Tumgik
#L'Ex-femme de ma vie
quietparanoiac · 2 years
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Josiane Balasko as Marie-Pierre Sarrazin in L'Ex-femme de ma vie (2005)
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sh0esuke · 1 year
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“ Always and Forever “
𝗠𝗲𝘁 𝗲𝗻 𝘀𝗰𝗲̀𝗻𝗲 : Miguel O’hara
𝗥𝗲́𝘀𝘂𝗺𝗲́ : Miguel O'hara, autrement connu sous le nom de 'SpiderMan 2099' l'avait découvert par lui-même : jouer avec le canon ᅳmodifier la réalitéᅳ, ça n'était pas sans conséquence. Il s'en était mordu les doigts. Il s'en était voulu d'avoir poursuivi une vie qui ne lui appartenait pas, aveuglé par son désir d'échapper au destin, de mettre la main sur une vie où ses malheurs, ses responsabilités, n'avaient plus d'importance si cela signifiait être heureux. Une vie où, lui et la fille de ses rêves, étaient restés ensemble, et avaient eu cette adorable petite fille qu'il revoyait sous la forme de rêves. Avant que ceux-ci ne se transforment en cauchemar. Lyla le savait, Miguel n'allait pas bien. Petit à petit, il se détruisait. Voilà pourquoi elle fit appel à la seule personne capable de leur rendre leur véritable SpiderMan. L'ex femme de Miguel, autrement connue sous le surnom de : le seul et unique amour de sa vie.
𝗔𝘃𝗲𝗿𝘁𝗶𝘀𝘀𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁 : exes to lovers.
ENG : PLEASE DO NOT STEAL MY WORKS. If you want to translate it, ask me first then we can talk about it. If you want to find me on Wattpad or AO3, my accounts are in my bio, these are the ONLY ONES i have.
FR : MERCI DE NE PAS VOLER MES OS. Si vous avez envie de les traduire, merci de me demander la permission avant. Si vous voulez me retrouver sur Wattpad ou AO3, j'ai des liens dans ma bio, ce sont mes SEULS comptes
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À ma droite, des SpiderMen. À ma gauche, des SpiderMen. En haut, des SpiderMen ! Et en bas, devinez quoi.. Des SpiderMen ! Il y en avait partout, des hommes, femmes, enfants et créatures en costume, imitant notre SpiderMan à nous, des araignées dans tous les coins, discutant autour d'une tasse de thé et petits biscuits comme si c'était habituel, comme si ça ne venait pas de bousculer mon entière existence. Je n'arrivais même pas à marcher convenablement. C'était absurde. Je me retournais sur le passage de nombreux super-héros. Il me dévisageait, et je les dévisageais en retour.
La Spider-Society, qu'est-ce que c'était que ce délire ?
« Je vérifie à droite, je vérifie à gauche ! »
En mettant les pieds ici, voire avant même d'y avoir pénétré, l'on m'avait prévenue, cet endroit se nommait la Spider-Society. Au départ, j'avais pensé à une entreprise spécialisée dans la protection de SpiderMan, il était après tout un super héros, un trésor national. Je ne m'étais pas attendue à voir un bâtiment sans dessus ni dessous, fourmillant d'hommes, femmes et créatures en costume d'araignée. Loin de là. Et je m'étais encore moins attendue à tomber dans le vide, parce que ces idiots s'étaient amusés avec la gravité.
« Je sécurise en haut, et puis en bas... Et de nouveau sur ma gauche, moment de surprise ! »
Scarlet Spider.
Il me tenait la main. Qu'il était gentil, curieusement habillée certes ᅳd'une tenue moulante rouge et un sweat bleu aux manches déchirées sur le torseᅳ mais terriblement gentil. C'était lui qui, lorsque j'étais tombée dans le vide, m'avait rattrapée. Collant sa toile d'araignée à ma poitrine, il m'avait attirée à lui, dans ses immenses bras musclés, et m'avait ainsi évité une mort certaine. En lui montrant mon 'invitation' son expression dubitative s'était transformée en illumination et il m'avait entraînée ici.
Il y avait des ponts dans tous les sens, empruntés par des SpiderMen. Nous, nous avancions sur un long presque interminable. Il se tenait au centre de la pièce, à l'endroit ᅳj'osais espérerᅳ mais j'étais reconnaissante envers Scarlet Spider car il ne lâchait pas ma main, en vue des battements effrénés de mon cœur et de ma respiration haletante, il avait dû remarquer que je me sentirai mieux ainsi. Ce qui était le cas. Je m'accrochais férocement à celle-ci. C'était dur à dire, je ne saurais savoir de combien de mètres j'avais chuté. J'avais juste voulu emprunter l'ascenseur, mais à la place j'avais frôlé la mort. J'en avais les jambes qui tremblaient encore. Et tout ce monde autour de moi... Je sentais des paires d'yeux plantées dans mon dos, j'étais dévisagée, foudroyée du regard et analysée sous tous les angles. Ils le savaient aussi bien que moi : ma place n'était pas ici.
Car, après tout, je n'étais pas un super-héros.
« Entrée en vue, dernière vérification ! Pose mémorable en cours et... Pose ! »
Un gentil rire me quittait à la vue de Scarlet Spider. Le torse bombé et sa main libre se balançant durement dans les airs, il marchait. Ses propos me firent lever les yeux après un instant, j'ignorais la montagne de SpiderMen perchée au dessus de moi ᅳj'en aurais pleuréᅳ pour effectivement remarquer que nous arrivions à un curieux endroit. C'était en intérieur, beaucoup plus sombre que là où nous étions, ça c'était sûr. Cela me forçait à déglutir.
« Euhm. Monsieur Scarlet, vous êtes sûr d'aller au bon endroit ? »
L'héros se tournait dans ma direction.
« Bien sûr ! Je ne me trompe jamais ! Ayez confiance, rayonnante citoyenne, je saurais vous amener à destination en un seul morceau. »
Mes yeux s'ouvraient en grand.
« En un seul quoi !? »
Mais pas le temps de me répondre, il me tirait en avant et nous faisait entrer si vite dans la pièce que je manquais d'en trébucher. Je poussais un cri aiguë.
« Seigneur. »
Scarlet Spider continuait à marcher. Fièrement, il me guidait à une pièce des plus curieuse. Je tournais la tête dans tous les sens, horrifiée à la vue d'hommes, femmes et créatures emprisonnés. C'était... C'était inimaginable. Tous ces gens étaient entassés les uns sur les autres, ils étaient entourés d'une curieuse lumière orangée sans rien avec eux, juste de quoi s'asseoir ou assez de place pour ne pas étouffer. J'en reconnaissais certains. Ils avaient l'air d'être des pâles copies des vilains de notre monde : des rhinocéros, des bouffons verts, des vautours. Quelques femmes et animaux étaient présents aussi.
« Excusez-moi, monsieur Scarlet. » je murmurais. « Qui sont tous ces gens ? »
Le curieux SpiderMan me jetait un coup d'œil.
« Oh, eh bien, ce sont des viᅳ »
Mon regard croisait celui d'une prisonnière et la voix de Scarlet Spider me semblait soudain lointaine. À sa vue, mes sourcils se fronçaient, ma bouche s'entrouvait. Elle reposait juste à ma droite, devant le reste des prisonniers entassés derrière elle, assise sur une caisse de bois à tortiller une vieille photo entre ses doigts. Mon cœur se serrait.
« Toi.. »
Ma main se libérait de Scarlet Spider. Avec un grand empressement, je me rapprochais d'elle et plaquais les paumes de mes mains contre sa prison. Je la touchais, comme si j'avais su qu'elle n'était pas électrifiée, comme si je savais qu'elle n'allait pas me rejeter, et ce geste attirait l'attention de la personne à l'intérieur.
« Tien donc. »
« Comment... Comment est-ce possible ? »
Un sourire méconnaissable se dessinait sur ses lèvres, je la voyais ranger la photo dans son curieux costume et se lever. Mon cœur battait à tout rompre. Elle se rapprochait de moi, de peu, sachant que sa prison était minuscule. Si proche, j'avais l'impression de sentir son souffle sur ma peau. Ou alors c'était le mien. Je n'en savais rien. J'étais... Elle était...
Elle était moi.
« Bizarre, hein ? »
Je clignais des yeux.
« Qui es-tu ? Qu'est-ce que c'est que tout ça ? »
Elle arquait un sourcil.
« Oh. Alors tu n'es pas au courant ? Tu viens de ce monde ? »
« C'est quel genre de question, bien sûr que je suis de ce monde ! Et toi, tu vas me dire qui tu es ? »
Je la regardais pointer du doigt son visage, dans de doux gestes circulaires.
« Ça m'a l'air évident, non ? Je suis toi. » riait-elle. « Ou plutôt, tu es moi. »
« Qu'est-ce queᅳ »
La voix de Scarlet Spider me coupait.
« Veuve Noire, on t'a pourtant prévenue ! Tu n'as pas le droit d'interagir avec le monde extérieur, attends qu'on te ramène chez toi ! »
Je sentais une ferme paire de mains m'attraper par les épaules.
« Attends ! »
Mais il me tirait déjà hors d'ici.
« Veuve Noire ? » répétais-je en me débattant. « D'où vient ce nom ? Pourquoi je suis dans cette prison ? Hein !? Qu'est-ce qui va m'arriver !? »
Scarlet Spider arrêtait de me tirer tant je me débattais. Je n'en pouvais plus. Entre cette mystérieuse invitation, ma terrible chute, tous ces héros masqués et finalement ça, c'était à peine si je pouvais en supporter plus. Ils me devaient une explication. Je repoussais Scarlet Spider et faisais volte-face dans sa direction.
« Madame, il faut avancer. »
« Qu'est-ce que je fais dans cette prison. » j'insistais. « Répondez. »
« Tu veux une réponse, ma jolie ? »
C'était moi ᅳelle ?ᅳ qui avait parlé. Elle qui, à deux mètres de moi, m'avait de nouveau interpellée et titillé ma curiosité.
« Oui. »
Malgré la tentative du héros masqué de m'empêcher d'y retourner, je me rapprochais de la prisonnière. Je déglutissais à sa vue. Quelques blessures ici et là, mais elle était bel et bien moi.
« Qu'est-ce que je fais dedans ? » la questionnais-je.
« C'est simple, pourtant. » elle répliquait. « On ne vient pas du même monde. »
Je tiltais sans attendre.
« D'où les SpiderMen à l'extérieur. »
« Bingo. »
Mon alter-ego souriait.
Soudainement, je la voyais extirper un bout de papier de son costume et le plaquer contre sa prison, juste sous mes yeux. C'était une petite photo. C'était la même que je l'avais vu tortiller entre ses doigts quelques minutes auparavant.
« Miguel est là, n'est-ce pas ? »
Je relevais mes yeux dans les siens.
« Oui. »
« Et vous êtes mariés ? »
Je levais une main pour lui montrer mon annulaire nu et l'expression de son visage se froissait.
« Plus maintenant. » elle constatait.
« On a divorcé il y a un an, à peu près. »
Ma précision la faisait grincer des dents.
« Et... Et toi ? »
Ça me paraissait bizarre. Me faire la conversation, demander des nouvelles de son monde, comme si je n'étais pas en train de me parler à moi-même ᅳdu moins une version de moi-même. Je la voyais grincer des dents. Un éclat sombre voilait son regard.
« Regarde moi. »
« Je te regarde. »
Elle grognait.
« Non. Regarde moi. »
Elle faisait glisser la photo devant son visage, elle me bloquait la vue. Je ne voyais plus que ce morceau de papier, il était vieux, déchiré à quelques endroits, le temps, les larmes et la colère l'avaient froissé. À cause de sa prison, j'avais du mal à comprendre ce que je regardais, cependant, j'arrivais à reconnaître deux visages, plus un troisième qui m'était inconnu.
Je relevais mes yeux.
« C'est moi. »
« Non, c'est moi. » répondait mon alter-ego.
« Miguel est là aussi. Je... Enfin, toi, tu es toujours avec lui, dans ton monde ? »
Elle étouffait un rire.
« Regarde moi, ma belle. »
Ses bras s'ouvraient et son regard se durcissait, la photo était tombée.
« J'ai l'air d'avoir mon Miguel ? »
Je ne comprenais pas.
« Regarde moi. Regarde moi ! »
Son hurlement m'avait fait sursauter.
« Miguel est mort, notre fille a été assassinée ! Il ne me reste plus rien ! »
Ses paumes de mains se plaquaient contre sa prison et elle se mettait à la frapper de toute ses forces. Elle frappait avec rage. Je sentais son envie de me faire la peau d'ici. La façon dont elle me regardait... J'en avais des sueurs froides. Son brusque changement de comportement m'avait fait hoqueter.
« N'ose pas te comparer à moi, espèce de sale grognasse. Moi, moi, j'ai tout perdu ! » hurlait-elle. « Toi tu n'es qu'une version pourrie gâtée de moi, tu as tout sous la main et tu snobes ce qui t'entoure ! »
Les mots me manquaient.
Sa peine et rage me coupaient le souffle. J'avais honnêtement peur qu'elle parvienne à se libérer et me tue. Je le sentais d'ici. Je le sentais, son désir de m'arracher la peau et de se vêtir avec.
« Madame, il faut y aller. »
Scarlet Spider avait attrapé ma main.
Il essayait d'attirer mon attention, j'en étais consciente, cependant, j'étais incapable de détacher mon regard d'elle. La façon dont elle hurlait, frappait et parlait, j'en avais la chair de poule. Tout le monde nous regardait, tous les prisonniers, toutes les versions, les alternatives et les SpiderMen qui passaient par là, faisaient des analyses. Ils étaient enfermés, loin de moi, mais leur regard me donnaient l'impression de me faire poignarder. Et les cris de mon alter-ego... Ils n'arrêtaient pas.
« Je.. Je ne comprends pas ? »
Scarlet Spider me tirait finalement hors d'ici.
« Je suis désolé, je n'aurais pas dû vous laisser avec elle, j'aurais dû me rendre compte que ça vous choquerait. »
Le ton sérieux qu'il empruntait me forçait à baisser la tête en direction de mes pieds. Soudainement, mes sabots à talons semblaient terriblement intéressants, de même pour mon pantalon taille basse à pattes d'éléphant, ils attiraient tous les deux mon attention. Je refusais de regarder autre chose. J'en avais assez avec les hurlements de mon alter-ego. J'avais envie de pleurer.
« C'est le Spider-Verse. »
Je le dévisageais.
« Le patron l'expliquera sûrement mieux que moi, mais je peux essayer d'éclairer votre lanterne. C'est mon rôle d'héros, après tout ! »
Je hochais la tête.
« Merci, Scarlet Spider. »
« Il y a une infinité de dimensions qui existent. Avec des versions différentes de vous et moi, d'où les SpiderMen que vous avez vu, ils sont des versions de moi, et je suis une version d'eux. »
« Donc il y a aussi des versions de nous ? Nous tous ? »
« C'est ça. »
Sa main serrait la mienne.
« Sauf que dans certaines dimensions, des personnes qui sont mortes ici sont vivantes ailleurs, et d'autres qui sont vivantes ici sont mortes ailleurs. »
« Je vois. » je murmurais. « C'est pour ça que cette version de moi était enragée. »
Scarlet Spider acquiesçait.
« Dans son monde, le boss a été tué par le Vautour, leur fille aussi. La boss a essayé de la sauver mais le Vautour les a transpercés alors qu'il la protégeait. »
J'en avais mal au cœur. C'était... C'était horrible. J'avais des vertiges. Miguel, mort ? Rien que d'y penser j'avais envie de vomir, ma gorge me faisait mal.
« Ils sont morts tous les deux. »
La suite était facile à imaginer. Mon alter-ego avait sûrement perdu la tête et avait cherché vengeance. J'osais dire que c'était facile parce que, en y repensant, je pense que j'aurais fait la même chose à sa place, j'aurais traqué cet enfoiré et je lui aurais fait regretter d'être sorti du ventre de sa mère. Je lui aurais fait regretter d'avoir enfilé son fichu costume et je lui aurais infligé les tortures les plus viles au monde. Je ne pouvais pas m'imaginer perdre Miguel. J'avais déjà mal rien qu'à le penser mort, alors je me savais incapable de comprendre la tristesse qui la traversait. Elle devait tant souffrir.
« Est-ce que... Est-ce que Miguel va bien ? »
Scarlet Spider me regardait curieusement.
« Le boss va super, madame. Je crois savoir de qui provient cette invitation, et je doute qu'il veuille vous voir, mais je peux pas refuser d'aider une citoyenne en détresse. »
Un rire m'échappait.
« En détresse ? »
« Oui m'dame ! Et c'est mon devoir de vous aider ! »
Je roulais gentiment des yeux. Peu de temps après, j'extirpais un bout de papier dans la poche arrière de mon pantalon, il était assez petit pour que je le lise d'une main. Après tout, l'autre était toujours accrochée à celle de Scarlet Spider, et je me voyais mal l'abandonner.
« Alors, cette invitation n'était pas une mauvaise blague. » songeais-je.
« Madame Lyla ne mentirait pas. » il me répondait. « Je pense que le boss va bien, mais si elle dit le contraire, je lui fais confiance. »
J'arquais un sourcil.
« Lyla ? »
« Oui ! C'est l'assistante du boss. »
« Tien donc... »
Miguel avait une assistante ? J'aurais aimé dire que ça me surprenait, mais je n'étais pas d'humeur à mentir. Elle était sûrement jeune, une jolie belle blonde toute timide et innocente qui savait bien lui préparer son café et lui faire oublier tous ses problèmes. Rien qu'à y penser, je grinçais des dents. J'étais verte de jalousie. Rouge de rage.
Je ne regardais même plus ce qui nous entourait. Une assistante..? J'ignorais toute cette ferraille, tous ces ordinateurs, les curieux bracelets qui traînaient sur des tables et l'obscurité qui commençait à nous engloutir alors que Scarlet Spider me guidait à l'intérieur d'un étrange couloir. J'avais mal au cœur. L'envie de faire demi-tour et de m'enfermer à la maison se faisait toujours un peu plus forte, j'avais du mal à y résister. Je me sentais bête. Après tout ce temps, tous ces mois... Revenir auprès de Miguel me semblait soudainement stupide. Il avait l'air de s'en sortir, il bossait auprès de SpiderMen, avait une assistante et ne m'avait pas appelée depuis le tribunal. C'était comme si il avait tourné la page sur notre histoire. Alors que moi...
« Nous y voilà. Mission réussie, c'est encore un succès pour Scarlet Spider ! »
C'était... C'était immense.
L'endroit était gigantesque.
Je peinais à en croire mes yeux, la pièce s'étendait à perte de vue, que ce soit en haut, en bas, sur les côtés ou devant moi. J'avais l'impression qu'elle était interminable. L'était-elle ? Je m'avançais. J'abandonnais la main de Scarlet Spider et je marchais. Au centre, se trouvait une plate-forme, elle était située si haut dans les airs que je ne parvenais pas à voir ce qu'il y avait dessus. Autour, c'était le néant, l'obscurité. Des espèces de piques entouraient l'endroit, elles étaient grandes et longues, je n'en voyais pas la fin en levant la tête.
« Qu'est-ce que c'est que cet endroit ? »
Scarlet Spider me rejoignait.
« Je vais vous laissez, madame. Mais n'ayez crainte. »
Je faisais volte-face. Me laisser ici, seule ? Mais il était fou !
« Non, attendez ! Vous n'allez tout de même pas me laisser ici ? C'est de la folie ! »
Le héros ne me répondait pas. Il me fixait à travers son masque, de ses grands yeux blancs inexpressifs. J'avais peur. Je ne savais pas où j'étais. Je ne voyais même pas Miguel. Et si c'était un piège ? Et si je mourrais ?
« Vous n'êtes pas seule. »
Je me figeais.
« Pardon ? »
Scarlet Spider soupirait. Il se reculait de quelques pas avant de faire totalement demi-tour. Il n'avait rien dit de plus, il me laissait en plan comme ça, sans même m'expliquer ce qui allait m'arriver. Je sentais mes mains recommencer à trembler. Tout était si peu familier ici. Et puis je... Je ne savais pas où était Miguel. J'étais supposée le retrouver, m'assurer qu'il aille bien mais je n'avais pas vu la moindre trace de lui depuis que j'étais arrivée.
« C'est pas vrai ! »
J'extirpais violemment mon portable de ma veste courte à manches, le cuir grinçait sur mon passage, je l'allumais et m'en allais pianoter dessus. Qu'est-ce que je cherchais ? Je n'en savais rien. Je pouvais appeler à l'aide, mais pour dire quoi ? Personne ne me croirait. Ou peut-être... Le contact de Miguel me titillait. Peut-être que l'appeler et lui demander de l'aide serait une bonne idée ? Après tout, c'était de sa faute si je me retrouvais ici. Cet endroit me donnait la chair de poule. Rien qu'à y penser, je me sentais forcée d'allumer la torche de mon portable et de tout examiner. Autant savoir où je me trouvais avant de mourir... J'oubliais d'appeler Miguel, j'étais plus préoccupée par le désir de faire la lumière sur toute cette situation. Sauf que, l'instant même où je me retournais, j'entrais en contact avec quelque chose.
« Mierda ! »
C'était quelqu'un.
La silhouette devant moi était géante, elle reculait, ses mains devant son visage pendant que je voyais mon portable s'éclater la face la première contre le sol. C'était avec impuissance que je le regardais. Il était allongé sur le ventre, le flash faisait ainsi face au plafond et, ainsi, cela lui permettait d'éclairer un peu mieux la pièce.
« Fais chier ! »
Mon sac à main tombait de mon épaule. Il encontrait le sol dans un bruit sourd.
Je le jurais, je connaissais cette voix.
« Miᅳ Miguel ? Miguel, c'est toi ? »
La silhouette retirait ses mains de son visage. Il se dévoilait à moi, il me montrait sa chevelure brune, les traits rugueux de son visage, ses splendides lèvres pulpeuses et ses fiers sourcils épais. C'était lui. Je n'arrivais pas à y croire. Miguel me faisait face, il était bel et bien là. Derrière lui, se trouvait la curieuse plateforme, elle était totalement descendue, dévoilant ainsi une panoplie d'ordinateurs et de claviers.
« Tu vas bien ? »
Je m'approchais de Miguel, le flash l'avait sérieusement blessé, c'était étrange.
« Mierda, ça a l'air d'aller !? » il répliquait en se massant les yeux. « Quelle idée de me foutre ton flash dans lesᅳ »
« Ça va, ça va. J'ai compris. » le coupais-je. « Je suis désolée. Viens avec moi, allons nous asseoir. »
Juste devant la plateforme, se trouvaient des escaliers. J'y accompagnais Miguel, pleine de remords et d'embarras. Je le faisais s'accrocher à mon bras, ignorant mon portable au sol ou le sentiment de surprise qui persistait à faire pétiller mon cœur. Miguel marchait doucement. Il ne voyait plus rien. Il grognait à répétition et poussait de fines plaintes.
« Je suis vraiment désolée. Je m'attendais pas à te voir. »
« Tu parles. »
Une fois assis, il me dévisageait.
« Qu'est-ce que tu fais ici, d'ailleurs ? » il s'exclamait. « C'est une société privée, elle est interdite auᅳ »
Me voyant faire gigoter un petit bout de papier sous ses yeux, Miguel s'arrêtait. C'était cette curieuse invitation que sa dite assistante m'avait envoyé, je la lui offrais sur un plateau d'argent, toute aussi curieuse que lui de comprendre toute cette situation. Et je ne parlais pas que ce lui, je parlais aussi du costume qu'il portait.
« Tu es SpiderMan ? »
Ses yeux s'ouvraient en grand.
« ¿ De qué estás hablando ? » je l'entendais jurer.
Miguel m'arrachait le papier des doigts. Il refusait de me répondre, l'expression très sévère. Ça ne m'étonnait pas. Miguel était quelqu'un de froid, trop professionnel parfois, même avec ceux qu'il aimait. Son corps était de profil alors que moi, même assise, j'étais tournée face à lui, je le regardais avec grande attention, extrêmement confuse. Je ne savais pas trop par quoi commencer. Le questionner sur cette Lyla, sur son costume, sur son état mental ou sur cette moi emprisonnée à quelques mètres de là ?
Je ne parlais pas en le voyant se lever.
« Lyla. »
Miguel broyait le morceau de papier dans son poing.
« Lyla ! »
Il était vraiment en colère. Miguel se tenait dos à moi, je ne parvenais plus à voir son visage, il regardait partout sauf dans ma direction. Je restais recroquevillée dans mon coin, je me sentais soudain de trop. Mon apparition n'était pas vue d'un bon œil, c'était évident. Qu'est-ce que cette Lyla avait espéré en m'envoyant ce message ? Miguel et moi étions séparés, c'était à peine si nous arrivions à nous entendre, j'en étais couverte de honte.
Soudainement, j'apercevais une lumière scintiller par dessus l'épaule de Miguel. Je clignais des yeux. Je les rouvrais à répétition. Croyant rêver, je peinais à croire que, face à moi, par dessus l'épaule de Miguel, se trouvait une minuscule jeune femme. Elle était entièrement jaune.
« Miguel ? Je peux t'aiᅳ Oh. »
La créature m'avait immédiatement remarquée.
« Tu es venue ! »
« Lyla, reviens ici ! »
Trop tard, elle s'était jetée sur moi.
« Je savais que tu ne dirais pas non ! Merci beaucoup ! »
Ses mains se plaçaient sur mon menton, elle me serrait contre elle. Miguel grognait. Je le dévisageais avec horreur pendant qu'il se pinçait l'arête de son nez, les yeux clos. Lyla était un hologramme, c'était évident parce que je n'arrivais pas à la sentir.
« Miguel, qu'est-ce qui se passe ? »
Il soufflait.
« J'en sais rien. » il avouait sans me regarder.
« Comment ça t'en sais rien ? C'est une blague, c'est ça ? »
Il était sur le point de me répondre, visiblement frustré, mais Lyla se jetait entre nous deux, juste sous mon nez. Qu'elle était adorable avec ses lunettes et son bob. Elle faisait à peu près la taille de ma main.
« C'est moi la responsable. » nous coupait-elle. « C'est moi qui t'as demandé de venir ici. »
« Oh, vraiment ? »
Je la cueillais, Lyla prenait place sur les paumes de mes mains pendant que je les déposais sur mes cuisses. Elle parlait un peu plus doucement, certainement par honte.
« Lyla, tu avais interdiction de la contacter. Je t'ai déjà dit queᅳ »
« Je sais. Mais c'était urgent. »
Miguel et moi arquions un sourcil. Je le voyais déposer ses mains sur ses hanches. C'était avec déception qu'il toisait son assistante. Elle m'avait contactée sans son ordre, je trouvais ça très étrange. Depuis quand les intelligences artificielles étaient dotées de volonté ?
« À cause des failles dans le Spider-Verse, la Veuve Noire s'est échappée de son monde et j'ai vu l'effet que ça t'a fait. »
J'arquais un sourcil.
« La Veuve Noire... Vous voulez dire la vilaine emprisonnée devant ? Celle qui me ressemble ? »
Miguel faisait volte-face.
« Tu l'as vue ? »
« Je l'ai croisée. » avouais-je. « Je n'ai pas tout bien compris, mais je sais qu'elle m'en veut. »
La façon dont il grimaçait ne me rassurait pas.
« Joder. Por el amor de Dios... »
« Miguel, il faut que tu m'expliques. »
Il me foudroyait du regard.
« T'expliquer quoi ? Tu n'es pas de ce monde, tu es une citoyenne, je peux pas me permettre de te mettre en danger. »
Lyla attirait mon attention.
« Ahem. »
L'intelligence artificielle me souriait.
« Miguel ne se sent pas lui-même en ce moment, j'ai jugé nécessaire de te contacter parce qu'il refuse de m'en parler. Mais toi, tu es son amie, après tout. »
Une question me démangeait. J'avais encore un peu de mal à tout comprendre.
« Il existe plusieurs mondes ? »
Elle hochait la tête.
« Et donc.. Dans l'un d'entre-eux je suis mariée à Miguel, je le perds, lui et notre fille ? Et je me transforme en cette version maléfique ? »
« C'est pas tout à fait ça. » marmonnait Miguel. « Mais si tu veux, oui. »
« On a eu une fille, alors ? »
C'était idiot, je n'aurais pas dû sourire autant, Miguel et moi n'étions plus. Cela faisait bien des mois, j'avais presque commencé à m'y faire. Malgré tout, la simple pensée que, dans un autre univers, notre mariage avait survécu, que je l'avais aimé à en tuer et à en devenir folle, me faisait énormément d'effet. J'en souriais bêtement. J'avais des papillons dans l'estomac.
« Pas vraiment non. »
Miguel soufflait. Lyla me répondait à sa place.
« Ce sont des versions de vous. » parlait-elle. « Et cette version de toi, la Veuve Noire, est venue en ce monde dans le but de prendre ta place. Miguel l'a capturée à temps et, même si il ne voudra jamais l'admettre, il se faisait un sang d'encre pour toi. »
« Elle est venue dans notre monde ? Ça veut dire qu'on peut voyager entre les dimensions ? »
« Normalement, non. Mais il y a une faille, une anomalie. » elle répliquait.
« D'accord. »
Je relevais mes yeux dans ceux de Miguel, il me fixait déjà. L'expression de son visage était toujours aussi sévère, j'y trouvais cependant une pointe de douceur, comme à chaque fois qu'il posait son regard sur moi. J'esquissais un petit sourire timide. Malgré les années écoulées, malgré le temps passé à ses côtés, je n'avais jamais réussi à me faire à la façon dont il me regardait. Miguel était énigmatique. Pas spécialement mystérieux, mais très réservé, difficile à déchiffrer. Et la manière dont il me dévisageait me faisait de l'effet. Il avait des yeux sombres, des yeux qui en disaient long sur ce qu'il avait vu et vécu, ça a avait toujours eu un effet charmeur sur moi. Il lui suffisait d'un coup d'œil, et Miguel me savait dans la poche.
« J'ai eu... »
Il soufflait.
« J'ai eu peur qu'il te soit arrivé quelque chose. »
Son aveu me forçait à sourire. Encore.
« Tu aurais pu m'appeler, tu sais ? »
« Pour te dire quoi ? »
Miguel faisait un rapide geste des mains, désignant son costume. Ensuite, il passait sa main dans ses cheveux, il se frottait le cuir chevelu, la mine renfrognée.
« Comment j'aurais pu t'expliquer tout ça sans passer pour un taré ? »
« Alors, tu es vraiment SpiderMan ? »
Il grimaçait.
« Je suis le SpiderMan de ce monde. »
J'en avais la gorge serrée. Me dire que, depuis tout ce temps, il s'était mis en danger et m'avait menti... J'avais encore du mal à y croire.
« Wow... Alors, toutes ces fois où tu disparaissais, tous ces lapins que tu m'as posé, c'était parce que tu te battais en petite tenue avec des monstres ? »
Il roulait des yeux.
« On peut dire ça, ouais. »
J'aurais voulu réagir avec plus de recul, lui montrer mon soutien et lui dire que je ne lui en voulais pas, je l'aimais trop pour ça. Mais c'était impossible. J'avais beau comprendre qu'il regrettait, qu'il culpabilisait, j'étais incapable de faire preuve d'empathie. Miguel m'avait menti. Pire : il ne m'avait pas fait confiance. Depuis tout ce temps, il m'avait vue me faire un sang d'encre pour lui, nous nous étions tant de fois disputés parce que j'avais suspecté qu'il me trompe, je l'avais tant de fois pensé infidèle... Tout ça pour qu'il m'avoue être un super-héros.
J'entendais mon cœur se briser. Je le sentais s'émietter.
« Tu me l'as pas dit. »
Ma réponse semblait le surprendre, ses yeux s'ouvraient en grand.
« C'est tout ce que t'as à dire ? Tu t'énerves pas ? »
« Je sais plus quoi penser, Miguel. »
Heureusement que j'étais assise, autrement, j'aurais chuté depuis longtemps.
« Je me sens bête. Je me sens trahie. » lui confiais-je.
« Te le dire n'aurais fait que compliquer les choses. Je ne voulais pas te mettre en danger. »
« Je comprends. »
Il fronçait les sourcils.
« Quoi ? » je demandais.
« C'est ta seule réaction ? »
« Tu aimerais que je te hurle dessus, peut-être ? Désolée, j'ai passé l'âge. »
L'hologramme de Lyla avait disparu depuis peu, son aura jaunâtre s'était volatilisée, me permettant ainsi de me lever. Je tapotais le derrière de mon pantalon, assez inconfortable, et me pinçais les lèvres sans même être apte à conserver mon regard dans celui de mon ex-mari. Miguel lui ne cessait de me fixer. Je sentais la lourdeur de son regard sur mon corps.
« Je voulais te le dire. » il m'avouait finalement. « Je compte plus les fois où, en te voyant endormie sur le canapé tard le soir, j'ai voulu te réveiller et tout t'expliquer. » poursuivait-il. « Ça ma rongé de l'intérieur. »
« Tu me l'aurais dit ? »
Miguel me questionnait du regard.
« ¿Qué ? »
« Si Lyla ne m'avait pas appelée, si je n'étais jamais venue, est-ce que tu aurais fini par me le dire ? Que tu étais Spiderman. »
Il ne répondait pas. Miguel tournait la tête sur le côté, il jouait avec sa bouche, je le voyais mâchouiller l'intérieur de sa joue. Son silence en disait long. À vrai dire, je ne savais même pas pourquoi je lui avais posé cette question, c'était pourtant évident. Miguel avait laissé notre mariage s'effondrer parce qu'il avait refusé de se confier à moi. Il avait détruit tout ce que nous avions construit et était allé de l'avant pendant que, de mon côté, j'avais continué à me demander pendant tout ce temps ce qui s'était mal passé pour que notre histoire se termine ainsi. J'avais envie de pleurer. Plus je le regardais et plus je me sentais en colère, j'avais envie de hurler. J'avais envie de le frapper, de l'insulter, de lui faire regretter tout ce qu'il m'avait fait vivre. Mais, à la place, je me contentais de le fixer. Car, au fond, je n'avais même plus les mots. J'étais hébétée, complètement brisée.
« Je... »
Je le stoppais en levant la paume de ma main.
« Pas la peine. »
Miguel grognait, il se frottait la nuque.
« Divorcer était une bonne idée, au final. Je peux plus te supporter, Miguel. Tu es bien trop égoïste, ça n'aurait jamais pu marcher entre nous deux. »
Je le voyais arquer un sourcil.
« J'ai du mal à te suivre. » il déclarait. « Tu aurais voulu que je te dise la vérité ou non ? »
« Ça ne sert à rien de s'attarder sur ça. Ça n'a plus d'importance. »
Miguel s'était construit une toute autre vie ici, une vie à laquelle j'étais inconnue. Entre technologie, amis, mondes parallèles, héros et monstres, ça faisait tâche comparé à une vie avec moi, je comprenais enfin pourquoi il avait tant cherché à me fuir. Être marié à moi devait l'avoir pesé. J'en venais presque à en culpabiliser.
« Ça a de l'importance pour moi. »
Sa réponse me surprenait.
« Vraiment ? Après avoir laissé notre mariage s'effondrer, ça t'intéresse soudainement ? »
Sans surprise, il ne répliquait pas. Il regardait vers le sol, ses deux mains pressées sur ses hanches et l'expression grave. Le fait qu'il n'ose même pas me regarder dans les yeux manquait de me faire voir rouge. Miguel n'était qu'un abruti fini. Une espèce de raclure plein d'amour, trop maladroit pour qu'on le comprenne entièrement, moi-même j'avais du mal à le cerner. Parfois, je pensais qu'il le faisait exprès, alors qu'au fond, il n'était que bêtises et regrets. Que c'était dur de l'aimer...
« Je pense que je serai restée. »
Je me pinçais les lèvres, regrettant immédiatement d'avoir parlé. Je rapportais une mèche de mes cheveux derrière mon oreille, bien trop nerveuse pour affronter l'expression sur son regard, je préférais regarder mes pieds vêtus de mes sabots. C'était une grosse confession, j'avais peur qu'il ne la prenne trop à cœur.
« Je t'aime tellement, j'aurai ignoré ma propre vie et ma propre santé pour t'épauler. À un certain point, je pense même que j'aurai pu te demander de venir travailler, ici, avec toi. »
Miguel serrait la mâchoire. Je le voyais, son nez se retroussait et un éclat familier scintillait dans ses beaux yeux sombres.
« No estoy sorprendido. » l'entendais-je marmonner.
Un rire sec me quittait.
« Évidement que ça ne t'étonne pas. »
Je levais deux doigts en l'air tout en rangeant mon autre main dans la poche arrière de mon pantalon taille basse.
« De nous deux, j'ai toujours été celle la plus amoureuse. Tout le monde le sait. »
« Hein ? »
Les yeux de Miguel s'étaient immédiatement redressés dans les miens. Il me regardait avec surprise ce qui, étonnement, ne me fit aucun effet. Il jouait sa dernière carte, feignant de se soucier des années que nous avions passé ensemble, il n'était que ridicule. Il se couvrait de ridicule. Qu'est-ce qu'il pouvait m'énerver...
« Qu'est-ce que tu racontes ? »
Je balayais la discussion sous le tapis d'un geste de la main. Je n'étais plus intéressée.
« Miguel, je pense qu'on va s'arrêter là. J'en ai assez. »
Il avançait, mais mes paroles le forçaient à se stopper.
« Je veux rentrer chez moi. »
C'était avec facilité que je le voyais commencer à paniquer. La bouche de Miguel s'entrouvrait, il cherchait sûrement les mots juste à me susurrer pour me faire rester, mais j'aurais été incapable d'y succomber, j'étais convaincue d'être à présent immunisée à ses belles paroles. J'en avais trop entendu. J'en avais trop vu. Il m'avait menti, m'avait caché un tout autre monde, juste sous le bout de mon nez. J'étais, pour être honnête, même pas sûre de faire face à l'homme que j'avais autrefois épousé. Le Miguel que j'avais aimé était méconnaissable, ça m'enrageait.
« Aᅳ Attends. On peut pas s'expliquer ? »
Miguel cherchait à s'approcher de moi, cependant, je le contournais. Je m'en allais récupérer mon sac à main et mon portable, une fois mes affaires rangées, je faisais volte-face dans sa direction.
« Ça fait longtemps que tu as fait ton choix. »
Mon regard se durcissait.
« Je n'ai pas ma place dans ta vie, Miguel. Tu le sais aussi bien que moi. »
« Tu peux pas t'en aller comme ça. »
« Regarde moi faire. »
Je tournais les talons et commençais à sortir de cette étrange pièce. Devant moi, se dressait le couloir par lequel Scarlet Spider m'avait guidée. Je n'étais même pas sûre de pouvoir l'emprunter sans me perdre, mais je préférais m'en aller par là plutôt que de faire de nouveau face à Miguel. J'aurais préféré n'importe quoi à lui, en cet instant.
Je me sentais humiliée.
Il ne me retenait même pas.
Je sortais de son espèce de QG secret, son bureau, ou la chose par laquelle il l'appelait, je m'en fichais. Je pressais le pas, la gorge serrée et les larmes aux yeux. J'avais tellement mal au cœur, c'en était ridicule. J'avais du mal à marcher, j'avais terriblement envie de me laisser glisser contre un mur et de pleurer, j'avais besoin d'exprimer le sentiment de peine qui me brûlait de l'intérieur. Il me marquait au fer rouge, tout comme l'amour de Miguel l'avait fait par le passé. Tout me faisait mal. Je n'aurais voulu m'arrêter pour rien au monde, j'aurais voulu continuer mon chemin ainsi, ne pas me retourner, le fuir comme la peste et tourner la page. Cependant, je fus retenue. Mais pas par Miguel.
Quelque chose parlait.
C'était la voix d'une enfant, la voix d'une enfant qui appelait sa mère.
La voix me força à me retourner.
« À quoi tu joues, Miguel ? »
Mais il n'avait pas bougé.
Il était là, devant les escaliers de la plateforme, il se tenait droit dans ma direction. Ça n'était pas lui, ça ne pouvait pas être lui. Si..? Je continuai d'entendre cette adorable voix gazouiller dans les moindres recoins de la pièce, elle faisait échos. Mais sa provenance n'était pas mystérieuse. J'avais une petite idée sur la responsable. Je raffermis la prise sur mon sac à main. Mes sourcils se froncèrent, j'étais incapable de bouger. Fuir ? Impossible. Parler ? Encore moins. Cette voix m'était inconnue, jamais de ma vie, je ne l'avais entendue. Néanmoins, elle me creusa un trou dans le cœur. Elle me faisait mal. Elle me faisait énormément de mal.
Et j'avais peur de savoir pourquoi.
« Lyla, c'est ça ? » je demandai. « Arrête. »
Je ne contrôlai plus ma respiration.
« Miguel ? Miguel, fait quelque chose. »
J'avais beau l'appeler, il ne me répondit pas. C'était peine perdue. À quelques mètres de là, Miguel était figé sur place, un grand gaillard comme lui, les yeux écarquillés comme jamais en direction du sol et ses bras tombant le long du corps. Je déglutis. Il avait l'air horrifié. Cette voix ne faisait pas effet qu'à moi, elle le terrifiait.
« S'il vous plaît. Arrêtez. »
Sur la plateforme, je vis l'écran se changer. Il devint noir l'espace d'une seconde, avant de se changer en visages. Trois visages, dont deux familiers. Sans attendre, des larmes me quittèrent.
Je me mis à pleurer.
Je savais que ça n'était pas réel. Ça n'était pas nous, ni Miguel, ni moi, nous n'avions jamais vécu ce moment. Pourtant, ce que je voyais était bel et bien là, sous mes yeux.
Je me voyais sur cet écran, à ses côtés, avec une adorable petite fille écrasée entre nous deux. Qu'elle était belle... Sur la vidéo, elle m'appelait à l'aide, attaquée par une vague de baisers que Miguel lui offrait. Il embrassait sa joue, son menton, sa mâchoire, sa tempe, son crâne, ses épaules, sa gorge, il l'attaquait de tous les côtés avec un immense sourire pendant qu'elle cherchait à s'enfuir, à trouver refuge dans mes bras ce qui, évidement, me faisait rire. Ce n'était pas moi. Ça n'était pas nous. Mais cette fille... Cette petite fille était notre portrait craché, elle nous ressemblait comme deux gouttes d'eau.
« Comment osez-vous... »
Je reniflai. Mes larmes me brouillèrent soudainement la vue. Je ne vis plus rien.
« Comment osez-vous utiliser les souvenirs d'une autre contre moi... C'est monstrueux. »
Et Miguel qui ne bougeait toujours pas, ça me rendait furieuse.
« Ordonne lui d'arrêter. Jeᅳ Je plaisante pas, Miguel. Dis-le lui ! »
C'était infernal. La petite fille continuait de rire, elle était à présent poursuivie par son père dans un joli champ, et mon moi d'un autre monde semblait tenir la caméra, puisque j'entendais mes ᅳsesᅳ rires provenir de derrière. Le paysage était paradisiaque. C'était à la fois si familier et inconnu, comme un souvenir que j'avais perdu. Cette fille n'était pas mienne, malgré tout, à la voir ainsi, je sentais que quelque chose nous reliait. Le simple fait de me dire qu'elle n'était pas de moi, que je ne la rencontrerai jamais me détruisait.
« Lyla. »
Miguel avait parlé.
« Lyla, arrête ça. »
Je séchai mes larmes avec la paume de ma main, l'assistante n'était pas réapparue, mais la vidéo avait enfin été mise sur pause : pile poil sur Miguel et sa fille, enlacés l'un contre l'autre, un grand sourire sur les lèvres et les yeux fermés tant ils étaient submergés par de la joie. Je grimaçai à cette vue.
« Est-ce que... Est-ce que c'est réel ? »
Miguel se frotta le visage d'une main. Je l'entendis pester d'ici.
« Hijo de puta.. Qué mierda... »
« Miguel ? »
Je me rapprochai finalement de lui. Mon sac pendait depuis ma main, il se cogna contre mon genoux pendant que je pressai le pas dans sa direction. Je ne savais pas ce qui me prenait. J'étais supposée le haïr. Cette vidéo m'avait fait un effet fou, à présent, lorsque je regardais Miguel, je ne ressentais plus le besoin de lui hurler dessous, mais de le réconforter et de lui montrer mon soutien. Si Lyla m'avait montré cet extrait et si Miguel avait réagi ainsi uniquement à l'audio, ça signifiait qu'il lui était familier. Combien de fois l'avait-il visionné pour le reconnaître rien qu'aux sons ? Je n'osais pas l'imaginer...
Une fois à sa hauteur, je déposai ma main sur son avant-bras. Penchant la tête sur le côté, je cherchai à croiser son regard.
Je ne savais pas quoi lui dire.
« Est-ce que... Est-ce que ce sont les souvenirs de la moi emprisonnée dans ton QG ? »
Lyla apparut sur son épaule, assise.
« Non. » elle me répondit. « Ce sont les souvenirs d'une autre. »
Miguel leva brusquement sa main droite sur son épaule gauche, il tenta de broyer son assistante dans la paume de sa main, mais son image ne fit que se brouiller et disparaître pour réapparaître de l'autre côté. Avec son mouvement, Miguel eut repoussé ma main. Je l'apportai alors contre moi, je croisai les bras en dessous ma poitrine, un peu gênée. Miguel baissa la tête droite dans ma direction, ses yeux étaient très expressif, j'étais dans l'incapacité de détourner le regard. Nous étions bien trop proches.
« Dans un autre monde, » poursuivit Lyla. « Toi et Miguel vivez heureux. Son ancien boss n'essaie pas de le tuer, il ne t'abandonne pas par peur de te perdre et vous avez une petite fille, bientôt des jumeaux. »
« Je vois. »
L'idée d'avoir des enfants avec lui m'avait toujours plu, même après avoir affirmé pendant des années que je n'en voudrais jamais. La grossesse était quelque chose qui m'avait terrifiée, et ce, depuis gamine. Mais Miguel m'avait donné envie de lui en donner une centaine, voire un millier, j'aurais voulu repeupler la Terre pour ses beaux yeux, j'aurais voulu sacrifier mon corps pour son bonheur, j'aurais voulu tout lui donner si cela aurait signifié rester à ses côtés pour toujours et à jamais.
Alors, oui, j'en crevais de jalousie.
« C'est ridicule. »
Miguel se redressa, le dos bien droit et rejetait à nouveau son assistante.
« Tu avais raison. »
Il me regardait.
« Tu es bien mieux sans moi. » ajouta-t-il sans me laisser le temps de répliquer. « Eux ont peut-être réussi à être heureux, mais, dans notre monde, ça n'est pas le cas. Ça fait longtemps que je m'y suis fait. Je suis désolé de t'avoir mêlée à tout ça. »
« Tu n'as pas l'air d'être convaincu. »
« Parce qu'il ne l'est pas. » affirma Lyla.
Sa voix provenait de mon épaule gauche.
« Lyla. » Miguel la prévint.
« Je fais ce qu'il y a de mieux pour toi. » elle le coupa. « Ça fait des semaines que tu te noies dans le travail pour échapper à la réalité. » affirma-t-elle. « Il faut que tu te l'avoues à toi-même : revoir la Veuve Noire t'as fait de l'effet, parce que tu es toujours amoureux. Ça te ronge, et un patron rongé par les remords, ça ralentit les performances de travail. C'est pas bon. »
Mon corps recula de son propre chef.
« Tu m'aimes encore ? »
Miguel détourna le regard.
« Comme si j'avais pu arrêter ne serait-ce qu'un seul instant... » il jura entre ses dents. « J'arrive pas à croire que tu penses m'aimer plus que je t'aime, j'ai tué pour toi. »
« Hein ? »
Le grognement qu'il lâcha me fit plisser les yeux.
« Rien, oublie. »
Miguel se retourna. Il m'évitait.
« Je sais plus où j'en suis. »
Il se pinçait l'arête du nez.
« Lyla n'aurait jamais dû te demander de venir ici. C'étaitᅳ »
« C'était une erreur ? »
Il se tut.
De là où j'étais, je le regardai. Je tenais à présent les lanières de mon sac de mes deux mains, celui-ci pressé contre mes genoux. Miguel avait fait volte-face à mes propos, surpris par ma question.
Je ne savais pas quoi penser, pour ne pas mentir. Une chose était sûre, je l'aimais. Je l'aimais à en devenir folle, à en sacrifier ma vie sentimentale et tout le reste. Je l'aimais du plus profond de mon cœur et je trouvais ça immonde qu'il ose qualifier ma venue d'erreur. C'était la preuve de mon amour pour lui. Après tout ce temps, je faisais l'effort de revenir vers lui, j'étais passée par tant de sentiments à la fois, pourtant, j'étais encore là, je n'étais pas partie en courant. J'aurais pu, après ma chute, ma rencontre avec mon alter-ego et tout ce foutoir mais non, j'étais encore là. Et, à la regarder ainsi, je jurais être prête à nous donner une deuxième chance. Miguel avait l'air misérable, épuisé par le travail et le chagrin.
Notre divorce ne nous réussissait pas, c'était évident, alors, oui, je ne savais plus quoi en penser.
L'envie de faire le premier pas me rongeait, cependant, la pensée que Miguel n'avait rien fait pour nous éviter le pire me hantait.
Il osait dire qu'il m'aimait davantage, mais il m'avait laissée partir. Sans Lyla, il serait mort sans avoir mis les choses au clair.
Je l'aurai perdu.
« Je te demande d'être honnête, Miguel. »
Je pressai mon index entre mes seins.
« Parce que moi, je vis mal notre séparation. J'en suis malade. »
Miguel déglutit. Toujours dos à moi, il déposa ses mains sur ses hanches, il secoua la tête et traîna du pied, mes propos restaient sans réponse. Des secondes s'écoulèrent. Elles s'écoulèrent jusqu'à se transformer en minutes.
« Miguel, je t'en prie. J'ai pas envie d'avoir fait tout ça pour rien. »
Silence.
« Miguel ? »
Ma voix tremblait.
Je ne le comprenais que maintenant : sa réponse, il venait de me la donner.
C'était son silence.
C'était son dos.
C'était son refus de me répondre.
« Je vois. »
Je secouai la tête, incapable de réagir davantage. C'était tout, c'était tout ce qu'il m'offrait, après tout ce que nous avions traversé, après les aveux qu'il venait de me faire il se rétractait et m'humiliait. J'étais à deux doigts d'en rire. Pathétique, ça l'était. Je finissais par reculer, je me séparai de lui, les sourcils froncés et le cœur émietté au fond de mon estomac. J'en avais la boule au ventre. Miguel soupira.
« Je peux pas. »
Il parlait sans même me regarder dans les yeux, j'en pouffais.
« C'est bien ce que je disais. »
Il tourna la tête pour me jeter un coup d'œil par dessus son épaule, entendre mes reniflements ne suffisait plus, il fallait qu'il voit mes yeux larmoyants et ma lèvre inférieure trembler. Il avait l'air surpris.
« Je t'ai toujours plus aimé. Ça n'a pas changé. »
« Dis pas çaᅳ »
« C'est pas grave. » le coupai-je. « C'est cool de savoir que dans un autre monde t'es pas une énorme enflure. C'est cool de savoir que dans tous les autres univers où on existe, c'est moi qui sacrifie ma vie pour la tienne. Que ce soit en devenant mère ou en assassinant, c'est cool. C'est génial. Ça me va. »
Durement, je le pointai du doigt.
« Tu oses me rappeler, tu oses m'écrire ou essayer de me retrouver, et je te promets que tu le regretteras. »
Un sanglot m'échappa.
Merde, je devais avoir l'air risible.
« Plus jamais je veux revoir ta sale face, Miguel. J'ai plus besoin de toi. »
Et c'était sur cette poignante conclusion que j'avais quitté les lieux.
J'étais sortie de ce curieux endroit, je m'étais engouffrée dans un long couloir rempli d'électroniques et mal éclairé pour rejoindre le pont que j'avais emprunté précédemment. Pas une seule fois j'avais osé me retourner. Mon cœur me faisait mal. Mes larmes coulaient d'elles-mêmes et peu importait le nombre de fois où je les essuyais, c'était toujours la même chose, d'autres arrivaient, c'était interminable, alors, je m'étais mise à avancer la tête baissée. Il était hors de question que je sois vue ainsi par tous ces gens, il était hors de question qu'ils comprennent que c'était cette enflure de Miguel qui m'avait mise dans cet état. Ça m'aurait détruite.
Il ne m'avait même pas rattrapée. Encore une fois...
J'avançais la tête baissée jusqu'à sentir les rayons du soleil réchauffer le cuir de ma veste. Je relevai alors le visage. Derrière moi, j'entendis du monde s'agiter. Entre les SpiderMen qui passaient à côté de moi, ceux qui me dévisageaient ou hésitaient à venir m'interpeller et les criminels qui beuglait à l'arrière, je peinais à m'entendre penser.
Le pont semblait interminable. Il pendait dans le vide, surplombé par une centaine d'autres ponts qui allaient dans diverses directions, un peu comme une autoroute. C'était de même pour en bas. Je me penchais pour mieux regarder le tout. Sans Scarlet Spider pour m'accompagner, c'était tout de suite plus impressionnant.
Il y avait tellement de SpiderMen... Lorsque Miguel m'avait avoué qu'il en était un lui-même, il avait dit "je suis le SpiderMan de ce monde" alors, ça signifiait que, chacun de ces héros présents, représentaient un monde, leur monde ? Je présumais. Tous ces gens, ces héros masqués, ça m'était difficile de croire que chacun d'entre eux ne venaient pas de Nueva York, mais plutôt d'une autre planète, d'une autre dimension.
« Besoin d'aide ? »
Une main s'était posée sur mon épaule. J'y jetai un coup d'œil en me retournant, légèrement surprise d'avoir été interpellée.
« Peter. Peter Parker. »
L'homme en costume de SpiderMan me salua gentiment. Avec appréhension, je le saluai en retour, cependant réticente à l'idée de donner si facilement mon nom et prénom. Il me regardait, lui aussi, de ses gros yeux blancs globuleux. Peu importait le ton chaleureux de sa voix, je ne pouvais pas m'empêcher jusqu'à toucher le rebord du pont du bas de mon dos et croiser mes bras contre ma poitrine. Je toisai le héros, peu convaincue. Ils se ressemblaient tous avec leur fichu masque.
« Les citoyens ne sont pas autorisés ici, je peux vous aider ? »
« Oui, justement. » répondis-je. « Vous pourriez m'accompagner à l'extérieur ? J'ai aucune idée de comment sortir d'ici. »
Il zieuta par dessus mon épaule.
« Vous m'êtes familière. »
Plus il avançait, et plus je mettais de la distance entre nous, je glissais contre le bord du pont, commençant à reculer assez vite. La façon dont il me détaillait ne me signalait rien de bon. J'en paniquai.
« Oh oh. » murmurait le héros. « Je reconnaîtrai ce regard n'importe où. »
Je n'eus pas le temps de répliquer, à peine j'eus ouvert la bouche, qu'une substance visqueuse s'était accrochée au bas de mon visage. Mes yeux s'écarquillèrent d'horreur, je ne pouvais plus respirer. Qu'est-ce que c'était que ce truc ? Un cri essaya de s'échapper de ma paire de lèvres. Ça m'était impossible. Je reculai jusqu'à entrer en contact avec quelqu'un et, peu après, je me retrouvai encerclée. Une horde de SpiderMen m'entourait.
De tous les côtés j'étais piégée, à ma droite, à ma gauche, devant derrière et même dans les airs. Je ne comprenais plus rien.
« C'est la Veuve Noire. » parla un SpiderMan à un autre.
Je respirai fortement par le nez. Mon cœur battait fort sous la panique. Ils me prenaient pour une vilaine ? Sérieusement !?
J'essayai de leur faire comprendre que je venais de ce monde, que je ne leur voulais aucun mal, mais comment faire sans parole ? J'avais beau tirer sur la toile d'araignée, elle ne cédait pas. C'était comme tirer sur un élastique. J'étais impuissante. J'y collais mes doigts, les tâchais et reculais en me débattant.
« Sonnez l'alarme ! Qui l'a laissée s'échapper ? »
« De quelle dimension vient-elle ? »
« Elle est sûrement armée, faites attention les Peter. »
Lorsque la toile d'araignée céda enfin, je pris une profonde inspiration, la gorge brûlante et les larmes aux yeux. Je jetai la toile au sol, les sourcils froncés et la mine enragée.
« Je ne suis pas la Veuve Noire ! » parlai-je. « Je... Jeᅳ Je viens de ce monde. J'étais partie voir Miguel. »
« Miguel ? »
Les SpiderMen m'étudièrent du regard.
« Ça m'étonnerait. » en parlait un.
« Comment es-tu rentrée ici ? L'entrée est interdite aux citoyens. »
« C'est Lyla qui m'a invitée et... Scarlet Spider qui m'a accompagnée. »
Je remonta les lanières de mon sac à mains sur mon épaule. Leur panique et attention était compréhensible, maintenant que je me souvenais de ma rencontre avec mon alter-ego, je comprenais. Je restais un peu paniquée. Je ne pouvais pas m'arrêter de me demander ce qui allait m'arriver si ils ne me croyaient pas. Est-ce que j'allais être envoyée en prison ? Être punie pour des vies que je n'avais pas prise ? Ça me faisait peur. Néanmoins, j'essayais de rester calme, paniquer ne ferait que les rendre dubitatifs, ils ne me croiraient pas et ça se finirait très mal.
« Miguel, on a trouvé une variante de la Veuve Noire dans le QG, qu'est-ce qu'on fait ? »
Mon regard se tourna vers le SpiderMan qui avait parlé, il tenait son avant bras, une étrange montre sur son poignet, projetant une lumière orange sous ses yeux. D'ici, je pus entendre Miguel soupirer.
« Laissez-la partir. » ordonna-il.
« Hein ? »
« Quoi ? »
Je me pinçai les lèvres.
« Elle vient de ma dimension, elle n'est pas un danger. Elle tuerait même pas une mouche. »
« Je lui fais pas confiance. Regardez comment elle tient son sac à mains, c'est sûr qu'elle cache quelque chose. » s'exclama une SpiderWoman.
« Non, attendez ! »
Je levai mes deux mains devant mon torse, soudainement visée par une cinquantaine de... poignets..? Les SpiderMen s'agitèrent, surpris par mon exclamation. Je n'avais pas pu m'en empêcher. J'avais été si proche du but, à deux doigts d'être relâchée, et voilà que cette héroine en compote venait de tout gâcher... Je paniquais. Là, je n'y pouvais rien. Je voulais rentrer. Merde, je voulais rentrer. Je voulais partir. J'en pouvais plus. C'était un véritable cauchemar.
« Dios mios... » pesta Miguel. « Vous allez laisser ma femme s'en aller ou il faut que je me ramène ?! » s'emporta-t-il.
Ohᅳ
« Attendez. »
Un des SpiderMan leva la main en l'air, cherchant à calmer la situation.
« Je crois le boss. » il affirma. « La Veuve Noire est belle est bien la femme de Miguel O'Hara, si elle vient de ce monde, elle ne peut pas être une vilaine. »
« Parce que ici, Miguel O'Hara est toujours en vie. » tiqua un second héros.
« Très bien, on vous félicite. » je m'enthousiasmai faussement. « Je peux m'en aller maintenant ? »
Mais personne ne répondit.
« Laissez-la. » acquiesça encore Miguel à l'autre bout du fil. « On n'a que trois Veuve Noire dans ce QG, elle, n'en fait pas partie. »
Trois !? Trois versions de moi ?!
« Je me charge de la raccompagner. »
Quelqu'un avait posé sa main sur mon épaule, un autre homme araignée. Je frissonnai à son contact. Son regard croisa le mien, lui aussi, masqué, mais, à travers ses grands yeux blancs, je pouvais y sentir une certaine tendresse. Je le remerciai silencieusement et il me tapota l'épaule.
« Ravi de pouvoir rendre service au boss. Désolée que vous vous soyez retrouvée dans une telle situation, madame O'Hara. »
Les SpiderMen s'écartèrent, ils se reculèrent tout en s'excusant. Je me sentis enfin capable de respirer. Le SpiderMan à mes côtés s'assura que j'étais apte à reprendre mon chemin et, très gentiment, il me proposa de nous mettre en route. Je fus incapable de lui dire non.
Je raffermis ma prise sur mon sac à mains et le suivis rapidement. Je n'avais qu'une envie : partir d'ici. Sans parler, sans croiser le regard de qui que ce soit et en espérant tout oublier en me réveillant le lendemain. Que c'était humiliant... Je m'étais retrouvée à leur merci, dans l'incapacité d'être entendue, accusée et menacée. Moi, une assassin ? C'était ridicule. La moi actuelle était pathétique. J'avais été recalée il y avait quinze minutes de cela, je devais avoir l'air horrible avec mes yeux rouges et mes joues collantes, et donc, selon eux, j'avais l'air de préparer un mauvais coup ? J'étais à deux doigts d'en rire.
« Vous allez bien, madame O'Hara ? »
Je grimaçai.
« S'il vous plaît, j'ai un prénom. » le prévins-je. « Et puis, je ne suis plus une O'Hara, Miguel et moi avons divorcé il y a peu. »
« Oh, excusez-moi. »
Je le sentais embarrassé d'ici.
« Non, non ça va. »
J'apportai ma main libre à mon visage. Je cachai ma grimace derrière ma paume, furieusement gênée par les précédents propos de Miguel. "Ma femme" ? Non, mais pour qui il se prenait ? C'était que ça l'amusait... Je ne voyais pas d'autre explication.
« Je suppose que Miguel a dit que nous étions ensemble pour simplifier les choses. » murmurai-je.
Il n'empêche, le fait qu'il ait parlé ainsi de moi m'avait fait de l'effet, je ne pouvais le nier. Son ton autoritaire, son exaspération, sa voix... J'en avais eu des frissons. Plus je m'éloignais de lui, plus je mettais de la distance entre nous, et plus je le regrettais. Je n'arrêtais pas de me retourner. Je regardais derrière moi toutes les cinq secondes, c'était à peine si je marchais droit, j'étais même forcée de m'excuser à chaque fois que je marchais sur le pied du SpiderMan à mes côtés. J'avais l'espoir de voir Miguel apparaître. J'avais l'envie de le voir me courir après, de crier mon nom, de me prendre avec lui et de nous emmener loin d'ici afin de mettre fin à cette mascarade. Mais ce n'était que des rêves. Je ne faisais que projeter des désirs que j'avais ressenti depuis que lui et moi nous étions séparés.
J'étais désespérée, c'était aussi simple que ça, voilà pourquoi dès que l'on m'avait appelé au sujet de Miguel, j'avais accouru.
« Accrochez-vous à moi. »
Le Peter Parker à côté de moi s'était posté de manière à m'empêcher d'avancer. Je ne l'avais écouté que parce qu'il avait prononcé mon nom, me faisant ainsi remarquer que nous étions devant l'ascenseur par lequel j'étais arrivée. Je déglutis, approchant ma main à ses avants-bras. Le SpiderMan me prit dans ses bras, il me serra très fort contre lui, et libéra une main pour cracher une toile d'araignée à l'intérieur de l'ascenseur. Il nous colla au plafond et se recula un peu de moi.
Embarrassée, je détournai le regard.
« Je suis désolé. Tout va bien ? »
Après avoir appuyé sur un bouton, le héros masqué me jeta un coup d'œil.
« Oui, ça va, merci. »
Notre proximité me rendit toute gênée. J'étais collée à un inconnu, la tête dans les airs avec les cheveux en pagaille, mon sac à main tombant et le cœur pétillant sous l'adrénaline. Ça m'était dur de me calmer.
Ce ne fut qu'une fois hors de cette fichue Spider-Society que je parvins à reprendre mes esprits. Le monde réel m'accueillit, avec ses voitures volantes, toute cette herbe et ce blanc, et cette technologie, sans des hommes, femmes ou créatures en tenue moulante. Le SpiderMan qui m'avait accompagnée continua de m'escorter ᅳil avait cependant changé de vêtements entre-temps, à ma plus grande surprise. Je ne m'arrêtai pas de le zieuter pendant que je sortais mon portable afin de commander un taxi. Nous descendîmes une longue rangée d'escaliers blancs, au bout, j'en finissais essoufflée. Il n'y avait personne aux alentours.
Le super-héros soupira lourdement, attirant mon attention. J'arquai un sourcil dans sa direction.
« Je tiens encore à m'excuser pour... Pour tout ça. »
Il se gratta la nuque, une main sur la hanche.
« C'est juste que, vous ressemblez énormément à une vilaine de mon univers. »
« La Veuve Noire ? » supposai-je.
« Vous la connaissez ? »
Je hochai la tête, rangeant par la même occasion mon portable dans mon sac à main de cuir.
« Je l'ai rencontrée, du moins une de ses versions. » répondis-je. « Elle vous a pris des gens que vous aimiez ? »
Le SpiderMan me dévisagea.
« Vous ne savez donc rien de la Spider-Society ? »
« Je suis désolée, mais non. »
Un petit rire m'échappa.
« Pour tout vous dire, monsieur Parker, je viens à l'instant d'apprendre que mon ex-mari est SpiderMan. »
Il hocha la tête.
« La Veuve Noire a tué une amie proche à moi. » me partagea-t-il. « Elle s'appelait Mary-Jane. »
Ma moue se froissa.
« Je vois.. »
« C'est fou à quel point vous lui ressemblez. »
« Miguel dit que je suis une version de la Veuve Noire, c'est sûrement pourquoi. Une version qui... qui n'a pas perdu son Miguel. »
Je détournai le regard.
« Du moins pas par la mort. »
J'avais pris notre situation pour acquise. La moi d'une autre dimension avait raison, j'étais égoïste et ridicule même, je vivais ma vie sans arrêter de penser à Miguel, j'espérais secrètement depuis des mois que lui et moi finirions par nous retrouver.
Je n'avais pas su chérir ce que nous avions construit et maintenant j'osais dire qu'il me manquait alors que je n'avais pas cherché à l'aider. Le fait que Miguel m'ait repoussée après avoir dit qu'il m'aimait me faisait mal. J'en crevais de douleur. Tout chez lui me manquait, sa voix, son doux regard, son corps, ses pensées et sa douleur. Mais je comprenais pourquoi il avait fait ça. Miguel cherchait à me protéger. Il n'avait pas jeté notre mariage à la poubelle pour jouer au super-héros, il s'était sacrifié pour sauver le monde. Il se levait chaque matin en regrettant son choix de m'avoir laissée, en y repensant sans cesse, à se demander si je lui manquais, si je pensais à lui et si me parler aurait changé quelque chose.
Je lui avais dit ma vérité : j'aurais accepté.
J'aurais porté le poids de toutes ces dimensions avec lui, je l'aurais supporté et je l'aurais aimé encore plus pour ça.
À présent, je devais accepter son choix.
Je n'étais pas la Veuve Noire. J'avais ma propre histoire à écrire, j'avais la chance de ne pas avoir tournée comme ces autres versions de moi, j'avais la chance de vivre, de me reconstruire, et pourquoi ? Parce que Miguel s'était sacrifié pour moi. Comme il l'avait fait dans tous ces autres univers. Il l'avait fait par amour pour moi, et il était tout à fait normal que je lui renvois la pareille en vivant ma vie, en signe de gratitude.
Je repris mes esprits en sentant un souffle chaud sur mes lèvres.
« Paᅳ Pardon ? »
Peter Parker me sourit gentiment.
« Vous aviez l'air perdue dans vos pensées. »
Il se recula et jeta un coup d'œil à la route, mon taxi n'était toujours pas arrivé.
« Vous savez.. Dans tous les autres univers que Miguel a visité, vous et lui... Eh bien, vous finissez toujours par vous rencontrer. »
Il plongea ses mains dans les poches de son jean, ses yeux refusant de quitter les miens.
« Vous finissez toujours par tomber amoureux, peu importe si l'un de vous deux meurt. C'est un interminable cycle pour lui et vous. »
« Est-ce que c'est vrai ? Ou alors, vous vous fichez de moi..? »
« La vérité, la seule et l'unique. Foi de Peter Parker, votre fidèle serviteur. »
« Alors, Miguel et moi... »
Peter esquissa un petit sourire.
« Votre amour traverse même les plus grandes difficultés, c'est comme si le destin persistait à vous réunir. »
Son discours me fit glousser.
« Il faut croire qu'il y a une première fois à tout. » je le coupai. « Regardez bien, la prochaine fois que vous visitez un autre univers, et peut-être que vous en trouverez une autre comme moi. » repris-je. « Ou peut-être que je suis l'exception même. Celle qui n'a pas eu l'occasion de perdre son Miguel, parce qu'il l'a abandonnée. »
Je refusais de dire que j'aurais préféré le voir mourir, me forçant ainsi à devenir une meurtrière. J'étais heureuse de le savoir en vie, même si cela signifiait que nous ne pouvions plus être ensemble. Il n'empêche, j'aurai donné tout l'or du monde pour ne serait-ce qu'une minute de plus avec lui. Miguel me manquait de manière inhumaine. Ça m'en donnait envie de vomir. J'avais comme cet immense trou dans le cœur, un trou incapable à remplir tant sa profondeur était inégalable. Il s'était creusé depuis qu'il avait signé les papiers du divorce, me faisant ainsi valser dans un cycle de chagrin interminable.
« Ne perdez pas espoir. » me certifia Peter Parker.
« Vous connaissez Miguel, n'est-ce pas ? Depuis longtemps ? »
« Ça fait déjà quelques mois. »
Je me pinçai les lèvres.
« Alors vous le savez, hein ? Qu'il est buté jusqu'à l'os. »
Du coin de l'œil, j'aperçus mon taxi. Je l'avais entendu s'approcher ce qui m'avait déconcentrée, juste le temps de m'assurer qu'il était là.
« Merci de m'avoir accompagnée, je vous en suis reconnaissante, monsieur Parker. »
Je lui offris un sourire.
« Bon courage et merci pour tout ce que vous faites. Toute ce.. » décrivis-je en balançant mes poignets et en crachant des onomatopées embarrassantes. « truc de super-héros. »
Il se mit à rire.
« Je vous en prie. Tout le plaisir est pour moi. »
Je glissai une mèche de mes cheveux derrière mon oreille, soudainement surprise par une bourrasque de vent. Je regardai le SpiderMan d'un autre monde me saluer d'un grand signe de la main, il s'assura que je sois bel et bien montée dans mon taxi, avant d'accourir dans l'immense bâtiment devant lui et de commencer à retirer ses vêtements, dévoilant ainsi fièrement son costume de super-héros. J'en souris. Incapable de décoller mon regard de sa silhouette, je donnai mon adresse au taxi et le sentis se mettre en route presque sur le champ. Afin de m'attacher, je fus contrainte de détourner le regard, juste le temps d'entendre un petit clic.
Néanmoins, cela suffit au SpiderMan pour disparaître. J'étais déçue. Je l'avais cherché du regard, persuadée de ne pas avoir pris autant de temps pour m'attacher mais, derrière moi, ne se trouvait que ces fichus escaliers blancs. Le taxi s'éloigna, je le perdis bientôt de vue.
Un lourd soupir m'échappa. Je me débarrassai de mon sac à main sur la banquette arrière à côté de moi et jeter un coup d'œil à ma vitre.
« Tout va bien, mademoiselle ? » me questionna le conducteur.
« Mhh ? Oh, oui. Merci. »
« Vous m'avez l'air bien triste. »
Je collai ma tempe à la vitre, sentant les vibrations du véhicule contre celle-ci.
« Non, je me porte comme un charme. »
« Et siᅳ »
Mais je l'ignorai déjà, incapable d'en entendre plus. Il m'était hors de question de poursuivre cette discussion. Combien de leçons allais-je recevoir aujourd'hui ? J'avais l'impression d'avoir tout juste dix-neuf ans, c'était frustrant. Entre cette Lyla, Miguel, ce Peter Parker et ces SpiderMen... Je ramenai mon portable sous mon nez et le rallumai, impatiente. Tout au long du trajet, j'y avais consacré mon attention.
Et, comme par pur hasard, j'avais porté mon dévolu sur des articles traitant de SpiderMan comme si, irrésistiblement, le destin m'avait ramenée à lui. Miguel. Et plus je regardais des photos de lui, plus son corps, ses mimiques et ses interviews me dévoilaient la seule et unique réalité. Une réalité qui, depuis toujours, s'était dandinée sous mon nez. Miguel O'Hara n'était effectivement nul autre que SpiderMan, le super-héros de notre monde.
J'avais lu plusieurs de ses articles en boucle, les sourcils froncés et les doigts endoloris à force de taper, jusqu'à, finalement, sentir le taxi s'arrêter. En jetant un coup d'œil à l'heure, je remarquai qu'une heure et demie s'était écoulée. Nous avions parcouru la ville, et voilà que je faisais face à ma maison.
« Merci, gardez la monnaie. » je plaisantai en offrant ma carte de crédit au conducteur.
Une fois mes affaires récupérées et ma facture payée, je m'extirpai de la voiture. Je claquai la portière. Devant moi, se trouvait nulle autre que ma maison, blanche, décorée de baies vitrées et entourée d'une herbe d'un vert cartoonesque.
Depuis que le voyage inter-spacial existait, beaucoup de place s'était libérée sur la planète, ce qui expliquait pourquoi le voisinage était aussi calme. Peu de gens habitaient sur Terre, ceux vieux-jeu, ou alors les peureux, et ceux n'ayant pas les moyens avaient préféré rester ici. Moi, je faisais partie des peureux. J'aimais sentir le vent frais parcourir mon visage et jouer avec mes cheveux, toucher la verdure du bout de mes pieds et aimer notre première et unique maison. J'aimais regarder le ciel et me dire qu'en deux mille quatre vint dix-neuf, tout était possible. Et j'aimais regarder tout ça de loin.
Une fois devant ma porte d'entrée, je pressa ma main sur un petit clavier à sa droite et vis la porte s'ouvrir en deux sur les côtés. J'entrai ensuite chez moi.
Je me débarrassai de ma petite veste à cuir à manches longues sur mon porte-manteau, elle y reposa joliment, je retirai mes sabots à talons pour les abandonner à même le sol et pressai le pas en direction de la cuisine. Mon sac à main tomba sur l'îlot principal. Une bouteille d'eau m'accompagna pendant que je me retournai contre le frigo, en direction de mon salon.
C'était calme. Beau, mais calme, parce que, à part moi, personne n'était présent pour rendre ma maison vivante. J'étais adossée contre mon frigo, la mine renfrognée et ma bouche enroulée contre le rebord de ma bouteille, de même pour mes dents. L'eau était rafraîchissante. Je me remerciai mentalement pour avoir attrapée la plus reculée, ce qui venait de m'offrir une expérience divine. L'eau était si fraîche et si bonne que je terminai de la boire en deux petites minutes. Je jetai l'emballage en verre dans le lavabo et m'approchai de la baie vitrée menant à mon jardin. Elle était tout au bout de mon salon, cuisine et salle à manger, elle faisait face à la porte d'entrée à plusieurs mètres de là, cachée par une rangée de volet.
J'avais eu à peine le temps de cligner des yeux, d'admirer le soleil perché haut dans le ciel, que la nuit était déjà tombée. L'après-midi avait volé en éclat.
J'avais passé quelques heures à me nettoyer, me changer, à faire du rangement dans ma demeure, tout pour me changer les idées. J'étais restée en constant mouvement, accompagnée par de la musique ou des exclamations provenant de la télévision. Il n'était plus quatorze heure, loin de là, il était à présent vingt deux heure. Mes volets, ma porte d'entrée, mes lumières, tout était éteint, sauf ma télévision écran plat et un regroupement de bougies dans ma cuisine. Couverte par un petit plaid noir, j'étais emmitouflée dans mes propres bras et une peluche d'ours, ma tête reposant sur une montagne d'oreillers. C'était très silencieux. Il faisait assez frais, même avec mon surplus de vêtements et les fenêtres fermées.
Toutefois, même avec les yeux scotchés devant moi, mon attention totalement rivée sur mon dessin animé, j'entendis mon portable sonner. La sonnerie me fit froncer les sourcils. Déposant mon coude sur le canapé, puis mon menton contre ma paume, je poussai mes lèvres en un cul de poule. À cette heure, j'avais du mal à croire que quelqu'un pouvait m'appeler.
C'était sûrement une erreur.
Cependant, je sursautai en voyant une lumière subitement jaillir de la caméra de mon cellulaire. Je le jurai, je n'avais pas bougé un pouce. Il était posé sur ma table basse du côté de l'écran, de ma place, il m'aurait été impossible de répondre à l'appel.
« Qu'est-ce queᅳ »
Mes yeux s'ouvrirent en grand à la vue de Lyla, l'assistante de Miguel. Je m'assis droite comme un piquet et la dévisageai. C'était elle. Je l'aurais reconnue entre milles. Avec ses lunettes, son bob, son épais manteau de fourrure et tout ce jaune qui la constituait... Elle se tenait devant moi, projetée par mon portable en tant que hologramme. Elle avait l'air morte d'inquiétude.
En vue du ton paniqué avec lequel elle murmurait mon prénom, je sentis que quelque chose de grave s'était produit.
« Il faut que tu parles avec Miguel, tout de suite. »
Je me penchai dans sa direction.
« Dis-moi... Je pensais que Miguel t'avait interdit de me contacter ? »
« Hein ? Oh. Margo m'a aidée. »
Au moment où elle finit sa phrase, elle pointa son pouce par dessus son épaule. Une gigantesque tête apparut, de la taille de la mienne. J'en criai.
« Bonsoir ! » me salua l'adorable fille à la couleur de peau foncée. « J'ai hacké votre dossier dans le bureau du boss, j'espère qu'il m'en voudra pas. C'est pour la bonne cause ! »
« Seigneur. »
Je posai ma main sur ma poitrine.
« Quoi qu'il en soit, » reprit Lyla alors que la dite Margo disparaissait. « Il faut que tu nous aides. »
« Pourquoi ça ? Il est arrivé quelque chose à Miguel ? »
L'intelligence artificielle tourna la tête et sourit.
« Tu vois, je te disais bien qu'elle ne nous rembarrerait pas ! »
« Hey, qu'est-ce qui se passe ? »
« Désolée. » elle se reprit en me zieutant. « C'est Miguel, effectivement. Il nous inquiète tous, depuis que tu es partie il n'a pas dit un mot. Il m'a même interdit l'accès à son bureau ! On a peur que quelque chose lui soit arrivé. »
« "On" ? » je répétai.
De son index, Lyla fit descendre ses lunettes au bout de son nez.
« Oui, "on". »
« Écoute, jeᅳ j'adorerai t'aider, vraiment, » mentis-je. « mais il ne m'a ni contactée ni est venu me voir. Il sait que je lui fermerai la porte au nez. Et puis, je suis plus d'humeur à le voir. »
« Je sais, je sais. »
Elle plaça ses paumes de main devant elle comme pour calmer les choses.
Je lui avais répondu un peu trop vite, mais ça n'était pas ma faute. Je venais de me faire pirater et Miguel était devenu fou ? Ça me faisait un peu peur. Et si il avait fait une bêtise ? Mon regard avait dévié un peu partout dans mon salon, le temps que Lyla réagisse. Finalement, mon attention se reporta sur elle lorsque j'aperçus du mouvement au niveau de son image.
J'avais du mal à comprendre ce qu'elle faisait. Son corps rétrécit, c'était comme si elle dézoomait. Et plus la caméra se reculait, plus des silhouettes apparaissaient, plus mes yeux grossissaient. Devant moi, à travers un hologramme, se dressait une armée de SpiderMen. Ça n'était pas une dizaine, non, c'était une centaine, voire trois cent de super-héros qui se présentaient. C'était un festival de costumes, de masques, de couleurs. J'en eus la bouche grande ouverte. Finalement, Lyla se plaça au dessus d'eux, juste sous mes yeux. Elle n'avait plus l'air amusée, juste extrêmement embêtée.
« On a besoin de Miguel pour maintenir le Spider-Verse en place, s'il te plaît. Il faut que tu nous aides. »
« Mais je viens de vous le dire, j'ai aucune idée d'où il se trouve ! Pourquoi je le saurai, hein ? »
« Parce que tu le connais mieux que quiconque, Miguel n'a plus personne d'autre. » murmura Lyla avec amertume. « Tu es notre dernier espoir. »
« Eh bien désolée mais vous êtes fichus. »
Je me levai, laissant mon plaid retomber sur le canapé.
« Je sais pas. J'en sais vraiment rien. »
Je commençai à tourner en rond.
« Vous n'avez qu'à enfoncer la porte de son bureau, j'en sais rien, moi ! »
« C'est ça le problème. »
« Quoi ? »
« On a réussi à entrer dans son bureau, mais il a disparu. On a aucune idée d'où il peut être. »
Son commentaire me força à rouler des yeux.
« C'est ridicule, vous pouvez pas le traquer ou vérifier les caméras de surveillance ? »
« C'est un SpiderMan, il sait ce qu'il fait. »
« Eh bien déployez-vous ! Cherchez le vous-même, c'est pas mon problème ! »
Je me frottai le front, soudainement agacée. Ils me posaient un tel poids sur les épaules, l'avenir du monde, la sécurité de d'un milliard de dimensions, qu'est-ce que j'en savais moi, où Miguel avait pu partir ? C'était insinuer que je le connaissais encore, ce qui était faux. Je n'aurais même pas pu deviner où il se cachait. Le Miguel que j'aimais et connaissais comme le dos de ma main avait disparu. Je détestais ce qu'ils étaient en train de faire.
Je vis Lyla à deux doigts de reprendre la parole, mais je la lui coupai brusquement.
« S'il vous plaît. »
Silence.
« S'il vous plaît, laissez moi. »
Lyla souffla, les mains sur les hanches.
Elle semblait enfin m'écouter.
« Tu as raison, désolée du dérangement. » elle se raisonna. « Prends soin de toi, d'accord ? On ne t'embêtera plus. »
Sa réponse fut un grand soulagement.
« Merci, merci beaucoup. »
La seconde suivante, les SpiderMen disparurent, de même pour l'image de l'intelligence artificielle. Il ne restait plus que moi, moi debout à côté de mon canapé, de l'autre côté de ma table basse, là où reposait mon téléphone portable.
J'étais... J'étais bouche bée.
Cet appel avait été plus qu'intense, il m'avait rendue brusquement morte d'inquiétude. Je croisai mes bras contre ma poitrine, le sentiment de panique qui se propageait en moi me terrifiait. J'avais peur pour Miguel, c'était une évidence. Je n'arrêtai pas de me demander si c'était ma faute, ou si quelque chose l'avait attaqué, mais il y avait aussi cette histoire de dimension. Miguel était leur chef ? Alors... Si il disparaissait, ça signifiait la mort de nos univers ?
Je la sentis arriver, ma crise de panique.
J'attrapai durement les côtés de ma tête, trébuchant sur mon tapis et tombant sur le popotin, je laissai un hoquet fébrile me quitter. J'avais compris que Miguel avait un rôle important dans cette Spider-Society. C'était évident à la vue de son bureau et de la manière dont les gens parlaient de lui, mais je ne l'avais pas imaginé aussi vital.
À cette pensée, je sanglotai.
Que faire ? Ça n'était pas mon problème. Je ne connaissais même pas cette Lyla, et je ne comprenais rien à leurs histoires. Je me sentais cependant en quelque sorte responsable. Elle avait raison, je connaissais Miguel, je l'aimais depuis que j'étais adolescente après tout, il était évident que je devais avoir des informations, mais il m'était impossible de réfléchir, pas quand je sentais si soudainement, le poids du monde reposer sur mes épaules.
Au même moment, un bruit attirait mon attention. Ma tête faisait volte-face en direction de la porte d'entrée, quelqu'un venait d'y toquer. Encore. On insistait, on toquait encore plus fort contre ma porte.
« J'aᅳ J'arrive ! »
Je ne questionnai même pas la situation, à l'instar de réfléchir, je me remettais sur mes deux pieds et traversais le salon dans le but de m'approcher de la porte d'entrée.
La télé tournait encore, éclairant ma vision, et le parquet glacé, quant à lui, forçait mes mollets à frissonner. J'en avais la chair de poule. Après mûre réflexion, je rapprochai ma main de la poignée. De l'autre côté, j'entendis une voix jurer et un soupir.
Je l'aurai reconnue n'importe où.
C'était Miguel, il était venu.
D'une violence inouïe, j'avais ouvert la porte. Elle claqua contre le mur, mais je n'y fis pas attention, car mon regard était rivé droit sur la silhouette obscure qui avait commencé à faire demi-tour sur l'allée de ma maison. Il faisait trop sombre pour que je le reconnaisse, mais le costume qu'il portait ne trompait personne.
« SpiderMan ? »
Le héros s'arrêta.
« À quel SpiderMan je m'adresse ? Miguel, c'est toi ? Quelle version ? »
Je passai le pas de la porte, pieds nus et uniquement habillée d'un boxer et d'une brassière, le froid me brûlait la peau, mais j'avais si peur de le voir partir. J'aurais affronté vent et tempête. Les lumières blanches aux côtés de la porte d'entrée de ma maison l'éclairaient, pas assez pour que je puisse reconnaître les motifs dans son dos, mais suffisamment pour que j'en reconnaisse la couleur.
Bleu et rouge.
« Miguel, c'est toi ? » j'insistai en avançant. « Tous tes amis te cherchent, ils sont fous d'inquiétude. Tu n'as rien à faire ici, rentre, d'accord ? »
Il baissa la tête.
« Puta madre... » l'entendais-je jurer.
Suffisamment proche de lui, j'étais à présent capable de le toucher, d'enrouler mes bras autour de ses hanches. Cependant, je me retins. Je m'en sentis incapable. Miguel resta muet l'espace d'un instant. Il ne parla pas, allant jusqu'à me faire croire que j'hallucinais. Toutefois, au moment même où je m'apprêtai à ouvrir la bouche pour le questionner, il me devança.
« Je t'aime. »
Mes yeux papillonnèrent sous la surprise.
« Je t'aime du fond de mon cœur. »
Le SpiderMan se retourna vers moi, en même temps, il fit disparaître son masque, un hologramme, lui aussi. Et Miguel me revint, Miguel réapparut.
« Je deviens dingue. » il cracha difficilement. « J'arrête pas de penser à toi. »
« Miguel, jeᅳ »
Il me coupa en levant la main, l'autre posée sur sa hanche.
« Non. »
Il releva son regard dans le mien.
Et j'en fus bouche bée. Il était très pâle, à bout de souffle.
« Donne moi une chance de parler. S'il te plaît. »
Miguel se contenta d'un hochement de tête de ma part pour poursuivre. Il descendit sa seconde main sur sa hanche et, toujours fièrement moulé dans son costume, grimaça.
« J'ai vu des univers. Des univers où je te perdais. »
Une légère brise se leva, balayant ainsi quelques mèches de ses cheveux brunes.
« C'était bien après notre divorce, ça ne justifie rien, mais bien avant je connaissais tout autant les dangers d'être amoureux en étant SpiderMan. T'imaginer mourir m'a rendu malade à en crever. J'en dormais plus. Bon sang, je t'aime tellement. »
Mon cœur battit un peu plus vite. Plus rien d'autres m'importait, juste... Qu'il continue de parler, c'était tout ce que je voulais.
« Je voulais pas te forcer la main, je savais que tu m'aurais suivi jusqu'au bout du monde. Ça n'aurait pas marché, j'en étais persuadé. »
Il me pointa du doigt, les sourcils froncés.
« Tu méritais pas une telle vie. » poursuivit-il. « Ça me rendait fou de rage de savoir que me séparer de toi serait synonyme de t'offrir à un autre. Putain. J'aurais tué le premier venu. Le premier qui aurait posé la main sur toi. »
« Miguelᅳ »
« Mais je préfère te savoir avec un autre que six pieds sous terre. »
Merde. Il ne me laissait même pas parler.
« Miguel, jeᅳ »
« Sauf que je le supporte plus. Je supporte plus d'être loin de toi. » pesta-t-il. « Et toutes ces versions de toi qui vont et viennent, ton sourire, ta voix, ton corps, tes mots doux... J'ai l'impression d'être en plein cauchemar. »
Il se pinça l'arête du nez.
« Même après tout ce temps, je continue de t'aimer comme au premier jour. »
Il me regarda ensuite. Ou plutôt, il me foudroya du regard.
« Tu sais à quel point je déteste ça ? »
Je ne pus empêcher le sourire qui prit place sur mes lèvres. Qu'il était beau. Charmeur et splendide, plus je le regardais, plus j'en oubliais de l'écouter. Miguel continua de me faire la cour, il parla, jura, et déblatéra les mêmes choses, encore et encore jusqu'à finir à bout de souffle. Sa main avait fini par trouver ma joue, Miguel m'avait touchée et avait, inévitablement, posé son front contre le mien.
« Te amo.. Te quiero. »
« Miguel... »
Il grogna soudainement.
« Ne me importa. »
Ses yeux étaient vissés dans les miens.
« Je te protégerai à en devenir malade, je bosserai plus fort, je t'enfermerai dans mon bureau jusqu'à la fin de tes jours si il le faut. Mais jamais, plus jamais je te laisserai t'en aller. Plus jamais je te laisserai me glisser entre les doigts. »
Ma vue se troubla.
« Tu te fiches pas de moi, hein ? »
Miguel secoua la tête.
« J'y ai pensé comme un malade. »
Ses mains sur mon visage me caressèrent, il faisait de doux gestes circulaires avec ses pouces sur mes joues, c'était agréable, étrangement familier.
« Je peux pas te laisser partir. »
« Pas besoin de t'inquiéter pour ça. »
Je plaquai mes mains sur ses joues à lui, les yeux de Miguel s'ouvrirent alors avec surprise.
« Je ne compte plus te laisser, non plus. »
Le sourire qui prit place sur ses lèvres fut tout à fait exquis, j'en avais des papillons dans le ventre. Son odeur intoxiqua mes poumons. J'avais du mal à respirer. Tout était si intense. Je le sentais, le voyais, l'entendais, je n'en avais pas assez. J'étais tellement heureuse. Qu'il était stupide d'avoir attendu aussi longtemps, évidement que j'allais sacrifier ma vie pour lui, il aurait dû le savoir depuis le début. Le fait qu'il soit SpiderMan ne me faisait pas peur, et c'était de même pour les dangers qui allaient avec le fait d'être sienne.
Ce fameux Peter Parker avait raison : il n'y avait pas d'exception.
Miguel et moi étions destinés à nous retrouver et à ne faire qu'un.
J'étais sienne, pour toujours et à jamais, à travers le temps, les univers et l'adversité.
« Tu le veux ? »
Miguel hoqueta, l'air tout à coup pressé.
« Dis moi que tu le veux. »
Je pressai mon front au sien, caressant le bord entre son visage et ses oreilles.
« Bien sûr que je le veux, sombre fou. Peu importe le nombre de fois où tu me repousseras, je ne me sentirai jamais capable de cesser de t'aimer. »
Nos regards s'enflammèrent.
« Je t'aime, Miguel. »
Mon cœur battait si vite pour lui. J'avais mal au ventre à force de le regarder et mon visage lui-même était douloureux. Plus nous restions ainsi, et plus j'avais mal. Je ressentais ce désir de le toucher. J'avais besoin de plus. J'avais besoin d'être à nouveau sienne.
Ce fut avec vitesse que Miguel retira ses mains de mon visage pour forcer mes jambes à s'enrouler autour de sa taille. Je criai de surprise. Ma poitrine s'écrasa contre son torse et mes mains firent un bon dans sa chevelure, le sol me sembla lointain, presque inaccessible.
« Je t'aime aussi. »
Sa bouche embrassa ma joue.
En même temps, il se mit à marcher jusqu'à entrer chez moi.
« Tu me rends dingue. » jura-t-il. « Plus jamais. Je te le promets, plus jamais. »
Finalement, nos lèvres se rencontrèrent.
Miguel m'embrassa avec ardeur, il claqua la porte d'entrée de son pied sans me lâcher pendant qu'il m'offrait en même temps le baiser le plus langoureux et passionné que j'eus partagé. Je couinai contre sa bouche. Que c'était bon.. Ses lèvres étaient humides, chaudes et sa salive se mariait merveilleusement à la mienne. Je n'en avais pas assez. Je ne le laissai même pas se reculer. Ses bras me pressaient fort contre lui. Mon torse et le sien bougèrent en rythme, sous nos deux respirations saccadées. Mes doigts se perdirent dans sa chevelure brune. Elle était douce, et sentait aussi terriblement bon. Miguel m'embrassait encore et encore. Sans cesser de mouver ses lèvres contre les miennes, il nous guida quelque part. Je le laissai faire, bien trop enivrée pour réagir..
Lorsque je le sentis me poser sur l'îlot central de la cuisine, juste à côté de mon sac à main ᅳque j'avais oublié de rangerᅳ je rouvris mes yeux et me séparai de lui.
J'avais du mal à retrouver mon souffle. Quelques plaintes me quittèrent en sentant ma gorge me brûler, ainsi que deux trois gémissements. Miguel me regarda faire, ses paumes de mains plaquées sur le plan de travail, penché droit sur moi, et les yeux.. rouge ?
« Ça n'était pas une erreur. »
Miguel me toisa avec sérieux. Je le questionnai du regard.
« Quoi ? »
« Lyla. Ta venue à la Spider-Society. »
Je le sentis caresser ma joue. Sa paume était chaude, ferme.
« Ça n'était pas une erreur, c'était tout sauf une erreur. »
J'acquiesçai.
« Je vais te demander quelque chose, sois honnête, d'accord ? »
« Bien sûr, tout ce que tu veux. »
Miguel me récompensa d'un baiser sur la mâchoire puis sur la commissure de mes lèvres.
« Je veux que tu reviennes dans ma vie. »
Il déglutit en agrippant ma hanche de son autre main, son regard se faisait incertain.
« Je veux pas attendre, je veux pas prendre mon temps. » m'expliqua-t-il. « Je te veux maintenant. »
« Moi aussi, Miguel. Je te veux. »
Le soupir de soulagement qui s'échappa de lui me fit esquisser un petit sourire.
« Tout ce que tu veux. » je murmurai contre son oreille, le souffle saccadé. « Je ferai tout ce que tu veux. »
Miguel me serra contre lui, il me pressa contre son torse dans une étreinte chaleureuse, son visage noyé dans ma nuque et mes jambes toujours enroulées autour de sa taille. Je n'avais plus envie de penser en cet instant. Je n'avais plus envie de rien si cela n'était pas en rapport avec Miguel. Je me sentais bien là, étouffée dans ses bras musclés, asphyxiée par son eau de Cologne, et charmée par ses belles paroles. J'y avais finalement succombé. Et, pour rien au monde, je n'aurais désiré y mettre un terme.
« J'arrive pas à croire que tu sois SpiderMan... »
Je l'entendis soupirer.
« J'aurais dûᅳ »
« Tu aurais dû rien du tout. »
J'embrassai sa gorge.
« Tu as fait ce que tu pensais juste, Miguel. Je ne t'en voudrais pas pour ça. Je t'en veux juste d'avoir laissé notre histoire se finir ainsi. »
« Je sais. Désolé. » il marmonna dans le creux de ma nuque.
« Je t'aime. »
« Je t'aime aussi. »
Miguel et moi restions prisonniers de notre étreinte l'espace d'une éternité, bras enlacés, visage noyé dans le creux de la nuque de l'autre et les battements de nos cœurs synchronisés. Je ne l'aurais lâché pour rien au monde. Je fondais contre son torse, il était chaud et la peau de son cou était si douce, onctueuse, à l'aide de mes jambes enroulées autour de sa taille je le serrais contre moi. Son bassin encontra le mien. Les bougies au fond de la cuisine continuaient de luire dans l'obscurité, elles réchauffaient légèrement la pièce, la télé, elle, depuis longtemps oubliée et positionnée dans mon dos dans le salon ᅳen face de la cuisineᅳ nous éclairait et projetait nos ombres contre le mur. C'était une mixture peu homogène, une espèce de créature immobile; le fruit de notre amour.
Miguel ne faisait pas que m'enlacer, son nez était plongé dans ma nuque, il inspirait fortement mon odeur, et me pressait si fort par la taille que, à répétition, je venais à manquer d'air, je poussais quelques plaintes et le serrais contre moi à mon tour.
« Miguel ? »
« Mhh ? »
Je raffermis la prise de mes doigts dans sa chevelure.
« Tu restes avec moi ce soir ? »
Il resta muet un court instant. J'avais entendu sa respiration s'arrêter puis, il me répondit juste après avoir soupiré.
« Si c'est ce que tu désires. »
« Oui, s'il te plaît. »
Je me détachai de lui pour l'observer tout en conservant ma poigne de fer sur ses mèches brunes. Son regard s'encra dans le mien. J'en frémis. Qu'il était charmant, une véritable œuvre d'art.
« Reste avec moi. » le suppliai-je.
Miguel esquissa un rictus.
« D'accord, d'accord. »
Je le sentis remonter une de ses mains sur mon visage pour que, de son pouce, il vienne caresser le dessous de mon œil. Un air soucieux se creusa sur les traits de son propre visage. Miguel me contempla avec grande attention, je le pensai même perdu dans ses pensées, noyé dans un torrent de peurs et affirmations avant que, soudainement, il ne me détache du plan de travail et ne me laisse poser les pieds au sol.
« Je te suis. » il murmura.
Tout en lui offrant un splendide sourire, je glissai ma main dans la sienne, entremêlant sans perdre de temps nos doigts et me rapprochai de lui. J'apportai ma main à sa joue, Miguel se baissa et j'en profitai pour embrasser sa mâchoire. J'y déposai un doux baiser. Qu'il sentait bon, que sa peau était douce... J'y étais dépendante.
Malheureusement, je me retrouvai rapidement contrainte de me reculer de lui. Je serrai ma main dans la sienne, puis, après avoir éteint mes bougies, je l'amenai à mon canapé où je m'empressai d'éteindre la télévision et de récupérer mon téléphone portable. Ensuite, je nous guidai jusqu'à ma chambre à coucher. Nous marchâmes dans l'obscurité, étonnamment, Miguel ne sembla pas dérangé par ce détail. Il ne me donna pas l'impression de connaître les moindres recoins de ma maison mais plutôt de parvenir à les voir.
Je nous fis pénétrer un petit couloir menant aux toilettes, ma librairie, la salle de bain et, finalement, ma chambre.
Miguel m'y suivit aveuglément.
« Attention. »
Mon corps sursauta lorsqu'il me jeta contre son torse.
« T'as pas vu ta commode, ou quoi ? »
Je fronçai mes sourcils.
« Où ça ? » demandai-je.
« Là, juste à côté. T'as failli lui rentrer dedans. »
Ce fut avec surprise que je me tournais dans sa direction, prête à le dévisager malgré l'obscurité. La baie vitrée qui faisait face à ma porte était grande ouverte, de sa transparence, elle laissait les rayons de la lune pénétrer dans la pièce, cependant, à un angle particulier, me permettant ainsi de toiser l'expression perplexe de Miguel, mais pas de reconnaître ce qui m'entourait. Avec son aide, je remarquai l'étrange couleur de ses yeux, Miguel avait les pupilles rouges, elles scintillaient comme décorées de constellations.
« Tu peux voir dans le noir ? »
Miguel grimaça.
Il détacha sa main de la mienne pour aller se gratter la nuque.
« Il faudra que je t'explique un jour. » déclara-t-il. « Je suis pas un SpiderMan normal, je suis légèrement différent. »
Ma réponse se contenta d'un hochement de la tête. Je ne comprenais pas trop où il voulait en venir, pour moi, il était comme tous ces autres super-héros, avec ses sens affûtés, sa puissance, ses toiles et son agilité, une véritable araignée.
Enfin. À vrai dire, il avait parfois un peu trop l'air d'une araignée, je devais me l'avouer. Miguel avait sûrement raison. Il n'était pas comme les autres. Entre la couleur de ses yeux, sa faible tolérance à la lumière et son agilité bien trop naturelle... Tout ça paraissait trop parfait, il avait vraiment l'air araignée.
Miguel embrassa ma tempe.
« Je peux t'emprunter une brosse à dents ? Je fais vite. »
« Elles sont en bas de l'armoire blanche. » je répondis.
Nos mains se séparèrent alors que je le vis s'en aller hors de la pièce. Miguel referma la porte sur ses pas, il me plongea dans un profond silence.
Peu après son départ, j'allais toucher du bout des doigts mon front, faiblement irritée, mes yeux se plissèrent et je poussai un profond soupir. J'avais rempli mes poumons et les avais entièrement vidé l'instant suivant. Je n'étais pas d'humeur à me brosser les dents ou à grignoter, je n'avais plus envie de rien faire. Choisissant de tout remettre au lendemain, je m'empressai de rejoindre mon lit et de me glisser sous ma couette. Je couvris mes jambes nues, me débarrassai de mon portable sur ma table de nuit et tapotai vigoureusement mon oreiller afin de corriger sa posture. Légèrement impatiente, je préférai patienter dans l'obscurité, le temps que Miguel me revienne.
Tout ce calme, cette fraîcheur et chaleur, la vue de mon jardin sur ma droite, à travers ma baie vitrée. C'était assez pour me relaxer.
Bêtise ou pas, j'étais revenue auprès de Miguel. J'avais l'impression de ne m'en rendre compte qu'en cet instant, j'étais frappée par ce fait, je comprenais l'ampleur de ma décision, de ma faiblesse. Mes paupières se firent lourdes. Mes yeux me brûlèrent un peu sous la fatigue et mon corps était endoloris de tous les côtés. L'envie de dormir se faisait de plus en plus forte. Cependant, j'étais dans l'incapacité de cesser de penser. Mon cerveau tiquait toutes les cinq secondes, il me forçait à repasser ma journée en boucle et à songer à Miguel, sous tous ses angles.
Même lorsqu'il revint dans la chambre, je n'y fis pas attention. Ça n'était que lorsque son torse se pressa à mon dos et que la pulpe de ses doigts se faufila sur mon bas ventre que je revins sur Terre. Miguel était brûlant, à moitié nu, aussi. Je n'avais aucun mal à le sentir : il ne portait qu'un boxer.
Sa bouche embrassa ma gorge. Il baisa ma peau, c'était... C'était divin. Son souffle me brûlait l'épiderme et ses mains raffermissaient leur prise sur le gras de mon estomac. Nos corps étaient si proches, si chauds, tels deux morceaux de bois fumant au dessus d'un brasier. J'étais recroquevillée sur moi-même, lui, collé à moi telle une carapace. Un faible murmur me quitta, tandis que, finalement, je l'abandonnai pour rejoindre l'étreinte de Morphée.
Et, Miguel glissant son visage dans le creux de ma nuque, taquinant mon bas ventre, se contenta d'être la dernière chose que je sentis avant d'enfin m'assoupir.
Nous avions passé la nuit ensemble, une nuit qui m'avait été si revigorante qu'en me réveillant le lendemain, j'avais eu cette curieuse impression d'avoir dormi cent ans.
Alarmée par une fine brise parfumée qui flottait dans l'air, je m'étirais. J'ouvris les yeux, et, au passage, fis tomber mon drap au sol. Ça sentait bon. Très bon même. Rien que renifler cette divine odeur sucrée suffit à ce que je me redresse. Mes paupières papillonnèrent. Je regardai autour de moi, la lumière du soleil qui brillait de mille feux m'aveuglait un peu, le temps que je cligne des yeux et m'en aille récupérer mon téléphone portable sur ma table de nuit. Il était huit heure et demie du matin. Cette constatation suffisait à me faire grogner, je poussais cette plainte et me laissais retomber sur mon matelas. Mon corps rebondit pendant que je soufflai tout l'oxygène présent dans mes poumons. Huit heure et demie... Je travaillais dans.. deux heures, à peu près ? Ça me fatiguait déjà.
Je me sentais bien là, dans mes draps. Je me recroquevillai contre ma poitrine, les paupières toujours lourdes et l'envie de retourner somnoler très présente.
Cependant, la curieuse odeur de petit-déjeuner qui provenait de mon salon continuait de me déranger. J'avais beau l'ignorer, et ignorer les grondements de mon estomac, je ne pouvais pas me résoudre à fermer les yeux sur les faits. Miguel était dans ma cuisine. Il était là, dans mon salon, à fouiller dans mes affaires, à faire comme chez lui, à se préparer de quoi petit-déjeuner avant de quitter ma maison. Ça me semblait familier. Ça me rappelait nos années passées ensemble.
J'en gloussai et secouai les jambes.
Toutefois, alarmée par mon comportement d'adolescente en chaleur, je me redressai et plaquai mes mains contre les côtés de mon visage. J'étais immonde. Je me répugnais.
« Tu délires, ma pauvre... »
Mes paroles me forcèrent à me lever, je me dépêchai de ranger ma chambre afin d'accéder plus rapidement à ma salle de bain. J'avais refait mon lit, rangé mes oreillers et peluches, entrouvert ma baie vitrée et je m'étais jetée dans mon armoire pour en extirper de quoi me changer. Tout ça m'avait pris une dizaine de minutes, la douche elle, une trentaine.
« Enfin levée ? »
Depuis la sortie du couloir, j'aperçus Miguel. Je le vis me faire face contre l'îlot de la cuisine, à déverser le contenu de la casserole dans deux assiettes, aux côtés de deux grands verres de jus de pomme sans me quitter du regard. Je terminai d'enfiler mes talons aiguilles dans un petit sourire et le rejoignis sans attendre. Miguel abandonna la casserole dans le lavabo, éteignit la plaque de cuisson et me servit mon assiette pendant que je m'assis sur un tabouret. Au moment où il l'a déposa sa main frôla la mienne. Je le remerciai d'une voix fébrile.
Miguel m'offrit une paire de couverts, de quoi boire mais refusa de s'asseoir, il resta devant moi, l'îlot nous séparant, debout droit comme un piquet.
« Tu as bien dormi ? »
Il me jeta un coup d'œil.
« Ouais. » me réponda-t-il la bouche pleine.
« Il a fait chaud, cette nuit, tu trouves pas ? »
« Un peu. Au fait, je t'ai utilisé ta douche. »
Je balançai nerveusement mes jambes d'avant en arrière. Qu'il était beau..
« Mhh, pas de problème. »
Miguel posa une main sur le bord de l'îlot, penché dessus pendant qu'il triait et attrapait sa nourriture. Ainsi installé, il m'offrit une splendide vue sur ses larges épaules et sa fine taille. Il était vêtu de son costume de SpiderMan, sauf au niveau du visage. Je toussai faiblement, soudainement frappée par mon état distrait.
« Tu as prévenu ton assistante que tu allais bien ? »
Miguel me questionna du regard.
« Comment tu sais ? »
« Je te demande. »
« Je m'en suis occupé hier soir. » expliqua-t-il. « Je vais revenir bosser ce matin, j'avais... J'avais juste besoin de me changer les idées. »
Sa réponse me fit hocher la tête.
« Ils t'ont contactée ? »
« Je sais pas si j'ai envie de répondre à ta question, honnêtement... »
Miguel esquissa un faible rictus, finissant de ramasser les restes de sa nourriture de sa fourchette, il s'en alla juste après saisir son verre et boire un peu de son contenu.
« C'est ton assistante, cette Lyla, qui m'a appelée hier. Et puis... Il y avait tous ces héros masqués derrière elle, ils étaient fous d'inquiétude. »
Un de ses sourcils se arqua.
« Tu es vraiment populaire. » murmurai-je.
Miguel laissa un rire lui échapper.
« Je dirais pas "populaire", plutôt : important. » il me reprit. « Je suis pas le plus intelligent de la Spider-Society, mais j'en suis son créateur, je maintiens un certain rythme et je m'occupe de prendre des décisions justes pour tous les SpiderMen existants. Même si, parfois, ça peut déplaire. »
« Je vois. »
Il avait fini son assiette avant moi, je le regardais donc la jeter dans l'évier et s'occuper de la vaisselle. Quelques secondes s'écoulaient. Bientôt une minute.
« Tu reviendras ? »
Miguel ne répondit pas.
« Ici, je veux dire. Tu reviendras me rendre visite ? »
Je devais avouer avoir un peu peur.
J'avais peur de m'être emballée, que, aussi vite qu'il soit arrivé, il ne s'en aille avec ses belles paroles. J'étais convaincue qu'en connaissant son plus grand secret, Miguel et moi pourrions avancer, je n'aurai plus peur de le voir partir, j'attendrai ses retours avec hâte et je saurai amplement le remercier d'avoir encore une fois sauvé notre univers. Mais que se passerait-il si Miguel me disait non ? J'avais peur qu'il me dise avoir mûrement réfléchi et qu'ainsi il refuse de nous donner une seconde chance. Je l'aurais haï pour ça, à en crever.
« Évidement que je reviendrai. Quelle question... »
Miguel essuya grossièrement ses mains contre un torchon, il se tourna rapidement dans ma direction et me dévisagea bien curieusement.
« J'y ai longuement réfléchi. » il m'avoua. « Tant que tu te tiens à l'écart de la Spider-Society, rien ne devrait t'arriver. Je rentrerai te retrouver, sain et sauf. Je ne veux plus qu'on se sépare. »
« Moi non plus, Miguel. »
Il accueillit ma réponse dans un sourire.
Posant mes pieds au sol, je m'en allai le rejoindre, abandonnant ainsi mon assiette vide. Je marchai jusqu'à arriver à sa hauteur et lui offris ma main, Miguel la saisit sans attendre, il entremêla nos doigts dans une chaude étreinte.
« Je t'aime tellement. »
Miguel s'empressa de caresser ma joue avec son autre main.
« Je t'aime aussi. »
J'adorais la sensation de sa peau sur la mienne, ça me donnait envie d'en avoir plus. J'avais toujours cette impression de ne pas être assez proche de lui. Elle me démangeait de l'intérieur. Miguel se pencha au dessus de moi et déposa un doux baiser sur ma joue, puis la commissure de mes lèvres.
« Tu veux aller dîner quelque part, ce soir ? »
J'hochai vigoureusement la tête.
« Pourquoi pas sur la lune ? Ils ont ouvert une nouvelle pizzeria là-bas, je meurs d'envie de la tester. »
« Je passerai te chercher alors. »
Sa réponse s'était faite douce. Il avait murmuré contre ma joue, faisant à répétition se frôler nos lèvres. Et puis, il avait descendu sa main au niveau de ma nuque, et il m'avait attirée à lui pour, tendrement, embrasser ma bouche. J'avais immédiatement répondu à son baiser. Nos lèvres se rencontrèrent, nos yeux se fermèrent et nos nez vinrent expirer au même moment. Je lâchai la main de Miguel après un instant, forcée de m'agripper à son avant-bras afin de ne pas perdre l'équilibre sur mes pieds. Il me rendait toute fébrile. Je focalisai toute mon attention dans notre baiser, incapable de songer à autre chose qu'à la douceur de ses lèvres, ou le doux nectar qu'était son odeur corporelle. J'étais tellement attirée par son être tout entier que j'en oubliais de me maîtriser. Et je perdais le contrôle.
Miguel pressa son visage davantage contre le mien, je sentis les traits de son visage se froncer, il raffermit sa prise sur ma nuque, me faisant déglutir. Lorsque lui et moi nous séparâmes, ce fut à bout de souffle que nous nous toisâmes. Miguel déposa un fier baiser sur ma tempe puis sur le dos de ma main qu'il avait fermement agrippé.
« Tu es magnifique. » il murmura.
« Et toi tu es... SpiderMan ? »
Un rire lui échappa.
« Ta tenue n'est pas réelle non ? » le questionnai-je finalement en glissant la pulpe de mes doigts sur sa nuque, là où une certaine limite se créait entre son costume et sa peau.
« Non, c'est vrai. »
Comme pour appuyer ses propos, Miguel fit apparaître son masque, il se matérialisa depuis la nuque jusqu'à descendre sur sa mâchoire. Ça s'était fait avec efficacité, d'un naturel déroutant.
« Wow. »
Voir Miguel en tant que SpiderMan était étrange, charmant, mais très étrange.
Son visage était masqué derrière cet espèce d'hologramme d'un bleu marine. Autour de ses yeux, des traits rouge brillaient, accentuant le côté expressif de son regard. J'y apportai ma seconde main. Je touchai Miguel avec grande curiosité, j'ignorai ses mains qui se faufilèrent sur mes hanches pour analyser le matériel qui l'habillait. Miguel me plaqua contre son torse et rapprocha sa tête de la mienne, me permettant ainsi de plus amplement le regarder.
« C'est splendide. » je chuchotai.
« Tu aimes ? »
« Mhh, beaucoup. »
La seconde suivante, son visage réapparut.
Le regard de Miguel était plongé dans le mien comme si, même si j'avais été incapable de le voir à cause de son masque, il n'avait pas cessé de m'observer un seul instant. Je balançai mes yeux dans les siens. Telle une pendule, je le toisai. Notre proximité me faisait beaucoup d'effet, mais je n'étais pas capable de me reculer de lui, j'étais comme figée sur place, hébétée face à tant de splendeur.
« J'ai du mal à me dire que tu es SpiderMan. Le SpiderMan. »
Je caressai sa joue de la pulpe de mon pouce, des étoiles dans les yeux.
« J'ai encore du mal à y croire. »
Miguel pressa gentiment sa main sur ma nuque afin de coller son front au mien, ses yeux se fermèrent.
« Je sais. »
Déposant un doux baiser sur sa joue, j'attirai son attention. Miguel me questionna du regard, je souris en retour, puis, je pouffai. La situation n'était pas particulièrement drôle, j'étais juste heureuse, je sentais mon cœur battre fort dans ma poitrine, il palpitait, il pétillait, il s'emballait comme si un feu d'artifices s'y déroulait. Et à l'admirer ainsi, à perdre mon regard dans le sien, je ne pouvais pas m'empêcher de rire. C'était un rire rempli de bonheur.
« Quoi ? »
« Rien. Rien du tout. »
Je soupirai d'aise.
« Je suis juste heureuse. »
« Ah ouais ? »
« Mhh. »
« Ça tombe bien, » murmura-t-il. « parce que moi aussi. »
Miguel embrassa une dernière fois mes lèvres. Je fermai mes yeux à la sensation de sa bouche pressée contre la mienne. Je fondis sur place. Lorsqu'il se recula de moi, j'en grognai d'inconfort.
« Miguel... »
Sa main posée sur ma nuque dévia sur mon menton, il s'en alla le saisir.
« Regarde moi. »
« Je te regarde, mon amour. »
Le suppliant du regard, j'espérai le sentir à nouveau m'embrasser, cependant, Miguel ne bougea pas. Il respirait doucement. Miguel se contenta de garder les yeux ouverts, très attentif à mes réactions pendant que, de mon côté, je mourrais d'envie de le toucher. Miguel relâcha doucement mon menton, tout ses gestes étaient méticuleux, très doux. Il s'en alla poser le dos de ses doigts sur ma joue, son front toujours pressé contre le mien.
Rien qu'en me regardant ainsi, je compris où il voulait en venir.
De ses beaux yeux sombres, m'exprimant un sentiment d'amour incomparable, Miguel me témoigna son infaillible loyauté et la promesse d'un futur à deux.
Il n'avait pas besoin de parler, ça aurait été futile. Nous avions assez échangé comme ça, à présent, il me suffisait de le regarder pour le comprendre. J'avais cette déroutante impression de lire dans ses pensées, et j'appréciais ça, un peu plus que je ne l'aurais cru. Miguel et moi restâmes ainsi silencieux. Nous avions tout le temps du monde entre nos mains. En cet instant, il ne ressentit pas le besoin de parler tandis que moi, j'avais simplement envie de le sentir proche. Je ne voulais plus le laisser s'en aller. Plus jamais.
J'en oubliai mon job, lui le sien. Il n'y avait que nous, nous deux, enlacés dans le côté de ma cuisine à côté du lavabo, nos deux silhouettes bercées par les doux rayons matinaux du soleil. Et, pour rien au monde, alors que je m'accrochai désespérément à lui, je n'aurai désiré que ça ne s'arrête.
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paulysson1 · 2 years
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Le piano-bar
J'emmènerai l'ex femme de ma vie,
Mais,
Le rideau était fermé,
Elle me regarda de dos,
Et ouvra ses paupière et dans sa magie les rideaux métallique se soulevèrent.
Des émotions qui m'mprégrèrent,
Les dieux, les anges et les démons étaient là,
Prêt à la fête avant mon trépa.
Pénétrant dans les abysses de l'antre,
Jamais de calices pour des géants.
J'ai vu tout le monde écervelée soir la : ancêtres, futur enfants et même des déments,
Certain ma foi palpitant.
Et dans l'obscurité d'une salle,
Je voyais son âme,
À cette étrange volonté ==> elle me donnait à être et exister,
Côme un pantin créé à qui l'on aurait volontairement coupé ses ficelles,
Sans jugement de ses fautes tellement il découvrait la vie,
Donnât sens à l'impie,
Mais à la fin le souffle divin disparaît,
Et sans un regret,
Un nouveau souffle s'installe.
P.amis
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lcmb · 26 days
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1990
Nouvelle vague
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Dancing Machine
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L'ex-femme de ma vie
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These Foolish Things
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The Voyage of Captain Fracassa
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marie-bradshaw · 5 months
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So what?
Ce soir, je suis sortie de ma zone de confort.
Tellement loin que je ne la voyais plus que de loin.
Vraiment loin.
Un horizon flou qui s'éloignait à mesure que je faisais un pas en avant vers l'inconnu.
Vers lui.
Rencontré il y'a tout juste 24h, tout s'est passé si vite que j'ai à peine eu le temps d'enregistrer l'information.
Une minute il était là en face de moi à parler de tout et de rien, l'autre je m'abandonnais complètement dans ses bras.
A "s'imprégner" comme il s'est plu à me le dire.
Une bien belle expression que je fais mienne à présent.
Une journée entière passée ensemble, à rire, à se découvrir, m'ont fait me dire: "et pourquoi pas?".
Sauf que voilà, comme dans chacune de mes dernières histoires avec des hommes plus âgés que moi, tout tourne encore beaucoup autour de l'ex-femme/compagne, de leurs espoirs brisés de constater qu'ils s'étaient malheureusement trompés.
Que non, ce n'était pas la femme de leur vie.
Ils sont tous tombés de haut.
Et ils en souffrent tous encore.
Je ne peux pas leur jeter la pierre.
Qu'aurais-je fait à leur place?
Je ne sais pas.
Ma situation à moi est toute autre.
Mes ex ne collaient soit pas au timing soit tous ont commencé par se présenter en princes charmants, droits et bienveillants, pour finir par se transformer en monstres possessifs dont l'ultime but était de me couper les ailes, de m'enfermer dans leur prison dorée et de ne plus jamais me laisser à la vue de tous de peur de me perdre.
Le genre qu'on ne regrette pas.
Le genre qui nous apprend à se déconstruire pour mieux se reconstruire, et surtout à aimer la solitude.
Alors toute à l'heure, quand Flo, mon meilleur ami, m'appelle et que je lui dis que cet homme là vient de me demander de venir à son anniversaire après si peu de temps passé ensemble, entourés de l'ex amour de sa vie à qui il a tout donné de sa personne, de leur enfant, et de ses amis.
J'ai le coeur en sursis.
"Il est... il est ... je ne peux pas te le décrire. Il est différent.
J'ai l'impression de tout redécouvrir avec lui, je ne peux rien anticiper, je ne sais plus où je campe ni comment je m'appelle - mais quand il me serre contre lui je me sens bien. Apaisée. " lui dis-je
"Alors ne fais pas la sauvage. Donnes-lui une chance" me dit-il avant d'ajouter:
"Ou je t'inscris à Mariés au Premier Regard !" en riant
Je me moque mais je l'écoute.
Parce que lui il sait.
Lui il a vu, lui il m'a vue changé et évolué.
"Tu sais - je me pose la question par moments de pourquoi telle ou telle fille est célibataire, malgré tout ce qu'elle a à offrir- et puis je pense à toi.
A la personne incroyable que tu es, à ta situation, et je sais pourquoi toi tu l'es.
Parce que les autres ne savent pas. Ils ne font que deviner les marques sur ton corps, sur ton âme, ils ne pourront jamais imaginer que tu es revenue de l'enfer pour être là aujourd'hui.
Ils veulent tous ce qu'ils pensent savoir de toi.
Ton look, ton côté piquant, ta douceur, ta culture.
Ils chassent une image et toi tu les as laissés faire. "
Ses mots me touchent en plein coeur.
Alors je décide de prendre un risque, en sachant pertinemment que la situation va être horriblement malaisante pour moi, qui ne suis rien, qui n'ai aucune légitimité ou place dans sa vie au moment présent.
Que sur des "peut-être", et des "pourquoi pas", la femme pour qui il a fait tout ce que j'aurais rêvé qu'on fasse pour moi, va décider d'un hochement de tête de si je suis assez bien pour lui et pour leur enfant.
Je ne souhaite à personne de ressentir ce que j'ai pu ressentir ce soir.
Etre mis à nu, sur la sellette, des chaînes aux pieds et la promesse d'un saut dans le vide incisif à 2 mètres.
Dieu soit loué, un ami que je devais rejoindre plus tard m'a accompagnée et j'ai pu dérivé l'attention sur lui pour reprendre mon souffle.
Là en haut, j'avais l'air sûre de moi, mais sous la table mes genoux tremblotaient.
J'étais entrain de me jeter à l'eau pour quelqu'un que j'apprenais tout juste à connaître suffisamment pour le laisser passer la barrière de sécurité en acier trempé que je me suis forgée au fil des années.
"T'as vu qu'il l'a laissée seule là, livrée à elle-même quand même" ricanait doucement l'ex amour de sa vie d'un regard en coin en pleine messe basse à sa meilleure amie avec qui j'avais eu bien du mal à nouer quelque contact que ce soit.
L'étrange sensation d'être un naufragé au bord d'une île blindée.
"Pourquoi tu t'infliges ça?" me murmurait une voix à l'intérieur de ma tête.
Mon ami, Geoffrey, m'écrivit à ce moment-là pour savoir si je voulais rester ou honorer notre réservation au restaurant.
Je regardais rapidement mon inconnu, en quête d'un signe, d'une attention, d'un geste, qui m'aurait montré l'importance ou tout au moins la reconnaissance de ce saut dans le vide que j'avais fait pour lui et cette idée que tout pouvait arriver.
Obnubilé par sa playlist, aveugle à mon regard qui cherchait désespérément le sien, de cette bouée que je semblais lui lancer, je fis un signe de tête négatif à mon ami qui comprit aussitôt et nous sortit de là aussi sec.
Si je devais résumer cet essai, je dirais que si j'avais été amenée à jouer sur le terrain en joueur remplaçant à 5 minutes de la fin avec un score de 5-1 parce que le joueur clef s'était blessé - largué là pour combler un vide, assurer la relève - le feeling aurait été sensiblement similaire.
Et le truc c'est que - chacun a ses expériences et son passé, il en est maître si il le souhaite - mais je ne souhaite quant à moi être le remplaçant du jeu de personne.
Moi je veux être le personnage principal de l'histoire d'un homme si extraordinaire que je lui ferai suffisamment confiance pour lui confier le plus important, mon coeur dans sa globalité.
Plus calme que moi mais tout aussi puissant.
Il aimera chaque maladresse, chaque bleu, chaque bourde, et plus que tout, il saura voir en moi ce que je ne montre pas toujours.
Le sacrifice, la grandeur, la bonté, la vulnérabilité.
Au fond je me fous de savoir à quoi il ressemblera.
Tant qu'il me regarde comme un trésor à protéger absolument.
Comme son roc, son far dans la nuit, son abri en pleine tempête.
Celui qui saura voir, et comprendre, que derrière chaque acte de bravoure, d'indépendance, de force, se cache une sensibilité dont il faut prendre soin sans chercher à en prendre possession.
Celui qui pourra me dire en me regardant dans les yeux, qu'il n'aurait jamais rêvé de me rencontrer.
Qu'avec moi tout est naturel et évident, et que ma complexité fait partie de ma beauté.
Celui qui saura deviner mes peurs, et, sans avoir à prononcer un seul mot, d'un simple regard, d'un simple geste, me transmettre qu'il croit en moi, que je ne suis plus seule, que je peux compter sur lui.
Qu'il me connaît.
Que c'est du vrai moi qu'il est tombé fou amoureux et pas d'une image lissée.
Instinctif.
Moi je rêve de cet homme qui pourra dire à nos petits enfants dans 30 ans qu'il remercie le ciel tous les jours de m'avoir mise sur sa route.
Est-ce que je fabule ou cela se peut-il encore?
Tout semble tellement incertain, le chemin interminable.
Hier soir je priais, seule dans ma chambre, un chapelet serré fermement entre mes deux mains pointées vers les cieux.
En silence.
"Merci seigneur.
Merci de ne m'avoir jamais abandonnée.
Quand tout était noir,
Quand je n'étais plus qu'une pauvre chose recroquevillée en sang dans un abysse sidéral, seule au monde - de m'avoir tendue la main - donné la force de me relever - fait ressentir que je ne serai jamais vraiment livrée à moi-même si je regardais dans ta direction "
Les larmes ruisselaient sur mes joues, dans une course effrénée.
Religieusement.
De prendre le temps de remercier la force qui m'avait fait me tenir debout quand j'avais le sentiment d'avoir les jambes brisées.
Sans rien demander.
Faire preuve d'humilité et de piété à l'heure où l'on prie pour tout et n'importe quoi.
Emplie de cette gratitude de seuls ceux qui auraient dû mourir et sont toujours présents connaissent.
De cette autre chance.
Je ne crois pas en la Bible, je ne crois pas qu'une religion soit meilleure qu'une autre, je crois qu'on se parle au fond tous de la même chose d'un point de vue différent et que les guerres menées au nom de Dieu ne sont que des conquêtes de territoires à peine voilées.
Je n'ai jamais eu peur de la mort d'ailleurs, bizarrement.
Toute jeune déjà, je me disais que de donner sa vie pour sauver celle de quelqu'un serait la plus belle manière de mourir.
Faire ce don si précieux.
A ce moment-là il faut bien dire aussi que je ne me rendais pas compte de ce que la mienne valait vraiment.
Tous les soirs je me perchais sur le rebord de la fenêtre de ma chambre, ou carrément sur le toit, et je regardais le ciel songeuse à ce qui m'avait amenée ici.
Au but de mon existence.
A la raison qui faisait que ma mère me méprisait et mon père m'ignorait carrément.
Les livres, la poésie, cette fantaisie, me permettaient de m'échapper le temps qu'il fallait pour me sentir de nouveau valeureuse.
"Et si en fait j'étais comme tous ces super-héros qui démarrent mal pour finir par être extraordinaires? Quel peut être mon super pouvoir à moi ?"
Assise là, en pleine réflexion, ne trouvant pas par quoi que je pouvais me distinguer des autres - j'en arrivais toujours à la même conclusion:
" Chaque vie compte. chaque vie est précieuse.
Et si je ne suis ni plus belle ni plus intelligente ou talentueuse qu'une autre, je peux toutefois faire don de la mienne pour sauver celle d'un autre"
Cela me réconfortait quelque part.
Aujourd'hui je sais que nous avons tous en nous le potentiel d'un super-héros.
Et qu'il ne tient qu'à nous de l'être plus.
J'ai choisi un chemin difficile quand rien ne m'y obligeait pour le devenir un peu plus, pour trouver un sens à ma vie, une conviction.
Celle de faire une différence dans celle des autres- aussi minime soit-elle plutôt que de participer à une excroissance de profit d'une énième entreprise.
Je voulais, et je veux toujours, les aider à se sentir en confiance, à l'aise, bien dans leurs baskets et partir conquérir leurs rêves quels qu'ils soient.
Ca- c'est ça mon rêve.
Réussir à en aider le plus possible, construire une entreprise à mission florissante qui fasse du bien à la planète, et partir à l'aventure dès que possible avec le partenaire de ma vie.
Celui avec qui je prendrai plaisir à construire un nid douillet tout en restant jeunes et fous, pleins d'entrain et d'envie de croquer le Monde.
Peut-être que j'en demande trop - peut-être que je rêve éveillée.
Mais sans rêves qui sommes-nous?
Des robots.
De l'IA.
Et moi je dis que l'humain peut encore faire de belles choses.
M.
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omagazineparis · 8 months
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Peng Shuai sort de son silence, son interview chez L'Équipe
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Lors de cet entretien exclusif, la joueuse de tennis revient sur les accusations de viol qu'elle avait proféré en novembre dernier. Elle parle d'un "énorme malentendu". La joueuse de tennis chinoise Peng Shuai, dont la disparition avait fait le tour des médias internationaux, est enfin sorti de son silence. Elle a ainsi accordé une première interview dans un média international, le journal sportif "L'Equipe". L'entretien a été réalisé alors que les journalistes du journal sont actuellement en Chine pour couvrir les Jeux Olympiques de Pékin. L'interview était une suite de question-réponse, dont certaines ont été porté à sa connaissance au préalable. Elle était accompagnée par deux personnes, l'une est membre du Comité olympique chinois et l'autre dont les journalistes ignoraient son rôles, parlait français. En échange, Peng Shuai n'a aucun droit de relecture sur la publication. Le directeur de la rédaction Jérôme Cazadieu a raconté les conditions de l'interview aux confrères de France Info. "Elle n'est pas libre ni de sa parole ni de ses mouvements" a-t-il déclaré à la radio le 7 février. https://twitter.com/franceinfo/status/1490587688021508096?s=20&t=QkESEvKEay5CWKL0il03Lw Pas de disparition, pas de viol et retraite sportif La joueuse a donc répondu à toutes les questions des journalistes français. Tout d'abord, elle réfute la thèse de la disparition. "Je n'ai jamais disparu. Simplement, beaucoup de gens, comme mes amis y compris du CIO (Comité internationale Olympique, ndlr) m'ont envoyé des messages, et il était tout à fait impossible de répondre à tant de messages", a-t-elle répondu au journal. Avant d'ajouter : "C'est pourquoi je ne sais pas pourquoi l'information selon laquelle j'avais disparu s'est répandue". La joueuse de tennis était réapparu après une quinzaine de jours sans nouvelles, sur plusieurs vidéos. Elle s'était également entretenu avec le président de la CIO le 21 novembre dernieR. Elle nie également en bloc avoir accusé un haut dignitaire chinois d'agression sexuelle même quand les journalistes de l'Equipe insistent. ""Agression sexuelle ? Je n'ai jamais dit que quiconque m'avait fait subir une quelconque agression sexuelle" a-t-elle déclaré à l'Equipe. Peng Shuai a aussi annoncé prendre sa retraite sportif. en effet, la joueuse de tennis met fin à sa carrière. « Le tennis a transformé ma vie, m’a apporté de la joie, des défis et tant de choses encore. Même si je ne participe plus à des compétitions professionnelles, je serai pour toujours une joueuse de tennis. » a-t-elle déclaré. Pour le directeur de "L'Equipe", il faut voir au-delà de ses réponses et "dans l'interstice la réalité". La jeune femme n'étant sûrement pas maitresse entière de ses actions, ses réponses sont probablement orientées par le pouvoir chinois. À lire également : La culture du viol : une crise sociétale Une accusation de viol qui a fait le tour du monde Début novembre, Peng Shuai avait accusé l'ancien vice-Premier ministre chinois de viol. Dans une publication postée en ligne, la joueuse de tennis affirmait avoir été contrainte à une relation sexuelle par Zhang Gaoli. Sa disparition depuis cette prise de parole inquiète. Mais qui est Peng Shuai ? Pourquoi dérange-t-elle tant Pékin ? En 2013, Peng devient championne en double à Wimbledon en 2013, puis à Roland Garros l'année suivante. Classée 191e joueuse mondiale en double, Peng Shuai est une star dans son pays. Début novembre, la joueuse publie une lettre accusant un ancien haut dirigeant du parti communiste, Zhang Gaoli, de viol. Depuis la publication de cette lettre par Peng Shuai, la jeune athlète reste introuvable. En effet, la lettre a été publiée sur le compte officiel Weibo, équivalent chinois de Twitter, de la joueuse de tennis. Dans cette lettre, elle explique que les faits se seraient déroulés entre 2013 et 2018. La tenniswoman ajoute également avoir été plusieurs années la maîtresse de l'ex-dirigeant chinois, une relation abusive selon elle, à laquelle elle aurait mis un terme aujourd'hui. Son message et son compte ont ensuite été supprimés. Depuis cette prise de parole, la jeune femme est introuvable. Inquiets, plusieurs stars de tennis lui ont apporté leur soutien sur les réseaux sociaux. Dans un tweet publié hier, Serena Williams se dit “dévastée et choquée” de la disparition de l'athlète chinoise. Elle demande aussi l'ouverture d'une enquête. https://twitter.com/serenawilliams/status/1461408866697105413?s=20 Peng Shuai : un nouvel e-mail sème encore plus le doute sur sa disparition ! Après avoir gardé le silence pendant près de deux semaines, la Chine brise enfin le silence sur la disparition de la tenniswoman. En effet, le média d'État chinois CGTN a publié mercredi un e-mail sur Twitter. Il s'agit d'un e-mail envoyé par l'athlète chinoise à Steve Simon, le directeur de WTA. Cette association gère le circuit professionnel féminin de tennis. Mercredi dernier, le média a publié l'intégralité du contenu de l'e-mail sans expliquer comment il a pu obtenir ces informations. Dans cette capture d'écran, Peng aurait affirmé : «Je n'ai pas disparu, et je ne suis pas en danger. Je suis juste en train de me reposer à la maison et tout va bien ».Peng Shuai https://twitter.com/CGTNOfficial/status/1461025491842916358?s=20 Dans ce mail, la championne de tennis dément aussi toute accusation de viol envers l'ancien haut-responsable chinois. Cependant, cette nouvelle information sème encore plus le doute sur la disparition de la jeune sportive ! En effet, Steve Simon ainsi que l'ONU demandent à Pékin une preuve vérifiable assurant que Peng est hors de danger. Aussi, certains ont remarqué un curseur de souris dans la deuxième ligne de l'e-mail. Ce qui suggèrerait alors que ce message n'aurait pas été réellement envoyé. Mais ce n'est pas tout ! Des observateurs ont souligné que la phrase : «J'espère que le tennis chinois continuera de progresser» à la fin de l'e-mail posait problème. En effet, cela serait une preuve de l'intervention de l'État chinois dans la rédaction du message. Selon ces mêmes observateurs, le langage formel et robotique ressemble à celui utilisé par la propagande d'État, un style très différent des propres messages de Peng sur Weibo. Read the full article
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lesombresdeschoses · 1 year
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I'M DERANGED
W. Agency - Victoria
— Avez-vous retrouvé le miroir ? demande Madame Montgomery.
— Oui, répond Mortensen.
Ren sert un thé à la cliente.
— Merci.
— Auriez-vous un lien de parenté avec un certain Beaumont... Felix ? poursuit l'enquêtrice.
— C'est possible, je ne sais pas... Beaumont était le nom de jeune fille de ma mère.
— Je croyais que c'était celui de votre mari... pardonnez-moi ma question, mais comment sont morts vos parents ?
— Dans un accident de voiture. Ils rentraient de voyage, lance la femme, intriguée.
L'enquêtrice acquiesce, les yeux dans le vide.
— Le passé de votre famille est relativement sulfureux... le schéma se répète...
— Que voulez-vous dire ? Vous m'accusez de quelque chose ?
— Loin de moi cette idée, Madame, mais comprenez que je ne peux pas vous rendre cet objet sans être sûre qu'il appartient bien à votre famille. Une photo ce n'est pas suffisant. Auriez-vous des preuves quelconques, une facture, le témoignage d'un cousin... d'un oncle ?
Law guette la réaction de Madame Montgomery. La cliente reste stoïque.
— Je n'ai personne. Pas d'oncle, ni de tante. Mes grands-parents sont morts. Éventuellement, un vieil album photo que mon grand-père gardait dans son secrétaire. Cela vous conviendrait-il ? Je peux même faire un test ADN, si vous le souhaitez.
Mortensen sent poindre l’ironie dans la voix de son interlocutrice.
— Nous n'irons pas jusque-là. Apportez l'album, cela suffira. Nous ne sommes pas de la police, réplique Ren. Puis s'adressant à Law : n'est-ce pas ?
— Bien sûr que non. Monsieur Beaumont est prêt à vous céder le miroir, nous n'allons pas nous formaliser.
L'ex-flic se lève, suivie de Madame Montgomery. Tout le monde se serre la main. Ren accompagne la cliente, referme la porte derrière elle, puis se retourne vers son associée, qui la regarde l'air de dire : « je sais ».
*
Paddington flat - 7 AM
Law, Ren et Felicia prennent leur petit déjeuner dans le salon.
— Attendez les filles, vous êtes sérieuses ?! Y'a un homme enfermé dans mon miroir et ce serait votre cliente qui l'aurait coincé dedans ?!
— C'est l'idée.
— Et Montgomery, aujourd'hui, aurait genre quatre-vingt-quatorze ans et pas une ride ?!
— C'est ça.
Felicia s'adresse à l'ex-inspectrice :
— D'où ta question - un peu cliché - sur le vaudou, l'autre nuit.
Mortensen lui répond, en faisant une grimace gênée :
— C'est ça...
— Faut sortir ce mec de là !!
À ce moment, un livre tombe sur le canapé. Le titre : Alice de l'autre côté du miroir. L'ex-flic le prend puis le pose sur la table basse.
— Il m'a l'air d'être d'accord. Vous en pensez quoi les filles ?
— On le sort de là !
La colocataire se tourne vers son amie, l'air malicieux :
— Il est comment ?
— Plutôt beau mec, répond la rousse, sourire en coin.
— Tu l'as vu ?! interroge Ren, surprise.
— Le jour du rendez-vous avec Madame Montgomery, je suis arrivée en retard. J'avais rêvé de Louise, enfin de Madame Montgomery, maintenant j'en suis sûre... bref peu importe. Elle était en train de tuer son oncle. Un poison qu'elle a mis dans son thé. J'ai pas percuté de suite à cause de la couleur de cheveux. Surtout que la cliente a la quarantaine, alors que Louise n'a que quinze ans. Mais en creusant un peu... le visage, c'est bien elle. Alors je suppose que c'est bien lui. Pas très clair, hein ?
— Si, si. Toi et tes rêves prémonitoires. Et c'est moi la sorcière vaudou…
— Pas vraiment prémonitoires, c'est plutôt comme une lucarne sur le passé ou un autre monde... Je suis peut-être un flic bourru à la syntaxe suspecte et au vocabulaire discutable, mais tout de même, j'aime la poésie ! ajoute Law, pensive.
*
Louise tâte le pouls de son oncle. Il est entre la vie et la mort :
— Parfait.
La jeune fille se redresse, toisant l'homme gisant par terre. Elle lève ensuite les yeux vers la glace accrochée au mur d'en face, la scrutant d'un air grave. Le pauvre bougre s'y reflète. Le regard en direction de sa nièce, il constate, horrifié, qu'il n'est plus à ses pieds. Louise décroche, du haut du miroir, une pièce représentant une chouette entourant un crâne de ses ailes, la met dans sa poche, puis sort de la salle.
*
Paddington flat - 6 AM
Mortensen se réveille en sursaut, se lève du canapé et fonce dans sa chambre. Sa collègue y dort du sommeil du juste.
— Ren, bouge ton cul ! Je sais comment faire !
L'associée s'extirpe du lit en gémissant. L'enquêtrice sort de la piaule, puis court réveiller Felicia. Elle lui tire sa couette en beuglant :
— Fili ! On a besoin de toi ! Move you're ass !
— Espèce de barge, lui lance la flatmate se levant mollement pour traîner instinctivement ses pieds vers la cuisine.
Quelques minutes plus tard, la bouilloire fume. Felicia remplit une théière, puis l'amène au salon. Law et Ren sont assises sur le canapé. Servant le thé - dans les mugs pas lavés de la veille, une hérésie pour la belle d'Afrique, à la discipline diamétralement opposée au mode de vie d'adolescant de sa colocataire - elle s'installe dans le fauteuil, faisant face aux deux enquêtrices :
— Bon, c'est quoi le plan, les filles ?
— On sort l'oncle du miroir, lance la rousse sur un ton convaincu.
— Comment ? demande la blonde perplexe.
— En utilisant le principe d'équivalence des charges, d'après la théorie de science-fiction de ma petite fée vaudou, répond Law, faisant un clin d’œil à son amie.
— OK. Mais ce n'est qu'une théorie, rétorque Felicia, quelque peu désarçonnée.
— On n'a pas le choix. Le gars vit un enfer depuis près d'un siècle. Au pire, s'il meurt quand on l’aura sorti de ce piège, on aura abrégé ses souffrances ! J'ai une autre théorie, qui expliquerait certaines choses, en supposant que Louise soit Madame Montgomery. Même si, j'en suis sûre... passons. Tout ce que j'ai rêvé sur la gamine se passait dans les années vingt. Je suis une grande fan des séries Hercule Poirot et Miss Fisher's Murder Mysteries, alors vous pouvez être certaines que je ne me plante pas de décor ! Bref. La mère Montgo aurait aujourd'hui près de quatre-vingt-quatorze ans. Elle aurait conservé sa jeunesse, mais comment ? En enfermant son oncle entre la vie et la mort, de l'autre côté du miroir... c'est l'état de Bardo. Genre, les limbes chez les bouddhistes. En le sortant de sa temporalité, elle fige le temps. Pas de temps, pas de fin, pas de mort. C'est source d'immortalité et l'amulette au hibou fait le lien, comme un cordon ombilical lui transmettant l'énergie saturée, extraite du « moment cristallisé ».
Mortensen regarde ses amies - les mains levées faisant le signe représentant des guillemets - fière de sa théorie. Soudain, Ren s’exclame :
— Mais la Montgomery ne fait pas quinze ans ! Si ce processus arrête le temps…
— Ouais, ça aussi j’y ai pensé ! Le seul truc possible, c’est que ça ralentisse le vieillissement. En fait, le flux ne s’arrête pas complètement vu qu’il est intégré à celui de la réalité ! Un peu, tu vois, comme le phénomène de frottement en physique, qui finit par arrêter l'objet en mouvement. Dans le vacuum il ne s'arrête jamais, mais le vacuum est un espace théorique. Une poche dimensionnelle dans notre dimension. Imagine la cocotte minute qui libère de la vapeur pour pas te péter à la gueule.
— Comme une temporalité à double vitesse. Être sur l’autoroute et sur une départementale, en même temps, lance Felicia pour soutenir les déductions de l’enquêtrice.
Les aventurières du bizarre finissent de boire leur breuvage, plongeant dans un silence méditatif. Le dénouement est proche.
*
W. Agency - Victoria
Londres s'éveille. Les trois comparses arrivent à l'agence. Elles se lancent dans les préparatifs de leur embuscade.
— On place les miroirs l'un en face de l'autre et on les cale avec des chaises pour la perpendicularité. Je veux un quatre-vingt-dix degrés tout pile avec le sol, pas de virgule. De la précision d'horloger ! Faudrait du ruban adhésif les filles. Ren tu peux les tenir s'il te plaît ?
L’associée s'exécute aussitôt, tandis que Law part chercher du matériel dans la cuisine.
— Tu veux dire qu'en l'enfermant de l'autre côté du miroir elle aurait créé, disons, un générateur d'immortalité ? demande Felicia, se tournant vers la kitchenette.
— Et de l'autre côté du miroir, l'atemporalité qui l'empêcherait de mourir, serait un peu comme une aiguille de montre qui tente sans cesse de passer à la seconde suivante, mais à chaque fois recule et ce mouvement perpétuel serait ce générateur d'énergie vitale qui l’empêche de mourir. J'ai bien appris ma leçon ? lance la blonde à la fée vaudou, tout en s'adressant à sa collègue, qui apparaît à l'embrasure de la porte, l'air surpris :
— C'est ça.
L'ex-flic brandit la boîte à outils :
— On va pouvoir passer aux choses sérieuses !
Les jeunes femmes placent deux chaises face à face, puis scotchent les objets aux dossiers. Ensuite, Felicia vérifie avec une équerre et un mètre ruban, que le parallélisme soit bien exact, que l'espace pour accueillir leur hôte soit suffisant. Puis, les trois drôles de dames se positionnent fièrement devant leur création.
— Mais, attends Law, si on le sort de là, il va mourir ! s’exclame la colocataire.
— On l'a dit : « c'est un risque à prendre ». Prêtes, les filles ?
Les deux camarades acquiescent. Law éteint la lumière. Un lourd silence emplit l'agence. Les filles guettent, tendues. Soudain, une boule d'énergie commence à se former entre les deux miroirs. Ren chuchote :
— La vache, ça fonctionne !
— Rien n'est sûr. On déroge à la règle de bienséance, Dame Renata. L'émotion, je suppose...
— Moque-toi, sale gosse immature.
Law sourit fièrement.
Progressivement, le halo chatoyant prend forme humaine. Au bout de quelques minutes, un homme se matérialise entre les deux panneaux de verre, agenouillé, tête basse. Il lève les yeux vers la petite équipe de Ghostbusters, l'air hagard. La blonde court allumer la lumière. La rousse se tourne vers elle :
— Attends !
Ébloui, il couvre son visage de ses mains, comme s'il brûlait. Ren le dévisage, désolée. Law avance vers lui pour le relever. L'associée se jette sur la chaise derrière le bureau. Les deux jeunes femmes l'aident à s'asseoir. Felicia s’éclipse dans la cuisine pour faire du thé. L'enquêtrice s’appuie sur la table, le regard fixe, concentrée sur ses objectifs. Tout ce petit monde, quelque peu décontenancé, reste réactif malgré la singularité de la situation.
— Vous vous appelez comment ? interroge l'ex-flic.
— James... Montgomery.
Ren et Felicia - sortie de la cuisine - se regardent : Mortensen avait vu juste.
— Montgomery...
Law se lève brusquement, saisit le miroir qu'elle a acheté, puis donne un coup de cutter sur le scotch.
— On range tout !
Elle se rue dans l’autre pièce, pose l'objet contre le mur à côté du canapé. Puis, revient cacher celui de Felicia derrière le bureau, après que les filles ont démonté leur installation improvisée. James, voyant l'objet, se pétrifie d'horreur, aveuglé par un flashback de Louise le regardant mourir. Law se tourne vers sa collègue :
— Vire les chaises, s'il te plaît. On va avoir de la visite, il faut faire place nette.
L'associée s'exécute. La colocataire disparaît dans la cuisine. S'adressant à James, l'ex-flic indique le salon :
— Allez vous cacher.
Engourdi, l'homme se lève lentement, puis se rend tant bien que mal dans l'autre pièce. Felicia ressort, à ce moment, plateau en main.
— Le thé est prêt. Je vais m’occuper de notre otage, je pense qu’il en a besoin.
— Parfait.
D'un léger mouvement de la tête, Mortensen remercie son amie, qui entre dans la chambre, refermant la porte derrière elle. L'homme, assis sur le canapé, se frotte nerveusement les tempes. Il ne comprend rien. Felicia pose le service sur la table basse, s'assoit, puis lui sert une tasse.
— Merci.
— Ça va bien se passer. Cette timbrée sait ce qu'elle fait.
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beatlesonline-blog · 2 years
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zasvepare · 5 years
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DIE HEIMAT Lettre à Arnaud
Graz,  le 24 juin 2019
Mon cher Arnaud, 
je suis désolé de ne pas avoir pu t’écrire plus tôt. Ayant relu ta dernière lettre ce matin (une bonne semaine après la réception!) j’ai décidé, sur-le-champ, de t’écrire une lettre véritable, oui, sur le papier, à la main, et par-dessus le marché en marchant ! La preuve ?
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J’ai tellement hâte de te montrer toutes les richesses que j’ai dénichées dans les marchés aux puces de Land Steiermark! Mais avant cela, j’aimerais te faire entrer tout doucement dans cette ville de Graz, tout comme l’avait fait Michel Butor dans l'Emploi du temps, en introduisant son lecteur pas à pas dans son Manchester imaginaire (tu peux t’imaginer, c’est le bouquin que je suis en train de traduire!). 
Le premier spectacle qui s'est offert à mes yeux ici à Graz, le soir même de mon débarquement, c'était une vieille femme, postée devant la parfumerie Orsay, et qui ne mendiait ni amusait le public, mais se plaisait à lui tenir un discours en pur serbe (à l'accent de Herzégovine); j'ai réussi à en intercepter quelques paroles que voici, pour tes oreilles : Je vous le baise bien, votre sang hitlérien, et je vous le baise encore sur un bûcher ! Allez le mettre, votre Hitler, dans le trou de cul, tous parmi vous!
(Je te dirais comment ça sonne en serbe. Si j’avais vu ça dans un bouquin, cela aurait l’air trop forcé et ridicule! Pourtant c'était comme ça dans la vraie vie : elle a même prononcé deux synonymes pour baiser ). Pour couper court, c'est en ce moment, cher Arnaud, que je me suis rendu compte que j'étais chez moi ! 
Et c'était seulement la première apparition de la Heimat. Il y en aura, s'avérera-t-il, d'autres apparitions vertigineuses, macabres même ! Lors de mes premières promenades fortuites (fortuites dans la mesure où le permet le plan urbanistique de la ville) dans la vitrine d’un antiquaire près du Jakominiplatz, j’ai surpris une carté du 19e siècle de la Bosnie (qui à l’époque était occupée par l’Empire Autriche-Hongrie) et des terres autour de celle-ci. J’y ai reconnu la ville de Valjevo, où j’ai passé quelques années avant l’école élémentaire (ici appelé Valiova), Kragujevac (Krakoiewacz) et Serraglio. Celle-ci est Sarajevo. 
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 Puisque nous y sommes, à Sarajevo, quelques jours plus tard, le quinze, j'ai passé à Volkshaus, une salle où le Parti communiste local (on m'a dit qu'ils étaient sérieux) avait organisé une Fête yougoslave (annoncée, aussi en serbe, comme Yugofešta). De quoi s'agissait-il donc? Il ne s’agissait, rien de moins, que de tenir des concerts des groupes de folklore pendant toute la journée de ce 15 juin, arrosés par des litres de bière Puntigamer et finalisés par le concert du groupe Zabranjeno pušenje. Tu n'en as pas entendu parler? Eh bien, dans les années 1980, ce groupe rock de Sarajevo était le seul représentant du mouvement de néo-primitivisme (va voir ce que c’est). Ses membres avaient réalisé le meilleur show de télé comico-satirique yougoslave qui s’appelait Top lista nadrealista (Liste top des surréalistes : ils n'avaient heureusement rien à voir avec Breton et co.). Un groupe culte, donc, que je retrouve trente ans plus tard à Graz, et ce lors de la fête des jeunes communistes styriens. Et c'était comment le concert ? Eh bien, franchement, je ne me souviens pas; ou à peine : je me souviens de quelques mesures de la chanson Zenica blues (leur réplique très drôle à Folsom prison blues de Johnny Cash; regarde : ils ont l’air tout réjoui) et de Šeki’s on the road again.  J’ai raté la plupart de leur concert car j'étais occupé à acheter de la bière. Un premier verre (plastique) de Puntigamer a pris une bonne trentaine de minutes de se transformer dans une gorgée et c’est alors que j’ai su que ce sera le seul verre. Ensuite, posté sur un escalier, je devais éviter la fumée. Quelle fumée ? Celle provenant des grilles spécialement aménagés pour l'occasion. Là on pouvait acheter des spécialités balkaniques, comme cevapcici, sarma, pleskavica, accompagnés tout comme il faut par des oignons. Bref, rien que de la meat is murder, avec un peu de choux, et tout cela dans un lieu appelé Dolly Bell, d'après le premier film d'Emir Kusturica. 
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J’étais, je t’avoue, pleinement déçu par ce spectacle nostalgique, organisé en plus par un parti communiste. J’y ai flairé une naïveté énorme, tout près de celle qui a poussé Peter Handke (à tous les égards mon écrivain bien aimé) de plaider pour Slobodan Milosevic en tant que sauveur de cette même Yougoslavie ! 
Ou bien cette parade du Parti communiste était une perspicacité de business (ça marchait bien lors de cette soirée) ! On n’échappe à la naïveté d’une Heimat du communisme-soft, western-friendly, surtout dans cette époque néolib. où ce communisme est transformé en marque commerciale (fût-ce dans une grille de cevapcici à la Sarajevo). Un communisme comestible. 
Pourtant, toutes les réserves prises en compte, le sentiment de reconnaissance d’un chez-soi a continué et s’est sensiblement accru quand j’ai, nous y sommes enfin, rendu visite au marché aux puces. Les plus grandes puces de Graz sont organisées dans la banlieue de Puntigam, tout à côté de la brasserie de la Puntigamer. Et le premier livre que je me suis surpris à prendre dans une boîte cartonnée et d’ouvrir, mais non, que j’ai retrouvé ouvert (tu te souviens qu’autrefois j’étais passionné de livres!); qu’est-ce que tu penses que c’était ? La première page de Sur le pont de Drina d’Ivo Andric, que tous les Yougoslaves connaissent par coeur. La preuve? La voici.  
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Mon dieu, Arnaud, la vie n’a commence qu’alors, à la vue de ces banlieues ! 
Il faut dire que, grâce à la bourse de cette institution locale de Kulturvermittlung, je profite (mais seulement durant un mois) d’un logement somptueux qui se trouve au centre-ville, tout en haut de la colline de Schlossberg, là où tout le monde veut monter, et payer 1.60E pour le faire, et au spectacle duquel une Bosnienne a, il y a quelques heures, dit à son petit ami : Prvo pa muško ! c’est-à-dire : Le premier lieu que tu me fais visiter et il s’avère que c’est un Bingo! Le voici, ce Bingo.  
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Cela doit être la vue la plus connue de cette ville. Les habitants de Graz doivent en avoir marre. Mais moi aussi ! Tout en ne voulant pas me montrer irrespectueux vis-à-vis de cette institution qui me prend pour un écrivain (vois-tu?), j’ai attendu impatiemment ce samedi, j’avais hâte à laisser derrière moi toutes ces façades somptueuses, tout ce luxe blink-blink pour les yeux touristiques (dont je ne me lassais pas à imaginer les coulisses) et de rejoindre la bienheureuse banlieue, les quartiers louches (chelous), les pavés défoncés, les mines crispées, tout ce qui n’était pas fait pour l’oeil de celui qui est en train de passer, mais pour le corps de celui qui y restera, pour un résident, oui, et c’est ce que je suis, jusqu’au début du mois de juillet au moins, un écrivain-résident, pas un écrivain-touriste! Donc, je mérité de m’y rendre !
Ainsi me suis-je pressé pour arriver à Puntigam ce samedi matin (avant neuf heures), ayant pris le tram numéro cinq à partir de Schlossbergplatz. Devant un Cineplexx (il ne s’agit pas de celui passant les films porno; nous sommes dans une époque où ce double X veut dire luxe), une centaine de vendeurs avait déjà déplié leurs ballots. 
Et, tout comme Luise G., organisatrice de cette résidence, m’a chaleureusement prévenu, il y avait des Serbes. Il y en avait beaucoup. De Yougoslaves, de Yougos en général. C’était comme sur mon marché aux puces natal (pourrais-je dire natal? je le pourrais!) de Zemun. Je passais les trajectoires à côté de Cineplexx dans tous les sens, je veux dire ces boulevards entre les marchandises, en écoutant la musique des accents pour la grande plupart bosniaques ou dalmates, avec quelques étirements slovènes. J’en ai tiré pour toi ce bref échange entre un vendeur et un acheteur, ayant pris les tenailles de son ballot : 
Jesi našo nešta? Ja ! Ta ti je odlična, zube da izvadiš!  
(T’as trouvé quelque chose ! / Ouais ! / Celles-là, elles sont excellentes même pour t’arracher les dents!)
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Encore un spectre de Marx dans la boîte dans l’édition de Fischer ! Mais revenons à nos moutons, à nos moutons musicaux je veux dire ! Lors de cette première randonnée à travers Puntigam, j’ai beaucoup vu et écouté, mais il n’y avait pas grand-chose à acheter. C’était simplement un samedi faible. J’en serais rentré les mains vides et tristes si un Yougo n’y avait pas surgi du sol avec deux boîtes pleines de disques. 
Y ayant déniché Harvest de Neil Young parmi de nombreux LPs allemands (surtout lisses! glanz!), je ne me suis pas adressé en serbe au patron. Ah non ! Dieu m’en garde hors de l'ex-Yu ! J’ai posé la question apprise par coeur quelques mois avant d’arriver ici : Was kosten die Platten? Quelle en fut la réponse ? Ein Euro. Sans discussion même ! C’était mieux qu’en Serbie. (Dans la photo qui suit, tu verras le disque confronté au celui de Pearl Jam des années 1990, Vitalogy, l’album que j’ai traité de ‘fils’ de Harvest) 
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Pour faire une comparaison, deux Plattenladen de Graz que j’avais déjà visitées avant Puntigam vendaient leurs disques usés pour minimum 10 euros. Ceux qui étaient proposés pour 3 ou 5 ne valaient strictement rien; parmi eux j’ai vu un McCartney. 
Mais c’est dans Dux Records au quartier Lend que j’ai trouvé un disque formidable : la première édition soviétique des singles précoces des Rolling Stones. Son titre? Игра с огнем/ Play with fire. 
Je l’ai montré à mon voisin de Géorgie, Zviad : il a failli pleurer à la vue de cette couverture. Cela a dû le rappeler sa jeunesse. Le disque avait paru en 1989. 
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 Je ne l’aurais, pour ma part, jamais pris si j’avais déjà “Play with fire” dans un de six ou sept LP que je possède de RS; Play with fire est pour moi de loin leur meilleure chanson. Chez un autre disquaire, avec un nom allusif, Inandout Records, j’ai déniché le troisième album de Stranglers, Black and white, où se trouve aussi ma chanson favorite de ce groupe, Nice’n’Sleazy. 
Dix euros seraient donc rien pour un résident de Graz, en matière de disques. Et les nouveautés, encore en emballage ? Cela ne dépasse pas 20 ou 25 euros. Je me suis souvenu encore une fois de ce disquaire de Belgrade, Yugovynil, qui vend toujours les nouveautés pour des prix dépassant 30 euros. Il est situé dans le centre d’un café-quartier récemment gentrifié de la rue Cetinjska, donc bien adapté aux poches de cette jeunesse posh qui peut bien se les acheter et se les mettre sur leurs... Insta. (Bien sûr, j’ai rencontré leur chef au marché aux puces à Zemun à maintes reprises, achetant ses disques pour 1 EUR maximum pour les revendre à des prix hors commun, sans taxe!)
Revenons à Graz (qui, comme nous avons dit, n’est pas tellement ailleurs!). Une semaine plus tard, le 22 juin, je suis entré dans le tram 5 de bonne heure. Une inscription dans le tram donnait à lire, en slovène : Danas velja vsaka vozovnica kot dnevna karta do 24 H. “Aujourd’hui, tout ticket de transport sera valable comme le ticket journal, jusqu’à 24 heures”. 
Pourquoi donc ? Ce jour-là, comme je le saurai plus tard, c’était le jour de Pride.
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 Cette fois, donc, Puntigam était plein à craquer. Un Slovène vendait des disques que tu me vois ici feuilleter. Ils coûtent combien? - ai-je demandé en allemand. Pourquoi je n’ai pas parlé slovène? J’ai toujours eu envie, mon cher Arnaud, de pouvoir me promener quelque part où tout le monde parle ma langue sans savoir que je peux les comprendre. Le Slovène était pourtant plus raffiné que le Yougo d’une semaine d’avant.  “Chaque disque a son prix!”  “Beatles 1967/1970?”  “20 euros”  “Come Together single?”  “10 euros” Ah, le voilà, il était aussi un Beatles fan.  “Talking Heads, Little creatures?”  “6″.  “Danke”. 
C’est que j’attendais trop, mon cher Arnaud. L’Autriche est quand-même le pays capitaliste le plus proche de nous, les Balkaniques. Dans les années 1980, que j’apprécie tout comme toi, je m’imaginais un bon nombre d’Autrichiens ayant parmi leurs disques les albums et singles des Television, Pixies, Sonic Youth, Dinosaur Jr., Gun Club, Siouxsie and the Banshees, et j’en passe, et même dans les années 1990, où cette maladie de CD avait déjà pris le dessus. 
Mais, hors la façade de ces DUX RECORDS, faite d'après la couverture de l’album Goo de Sonic Youth, hors quelques conneries habituelles de ces années trouvables même à Belgrade, il s’est avéré que nos marchés aux puces respectifs sont, de ce point de vue, absolument contemporains : leurs disques proviennent aussi pour la plupart des années 1960/1970, tout au plus jusqu’à 1980.
Donc, ce 22 juin, un jour après le solstice d’été, un jour après la promenade de Cléo de 5 à 7 dans le film d’Agnès Varda, je m’arrête devant quelques boîtes de disques. C’est une Yougoslave qui vent. Je lui demande dans mon bas-allemand: Was kosten die Platten? Elle me répond d’une façon compliquée, je n’arrive pas à saisir un mot, Arnaud, pourtant je fais oui de la tête avant de poser une question supplémentaire Für eine Stücke? (Pour une pièce?), sur quoi elle me fait: Drei euro. 
Je m’y mets et j’en déniche le soundtrack pour un des films les plus drôles de ma vie, My fair lady (oui, je sais que c’est peut-être hip maintenant, mais il s’agit d’un musical, et, tout comme pour Hair, je n’en aime que le tracklist!). Et ensuite je dis Danke et continue à marcher sans rien acheter. 
C’est alors que je rencontre Ada Kobusiewicz. (Si je ne t’en ai rien dit jusqu’à ce moment-là, c’est que j’ai voulu que tu la rencontrasses en lisant!) Ada est une artiste visuelle qui fait aussi des films et qui est auteure d’une exposition actuelle dans Schlossbergstollen (Tunnel pour les piétons); Illusion, basée sur les effets de lumière et de couleurs. Elle avait passé quelques années en Serbie et j’ai eu l’occasion de voir ses photos du marché aux puces de Novi Sad, appelé Nylon. Je te montrerai à Arles cette série de photos qui s’appelle Fleeting Installation (2014). 
Donc, je rencontre Ada qui me dit s’être procuré de quelques vêtements. Pour combien, je lui demande. Pour 10 centimes pièce! Va voir ! La pluie commence. Je cours immédiatement chez la Yougoslave, demande en bas-allemand si ce serait possible de prendre My fair lady pour 2 euros, et quant au Slovène; si je pourrais avoir Talking Heads pour 5. La pluie devient forte. Mon prix balkanique est immédiatement accepté. Revenu chez moi (de chez moi? je suis toujours chez moi !) je découvre que l’album de Talking Heads est une édition de Jugoton, le disquaire yougoslave le plus important, de Zagreb. 
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Alors, Ada me montre l’intérieur de ce fameux Cineplexx. Là il s’avère que c’est encore plus riche que je ne m’imaginais. Tout en jurant parce que je n’avais pas sur moi de sac supplémentaire, je me surprends à boire un café mit zunehmen, pour la première fois dans un marché aux puces. Pourquoi ? Bah, simplement, ils ont des bancs où s’asseoir, où l’on peut même supporter la pluie. 
Est-ce donc si facile de se faire servir? Oui, et marcher avec un café, mettre son verre en plastique chaque fois devant une boîte pleine de disques ou de livres bon marché et le retrouver intact. 
Et puis, se reposer sur un de ces bancs en attendant Ada et en regardant un Chinois content, s’étant muni d’un ventilateur. 
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Après cela, toujours guidé par Ada, je vais visiter une boulangerie spéciale qui revend le pain de la veille. Mais ce n’est pas un bäckerei comme les autres, Arnaud; ici, au centre ville, à Lend, à Mariahilferstrasse, il s’agit d’un concept-store, dont la vitrine te dira tout ! 
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Donc, au moment où je commençais la lettre que je te destine, j’étais à Sackstrasse, où, à 17h40 précisément, une camionnette jaune s’est arrêté au milieu de la rue. Il en est sorti un employé avec une corbeille orange. Il s’est approché d’une grande boîte jaune d’en face, a mis sa corbeille dessous, et ayant ouvert le fond de la boîte, il en a fait tomber une pile de lettres. 
Cette lettre t’arrivera beaucoup plus tôt que celles-ci, ramassées dans la corbeille du facteur, mais j’espère que tu ne m’en voudras pas ! C’est quand même d’une HEIMAT que je t’écris là!!! Hein ! Je t’écrirai bientôt, surtout si je déniche un chanteur ou un écrivain italien pour tes oreilles.  
P S Quant à l’alcool, le vin... le rouge, tu peux t’imaginer, c’est pas grand-chose. Des vins blancs? C’est mieux. A considérer leurs bières de près, on est plus optimiste qu’en France. Je suis décidément devenu fan de Gösser. J’en importerais sans doute clandestinement quelques-unes, cet été, à Arles.   
J’espère que je ne t’ai pas assommé avec cette lettre énorme ! Mais il y a des photos aussi ! Et que tu ne m’en voudras pas que ce soit une lettre ouverte ! En attendant ta réponse (épique comme d’habitude) ! 
Bojan  
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reseau-actu · 6 years
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L'étudiant a pris la défense d'un couple agressé à Lyon. Les coups violents qu'il a reçus lui ont laissé de lourdes séquelles. En avril dernier, il a rencontré le Pape.
Cet après-midi de 11 novembre 2016, veille de week-end, Marin veut s'acheter un manteau et parcourt le centre commercial de La Part-Dieu, à Lyon. Un jour férié qu'il passe avec sa petite amie, Clémentine, dont ils fêtent l'anniversaire le soir même. Marin vient d'avoir 20  ans. Après un bac mention très bien, il est étudiant en double licence droit et sciences politiques, Clémentine prépare un BTS. Ils n'ont pas trouvé ce qu'ils cherchaient dans les boutiques. La nuit commence à tomber. Ils marchent vers l'arrêt du bus C1.
Sur le parvis du centre commercial, Yacine *, 17 ans, ne sait que faire de ce 11 Novembre. Il a fugué de chez sa mère depuis des semaines, est en rupture de ban avec l'école, les éducateurs et toute forme d'autorité. Parfois, pourtant, l'armée l'attire. Peut-être une façon d'oublier «les hauts et les bas», comme il les appelle, de sa propre famille. Les «hauts», entre un père violent et une mère toxicomane, s'il y en a eu, personne n'en parle plus. Les «bas» remplissent les pages d'un dossier judiciaire qui porte déjà vingt et une condamnations, un séjour en prison en 2014 et des échecs à la pelle. Dans le jargon psychosocial, cela se transforme en «parcours chaotique», en «manque d'investissement» dans les obligations de soins pour toxicomanie, en «manque d'implication» dans les formations proposées. Ce vendredi après-midi, les heures s'étirent, tuées à coups de vodka et de joints. Yacine «zone» sur le parvis du centre commercial lyonnais. L'envie de cogner, n'importe qui, n'importe quand.
Un couple est assis à quelques mètres, à l'arrêt Part-Dieu - Vivier Merle, ligne du bus C1. L'homme et la femme, la cinquantaine, viennent de se retrouver. Lui est un gendarme à la retraite, elle vit dans une autre ville que Lyon. Ils s'embrassent.
«Y a des hôtels pour ça!, jette Yacine au couple.
- Va te faire enc…!, réplique l'ancien gendarme.
- Répète!»
«Vous devez vous préparer, dire au revoir à votre fils. Son cas est… désespéré»
L'embrouille, l'escalade… La femme qui accompagne l'ex-militaire tente de s'interposer. Marin voit la scène toute proche, s'avance vers Yacine avec l'idée de calmer le jeu, s'adresse au jeune de son âge: «C'est bon… Il a rien dit. J'ai rien entendu.» Des mots pour faire retomber la pression. Deux petits gabarits se font face. Marin, 1,65 m, «taillé dans une allumette», dit-on dans sa famille. Yacine, 1,70 m. Rien d'un poids lourd non plus. Des coups partent. Yacine est devenu enragé. Marin, lui, croit encore qu'un sourire et de la bonne volonté peuvent faire tourner le monde plus rond.
Voilà l'autobus. Enfin. Monter dedans, quitter ce parvis. Laisser là cet abruti. Clémentine pousse Marin à l'intérieur. Le couple qui s'embrassait monte aussi. Les quatre passagers s'assoient ensemble. Personne ne voit que Yacine, après avoir attrapé la béquille d'un autre jeune qui traîne avec lui, a grimpé dans le bus par la porte centrale. Il vise la tête de Marin. Trois coups, d'une extrême violence, par l'arrière. Yacine prend la fuite.
Le sang coule de l'oreille de Marin, qui convulse. Les passagers du bus ne comprennent pas encore bien la raison de ces cris, de cette agitation. En quelques secondes, tout a basculé. L'après n'est que douleur.
Audrey, la mère de Marin, a les yeux secs et la voix qui ne tremble pas lorsqu'elle raconte la vie de Marin depuis le 11 novembre 2016. Elle donne rendez-vous dans le bar d'un hôtel, quartier de La Part-Dieu. L'arrêt du bus C1 tout proche? «À chaque fois que j'y passe, je fais une petite prière», reconnaît cette femme énergique, sympathique, qui a décidé de s'accrocher à chaque progrès, au plus mince espoir. De remuer ciel et terre pour son fils. Chacun réagit comme il peut. Le père - le couple s'est séparé avant les 2  ans de Marin - préfère rester discret. Il habite un autre département, travaille dans le secteur automobile, entoure beaucoup son fils. «Un homme bon et doux», résume son avocat, Me Jean-Félix Luciani. «Des gens bien. Exceptionnels même. Ils ont toujours voulu l'apaisement», complète Me Anne Guillemaut, avocate de Yacine.
C'est d'une voix toujours décidée, sans pathos inutile, que la mère décrit son fils
Novembre 2016, hôpital de Bron. «Vous devez vous préparer, dire au revoir à votre fils. Son cas est… désespéré» : dans le service de neurochirurgie où Marin est hospitalisé, les larmes, la stupeur, le chagrin… Et les heures d'attente après l'opération destinée à stopper cette terrible compression du cerveau provoquée par l'hématome sous la boîte crânienne. Audrey se souvient de tout: «On nous avait expliqué: “  Sur l'échelle de Glasgow (indicateur de l'état de conscience), Marin est à 3.” Je m'étais dit: “3, c'est déjà ça.” Je ne savais pas que l'échelle commençait à 3 pour monter à 15…»
Mais, peu à peu, la parole revient. Des bribes puis une première phrase intelligible alors que le jeune homme a déjà passé plusieurs semaines en réanimation, dans le bruit, le va-et-vient des soignants: «C'est un hall de gare ici, sans déconner!» Audrey sourit: «Tout Marin est dans cette phrase…» Et quand, à l'approche de Noël, sa grand-mère s'enquiert d'un cadeau, la réponse de celui qui est depuis trop longtemps alité, fuse: «Un coccyx!»
C'est d'une voix toujours décidée, sans pathos inutile, que la mère décrit son fils. «Marin est un enfant brillant même s'il ne “ pousse ” pas trop. Il a confiance en lui, en la vie. Il a une belle plume. Une passion pour le foot aussi. Il a commencé très jeune, a toujours joué et continuait à la fac. Un sportif et un bon vivant à la fois, fêtard.» Des phrases au présent.
Lourdes séquelles
C'est aussi au présent que Marin remplit sa page Facebook, un an après le drame, le 11 novembre 2017. «J'ai, depuis un petit moment désormais, abandonné tout espoir de redevenir le Marin d'avant, celui qui pouvait jouer au foot, danser avec ses amis et son amoureuse en soirée.» Malgré les quatre opérations au cerveau, les séquelles motrices et neurologiques sont lourdes. Du mal à marcher. Le risque de chuter à tout moment. Un fauteuil roulant pour les longs trajets. Aux problèmes physiques s'ajoutent ce qui, sans doute, est le plus cruel et insupportable: «Un an que je suis mentalement submergé par mes TOC (troubles obsessionnels compulsifs, NDLR), que je compte tout, etc. Un an que je subis une sorte d'allergie qui provoque éternuements et démangeaisons à répétition. Un an que je souffre d'un problème de désinhibition (très) embêtant.»
Comment un garçon de 20 ans décide de s'interposer dans une querelle qui prend mauvaise tournure? D'aider son prochain? De tenter d'éviter que l'agression ne tourne vraiment vinaigre? En un mot, d'être «héroïque»? Réponse d'Audrey: «Marin est très courageux. Pourquoi? Je ne sais pas. Il déteste l'injustice. Nous avons ce qu'on appelle “des valeurs”. On est dans ce monde. On aide facilement autour de nous.»
Cour d'assises des mineurs du Rhône, mai 2018, deuxième journée du procès de Yacine pour «violence avec usage d'une arme suivie de mutilation ou infirmité permanente». Marin est invité par la présidente à s'exprimer à la barre. Aidé de ses notes, il répond puis se tourne vers le box. Là, il n'a rien préparé. Un dialogue se noue. Les assises retiennent leur souffle.
«Je regrette ce que je t'ai fait. J'ai détruit ta vie et celle de ta famille, commence Yacine.
- Je ne peux pas excuser ton geste, mais peut-être qu'un jour je pourrai te pardonner, répond Marin.
- Ce n'est pas pardonnable, je le sais. Je vivrai toute ma vie avec ce que j'ai fait.
- J'espère que tu vas te construire, que tu vas changer, que tu vas faire des études, pour ne plus être le même homme.»
Marin retourne à sa place. Il a oublié «plein de choses» qu'il voulait dire à son agresseur. Tant pis. L'essentiel a eu lieu. Il a affronté ce face-à-face. Le lendemain, Yacine est condamné à sept ans et demi de réclusion. Le jury a retenu l'excuse de minorité, le maximum de la peine encourue étant de quinze ans.
Yacine a rejoint sa prison, sa formation de CAP en électricité, ses rendez-vous avec les psychologues. Les premiers mois de sa détention n'étaient guère encourageants. Des outrages et violences, un téléphone portable découvert dans sa cellule…
Marin habite seul mais est aidé chaque jour, presque chaque instant, par sa maman, qui a dû arrêter de travailler. Un quotidien qu'on devine épuisant, où l'exploit consiste à aller au bout de la rue. Sans tomber.
Marin habite seul mais est aidé chaque jour, presque chaque instant, par sa maman, qui a dû arrêter de travailler. Un quotidien qu'on devine épuisant, où l'exploit consiste à aller au bout de la rue. Sans tomber. À ne pas oublier son portefeuille n'importe où, ce qui est déjà arrivé deux fois. Audrey, qui se décrit «volcanique» sous son calme apparent, a appris à ne pas s'énerver quand Marin, saisi par ses angoisses, se met à tout compter. Les points au Scrabble dix fois, comme les carreaux de la salle de bains. À ne pas exploser quand son fils, sans filtre social, se met à dire des grossièretés. À ne pas s'effondrer en pleurs quand il est triste. La peur d'être un fardeau pour les siens…
«Marin, dit Audrey, ne se trouve pas héroïque.» Parfois, il se met carrément en colère, répétant: «Mais comment peut-on s'acharner sur quelqu'un comme il l'a fait?» Ou se révolte: «Quelle injustice d'être tombé sur quelqu'un d'aussi con!»
C'est ce garçon plein d'humanité mais aussi une boule de nerfs qui est allée rencontrer le Pape en avril dernier. «Marin a été élevé dans la foi, mais il ne va pas à la messe tous les dimanches non plus!, s'amuse Audrey. C'est lui qui a eu l'idée de demander cette audience. Je pense qu'il pense qu'il y a un Dieu. Quand on a frôlé la mort…» Avec François, le jeune homme a parlé du handicap, de sa vie ralentie, de son avenir en pointillé. Et du pardon. Il n'a pas été question d'héroïsme. Ou plutôt si. Le Pape a simplement dit à Marin: «Tu es courageux.»
* Le prénom a été modifié.
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omagazineparis · 8 months
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Peng Shuai sort de son silence, son interview chez L'Équipe
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Lors de cet entretien exclusif, la joueuse de tennis revient sur les accusations de viol qu'elle avait proféré en novembre dernier. Elle parle d'un "énorme malentendu". La joueuse de tennis chinoise Peng Shuai, dont la disparition avait fait le tour des médias internationaux, est enfin sorti de son silence. Elle a ainsi accordé une première interview dans un média international, le journal sportif "L'Equipe". L'entretien a été réalisé alors que les journalistes du journal sont actuellement en Chine pour couvrir les Jeux Olympiques de Pékin. L'interview était une suite de question-réponse, dont certaines ont été porté à sa connaissance au préalable. Elle était accompagnée par deux personnes, l'une est membre du Comité olympique chinois et l'autre dont les journalistes ignoraient son rôles, parlait français. En échange, Peng Shuai n'a aucun droit de relecture sur la publication. Le directeur de la rédaction Jérôme Cazadieu a raconté les conditions de l'interview aux confrères de France Info. "Elle n'est pas libre ni de sa parole ni de ses mouvements" a-t-il déclaré à la radio le 7 février. https://twitter.com/franceinfo/status/1490587688021508096?s=20&t=QkESEvKEay5CWKL0il03Lw Pas de disparition, pas de viol et retraite sportif La joueuse a donc répondu à toutes les questions des journalistes français. Tout d'abord, elle réfute la thèse de la disparition. "Je n'ai jamais disparu. Simplement, beaucoup de gens, comme mes amis y compris du CIO (Comité internationale Olympique, ndlr) m'ont envoyé des messages, et il était tout à fait impossible de répondre à tant de messages", a-t-elle répondu au journal. Avant d'ajouter : "C'est pourquoi je ne sais pas pourquoi l'information selon laquelle j'avais disparu s'est répandue". La joueuse de tennis était réapparu après une quinzaine de jours sans nouvelles, sur plusieurs vidéos. Elle s'était également entretenu avec le président de la CIO le 21 novembre dernieR. Elle nie également en bloc avoir accusé un haut dignitaire chinois d'agression sexuelle même quand les journalistes de l'Equipe insistent. ""Agression sexuelle ? Je n'ai jamais dit que quiconque m'avait fait subir une quelconque agression sexuelle" a-t-elle déclaré à l'Equipe. Peng Shuai a aussi annoncé prendre sa retraite sportif. en effet, la joueuse de tennis met fin à sa carrière. « Le tennis a transformé ma vie, m’a apporté de la joie, des défis et tant de choses encore. Même si je ne participe plus à des compétitions professionnelles, je serai pour toujours une joueuse de tennis. » a-t-elle déclaré. Pour le directeur de "L'Equipe", il faut voir au-delà de ses réponses et "dans l'interstice la réalité". La jeune femme n'étant sûrement pas maitresse entière de ses actions, ses réponses sont probablement orientées par le pouvoir chinois. À lire également : La culture du viol : une crise sociétale Une accusation de viol qui a fait le tour du monde Début novembre, Peng Shuai avait accusé l'ancien vice-Premier ministre chinois de viol. Dans une publication postée en ligne, la joueuse de tennis affirmait avoir été contrainte à une relation sexuelle par Zhang Gaoli. Sa disparition depuis cette prise de parole inquiète. Mais qui est Peng Shuai ? Pourquoi dérange-t-elle tant Pékin ? En 2013, Peng devient championne en double à Wimbledon en 2013, puis à Roland Garros l'année suivante. Classée 191e joueuse mondiale en double, Peng Shuai est une star dans son pays. Début novembre, la joueuse publie une lettre accusant un ancien haut dirigeant du parti communiste, Zhang Gaoli, de viol. Depuis la publication de cette lettre par Peng Shuai, la jeune athlète reste introuvable. En effet, la lettre a été publiée sur le compte officiel Weibo, équivalent chinois de Twitter, de la joueuse de tennis. Dans cette lettre, elle explique que les faits se seraient déroulés entre 2013 et 2018. La tenniswoman ajoute également avoir été plusieurs années la maîtresse de l'ex-dirigeant chinois, une relation abusive selon elle, à laquelle elle aurait mis un terme aujourd'hui. Son message et son compte ont ensuite été supprimés. Depuis cette prise de parole, la jeune femme est introuvable. Inquiets, plusieurs stars de tennis lui ont apporté leur soutien sur les réseaux sociaux. Dans un tweet publié hier, Serena Williams se dit “dévastée et choquée” de la disparition de l'athlète chinoise. Elle demande aussi l'ouverture d'une enquête. https://twitter.com/serenawilliams/status/1461408866697105413?s=20 Peng Shuai : un nouvel e-mail sème encore plus le doute sur sa disparition ! Après avoir gardé le silence pendant près de deux semaines, la Chine brise enfin le silence sur la disparition de la tenniswoman. En effet, le média d'État chinois CGTN a publié mercredi un e-mail sur Twitter. Il s'agit d'un e-mail envoyé par l'athlète chinoise à Steve Simon, le directeur de WTA. Cette association gère le circuit professionnel féminin de tennis. Mercredi dernier, le média a publié l'intégralité du contenu de l'e-mail sans expliquer comment il a pu obtenir ces informations. Dans cette capture d'écran, Peng aurait affirmé : «Je n'ai pas disparu, et je ne suis pas en danger. Je suis juste en train de me reposer à la maison et tout va bien ».Peng Shuai https://twitter.com/CGTNOfficial/status/1461025491842916358?s=20 Dans ce mail, la championne de tennis dément aussi toute accusation de viol envers l'ancien haut-responsable chinois. Cependant, cette nouvelle information sème encore plus le doute sur la disparition de la jeune sportive ! En effet, Steve Simon ainsi que l'ONU demandent à Pékin une preuve vérifiable assurant que Peng est hors de danger. Aussi, certains ont remarqué un curseur de souris dans la deuxième ligne de l'e-mail. Ce qui suggèrerait alors que ce message n'aurait pas été réellement envoyé. Mais ce n'est pas tout ! Des observateurs ont souligné que la phrase : «J'espère que le tennis chinois continuera de progresser» à la fin de l'e-mail posait problème. En effet, cela serait une preuve de l'intervention de l'État chinois dans la rédaction du message. Selon ces mêmes observateurs, le langage formel et robotique ressemble à celui utilisé par la propagande d'État, un style très différent des propres messages de Peng sur Weibo. Read the full article
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memexx · 5 years
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Au moment de l'abolition de la peine de mort en Californie, en juin 1972, j'ai envoyé de Majorque, où je vis la plupart du temps, un papier au Monde. Je disais dans l'article que cette abolition ne constituait pas à mes yeux un progrès moral mais tirait simplement les conclusions d'une banqueroute morale. Je m'explique. La peine de mort, «châtiment suprême», «peine capitale», était sensée jouer un rôle exceptionnel pour désigner un acte exceptionnel dans l'horreur : l'assassinat. C'était une «désignation de valeur», et cela voulait dire que la vie humaine est sacrée et que lorsqu'on prend une vie humaine, on prend toujours la sienne. Or, en Californie et ailleurs en Amérique, et partout dans le monde, la tuerie, l'assassinat, sous couvert idéologique ou «syndrome de protestation», terrorisme, bombes, otages, exécutions sommaires, sont devenues monnaie courante et tuer quelqu'un, pour une raison ou pour une autre, est un simple «moins un » démographique. Que ce soit au Chili, en Irlande ou en Palestine, il y a reconnaissance d'un véritable «droit de tuer». […]. L'assassinat est entré dans les mœurs. […]. J'avais donc conclu mon papier en disant que si la peine de mort n'a plus aucun sens, c'est parce que la vie humaine n'en a plus, l'assassinat étant accepté de plus en plus comme «mode d'expression» courant. […]. Voilà ce que j'ai écrit. J'envoie mon article au Monde et j'attends. Rien. Ils ne le publient pas. Quelques mois se passent. Je rentre à Paris, le lendemain de l'exécution de deux égorgeurs. Pompidou avait refusé leur grâce. J'achète Le Monde à Orly. Je vois à la première page : «Débat sur la peine de mort. Deux points de vue : professeur Untel et Romain Gary. p.4. Je regarde p.4. Sur une première colonne, l'exposé du professeur en question, contre la peine de mort. Et en apposition : Romain Gary. Cette «mise en page» me faisait immédiatement apparaître comme un partisan inconditionnel de la peine de mort justifiant le refus de grâce de deux assassins guillotinés. Mais dans mon papier, tu trouves le point de vue général suivant : la vie humaine s'est dévalorisée, elle a perdu son caractère sacrée, être pour ou contre la peine de mort dans une civilisation de sang ne veut plus rien dire, du point de vue de la désignation de la valeur-vie. En abolissant la peine de mort, on reconnaît simplement le fait que depuis Staline, Auschwitz et les terrorismes sous toutes ses formes, il existe le droit de tuer. Seulement, par sa mise en page et par le choix du moment de la publication, Le Monde a fait de moi le porte-parole de la peine capitale…». «Deux femmes dans ma vie ont été tuées par la drogue… […]. Elle s'appelait…mettons, Sophie… Très belle, elle trouvait le moyen d'être jolie en même temps, la beauté seule est souvent assez chiante. […]. C'était à Nice, en 1935. […]. Sophie est partie à Paris. Je suis resté seul avec les mimosas et ils n'étaient plus les mêmes, sans elle. À Paris, la môme tombe sur une ordure qui lui apprend à se piquer. Elle passe de la morphine à l'héroïne. Plus de lettres, plus de nouvelles, j'apprends ça par hasard, par des amis russes. Je vais à Paris et je me mets à la chercher mais quand tu arrives pour la première fois de Nice à Paris, tu es complètement paumé, et j'ai même du vendre mon pétard à un copain d'Edmond, pour bouffer. En trois ans, Sophie est descendue sur le trottoir pour se procurer de la drogue et puis elle est morte d'un excès de paradis. Le truc habituel que l'on voit depuis partout, mais à vingt ans, et à une tout autre époque, ça m'a fait de l'effet… J'ai chialé. […]. Le type en question a été tué dans un règlement de comptes à Pigalle, mais ça ne m'a même pas fait plaisir. Lynn. Lynn Baggitt. L'ex-femme du producteur Sam Spiegel. Je l'ai connue à New York, en 1953...[...]. Elle se faisait sauter à l'héroïne. On la foutait à la porte d'hôtel en hôtel, parce que les seringues traînaient partout. Je la trouvais dans le lit en train de s'envoyer en l'air avec l'aiguille. Je ne suis jamais arrivé à savoir par qui elle se procurait la merde. J'ai été sublime de connerie, je lui ai dit : «C'est moi ou la merde.» Elle n'a pas hésité une seconde, elle a choisi la merde. Je ne l'ai plus jamais revue... Hollywood 1958-1959. J'ouvre le journal. Lynn a été trouvée morte, coincée par son lit contre le mur, étouffée : un de ces lits américains qui se cabrent et qui rentrent dans le mur. Elle était dans le coma «extatique» lorsque c'est arrivé. Ça du être atroce, des heures d'agonie...[...]. Donc je réclame la peine de mort pour les trafiquants.[...]. Mais les marchands de drogue ne sont pas des «génétiques». Leurs chromosomes sont en règle. Ce sont des pères tranquilles, qui font du fric. Ils ont eux, une peur bleue de mourir, parce qu'ils ont peur de perdre leur fric... Voilà, encore une fois, pour ma cruauté...». «Et l'autre jour, à Berlin... J'étais là pour la projection d'un de mes films. Je suis assis à la terrasse d'un café, en face d'un kiosque à journaux... Épinglé au kiosque, en face de moi, il y a un journal en yiddish... Un type s'approche, genre retraité d'Auschwitz, une tête du genre affiche publicitaire «Visitez Auschwitz»... Le bonhomme lit la page extérieure, debout devant le kiosque. Quand il a fini, il se tourne vers le propriétaire du kiosque, le regarde, et l'homme ne dit rien, sort, tourne la page du journal, l'épingle de la même façon, soigneusement, et mon bonhomme continue la lecture... Je suis intrigué, je pose des questions et j'apprends que ce fantôme, ce revenant, vient lire ainsi son journal en yiddish depuis vingt ans sans jamais l'acheter, et que le propriétaire allemand du kiosque tourne ainsi la page pour son revenant juif, tous les jours... Le Juif ne l'achète pas mais exige de le lire et l'Allemand ne le donne pas pour rien, mais le laisse lire, il y a accord tacite entre le Juif et l'Allemand sur les dommages-intérêts, et leur limite exacte, un impôt par accord tacite sur Auschwitz... Et hier, chez un chirurgien d'esthétique... Une mère vient le trouver avec sa fille âgée de quatorze ans. L'enfant a un blair énorme, à opérer d'urgence, copie exacte de celui de sa mère... La maman dit au chirurgien : «Comme vous le voyez, ma fille a besoin d'une opération... Est-ce-que vous croyez que vous pouvez arranger ça? » Le médecin est un vieux routier, il est prudent, il en a vu d'autres, alors il demande : «Arranger quoi, Madame? » Et la bonne femme répond : «Mais les oreilles de ma fille, docteur; quoi d'autre? Vous ne voyez pas qu'elles sont difformes?» Car la fillette avait les oreilles un peu décollées de son père, mais le nez était le même que celui de sa mère et celle-ci ne se rendait pas compte ou ne voulait pas admettre que ce nez était hideux... C'est fabuleux, la nature humaine, c'est toujours sans précédent, des sources toujours nouvelles, ça jaillit sous tes pieds, une fraîcheur toujours recommencée...».
Romain Gary - La nuit sera calme
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revuedepresse30 · 5 years
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“Le dimanche soir” d'Emma : une BD anticapitaliste et féministe pour repenser le travail
Dans Le dimanche soir, histoire extraite de son nouvel ouvrage Des princes pas si charmants et autres illusions à dissiper ensemble (éd. Massot, quatrième tome de sa série Un autre regard), la dessinatrice Emma s'emploie à décrire la violence exercée par le monde du travail sur les salariés.
L'autrice de 36 ans, qui a fait connaître le concept de "charge mentale" avec sa BD Fallait demander, dépeint un climat anxiogène, au sein duquel le salarié n’en fait jamais assez, et ce, jamais assez bien. Une pression qui peut avoir de graves conséquences sur la psychologie des personnes qui la subissent. On se souvient par exemple des 60 suicides d'employés de France Télécom, qu'Emma évoque d'ailleurs le temps de quelques planches, de même que la situation dramatique à la Poste ou encore à la SNCF. Des entreprises dont les techniques managériales ont mené une partie de leur personnel à la rupture, et dont l'ex-ingénieure se sert pour illustrer le profond malaise qui s'est enraciné dans l'ensemble du monde professionnel.
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Cette souffrance au travail, la dessinatrice y a d'ailleurs elle-même été confrontée. “Si j’ai fait cette BD, c’est pour montrer aux gens qu’ils ne sont pas seuls, parce que moi j’avais vraiment l’impression de l'être quand j’ai vécu ça”, confie-t-elle aux Inrocks. Dans Le dimanche soir, Emma revient ainsi sur ses douloureuses expériences professionnelles passées, de ses premiers boulots difficiles - serveuse, aide ménagère...- jusqu'à l'obtention de son diplôme d'ingénieure. “Avec ma mallette et mon tailleur neuf, j’étais convaincue d’avoir enfin trouvé ma place dans la société”, écrit-elle.
Mais, très vite, Emma déchante. De nouveau confrontée à un chef toxique après une restructuration de sa boîte, elle fait des heures à n’en plus finir, voit son travail sans cesse critiqué, et finit par perdre totalement confiance en elle et en ses capacités. Pressions, instructions floues qui font peser sur l’individu la responsabilité d’un échec, remarques sexistes sur le physique de la part de supérieurs… Tout cela, la dessinatrice l'a subi. “Là, je me suis rendu compte que quels que soient les efforts que je pouvais fournir, cela n’allait jamais, j’avais l’impression d’être en permanence mise en défaut, d’être incompétente, et j’ai fini par tomber en dépression”, nous raconte-t-elle. “Mais j’ai aussi compris que tant que nous ne serions pas propriétaires des moyens de production, nous serions tous susceptibles d’être confrontés à cette violence.”
“Le travail pourrait être tellement autre chose que ce qu’on en fait aujourd’hui”
Pour la militante féministe, qui a entamé sa réflexion anticapitaliste à partir des violences qu'elle a elles-mêmes subies dans le monde professionnel - elle finira par quitter son job d'ingénieure pour se consacrer pleinement au dessin et à l'écriture, armes dont elle se sert pour tenter d'éveiller les consciences -, le problème du mal-être au travail est inhérent au fonctionnement de notre société, et ne pourra en effet se résoudre qu’au travers d’une lutte collective. “En publiant ces planches, je veux dire que ce n’est pas de notre faute, et qu’on ne trouvera pas de solution en cherchant individuellement à s’adapter à ce monde-là. C’est ce monde qui est toxique, ce n’est pas nous qui ne savons pas gérer ça”, nous dit-elle, en écho à un message relayé dans Le dimanche soir : “Face à ces machines à broyer l’humain, on se sent impuissant.es mais on a tort ! Sans nous, pas de travail, pas de bénéfices pour les capitalistes ! Alors il est peut-être temps de relever la tête en usant du plus puissant de nos droits : la grève !”
Alors même qu'à l'appel de plusieurs syndicats, une grève interprofessionnelle se prépare en France le 5 décembre - et ce, contre la réforme des retraites menée par Emmanuel Macron, qui prévoit notamment la suppression des régimes spéciaux mais aussi l'instauration d'un système de retraite par points -, Emma nous raconte vouloir “transmettre l’idée qu’il ne faut pas se retourner contre les grévistes, mais, au contraire, participer partout où on le peut. Parce que le travail, libéré du capitalisme, pourrait être tellement autre chose que ce que l'on en fait aujourd’hui”.
>> A lire aussi : L'année 2017 vue par Emma, l'auteure de la BD sur la charge mentale des femmes
En effet, pour nombre d’actifs de nos jours, travailler se résume à percevoir un salaire à la fin du mois, sans constituer une source d’épanouissement personnel. “La majeure partie du temps, nous n’avons aucune idée de ce que l’on produit ni de son utilité pour la société”, souligne la dessinatrice. Or, dans une société organisée différemment, d’autres approches pourraient être envisagées. Emma évoque d’ailleurs quelques pistes dans son ouvrage, en prenant notamment pour exemple les communautés primitives, qui travaillaient sans contrainte de rentabilité ou d’horaires. “Il ne s’agit évidemment pas de dire que l’on va y retourner, mais de comprendre comment les rythmes de travail, le Taylorisme et le présentéisme sont construits, liés à une structure de la société et pas du tout à la nature humaine.”
A noter que dans Des princes pas si charmants, la dessinatrice (ré)aborde également le concept de "charge mentale", qui empoisonne la vie des femmes, ou encore celui de "sexisme bienveillant". Une façon de montrer, en évoquant ces sujets aux côtés de la problématique mise en avant dans Le dimanche soir, comment patriarcat et capitalisme vont de pair. Des mécanismes complexes et imbriqués qu'Emma nous résume en une phrase : “Tant que nous serons dans cette société capitaliste et que nous ne supprimerons pas la hiérarchisation des classes sociales, nous serons en lutte permanente pour éviter des reculs, tant pour les femmes que pour les salariés.”
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Des princes pas si charmants et autres illusions à dissiper enselmble, d'Emma, éd. Massot, 112p., 16 €
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beatlesonline-blog · 2 years
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reseau-actu · 5 years
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François de Rugy et sa femme ont multiplié, entre 2017 et 2018, aux frais de la République, des agapes entre amis dignes de grands dîners d’État, selon notre enquête. Le ministre parle de « dîners informels liés à l’exercice de ses fonctions avec des personnalités issues de la société civile ».
L’ancien président de l’Assemblée nationale et actuel ministre d’État, François de Rugy, et sa femme ont multiplié, entre 2017 et 2018, aux frais de la République, de somptueuses agapes entre amis dignes de grands dîners d’État, selon des documents, photos et témoignages obtenus par Mediapart.
Cette débauche de dîners de grand standing, essentiellement organisés par Séverine de Rugy, journaliste people à Gala, a pris de telles proportions qu’elle a suscité l’indignation de certains fonctionnaires de l’Assemblée nationale.
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François et Séverine de Rugy, le 21 février 2019. © Reuters
Le personnel a en effet été mis à contribution à de très nombreuses reprises, parfois jusqu’à tard dans la nuit, pour ces soirées qui avaient lieu dans les salons de l’hôtel de Lassay, la résidence du président de l’Assemblée nationale, sans qu’il y ait de lien évident avec les fonctions d’alors de François de Rugy.
Cette pratique apparaît en franche contradiction avec le combat mené depuis des années par François de Rugy pour la transparence et une meilleure gestion des deniers publics au Parlement.
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Député depuis 2007, François de Rugy fut le premier président de l’Assemblée nationale sous le quinquennat d’Emmanuel Macron, de juin 2017 à septembre 2018. Il a par la suite été nommé ministre d’État, numéro 2 du gouvernement dans l’ordre protocolaire, chargé de la transition écologique et solidaire après la démission du gouvernement de Nicolas Hulot.
En septembre 2017, l’ancien élu écolo, qui a rejoint le groupe La République en marche (LREM), se plaignait d’ailleurs au micro de l’émission Quotidien d’un certain laisser-aller à l’Assemblée : « Je veux qu'il y ait une comptabilité analytique, transparente, et qu’on sache bien, à l'Assemblée nationale, qu'est-ce qui coûte quoi. Aussi bizarre que ça puisse paraître, aujourd'hui ce n’est pas le cas. »
Dans le cas des dîners privés des époux de Rugy – Mediapart a pu en identifier une dizaine entre octobre 2017 et juin 2018 –, la mécanique mondaine était toujours la même. Cela commençait par un carton d’invitation imprimé sur du papier luxueux, avec, en page de garde, la photo imprimée de l’hôtel de Lassay suivie de l’histoire du lieu à base d’anecdotes sur la duchesse de Bourbon. Le tout noué par une jolie cordelette rouge.
Pour les heureux invités, essentiellement des amis de Séverine de Rugy et de son mari, la suite n’était que luxe et volupté sous les ors – et avec les moyens – de la République : verres en cristal, porcelaines, petites cuillères en or, chandeliers, vaisselles d’apparat, bouquets de fleurs composés pour l’occasion selon la couleur choisie par madame.
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Séverine de Rugy devant un mouton-rothschild 2004 siglé du centenaire de l'Entente cordiale entre l'Angleterre et la France. © DR/Mediapart
Mais les participants, entre dix et trente par dîner, se souviennent surtout des champagnes et des vins offerts par les hôtes. Toujours des grands crus directement issus des caves de l’Assemblée, réputée pour être l’une des mieux garnies de France.
Les photos de ces soirées fastueuses le confirment : on y a bu entre amis du mouton-rothschild 2004 du centenaire de l’Entente cordiale entre l’Angleterre et la France (au moins 500 euros la bouteille, en photo ci-contre), du Château Cheval Blanc 2001 (550 euros), du Château d’Yquem 1999 (265 euros la bouteille), du Château Pichon-Longueville (100 euros), de la Clarté de Haut-Brion 2014 (100 euros), du Château Brane-Cantenac 2000 (120 euros), du pavillon-rouge du château Margaux 2003 (200 euros)…
Selon un bon connaisseur de l’Assemblée, aucun grand cru ne peut sortir des caves sans une autorisation particulière.
La nourriture ne laissait pas non plus à désirer, comme en témoigne un cliché des homards géants finement préparés en cuisine offerts aux convives, dont des membres de sa famille, en décembre 2017 (voir ci-dessous). « Ce n’était pas vraiment le genre à la bonne franquette, ça, c’est sûr », se souvient, amusé, un participant.
François de Rugy, qui aime à citer de Gaulle, ne s’inscrit pas vraiment dans les pas du fondateur de la Ve République, connu pour payer de sa poche les goûters de ses petits-enfants.
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À la table des époux De Rugy. © DR/Mediapart
Selon les listes d’invités consultées par Mediapart, les convives appartenaient tous au cercle relationnel et surtout amical de Séverine de Rugy, qui déclarait il y a peu à Femme actuelle : « Être femme de ministre, c'est être au service de la France. Cela donne des devoirs d’exemplarité. »
On retrouvait ainsi, pêle-mêle, à la table du président de l’Assemblée nationale et de son épouse des copains et copines de la communication et du journalisme, des réalisateurs, des producteurs, de gens la finance, des actrices ou des écrivains de seconde zone…
Contacté par Mediapart, le cabinet de François de Rugy a répondu par écrit le mardi 9 juillet (voir sous l’onglet Prolonger l’intégralité des réponses apportées).
De Rugy préfère parler de « dîners informels liés à l’exercice de ses fonctions avec des personnalités issues de la société civile », tout en insistant sur une baisse de 13 % des frais de réception à l’hôtel de Lassay.
« [Ces dîners] rassemblaient le plus souvent une dizaine (deux fois une vingtaine, plusieurs fois moins de dix) de personnalités, issues du monde économique, médiatique, culturel, scientifique, universitaire. Ils visaient à répondre à l’exigence de représentation liée à sa fonction auprès de la société civile, ainsi qu’à nourrir son action de président de l’Assemblée nationale, dont le rôle est par essence d’intervenir et de travailler sur une très grande variété de sujets liés à l’action publique », observe-t-on dans l’entourage du ministre d’État.
Interrogée lundi 8 juillet, Séverine de Rugy a pourtant confirmé qu’elle opérait elle-même un « filtre relationnel » et que les invités appartenaient pour l’immense majorité à son cercle « amical ». « Pour moi, ce n’est pas privé parce qu’en fait, c’est du relationnel qui permet de se mettre au courant et de s’intéresser à ce que font les gens », explique-t-elle. Avant de poursuivre : « Certes, ça appartient à un cercle amical mais on n’est pas là pour se taper la cloche. Effectivement, je connais des gens mais quand on les voit, on parle toujours de politique et y a des choses qui en sortent en relationnel. »
« Son épouse connaissait certaines des personnes conviées à ces dîners, d’autres pas, tout comme François de Rugy », tempère-t-on dans l'entourage du ministre de l'écologie.
Selon Mme de Rugy, ces dîners avaient surtout une fonction essentielle pour son mari : l’aider à rester connecté à la vraie vie. « Quand vous êtes un homme politique, vous ne pouvez pas vous couper de la société », dit-elle. En dégustant des grands crus à plusieurs centaines d'euros la bouteille ?
« Avec François, on boit très peu, répond Séverine de Rugy. Il y a une cave à l’Assemblée qui est très conséquente. On nous met à disposition des bouteilles, j’imagine que M. Ferrand [actuel président de l’Assemblée – ndlr], c’est la même chose. Je n’ai jamais demandé quoi que ce soit et je n’ai jamais vérifié ce qu’on mettait comme vin. Ce n’est pas mon truc. »
Contacté, le cabinet de Richard Ferrand dément des pratiques analogues et explique que ses dîners à l’hôtel de Lassay n’excèdent guère un ou deux convives, souvent des parlementaires ou des membres du gouvernement.
« Quel que soit le déjeuner ou le dîner, les menus, y compris le vin servi, étaient choisis par le service restauration de l’Assemblée nationale. François de Rugy n’a jamais passé aucune commande spécifique et n’a jamais rien fait acheter en externe », explique pour sa part le cabinet de François de Rugy.
Plusieurs participants aux soirées des époux de Rugy ont remis en cause auprès de Mediapart le caractère professionnel des dîners. C’est le cas par exemple de l’éditorialiste Jean-Michel Aphatie, dont la femme est une amie de Séverine de Rugy. « J’ai participé à un dîner une fois, à l’automne 2017, indique le journaliste d’Europe 1 et France 5. C’est une invitation qui m’est parvenue par ma femme. J’ai hésité à y aller parce que si le déjeuner est un espace de travail, le dîner est un espace ambigu. Là, j’ai dit oui… J’ai vite compris que cela n’avait pas beaucoup de sens d’être là pour moi. Ce n’est pas un dîner de travail. Et si c’était à refaire, non, je ne le referais pas. »
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François de Rugy, pour la Saint-Valentin 2018. © DR/Mediapart
D’après les éléments recueillis par Mediapart, le personnel et les moyens de l’Assemblée nationale ont également été mobilisés pour des événements intimes du couple. Exemple : la Saint-Valentin 2018 (voir photo ci-contre), avec compositions florales et desserts en chocolat en forme de cœur, sans oublier un jeté de pétales de roses rouges sur nappe blanche.
« Pour le jour de la Saint-Valentin, le service de restauration de l’hôtel de Lassay a eu la délicate attention, sans qu’aucune demande préalable leur soit faite, de décorer la table de François de Rugy et son épouse », explique-t-on dans l’entourage de l'ex-président de l'Assemblée.
François de Rugy avait déjà été épinglé par la presse pour avoir organisé, le 17 décembre 2017, le déjeuner de son mariage à l’hôtel de Lassay, ce qui avait beaucoup fait jaser en interne à l’Assemblée. Mais il était parvenu à éteindre la polémique en affirmant qu’il avait payé les frais engagés.
En novembre 2018, lors d’une discussion organisée par Le Parisien avec des « gilets jaunes », François de Rugy avait déclaré : « Il faut que nous, les politiques, y compris au plus haut niveau, on s'interroge sur nos façons de faire et d’être. »
***
Les explications en vidéo de l’auteur de l’enquête, Fabrice Arfi
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© Mediapart
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