Etudiant en journalisme à l'ISCPA Lyon j'ai passé une semaine à l'Odéon, conservatoire et salle de concert à Tremblay-en-France. L'occasion de raconter le rôle particulier de ce bâtiment et de la culture dans une ville du 93. Le tout avec le support musical du Variety Orchestra, enregistré lors des répétitions.
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L’Odéon, la maison de deux institutions culturelles tremblaysiennes
L’Odéon est un bâtiment municipal construit par la mairie en 2001. Depuis son inauguration se côtoient en son sein une association de spectacle, l’association Scène JRC et le conservatoire de musique.
Le conservatoire de Tremblay-en-France se trouvait depuis les années 70 dans l’école Eugénie Cotton. Les professeurs qui ont connu cette époque sont d’accord, “C’était sympa mais c’était petit et pas super adapté” résume Frédéric Sanchez Del Rio, professeur de guitare. D’où le besoin de cette nouvelle structure, l’Odéon. L’immeuble à l’architecture moderne est vaste et bien équipé. Doté d’une salle de concert il a été décidé d’en faire profiter une autre structure culturelle tremblaysienne, l’association Jean-Roger Caussimon, cinquantenaire cette année. C’était à l’origine une Maison de la Jeunesse et de la Culture au sein de laquelle “Un projet spectacle est né avec de l’engagement et une passion pour le blues” nous explique Guillaume Garcia, actuel directeur de l’association devenu “Scène JRC” suite à une scission entre les activités MJC et de spectacle.
Les lieux ont été partagés. En entrant dans le hall baigné par la lumière du jour des escaliers permettent d’arriver à l’étage administratif de l’Odéon. Il y’a de forte probabilité de trouver la porte d’un bureau ouvert. Geneviève Cesbon et Nadia Souadji respectivement responsable et assistante administrative, souriante et à l’échange facile y accueillent quotidiennement professeurs, parents ou élèves, “C’est un lieu de passage, de vie, de rencontre, d’échange, de boulot mais aussi de rigolade” explique Geneviève. On y rencontre Francesca, agent de la ville détachée auprès de l’association. Elle passe régulièrement au premier étage mais travail au rez-de-chaussée, dans les locaux plus en retrait de la Scène JRC. C’est ici qu’elle partage une pièce encombrée avec Debora Alloyeau, chargée de la communication. Deux stagiaires de 3ème s’activent autour des cartons pleins de nouvelles plaquettes de la salle de spectacle, “On en imprime 20.000, on est très aidée par la mairie qui les glisse dans le TMagazine, le journal de la ville” détaille-t-elle alors que le contenu d’une boite se disperse sur le sol.
La plaquette a fait tiquer le nouveau directeur pédagogique et artistique du conservatoire, Pascal Jollans “C’est vrai que j’aurais aimé que les événements organisés par le conservatoire ait plus de visibilité”. La salle de spectacle, comme les techniciens de la salle sont partagés. Le conservatoire organise des concerts de musique classique notamment en partenariat avec le Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. La cohabitation entre les deux équipes peut se tendre. Quelques problèmes de wifi, de papier ou de frigo déplacé suite à un concert amènent une remarque de Geneviève a Francesca comme souvent de passage dans le bureau, “La pauvre c’est elle qui arrive le plus tôt donc c’est toujours à elle qu’on s’adresse” nuance-t-elle ensuite en s’adressant à Nadia. Il y’a naturellement quelques irritations inhérentes à la vie de bureau mais il ne semble pas exister de réelle tension entre l’association et le conservatoire.
Les deux structures ont récemment vu leurs directions et une partie du personnel administratif renouvelé ces cinq dernières années. Que ce soit Guillaume Garcia et Debora Alloyeau pour l’association ou Yolaine Jouanneaux et Pascal Jollans pour le conservatoire les deux nouvelles équipes ont dû prendre la relève de deux situations compliquées. Guillaume Garcia témoigne des avertissements qu’il a reçu en s’intéressant au poste, “Dans le réseau professionnel du 93 on parlait d’un panier de crabe, pas mal de gens étaient passés à ce poste et repartis” ce qui ne l’a pas dissuadé. Dans le cas du conservatoire, la situation est plus complexe. Yolaine Jouanneaux a bénéficié de la création d’un nouveau poste qui lui donne la direction du conservatoire et surtout de la Médiathèque municipale. Pascal Jollans est lui directeur pédagogique et artistique du conservatoire depuis avril 2018. Arrivé à Tremblay-en-France comme professeur de piano en 1996 il a déjà dirigé plusieurs conservatoires dans des villes de la région parisienne. Une expérience nécessaire pour prendre le relai du dernier directeur passé en conseil de discipline pour une agression sur Agnès Brancherie, professeure de Guitare et coordinatrice des études et de la diffusion artistique “j’étais proche du directeur précédent avec qui ça s’était très très mal passé sur la fin, ça a été très douloureux pendant 18 mois avant qu’il parte”.
Pour Agnès Brancherie "c’est beaucoup plus organisé qu’avant”, elle tient à ajouter “c’était pas du tout le cas du directeur précédent mais qui avait d’autres qualités, beaucoup d’idées”. Sabrina, élève depuis 6 ans à l’Odéon a ressenti cette meilleure organisation, elle estime qu’il “y’a beaucoup plus de présence du nouveau directeur que l’ancien.”. Pascal Jollans confirme cette impression vérifiée au cours de la semaine “j’aime que les choses soient bien faites, en tant que directeur pédagogique et artistique on ne peut imaginer les grands projets, les grandes lignes d’un établissement que si on le connait dans les moindres recoins”. D’où un investissement horaire particulièrement conséquent, “j’ai un contrat de 42 heures par semaine mais je fais plutôt 50 heures.”. Une omniprésence remarquée et appréciée par les personnes rencontrées durant la semaine. Du côté de la Scène JRC Guillaume Garcia et Débora Alloyeau ont également apporté un renouveau apprécié. Sous l’impulsion du directeur ils sont parvenus à tripler la fréquentation de la salle en amenant une musique plus actuelle tout en préservant les racines blues de l’association.
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Répétition du “Variety Orchestra” dirigé par Philippe Ego.
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Guillaume Garcia, Directeur de l’association JRC
Arrivé il y’a près de cinq ans Guillaume Garcia organise avec les cinq autres employés de l’association les concerts de l’Odéon. Tout en conservant l’héritage blues historique de la Scène JRC il y a introduit une programmation plus jeune avec succès.
Guillaume Garcia entrain de retirer l’affiche du dernier concert de la Scène JRC
Peux-tu commencer par nous parler de ta formation ?
Je viens de l’île-de-France, du 92. J’ai voulu travailler dans des projets de développement, dans les pays en voie de développement, dans la relation Nord-Sud. Maintenant je ne me voyais pas travailler contre la pauvreté, l’assainissement des eaux... J’avais l’impression, même si ça semblait assez luxueux qu’il y’avait aussi un axe de développement pertinent lié à la culture. C’est à dire cela aller être plus facile de rapprocher des peuples par le biais de la culture.
Je me rappelle que je prenais l’exemple de Youssou N’dour que tout le monde connaissait. Il était sénégalais et nous parlait bien de son pays à une époque où personne savait où était ce pays sur la carte de l’Afrique. C’est Youssou N’dour qui a peut-être fait comprendre aux français que c’était un pays francophone etc.
Donc j’ai fait une formation développement à Paris plutôt classique et après je suis parti à Lyon faire 3A qui était une formation sur le développement d’ordre économique. Quand on veut développer des projets il faut savoir les gérer, on parle de droit, de gestion, de compta...
Qu’est-ce que tu as fait en sortant de l’école ?
Du coup j’ai commencé à bosser avec des radios à Dakar et en partant de là je me suis rendu compte qu’à court terme, et je ne l’ai pas fait exprès, je me suis mis à produire et pu à être dans le développement. Donc j’ai produit des contenus artistiques à Dakar. J’ai directement fait voyager par avion, les artistes pour faire des rencontres avec d’autres projets artistiques européens, français, anglais, américain...
En partant de ça j’ai conduit plusieurs projets, des fois qui allaient dans le sens de défendre des causes. Alors c’était beaucoup lié au hip-hop car le hip-hop arrivait à parler de tout ce dont les autres ne parlent pas. On allait parler droit des femmes, religion, polygamie, rapport nord-sud, des dominations, du rapport l’identité d’ado, de jeunes adultes, de femmes. Le rap allait traiter de tout ça. Donc faire bouger des lignes, faire avancer les choses et aussi à travers les styles.
Le rap à travers le sample [ndlr la récupération d’échantillon sonore préexistant] permet d’accueillir une femme qui parle une autre langue, une musique d’une autre tradition, d’accueillir sa propre tradition dans une musique moderne et la faire revivre. On allait aussi pouvoir sampler la musique de demain avec de l’électro. On allait pouvoir aussi casser les clichés qui s’installaient en Afrique entre les générations : ceux qui s’habillaient en américain, ceux qui s’habillaient en boubou alors qu’en fait c’était les mêmes personnes à des périodes différentes. En mélangeant et en accueillant un peu tout le monde on allait faire comprendre que c’était les mêmes personnes. Des fois on aimait bien mettre les sociétés en conflit entre générations, styles, origines. Pour moi le hip-hop apportait ça. Après faire se rencontrer le hip-hop avec le hip-hop de France c’était intéressant, avec le Jazz, l’electro, le dancehall, avec les ponts afro-caribeens, américains, et aussi afro-français. Je me suis retrouvé à produire un petit peu tout ça.
Pourquoi être revenu en France et surtout à Tremblay-en-France ?
J’ai fait plein de projets qui ont marchés, qui ont donné des beaux voyages, de belles tournées dans toute l’Afrique, Canada, Asie, Europe. Un boulot hyper nomade, avec de la prise de risque. Quand j’ai voulu me poser la d’où je venais, c’est à dire Paris, je savais qu’il y’avait beaucoup de choses que je n’avais pas assez travaillé ici. Pourtant c’était ma source et ma richesse. Et ça m’intéressait de prendre racine ici pour voir ce que moi j’allais pouvoir faire arriver, comment faire des liens. Et là j’ai vu une annonce sur ce job à Tremblay. Job de coordinateur de projet artistique avec dedans de la programmation, de la gestion. Je me suis dit qu’est-ce que c’est que ça ? J’ai regardé un peu plus près et je me suis dit : c’est un projet petit au même titre que les projets sur lesquelles je travaillais, c’est à dire à 3-4 on va faire les choses, un régisseur, un technicien, un attaché de presse.
J’ai proposé ma candidature, ça a intéressé l’association et la ville justement par ce parcours de production de musique, ce côté “il connait les concerts parce qu’il a fait beaucoup de tournées, il connait le milieu, il a fait une école saura gérer administrativement parlant, et d’avoir travaillé avec plusieurs culture il saura géré cette particularité de travaillé avec le conservatoire, la ville, l’association.”
Qu’est ce qui t’a attiré dans le projet Scène JRC ?
Le projet était un peu balbutiant mais ils avaient aussi de gros atouts par la situation géographique, la proximité du RER, un bel environnement, un quartier calme avec des commerces, un beau plateau technique, une belle salle, des techniciens là depuis longtemps avec une capacité d’accueil technique. A partir de là on avait un bel outil de travail.
En y regardant de plus près j’ai vu que la salle n’avait pas été travaillée en configuration debout, seulement en concert assis. Il y’avait un challenge là-dessus quand j’ai voulu commencer à programmer plusieurs concerts debout. On m’a dit “attend tu veux en faire autant en un an qu’on en a fait en douze ans de projet”. J’ai dit certes mais y’a qu’en essayant qu’on verra ce que ça donne et finalement assez rapidement les retours ont été plutôt bon. On a décidé de s’orienter vers quelque chose de festif.
Pourquoi quelque chose de festif ?
Si on veut faire la promo d’un lieu ce qu’il faut y faire c’est la fête. C’est ce qui aura le plus d’impact avec le moins de moyens financiers ou humains. Alors quoi faire ? Eh bien dans une salle de concert de banlieue ce qu’on veut c’est qu’après le concert le lieu reste ouvert, que le bar reste ouvert, qu’il y’ait à manger dehors avec un foodtruck, une terrasse et une petite ambiance de musique. Et avant le concert que tout soit déjà ouvert, favoriser les commerces autour. Tout ce qui allait nous différencier d’une salle de banlieue classique.
C’est ce qui fait la différence avec Paris, quand la salle est vidée on a 200 bars à gauche 200 bars à droite. On préfère y aller même si c’est 10-20 euros plus cher. Pas parce que la prestation sera meilleure mais pour sortir, boire un coup avant, après, pas savoir ce qu’on va faire. Alors nous en mettant en place un bar ouvert tard, le foodtruck, on allait permettre au public de sortir et de pas finir à poil dans les rues de Tremblay. Le public se retrouve à parler ensemble de ce qu’il vient de voir. Chose qui n’est pas évident même a Paris puisqu’on se disperse. Cela créé quelque chose d’atypique et de sympa.
Et côté musical ?
Pour la ligne artistique j’ai essayé de m’inspirer de ce qui avait été fait par mes prédécesseurs, la chanson, l’engagement, le rock, le blues. En me disant : en partant de là comme arriver au hip-hop d’aujourd’hui.
On peut prendre une ligne droite sur les musiques qui traitent d’âme, de sincérité. La ligne afro-américaine du blues peut amener l’afro-funk, l’afro hip-hop ou l’afro tout court. J’ai ouvert légèrement sur ce qui se faisait en World musique, afro-caribéen, afro-africain, jazz. Et du coup on a eu des rebonds dans la ville.
On s’est retrouvé à accueillir E.sy Kenenga, Kalash, ou Admiral T pour le plus connu. Aujourd’hui la progra est divisée en trois. Blues et jeune public, travaillé en assis, et la partie musique actuelle travaillée en debout. Cela permet de mettre trois fois plus de monde, ça fait effet au niveau des politiques, du quartier, des villes environnantes parce qu’on a créé un nouveau lieu avec les mêmes moyens. Cela fait plaisir à tout le monde.
On a mis en place une partie de résidence pour être un accueil de développement de tous les projets des artistes d’aujourd’hui. Il a fallu qu’on se rapproche de tous les tourneurs, de tous les producteurs non seulement pour leur acheter du spectacle vivant et en même temps pour faire venir des artistes pour qu’il fasse leur résidence, c’est à dire qu’ils viennent créer chez nous. Et on devient un nouveau lieu pour ces professionnels-là.
Aujourd’hui qu’est ce qui a fait que cela a fonctionné ?
La seule chose qui aurait été un frein personnellement c’était si on avait eu une équipe technique limitée. C’est à dire qui sait faire ce qu’elle sait faire mais qui n’osera pas aller plus loin quand elle se fera bousculer par les projets de Kalash, Youssoupha, Vald qui descendent du Zenith. Et je suis tombé face à une équipe très douée et très dangereuse : des envies de plus, des grosses capacités d’analyse, d’accueil, d’expertise mais aussi des capacités humaines qui ont permis de porter l’ambition que je pouvais donner à ce projet.
L’autre gros atout que j’ai eu c’est de tomber sur Debora [ndlr chargée principalement de la communication de Scène JRC]. Il fallait que j’ai face à moi quelqu’un qui puisse encaisser le volume d’activité supplémentaire que j’allais ajouter et qui soit capable d’être force de proposition. Cela a été le facteur déterminant, si Débora n’avait pas été Débora je me serais vite retrouvé avec la charge de travail à faire seul et j’aurais automatiquement moi-même limité le projet. Elle a été source, ressource, elle a pu complètement développer, alimenter le projet avec moi et aujourd’hui ça se poursuit.
Et ça aurait été une erreur pour moi d’oublier l’association. Si elle n’avait pas été là, président, trésorier, secrétaire, et eu de l’intelligence dans son rôle d’interface entre le projet, les salariés et la ville on n’aurait pas pu avancer aussi vite. Elle est ancienne, liée au projet depuis toujours, dynamique pour être bénévole, créée de l’engouement dans tout ce qu’elle fait. Pour moi le projet a encore beaucoup d’énergie. On ne s’est pas fatigué pour le mener parce qu’on a eu le soutien et les réussites qui sont aussi liées à de la chance. Des bons feelings et globalement une bienveillance, un bon management : un équilibre entre les affaires culturelles de la ville, le conservatoire, les autres équipements de la ville, la technique et son expertise ancienne... Tout ça a bénéficié au projet. L’équipe vit bien et elle a encore du souffle, c’est parce qu’elle a les bonnes qualités humaines.
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Un lieu d’apprentissage, un lieu de vie
Une semaine suffit pour réaliser que les activités du conservatoire ne se cantonnent pas aux salles de classe. Le hall et son impressionnante baie vitrée donnant sur la rue est souvent animé par les discussions des gens de passage.
Hall de l’Odéon
Lorsqu’on se rend à l’Odéon pour la première fois il y’a de quoi être surpris par l’activité qui y règne passer 17h. Enfants, parents, élèves de tous âges, et employés du conservatoire se croisent et échangent au quotidien dans ce lieu ouvert sur la ville. Pour Corinne Neuvecelle, 56 ans, enseignante de piano, “Le bâtiment est réussi, il est convivial, il se prête à la discussion”. Quand il ne discute pas les plus jeunes font leurs devoirs, les adultes sont sur leurs ordinateurs. Nestor ancien pêcheur guadeloupéen à l’accent prononcé veille sur les apprenties musicien et danseurs depuis l’inauguration de la structure, “Tous le monde me connait. Les parents, les enfants savent que je suis là pour voir qui rentre ou s’ils y’a un souci”. Lorsqu’il n’est pas en train de régler un problème technique quelconque l’agent d’accueil discute avec les habitués ou les enseignants dans sa loge décorés de desseins enfantin ou de poster du club de foot Saint-Etienne. On le retrouve régulièrement à faire les cent pas équipés de son écharpe en triturant son trousseau de clef.
Nestor, agent d’accueil de l’Odéon depuis le premier jour.
Nanou 34 ans y patiente justement avec deux de ses enfants. Deux autres petites répètent ce soir-là le spectacle de danse, l’évènement de la semaine “On est tous le temps là. Des fois je reste un peu tard mais cela ne me dérange pas, il y’a plein d’activités, les enfants ne s’ennuient pas et puis c’est calme”. Quand on s’inscrit à l’Odéon on s’engage à y passer du temps. L’apprentissage de la musique ou de la danse est chronophage et le 1 place du bicentenaire devient rapidement “une deuxième maison”. Sabrina, 17 ans est un cas extrême : Solfège, chant, trompette, piano, membre de plusieurs ateliers de musique, difficile de ne pas la croiser au détour d’un couloir, “J’ai compté, ici je fais bien 40 heures”. Emmeline, employé de la poste de 32 ans est aussi de ces habitués “Je suis pratiquement là tous les jours”. Elle joue avec son fils, trompettiste de 13 ans et sa fille au tuba dans un orchestre de l’Odéon, “Jouer avec ces enfants cela permet de créer une activité commune, on peut s’entraider pour les coups de mous, pour que venir ici faire de la musique reste un plaisir”.
Pour Corinne Neuvecelle la plupart des élèves en musique “sont présents 3 à 4 fois par semaine sur une période d’environ à 3-4 ans”. Elle ajoute avoir suivis certains d’entre eux pendant près de 10 ans, “C’est le contraire de l’anonymat ici. Il y’a une convivialité qu’il n’y a plus à l’école”. Nicolas Maskharachvili, également professeur de piano confirme “Je vis à Orléans et je viens d’y trouver un poste mais je redoute mon départ, je suis très attaché à mes élèves...”. L’ambiance dans les cours est légère, on rigole, on se moque d’un chef d’orchestre qui lance avec une prononciation improbable le générique de la série Games of Thrones qu’il ne connait, de toute évidence, pas du tout.
Atelier de musique de Frédéric, professeur de Guitard, au sous-sol de l’Odéon
Les frictions sont rares mais arrivent aussi. Des tensions surviennent entre deux élèves d’une quarantaine d’année lors d’un atelier, l’un s’agace auprès de l’autre “Non mais faut bosser aussi quoi, faut être sérieux !”. Mais le plus souvent c’est la discipline qui est nécessaire, surtout avec les plus jeunes “Concentrez-vous ! Tolérance zéro !” s’exclame sévère Francis Aubier à l’attention de son jeune orchestre dissipé. Mais à peine quelques secondes plus tard, après un éternuement discret, le sourire revenu sur le visage “Non ! Même toussé tu n’as pas le droit”. On n’oublie pas que la musique est ici le plus important. Bruno professeur de basse et Leslie, son élève du jour, résument bien l’état d’esprit qui règne à l’Odéon, “La façon dont on travaille est relax mais c’est sérieux, il y’a énormément de choses à apprendre et c’est du boulot” pour Leslie. Bruno ajoute “On est obligé d’avoir une certaine exigence, ce n’est pas parce que c’est cool qu’on n’est pas exigeant.”.
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Le canal de l’Ourcq, frontière indomptable
Tremblay-en-France, comme d’autres villes de Seine-Saint-Denis et de Seine-et-Marne doivent faire face au passage du canal de l’Ourcq sur la commune. Tant pour les habitants que pour la musique il est parfois bien difficile à franchir.
Carte des quartiers de Tremblay-en-France
En ce mois de février la Une du magazine municipal pointe un sujet d’agacement pour l’ensemble des habitants de la ville : la traversée du Canal de l’Ourcq. “Une frontière naturelle qui est très problématique pour nous depuis de nombreuses années” admet Alexis Mazade jeune adjoint au maire multi-casquette dans un bureau de l’étage sécurisé de l’hôtel de ville. La mairie doit faire face à l’engorgement quotidien aux heures de pointes du seul point d’accès traversant le canal et la ligne RER qui le longe, “On est un territoire où il y’a toute les zones d’habitations au sud et toute les zones d’emplois au nord”. Installé au sud du canal, dans le quartier pavillonnaire du Vert-Galant, l’Odéon souffre, comme toute la ville de cette séparation. C’est un constat un peu amer que dresse le nouveau directeur pédagogique de l’établissement Pascal Jollans, “Jusqu’en 2001 le conservatoire était implanté à l’école Eugénie Cotton, de l’autre côté. Il a été statistiquement démontré qu’à partir du moment où le conservatoire est allé de l’autre côté du pont il s’est privé d’une partie du public”. Les chiffres parlent effectivement d’eux-mêmes, 52% des 600 élèves qui fréquentent le conservatoire sont issues du seul quartier du Vert-Galant. “Effectivement, sauf à venir à pied ce n’est pas possible quand tu habites au Vieux-Pays d’aller au conservatoire parce qu’on va mettre 50 minutes” regrette Alexis Mazade. Pascal Jollans ajoute “Les enfants quand ils sont inscrits en musique et en danse viennent à deux voire quatre cours par semaine donc ce canal il faut le franchir plusieurs fois... C’est extrêmement compliqué pour les parents.”
Répartition des structures municipales entre les deux rives du Canal de l’Ourcq
Pour Boubek, 48 ans, élève de l’Odéon c’est une fausse excuse, tout ne serait question que de motivation, “il est tout à fait possible de venir, de se bouger à vélo ou en transport en commun jusqu’au conservatoire”. En réalité la fracture géographique seule n’expliquerait pas tout. L’autre grand foyer d’habitation de la ville, le quartier populaire du centre-ville ne représente en effet que 15% des élèves. Yolaine Jouanneaux responsable de la médiathèque et du conservatoire balaie le facteur géographique. Pour elle l’explication est avant tout sociologique : “Typiquement de l’autre côté du canal on est pas du tout sur les mêmes classes sociales que ce soit au centre-ville ou ici [ndlr le Vert-Galant]. Quand on regarde à la Médiathèque, en plein coeur du centre-ville, on s’en rend compte : on touche beaucoup plus les habitants de Vert-Galant.” elle en tire un constat sans appel “Il faut aussi se dire que nous, acteur culturel, on a échoué sur la question de la mixité des publics”. Les personnes interrogées ont consciences de cette problématique. Corinne Neuvecelle, professeure de piano considère qu’il “y’a une difficulté à toucher le centre-ville, on n’arrive pas à faire venir s’inscrire les habitants des cités”. Pascal Jollans cherche à l’expliquer par l’image que peut renvoyer un conservatoire de musique aux habitants des quartiers populaires “De façon générale un établissement d’enseignement artistique comme nous a cette image de lieu élitiste etc.”
Espace Angela Davis
C’est un sujet de préoccupation pour l’ensemble des acteurs. Tous sont à la recherche de solutions, Alexis Mazade analyse “C’est important que les jeunes et moins jeunes du quartier populaire du centre-ville viennent au conservatoire mais peut-être que pour ça il faut que le conservatoire vienne à eux”. C’est dans ce sens que perdure depuis 15 ans une initiative au sein du collège Ronsard de Fabrice Aubier, professeur au conservatoire “C’est le programme El sistema au Venezuela qui m’a inspiré à l’époque, cela consistait à amener la musique dans les favelas”. L’initiative a été immédiatement soutenu par la mairie, elle finance instruments et salaires. Les élèves volontaires de 6e, 5e, 4e du collège profitent de deux heures de musiques par semaine, le lundi par type d’instrument, le mardi en orchestre inséré dans le dispositif orchestre à l’école. Depuis deux ans une classe de 6e du collège Romain Rolland est doté d’un système similaire. Dans le centre-ville existe également l’Espace Angela Davis, l’équivalent d’une maison de quartier en plein coeur des cités tremblaysienne. On y joue du piano, on discute, des parties de Football se jouent sur le terrain bitumé à proximité. C’est là-bas que ce rend Frédéric tous les mercredis. Toujours avec le soutien de la mairie il y dispense à des tarifs préférentielles trois heures de cours de guitare à raison de trente minutes par élèves. Il convient d’ajouter les concerts proposés par le conservatoire. Les orchestres sont souvent mobilisés pour proposer des spectacles dans toute la ville, depuis quelques années celui du 14 juillet est devenu une référence. Ces initiatives visent toutes à apporter la culture du conservatoire vers les quartiers les moins favorisés de Tremblay-en-France dans une démarche d’ouverture à la musique.
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Tremblay-en-France, ville de culture héritière de la ceinture rouge
L’Odéon est une des nombreuses structures de la vie culturelle de la municipalité. L’offre est en réalité très riche sur le territoire pour la plus grande satisfaction des habitants. Cette richesse est le fruit d’un héritage politique intimement lié au communisme.
carte Wikipédia commons, La ceinture rouge en 2014
A bientôt vingt ans l’Odéon n’a pas pris une ride. L’ensemble des acteurs exprime une grande satisfaction envers cet endroit, tout au long de la semaine aucune voix dissonantes ne s’est fait entendre. Les professeurs qui le fréquentent quotidiennement sont les premiers à louer leur lieu de travail, Frédéric Sanchez Del Rio, professeur de guitare estime “On est particulièrement bien lotie, les équipements sont superbes”. Un avis partagé par Agnes, professeure de piano, qui n’hésite pas à renchérir “on est privilégié de travailler ici” évoquant tout autant la politique de la ville que les conditions matérielles de travail. Même son de cloche chez les élèves, pour Boubek “Un conservatoire comme celui-là et aussi peu cher c’est exceptionnel”. Les tarifs de l’Odéon de 7,20€ à 117,80€ l’année selon les tranches du quotient familial sont abordables pour une structure de ce type. C’est également le cas pour les concerts, ceux organisés par le conservatoire sont gratuits et de 12 à 16€ pour la Scène JRC. Au travers de cette tarification abordable et la qualité des locaux se manifestent une volonté de la mairie de rendre accessible la culture au plus grand nombre.
La musique n’est en effet pas la seule bénéficiaire d’une politique ambitieuse, “Par rapport à d’autres villes il y’a plein d’installation, en sport, un cinéma d’art et d’essai, le théâtre Louis Aragon une scène conventionné nationale, un espace Angela Davis” énumère Sylvain, ingénieur son à l’Odéon depuis 2010. Dylan tremblaysien de toujours a réalisé récemment ça chance d’habiter ici, “en fait j’ai grandi dedans, je ne me rendais pas compte, c’est ma copine originaire de Cherbourg qui m’a dit que c’était ouf la vie culturelle ici”. Pour Kader régisseur de l’Odéon le constat est sans appel, “C’est une super bonne ville.”. Pour les tremblaysiens leur chance a une explication très concrète, “C’est sans doute grâce à l’argent de la taxe professionnelle de l’aéroport” estime Corinne Lavail, enseignante spécialisée. Frédéric confirme, “Tremblay est une ville riche”. Alexis Mazade, adjoint au maire balaie cet argument “Il faut savoir que Tremblay avant les années 80 était une des villes les plus pauvres du 93, on a pu bénéficier de la fiscalité de l’aéroport depuis mais ça a surtout servi à rattraper notre retard par rapport à d’autres villes”. La ville selon lui a perdu cet accès direct à ces ressources du fait de la création du Grand Paris et subit de plein fouet les politiques d’austérité de la ville, “Entre 2014 et 2018 on a perdu près de 27 millions d’euros, plus que le budget entier de la culture, des sports et des centres de loisir”.
Alexis Mazade à l’hôtel de ville, adjoint au maire à la culture
Pourtant le budget de la culture est préservé, pour Alexis Mazade cela traduit une volonté politique. Tremblay-en-France est gérée depuis 1935 par des élues communistes ou affiliés au PCF. La ville est un des derniers bastions de feu la ceinture rouge parisienne, “Il y’a une vraie tradition en Seine-Saint-Denis, dans les villes populaires d’être aux avant-gardes de ce qu’on peut proposer en culture et en art” pour Alexis Mazade lui-même élue sur une liste liée au parti communiste. Cette politique est bien connue et étudiée par des historiens comme Annie Fourcaut. Il s’agit d’émanciper les classes populaires par le biais d’une politique culturelle ambitieuse. Yolaine Jouanneaux a analysé pour nous cet héritage historique, “Cette vision de l’homme et de la société qui doit être nourrie par la connaissance pour s’émanciper. C’est vrai ça fait partie de l’ADN du PCF”.
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