iloveyoukatrinamitchell
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i love you katrina mitchell
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iloveyoukatrinamitchell · 7 years ago
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106 // les chemins de la gloire
Avec Charles, nous avions enregistré quelques reprises, dont une version de « Rape me » mal fagotée, deux guitares folk pas vraiment accordées et des cartons en guise de batterie. J’y chantais faux, avec un ton que j’espérais tendre, dans un anglais approximatif, doublé par mes propres hurlements en fond sur le refrain. La chanson se trouvait sur une cassette que nous avions donnée à quelques connaissances, dont un label local tout juste créé. Elle a fini sur une compilation éditée à 15 exemplaires ou pas beaucoup plus. C’est avec elle que la gloire est arrivée : Camille, jeune homme timide et ténébreux qui allait devenir une figure respectée de la scène piano-indé-sérieux des années 2000, évoquait notre prestation en des termes bienveillants dans son fanzine. Nous étions ravis évidemment en découvrant le texte. Mais un peu frustrés aussi. Qu’est-ce que ça aurait été s’il avait pu entendre la version magnifique du « Can’t you see? » de Billy Childish et Kyra que nous venions de terminer ?
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iloveyoukatrinamitchell · 7 years ago
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105 // lou furieux
En première partie de Sebadoh, un couple jouait saoul, terrorisé. Ils avaient installé leur clavier au fond de la scène, à gauche de la batterie de Gaffney. Chaque chanson était un échec à peine audible. La plupart des spectateurs s’en moquaient. Beaucoup au bar à attendre ceux qui étaient déjà des stars dans le petit monde que nous habitions, les autres dehors à fumer et à profiter de la douceur. Quand ça a été fini, la salle s’est rapidement remplie. Lou Barlow est monté sur scène d’un pas décidé, suivi des deux autres. Il a attrapé son micro et s’est mis à engueuler le public. Vous êtes une bande de cons, comment pouvez-vous manquer de respect à ce point. Vous avez la chance de voir Bill et Cynthia jouer. C’est leur première tournée en France et tout ce que vous trouvez à faire c’est rester au bar à parler fort, vous me dégoûtez. Il s’est tourné vers la batterie, quatre coups de baguettes à tout allure, et a hurlé Just gimme indie rock. Le morceau a claqué comme une gifle envoyée à tous les spectateurs, qui ont beaucoup dansé ce soir-là pour se faire pardonner de n’être qu’un poignée seulement à déjà vénérer Smog.
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iloveyoukatrinamitchell · 7 years ago
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104 // feux d’artifice
Chaque année, aux alentours du 14 juillet, mon grand-père organisait un grand feu d’artifice dans le parc de la maison familiale. Le rituel rapprochait pour un soir la ribambelle de cousins, d’oncles et de tantes qui, le reste du temps, se dispersaient au gré des mille activités de l’été. Il donnait aussi au lieu, à moitié dévoré par les herbes folles et le manque d’entretien, un éclat particulier. Le bassin plein de vase et son jet d’eau capricieux, les immenses cèdres, la terrasse en pierres disjointes, le sapin et ses branches pendantes, longues comme des pattes d’araignée, la maison elle-même, presque un château avec sa tour et ses grands volets en bois : tout se drapait d’une beauté apaisante. On pouvait sentir les fantômes des enfants que nos parents avaient été se blottir contre nous. Les dernières années, nous avons ajouté de la musique aux explosions et aux éclairs multicolores. Jean-François, le cousin le plus proche de moi — nous avions quelques mois de différence — montrait depuis ses 18 ans des signes inquiétants de schizophrénie. Son intérêt pour la musique contemporaine s’était transformé en passion qu’il n’est sans doute pas exagéré de qualifier de vitale. J’imagine qu’elle calmait ses terreurs et domestiquait les voix qui l’habitaient. Chacun pour des raisons différentes sans doute, nous étions heureux de le voir se consacrer à la programmation musicale de l’événement. Et lorsque les œuvres d’Arvo Pärt et de Philip Glass résonnaient à tue tête dans la nuit, trouées par les détonations et les flashes, je devinais qu’une porte quelque part au fond de la maison s’entrouvrait et nous laissait respirer pour un temps le même air que lui.
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iloveyoukatrinamitchell · 7 years ago
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103 // nouveaux formats
Pendant quelques mois, dans la lignée des succès fulgurants de ce que tout le monde appelait le trip-hop, nous avons subi une véritable déferlante de hip-hop instrumental. La compilation Headz du label Mo Wax était un modèle du genre, devenue dès sa sortie l’un de mes disques de chevet. Le premier EP de Air, La Funk Mob. Plus tard, DJ Shadow et des dizaines d’autres. Et Massive Attack, bien entendu, précurseurs du mouvement. Directement importé du dub, le mélange d’abstraction et de groove collait parfaitement à ce que je savais faire, même si j’avais alors arrêté de fumer de l’herbe : danser doucement sans me lever du canapé. En ces temps bénis, les labels étaient riches. Bob, qui écrivait des chroniques culturelles dans différents journaux locaux, recevait les disques promo de chez Source en vinyle. Certains en double, pour mon grand bonheur. Même les CD étaient soignés, la plupart publiés dans des formes originales. Cela, pourtant, ne semblait pas me convenir, si j’en crois l’état des pochettes de ceux que j’ai achetés à l’époque. Pas une n’a survécu à ce qui devait être alors un souci de rangement efficace (je ne vois que ça). Les couvertures carton ont été découpées, les livrets trop grands jetés. Tout ce qui ne pouvait pas loger dans le boitier plastique d’un disque ordinaire a disparu. Je n’ose même plus aujourd’hui sortir Endtroducing… de ma discothèque.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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102 // gâté
Pour mes 21 ans, Isabelle m’a offert un quatre-pistes, le plus beau des cadeaux qu’on pouvait me faire. Jamais je n’avais osé imaginer avoir mes propres moyens d’enregistrement à disposition. Fabriquer de la musique sans attendre que l’on me prête le matériel, et sans me presser avant de le rendre. Attraper chaque idée au vol, laisser reposer, un luxe impensable. Pendant les cinq ans qui ont suivi, à mes heures perdues qui ne l’étaient plus, j’ai enregistré sur ce magnétophone plus de 70 instrumentaux, sans autre ambition que de les fixer sur bande et distribuer mes « albums » aux plus proches de mes amis, qui se comptaient sur les doigts d’une seule main. Je ne pouvais pas aller bien plus loin : improvisé, chaque morceau, une fois terminé, sortait de ma mémoire. J’étais incapable de le reproduire.
Le premier Mac suffisamment puissant que nous avons pu acheter a progressivement remplacé l’appareil. Mais le goût pour la composition lo-fi sans lendemain ne m’a jamais quitté. Sans ce cadeau, j’aurais vite arrêté. Pour la musique, comme pour beaucoup d’autres choses, Isabelle m’a appris très tôt à ne pas abandonner les chemins qui valent le coup d’être suivis.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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101 // antoine
Antoine, mon plus jeune frère, fonctionnait par obsessions. Aux alentours de 13 ans, il n’écoutait que Sonic Youth, puis ça a été Cypress Hill. Impossible de lui faire découvrir quoi que ce soit. J’avais beau mentionner tel ou tel groupe, ou style, en variant les situations et les tons, il ne déviait jamais de ses rails. Mon statut d’aîné — neuf ans de plus que lui — n’y changeait rien. Il a fallu que Wild Style soit diffusé à la télévision pour que son rapport à la musique se transforme complètement. Il a commencé à malmener la platine vinyle des parents et s’est mis à écouter des classiques du rap et du funk. Je l’emmenais chercher des 45 tours chez Emmaüs, où il a trouvé une mixette. Plusieurs années après, à l’occasion de ses 18 ans, nous lui avons offert une Technics SL1200. Lorsqu’il a découvert le contenu du paquet, il est resté figé, incrédule. Il allait enfin pouvoir mettre en œuvre les méthodes qu’il avait glanées au fil de ses recherches, à l’écoute de ses maîtres, Grandmaster Flash et DJ Qbert.  
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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100 // le test
J’ai acheté le deuxième album des Palace Brothers dès sa sortie, mais je ne l’ai pas écouté tout de suite. Isabelle partait à Paris ce jour-là. Cela faisait plusieurs semaines que nous étions ensemble. Tout se passait bien. Elle m’avait pourtant prévenu : elle allait voir là-bas le garçon qu’elle aimait quelques mois plutôt, qui l’avait quittée brutalement, et qu’elle pleurait encore à chaudes larmes les jours qui avaient précédé notre rencontre. Je ne sais pas ce que je ressens pour lui aujourd’hui. Je ne sais pas non plus exactement ce que je ressens pour toi. Ce voyage est comme un test. Je serai fixée quand je le verrai, quand j’entendrai sa voix. J’étais terrorisé. Je ne connaissais rien de ce Denis, mais je l’imaginais ténébreux, grand, et bien plus mature que le gamin que j’étais encore à l’époque. Le soir venu, seul dans l’appartement pour la première fois, j’ai inséré le disque dans mon lecteur CD double cassettes que nous avions installé sur le sol, à côté du lit. La guitare et la voix de Will Oldham ont résonné dans la chambre de plus en plus sombre. When you have no one, no one can hurt you. Il n’y avait rien d’apaisant là-dedans, la musique pourtant m’a rassuré. Ces chansons dénudées, que j’ai passé une partie de la nuit à écouter, étaient une véritable révélation. La preuve que vivait, à la même époque que moi, pas bien plus vieux que moi, un type capable d’égrainer des chefs d’œuvre intemporels de la même trempe que ceux que m’avait transmis mon père, issus d’un monde que je croyais révolu. Elles laissaient entendre aussi qu’Isabelle voudrait bien de moi, que nous pourrions vivre et peut-être même vieillir ensemble.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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099 // l’inquiétude
C’est aussi sur la mini-chaîne d’Isabelle que j’ai écouté pour la première fois In Utero. Je n’avais jamais été si inquiet en glissant un CD dans une platine. J’avais certainement déjà entendu un extrait chez Lenoir, mais je n’en suis même pas sûr. J’ai monté le volume avant d’appuyer sur Play, seul moyen de se faire une idée juste.
Et puis tout a volé en éclats. Au milieu de « Serve the Servants » je souriais déjà comme un demeuré. Rien de faux. Aucun morceau n’était à vendre. Plus encore, tous sonnaient mille fois mieux que les titres surproduits de Nevermind. Je savourais chaque note, chaque coup de caisse claire, chaque déchirement de la voix de Cobain. J’aurais voulu le serrer dans mes bras et le remercier. Comment avais-je pu douter de lui ?
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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098 // palace
En me quittant, les filles m’avaient dit il faut que tu écoutes l’album des Palace Brothers. Thurston Moore en faisait la publicité dans une interview que je n’avais pas encore lue. Une ou deux semaines plus tard, je suis tombé sur le disque à la Fnac : j’ai suivi le conseil de celles qui restaient malgré la distance mes deux principales sources de prescription musicale (pendant des années, je n’ai pas écouté une chanson sans me demander ce qu’elles en penseraient). Je ne savais rien de ce groupe ni de son chanteur ni des conditions d’enregistrement. Je m’attendais à un déferlement de bruit, du rock violent et expérimental, des cris, des larsens. Je suis resté interdit en découvrant le banjo, puis la voix cassée, nasillarde, aux mélodies qui rappelaient la country. Lorsque « Long Before » a commencé, les derniers doutes se dont évaporés. Cette voix et le monde qu’elle faisait advenir étaient faits pour m’accueillir. Les jours ont filé, le disque ne quittait pas la mini-chaîne d’Isabelle. Nous étions hypnotisés. Je ne le savais pas encore, mais j’allais passer ma vie avec Will.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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097 // just gimme indie rock
Les filles m’attendaient devant l’entrée de la fac, comme promis. On a quelque chose pour toi, pour ton anniversaire. On ne se voyait plus beaucoup. Nos embrassades étaient gauches et mon sourire figé, je n’arrivais pas à savoir si nous étions encore amis. J’ai déchiré l’emballage maladroitement et découvert la pochette du 45 tours de Sebadoh, Just Gimme Indie Rock. Le disque était transparent, magnifique. Et le morceau titre, que j’écouterais quelques heures plus tard, était un hymne. Lou Barlow, au cœur de l’ouragan, y raconte la naissance d’un son, identifie ses racines (le Velvet, les Stooges et Hüsker Dü) et balance les noms de la première génération d’electric white boy blues. Et juste après ça, une version inédite de « Ride the Darker Wave. » À cette époque, sans la ramener, Lou écrivait les plus belles chansons du monde par dizaine.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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096 // Isabelle
Il n’y avait pas de musique quand j’ai rencontré Isabelle. Juste ses yeux et la lumière sidérante qui s’en dégageait. Je faisais l’acteur pour la dernière fois, elle prenait des photos. Elle soupirait en dormant et riait grassement à mes blagues. Quelques semaines plus tard, La Fossette accompagnait nos après-midi vautrés sur le matelas qui faisait office de canapé. Un piano droit désaccordé meublait son salon presque vide. Je lui ai offert Harvest Moon, et une vie nouvelle a commencé.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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95 // l’un dans l’autre
Hélène, que j’avais complètement perdue de vue, m’a appelé pour m’inviter à déjeuner chez elle. Elle voulait me parler d’un projet. Une nouvelle pièce de théâtre dans laquelle elle souhaitait que je joue à ses côtés. Catherine Anne, encore une fois. J’ai un peu vacillé, mais j’ai fini par accepter. Je voulais me changer les idées, prendre mes distances. L’air était devenu irrespirable. Pour ne pas arriver dans cet appartement étranger les mains vides, j’avais préparé une cassette avec le premier album de Dominique A. « Vivement dimanche » : les premières notes, les premiers mots ont résonné après le repas. En fixant le café dans ma tasse, j’essayais de guetter sa réaction. Elle ne bougeait plus, ne respirait plus. Ses yeux grand ouverts ne cillaient pas. « Février » est passé, puis « Trombes d’eau. » « Va-t-en » l’a terrassée. Ses épaules se sont affaissées doucement, elle m’a regardé, a dit c’est magnifique dans un souffle. Il y avait quelque chose dans sa voix qui allait au-delà du simple verdict. Comme si elle venait d’entrevoir malgré elle l’histoire que nous aurions pu vivre ensemble. Un horizon de poésie et de musique qu’elle avait fui en me tenant à distance. J’ai composé un sourire qui jouait lui aussi sur les deux tableaux. Qui disait oui c’est beau et qui ajoutait mais c’est trop tard, tandis que la voix blanche chantait par dessus la boîte à rythme l’un dans l’autre, nous ne nous en tirons pas mal, si l’on pense à ce par quoi nous sommes passés.
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iloveyoukatrinamitchell · 8 years ago
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094 // Neil, Charles et John
Que parmi mes amis certains ne connaissent de Neil Young qu'Harvest me dépassait complètement. Je n'arrivais pas à imaginer que l'on puisse s'en tenir à l'idée d'un vieux hippie de feu de camp un peu chiant. Même avec Harvest d'ailleurs. Comment pouvait-on être passé à côté de ses déluges de guitares rouillées, synthèse parfaite de la ville et de la campagne américaines ? Beaucoup plus tard, je rirai en voyant les spectateurs qui venaient de danser en écoutant les affreux Los Lobos quitter le Zénith aux premiers larsens qui accompagnaient l'arrivée sur scène du Crazy Horse. Je n'ai compris l'ambition du bonhomme qu'en découvrant une interview par Nick Kent, publiée dans les Inrockuptibles au début des années 1990. Neil y parlait de Charles Manson et de ses chansons qui le fascinaient. Il évoquait surtout Coltrane, l'inspiration principale de ses solos. Voilà qui expliquait tout. C'est la quête stellaire qui l'animait lui aussi, chaque note comme une nouvelle étoile à découvrir, parfois la même qu'il fallait contourner à plusieurs reprises afin d'en apprécier pleinement la lumière, puis filer dans l'espace jusqu'au prochain amas de matière.
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iloveyoukatrinamitchell · 9 years ago
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093 // hell
La presse spécialisée le vendait comme l'album d'un super-groupe, chose assez rare à l'époque. C'était surtout un super disque. Une grenade new yorkaise, qui brûle encore dans ma discothèque. Une pierre à part, pas vraiment précieuse, mais sacrément belle, qui m’éblouit à chaque écoute. À sa sortie, l'attraction venait évidemment surtout de Steve Shelley et Thurston Moore. Don Fleming aussi. Un nom que j'avais appris à guetter dans les notes de pochettes. Teenage Fanclub, Half Japanese, Jad Fair, Dinosaur Jr, Daniel Johnston, le garçon apparaissait dans les trois quarts des disques qui comptaient. Et encore, je n'avais écouté ni B.A.L.L., ni Gumball, ni les Velvet Monkeys, ni Action Swingers. Il y avait aussi Robert Quine, celui des mythiques Quine Tapes, guitariste mercenaire dont on trouve un beau portrait dans un récent numéro de la revue Audimat. 
Surtout, il y avait Richard Hell. À part le Horses de ma mère je ne connaissais alors pas grand chose du New York proto-punk. Sans rien savoir des Neon Boys, de Television, des Heartbreakers, des Voidoids, ni des emprunts de McLaren, c’est donc avec Dim Stars que j'ai découvert la plus belle voix du rock. Cet accent, ce grain, cette manière de jeter les mots par dessus les guitares avec un mélange d’arrogance et de désespoir. Aucune autre voix, absolument aucune, ne me touche à ce point.
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iloveyoukatrinamitchell · 9 years ago
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092 // la boîte à meuh
Je crois que le premier disque de rap que j’ai essayé d’écouter était le 3 Feet High And Rising de De La Soul. Ça m’intéressait, mais ça ne ne m’accrochait pas vraiment. Jusqu’à ce qu’un jour Thibault, qui jouait de la basse dans les Machines à laver, me parle des Beastie Boys. Je connaissais le groupe bien entendu, j’avais écouté plusieurs de leurs morceaux, mais je ne m’étais jamais plongé dans leur discographie. Thibault a mentionné le détail idéal pour déclencher l’envie de réparer cette lacune : une chanson dont le rythme est marqué par une boîte à meuh. J’ai enfin acheté Paul’s Boutique, que je considère comme l’un des plus beaux joyaux de la musique populaire post-sixties. La chanson, elle, ne m’a plus jamais quitté. Aujourd’hui encore, c’est sa boîte à meuh qui fait sonner mon téléphone. Il faut dire que j’aime assez « dropping the new science and kicking the new knowledge. »
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iloveyoukatrinamitchell · 9 years ago
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091 // la ville
Faire de la musique ensemble, nous n’avions plus que ça en tête. Et Thomas insistait : il nous fallait un batteur. Nous avons affiché une annonce chez deux des disquaires que nous apprécions. Il y avait une vanne, je ne me souviens plus laquelle. Du genre « aimant Sonic Youth, Beat Happening, le Velvet Underground, les Bad Seeds et Dorothée. » Mais nous étions pessimistes. Comment, alors que cela faisait dix ans que nous habitions cette ville pas si grande, allions-nous découvrir un candidat sérieux, aux goûts surs et à la compagnie agréable ? Présomptueux et naïfs, nous pensions avoir fait le tour des possibilités en listant sur les doigts d’une de nos mains les candidats éventuels, à qui nous n’avions par ailleurs pas osé faire de propositions. Quelques jours après l’affichage de l’annonce, un garçon dont nous n’avions jamais entendu parler a laissé un message. Nous avons fait la connaissance d'Éric, excellent batteur, d’une gentillesse et d’une ouverture d’esprit rafraîchissantes. Je me souviens qu’il était obsédé par les Spacemen 3 — dont je ne connaissais alors rien — et qu’il voulait jouer de longs morceaux faits d’un ou deux accords maximum. Surtout, Éric était un marcheur. Il arpentait la ville de longues heures sans autre but que de capter avec le magnétophone miniature qui ne le quittait jamais, la texture sonore d’un monde toujours en mouvement, dont la violence ordinaire et les surprises faisaient un matériau parfait pour fabriquer de la musique.
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iloveyoukatrinamitchell · 9 years ago
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090 // schisme
La bande a explosé en quelques heures. Je crois me souvenir d’une dispute à propos de Daniel Johnston, ou peut-être d’un débat plus général sur la basse fidélité. Mais les tensions remontaient déjà à plusieurs jours. Patrick et Jeanne d’un côté, Thomas et Stéphanie de l’autre. Deux couples, et moi au milieu. Les choses sont vite devenues dégueulasses, les uns appelant les autres « les monstres, » et balançant toutes les saloperies que permettaient l’intimité qui les avait liés jusqu’ici. Chacun rivalisant de mauvaise foi et de prétendu détachement. Je me suis retrouvé dans la cour de récréation d’un collège de banlieue de province, paralysé par l’ampleur et le ridicule du conflit. Un soir, à l’occasion de je ne sais plus quel concert, Thomas et Patrick en sont venus aux mains. La rupture était consommée.
Je n’ai plus vu Jeanne qu’à de rares occasions, et n’ai presque plus remis les pieds chez elle. Thomas et moi nous sommes encore rapprochés, avec une règle explicite de mon côté : qu’il ne me mêle pas une seule fois aux répliques du séisme. Je restais à ses côtés, mais refusais de prendre parti. Stéphanie et lui savait que je leur en voulait tout autant qu’aux deux autres. Nous avons continué à parler musique des nuits entières. Thomas s’est acheté une guitare, nous avons joué de plus en plus sérieusement, sans nostalgie de ce que la ville et nos vies auraient pu devenir si le schisme n’avait pas eu lieu.
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