le but d’être le moteur d’une réflection. Procédé primordial afin de rendre digeste le livre et dont on remercie les protagonistes pour avoir fait la plus intéressante des sélections possible.
Mais le pari reste pour moi partiellement réussi. Les lectures sont certes intéressantes, abordant des notions globales du métier de graphiste — telle que le plagiat ou la contrefaçon graphique, la passion du métier, ou encore la relation au client. Néanmoins, si certain de ses écrits peuvent amorcer cette réflection tant souhaitée sur la discipline, ce n’est pas le cas de la majorité d’entre eux : qui se contentent d’apporter une réponse attendue, arrêtée ou encore anecdotique.
Ce qui m’a le plus questionné sur ce livre, ce n’est pas tant son contenu, si mais plutôt la façon dont il m’a été présenté : une « lecture indispensable », prioritaire de la discipline. Pourtant la notion de « classique » littéraire reste très relative, consiste en un jugement moral de l’oeuvre subjectif, représentative d’un contexte donné. Mais sous prétexte de l’autorité de la figure de Michel Bierut au sein du design graphique ses textes doivent-ils tout autant faire autorité ?
Je dois l’admettre, si ces articles peuvent retenir notre attention c’est, selon moi, grâce à la curiosité dont l’auteur (M. Bierut) fait preuve, en citant / s’inspirant / côtoyant des grands noms du design quotidiennement. Cette richesse se reflète d’ailleurs sur sur ses productions de design graphique. Mais dans ce cas, pourquoi proposer un tel découpage de l’ouvrage ? En admettant que cette publication peut faire référence à la figure alors pourquoi ne pas faire dialoguer articles, productions et biographies plutôt que de les placer à la suite ? Cela permettrait également d’annoter d’avantage sa production (d’écrits et graphiques), au lieu de proposer des notes trop courtes, trop souvent.
Je conclurais en relativisant le point de vue très critique auquel je me suis employé au long de mon écriture. Cet ouvrage, s’il n’est pas « l’ouvrage de référence » tant espéré, provient également de l’optimisme débordant dont Stéphane Darricau à fait preuve dans sa préface. On peut néanmoins saluer cette volonté de démocratisation, d’accessibilité au texte offert par sa traduction en français. Il est clair que traduire et rendre accessible, tout comme enrichir notre discipline avec de nouveau écrits, reste un enjeu majeur. Peut-être que Paula Scher —collègue de M.Bierut chez Pentagram — aurait eu des choses tout aussi intéressantes à dire finalement…
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Catch the reader's eye
When the editorial design become the identity of a publishing house.
Dear reader, early in November, was open the Offprint fair, an event which gathered independent publishers around the theme of visual art, design and culture. During the same week-end, a second fair also began around those themes too, entitled Accident Book Fair, where there was a tremendous amount of exhibitors. The visitors found themselves in front of so many identities and books covers, each one more attractive and creative than the previous. Amidst visual abundance, how can a publisher differentiate himself thanks to his covers ? That question leads to an even bigger interrogation in the editorial design world : while the book trade is expanding more and more, what are the tools to attract readers ?
To this question, I discovered a viable answer : the case of Divergences publishing house. This exhibitor had directly attract my attention, in big part, thanks to the colored harmony of his covers… The Divergences is a young publishing house, created in 2016 by Johan Badour. The house has developed an editorial line to give the tools to understand and rebuild the world which we live in, through social and political criticism books. Moreover, with a strong editorial line, Divergences could only choose a powerful book design !
So what about the design ? The publishing house is immediately recognizable in the use of a uniform design cover. The books require a strong visual identity based on an editorial grid and two distinct typefaces. One is the Univers, the well known sans serif typeface designed by Adrian Frutiger for the Deberny & Peignot foundry in 1957. Here, the font used to write the author name. The second typeface is the Concorde, designed in 1990 by Günter Gerhard Lange for the Berthold Foundry, employed for all the over informations of the cover (like the headline, the subheading, the publisher name and also the summary). The two typefaces — used in capital letters for the headline and the author — suggest opposites shapes. The Concorde with its sharp serifs contrast with the round outline of the Univers sans serif.
Concerning the layout of the cover, is used as a minimal design and only this two typefaces on a grid with apparent threads. The modular grid offers a variety of achievable designs while being binding. That grid could change depending on the density of information and space needed on the cover.
Lastly, the summary is an integral part of the cover, which is unusual and enables the reader to immerse himself inside the written text. What distinguishes this collection from other books is also the use of a flattened bright color, each assigned to one book, contrasting with the darker typeface.
The radically of editorial choices makes these books really noticeable. Besides, the modular system offered by the grid puts forward the typesetting of the inside book model — and not only an editorial design of covers — until it forms the entire communication of the publishing house : the website page and goodies used to that design… The idea of unifying designs allows a publisher to be more recognizable. Finally, it appears that the boundary between editorial design and brand identity is not so established…
Julia Ducretet, 04/12/22.
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Ne pas sous-estimer la couleur
Cher lecteur·rice·s, je suis certaine que vous n’avez pu louper les nouvelles affiches du Théâtre de l’Odéon, accrochées récemment à Nation, tant leur beauté et leur justesse est tape à l’œil ! Imaginées par l’Atelier ter Bekke & Behage, elles ne sont pourtant pas si novatrices dans leur genre. Si le studio s’est depuis longtemps imposé par ses communications hautes en couleurs — notamment avec ses placards bien connus pour le Théâtre de la Colline — elles gardent une identité simplement déclinée au fil des années. Mais parmi la masse visuelle qui habite le métro, comment expliquer que ces affiches se distinguent singulièrement ?
C’est en 2018 que l’Atelier commence à travailler avec le Théâtre l’Odéon, proposant alors des affiches sur fond blanc, employant une linéale (la Basic Commercial Std) dans deux graisses et deux couleurs — l’une à l’usage du lieu, l’autre du spectacle. Un procédé simple, certes, mais qui prend tout son sens dans sa composition : l’affiche est pensée en analogie avec l’architecture du bâtiment ! Les informations sur la pièce sont ainsi organisées sur une grille qui rappelle les colonnes architecturales. Un clin d’œil réfléchi dans lequel apparaît occasionnellement une image (placée à bord perdu) coupant avec la structure précédemment mise en place. Des couleurs souvent complémentaires cohabitent sur un grand format, mais jusque là, plus d’espace est accordé au blanc tournant laissé par la grille qu’à la couleur.
C’est avec les affiches de la saison 2022-2023 que l’Atelier saisit l’opportunité de placer la couleur au centre de l’attention. Ces nouvelles affiches font état d’un parti-pris encore sobre, employant toujours la même linéale noire dans deux graisses sur un fond blanc. Le texte est composé centré sous l’encart de l’identité du théâtre conçue avec la même linéale. Ajouté à cela, des formes colorées se superposent au texte, dans toute la hauteur de l’affiche. Celles-ci apportent un nouveau regard, qui se veut, non plus un clin d’oeil à l’architecture mais plutôt une interprétation sensible de la pièce promue. Mais quel changement : chaque affiche employant deux à trois tons directs sont immédiatement visibles ! Et l’objectif est atteint : les usagers s’arrêtent pour lire les informations sur l'affiche vibrante qui marque les esprits. Stratégie pertinente, j’y ai vu là l’aveu d'une volonté de réutiliser une création que le studio avait déjà mise en place auparavant…
En effet, l’Atelier a beaucoup marqué les esprits avec sa communication pour le Théâtre de la Colline. Créant un système typographique et identitaire fort à partir d’un caractère redessiné des années 1920, il propose une communication très formelle. Les affiches créées pour l’occasion mettent à l’honneur l’usage de tons directs complémentaires, employés dans le caractère et dans l’usage de formes. Le système s’enrichit et s’ancre au fil des communications entre 2009 et 2016 et le ton direct apparaît peu à peu comme une aubaine pour se distinguer de la communication publicitaire.
Cependant si ces affiches sont si fonctionnelles, leur attrait visuel n’est pas uniquement dû à l’usage de la couleur. Malgré la sobriété qu’elles renvoient, mettre en place une colorimétrie équilibrée n’est pas si simple… C’est certainement dans ce dialogue avec le fond de l’affiche laissé blanc — prenant une place prépondérante — que le ton direct trouve toute sa force d’expression. Ces codes graphiques sont aujourd’hui une marque presque identitaire — qu’ils soient volontaires ou pas — du studio.
La mise en perspective de ces deux projets posent diverses questions. D’une part, quelle est la place laissée au « recyclage » d’idées dans le métier de graphiste ? À quel point peut-on s’auto-copier où s’auto-citer en réutilisant les codes presque identitaires de nos productions ? D’autre part, elle questionne également la place laissée à la couleur et à son impression. Souvent pensées par les graphistes aux derniers moments de la création, leurs places dans la communication peuvent pourtant se révéler primordiales…
Julia Ducretet, le 27/11/22.
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Listen to the world
Another way to stay informed
Dear reader, it appears that being informed, in the society we live in, is an obvious thing. But faced with the diversity of content, created daily, how do we choose our sources of information ? Another thing I’ve noticed : if the majority of French people watch television or listen to the radio, this is not the case for the younger generation…
We — students — have such a different way to staying updated : we use social media. However, social media were never thought of as a receptacle for a variety of topics, nor as an archive. Instagram — to name but one — due of its algorithm is incapable of giving the user a satisfying feed with current events.
Thus, I’ve decided, to tell you about the way I stay informed. A few weeks ago, I discovered a podcast on topical issues titled « L’heure du monde » [ the World Time ]. It’s a daily podcast broadcast on Spotify and produced by the newspaper Le Monde. Each program offers an answer about news like :« Why the world football cup 2022 in Qatar is a problem ». Or « What are the TV series we have to see in November ? ». The large diversity of topics is very precious. The podcast treats one by one political, cultural, controversial, economic and sport subjects, which makes it a program addressed to everyone.
The newscaster calls in a specialist for each topic : most of the time a journalist or a reporter. So, all along the episode, the two or three contributors build a reflection exposing us facts and presuppositions about different matters. The clear intention is to popularize information and very frequently, speakers conclude with an open answer which allows the listener to build his own opinion.
The podcast provides only one topic per day, and so, editors-in-chief have to make choices between all the current events. Moreover, each program gives us keys to refine the topic which is covered. It pushes the debate far away from preconceived ideas. I frequently went on the internet at the end of my listening to look for complementary information about the subject — most of the time, a more precise timeline of the issue or a different opinion — which can only be valuable.
Another thing that I think is clever is the episode length. Between 15 and 25 minutes, just the perfect time to listen to them on our daily trip (on the way to work, school or home). I personally really appreciate to begin my day with fresh news ! And more than that, it’s also pleasant, for once, not to have to read news — because we spend our days at a screen anytime every day — and to just listen to topical issues.
To conclude, I highly recommend « L’heure du monde », to you, dear reader, with the hope, you’ll not become addicted to it…
Par Julia Ducretet, le 20/11/22.
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Photographier l'intime
L’intime est un sujet que j’ai plusieurs fois vue s’afficher dans la photographie. Or s’il peut se définir comme : « l’essence, le sens profond de quelqu’un ou de quelque chose […] resté caché, secret. » (selon le Larousse), peut-on le photographier ? Car la pratique photographique, si elle est destinée à être montrée, rendue publique, signe la mort de l’intime. Vous admettrez ici, – je crois – cher lecteur, que persiste une paradoxe entre une pratique à priori documentaire, destiné à rendre universel ou à enseigner, qu’est la photographie et la thématique de l’intime.
Lorsque l’on parle d’intimité, on pense assez rapidement à des scènes de nudité, amoureuses et/ou sexuelles : telles qu’elles pouvaient être exposées dans Love Songs — exposition tenue à la MEP entre mars et août 2022. Je me rappelle avoir particulièrement apprécié les tirages argentiques volatiles réalisés par René Groebli datant des années 1950, malgré une représentation très clichée de l’amour. Lin Zhipeng proposait quant à lui des images plus suggestives… Photographier et afficher une intimité sexuelle longtemps cachée, longtemps tabou, est le meilleur moyen de revendiquer leur existence.
Mais l’intime passe-t-il toujours par le portrait ? Par l’apparition d’une figure humaine ? Me rendant cet été aux Rencontres Internationales de la photographie — festival annuel ayant lieu à Arles — je me suis laissée surprendre par la façon dont Barbara Iweins partage son intimité.
Artiste Belge, c’est en 2017 qu’elle débute Katalog : un projet photographique visant à répertorier tous les objets de sa maison. Elle prend ainsi en photo chaque objet de sa maison sur un fond blanc à raison de quinze heures par semaines durant près de cinq ans. S’en suit une classification par type, couleur, matière et fréquence d’usage de chaque sujet.
À la fin de la sélection, Barbara Iwiens nous propose un livre, tel un catalogue découvrant une intimité matérialiste, chapitré en fonction des pièces de sa maison. À cela s’ajoute beaucoup d’auto-dérision. Difficile de ne pas craquer lorsque l’on a passé cinq ans de sa vie à photographier rétrospectivement les 12 795 objets que l’on possédait chez soi : l’humour revêt un sens salvateur, explicite l’artiste. Par le bais d’une mise en page laissant place à la photographie, elle met en avant sa classification enrichie d’histoires et de remarques relatives à la vie de ses objets.
Katalog est aussi fascinant qu’effrayant : s’il témoigne de la folle contrainte du travail de l’artiste, il nous positionne en tant que voyeur délibéré. Ne sommes-nous pas toujours très intrigués par les possessions des autres ?
Barbara Iweins nous livre une certaine intimité de son quotidien. En publiant son processus de travail, si elle rend public son intimité et se dévoile, elle réussit le double jeu de garder une part de mystère, choisissant de ne raconter que peu de ses photographies.
Les objets choisis (parfois aussi banals que la collection de casseroles qui habite nos cuisines) en font un projet assez universel, auquel tout-un-chacun est capable de s’identifier. Contrairement à de nombreuses narrations et photographies présentes dans Love Songs, c’est ici grâce à un procédé photographique extrêmement sobre et économique que l’artiste réussit son pari.
Katalog est un joli dialogue entre l’identité intime de Barbara Iwiens et un processus photographique qui en fait une classification universelle.
Julia Ducretet, le 13/11/22.
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Pyramyd summer reading
Are the DO books collection solid essays ?
Dear reader, I would like talk to you about two books I bought in June. While I was in Paris for a few days, I go into a library with the idea to find easy readings to remind me graphic design during the summer. The two books I bought are from the Pyramyd Do Books collection. The titles are Why beauty and design are the keys to success by Alan Moore and, Why the unexpected develops creativity by Robert Poynton.
These accessible essays have the ambition to help arty people daily. The titles, written as opening questions invite authors to expose and argue their own reflections. Pyramyd publishing promotes books addressed to creative people in general (artists, designers, scenographers…), thus they are well known by graphic designers. But, don’t make any mistake : these essays are not written by designers or authors but by businessmans, scenarists, artists.
It might be good in a way ; it permits us to have an open-minded vision of art. So don’t be surprised if you were expecting an academic essay written by a graphic designer to a graphic designer.
In fact, the first one I read was Allan Moore’s one. The author treats his subject with a complex chaptering. The notions he evokes « beauty, art, style and process… » are flickle concepts he illustrates by multiple concrete examples. Perhaps what is lacking is a more detailed link between examples he gives and notions he wants illustrate with. However, the author proposes useful methods to improve our creativity : how can we bring beauty in our daily life or several ways to improve our creative process… Without to forgetting that the answers given by authors depend of their own point of view and their subjective analysis.
The subjectivity wrote fades in the second publication. In fact, to me, Robert Poynton seems more accustomed with writing essays. He had already written several books including one for Pyramyd publishing (contrary to Alan Moore). For Why the unexpected develops creativity, heintroduces his statements with a paradox. He proves that if we’re afraid by unexpected and improvisation, we have to practice them daily to improve our communication and our creativity.
Instead of giving us a direct answer—like Alan Moore—, he leads us slowly with personal examples and illustrations, to his conclusion. The book chaptering is really well thought : he adds games at the end of each chapter to helping us to develop our proper way to improvisation. Robert Poyton is a good enough writer to build a book which I enjoyed reading.
To conclude, I think that the seriousness of the writing could be more considered before his publishing. The reader ask itself why should he have to listen to the advises of a script-writer regarding business leadership ? (I wasn’t convinced by his personal experience.) Today, a lot of inexperienced people are invited to write books, it’s more and more important to be cautious with the books we buy.
Julia Ducretet, 16/10/22.
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Sans [aucun] filtre
La satire vomitive de Ruben Östlund
/ Spoiler alert /
Cher·e·s lecteur·rices, nous sommes le dimanche 9 octobre. Les heures défilent mais je reste saisie / scotchée / presque tétanisée du film que j’ai vue hier soir. Le dernier film de Ruben Östlund : Sans Filtre, à décidément eu une influence néfaste sur mon sommeil. Si bien que je me sens aujourd’hui obligée de vous écrire à son sujet...
Ce film raconte l’histoire de Carl et Yaya, deux mannequins influenceurs invités sur un yacht pour une croisière de luxe. Mais alors que le personnel est au petit soin avec les vacanciers le scénario tourne à la catastrophe…
Il faut sans doute vous préciser, que je pars à cette séance de ciné, sans avoir ni vu The Square — film primé aux Oscars 2017 du même réalisateur — ni même sans avoir visionné la bande annonce de la projection qui allait suivre. Grossière erreur car vous n’imaginez pas ma stupeur, lorsque Östlund, durant presque 2h de film, enchaîne les scènes malaisantes dépeignant l'humain dans sa forme la plus grotesque.
Découpé en trois volets, ce film introduit crescendo, les thématiques de l’argent, du pouvoir et de la lutte des classes, jusqu’à frôler la misanthropie.
Sans Filtre démarre avec une scène rendue intime par des plans serrés, où Yaya et Carl se retrouvent au restaurant. Ce dernier tente maladroitement de questionner sa copine sur son rapport à l’argent qui s’énerve et fait une esclandre. Très vite, le réalisateur dresse le portrait moderne de deux jeunes adultes empreint de contradictions, tentant de redéfinir leur rôle au sein de la relation.
Si la thématique de l’argent est introduite dès les premières minutes du film, il est d’autant plus présent dans la seconde partie. L’on retrouve notre jeune couple invité sur une croisière de luxe. Östlund s’amuse, nous dépeignant des scènes satiriques où la folie des riches n’a aucune limite. La femme d’un oligarque russe ordonne à tout l’équipage un bain forcé contrecarrant toute l’organisation du diner. Absurdes et insensées, les conversations vides de sens s’enchaînent jusqu’au drame. Si la fortune régit les rapports de force durant la croisière entre un équipage s’écrasant pour répondre aux moindres besoins des vacanciers : ce rapport de force est soudain mis à mal lorsqu’une tempête surgit. En plein repas, les invités vomissent tour à tour leurs assiettes, se vautrant dans les escaliers et s’enfermant dans leurs cabinets. Le réalisateur malmène ces bourgeois, poussant le vice avec des scènes intimes, nauséeuses. Le rapport de force s’inverse violemment, les fortunés sont montrés très impuissants, provoquant les rires nerveux des spectateurs autour de moi.
Mais alors que le réalisateur aurait pu se contenter de nous proposer une fin moralisatrice, il pousse le vice en nous plongeant dans un troisième volet. Très long, le film prend une tournure grotesque lorsque : échouée sur une île, après s’être fait attaquer par des pirates, une petite partie des passagers (vacanciers et équipage confondus) se retrouvent lâchée dans la nature. Les rapports de force se polarisent lorsque Abigaïl (ex-responsable de la propreté des sanitaires) est la seule à pouvoir subvenir aux besoins du groupe. Elle impose son matriarcat sur l’île. Le scénario bascule dans un faux-semblant de Koh-Lanta où le réalisateur ne manque pas de nous dépeindre toute la cupidité et la bêtise humaine prête à tout pour survivre et conserver son pouvoir.
Finalement, ce film est une critique vomitive du genre humain. Grâce à un procédé de surdose le réalisateur nous propose un film long et lourd à digérer. À la place de nous faire passer un message, il nous laisse seul face à la satire et à notre propre moralité : quelle cruauté ! Et si nous ressortons de la salle assez dégoûtés de ce portrait humain du XIXème siècle, paradoxalement, les scènes sont si crues et denses qu’elles nous laissent plutôt hermétiques au sujet.
S’il est certain que Sans Filtre colle des frissons et divise, qu’il aie remporté la palme d’or aux Oscars 2022 en dit long…
Julia Ducretet, le 09/10/22
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Fate
What happens when Netflix adapts an animated series of the 2000s ?
Dear reader, you can’t imagine how disappointed I am today. Why? Because I just saw the season two of The Winx, a series produced by Netflix.
The original Winx Club is an Italian animated series, broadcasted by the French television in the 2000s. Iginio Straffi imagined the animation from Rainbow studio, who presents six fairies learning how to use their enchanting powers. During the eight seasons, they grow up in Alféa, a Magical school, and fight different monsters, witches and fantastic creatures to save their kingdoms. If the series had experienced a big success, it’s probably thanks to the quality of the animation, and the dreamlike glittering outfits. It’s also one of the first series produced in Europe with female fighting heroines.
In 2021, Netflix released the first season of Fate: The Winx Saga. The new series deviated from the original on one significant point : it’s a free live action adaptation of Winx club, though in co-production with Rainbow studio.(Obviously I went through it in two days.)
The adaptation of the Winx universe to our time is particularly well thought : the actors provide us narrative information using new technologies like FaceTimes and e-mail messages. The casting, even if it doesn’t refer to the casting of the original animated series is more inclusive in terms of bodysizes and it’s more unexpected.
The « model size » characters and the heteronormative relationships of the Winx Club, give way to gay couples and free relationships in the Netflix adaptation : what a change !
The story is also entirely remixed, although widely inspired by the original series. Bloom, the main character played by Abigail Cowen, poursuits her true origins. She is a young, complex woman who is also sensitive and touching. Thus, the first season has ingenious choices in terms of screenwriting which gives us the real desire to see the next ones…
Friday, September 15th 2022, here we are : the second season is released on Netflix ! (My eagerness pushed me to watch the first season four times before that…)
The second season gives more space to other characters as with the development of new relationships for Aisha and Terra or with Flora’s arrival however, Bloom is still the main character. Yet, her character is neglected and sloppy : she appears on screen made-up and acting differently. The character doesn’t evolve during the season : she is more superficial, and all her choices and reactions are similar to those first season. I was expecting more from the main character of Fate.
On top of that, even if the scenario tries to be a little bit more innovative with the apparition of the wizards, it goes too far with Terra’s coming out. Instead of being a subtle adaptation of Winx Club, the season 2 of Fate, borders on bad taste and cliche. As we could have imagined, Netflix tries to make the Fate series a hit with in 10 seasons : a definitely bad idea !
Dear reader, if my article has discouraged you to watch this series, I still encourage you, at least, to see the first season, which is really cool !
Julia Ducretet, 02/10/22.
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L’Iliade 2.022
S’introduire dans l’œuvre d’Homère.
Mercredi 21 Septembre, 19h30. Nous nous retrouvons devant le Théâtre Public de Montreuil, pour assister à une représentation de L’Iliade. Chef d’œuvre antique, il raconte un épisode spécifique de la guerre de Troie : la colère d’Achille.
Le siège de Troie par les Grecs dure depuis neuf ans maintenant. Agamemnon, roi grec, par un enchaînement de circonstances enlève la captive d’Achille : Briséis. Cette manoeuvre provoque la colère de ce dernier —amoureux— qui se retire de la bataille. Les Grecs, privés de leur meilleur guerrier, peinent face aux Troyens conduits par Hector…
Si l’Iliade ne manque pas de décors fabuleux et encore moins de personnages, je suis curieuse de voir comment Pauline Bayle, la metteuse en scène, a pu imaginer une pièce digeste de seulement 1h25.
Alors que nous attendons devant l’entrée du théâtre, une dispute éclate au milieu de la foule. Tous les visages se tournent vers l’homme en civil qui vient d’hausser le ton. Quelle surprise de rencontrer Agamemnon, là, à deux spectateurs de moi, en train de disputer Achille. Sous nos yeux ébahis, la place Jean Jaurès laisse place à la guerre de Troie. Puis, Ulysse, se frayant un passage dans la foule, nous attribue bateaux, noms et cités et nous propose de le suivre à l’intérieur.
Une fois installés, nous découvrons une scénographie d’une extrême sobriété. Sur le mur du fond sont suspendues deux pancartes en carton répertoriant les noms des Grecs d’un côté, ceux des Troyens de l’autre. Cinq chaises en plastique en arrière-scène ainsi qu’un long tissu blanc en devant de scène, sont bordés de seaux et occupent le reste de l’espace. C’est parmi ces maigres décors que viennent jouer les cinq comédiens de la compagnie À Tire d’Aile. En civil, habillés d’un tee-shirt et d’un pantalon de travail noir, ils prennent plusieurs rôles. Viktoria Kozlova jouera tour à tour Poséidon, Ajax le grand et Priam, le roi des Troyens. Pourtant, cette simplicité des décors et costumes contribuent très rapidement à mon immersion la plus totale dans le récit…
Si la mise en scène est d’une sobriété extrême, elle n’en est pas moins symbolique. Mathilde Méry, dans le rôle d’Achille, lors de la quatrième nuit, se couvre la peau de paillettes afin de revêtir « ses armes ». Le revêtement d’un costume, normalement caché, confère une dimension secrète à la scène. De même, les funérailles de Patrocle sont représentées par du feu sur scène. La régie coupe la lumière et les comédiens ne sont plus qu’éclairés par le feu qui brûle dans un sceau à leurs pieds. L’éclairage tamisé produit alors un effet de compassion et d’intimité intense avec les comédiens.
Plus encore, l’interprétation plus contemporaine du texte, nous immerge dans la pièce antique. Poséidon rape une de ses tirades, les scènes de guerre sont énumérées rapidement avec froideur contrastant avec d’autres, majeures, jouées de façon plus touchantes. Quand aux dieux de l’Olympe, ils sont interprétés avec beaucoup d’humour et d’extravagance provoquant les rires du public. Et si chaque comédien détient plusieurs rôles, Pauline Bayle met à bas les l’attribution genrée des rôles au théâtre en faisant interpréter la plupart des rôles féminins à des acteurs hommes et vice versa.
Finalement, la sobriété de la mise en scène laisse davantage d’espace au jeu d’acteur. Avec des accessoires-symboles justement trouvés, la pièce —contemporaine— côtoie l’humour. Cette place faite au jeu d’acteur contribue à humaniser les personnages là où une surdose de costumes et de décors aurait probablement conduit à un décalage entre la pièce et son public.
En bref, je ressors parfaitement conquise de cette représentation, me demandant quand se joue l’Odyssée, deuxième chapitre du dyptique d’Homère. Affaire à suivre…
Julia Ducretet, le 25/09/22
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THE POETIC FIGURE OF DOAN LY
Contemporary still life gender’s
Sunday, September 18th, 15 past 6. Dear reader, you ignore my impatient to reach sunday. Not to reach sunday but to talk to you about Doan Ly. Floral Designer and photographer, I discovered her between the few 335 other artists of the Fisheye Photo review 2021 by Fisheye Magazine. Trapped between the page 110 and 112 of the annual magazine, she caught my eye. And for a reason : how a still life could be seems so aerial and irealistic ?
Based in New York, Doan Ly pass the half of her time to imagine florals compositions for mariage and half of his time for shooting and television. Known for her Vogue and Rotari commission's, her artist signature be composed in a same way : a sweet and almost realistic gesture of light who draw a new face of her flowers. The still life, a big gender classic of painting is habitually treated full of allegoric figure. We all thinking of Vanity, the oil on canvas of the painter The Champiains who represent three objects on a table ; a human skull between a flower (to left) and a hourglass (to right). This painting symbolise the vacuity of human existence.
Instead, still life of Doan Ly brings a part of contemporary on the gender. The plants, highlight down to the smallest detail, glorify the ephemera figure of vegetal. Doan Ly propose us dreamlike visual who let a big place to thought floral composition, balanced by sleek visuals. The diffused light she use, contribute to a refined and a brighter colored atmosphere. For her brand commissions, she brings together hight fashioned product, textiles and poor materials —like plastic— with her flowers. In a curious way, her photographies keeps always the same part of poetic.
As you could understand, dear reader, I’m in loved with the pictural world of Doan Ly. I encourage you, to view her portfolio before to sleep, with an album of the pianist Sofiane Pamart in the ears : perfect medicine to sweet dreams.
Julia Ducretet, 18/09/22
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MAD — Multiple Arts Days
Déambulation au Salon de l'édition d'art contemporain
Vendredi 9 septembre, 14h40, nous avons rendez-vous à la Fondation Fiminco dans le but de visiter le Salon MAD. Drôle d’acronyme : une déclaration d’amour au Musée des Arts Déco, ou bien un clin d’œil à l’œuvre de George Miller ? J’ai à peine ouvert le communiqué de presse donné par la professeure et suis d’humeur à me laisser surprendre.
Tandis que nous approchons du lieu, un scotch blanc revêt un espace en travaux, faisant office de signalétique. J’y découvre —plutôt déçue— l’intitulé véritable du salon : « Multiple Arts Days », cela s’annonce très sérieux.
À l’intérieur du grand bâtiment vitré, on nous présente brièvement le festival dont c’est déjà la 7ème édition. Salon des pratiques éditoriales contemporaines, il expose le travail d’une centaine d’éditeurs, galeristes et artistes internationaux durant le temps d’un week-end. Le festival, présentant des éditeurs d’art contemporain, se positionne en faveur d’un art multiple et reproductible. Je suis déjà conquise par cette première introduction : une belle diversité à travers laquelle papillonner.
L’évènement s’ouvre sur un couloir présentant les livres sélectionnés pour le prix Révélation du Livre d’Artiste. Je feuillette rapidement quelques ouvrages et me hâte vers la salle suivante, poussée par l’envie de découvrir les exposants.
Mes pas m’emmènent vers une première petite salle. Des objets de différentes tailles, textures, couleurs se succèdent, y foisonnent. Je feuillette, tente de discuter avec les artistes : en vain. Mon esprit vagabonde sur cette cinquantaine d’objets graphiques sans parvenir à m’attacher à aucun d’eux.
Déboussolée, je m’enfuie vers l’espace suivant et découvre déjà une salle plus grande. Mon regard passe de travaux en travaux, lentement. J’écoute les bribes de conversations, remercie, déambule. Soudain, sur le coin d’une table, un titre me happe : Dénude moi nom de dieu. Le sourire me monte aux lèvres. Exposé sur le stand, je rencontre le travail de Jean Claude Mattrat, à travers ICONOMOTEUR, et ses collections sérigraphiées.
Il se démarque nettement des autres par son homogénéité. Les éditions monochromes ne laissent apparaître qu’un titre. Ici, Pourtant, Aussi en blanc sur bleu pervenche forment les trois ouvrages de la collection de 2017. À l’intérieur : aucun mot et de la place pour la couleur. Son travail se constitue d’aplats sérigraphiés. Des formes simples viennent s’entrecroiser et se superposer.
L’artiste explique que les mots sont une tare, qu’il travaille très lentement pour ne pas les laisser investir son travail. En ce qui concerne les anagrammes titrant ses plus petits formats, c’est en changeant de point de vue que lui viennent les jeux de mots. Échange enrichissant, je repars souriante et motivée bien que légèrement culpabilisée de ne rien lui acheter.
Je continue mon vagabondage, conduis des discussions avec plusieurs éditeurs, n’hésite pas à interpeler, questionner. La salle du bas découvre un second étage au terme de l’escalier au fond du bâtiment.
Ce dernier espace à des airs religieux : bâti industriel bordé d’immenses fenêtres carrelées. J’aimerais m’éterniser ici mais, déjà, il est temps de clôturer la visite. Je ressors de ce salon la tête pleine de belles images. Nourrie et satisfaite bien qu’épuisée par tant de foisonnement visuel.
Julia Ducretet, le 11/09/22
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